Intervention de Pierre Dharréville

Réunion du mercredi 14 février 2024 à 9h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

Le rapport de la commission d'enquête du Sénat sur la pénurie de médicaments et les choix de l'industrie pharmaceutique française – créée à l'initiative du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – a été publié au printemps dernier. Rédigé par Laurence Cohen, ce rapport est riche en données objectives et il nous apprend qu'en 2022 plus de 3 700 médicaments ont été signalés en rupture ou à risque de rupture de stock, soit trois fois plus qu'en 2019.

Il indique aussi que l'ANSM use peu de son pouvoir de sanction. Entre 2018 et 2022, elle n'a prononcé que huit pénalités financières, pour un montant total de 922 000 euros. Et aucune d'entre elles n'avait pour motif une violation des obligations d'élaboration d'un plan de gestion de pénurie ou de constitution d'un stock de sécurité – ce qui est pour le moins étonnant en période de pénurie avérée.

Cette proposition prévoit à juste titre, d'une part, de renforcer les stocks de sécurité en allongeant la durée de réponse aux besoins qu'ils doivent assurer et, d'autre part, de renforcer les sanctions financières.

Il nous semble néanmoins nécessaire de rendre obligatoires ces dernières et de les assortir d'un montant plancher. Les pénuries trouvent leur origine dans le choix du Gouvernement de s'en remettre à une logique marchande, au détriment de l'intérêt général.

Le rapport du Sénat pointe ainsi l'insuffisance des mesures prises pour contraindre les entreprises pharmaceutiques en matière de prévention, de déclaration et de gestion des pénuries dans un contexte de dépendance croissante aux importations, venues notamment d'Asie. Il évoque un chantage aux prix encouragé par la financiarisation des laboratoires et souligne le problème que constitue l'augmentation du pouvoir de laboratoires qui développent des médicaments en monopole. Cela pose la question des brevets et de l'organisation de l'ensemble de la chaîne de production. Un pilotage par une politique publique plus forte est nécessaire. Il faut aussi mettre en place un service public du médicament, afin d'instaurer un rapport de force différent.

Par ailleurs le secteur pharmaceutique est le deuxième bénéficiaire du CIR, avec 710 millions d'euros en 2020 – sans aucune contrepartie puisqu'il ferme des sites de recherche et de production. Le rapport du Sénat ne manque pas de propositions sur ce point, afin que les entreprises pharmaceutiques rendent des comptes à l'État et aux patients.

Je remercie la rapporteure d'avoir mis ce sujet sur la table.

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