Intervention de Manon Meunier

Séance en hémicycle du jeudi 6 octobre 2022 à 15h00
Limitation de l'engrillagement des espaces naturels et protection de la propriété privée — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaManon Meunier :

La biodiversité s'effondre et – mauvaise nouvelle ! – les écosystèmes non plus n'obéissent pas aux lois du marché. Tout gouvernement devrait donc prendre conscience de la nécessité d'organiser une planification poussée et correctement financée pour sauvegarder cette biodiversité. Or si j'en juge par le nombre de fois que nous avons abordé le sujet depuis le début de la législature, il me semble que le Gouvernement n'a pas saisi l'urgence de la situation.

Expliquons-nous, en revenant sur les faits. La population d'oiseaux en France a diminué de 30 % en trente ans ; dans le monde, 1 million d'espèces animales et végétales sont actuellement menacées d'extinction.

Or un rapport de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) paru le 8 juillet dernier montre que nous dépendons au quotidien de près de 50 000 espèces sauvages. Les pollinisateurs, par exemple, assurent la reproduction de plus de 80 % de fleurs et de végétaux cultivés dans l'Union européenne. Divers insectes et mollusques participent au recyclage organique et à la recomposition des sols. Chaque espèce est un maillon d'une chaîne alimentaire dont nous faisons partie. Bref, l'être humain appartient au très grand écosystème terrestre et il est donc nécessaire de le préserver.

Or il semble malheureusement que M. Béchu, pourtant ministre de la transition écologique, ne l'ait pas compris. En effet, seuls 300 millions d'euros sont prévus pour la biodiversité dans le nouveau projet de loi de finances. C'est dérisoire, si l'on considère par exemple les 800 millions d'euros que recevront Vinci et Eiffage pour la construction d'une autoroute payante, trop chère, en Haute-Vienne et en Vienne. On dépense donc 300 millions au niveau national pour la biodiversité, tandis qu'on affecte 800 millions au niveau local à deux entreprises privées afin qu'elles réalisent un projet destructeur de terres agricoles et naturelles.

Dans un tel contexte, cette proposition de loi qui nous permet enfin de parler de la biodiversité, en proposant l'adaptation des clôtures placées en milieux naturels pour permettre la libre circulation de la faune sauvage, est la bienvenue.

Je salue d'ailleurs l'esprit de concertation qui a régné au sein de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire ainsi que la mobilisation de la NUPES, qui ont permis d'améliorer le texte. Ensemble, nous avons étendu le champ d'application de la proposition de loi à tous les espaces naturels, prévu que les haies remplaçant les clôtures soient constituées d'espèces végétales locales et diversifiées et réduit la classe de la contravention applicable en cas d'intrusion involontaire dans une propriété privée.

Mais il reste encore quelques points fort regrettables dans le texte.

Premièrement, nous tomberons probablement d'accord à l'énoncé de quelques principes fondamentaux relatifs à nos services publics : il convient de rendre ces derniers accessibles à tous nos concitoyens, mais également assurer l'impartialité des agents de l'État qui les animent. Ce dernier principe est encore plus important lorsqu'il s'agit d'exercer un contrôle à visée judiciaire, comme le font les agentes et agents de l'OFB, qui exercent un rôle de police de l'environnement.

Or certains alinéas du texte visent à confier aux fédérations de chasse une partie du contrôle de l'application du code de l'environnement. Vous comprendrez qu'une telle décision remettrait en cause le principe d'impartialité et que des conflits d'intérêts pourraient se faire jour.

Si vous jugez que les agents de l'OFB ne sont pas suffisamment nombreux pour effectuer ces contrôles, rien de plus normal : 60 équivalents temps plein y ont été supprimés depuis 2020. Mais j'ai une bonne nouvelle : nous examinerons très prochainement le projet de loi de finances, et nous pourrons alors, ensemble, proposer la création des 500 postes supplémentaires demandés par les syndicats pour l'OFB – quand le Gouvernement n'en propose que 15.

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