Intervention de Eva Sas

Séance en hémicycle du jeudi 6 avril 2023 à 15h00
Indemnisation des dégâts causés par le retrait-gonflement de l'argile — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEva Sas :

La question que pose la proposition de loi de ma collègue Sandrine Rousseau est simple. Le dérèglement climatique est là. Les Françaises et les Français doivent faire face tous les jours à ses conséquences. Allons-nous les laisser seuls face à ces dégâts qui bouleversent leur vie quotidienne ou allons-nous les protéger ?

Lorsque nous évoquons les conséquences du dérèglement climatique, il nous vient tous à l'esprit des images de catastrophes spectaculaires – incendies, inondations, rivières asséchées – mais la réalité du changement climatique, ce sont aussi des dégâts insidieux, des bouleversements profonds qui rendent la vie des Françaises et des Français de plus en plus difficile : chaleurs caniculaires, restrictions d'eau, fragilisation du littoral et, pour ce qui nous occupe aujourd'hui, dégâts causés par le retrait-gonflement de l'argile sous l'effet des sécheresses.

Les zones d'exposition dite forte ou moyenne au risque de retrait-gonflement des argiles couvrent 48 % du territoire hexagonal et plus de la moitié des maisons individuelles sont en risque. Le phénomène touche surtout des millions de familles dont la maison est fissurée, dont le foyer est délabré et dont les vies sont parfois brisées. Face à ces drames, les pouvoirs publics laissent le plus souvent les citoyennes et les citoyens démunis, puisque seule une commune sur deux, parmi celles qui en font la demande, fait l'objet d'une décision de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

Tout l'objet de cette proposition de loi est de mieux protéger la très grande majorité des sinistrés, actuellement abandonnés par l'État, en permettant de reconnaître plus aisément le statut de catastrophe naturelle pour le retrait-gonflement des argiles. C'est un paradoxe : alors que ces dégâts sont bien connus des maires, des habitants et des députés de toutes les nuances politiques dont les circonscriptions sont affectées, ils sont en grande partie niés par les pouvoirs publics et ne sont ni reconnus, ni indemnisés, peut-être parce qu'ils ne causent pas d'effondrement massif de bâtiment, comme le font les tremblements de terre, mais créent simplement dans les habitations des fissures qui n'en sont pas moins désastreuses pour les habitants.

Bâtir une société écologiste demande de regarder en face les conséquences du changement climatique, en appréciant en particulier à leur juste mesure les dommages réels subis par nos concitoyens. Ces dégâts ne concernent pas l'autre bout du monde ; ils ne menacent pas de se produire à l'horizon de 2050. Ils apparaissent ici et maintenant, s'aggravent de jour en jour et ont un coût. Celui des catastrophes naturelles en France devrait s'élever à 10 milliards d'euros en 2022, un record depuis 1999. Pour les seuls dommages liés à l'accroissement du retrait-gonflement des argiles, la facture passerait de 450 millions d'euros par an pour la période allant de 1989 à 2019 à 1,3 milliard d'euros en moyenne pour la période allant de 2020 à 2050. D'après France Assureurs, 59 % de cette hausse est due au réchauffement climatique. Cela fait des années que les écologistes vous alertent sur le coût de l'inaction climatique. Maintenant qu'il est avéré, il ne reste qu'à savoir qui paiera.

En commission, M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, s'est interrogé sur le coût de la proposition de loi. Il faudrait plutôt s'interroger sur le coût actuel des dégâts pour les ménages.

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