Intervention de Philippe Gosselin

Séance en hémicycle du mercredi 27 juillet 2022 à 15h00
Extension de dispositions statutaires à la fonction publique des communes de polynésie française — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Nous nous retrouvons pour ratifier une ordonnance de décembre 2021 sur le statut de la fonction publique communale en Polynésie française. Entendons-nous bien : il ne s'agit pas de ratifier une ordonnance relevant de l'article 38 de la Constitution. Le professeur et le juriste que je suis souligne qu'il ne s'agit pas d'un décret-loi de la IIIe République, il s'agit de l'application de l'article 74 de la Constitution, relatif au principe de spécialité législative qui concerne les collectivités d'outre-mer comme la Polynésie française. Dans ce cadre, le Gouvernement peut étendre, adapter par ordonnances un certain nombre de mesures qui doivent être ratifiées par le Parlement avant dix-huit mois sous peine de caducité – une disposition assez sévère.

Je tiens avant tout à saluer nos amis polynésiens qui nous écouteront plus tard du fait du décalage horaire – mais, heureusement, nous avons d'eux de dignes et bons représentants dans cet hémicycle. Je salue également les élus municipaux de Polynésie et tous les agents communaux qui font eux aussi tourner la boutique au quotidien, si je puis me permettre cette expression quelque peu triviale.

Je viens d'évoquer le principe de spécificité législative : si la République est indivisible sous toutes les latitudes, elle est également diverse et doit s'adapter à un certain nombre de contraintes et de particularités – et nous devons saluer ici la large autonomie dont jouit l'archipel polynésien.

Le président de la délégation aux outre-mer, Moetai Brotherson, le rappelait tout à l'heure, la Polynésie n'est pas un petit territoire : elle est aussi étendue que l'Europe et représente, soit dit en passant, plusieurs millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive. On y compte quarante-huit communes, dont trente comprennent des communes associées, 118 îles, dont soixante-quatorze habitées – M. le rapporteur l'a dit. Nous voyons donc bien que le cadre hexagonal et européen de division du territoire par communes et collectivités ne saurait être totalement opérant : appliquer intégralement à la Polynésie ce qui se fait ici n'aurait pas de sens.

Avant d'entrer dans le détail du texte, quelques éléments historiques s'imposent – sans pour autant remonter à Mathusalem, rassurez-vous.

M. le rapporteur l'évoquait également, avant 2005, les près de 4 700 agents employés par les communes polynésiennes relevaient – c'était une bizarrerie – d'un statut de droit privé. Il en allait ainsi et il a fallu faire face à des situations très hétérogènes. En 2005, une première ordonnance est donc venue définir un statut visant, pour l'essentiel, à offrir aux fonctionnaires polynésiens les mêmes droits et obligations que ceux s'appliquant aux fonctionnaires des collectivités territoriales de l'Hexagone et d'outre-mer, en tenant compte des spécificités polynésiennes en matière de financement des communes, des groupements de communes et des établissements publics administratifs.

En 2011, une autre étape a été franchie en procédant à une large actualisation de l'ordonnance de 2005.

Puis, en 2017, un important mouvement social, qui a concerné presque toutes les communes de l'archipel, a exprimé plusieurs revendications. En définitive, ce sont ces revendications, qui ont été mises en ordre sous la forme de plusieurs propositions issues des accords avec le haut-commissariat de la République en Polynésie française en mai 2017, que nous allons, par nos échanges et par nos votes, valider aujourd'hui – je n'en doute pas.

L'ordonnance de décembre 2021 vise à actualiser le statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes qui composent la Polynésie française, eu égard aux évolutions législatives de 2011 – il était temps, c'était il y a plus de dix ans –, et en intégrant les demandes, les revendications et les échanges qui se sont tenus depuis 2017. Ceux-ci portent sur trois axes : le renforcement des droits, des garanties, mais aussi des obligations des fonctionnaires ; la modernisation des instances de dialogue social – ce n'est pas un vain mot – ; et la facilitation de l'accès à la fonction publique pour les employés des communes, avec l'intégration d'éléments nouveaux qui permettront, par exemple, de disposer d'un droit d'option – je ne reviendrai pas sur l'ensemble des dispositions du texte.

Le Sénat, notons-le, a adopté le projet de loi à l'unanimité – nous ne pouvons faire moins bien –, entérinant ainsi les avancées figurant dans l'ordonnance, et s'est fait fort de davantage tenir compte des éléments culturels, sociaux, géographiques et religieux, notamment en matière de laïcité, qui ont été évoqués précédemment. M. le rapporteur a permis d'encore améliorer les choses, et la commission des lois a adopté le texte à l'unanimité.

Hormis quelques amendements qui mériteraient d'être votés et quelques ajustements auxquels nous procéderons peut-être en commission mixte paritaire, vous l'avez compris, le groupe Les Républicains juge bien sûr nécessaire la ratification de cette ordonnance. Des évolutions sont à prendre en compte et une adaptation doit être opérée, sachant que le travail et le dialogue devront naturellement se poursuivre au quotidien, dans le respect des réalités locales polynésiennes. C'est la République qui s'exprime ici dans sa diversité.

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