Intervention de Pierre-Yves Bournazel

Réunion du mercredi 9 septembre 2020 à 15h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Yves Bournazel :

Le projet de loi de programmation est un texte volontariste et ambitieux, pour replacer la France dans le peloton de tête des classements internationaux et parmi les pays en pointe sur l'innovation. Ce sont d'abord des crédits nouveaux, qui font partie intégrante du paquet de mesures du plan de relance, à hauteur de 25 milliards d'euros sur dix ans. Autrement dit, ce sont en moyenne 500 millions d'euros supplémentaires qui viendront accroître chaque année les moyens de la recherche publique. L'objectif est bien de parvenir, par un effet de levier sur la recherche privée, à 3 % de PIB à l'horizon de 2030. Cela passe par une forte mobilisation et de fortes synergies entre public et privé. Notre groupe, Agir ensemble, salue cette ambition et l'inscription des crédits dans une trajectoire pluriannuelle, qui donnera de la visibilité à nos universités et à nos organismes de recherche et renforcera notre attractivité.

Nous avons trois défis à relever : défi écologique, défi numérique, défi des mutations du travail. Le défi écologique est posé par l'urgence du changement climatique et les dangers que nos modes de vie font peser sur la nature et la biodiversité. Il faudra trouver des moyens nouveaux pour y faire face et accroître notre résilience. La recherche fondamentale sur les énergies propres – je pense aux renouvelables ou à l'hydrogène – sera décisive. Le défi est aussi numérique, alors que les possibilités ouvertes par l'intelligence artificielle et les innovations en matière de santé sont vertigineuses. Dans le même temps, l'horizontalité croissante de notre société, conjuguée à l'effort de ces technologies nouvelles, a entraîné des dérives regrettables : manipulation de l'information et discrédit de la parole scientifique. Nous sommes entrés dans l'ère du soupçon et des manipulations, parfois au plus haut sommet de l'État. Il est d'autant plus essentiel pour nos démocraties de replacer la rationalité et la rigueur scientifique au cœur de nos sociétés. Enfin, alors que les précédentes révolutions industrielles avaient constitué des gisements d'emplois nouveaux, ce n'est pas le cas de la troisième, qui voit l'émergence du big data, de l'intelligence artificielle ou de la blockchain. Réinventer un modèle de croissance pour prendre en compte ces mutations durables va constituer notre plus grand défi. C'est la raison pour laquelle il faut y investir.

Cette loi de programmation est aussi une loi à l'intention des chercheurs eux‑mêmes. En réalité, depuis trop longtemps, nous négligeons les rémunérations des personnels scientifiques. Cette évolution conduit malheureusement à une perte de prestige, au discrédit de la parole scientifique et à l'exode de nos talents à l'étranger. En portant une attention particulière aux nouveaux entrants, c'est l'ensemble des personnels qui seront progressivement revalorisés.

Le projet de loi comporte plusieurs mesures qui ont parfois reçu un accueil mitigé d'une partie de la communauté scientifique, en particulier les chaires de professeur junior inspirées du modèle anglo‑saxon ou les contrats de mission. Notre groupe a deux interrogations à ce stade. Nous croyons qu'il est essentiel que le Gouvernement rassure quant à la portée de ces nouveaux dispositifs et rappelle leur aspect facultatif. Il faudra, par ailleurs, très certainement remettre l'ouvrage sur le métier et évaluer à échéances régulières les progrès accomplis pour parvenir à l'objectif de 3 % du PIB, d'autant que l'écart entre la France et nos voisins les plus ambitieux est important. Vous avez eu raison, madame la ministre, de rappeler le retard pris par la France ces dernières années. En Allemagne, par exemple, l'objectif de 3 % est déjà atteint, et le Gouvernement en a fixé un nouveau à 3,5 %. Notre groupe accueille donc favorablement l'examen de ce texte qui porte le beau projet de replacer la science au cœur de notre modèle républicain.

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