Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Réunion du mardi 4 juillet 2023 à 17h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à dix-sept heures trente.

Présidence de Mme Véronique Riotton, présidente

La Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes auditionne M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics.

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Monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (DDF) de l'Assemblée nationale a récemment adopté le rapport sur la budgétisation intégrant l'égalité, présenté par Céline Calvez et Sandrine Josso. Votre avis et celui de votre ministère nous tiennent à cœur et nous comptons sur vous pour que vous vous appropriiez nos travaux.

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Nous vous remercions vivement, monsieur le ministre, pour votre présence et pour ce temps d'échanges consacré à notre rapport sur la budgétisation intégrant l'égalité, un peu plus d'un mois et demi après sa présentation et son adoption, à l'unanimité, par notre délégation.

Ce rapport et les travaux de la mission d'information qui l'ont précédé s'inscrivent dans un contexte favorable à triple titre. D'abord, avec la mise en œuvre de cette démarche pour l'égalité dans un nombre croissant de pays de cultures politique et juridique différentes, ainsi que dans certaines de nos collectivités territoriales. Ensuite, avec l'élaboration du premier budget vert, outil vertueux d'arbitrage budgétaire qui permet de s'assurer que la dépense publique contribue à la transition écologique – ou, à tout le moins, que son impact négatif est minimal. Enfin, avec l'expérimentation intitulée « budgets intégrant l'égalité », conduite par différents ministères, qui n'a toutefois eu ni la pérennité ni les effets escomptés. Le bilan de cette expérimentation révèle, en effet, un manque de mise en œuvre et de perspectives, un déficit de données pour l'alimenter et une trop faible coordination entre les ministères, d'où des difficultés méthodologiques.

Au terme de nos travaux – que nous avons présentés ici à plusieurs reprises et sur lesquels nous ne reviendrons pas dans le détail –, nous faisons des recommandations qui s'articulent selon quatre axes, dont trois, nationaux, concernent plus précisément cette audition.

Le premier est l'instauration d'un cadre juridique, qui nécessite une impulsion politique forte. Celle-ci pourrait se traduire, dès la prochaine loi de programmation des finances publiques (LPFP), par un objectif chiffré de réduction de la part des dépenses ayant un impact négatif sur l'égalité entre les femmes et les hommes. À terme, nous considérons que l'inscription dans la LOLF (loi organique relative aux lois de finances), qui régit nos finances publiques, du principe de la BIE serait la meilleure manière de pérenniser la démarche et de lui permettre de survivre aux alternances politiques. Le contrôle par le Parlement nous semble également essentiel, notamment par une amélioration et une clarification du document de politique transversale (DPT) et par un approfondissement des études d'impact qui accompagnent les projets de lois. Pour cela, un audit des codes sources des principaux modèles économétriques de l'État, au regard de l'égalité femmes-hommes, est particulièrement recommandé.

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Le deuxième axe de la démarche de budgétisation intégrant l'égalité est une phase initiale de cadrage méthodologique approfondi, crucial lui aussi. Outre le soutien politique et le cadre juridique, ce cadrage implique que l'on définisse clairement la méthode à mettre en œuvre et le périmètre de dépenses concerné. Nous avons considéré qu'à l'instar de ce qui a été fait, avec succès, pour le budget vert, une mission pourrait être confiée conjointement à l'Inspection générale des finances (IGF) et au SDFE (Service des droits des femmes et de l'égalité), pour préciser la démarche et pour la piloter ensuite. Cela permettrait de définir une méthode adaptée à la fois à notre contexte juridique et budgétaire et aux différentes catégories de dépenses traitées. Il s'agirait également de définir la trajectoire qui permettrait d'étendre progressivement la démarche au périmètre des dépenses de l'État – tout en privilégiant les mesures de l'année –, sans omettre ses recettes. Le budget de la sécurité sociale devrait également être envisagé, de même que les dépenses effectuées par le biais de la commande publique. Tout cela implique une adaptation des applications de gestion et une formation des personnels qui, semble-t-il, a fait défaut lors de l'expérimentation de budgétisation intégrant l'égalité.

Le troisième axe de la démarche est le dialogue entre les services statistiques et les différents ministères. Ce dialogue est indispensable pour que des données sexuées pertinentes et suffisantes puissent alimenter celles de la performance et que l'ensemble des indicateurs de la maquette budgétaire puissent être déclinés en sous-indicateurs sexués. Les progrès réalisés en ce sens nous semblent encore trop lents ; nous avons constaté un manque manifeste d'échanges entre les services gestionnaires et les services statistiques. À cet égard, nous considérons qu'il convient de lancer, sous l'égide du Conseil national de l'information statistique (Cnis), des états généraux de la statistique publique genrée et d'évaluer s'il est pertinent de créer, au sein de l'Insee, un service transversal consacré à cette question. Enfin, dans le cadre de la mise en œuvre de la budgétisation intégrant l'égalité, il est essentiel que les acteurs de la statistique publique soient associés dès le départ, les pilotes de la démarche devant faire précisément état de leurs besoins et des données attendues.

Monsieur le ministre, nous souhaiterions savoir quelles actions le Gouvernement pourrait engager, parmi les principaux éléments que nous venons de porter à votre attention.

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Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics

Merci pour votre invitation à échanger sur la budgétisation intégrant l'égalité, un thème qui est à mi-chemin entre la procédure budgétaire et des enjeux, bien plus profonds, de nos sociétés démocratiques. Je dis nos sociétés, car comme votre rapport le souligne fort justement, les questions que nous nous posons aujourd'hui se posent dans la plupart des démocraties, que ce soit en Allemagne, en Autriche, en Belgique, au Canada, en Espagne, en Finlande, en Italie, en Islande, au Portugal ou en Suède et dans nombre de nos collectivités territoriales.

Avant d'aborder le contenu de votre rapport et de réagir à ses principales recommandations, je veux redire l'engagement du Gouvernement pour réduire durablement les inégalités entre les femmes et les hommes, à tous les niveaux de notre société.

Concernant les inégalités face à l'emploi, l'écart de taux d'activité a ainsi été divisé par deux en vingt ans – 13 points d'écart en 1999, 7 en 2019. Avec l'index de l'égalité professionnelle, dont la note a progressé de 5 points depuis sa création, en 2019, nous avons doté les entreprises d'un outil qui leur permet de mesurer les écarts et de progresser dans leurs pratiques managériales. Le différentiel de salaires entre les femmes et les hommes se réduit lui aussi – il a diminué d'un tiers en vingt ans – et nous œuvrons résolument pour que cela se poursuive. De même, alors que le taux de chômage des femmes était de 2,5 points supérieur à celui des hommes, il est aujourd'hui inférieur, notamment parce qu'il a baissé de 2,3 points depuis 2017. Mais ce n'est pas suffisant ; cela doit au contraire nous encourager à aller beaucoup plus loin et à réaffirmer que l'égalité professionnelle est un horizon non seulement souhaitable, mais atteignable. C'est un des principaux défis de notre génération.

Les inégalités en matière de prestations sociales – et plus particulièrement de système de retraite – reproduisent, pour partie, celles du monde professionnel. La réforme que nous avons conduite en début d'année et qui a entraîné beaucoup de débats, y compris dans cette assemblée, aura pour effet de réduire les inégalités des pensions de retraite, comme l'a démontré le dernier rapport annuel du Conseil d'orientation des retraites (COR), paru en juin. Ainsi, la pension moyenne des femmes de la génération 1966 progressera de 1,9 % grâce à cette réforme, quand celle des hommes n'augmentera que de 0,7 %. Pour la génération 1972, les hausses seront respectivement de 2,5 et de 1,4 %, et cette tendance s'amplifiera les années suivantes. Quels que soient nos désaccords, légitimes, sur cette réforme, force est de constater – et ce n'est pas le Gouvernement qui le fait, mais le COR, dont les conclusions ont été abondamment relayées par tous les groupes de cette assemblée – qu'elle est plus favorable aux pensions des femmes. Elle réduira en cela une des inégalités les plus ancrées dans notre modèle social, même si l'on sait que la façon la plus efficace de réduire ces inégalités de pension de retraite est de lutter contre les inégalités salariales.

Les inégalités face à l'éducation persistent, malgré les progrès notables qui ont été accomplis. Dans trop de filières la mixité demeure très ou trop faible ; nous devons nous battre contre les stéréotypes – Céline Calvez connaît bien ce sujet, s'agissant des filières scientifiques notamment – pour que seuls le talent et le travail déterminent l'accès aux filières éducatives et professionnelles.

C'est également le cas des inégalités face aux modes de garde ; à ce titre, la Première ministre a annoncé, début juin, une mobilisation massive des financements de la politique familiale, pour ouvrir 35 000 places de crèche d'ici à 2027, en veillant scrupuleusement à la qualité de l'accueil.

Quant aux inégalités face aux violences, le Gouvernement agit en créant plus de 10 000 places d'hébergement destinées à l'accueil des femmes. Le doublement des capacités d'urgence depuis 2017 s'accompagne de la formation de dizaines de milliers de membres des forces de l'ordre au recueil des plaintes. Plus largement, pour répondre aux violences intrafamiliales, une nouvelle aide universelle d'urgence a été créée, en application de la loi du 28 février 2023 qui, je crois, a été votée à l'unanimité par votre assemblée.

Les crédits du programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes du budget de l'État ont connu une progression spectaculaire, de 22 millions d'euros en 2017 à 65 millions en 2023 : peu de budgets ministériels ont triplé au cours de la même période. Cela témoigne de notre engagement, y compris budgétaire, même si la route est encore longue et que ce budget ne recouvre pas l'ensemble des dépenses qui concernent l'égalité entre les femmes et les hommes.

Enfin, il y a aussi les inégalités face à la représentation dans le champ politique. Vous savez combien la majorité présidentielle a œuvré pour faire avancer la parité ; je sais que d'autres formations, y compris dans l'opposition, ont également progressé en ce sens. Mais, là non plus, nous ne sommes pas au bout du chemin.

Cette liste non exhaustive illustre l'ampleur des chantiers que notre génération doit mener à bien. C'est pourquoi l'égalité entre les femmes et les hommes est à nouveau, comme en 2017, une grande cause de ce quinquennat, toutes les actions étant traduites en termes budgétaires.

Aujourd'hui, un DPT retrace l'ensemble des financements dédiés à l'égalité femmes-hommes : 3,3 milliards d'euros de crédits sont engagés en 2023. Cette documentation est-elle pour autant suffisante ? Sans doute pas ; j'en viens donc à votre rapport.

Je salue, tout d'abord, la qualité du travail des rapporteures, Céline Calvez et Sandrine Josso. Un travail très important a été effectué, en auditionnant notamment de nombreux acteurs et en se nourrissant d'expériences et d'initiatives menées à l'étranger. Ce rapport intègre plusieurs propositions et recommandations pour aboutir à une budgétisation intégrant l'égalité ; avant même de répondre aux différents points, je veux dire que j'y suis favorable. J'annonce donc, devant votre délégation, que la France va se doter d'une budgétisation intégrant l'égalité à la suite de votre rapport et des propositions que vous y faites.

Vous proposez une cotation des dépenses budgétaires selon qu'elles sont favorables, neutres ou défavorables à l'égalité entre les femmes et les hommes, sur le modèle du budget vert. Je soutiens cette proposition et je vais mobiliser les services de la direction du budget pour que les systèmes d'information permettent, très rapidement, d'afficher cette cotation. Très concrètement, une partie de ces systèmes changeront prochainement, notamment Tango – que tout le monde ne connaît pas ici –, un outil interne important pour la préparation du PLF (projet de loi de finances) et de ses annexes, avec les indicateurs pour les services de l'État. Il sera adapté dès le PLF 2024, pour intégrer cette budgétisation ; d'autres outils le seront ensuite, pour le PLF 2025. Je pense que nous aurons, en deux ans, une budgétisation intégrant l'égalité aussi aboutie que celle que nous avons adoptée pour le budget vert.

L'objectif, que nous partageons, n'est pas simplement de coter les dépenses mais aussi de pouvoir les remettre en question et de les faire évoluer. Nous chausserons ainsi les lunettes de l'égalité – pour reprendre vos termes –, comme nous avons su chausser celles de l'environnement avec le budget vert, pour poser un autre regard sur nos dépenses budgétaires. Je le précise, car d'autres pays, qui ont adopté cette analyse ligne à ligne du budget – comme l'Italie depuis 2017 ou l'Islande –, n'en ont pas toujours tiré toutes les conséquences budgétaires. Ils l'ont d'ailleurs reconnu eux-mêmes, il y a deux ans, lors d'une table ronde des pays de l'OCDE. L'Islande a ainsi précisé qu'il était difficile, une fois la cotation faite, d'en tirer les conséquences ; par exemple, les dépenses effectuées lors de la crise sanitaire avaient pour beaucoup concerné la construction, qui emploie très peu de femmes. Ces dépenses n'avaient donc pas été particulièrement favorables aux femmes, mais elles étaient nécessaires pour l'économie.

Vous proposez de développer des indicateurs genrés et de renforcer les études d'impact préalables pour les mesures nouvelles en PLF et PLFSS (projet de loi de financement de la sécurité sociale) : j'y suis, là aussi, favorable. Je souligne cependant que tous les indicateurs n'auront pas vocation à être genrés, le seront principalement les dépenses d'intervention et d'investissement, et que toutes les mesures en PLF et PLFSS n'ont pas d'impact sur l'égalité entre les femmes et les hommes. De la même manière, toute une partie des dépenses du budget vert – qui font d'ailleurs, chaque année, l'objet de débats lors de la procédure budgétaire – sont considérées comme neutres. C'est le cas notamment des dépenses sociales : lorsque l'on verse des allocations aux Français, on ne contrôle pas, ensuite, ce qu'ils en font ni si cette utilisation est favorable ou non à l'environnement. Cependant, pour reprendre cet exemple des dépenses sociales, la situation sera un peu différente en ce qui concerne l'égalité entre les femmes et les hommes, puisqu'une grande partie de ces dépenses ont précisément pour objectif la réduction des inégalités. Néanmoins, une partie des dépenses seront nécessairement cotées neutres. Par exemple, le budget travail et emploi présente un sous-indicateur genré sur le taux de retour à l'emploi six mois après la fin d'une formation à Pôle emploi – il est en l'occurrence moins bon de 4 points pour les femmes, ce qui démontre que nous devons encore progresser. De même, il existe des indicateurs genrés et pertinents pour la prévalence du tabagisme, pour le taux de participation à des campagnes de dépistage, pour le nombre de femmes victimes de violences sexistes et sexuelles ou encore pour la part des femmes dans les bénéficiaires du bonus de la prime d'activité. A contrario, la superficie des terres agricoles cultivées en agriculture biologique, le nombre de cambriolages de résidences principales et secondaires ou le taux de dossiers de politique agricole commune (PAC) payés dans les délais apparaissent comme des indicateurs, a priori, assez peu sensibles au genre. Même si je pense que tout se discute et que nous pourrions avoir des débats nourris sur ce sujet.

C'est la même logique qui prévaut dans le budget autrichien, que vous citez dans votre rapport. En France, nous progressons rapidement, avec près de 200 indicateurs, sous-indicateurs et objectifs d'ores et déjà genrés dans le budget 2023, contre une centaine en 2021. Nous continuerons à progresser dès 2024 et, évidemment, en 2025 pour un aboutissement systémique.

Vous proposez ensuite de généraliser l'égaconditionnalité pour les aides publiques, notamment, pour les commandes publiques : je vous soutiens également sur ce point. Nous chercherons à généraliser cette égaconditionnalité pour les aides et commandes publiques d'ici à 2027 ; nous allons le faire progressivement, année après année. Je vous annonce qu'une première étape importante aura lieu dès le 1er janvier 2024, avec la prise en compte de l'index de l'égalité professionnelle femmes-hommes pour accéder aux marchés publics. Concrètement, les entreprises qui ne publient pas cet index ou celles qui ont obtenu une note inférieure à 75 sur 100 – la moyenne est aujourd'hui de 88 – n'auront plus accès aux marchés publics. L'objectif n'est pas, in fine, de sanctionner les entreprises pour faire des économies, mais de changer profondément les comportements. Depuis l'instauration, en 2019, de l'index d'égalité professionnelle femmes-hommes, la note moyenne a progressé – je l'ai déjà précisé –, tandis que le taux de transparence des entreprises a bondi de 18 points. Pour celles et ceux qui nous regardent, je précise que toutes ces informations sont publiquement disponibles, avec des notes par entreprise, sur le site egapro.travail.gouv.fr. Nous savons combien cette transparence est un moteur de changement.

Enfin, vous préconisez de réviser la LOLF et le projet de LPFP, pour donner une base organique à la budgétisation intégrant l'égalité et pour fixer un objectif pluriannuel de réduction des dépenses défavorables à l'égalité. Sur ce point, je répondrai en deux temps : pour ce qui est de la LOLF, je ne peux pas garantir qu'il y aura, dans les années à venir, une réouverture du débat : elle a été réformée il y a peu et si cette réouverture devait avoir lieu, par exemple pour transposer les discussions en cours sur la gouvernance européenne des finances publiques, la budgétisation intégrant l'égalité pourrait alors faire partie des débats.

S'agissant de la LPFP, je suis d'accord, à titre personnel, pour que nous intégrions un objectif pluriannuel de réduction des dépenses qui vont à l'encontre de l'égalité. Je vous ai dit que l'objectif n'était pas seulement de coter les dépenses selon qu'elles étaient ou non favorables, mais aussi de réduire celles qui sont défavorables. Il me semble donc assez logique, lors de l'élaboration d'une LPFP – ce qui n'arrive que tous les cinq ans – destinée à fixer la qualité de la dépense publique, qu'on lui ajoute un objectif de réduction des dépenses défavorables à l'égalité. Cette position n'a pas fait l'objet d'un arbitrage de la Première ministre, même si je la sens très sensible à cette question. J'y suis personnellement très favorable et, comme je suis en charge de ce texte, ma voix devrait, je l'espère, être entendue.

J'affirme à nouveau l'engagement plein et entier de tout le Gouvernement – et le mien au premier chef – à avancer résolument sur le chemin de l'égalité, mais aussi à agir en cohérence avec les principales recommandations de votre rapport, dont je salue une nouvelle fois la qualité.

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Merci monsieur le ministre ; vous n'êtes pas venu les mains vides ! Vos propos prouvent que les travaux de notre délégation sont suivis ; ils soulignent également la qualité du travail accompli par les deux rapporteures.

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Merci, monsieur le ministre, d'être intervenu aussi bien sur la LPFP, sur l'égaconditionnalité de la commande publique que sur l'intégration au système Tango.

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J'ai moi aussi apprécié vos propos, en particulier ce que vous avez dit sur l'aboutissement systémique. Peut-être pourrez-vous nous en dire un plus tout à l'heure ?

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Nous en venons aux interventions des oratrices des groupes.

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Je vous remercie, monsieur le ministre, de prendre le temps de répondre à nos questions ; je remercie également Céline Calvez et Sandrine Josso, dont le travail de qualité nous permet d'avancer sur un sujet qui fait, trop souvent, l'objet de caricatures ou de préjugés.

La France veille, depuis 2008, à annexer chaque année au projet de loi de finances un document de politique transversale sur l'égalité femmes-hommes. Ce document n'est pas l'aboutissement de notre démarche en faveur de l'intégration de l'égalité dans le budget de l'État, mais il nous permet de nous en faire une idée très précise. Le budget égalité entre les femmes et les hommes représente 0,5 % du budget de l'État ; cela peut paraître peu, mais ce chiffre ne prend pas en compte – vous l'avez indiqué – les éléments que l'on retrouve dans d'autres parties du budget de l'État, ou dans le budget de la sécurité sociale.

De nombreuses expérimentations à l'étranger montrent la variété des approches et des éléments à prendre en compte. Je tiens à souligner que le Gouvernement a expérimenté le budget intégrant l'égalité au cours du quinquennat précédent, mais que la crise du covid-19 n'a pas permis d'en tirer tous les enseignements. Quant à ce quinquennat, j'ai noté votre engagement de budgétisation intégrant l'égalité, que nous saluons tous.

Beaucoup reste à faire pour qu'il y ait davantage d'égalité ; plusieurs recommandations du rapport de Céline Calvez et de Sandrine Josso auraient un impact important, y compris sur les finances publiques : comment pourraient-elles en améliorer la gestion ?

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Il y a quelque chose d'agaçant – et je choisis des mots légers – à vous entendre vous gargariser des efforts faits par le Gouvernement en matière d'égalité ; à vous entendre parler des pensions, alors que votre réforme des retraites allonge plus le temps de travail des femmes que celui des hommes – cela a été démontré et beaucoup critiqué. Agaçant de vous entendre parler d'égalité salariale tout en refusant d'augmenter le Smic – alors que 60 % de ceux qui le touchent sont des femmes – ; de vous voir balayer d'un revers de main toutes nos propositions de revalorisation des métiers féminisés, laquelle est pourtant indispensable à l'égalité salariale. Je ne pouvais pas ne pas dire que vos propos sont quelque peu hors-sol.

Le sujet des budgets genrés nous intéresse beaucoup. Je voudrais saluer le travail des rapporteures ; leur rapport est intéressant et souligne que, malgré les engagements pris depuis 2017 de faire de l'égalité femmes-hommes la première cause du quinquennat, celle-ci n'a pas beaucoup avancé. Si on veut qu'elle le fasse, il faut une décision politique à haut niveau, celui du Président de la République, du Premier ministre et du ministre des finances. Vous nous répondez assez favorablement, mais pensez-vous qu'il sera possible de les convaincre, notamment pour ce qui est de la LOLF, sur laquelle vous vous engagez moins que sur le reste ?

En matière de fiscalité, La France insoumise soutient la suppression du quotient conjugal, qui est défavorable à la personne qui gagne le moins dans un couple, c'est-à-dire aux femmes dans les trois quarts des cas. Le revenu des femmes est davantage taxé qu'il ne le serait en l'absence d'imposition conjugale, ce qui entraîne d'ailleurs une inégalité entre les femmes mariées ou pacsées et les célibataires. Dans notre programme, nous proposons de le remplacer par un crédit d'impôt par enfant, que pourraient toucher toutes les familles. Je sais qu'Élisabeth Borne est inquiète que le passage au taux d'imposition individualisé automatique pénalise les femmes, mais il ne s'agit pas de la même question, le quotient conjugal instaurant une inégalité supplémentaire pour les femmes, dès le calcul de l'impôt. Avez-vous réfléchi à la suppression de ce quotient ?

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Je vous félicite à mon tour, chère Céline, chère Sandrine, pour votre travail et votre engagement au service d'un sujet non seulement méconnu, mais aussi souvent mal compris, en France. La mise en application de ce travail ne pouvait pas se faire sans l'implication forte du Gouvernement. Votre présence, monsieur le ministre, est à ce titre indispensable pour engager les prémices de la culture de l'égalité.

Une étude d'impact devrait désormais être réalisée pour l'ensemble des projets de texte préparés par le Gouvernement. C'est ce que le Haut conseil à l'égalité (HCE) a rappelé dans son avis sur le déploiement d'une budgétisation intégrant l'égalité, en application de la circulaire du 23 août 2012 relative à la prise en compte, dans la préparation des textes législatifs et réglementaires de leur impact en matière d'égalité entre les hommes et les femmes.

La dimension des droits des femmes et de l'égalité entre les femmes et les hommes devrait à ce titre être systématiquement prise en compte dans les travaux d'évaluation préalables des projets de loi. En mars 2018, Édouard Philippe, alors Premier ministre, avait inauguré cette intention en demandant à ses ministres d'intégrer cette dimension. Pourtant, des projets de loi de finances, de financement de la sécurité sociale et de programmation ont trop longtemps échappé au dispositif. On peut, manifestement, avoir raison trop tôt. Grâce à la récente volonté du Gouvernement de faire de l'égalité entre les femmes et les hommes la grande cause du quinquennat et avec une progression budgétaire majeure – vous l'avez rappelé – notre pays devient enfin un sérieux moteur de la diffusion de la culture de l'égalité. Nous ne pouvons que nous en réjouir.

Alors qu'il s'agit d'un véritable enjeu, comment sensibiliser et accompagner les élus, dans nos territoires ? Si j'en crois l'actualité, ce n'est pas encore un enjeu prioritaire pour eux, mais cela doit le devenir. Comment les aider à en prendre conscience et à construire leur budget ?

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Plusieurs villes de France, comme Lyon, ont déjà commencé à expérimenter la budgétisation sensible au genre – je suis un peu vieux jeux et je l'appelle encore comme ça ; elles ont d'ailleurs été auditionnées par la DDF.

Je salue le travail de ces municipalités qui œuvrent déjà à ce que l'égalité femmes-hommes soit pleinement intégrée dans la conception et la mise en œuvre des services rendus aux habitants et aux habitantes. On sait qu'il s'agit d'un outil de diagnostic, de mesure et d'évaluation puissant et je remercie mes collègues Céline Calvez et Sandrine Josso de s'être saisies de ce sujet et je suis ravie, monsieur le ministre, d'apprendre que vous allez, enfin, le faire également. Je dis « enfin », car, quand même, le guide pratique du Centre Hubertine Auclert date de 2015 et beaucoup de pays l'ont fait depuis fort longtemps. Il est vraiment temps, en France, que l'on aille au-delà de l'expérimentation, ministère par ministère.

Que prévoyez-vous comme accompagnement des agents de l'État pour qu'ils intègrent ces nouvelles pratiques ? Le changement est parfois compliqué dans les organisations, la fonction publique et l'administration et c'est un frein important. Avez-vous un calendrier de formation pour créer l'adhésion ? À défaut, les agents seront réfractaires, la démarche capotera : toute notre bonne volonté politique n'aura alors servi à rien et il n'y aura au bout du compte aucun impact.

Avez-vous demandé aux structures expertes du budget sensible au genre, pour voir si elles avaient des recommandations et des retours critiques à formuler quant à la méthodologie que vous proposez ?

Je me permets d'aborder un autre sujet car faire avancer l'égalité passe par une telle approche transversale, mais aussi par un travail plus spécifique, notamment du point de vue des finances. La crise sanitaire a allongé de plus d'une génération le temps nécessaire pour parvenir à l'égalité. Certes, vous avez donné des chiffres satisfaisants, mais on n'a pas la preuve que c'est grâce à votre gouvernement que certains écarts d'égalité ne se creusent pas ou commencent à se réduire. Il s'agit plutôt de faits structurels, d'une courbe qui se prolonge et on voit bien que la volonté politique pourrait contribuer à ce que l'on aille encore plus loin. Vous souhaitez que le budget de l'État intègre réellement l'égalité. Soit. Mais pour cela, il va falloir mettre plus de moyens, notamment pour la lutte contre les violences faites aux femmes.

Le Centre Hubertine Auclert nous a indiqué qu'en 2020 l'Espagne consacrait 16 euros par habitante et par habitant à la lutte contre les violences de genre, alors qu'en 2023 la France ne leur dédie que 5 euros. Or sans moyens, on n'arrivera à rien. Les associations nous demandent quant à elles 2 milliards pour lutter contre les violences conjugales ; je sais que c'est beaucoup et que le rôle d'un gouvernement est de faire des arbitrages budgétaires. Mais ces 2 milliards, ce n'est pas grand-chose si on les compare aux 118 milliards du coût des inégalités femmes-hommes tel que l'estime la Fondation des femmes. On peut investir davantage du côté de l'égalité.

Allez-vous prendre en compte les revendications des associations lors de l'élaboration du prochain budget ?

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La longue marche vers la parité est entamée dans notre pays et nous pouvons nous en réjouir. Je remercie à mon tour nos collègues Céline Calvez et Sandrine Josso pour leur travail et pour leur rapport, qui préconise une méthode ambitieuse intégrant pleinement le travail parlementaire, en proposant de faire du budget un outil de transparence et d'arbitrage. En effet, les politiques fiscales et budgétaires sont souvent le reflet inconscient d'un phénomène autoentretenu ; elles peuvent en ce sens renforcer les inégalités. Au-delà de l'accélération législative, l'enjeu est bel et bien de transformer les mentalités, dès le plus jeune âge, pour établir une véritable parité dans notre société. Citoyens, entreprises et institutions en sont convaincus.

Le rapport fait mention de différences de parcours scolaire : les filles sont toujours plus diplômées, mais à diplômes équivalents, leur taux d'emploi est toujours inférieur à celui des garçons. Par ailleurs, la désaffection des jeunes filles pour les métiers techniques demeure une vraie source de blocage. Les idées reçues ont la vie dure, puisque 66 % des parents souhaitent que les garçons intègrent une filière technique, contre seulement 33 % pour les filles.

Monsieur le ministre, à l'approche du prochain PLF, quelles propositions allez-vous retenir pour que les plus jeunes d'entre nous considèrent la parité comme une chance et un signe de performance de notre société ?

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Je remercie Céline Calvez et Sandrine Josso pour leur rapport. Elles demandent qu'une budgétisation intégrant l'égalité soit rapidement mise en œuvre dans notre pays. Certaines instances internationales, comme le Conseil de l'Europe, le recommandent aussi ; or au niveau local, peu de nos collectivités se sont lancées dans cette démarche. À l'étranger, il existe des communes pionnières, à l'image de Vienne, en Autriche, qui depuis 2006 intègre le critère du genre dans son budget, en le soumettant à une grille d'analyse. Si certains agents et élus étaient au départ réticents à l'idée de déployer cette méthode, parfois technique, tous ont fini par adhérer à la démarche, grâce notamment à une sensibilisation accrue des équipes. Les collectivités ont un rôle à jouer pour mettre en place un outil de transparence et d'allocation équitable de l'argent public, afin de démontrer que l'égalité des femmes et des hommes passe aussi, et surtout, par les territoires.

Comment votre ministère pourrait-il aider à la sensibilisation, voire à la formation des acteurs locaux, aux enjeux de l'égalité des genres et promouvoir ainsi la méthode de la budgétisation intégrant l'égalité ?

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Gabriel Attal, ministre délégué

Vous m'avez demandé, madame Josso, ce que j'entendais par aboutissement systémique. Pour moi, la démarche deviendra systémique lorsque l'on verra que les pratiques de budgétisation changent vraiment ; lorsque lors de la conception d'une nouvelle aide, d'un nouveau dispositif, pérenne ou de crise, on aura conscience qu'il est nécessaire de vérifier s'il n'introduit pas un biais défavorable à l'égalité. Mon objectif est d'avancer par étapes, en commençant avec ce PLF, pour parvenir dès le PLF 2025 à un aboutissement de la budgétisation intégrant l'égalité du même ordre que celui que l'on a désormais pour le budget vert.

Cette nouvelle procédure permettra-t-elle une meilleure gestion des finances publiques ? Oui, madame Chandler, je pense que lorsque l'on aura de véritables indicateurs, une vraie cotation et une transparence réelle des objectifs, notamment de baisse des dépenses défavorables à l'égalité, cela nous aidera à mieux piloter les finances publiques. Si, par ailleurs, réduire les dépenses défavorables à l'égalité nous permet de faire des économies, tant mieux ! Même si, bien entendu, il ne s'agit pas de la priorité de la démarche.

Madame Legrain, le Smic a augmenté de 9 % depuis un an, grâce à des revalorisations automatiques liées à l'inflation. J'entends que vous auriez souhaité qu'on l'augmente davantage, mais nous avons à cet égard un vrai désaccord de fond. Pour nous, l'augmenter dans les proportions que vous proposez détruirait des emplois. Or, vous l'avez dit vous-même, beaucoup de femmes sont rémunérées au Smic : ce sont donc des femmes qui, majoritairement, perdraient leur emploi. Nous souhaitons avancer différemment, par exemple en revalorisant, aussi, la prime d'activité, dont 57 % des bénéficiaires sont des femmes. Vous avez parlé également de l'absence de revalorisation des métiers féminisés : je ne peux qu'être en désaccord avec vous. Ainsi, grâce au Ségur de la santé, 13 milliards d'euros ont, principalement, servi à revaloriser les salaires de métiers très féminisés, à l'hôpital.

Nous avons un débat politique, légitime. On peut toujours considérer que l'on devrait aller plus loin sur un certain nombre de sujets, mais de la même manière que vous avez formulé vos critiques, il est important pour moi de dire ce qui a été fait et qui, je crois, va dans le bon sens.

Concernant les quotients, Jean-Luc Mélenchon proposait de supprimer non seulement le quotient conjugal, mais aussi le quotient familial. Je n'ai pas souvenir que leur remplacement par un autre dispositif figurait dans son programme – ou le vôtre – lors des dernières élections législatives. J'avais bien étudié la question et fait quelques débats avec certains membres de votre famille politique ; il s'agissait avant tout d'un levier d'augmentation des impôts. Or je ne souhaite pas augmenter les impôts des Françaises et des Français. En revanche, je souhaite qu'ils puissent avoir le choix et qu'ils sachent, de façon transparente, ce qu'implique le fait d'être ou non conjugalisé et d'avoir un taux conjugalisé ou individualisé de prélèvement à la source. Je souhaite qu'ils puissent le savoir et qu'ils puissent choisir en connaissance de cause. J'adhère totalement à la proposition de la Première ministre d'instaurer une individualisation du taux de prélèvement à la source par défaut. Et je vous annonce qu'il y aura dans le PLF pour 2024 une mesure d'individualisation du taux de prélèvement à la source. Cela me semble aussi aller dans la bonne direction.

La sensibilisation des élus et la stratégie territoriale, évoquées par Mmes Violland, Melchior et Garin, n'est pas à sens unique. Des élus et des collectivités locales peuvent aussi nous apporter, comme ils l'ont déjà fait pour le budget vert. Certains s'étaient, en effet, engagés dans cette voie avant que l'État n'adopte ce type de budget. L'État s'inspirera donc des meilleurs exemples des collectivités territoriales ; mais sa responsabilité sera aussi de systématiser ces pratiques au niveau national.

Par exemple, l'État et beaucoup de collectivités ont un budget vert – je vais d'ailleurs en parler avec mon collègue Christophe Béchu. Il me semblerait positif que l'on adopte, avec les associations d'élus, les mêmes critères et les mêmes manières d'évaluer les dépenses. Cela fournirait, entre autres, une visibilité exhaustive des dépenses favorables ou non à l'environnement, sur l'ensemble du territoire national. Il serait sans doute intéressant que l'on ait la même approche pour la budgétisation intégrant l'égalité, pour disposer d'un cadre de référence partagé.

Pour ce qui est de la formation et de l'accompagnement des agents de l'État, il s'agit d'un véritable enjeu. Des initiatives ont déjà été prises dans le cadre de l'expérimentation de 2019, puisque les agents de l'ancien Commissariat général à l'égalité des territoires avaient notamment été formés à l'intégration du critère « égalité femmes-hommes » pour les subventions aux associations. Concrètement, je veux réunir, si possible avant les vacances, le réseau des hauts fonctionnaires à l'égalité, qui sont désormais présents dans chaque ministère ; il serait sans doute utile que les deux rapporteures viennent présenter leur rapport, pour lancer les travaux avec eux. Je souhaite ensuite qu'à partir de la rentrée on puisse avoir les premiers retours d'initiatives de formation prises dans les ministères. Vous l'avez dit, madame Garin, le succès de cette budgétisation intégrant l'égalité ne dépendra pas du seul ministère des comptes publics. Par définition, les documents budgétaires sont préparés par l'ensemble des ministères ; si ces ministères n'intègrent pas cette question de l'égalité femmes-hommes, la démarche ne sera pas un succès.

Je reprends d'ailleurs une autre proposition du rapport, à savoir lancer une mission d'application. Votre rapport est utile et permet de voir où l'on veut aller ; je ne vais donc pas relancer une mission pour le savoir. En revanche, je vais en déployer une, dès la rentrée, avec l'Igas (Inspection générale des affaires sociales) et l'IGF, à laquelle sera associé le SDFE. Elle devra nous dire, premièrement, quelle est la bonne méthodologie ; deuxièmement, de quels outils supplémentaires nous devons nous doter ; troisièmement, quels sont les champs ministériels prioritaires. Allons-nous également associer les structures expertes ? Oui. Il serait d'ailleurs intéressant que je les reçoive elles aussi. Allons-nous tenir compte des demandes des associations dans le PLF 2024 ? Évidemment, mais il y a une équation budgétaire et des choix politiques à faire. Comme l'ont rappelé plusieurs intervenants, on ne peut pas dire que l'effort budgétaire en matière d'égalité femmes-hommes repose exclusivement sur le ministère de l'égalité entre les femmes et les hommes. En réalité, si l'on intègre l'ensemble des dépenses engagées pour l'égalité, le total atteint plus de 3,3 milliards d'euros, alors que le budget du ministère est plus restreint. C'est la raison pour laquelle il existe un document de politique transversale. Il est néanmoins évident que l'on ne peut pas satisfaire toutes les demandes.

Madame Descamps, vous m'avez interrogé sur la formation ; je ne veux pas empiéter sur la compétence d'autres ministères ni faire des annonces à la place de collègues, mais vous savez que cette question est importante pour moi. Nous avons d'ailleurs siégé ensemble au sein de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, au cours du précédent quinquennat. Céline Calvez avait quant à elle remis un rapport sur le sujet. La formation est un enjeu majeur, notamment dans les écoles d'ingénieurs, dans lesquelles moins d'un tiers des étudiants sont des femmes. Une étude Ipsos a montré que 33 % des filles étaient encouragées à s'orienter vers les métiers du numérique, contre 61 % pour les garçons. Il faut intégrer de nouveaux éléments à notre politique éducative, mais aussi changer les mentalités.

Les modèles jouent beaucoup en la matière et je veux saluer toutes les femmes qui s'engagent, qui vont dans les écoles et qui interviennent dans les médias pour montrer aux petites filles que, oui, c'est possible. Nous avons un bel exemple avec une Première ministre qui, je me souviens, lors de sa passation de pouvoirs, a dit qu'elle pensait à toutes les petites filles, auxquelles elle montrait que l'on pouvait être une fille et espérer devenir Première ministre. Je me suis dit que cela allait peut-être donner des idées à certaines petites filles devant leur télévision et qu'on en retrouverait certaines, dans quelques années, dans nos exécutifs locaux ou à l'Assemblée nationale.

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Madame la présidente, au mois de novembre 2022, vous avez mis à l'agenda de notre délégation le sujet des budgets genrés. Sandrine Josso et moi-même avons travaillé sur cette question et cette même délégation a approuvé les grandes lignes de ce travail.

Je vous remercie, monsieur le ministre chargé des comptes publics, d'avoir accordé de l'attention à cette démarche et de vous être pleinement engagé. Un des principaux axes de nos recommandations est l'impulsion politique : je pense que par votre prise de parole et votre prise de position aujourd'hui, vous l'avez donnée. Nous ne pouvons que saluer cette impulsion politique.

Au-delà de celle-ci, vous nous avez également donné des précisions sur les engagements et sur les calendriers, en mettant en place des groupes, notamment avec les hauts fonctionnaires à l'égalité, ou encore en déclenchant une mission Igas, IGF et SDFE. Tous les groupes de cette délégation et de cette assemblée auront à cœur de les suivre pour servir la grande cause des deux quinquennats qu'est l'égalité entre les femmes et les hommes.

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Merci, monsieur le ministre, pour cet exercice synthétique et fructueux.

La séance est levée à dix-huit heures vingt.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Céline Calvez, Mme Émilie Chandler, Mme Béatrice Descamps, Mme Marie-Charlotte Garin, M. Guillaume Gouffier Valente, Mme Sandrine Josso, Mme Sarah Legrain, Mme Graziella Melchior, Mme Véronique Riotton, Mme Anne-Cécile Violland.

Excusés. - Mme Agnès Carel, Mme Julie Delpech, Mme Marie-France Lorho, M. Emmanuel Taché de la Pagerie.