Intervention de Timothée Houssin

Réunion du mercredi 6 mars 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaTimothée Houssin :

Il est urgent de répondre à la hausse constante des violences physiques dans notre pays, encore attestée par le rapport du service statistique ministériel de la sécurité intérieure, publié ce jeudi 29 février. Alors que chacun a gardé en mémoire l'atroce assassinat d'une infirmière au centre hospitalier universitaire (CHU) de Reims au mois de mai 2023, les conclusions du rapport sur les violences à l'encontre des professionnels de santé sont sans appel. Entre 2021 et 2022, les agressions à l'encontre des médecins ont augmenté de 23 %, les coups et blessures envers les soignants de 15 %. Les professionnels de santé des hôpitaux sont 37 % à déclarer avoir été victimes de violences en 2022, et ce chiffre atteint 66 % pour les infirmiers.

Nous nous devons de protéger ces personnes qui consacrent leur carrière à soigner les autres. Ces intolérables violences viennent s'ajouter au nombre croissant des difficultés que rencontrent les professionnels de santé dans l'exercice de leur métier. Le manque d'effectifs, en milieu hospitalier comme dans la médecine libérale, pèse sur les patients et les soignants. Nous avons besoin de plus de médecins et de personnels de santé ; mais qui voudra exercer ces professions dans de telles conditions ? On compte – et c'est aussi le bilan de la Macronie – 15 000 postes d'infirmiers vacants, quand un quart d'entre eux envisagent de quitter le métier dans l'année à venir. Le risque de violences vient aggraver cette situation.

Certains quartiers sont plus touchés que d'autres. Le président du syndicat national des infirmiers libéraux affirme que des professionnels préfèrent ne pas se rendre chez certains patients en raison de leur lieu d'habitation. SOS Médecins a annoncé cette semaine renoncer à se déplacer dans certains quartiers de Toulon. À l'insécurité que subissent déjà les habitants de ces quartiers, où la Macronie laisse régner l'insécurité, s'ajoute l'inégalité d'accès au soin.

Sensibiliser et former les soignants victimes de violence, comme le rapport du ministère de la santé le préconise, ne suffit pas. Ce ne sont pas les soignants qui doivent s'adapter à la violence, mais les agresseurs qui doivent être plus sévèrement punis, comme le demande, à raison, le Conseil national de l'Ordre des infirmiers. Il y a quelques jours, un homme reconnu coupable d'avoir frappé un médecin dans son cabinet n'a été condamné par le tribunal de Montbéliard qu'à un simple stage de citoyenneté.

Le groupe Rassemblement national est favorable à un durcissement des peines, qu'il faut rendre plus dissuasives, et à une facilitation du dépôt de plainte en permettant à l'employeur de le faire pour l'employé, qu'il soit professionnel de santé ou personnel d'un établissement de santé – seulement 30 % des agressions sont en effet actuellement suivies d'un dépôt de plainte.

Nous voterons donc en faveur de cette proposition de loi, mais sans naïveté. Nous savons qu'il ne s'agit que d'une opération de communication de la Macronie, elle-même en partie responsable des problèmes qu'elle prétend résoudre. Sous la présidence d'Emmanuel Macron, 30 000 lits d'hôpital ont été fermés. Si cela n'excuse en rien les violences, l'état de notre système de santé attise assurément ces tensions : 48 % des violences font suite à des reproches sur la prise en charge médicale, et 28 % concernent le temps d'attente. Si votre texte tend à augmenter le quantum des peines, monsieur le rapporteur, votre ministre de la justice, M. Éric Dupond-Moretti, s'y oppose par principe. L'augmentation de la peine maximale ne sera d'ailleurs que de peu d'effet ; il est urgent de sanctionner dès la première infraction et de mettre en place des peines planchers, comme nous le proposons, mais vous vous y refusez également. Nous comprenons d'ailleurs assez mal pourquoi les amendements que nous avons déposés en ce sens, avec d'autres groupes, ont été considérés comme des cavaliers par la commission.

Ce texte est donc avant toute chose une opération de communication du groupe Horizons. S'il ne changera rien sur le fond, il constitue une avancée marginale pour la sécurité des soignants ; c'est pourquoi nous le voterons.

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