Commission des affaires européennes

Réunion du mercredi 27 mars 2024 à 15h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 27 mars 2024

Présidence de M. Pieyre-Alexandre Anglade, Président de la Commission,

La séance est ouverte à 15 h 05.

I. Nomination de rapporteur

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Chers collègues, je vous propose que l'on débute notre réunion de ce jour avec la proposition de résolution européenne visant à étendre les compétences du Parquet européen aux infractions à l'environnement, dont l'auteure est la vice-présidente de notre Assemblée, Naïma Moutchou, que je suis très heureux d'accueillir au sein de notre commission.

Avant de l'entendre sur le sujet, je vous propose que nous la nommions rapporteure sur cette proposition de résolution européenne.

(Assentiment)

La Commission a donc nommé, sur proposition de M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade, Mme Naïma Moutchou, rapporteure sur la proposition de résolution européenne visant à étendre les compétences du Parquet européen aux infractions à l'environnement (n° 2395).

II. Examen de la proposition de résolution européenne°: étendre la compétence du Parquet européen aux infractions à l'environnement (Mme Naïma MOUTCHOU) (n° 2395)

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Je suis très heureuse d'intégrer votre commission. Je ne suis pas présente seulement en raison des élections européennes mais pour examiner un texte qui fera partie, je l'espère, de cet édifice que nous essayons de construire ensemble. Cette proposition de résolution européenne vise à étendre les compétences du Parquet européen aux infractions à l'environnement.

Il y a quatre ans, je rapportais devant la commission des lois le texte qui mettait en place le Parquet européen en France. Je propose aujourd'hui cette résolution dans le prolongement des travaux que nous avions menés. En effet, du chemin a été parcouru depuis quatre ans. Alors que la mise en place d'un Parquet européen avait pu susciter des inquiétudes, quant à son articulation avec les juridictions des États membres notamment, le résultat de ces trois années d'activité démontre la réussite presque totale de ce projet.

Le Parquet européen constitue désormais une pièce maîtresse de l'architecture de justice et de sécurité de l'Europe en poursuivant les auteurs d'infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union européenne. Aujourd'hui, ce Parquet s'occupe des poursuites pour fraudes ou détournements aux recettes du budget de l'Union européenne. Quelques chiffres suffisent d'ailleurs à illustrer la contribution du Parquet européen à la lutte contre la fraude : au 31 décembre 2023, près de 2 000 enquêtes étaient en cours, pour un préjudice estimé à environ 20 milliards d'euros. Sur l'année 2023, le Parquet a procédé à la saisie d'1,5 milliard d'euros.

La question de l'extension des compétences du Parquet européen au-delà des seules infractions portant atteintes aux intérêts financiers de l'Union européenne s'est posée dès sa création. De mémoire, au moment des débats parlementaires, il y avait eu des amendements d'extension à divers champs, dont le champ environnemental, mais également les questions liées aux infractions terroristes qui intéressent certains États membres. Cette question se pose aujourd'hui avec une force particulière s'agissant de la criminalité environnementale, au regard de l'urgence climatique que nous vivons.

La criminalité environnementale connaît en effet une croissance inquiétante. Elle est souvent le fait d'organisations criminelles à la recherche d'activités fortement lucratives mais dont le risque pénal est bien inférieur à d'autres infractions plus classiques telles que le trafic de stupéfiant. Elle a été classée par les Nations Unies et l'agence Interpol au quatrième rang des activités criminelles les plus importantes au monde et constitue une source de financement pour des réseaux qui se livrent aussi à d'autres trafics, voire à des activités terroristes et présente donc une réelle menace pour notre sécurité collective.

Cette criminalité environnementale prend des formes nombreuses : trafic de déchets, d'espèces protégées, émission ou rejet illégal de substances polluantes dans l'atmosphère, le sol ou l'eau. Elle contribue à l'augmentation de la pollution, à la dégradation de la faune et de la flore, à la réduction de biodiversité et in fine comporte des risques pour la santé humaine.

Toutefois, la criminalité environnementale demeure mal saisie par les juridictions pénales nationales. En effet, ces affaires représentent moins d'1 % des cas traités par les juridictions judiciaires françaises. Un rapport du groupe de travail mené sous l'égide de la Cour de cassation relève une réponse pénale insuffisante via la préférence donnée aux alternatives aux poursuites.

La pertinence d'une action à l'échelle européenne dans ce domaine est incontestable.

Il y a d'abord une évidence dans le caractère transfrontalier des infractions environnementales : la pollution ne s'arrête pas aux frontières, les trafics de déchets entraînent une réelle nécessité d'assurer une poursuite à l'échelle de l'Union européenne. Actuellement, si les services de police coopèrent dans ces domaines, cette coopération, on doit le dire, ne fonctionne pas toujours. Elle peut être complexe et les procédures peuvent être ralenties : une direction d'enquête assurée par le Procureur européen permettrait d'améliorer substantiellement la coordination dans ce domaine.

Autre élément, les demandes d'entraide judiciaire auprès de l'agence Eurojust en matière environnementale ne représentent qu'1 % des saisines des États membres auprès de l'agence, ce qui est très insuffisant. Celle-ci a dans un rapport de 2021 regretté un tel manque d'investissement des États membres dans ce domaine.

L'Union européenne a placé la lutte contre la dégradation de l'environnement au cœur de son action, via notamment le Pacte vert. Dès lors, l'extension de la compétence matérielle du Parquet européen serait un signal supplémentaire envoyé en ce sens. Celui-ci est en effet en capacité de définir lui-même une politique pénale au niveau européen sans être dépendant des saisines effectuées par les États membres. Le doter de compétence en matière environnementale permettrait ainsi d'ériger la protection de l'environnement en priorité de politique pénale.

Cette extension est d'autant plus cohérente avec la mission de protection des intérêts financiers de l'Union du Parquet européen, dès lors que l'Union consacre désormais 30 % de son budget à la protection de l'environnement et du climat, auxquels s'ajoute également une partie substantielle des montants du plan de relance. De surcroît, la répression des réseaux criminels qui contournent les obligations de protection de la nature constitue une condition de l'acceptabilité sociale des normes environnementales, qui est aujourd'hui un enjeu majeur.

Enfin, la mise en place de ce Parquet vert européen permettrait une action plus intégrée au niveau européen afin de remédier aux limites identifiées de la coopération judiciaire intergouvernementale.

Pour toutes ces raisons, j'ai la conviction qu'il est nécessaire d'étendre la compétence du Parquet européen à la criminalité environnementale, sans plus attendre. Bien que celui-ci ne soit en activité que depuis trois années, son action est unanimement saluée, son bilan démontre son efficacité et son fonctionnement s'inscrit en parfaite coopération avec les juridictions des États membres.

Attendre davantage avant d'envisager cette extension, c'est laisser davantage de temps aux réseaux criminels pour développer leurs trafics, c'est échouer à prévenir des dégradations de l'environnement dont les conséquences pourraient être difficilement réparables, parfois irrémédiables. Enfin, c'est nier une réalité qui a pourtant été affirmée par l'Union européenne, elle-même, dans la loi pour le climat : le changement climatique constitue une menace existentielle pour l'humanité. Face à cette menace, dans un État de droit, la justice, et la justice pénale en particulier, a une mission de protection.

C'est pourquoi, j'espère mes chers collègues, que vous soutiendrez cette proposition de résolution.

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Cette proposition de résolution européenne porte devant notre commission un sujet extrêmement important. Vous l'avez rappelé, les atteintes à l'environnement n'ont pas de frontières. Qu'il s'agisse du commerce d'espèces sauvages, des marées noires, des surexploitations forestières, du trafic de déchets, de l'exploitation ou du commerce illégal de minerais, ce sont autant de crimes contre notre planète. Nos concitoyens ne supportent plus de voir des réseaux puissants saccager notre bien commun, d'autant plus qu'ils alimentent d'autres menaces. En effet, comme vous l'avez rappelé, la criminalité environnementale est l'une des activités criminelles les plus lucratives au monde, elle offre donc des financements faciles à d'autres, y compris de nature terroriste.

Le Président de la République a pour cette raison réaffirmée que la lutte contre la criminalité environnementale était une priorité française, à l'occasion de l'Assemblée générale des Nations unies en 2020. Je rappelle également que c'est sous la présidence française du Conseil de l'Union européenne en 2022 qu'ont été engagées les négociations sur la proposition de la Commission visant à réviser la directive de 2008 sur la protection de l'environnement par le droit pénal. Et c'est également sous cette présidence que la France a organisé une conférence sur ce thème à Marseille en mai 2022.

Comme vous l'avez rappelé, la grande criminalité se joue des frontières. Ainsi, pour la réprimer nous devons disposer d'instruments européens. C'est ce même raisonnement qui, alors appliqué à la criminalité financière transfrontalière, avait mené à la création du Parquet européen en 2021.

Le paragraphe 4 de l'article 86 du TFUE prévoit justement la possibilité d'étendre les attributions du Parquet européen à la lutte contre la criminalité grave ayant une dimension transfrontière. Dans ce sens, une résolution du Parlement européen avait été adoptée avec le soutien du groupe Renew, pour proposer la création de compétences en la matière. Un rapport de la Cour de cassation en date de 2022 préconise également l'extension des compétences du Parquet européen à la criminalité environnementale. Nous souscrivons donc pleinement à l'objectif de votre résolution.

Il faudra évidemment travailler techniquement à sa mise en œuvre et à son articulation avec les procédures nationales. Vous connaissez parfaitement bien le sujet pour avoir été la rapporteure du projet de loi relatif au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée. Il faudra évidemment travailler à l'articulation du texte que vous présentez avec l'article 86 du TFUE qui pose comme l'une des conditions à l'extension du Parquet qu'elle soit limitée à la criminalité grave. Une des questions que nous aurons à débattre est donc de savoir quels critères on utilise pour caractériser la gravité de cette criminalité. Ces travaux sont donc devant nous, mais nous sommes très heureux de cette résolution, nous la voterons et la soutiendrons puisqu'elle permet d'ouvrir ce travail ô combien nécessaire pour protéger notre environnement européen.

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Cette proposition de résolution européenne s'inscrit dans la montée en puissance du Parquet public européen. Depuis le 1er juin 2021 ce nouvel organe supra-étatique bruxellois a pour objectif affiché de lutter contre la criminalité en col blanc, souvent transfrontalière, comme le blanchiment de capitaux, la corruption et la fraude à la TVA. Le nombre de ces infractions pourrait augmenter avec le plan de relance européen. Pour autant, la justice pénale est une prérogative régalienne, qui appartient aux États depuis toujours. C'est une composante indivisible de notre souveraineté.

Aujourd'hui, l'objectif affiché est d'étendre les compétences de ce Parquet aux infractions à l'environnement. Nous n'avons pas d'hostilité de principe sur le sujet, la protection de l'environnement étant naturellement un sujet très important.

Mais Bruxelles étend toujours plus ses prérogatives au détriment de notre souveraineté : diplomatie, défense, les exemples sont malheureusement nombreux. Avec cette proposition, le Parquet européen pourrait court-circuiter les juridictions nationales, empiétant de façon inquiétante sur la souveraineté des États, raison pour laquelle plusieurs États ont fait le choix fort de ne pas y participer, à savoir le Danemark, la Hongrie, l'Irlande, la Pologne et la Suède. Il s'agira donc d'une coopération renforcée entre les 22 autres États.

La mission du Parquet peut sembler louable, comme celle de lutter contre la fraude transfrontalière à la TVA, la corruption, le détournement de fonds ou d'actifs de l'Union européenne, ainsi que le blanchiment de capitaux et la criminalité organisée. Les infractions qui portent atteinte au budget de l'Union européenne sont particulièrement visées, et dans la mesure où l'Union européenne étend de plus en plus sa compétence en matière écologique, par le biais d'instruments économiques tels que le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, elle souhaite avoir un instrument qui assure sa coercition en la matière.

Or, tout le problème est là : ce Parquet vient supplanter les parquets nationaux qui étaient parfaitement en mesure de coopérer entre eux si nécessaire. Notre effort devrait se concentrer au contraire sur l'amélioration de la coopération entre les parquets nationaux sur les questions écologiques, plutôt que de renforcer une entité supranationale. Cette solution en apparence simple, qui consiste à donner un pouvoir supplémentaire à la Commission en s'affranchissant des difficultés de coopération entre les États, n'est pas une bonne idée car elle revient à dissoudre un peu plus la souveraineté de la France dans l'Union européenne, c'est-à-dire à effacer un peu plus les nations au profit de l'Union.

Ainsi, sous prétexte de vouloir lutter plus efficacement contre la criminalité environnementale, les fédéralistes font avancer encore un peu plus leur projet d'une union fédérale avec à sa tête Mme von Der Leyen et la Commission européenne. Le chemin à suivre nous semble pourtant tenir dans les alinéas 19 et 20 de l'article unique de votre proposition de résolution, qui visent à renforcer la coopération entre les États membres. Malheureusement, l'alinéa 21 compromet pour nous ce texte. Vous l'aurez compris, nous ne voterons pas cette proposition de résolution européenne qui brade notre souveraineté nationale.

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Le groupe Modem vous remercie pour ce travail, ne serait-ce que parce qu'il permet de mettre en lumière le parquet européen, qui est une construction assez unique dans son genre. Il s'agit en effet d'une coopération qui dispose d'un pouvoir de poursuite direct devant les tribunaux de l'Union, ce qui est assez révolutionnaire dans un domaine hautement régalien. Comme indiqué dans votre proposition de résolution, la criminalité environnementale se classe au quatrième rang mondial des activités criminelles les plus importantes, posant ainsi une menace grave à l'environnement ; elle est également une source de financement pour les groupes armés et terroristes.

À l'échelle internationale, les initiatives se multiplient pour prévenir et combattre cette forme de criminalité avec des résolutions adoptées par les Nations unies entre 2019 et 2021. Sur le plan national, des mesures concrètes ont été prises comme l'adoption de la loi climat et résilience du 22 août 2021 créant de nouvelles infractions pénales liées à l'environnement.

Cependant, les lacunes persistent au niveau européen en matière de législation pénale environnementale. Une avancée majeure a été réalisée hier avec l'adoption par le Conseil de la directive sur la criminalité environnementale remplaçant un système de 2008 et renforçant la coopération judiciaire entre les États membres. Cette directive est une opportunité à saisir pour créer une dynamique d'entraide judiciaire en matière environnementale.

La réforme que vous proposez nous apparaît justifiée pour au moins trois raisons. Elle offre d'abord la perspective d'obtenir un accord politique, d'autant que la question n'est pas nouvelle : elle était déjà évoquée dans une résolution de mai 2021 du Parlement européen. Elle reconnaît ensuite que le renforcement de la réponse pénale dans les affaires environnementales internationales dépasse les limites du modèle intergouvernemental actuel sur lequel repose par exemple l'agence Eurojust. Le rapport annuel d'Eurojust de 2021 souligne que 1 % de son activité opérationnelle sur la période 2014-2018 représentait des saisines en matière d'atteinte à l'environnement. La réforme vise enfin à étendre les compétences du parquet européen à des infractions liées à la criminalité organisée du trafic des déchets, du trafic de faunes et flores protégés ou de substances dangereuses. De telles infractions constituent aujourd'hui un trafic à risque pénal nul.

Le groupe démocrate votera en faveur de la résolution mais a déposé deux amendements.

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Ces cinq dernières années, l'Europe s'est dotée d'objectifs ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de protection de l'environnement. Le Pacte vert pour l'Europe introduit en 2019 a été suivi du paquet législatif Fit for 55 et du plan industriel associé pour les secteurs stratégiques et les matières critiques. Le Parlement européen et le Conseil ont récemment approuvé une révision de la directive de 2008 relative à la protection de l'environnement par le droit pénal. Elle inclut à présent de nouvelles infractions relatives au commerce illégal de bois, à l'épuisement des ressources en eaux, aux violations graves de la législation européenne sur les substances chimiques ou encore à la pollution causée pour les nappes phréatiques. Malgré ces ambitions affichées pour le climat et l'environnement, l'Union européenne ne dispose pas, à ce jour, d'une institution pouvant poursuivre les infractions à l'environnement. Cela est dommageable pour deux raisons.

Premièrement, de par le caractère transfrontière des infractions à l'environnement, l'échelle européenne semble la plus appropriée pour les poursuites, tous les États n'ayant pas le même zèle à poursuivre ces infractions. Deuxièmement, parce que ces crimes peuvent générer des profits très élevés, présenter un risque relativement faible de détection et sont souvent commis par des groupes criminels organisés.

Le rôle de parquet européen est aujourd'hui limité aux infractions pénales portant atteinte au budget de l'Union. Si les enjeux environnementaux n'entrent pas dans le champ des compétences par le biais du budget de l'Union européenne, lui-même dédié pour un tiers au Pacte vert, le parquet européen ne peut poursuivre directement les infractions à l'environnement. Au vu des ambitions de l'Union mais aussi de l'augmentation et du caractère transfrontière de cette criminalité, une extension de la compétence du parquet européen sur ce domaine serait donc la bienvenue. Le groupe Horizons votera en faveur de cette proposition de résolution européenne.

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Je remercie les collègues qui m'apportent leur soutien et qui ont bien cerné les enjeux de cette proposition de résolution : il ne s'agit évidemment pas de supplanter les juridictions nationales. Je suis très attachée à l'idée de souveraineté et aux conséquences qu'elle emporte. Ici, il s'agit de complémentarité.

La criminalité environnementale constitue un sujet complexe qui nécessite, dans tous les cas, que les États coopèrent entre eux. Le niveau de coopération qui existe aujourd'hui n'est pas suffisant pour un certain nombre d'affaires. Or les enjeux écologiques sont suffisamment graves pour qu'on se dote des moyens nécessaires au traitement de ces infractions. C'est le raisonnement qui avait prévalu lors de la création du parquet européen sur la fraude financière : les détournements de plusieurs milliards d'euros par an sur les recettes de l'Union européenne que les États ne parviennent pas à empêcher à l'échelle nationale ou intergouvernementale devaient être combattus. Les mêmes questions relatives à la souveraineté se sont posées à l'époque. Au fur et à mesure des débats, les parties prenantes ont compris qu'une meilleure coopération n'empêcherait pas les juridictions nationales de continuer à exister sur ces sujets. L'exemple de la France le prouve, avec le Parquet national financier. Le parquet européen constitue une strate supplémentaire pour tout ce que nous ne parvenons pas à appréhender au plan national. Ce qui m'intéresse c'est que la justice puisse se déployer au niveau local et à l'échelon le plus grand afin de récupérer de l'argent détourné ou pour mieux protéger l'environnement.

J'entends donc les craintes de certains de mes collègues mais en matière de protection environnementale elles ne sont pas justifiées. Peut-être que sur la question de la lutte contre le terrorisme j'aurais fait preuve d'un peu plus de réserves, car il s'agit d'un sujet stratégique pour chacun des États qui peuvent estimer que sa gestion relève de la souveraineté nationale. Ici, le champ est différent et je pense qu'il y a l'espace pour un parquet spécialisé au niveau européen. Je rappelle aussi que ce texte est une résolution, un vœu, et que les discussions concrètes autour du dispositif n'interviendront que dans un second temps.

Amendement n° 1

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Il s'agit de remplacer le mot « augmenter » par le mot « adapter » à l'alinéa 17 et insérer après « parquet européen » « en fonction du volume des dossiers annuels traités ». Mon groupe est d'accord avec la nécessité d'augmenter le budget et les effectifs du parquet mais, en pratique, il serait bien de conditionner cette augmentation à certains critères. L'unanimité sera requise au Conseil pour étendre ces compétences et, à l'heure où les ressources financières et humaines sont restreintes, nous pensons qu'il serait bienvenu de montrer qu'augmenter les moyens constitue une nécessité sur la base du volume de dossiers.

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Dans les faits, le parquet européen se déploie. 2 000 enquêtes sont en cours. Ce sont des enquêtes qui sont techniquement difficiles. En France, on compte six procureurs européens. Ils seront bientôt sept. Ils sont dix-neuf en Allemagne. Si l'on ajoute une compétence comme je le propose, j'ai tendance à dire que l'on va augmenter les moyens en conséquence. Je propose de retirer cet amendement pour qu'on le retravaille en vue du débat en séance publique.

L'amendement n° 1 est retiré.

Amendement n° 2

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À l'alinéa 22, nous proposons de remplacer les mots « spécialiser celui-ci » par « lui donner la compétence ». Spécialiser implique en effet, selon nous, une restriction des compétences du parquet européen tandis que notre formulation suggère la possibilité d'acquérir de nouvelles compétences, pas nécessairement exclusivement dans le domaine de la criminalité environnementale.

L'amendement n°2 est adopté.

L'article unique de la proposition de résolution européenne est adopté

La proposition de résolution européenne est donc adoptée.

La séance est levée à 15 h 45

Membres présents ou excusés

Présents. – M. David Amiel, M. Pieyre-Alexandre Anglade, Mme Annick Cousin, Mme Laurence Cristol, Mme Naïma Moutchou, M. Christophe Plassard, M. Alexandre Sabatou, Mme Sabine Thillaye

Excusés. – Mme Marietta Karamanli, M. Charles Sitzenstuhl, Mme Liliana Tanguy