Intervention de Jean-Luc Fugit

Réunion du lundi 3 octobre 2022 à 18h05
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Fugit, rapporteur pour avis :

Le projet de loi de finances pour 2023 vise, dans le prolongement de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience », à proposer aux entreprises et aux particuliers des mesures les incitant à se tourner vers la transition énergétique, notamment l'étalement des subventions d'équipement dans le cadre des certificats d'économies d'énergie (CEE), l'impulsion donnée aux bornes de recharge des véhicules électriques et la clarification des travaux de rénovation éligibles à la TVA à taux réduit.

Si ces dispositions n'ont rien de spectaculaire, elles n'en marquent pas moins la volonté du Gouvernement de poursuivre une politique de long terme, en dépit d'un contexte budgétaire très tendu. Il s'agit de mesures concrètes, plutôt que d'incantations, portant principalement sur le logement, l'industrie et les transports. Elles permettent à notre commission, saisie pour avis des articles 7, 8, 20 et 21, de rappeler que tout budget doit désormais donner une impulsion environnementale aux politiques publiques.

L'article 7, d'apparence complexe en raison de sa longueur, transpose dans notre système fiscal plusieurs objectifs adoptés dans le cadre de la loi « climat et résilience ». Il donne notamment une impulsion aux politiques de rénovation énergétique et de mobilité, en améliorant la lisibilité des dispositions afférentes et en soutenant celles permettant la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES).

Le A du I de l'article 7 étend le régime fiscal des subventions d'équipement versées aux entreprises, qui permet d'en étaler l'imposition sur plusieurs années, aux subventions perçues dans le cadre des CEE. Il s'agit clairement d'une mesure qui accélérera la modernisation des équipements industriels. Pour rappel, la quatrième période des CEE – 2018-2021 – a permis, d'après le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, d'économiser 1 148 térawattheure (TWh).

Le B prévoit une mesure très simple : les travaux d'installation et d'entretien de bornes pour recharge de véhicules électriques dans les habitations seront soumis à un taux réduit de TVA de 5,5 %. Notre pays a accéléré la cadence depuis 2020 et dispose désormais de près de 60 000 points publics de recharge, mais il accuse un net retard s'agissant des points de recharge dans le parc immobilier privé. Le projet de loi de finances pour 2023 vise à poursuivre l'accélération du déploiement des bornes de recharge dans la perspective de la promesse d'installation de 500 000 bornes de recharge d'ici à 2027.

Le C redéfinit le périmètre des travaux de rénovation énergétique des logements éligibles au taux réduit de TVA de 5,5 %. Les dispositions des articles 278-0 bis A et 200 quater du code général des impôts sont peu lisibles. La mesure prévue par le présent projet de loi de finances concerne le recours aux énergies renouvelables, ainsi que les travaux d'isolation thermique, le chauffage, la ventilation et la production d'eau chaude sanitaire.

L'enjeu est important. Comme l'ont rappelé Marjolaine Meynier-Millefert et Vincent Descoeur dans leur rapport d'information publié en 2021, la rénovation thermique de notre parc de logements est le principal moyen de diminuer nos émissions, qui s'élevaient à environ 71 millions de tonnes de CO2 en 2018.

Le D, le E et le F prorogent l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), notamment en faveur du logement social, prévue aux articles 1384 A à 1384 C du code général des impôts, en actualisant les critères environnementaux d'éligibilité. Ils permettront de faire entrer l'habitat social neuf dans la politique de performance énergétique, ce qui me semble être un objectif largement partagé.

Le G prévoit une mesure utile, en partie inspirée des travaux de notre commission sur les friches industrielles, menés sous la précédente législature par Damien Adam et Stéphanie Kerbarh. Il s'agit d'étendre les cas d'exonération de la taxe d'aménagement aux constructions et aménagements effectués sur des terrains réhabilités. Cette disposition offre un outil supplémentaire à l'utilisation plus rationnelle de l'espace et à la lutte contre l'artificialisation des sols.

Le H et le I visent essentiellement à majorer les valeurs servant au calcul de la taxe d'aménagement sur les aires de stationnement, dans une optique de limitation de l'artificialisation des sols.

Le II de l'article 7 vise à modifier les tarifs réduits d'accise sur les énergies concernant le charbon en 2024 et 2025. Ces modifications tarifaires visent à rendre plus coûteuse la consommation de charbon, dont chacun sait qu'elle est fortement émettrice de CO2. L'augmentation des tarifs devrait nous permettre d'atteindre notre objectif de neutralité carbone d'ici 2050.

Le III de l'article 7 vise à prolonger jusqu'en 2026 l'exonération de TFPB, dont l'échéance était prévue en 2022, accordée aux logements sociaux bénéficiant d'une décision d'octroi de subvention ou de prêt aidé prise entre le 1er décembre 2005 et le 31 décembre 2022.

Le IV de l'article 7 modifie l'article 107 de la loi « climat et résilience », qui prévoit d'accorder un prêt à taux zéro aux personnes vivant dans une zone à faibles émissions mobilité (ZFE-m) ou à proximité, pour leur permettre d'acquérir un véhicule à faibles émissions. La mesure proposée n'est pas directement environnementale. Elle précise le régime fiscal applicable aux sociétés financières octroyant les prêts.

Le cœur du dispositif prévu par la loi et par le décret du 22 avril 2022 n'est pas modifié. Le prêt peut être accordé aux personnes dont le revenu fiscal ne dépasse pas 14 000 euros ainsi qu'aux entreprises de moins de dix salariés dont le chiffre d'affaires ou le total du bilan ne dépasse pas 2 millions d'euros.

Le VI de l'article 7 précise les modalités d'application du H et du I du paragraphe I. Il prévoit que les nouvelles dispositions ne s'appliquent qu'à certaines opérations d'urbanisme.

Enfin, le VII de l'article 7 donne des indications sur les dates d'entrée en vigueur des nouvelles dispositions.

L'article 8 vise à renforcer les incitations à l'utilisation d'énergies renouvelables dans les transports en faisant évoluer les paramètres de la taxe incitative relative à l'utilisation d'énergie renouvelable dans les transports (TIRUERT), qui repose sur un mécanisme incitatif simple visant à modifier le comportement des redevables. Il existe un pourcentage cible d'incorporation d'énergies renouvelables dans les carburants à atteindre. S'il ne l'est pas, l'opérateur est soumis à une taxe. Dans la lignée des précédentes lois de finances, l'article 8 vise à relever les pourcentages cibles d'incorporation et le tarif de la taxe. Cette évolution devrait, en toute logique, permettre de renforcer l'incitation à l'incorporation d'énergie renouvelable dans les transports.

Les articles 20 et 21 n'appellent aucun commentaire particulier. Il s'agit de questions comptables et de technique budgétaire. L'article 20 actualise la définition du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». L'article 21 met fin à un compte de commerce sur les concessions hydroélectriques dont l'objet ne correspondait pas aux dispositions prévues par la loi organique sur les lois de finances (LOLF). Leurs dispositions sont sans conséquence sur la politique environnementale.

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