Intervention de Ersilia Soudais

Réunion du mercredi 14 septembre 2022 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaErsilia Soudais :

Je peine à croire que l'AFD soit un levier d'action collective dans le monde quand je vois la situation au Sahel. Je ne peux que constater l'échec de la stratégie adoptée dans cette région où, malgré des années d'investissement et le dévouement du personnel de l'Agence, le gouvernement français a essuyé un revers diplomatique. Je ne peux que constater l'échec de l'AFD quand j'observe que 96 % des personnes atteintes du sida vivent en Afrique subsaharienne et que la tuberculose et la faim continuent d'y tuer à foison ; quand j'observe que l'Afrique subsaharienne a les taux les plus élevés d'exclusion de l'éducation, dont les filles sont les premières victimes.

Vous avez engagé 5,2 milliards d'euros sur le continent africain, soit près de la moitié des engagements totaux de l'AFD. Pour quels résultats ? Comment l'AFD peut-elle se targuer d'avoir les mains propres et d'agir pour les populations, lorsqu'elle apporte son soutien à des systèmes autocratiques qui répriment leurs opposants et appauvrissent leurs peuples, comme ce fut le cas au Gabon ou au Cameroun ? Pourquoi ne pas conditionner l'accès à l'aide bilatérale à des critères démocratiques ?

L'AFD est l'héritière de la Caisse centrale de coopération économique, qui a été créée par de Gaulle en 1941, dans un contexte colonial. Elle demeure le bras armé, stratégique et financier de cet héritage colonial. Nous ne sommes pas dupes : l'AFD n'a pas tant pour vocation de mener une action humanitaire ou diplomatique que de préserver les intérêts de la France. Force est de constater qu'aucun de ces trois objectifs n'est finalement atteint, tant la place de la France est désormais contestée en Afrique et dans le reste du monde.

Je partage l'objectif affiché par l'AFD de faire advenir un monde plus juste et durable, mais le moment est venu de refonder totalement cet organisme, d'en faire un réel outil d'émancipation des peuples, qui ne suinte pas le paternalisme – ce qu'on appelle communément la Françafrique. C'est une tâche ardue, j'en conviens : à vous de nous dire si vous vous en sentez capable ou s'il vous faut passer la main.

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