Intervention de Émilie Bonnivard

Réunion du vendredi 27 octobre 2023 à 14h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉmilie Bonnivard, rapporteure spéciale (Tourisme) :

Bonne nouvelle : le tourisme français a retrouvé des couleurs. Le niveau de recettes est équivalent, voire supérieur à celui de 2019, à près de 58 milliards d'euros en 2022. La fréquentation est bonne, dépassant même celle de 2019. C'est donc une nette amélioration par rapport aux années marquées par l'épidémie de Covid-19, qui ont mis à mal le secteur.

Il est toujours difficile d'analyser les crédits relatifs au tourisme parce que nous n'avons plus de documents de politique transversale. On peut évaluer l'effort budgétaire en faveur du tourisme en 2024 à 130,37 millions d'euros en autorisations d'engagement et 167 millions d'euros en crédits de paiement. En font partie notamment les crédits dédiés à l'opérateur Atout France, qui est chargé de la promotion de la destination France, à hauteur de 28,7 millions. Atout France rencontre cette année une difficulté particulière : en raison de son passage de la tutelle du ministère de l'Europe et des affaires étrangères à celle du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et des nouvelles exigences de la Lolf (loi organique relative aux lois de finances), l'opérateur se voit privé d'une recette pourtant essentielle dans son budget de promotion, à savoir les droits de visa, qui représentent entre 4,5 et 5 millions d'euros. Je proposerai donc un amendement pour combler cette perte, notamment à la veille des Jeux olympiques et paralympiques de Paris

En 2024 se poursuivra l'exécution du plan Destination France, doté de 1,9 milliard d'euros. Ce plan a permis de définir une vision pour le tourisme de demain. Toutefois, des défis majeurs ne sont toujours pas relevés, alors qu'ils sont structurels dans le secteur touristique. Ainsi, les professionnels de l'hôtellerie et de la restauration font face à des difficultés de recrutement constantes. À ce titre, je serai très attentive au déploiement du plan « saisonniers », en particulier s'agissant des 10 millions devant être décaissés au titre du fonds national de l'emploi formation.

Par ailleurs, les prix de l'énergie et la nécessité de rembourser les prêts garantis par l'État (PGE) ont conduit à un pic de défaillances des entreprises dans le secteur avec une augmentation de 70 % des défaillances en juillet 2023 par rapport à juillet 2022. Le remboursement des PGE constitue un véritable enjeu : la médiation du crédit n'est pas suffisante et la notation des établissements est dégradée au niveau bancaire, ce qui les bloque dans leurs investissements, sans parler des difficultés de trésorerie.

S'agissant des meublés de tourisme, le choix du Gouvernement de baisser l'abattement fiscal de manière uniforme, à 50 %, a été une erreur. Cela ne répond pas au besoin de certains territoires touristiques de conforter leurs « lits chauds » au bénéfice de l'activité touristique – je pense à la montagne, aux stations thermales, ainsi qu'à certaines stations du littoral qui se sont construites sur ce type d'hébergement, comme La Grande-Motte. Cela ne permet pas non plus de lutter contre le dévoiement professionnalisé des logements permanents dans les zones tendues, de type Airbnb, qui fait que nos concitoyens ne peuvent plus se loger dans des villes comme Biarritz, Saint-Malo ou Paris par exemple.

Sur ce sujet, j'ai deux convictions. Tout d'abord, il faut conserver une différence de fiscalité entre meublés de tourisme classés et non classés : c'est fondamental. Ensuite, s'il ne faut pas toucher à l'avantage fiscal de 71 % pour les meublés classés jusqu'à 7 000 euros – cela concerne les tout petits loueurs – pour sauvegarder les hébergements touristiques en zone de montagne, il faut ensuite ramener l'avantage fiscal à 50 % entre 10 000 et 20 000 euros, et le supprimer au-delà : de cette façon, il est certain que l'immobilier repartira à la location permanente dans les zones tendues.

Le plan Destination France promeut un tourisme durable, à cette réserve près que l'on n'agit pas sur le transport, qui est à l'origine de 80 % des émissions de CO2 dans le tourisme. Si l'on ne développe pas le transport ferroviaire pour assurer la liaison entre le domicile et la destination touristique, on n'assurera pas la transition écologique du secteur. Toutefois, un effort est engagé par le Gouvernement en ce domaine. Je me prononcerai donc sur les crédits du tourisme à l'issue de nos débats, notamment en fonction du sort que connaîtra mon amendement.

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