Intervention de Bertrand Petit

Réunion du mardi 27 juin 2023 à 17h05
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Petit :

Chacun connaît Barbe-rouge – je ne parle pas de la barbe de notre collègue Hubert Wulfranc, que je remercie de son initiative –, le pirate des Aventures d'Astérix qui saborde son propre navire : c'est exactement ce que le Gouvernement s'apprête à faire, anticipant la confrontation avec la Commission européenne, susceptible d'exiger le remboursement des aides versées à l'opérateur public Fret SNCF. Le ministre des transports préfère le liquider, en abandonnant vingt-trois services à ses concurrents, dont une partie de l'activité la plus rentable que sont les trafics dédiés, tels que les transports internationaux d'Arcelor-Mittal et la liaison Perpignan-Rungis. Au total, 20 % du chiffre d'affaires, 30 % de l'activité, 40 % des actifs immobiliers et une partie du matériel roulant de Fret SNCF seront transférés au secteur privé.

Le secteur du transport pèse 30 % de nos émissions de gaz à effet de serre (GES), hors transport aérien international. Hérésie écologique, alors même que le fret ferroviaire émet dix fois moins de GES que le fret routier, 85 % des marchandises sont acheminées par camion contre 9 % seulement par le train ! Contrairement au fret routier, le fret ferroviaire doit assumer des coûts de maintenance et d'entretien de ses infrastructures ; c'est pourtant le fret routier que l'on soutient massivement par des exonérations de taxe pétrolière, des tarifs de péage sans rapport avec l'usure de la route par les camions et le recours aux travailleurs détachés.

La séparation des activités de réseau et d'exploitation ainsi que la mise en concurrence de l'exploitation du fret ferroviaire devait améliorer, disait-on, la compétitivité du secteur. Un réseau ferroviaire victime d'un sous-investissement chronique et de comportements non coopératifs qui ont mis par terre les synergies qui prévalaient auparavant : tel est le bilan de la libéralisation. La liquidation de Fret SNCF sur l'autel du dogme concurrentiel est le coup de grâce. Dans la précipitation, ses concurrents ne seront pas en capacité de reprendre tous les flux abandonnés. Il y aura d'autant plus de camions sur les routes.

Inspirons-nous de ce qui marche en Suisse, où, grâce à une taxe routière élevée et à des investissements d'ampleur dans le réseau ferroviaire, la part modale du fret ferroviaire représente 72 % du trafic de marchandises !

Dès lors que nous devons décarboner le transport, il faut soutenir le fret ferroviaire, aujourd'hui exsangue, et sortir de la logique libérale. Le groupe socialiste s'associe pleinement à la commission d'enquête prévue par la présente proposition de résolution.

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