Intervention de Lisa Belluco

Séance en hémicycle du mercredi 25 janvier 2023 à 15h00
Limitation de l'engrillagement des espaces naturels et protection de la propriété privée — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLisa Belluco :

Mais la proposition de loi répond aussi à une demande des autres chasseurs, ceux qui n'ont pas les moyens de se payer un carnage sur animaux enfermés, ceux qui sont, dans certaines régions, privés de chasse à cause de l'engrillagement à outrance de toutes les forêts. Même si le texte n'évoque pas directement la chasse, elle est en fait présente dans chacun de ses articles.

Je reviendrai sur un article particulièrement injuste et auquel je m'étais opposée lors de son examen en première lecture. L'article 2 instaure la possibilité de sanctionner d'une contravention de quatrième classe toute personne qui s'introduirait dans une propriété privée rurale ou forestière, sauf dans les cas où la loi le permet. Au premier abord, cette mesure semble être frappée au coin du bon sens : si vous n'approfondissez pas le sujet, vous serez certainement convaincus que l'obligation de déclôturer certains terrains doit obligatoirement s'accompagner d'une protection renforcée de la propriété privée. Il s'avère pourtant que cette disposition pose deux problèmes majeurs.

Premièrement, elle risque en fait de limiter très fortement l'accès de toutes et tous à la nature. En effet, 75 % des forêts françaises sont privées. La disposition introduite par ce texte permettrait donc, par l'installation d'une simple limite physique sans que cette notion soit définie dans le texte, d'interdire à quiconque de s'y promener. Je réitère donc ici l'appel que j'avais formulé en commission d'engager des états généraux des usages de la nature pour discuter de l'accès et du partage de la nature entre toutes et tous.

Deuxièmement, ce que nous n'avions pas identifié lors de la première lecture, c'est que cette disposition instaure une inégalité face à la loi entre chasseurs et non-chasseurs. En effet, les chasseurs ont le droit de pénétrer dans quasiment toutes les propriétés sans jamais être inquiétés, à partir du moment où ils poursuivent un animal mortellement blessé. Avec le texte que nous allons vraisemblablement voter aujourd'hui, nous entérinons le fait qu'un naturaliste qui pénétrerait intentionnellement dans une propriété privée rurale ou forestière, dans le but par exemple de compter les individus d'une espèce qu'il étudie, aurait toutes les chances de se voir verbaliser d'une amende d'un montant pouvant atteindre 750 euros, alors même qu'il n'aurait commis aucun dégât. À l'inverse, un chasseur qui s'introduirait dans une propriété privée rurale ou forestière, en coupant au passage les fils de la clôture électrique – expérience de cavalière – pour traquer un animal agonisant et sans défense autre que la fuite, ne se verra jamais inquiété par la moindre amende.

Cette situation conduit mon groupe à revoir sa position de vote : ce texte entérinant tout de même quelques avancées en faveur de la biodiversité et de la faune sauvage, le groupe Écologiste – NUPES s'abstiendra.

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