Intervention de Claudia Rouaux

Séance en hémicycle du lundi 6 mars 2023 à 16h00
Garantir le respect du droit à l'image des enfants — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaudia Rouaux :

« La société est en train de préparer les invalides de demain. Certains souffriront d'ostéoporose à 35 ans. » Lorsque je l'ai auditionnée en septembre dernier, en ma qualité de rapporteure pour avis du budget de la mission "Sport, jeunesse et vie associative, " le docteur Sophie Cha, médecin conseiller à la délégation régionale académique à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (Drajes) de Bretagne, m'a ainsi alertée. Elle dénonçait la sédentarisation croissante de notre société, ses effets désastreux sur les enfants et les adolescents et, par conséquent, sur les adultes qu'ils deviendront et qui seront atteints d'obésité, de troubles du comportement et du langage, de manque de sommeil, d'hypertension artérielle. C'est par l'activité physique que les enfants gagnent leur capital physique, osseux et cognitif. Les comportements sédentaires, liés à la télévision, au téléphone portable et, surtout, aux écrans numériques, préfigurent les maladies chroniques de demain.

Ainsi la Fédération française de cardiologie a-t-elle estimé que les jeunes de 9 à 19 ans ont perdu 25 % de leur capacité cardiovasculaire en quarante ans. Dans ce contexte inquiétant, nous ne pouvons que soutenir la rapporteure, qui veut protéger les enfants de l'exposition aux écrans. La formation des professionnels de santé, du secteur médico-social et de la petite enfance à des modules spécifiques consacrés aux risques liés aux écrans numériques pour le jeune public ; l'ajout de mentions spéciales sur les emballages d'ordinateurs, de tablettes et de téléphones portables, afin d'informer les consommateurs des dangers liés à la surexposition aux écrans ; l'insertion de messages de prévention dans l'ensemble des publicités pour ces produits : ce sont autant de mesures qui nous semblent pertinentes pour sensibiliser les parents, les professionnels, les enfants eux-mêmes et, de manière plus large, la société, aux risques de l'exposition aux écrans numériques.

Vous avez pris en considération, madame la rapporteure, certaines des réserves que nous avions exprimées en commission. Ainsi n'étions-nous pas certains que rédiger, dans le carnet de grossesse, les recommandations aux parents relevait du rôle du législateur : nous vous remercions d'avoir su entendre nos doutes en renvoyant aux spécialistes compétents le soin de les formuler.

Nous continuons d'avoir des différends sur d'autres réserves, me semble-t-il : ainsi, nous ne pensons pas que la surexposition aux écrans numériques soit le fait de l'école et nous ne partageons pas votre méfiance quant au temps passé par les élèves sur les écrans. L'influence de mon rapport et les nombreuses auditions que j'ai effectuées me conduisent à considérer qu'en ce domaine, le besoin le plus urgent concerne la revalorisation de l'éducation physique et sportive (EPS) et l'amélioration de la formation des enseignants dans cette discipline, plutôt que le contrôle des activités et des enseignements assurés par les professeurs des écoles à l'aide de supports numériques. Les enseignants, les animateurs et les puéricultrices qui s'occupent chaque jour de nos enfants le font avec la meilleure volonté et sont les premiers à se battre contre l'utilisation abusive des écrans.

En revanche, nous sommes persuadés que ce problème de société provient avant tout des parents, insuffisamment alertés des dangers des écrans par leurs promoteurs, les publicitaires et les producteurs de contenus. Nous réitérons notre demande : eux doivent être contrôlés et obligés. Pour transformer vos bonnes intentions en mesures concrètes et opérationnelles, il faut les assortir de sanctions, comme il en existe en matière de publicité alimentaire. Pouvez-vous nous assurer que tel sera le cas ?

Enfin, les services de PMI, les acteurs éducatifs et les politiques de prévention ont moins besoin d'alinéas à insérer dans leurs documents que de moyens pour renforcer leurs effectifs, leur formation et la communication, comme je le soulignais dans mon rapport. Je terminerai mon propos comme j'ai commencé, avec les mots du docteur Sophie Cha : « Les enfants sont faits pour ça : faisons en sorte qu'ils bougent, sautent, et même, tombent de nouveau ! »

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