Intervention de Hervé Saulignac

Réunion du mercredi 3 mai 2023 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Saulignac :

La majorité reproche souvent à l'opposition de ne traiter que de petits sujets. Vous admettrez que celui que vous nous proposez ce matin ne relève pas d'une urgence absolue. Nous aimerions plutôt vous voir légiférer sur les déserts médicaux, sur l'appauvrissement des Français, sur la crise démocratique, sur l'ubérisation de la société, sur le malaise de l'école… Vous préférez nous occuper deux journées, en commission puis en séance, pour accrocher deux drapeaux sur les mairies de nos villages !

La tradition républicaine du pavoisement n'a jamais été consacrée par une obligation législative ou réglementaire, à l'inverse de nombreux autres pays. La France s'en porte-t-elle plus mal ? Certainement pas. La mairie est toujours bien identifiée ; c'est un symbole de proximité. C'est là que se prennent des décisions qui touchent à la vie quotidienne : en général, on n'y délibère pas pour amuser la galerie. Elle est aussi parfois le dernier service public du village : après la fermeture de l'école, du bureau de poste, de la perception, de la brigade de gendarmerie, il reste l'état civil, quelques pouvoirs de police et une démocratie locale tellement précieuse.

Nous contribuerons à arborer ces drapeaux, car les socialistes sont attachés aux valeurs républicaines, comme à une Europe qui protège les nations. Néanmoins, quand les manifestations continuent de rassembler les foules, quand l'inflation ruine certains de nos compatriotes et que d'autres doivent faire 50 kilomètres pour se rendre aux urgences, et alors que le Président de la République vous a demandé de l'audace pour trouver le chemin de l'apaisement, répondre par ce symbole paraît léger.

Vous créez en outre une obligation de dépense supplémentaire pour les communes – vous aimez les contraintes. Mais 70 % des communes comptent moins de 1 000 habitants, et leurs maires n'ont pas un kopeck à mettre dans des drapeaux. Dans un souci d'apaisement, je suppose que vous aurez prévu d'ici à la discussion en séance publique les modalités de prise en charge de cette dépense – plusieurs milliers d'euros pour un motif somme toute futile. À défaut, je ne vous garantis pas l'apaisement chez les maires de ces petites communes.

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