Commission des affaires européennes

Réunion du jeudi 27 juillet 2017 à 10h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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Jeudi 27 juillet 2017

Présidence de Mme Sabine Thillaye, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 10 heures.

I. Audition de M. Pierre Moscovici, Commissaire européen aux Affaires économiques et financières, à la Fiscalité et à l'Union douanière

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

M. Pierre Moscovici, je vous remercie de votre présence dans cette enceinte qui vous est familière. Vous êtes le premier Commissaire européen que nous recevons depuis le début de cette législature.

Nous vous entendons en tant que membre français du collège des Commissaires et je propose à mes collègues de ne pas se limiter aux seules questions relevant de votre portefeuille. Une autre audition, commune avec la commission des finances, est prévue le mercredi 4 octobre prochain. Nous aurons ainsi une possibilité supplémentaire de vous interroger sur les questions économiques, financières et fiscales à la veille de l'examen du premier projet de loi de finances du quinquennat.

Le résultat des élections présidentielles et législatives en France, après la séquence calamiteuse du Brexit, nous oblige à réformer le fonctionnement de l'Union européenne et à répondre davantage aux préoccupations de nos concitoyens, qui sont inquiets face à un contexte mondial lourd de menaces : insécurité liée au terrorisme et aux conflits, dérèglement climatique, instabilité économique et financière, mais aussi chômage. Nous sommes persuadés que l'Union européenne constitue la meilleure réponse à ces problèmes. Encore faut-il qu'elle conduise des politiques lisibles et efficaces dans un cadre institutionnel clair et cohérent.

Nombre de ces questions relèvent de votre portefeuille. Comme vous rentrez de Grèce, nous souhaitons aussi votre éclairage sur la situation de ce pays, qui a fait le choix de rester dans la zone euro et connaît une situation politique, économique et sociale dramatique. Quels enseignements en tirez-vous pour la gouvernance de la zone euro et en matière d'Union bancaire ? Quelles perspectives pouvons-nous envisager, notamment après les élections allemandes de septembre prochain ?

Je sais par ailleurs que vous suivez avec beaucoup d'attention le sujet de l'harmonisation de l'impôt sur les sociétés, qui a été à l'ordre du jour du dernier Conseil des ministres franco-allemand : nous aimerions vous entendre sur ce sujet, comme sur celui de l'harmonisation sociale, qui se pose notamment à travers la question des travailleurs détachés.

Permalien
Pierre Moscovici, Commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l'Union douanière

Merci d'avoir répondu favorablement à ma proposition d'organiser cette rencontre : pour moi qui suis le Commissaire français, il était important d'avoir rapidement un dialogue avec cette nouvelle Assemblée et avec votre commission, dans un lieu que je connais bien, en effet. J'y suis venu souvent comme ministre et j'ai été vice-président de la commission des affaires européennes lors d'une législature antérieure. Comme je l'ai dit à votre présidente, je suis tout à fait à l'écoute de votre commission et prêt à travailler avec vous, ainsi que mes équipes.

Les prérogatives des Parlements nationaux en matière d'affaires européennes se sont considérablement renforcées ces dernières années. Nous serons amenés à nous voir régulièrement et à débattre notamment des budgets français dans le cadre du semestre européen. Si les lois de finances nationales ne sont pas encadrées, elles sont néanmoins surveillées de manière étroite. L'avant-projet de budget est ainsi transmis à la Commission européenne. Elle a un pouvoir théorique, qu'elle n'a jamais exercé et je souhaite d'ailleurs qu'elle ne le fasse pas, de rejeter un budget. Il y a toutefois des échanges extrêmement fréquents et je viens de toute façon ici de manière régulière pour des auditions conjointes avec la commission des finances.

Étant non seulement Commissaire aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l'Union douanière, mais aussi Commissaire français, je souhaite pouvoir échanger avec vous en dehors de mon portefeuille, dans les limites bien sûr de ma compétence : je ne peux pas prétendre connaître aussi bien tous les sujets.

Je sais que vous aurez à vous rendre à Bruxelles dans le cadre de vos missions parlementaires et je veux vous dire ma disponibilité pour échanger sur les différents rapports qu'il vous reviendra de préparer, ainsi que la disponibilité de mes équipes. Je suis notamment venu aujourd'hui avec mon chef de cabinet et avec le chef de la représentation de la Commission à Paris.

Pour cette première rencontre, je voudrais commencer par vous livrer ma lecture politique du moment européen assez unique dans lequel nous nous trouvons. J'en suis d'autant plus conscient que je m'occupe de ces sujets depuis longtemps : ma première élection au Parlement européen date d'il y a 23 ans et je suis devenu ministre des affaires européennes il y a 20 ans.

Le moment extrêmement particulier que nous vivons constitue une toile de fond pour l'action du nouveau gouvernement et de votre Assemblée. C'est aussi un point important pour un Président et une majorité qui ont fait de la question européenne un axe central et qui portent un discours structuré et positif à son sujet.

Un nouvel élan européen est à la fois possible et souhaitable. Il faut se garder des grandes phrases, des impressions superficielles et de l'idée que l'on pourrait passer subitement de l'ombre à la lumière, pour reprendre une expression utilisée par Jack Lang en 1981, mais on peut raisonnablement affirmer que l'optimisme est de retour en Europe. C'est la conjonction de plusieurs facteurs.

À l'échelle mondiale, d'abord, il y a la question du leadership américain : nos visions divergent sur un certain nombre de sujets, en particulier les échanges commerciaux - vous avez vu les batailles qui se sont déroulées au dernier G20 sur la question du protectionnisme –, sur le réchauffement climatique, M. Trump ayant confirmé son retrait de l'accord de Paris à l'occasion de la même réunion du G20, sur le multilatéralisme en tant que tel, et nous constatons aussi une certaine agressivité à l'égard de l'Union européenne. Cela plaide pour un leadership européen renforcé : quand un grand partenaire est aussi assertif et agressif, la conclusion est qu'il faut être extrêmement uni. D'ailleurs, j'ai parfois l'impression que M. Trump est le meilleur agent électoral de l'idée européenne.

Un deuxième facteur est la tournure du Brexit, que vous avez qualifié de « séquence calamiteuse » – je ne m'exprimerai pas ainsi, pour ma part, en tant que Commissaire européen. Quand je regarde la façon dont la négociation se noue et celle dont le débat se déroule, il me semble que c'est le Royaume-Uni qui a le plus à perdre. Il n'y a pas eu de « printemps des référendums » sur la sortie de l'Union, alors que tout le monde imaginait il y a un an une contagion. Il n'y a pas non plus de rupture de l'unité des 27 dans la négociation, ce qui est décisif. Notre compatriote Michel Barnier, le négociateur de la Commission européenne, a naturellement le plein soutien de cette dernière, mais aussi de tous les États membres. Sortir de l'Union apparaît aujourd'hui comme une voie hautement hasardeuse, potentiellement très coûteuse pour les uns et les autres. Là encore, cela plaide pour une unité renforcée de ceux qui restent : les 27 États membres qui constituent l'Europe de demain et les 19 qui ont en commun l'euro et représenteront 85 % du PIB de l'Union européenne à 27. L'intégration de la zone euro est un sujet absolument crucial pour l'avenir, mais j'y reviendrai.

Il y a aussi l'élan donné par les dernières élections en France. J'ai pris beaucoup de recul par rapport à la vie partisane, mais je voudrais dire comment la situation est vécue à Bruxelles, quelles que soient les sensibilités politiques. Les membres de la Commission et surtout nos partenaires européens ont incontestablement été très soulagés : il y avait la crainte que ne l'emporte une candidate d'extrême droite, appartenant à un parti populiste. L'impression dominante est que la France, un pays clef, a échappé à ça. À cela s'ajoute le fait que le nouveau Président de la République a mis l'engagement européen au coeur de sa campagne. Le contexte est par ailleurs celui d'un coup d'arrêt donné au populisme. L'atmosphère de cette réunion aurait été beaucoup plus inquiète si elle avait eu lieu il y a un an : on était alors à la veille d'une nouvelle élection présidentielle en Autriche, la première s'étant terminée par un score de 50,3 % contre 49,7 %, et tout le monde pensait que le candidat populiste allait cette fois l'emporter ; on voyait par ailleurs M. Wilders devenir sinon le Premier ministre des Pays-Bas, du moins arriver en tête du scrutin ; il y avait aussi l'élection présidentielle à venir en France.

Aujourd'hui, l'impression est qu'il existe un « momentum » européen, une fenêtre d'opportunité. Il faut néanmoins faire preuve de lucidité : une fenêtre peut s'ouvrir mais aussi se refermer. On doit être capable de saisir le moment qui s'offre. Si l'on attend trop, si l'on ne dit pas et ne fait pas ce qu'il faut, alors la fenêtre se referme et l'on revient au « statu quo ante ». Par ailleurs, si les populistes ont perdu des batailles en Europe, ils n'ont pas perdu la guerre et ne désarment pas. Mme Le Pen est tout de même arrivée au deuxième tour de l'élection présidentielle en France, avec près de 11 millions de voix. M. Wilders a perdu les élections, mais son parti est le deuxième des Pays-Bas. En Autriche, le résultat de la seconde élection présidentielle a été de 53 % contre 47 %, ce qui est mieux que la première fois, mais ne constitue pas un triomphe. Au Parlement européen, les populistes restent une force puissante, qui ne relâche pas ses efforts. Ne pensons donc pas que tout est fait : tout reste au contraire à réaliser.

Dernier facteur, dans une perspective quelque peu marxiste de rapport entre les infrastructures et les superstructures, la performance économique européenne s'améliore. Les indicateurs sont clairement passés au vert : la croissance européenne devrait se stabiliser à 1,9 % en 2017 et 2018 ; il y a désormais peu ou pas d'écart entre l'Europe à 27 et l'Europe à 19, c'est-à-dire la zone euro, qui a elle aussi réalisé un effort, avec un cortège heureux de création d'emplois et de recul du chômage. Cette amélioration donne davantage confiance en l'Europe que la période de crise dont nous sortons.

Voilà mon premier message d'ensemble : oui, il y a une opportunité, mais il faut la saisir. Le moment actuel pourrait être sinon fugace, du moins fugitif.

J'ajouterai à cela quelques éléments, plus détaillés, sur le contexte économique car c'est aussi une clef. Nous sommes à un tournant, marqué par une sorte d'alignement des planètes.

Les signes d'amélioration sont nets : la reprise est dans sa cinquième année, avec 16 trimestres consécutifs de croissance dans l'Union européenne et cela se voit maintenant davantage, car le niveau de la croissance, qui tend vers 2 %, est comparable à celui des États-Unis, dans un contexte d'amélioration de la croissance mondiale. Sur le front des finances publiques, le tableau s'améliore aussi : le déficit public devrait représenter 1,3 % du PIB dans la zone euro en 2018, contre 6 % en 2010. L'amélioration est donc spectaculaire et généralisée.

Je veille à ce que la Commission accompagne les États membres dans ce redressement, n'étant pas un partisan de la discipline, de la sanction, de la punition et de l'austérité, mais du sérieux et du respect des règles, dans la flexibilité, l'intelligence et le dialogue. La Commission a cette philosophie et va la garder. Cela ne signifie pas que l'on peut faire n'importe quoi, parce que le respect des règles est essentiel en la matière. Il existe plusieurs méthodes pour les faire respecter – la voie disciplinaire ou le dialogue – mais il n'y a pas de manière d'éviter les règles. Elles sont partagées. Ce n'est pas la Commission qui les impose : elles ont été fixées par les traités et résultent d'engagements pris par tous les États membres, y compris un pays qui nous est cher et commun.

Le taux d'endettement devrait poursuivre sa décrue l'an prochain, pour passer sous la barre des 90 %. Le chômage devrait se situer sous 9 % en 2018 dans la zone euro, soit le point le plus bas depuis 2009. Ce sont de vrais résultats, certes encore insuffisants car il faudra faire reculer encore le niveau du chômage, mais qui récompensent les efforts consentis et effacent peu à peu les séquelles de la crise.

Tous ces indicateurs sont importants pour la France, car sa performance économique est aussi mesurée à l'aune de ses voisins. Il en va de même pour les performances budgétaires. La France doit vraiment respecter ses engagements en matière de déficit public. J'évoquais tout à l'heure l'année 2010 : hors Royaume-Uni, 24 pays étaient alors en procédure de déficit excessif ; ils seront l'an prochain au nombre de deux, l'Espagne et la France. L'Espagne, dont le taux de croissance tangente 3 %, est quasiment assurée de passer nettement sous la barre. Il ne serait pas concevable que la France ne le fasse pas aussi : elle ne peut pas choisir de rester à l'écart des engagements. Elle a vocation à être un leader européen, elle en a l'ambition et les capacités, mais pour cela elle doit être exemplaire chez elle. C'est ma conviction et le discours que je tiens avec les autorités françaises.

À titre de parenthèse, il est possible de respecter les engagements européens sans accroître les inégalités. La Commission ne dit jamais aux gouvernements comment réduire leurs déficits. Dans la conception qui est la mienne en tant que Commissaire en charge de ces sujets, et que j'avais déjà en tant que ministre, les États membres sont libres de leurs moyens et comptables de leurs choix. Nous avons des finalités communes et des règles partagées, mais ce n'est pas à la Commission de dire à un gouvernement s'il doit faire davantage de baisses d'impôts ici ou plus d'économies là. La composition budgétaire est du ressort des États membres, c'est leur liberté. Il y a plusieurs manières de réduire le déficit et les options politiques sont parfaitement libres.

Vous m'avez interrogé sur la Grèce, pour laquelle les bonnes nouvelles s'accumulent. J'étais sur place il y a deux jours, au moment où le pays faisait d'ailleurs un retour plutôt réussi sur les marchés financiers. La Grèce reçoit depuis des années une assistance financière des États membres de la zone euro et elle franchit avec succès, depuis le programme de juillet 2015, les différentes étapes. Il y a dans ce pays une souffrance économique et sociale considérable qui n'est pas due à l'austérité, même s'il peut y avoir un débat sur les causes. Pour moi, la base est que les comptes publics grecs reposaient sur une fiction et l'économie sur un château de sable. Le mouvement de réformes était donc incontournable. Est-on allé trop loin ? Sans doute. Les réformes étaient-elles indispensables ? Sans doute aussi. Toujours est-il qu'un effort considérable a été fait pour moderniser l'économie, dans ses structures, et que ces efforts sont en train de payer. Il reste encore des pas à accomplir pour en arriver à une situation normale. J'en parlais mardi avec Aléxis Tsípras et je n'hésite pas à employer ce terme : je souhaite que la Grèce soit un pays normal dans la zone euro, respectant les règles comme les autres, sans plus d'obligations de moyens que les autres, et avec une discussion sur les finalités comme les autres.

Je crois que l'on voit vraiment la lumière au bout du tunnel en Grèce. La croissance est de retour : le Gouverneur de la Banque centrale me disait qu'elle serait d'environ 1,8 ou 2 % cette année et de 2,5 % l'année prochaine. Le solde budgétaire est désormais à 1 %, contre 15 % en 2010. Il faut être conscient de l'effort de consolidation considérable qui a été réalisé. Les marchés ont d'ailleurs salué positivement la première émission obligataire de la Grèce depuis deux ans.

Vous m'avez interrogé sur les leçons que l'on peut en tirer. Pour avoir été dans la salle de l'Eurogroupe depuis cinq ans, d'abord comme ministre des finances puis comme Commissaire européen, je suis très choqué du déficit démocratique massif sur cette question, comme sur d'autres. L'Eurogroupe est très efficace et utile, mais je ne trouve pas normal que les 19 ministres des finances, le Commissaire compétent, le président de la Banque centrale européenne (BCE), la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) quand il s'agit de la Grèce et le responsable du Mécanisme européen de stabilité (MES) puissent prendre des décisions sans contrôle démocratique par le Parlement européen, les Parlements nationaux, les médias et les citoyens. Je plaide pour plus de démocratie et moins de technocratie, sans ranger la Commission parmi les organes technocratiques : elle fait plutôt partie des organes politiques. On lui reproche parfois de l'être trop, mais il me semble qu'elle l'est juste comme il faut.

Il serait très important d'ouvrir les portes, pas totalement car une négociation suppose toujours une part de secret – si l'on négocie à ciel ouvert, on donne ses cartes –, mais il faut quand même savoir ce qui passe. C'est une des raisons pour lesquelles je plaide en faveur d'un ministre des finances de la zone euro, qui soit aussi Commissaire européen. Ce n'est pas un plaidoyer « pro domo », car il s'agira de mon successeur, du moins je l'espère. Il pourra aller s'expliquer devant les Parlements. Tant que l'Eurogroupe restera une formation totalement informelle et intergouvernementale, comment pourra-t-il y avoir un contrôle ?

S'agissant du cas grec, la France et la Commission européenne ont toutes deux compris ce qu'était le pays – je ne parle pas en l'occurrence des gouvernements grecs – et l'ont appuyé. Mais j'aimerais vraiment que l'on puisse passer à un autre stade dans le traitement des problèmes. Vous voyez que c'est pour moi une question presque affective.

Voilà pour le paysage, où tout n'est pas rose. La reprise européenne reste fragile et atypique. Nous avons d'abord une inflation très basse, même si la politique monétaire de la BCE reste accommodante. Pour le traduire autrement, il y a toujours un problème de demande en zone euro. La reprise est par ailleurs inégale entre les États membres et en leur sein. Le taux de chômage allemand est à peu près deux fois moins élevé que celui de la France et quatre fois moindre que celui de l'Espagne. Il y a aussi des excédents d'un côté et des déficits de l'autre. Les divergences sont très fortes en matière de finances publiques, ce qui crée de vrais problèmes, et il en est de même pour l'investissement.

Il est très important que la France contribue pleinement à la reprise. Avec l'Allemagne, elle représente près de 50 % du PIB de la zone euro, qui comptera elle-même pour 85 % de l'économie des 27 après le Brexit, comme je viens de le souligner. C'est dire le potentiel d'entraînement du moteur franco-allemand quand il tournera à plein régime.

La question de l'impact du Brexit reviendra probablement de manière récurrente dans les années à venir. C'est un sujet qui mobilise beaucoup de ressources et d'énergie à la Commission. Nous discutons avec un partenaire dont il faut reconnaître qu'il est très affaibli par les dernières élections, quel que soit le jugement que l'on peut porter : on a affaire à un « Hung Parliament », où la majorité est difficile à trouver alors que l'objectif était de la renforcer. Ce n'est donc pas simple. Dans l'immédiat, le Brexit met plutôt du plomb dans nos chaussures car il interfère avec le calendrier et la substance de nombreux dossiers. Il faut donc vraiment s'efforcer de réussir la négociation et d'inventer une nouvelle relation, intelligente, approfondie et équilibrée avec ce pays. Le Royaume-Uni ne sera certes plus membre de l'Union, mais il restera un pays européen, un allié, un membre du G20 et du G7, ainsi qu'un partenaire pour la sécurité et la défense, ainsi qu'en matière économique.

C'est dans ce contexte qu'un important débat politique s'est engagé au printemps dernier sur l'avenir de l'Europe.

Alors que la position des États-Unis est incertaine, il faut réfléchir à ce que nous voulons ensemble et à ce que nous pouvons faire de mieux en matière de défense européenne. Au-delà de la personnalité de M. Trump, soyons conscients que la relation va changer durablement. Le temps est donc venu pour les Européens de penser à leur propre défense, quoi qu'il arrive et quel que ce soit le prochain président des États-Unis.

Il s'agit par ailleurs de mieux construire le rôle de l'Europe dans la mondialisation, qui est source de croissance mais aussi d'inquiétude devant l'accroissement des inégalités politiques, économiques, sociales et fiscales. De ce point de vue, la Commission a un peu rompu avec une tradition parfois considérée comme très libérale, notamment dans un papier sur la mondialisation qui met beaucoup mieux l'accent qu'auparavant sur les avantages et les inconvénients.

Dans un domaine relevant plus directement de ma compétence, il faut aussi terminer le travail sur l'Union économique et monétaire. Ma conviction rejoint ici celle des autorités françaises : je crois indispensable de finaliser l'Union bancaire. Elle a déjà fait des progrès considérables, mais d'autres restent à faire. C'est une nécessité pour empêcher le retour des crises financières. On gère des questions bancaires en Espagne, en Italie et au Portugal avec des outils nouveaux, mais nous avons besoin d'aller jusqu'au bout en la matière. J'appelle de mes voeux une intégration plus poussée de la zone euro, que je souhaite plus active, grâce à un budget de la zone euro tourné vers l'investissement, mieux pilotée – c'est le rôle du ministre des finances de la zone euro que j'évoquais – et plus démocratique grâce à un Parlement de la zone euro. Sa composition peut faire l'objet de débats, notamment sur l'association des Parlements nationaux au Parlement européen, et vos réflexions seront précieuses. Je suis d'ailleurs prêt à y contribuer. Il est temps de passer du stade de la stabilité – comme le disait Jacques Delors, l'euro protège mais ne dynamise pas – à celui de la politique économique et de la démocratie.

Sur tous ces sujets, la Commission a publié au premier semestre 2017 des documents de réflexion qui font l'objet de discussions entre les Gouvernements européens. Nous attendons bien sûr de la partie française qu'elle soit un acteur éminent dans les débats. Alors que la crise s'éloigne, ce qui nous laisse enfin un répit pour discuter des questions d'avenir, la France doit apporter une contribution sur le fond et faire valoir ses propositions, que ce soit sur l'articulation avec le rôle du Parlement européen et de la Commission ou encore sur la part d'intergouvernemental et de communautaire.

Tout cela fait partie des sujets que vous aurez sans doute à traiter. J'invite bien sûr l'Assemblée nationale française à être un acteur de la démocratisation de l'Union européenne, par les travaux que vous menez et par vos propositions. Il faudra que la France soit très présente dans le débat que les menaces politiques continuent de faire planer sur l'Europe. De nombreuses élections se profilent, en Allemagne, en Autriche, en République tchèque et en Italie : le paysage politique européen n'est pas figé et il peut même évoluer beaucoup dans les douze prochains mois. La menace populiste, je le répète, n'est pas écartée. Rien ne dit qu'il s'agit d'un coup d'arrêt durable. Nous avons donc besoin de continuer à pédaler sur la bicyclette européenne et la France doit être la première à le faire. Pour contrer les populistes, il faudra encore et toujours leur opposer des résultats. C'est ce que les citoyens attendent de l'Europe.

J'en viens à la question de la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales, qui correspond à l'autre volet de mon portefeuille à la Commission. Nous avons fait plus de progrès en Europe depuis deux ou trois ans qu'au cours des vingt années précédentes.

La fraude et l'évasion fiscales sont des phénomènes coûteux budgétairement, les « fuites » dues à l'évasion fiscale s'élevant à au moins 160 milliards d'euros par an pour la TVA et à 50 milliards d'euros pour la seule TVA transfrontalière à l'échelle de l'Union européenne. C'est aussi coûteux politiquement, parce que cela fait reposer la plus grande partie de l'effort fiscal sur d'honnêtes contribuables. L'idée s'est également développée, avec les scandales « LuxLeaks », « BahamaLeaks » ou « Panama Papers », qu'il faut que les multinationales paient leur juste part d'impôt là où elles génèrent des profits. C'est une attente citoyenne essentielle qui doit être entendue. Dans ce contexte, la Commission s'efforce de promouvoir une politique s'attaquant à toute la chaîne de fraude et d'évasion fiscales.

S'agissant des entreprises, notre principe cardinal est, je le répète, que les profits doivent être taxés là où ils sont générés. Concrètement, nous avons supprimé les mécanismes d'optimisation fiscale les plus répandus pour contourner l'impôt en transférant les bénéfices dans des pays à faible fiscalité.

Nous avons aussi proposé que les entreprises rendent publiques, pays par pays, certaines données fiscales et comptables. Il existe déjà depuis un an l'échange automatique d'informations sur les données fiscales et comptables, mais je suis pour que le « reporting » devienne public et transparent. Si cela pouvait être un combat de ce Parlement et de votre commission, je vous en remercierais, car ce n'est pas gagné : des entreprises et certains gouvernements sont assez résistants ou réticents. Cette mesure est pourtant indispensable. Quand j'étais ministre des finances, j'ai fait voter une loi instaurant un « reporting » public sur les activités bancaires, et les banques françaises n'en sont pas mortes. Elles se portent plutôt mieux que d'autres en Europe. Ce serait un beau défi de faire comprendre qu'il n'y a pas d'opposition entre compétitivité, investissement et transparence.

Nous traitons par ailleurs la question des intermédiaires, les conseillers fiscalistes, les consultants et parfois les banques, qui vendent des schémas d'évasion fiscale à leurs clients. Si la proposition que j'ai faite en juin est adoptée par les États membres, alors ces acteurs auront l'obligation de déclarer de tels schémas aux administrations fiscales nationales, lesquelles pourront ainsi identifier les faiblesses des systèmes fiscaux et les corriger.

Nous avons supprimé le secret bancaire en Europe, parfois après des changements constitutionnels, comme au Luxembourg ou en Autriche, et par des conventions bilatérales avec la Suisse, Saint-Marin, le Liechtenstein, Andorre et Monaco, de sorte que la règle est désormais l'échange automatique d'informations. Cela signifie la fin du secret bancaire depuis janvier 2017 et cela va continuer à se mettre en oeuvre, notamment avec la Suisse.

En bout de chaîne, nous avons rendu automatique l'échange d'informations entre fiscs nationaux sur les rescrits fiscaux. Je ne suis pas pour la suppression de ces prévisions fiscales qui sont liées, par exemple, aux investissements d'une entreprise, car il est utile d'avoir de la prévisibilité. Mais si la prévisibilité est une chose, l'opacité et l'optimisation en sont une autre. Il s'agit d'empêcher les entreprises de faire du « shopping » en choisissant le pays européen le plus accueillant fiscalement.

La fraude et l'évasion fiscales étant de nature internationale, la lutte doit l'être également. Je dévoilerai d'ici à la fin de l'année une première liste européenne de paradis fiscaux mondiaux, assortie de sanctions. L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), que je respecte, a publié sa propre liste, ne comportant qu'un État, Trinité-et-Tobago. Je souhaite que la liste européenne soit plus fournie : j'ai peine à croire qu'il n'y ait qu'un paradis fiscal dans le monde. Ce sera un gage de crédibilité et il revient aux États membres de nous donner l'autorisation en la matière.

Au-delà de ces aspects, nous voulons proscrire le trafic de biens culturels, qui finance par exemple les activités de Daech. Il s'agit à la fois de protéger le patrimoine culturel de l'humanité, de faire prévaloir nos valeurs face à un véritable assaut idéologique et de tarir les sources de financement du terrorisme. C'est pourquoi nous voulons imposer des normes de contrôle douanier beaucoup plus substantielles aux vendeurs et aux intermédiaires. Je comprends qu'ils sont tout à fait prêts à s'engager dans ce mouvement.

Sur la fiscalité, nous avons des projets structurants allant au-delà de la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales.

Il faut absolument lutter contre la fraude à la TVA transfrontalière, dite à « carrousel », qui est la source de pertes de recettes considérables et à l'origine de financements pour la criminalité organisée. Il faudrait simplement que les opérations transfrontalières soient suivies comme des opérations nationales. Je ferai des propositions à l'automne sur ce sujet.

Il y a aussi la réforme structurelle et structurante qu'est l'ACCIS, l'Assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés, qui doit d'abord permettre de rapprocher les bases fiscales, mais aussi d'éviter les mécanismes de « shopping » que j'ai mentionnés. On aura besoin de toute l'énergie politique de la France pour faire adopter cette proposition. Une première tentative a échoué à la fin des années 2000 et au début des années 2010, mais j'ai tenu à ce que l'on reprenne ce dossier, dont je mesure la difficulté. Je le crois tout à fait indispensable.

Puisque nous parlons de fiscalité, permettez-moi de faire une nouvelle parenthèse : la France doit veiller à la qualité de sa législation et à sa conformité avec le droit européen, particulièrement dans le domaine fiscal. Cela fait largement partie des prérogatives de votre commission. Je pense en particulier à la transposition des directives, qui constitue aujourd'hui une part importante du travail législatif national, même s'il ne faut pas s'abandonner aux fantasmes. On a prétendu que 80 % de la législation nationale est en réalité du droit dérivé, ce qui est totalement bidon, mais il y a quand même du droit communautaire dans beaucoup de textes. Quand la France transpose mal les directives ou quand elle propose de nouvelles lois qui discriminent les contribuables et les entreprises selon qu'ils sont français ou européens, ce qui arrive assez régulièrement, elle est condamnée par la Cour de justice de l'Union européenne et doit payer des amendes se chiffrant en milliards d'euros. On me demande fréquemment de me prononcer sur des infractions : j'essaie de le faire avec intelligence, mais je préférerais ne pas avoir à le faire du tout. Lors de la préparation des lois, il faut être très vigilant.

Sur tous les sujets, la Commission s'efforce d'être ambitieuse et se tient à vos côtés. Les gouvernements nationaux ne peuvent pas tout faire. En matière législative, la Commission a le monopole de l'initiative, outre celui de l'exécution en bout de chaîne. Le rôle de la Commission consiste à être une force de proposition, ce qu'elle ne fait pas en apesanteur mais dans un cadre politique. Ce sont par ailleurs les États qui décident en fin de compte. La Commission agit aussi comme intermédiaire entre les capitales, ce qui fait que nous nous déplaçons beaucoup, afin d'aider à rapprocher les positions et de pousser en avant.

Je souhaite également que la Commission dialogue davantage avec les Parlements nationaux pour mieux expliquer son action et ses résultats. C'est d'ailleurs l'une des raisons de ma visite. Vous êtes dans vos circonscriptions les relais de l'Europe auprès des citoyens et vous constituez l'un des facteurs d'appropriation du projet européen. Ayant siégé dans cette commission, je sais que ses membres l'ont choisie parce qu'ils ont cet engagement européen. Comme je fais régulièrement des déplacements de terrain pour illustrer les réalisations de l'Union, je serais heureux que ce soit à vos côtés. Le Président Juncker a souhaité que les Commissaires soient une interface un peu privilégiée avec leur pays d'origine. Ma présence ici est très claire : elle est voulue par le Président de la Commission européenne. Nous sommes également des ambassadeurs de la Commission, bien qu'elle dispose de représentations dans les États membres.

Je suis prêt à répondre maintenant à vos questions, en vous priant néanmoins de m'excuser si elles s'éloignent trop de ma compétence : vous me pardonnerez de ne pas vous répondre en improvisant.

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Merci pour ce tour d'horizon et pour le tableau assez optimiste que vous avez brossé au début de votre intervention : cela nous donne aussi le courage d'affronter les défis. Nous sommes très conscients d'avoir une fenêtre de tir qu'il faut absolument saisir maintenant et je crois que tous les membres de notre commission sont d'accord pour s'engager dans cette voie.

Afin que le plus grand nombre de collègues puissent poser des questions, je vous propose de limiter la parole à une minute trente chacun, en commençant par les porte-parole des groupes.

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À force de caricaturer notre organisation européenne et de blâmer la dérive libérale de l'Union économique et monétaire, on a restreint la monnaie à un instrument purement marchand, soustrayant ainsi la signification politique de l'euro qui était celle prônée par le traité de Maastricht.

Vous l'avez dit tout à l'heure, le moment est venu de changer les choses. La zone euro doit être le coeur de l'intégration politique, tandis que le marché intérieur demeure le poumon de l'intégration économique. Encore faut-il innerver la zone euro d'une véritable solidarité, ce qui conduit à la question qui fâche : la dette.

Celle de la Grèce n'est pas soutenable et celles d'autres États membres risquent de ne plus l'être sous peu. On pourrait s'inspirer du plan Hamilton de 1789 pour la restructuration des dettes des États américains, oser le tabou de la mutualisation des dettes publiques. Les travaux économiques sont légion, mais la volonté politique fait désertion. Pourtant, ce serait le prélude à une européanisation du budget de la zone euro, gage d'une parlementarisation de la gouvernance économique, vecteur d'une démocratisation de l'Union. La monnaie aura alors fait le roi et la monnaie unique le gouvernement économique.

Le moment n'est-il pas venu de prendre appui sur l'acquis monétaire pour fonder une zone euro sur un projet de solidarité politique, faisant ainsi le choix de la différenciation au sein de l'Union européenne ? Plus généralement, comment la France peut-elle participer à l'aboutissement d'une Union économique et monétaire efficace et surtout cohérente ?

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Monsieur le commissaire, j'ai bien noté votre optimisme raisonnable. Paradoxalement, les institutions européennes n'ont jamais été autant décriées alors que nous n'avons jamais eu autant besoin d'Europe comme on le constate dans tous les domaines et quels que soient les chantiers que vous avez évoqués : l'harmonisation de l'impôt sur les sociétés, l'harmonisation sociale et la révision de la directive sur les travailleurs détachés, et tous les nombreux autres projets qui vous attendent.

Tout d'abord, je voudrais revenir sur la situation budgétaire de la France. L'an prochain, l'Espagne et la France seront les deux seuls pays en procédure pour déficit public excessif, le premier étant en phase de sortie. La Cour des comptes a noté l'insincérité du budget de 2017 et les 9 milliards d'euros qui manquaient à l'appel. Quel regard portez-vous sur la trajectoire économique et budgétaire de la France ?

Je sais que vous ne pouvez pas porter de jugement de valeur mais je me permets de citer l'un de vos propos qui me semble juste : « Il ne faut plus avoir la méthode du rabot mais essayer de procéder de manière plus intelligente et stratégique pour jouer non pas seulement sur la quantité de la dépense publique mais aussi sur sa qualité. Faisons des politiques d'économies intelligentes en France. » Considérez-vous que réduire l'aide personnalisée au logement (APL) de 5 euros par mois est une politique d'économies intelligente ou au contraire un coup de rabot aveugle ? De quelles réformes structurelles avons-nous besoin en Europe ?

S'agissant de la réforme de la TVA, je partage votre avis sur les opérations transfrontalières mais je voudrais insister sur un point qui concerne beaucoup la France : la TVA sur les poneys clubs des centres équestres. Notre pays a été condamné pour manquement à ses obligations. C'est un secteur qui compte 35 000 emplois directs et 24 000 salariés. À l'occasion de la présentation de ce plan d'action, serait-il possible d'envisager d'avoir une fiscalité adaptée aux activités équestres, c'est-à-dire un taux de TVA réduit ?

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À mesure que les motifs de la volonté du Gouvernement de faire une pause dans l'investissement concernant le canal Seine-Nord Europe s'éclaircissent, je n'ai de cesse de penser que la solution au problème se trouve, une fois de plus, au niveau de l'Europe.

La semaine dernière, lors d'une séance de questions au Gouvernement, notre Premier ministre, Édouard Philippe, a identifié un emprunt manquant de 700 millions d'euros dont « nul n'a proposé de prendre la garantie. » Xavier Bertrand, président du Conseil régional des Hauts-de-France, dont je salue l'initiative constructive, a proposé de prendre la part de l'État durant les deux ou trois premières années du chantier, faisant en quelque sorte une avance de trésorerie. Cette solution n'étant pas suffisante, je me tourne vers l'Europe pour finaliser le bouclage du financement.

L'Europe finance déjà 40 % de l'investissement dans le canal Seine-Nord Europe, soit 1,8 milliard d'euros. Le plan Juncker pourrait constituer la pièce manquante du puzzle car ce canal remplit les critères d'éligibilité au financement du fonds. C'est assurément un grand projet, portant sur un secteur d'avenir, qui concourt à la réalisation de la priorité sectorielle - emploi, croissance et investissement –, viable économiquement à long terme et dont le déclenchement des dépenses doit avoir lieu le plus rapidement possible. Monsieur le commissaire, pourquoi le plan Juncker ne garantirait-il pas l'emprunt de la somme restant à financer pour la construction du canal ?

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Mon analyse ne vous vise pas particulièrement, monsieur le commissaire, mais je pense que l'on sous-estime la rupture qui existe entre le peuple et l'Europe. Le Président de la République a expliqué qu'à force de présenter systématiquement l'Europe comme un bouc émissaire, les responsables nationaux ont instillé le virus de la défiance. À mon avis, nous sommes bien au-delà de cela. Il faut réorienter de façon radicale une politique européenne s'appuyant pour l'essentiel sur un libéralisme exacerbé qui provoque des ruptures terribles au niveau des territoires.

Depuis 2014, les banques ont reçu 767,3 milliards d'euros sous forme de prêts de la Banque centrale européenne (BCE), à des taux compris entre 0 % et 0,4 %, en plus des 1 700 milliards d'euros de garanties des plans de sauvetage élaborés à la suite de la crise de 2008. Ne pensez-vous pas qu'il vaudrait mieux créer, sous l'égide de la BCE, un fonds européen de développement solidaire et écologique qui permettrait de lancer un plan d'investissement global de l'Union européenne, soutenant une reconstruction productive, durable, sur des bases sociales de solidarité ?

Ne pensez-vous pas que le budget – qui représente seulement environ 1 % de la richesse créée dans l'Union européenne – est étriqué au point d'incarner une forme d'absurdité économique ? Dans une zone économique intégrée, refuser de se doter d'un budget conséquent ne revient-il pas à se priver totalement d'un levier décisif pour dynamiser l'activité ? Victor Hugo disait : « Ce que Paris conseille, l'Europe le médite. Ce que Paris commence, l'Europe le continue. » Qu'en pensez-vous ?

Vous dites souhaiter une Europe plus démocratique et notamment lutter contre la fraude fiscale. Pourrons-nous dire « veni mosco vici » dans quelques mois ? (Sourires.)

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Pierre Moscovici, Commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l'Union douanière

J'aurais regretté que cette question ne puisse pas être posée !

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Je vais aborder trois sujets : l'image de l'Europe ; l'influence de la France dans l'Union européenne ; les prochaines élections européennes.

Comment voulez-vous que les citoyens européens puissent avoir une belle image de nos institutions européennes quand le président de la Commission est un ancien Premier ministre du Luxembourg, c'est-à-dire d'un paradis fiscal – arrêtons de nous cacher derrière notre petit doigt à cet égard ? Comment le pourraient-ils quand le commissaire à la citoyenneté est un Hongrois, un pays où la citoyenneté n'est pas la priorité ? Comment le pourraient-ils quand un ancien président de la Commission européenne, M. Barroso, est devenu, de façon très médiatique, lobbyiste pour le compte d'une grande banque qui n'a pas toujours été très vertueuse dans la gestion de certaines affaires publiques ? Comment le pourraient-ils alors que nous n'avons guère entendu de réflexions et d'argumentations de la part de nos hommes politiques européens sur ces thématiques ?

Il n'est pas possible de laisser perdurer cette image. En tout cas, on ne peut pas dénoncer la mauvaise image de l'Europe sans argumenter contre ce type de nominations ou des comportements comme celui de M. Barroso.

Mon temps de parole étant écoulé, je vais m'en tenir à cette question.

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Pourriez-vous nous donner plus de détails sur l'harmonisation de la fiscalité européenne dont nous attendons beaucoup ? Pour l'instant, les réformes envisagées restent très opaques. Quelles seraient les modalités concrètes de mise en oeuvre de cette harmonisation et de l'assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés (ACCIS) ? Comment nous assurer que la France n'y perdrait pas ? Dans quelle mesure, ces réformes permettraient-elles de lutter contre l'évasion fiscale – un sujet qui vous tient à coeur ? Comment peut-on parvenir à remédier aux asymétries entre les systèmes nationaux d'imposition sans toucher aux taux ?

L'idée de taxe européenne sur les transactions financières – qui n'est pas sans rapport avec l'évasion fiscale – représente aussi un enjeu important. Mme Loiseau a indiqué la semaine dernière que les négociations stagnaient en raison du Brexit. Quant à certains banquiers, notamment Alain Papiasse, ils expliquent que des établissements financiers pourraient envisager de se délocaliser à Londres pour ne pas subir une telle taxe. Réagissant à ces propos, vous avez dit que le secteur bancaire devrait alors s'en expliquer. Quel est votre point de vue ? Pensez-vous que ces réformes sont nécessaires pour lutter non seulement contre l'évasion fiscale mais aussi contre les crises qui ont été dramatiques pour certains pays et peuples européens ?

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Pierre Moscovici, Commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l'Union douanière

Le problème de la dette est répandu mais de manière inégale dans la zone euro. La dette se situe en moyenne à 90 % du PIB dans la zone euro et à près de 97 % du PIB en France, tandis que ce taux atteint 187 % en Grèce, 133 % en Italie et 120 % au Portugal.

Les dettes sont faites pour être remboursées et il faut renoncer aux idées généreuses de moratoires. S'agissant de la dette grecque dont on parle depuis tant d'années, la question est de savoir comment on l'allège, comment on en réduit la charge, comment on en diminue le service. Mais quand on commence à parler de haircut, c'est-à-dire de décote, ce sont les citoyens qui sont concernés en bout de chaîne.

Comment nous désendetter ? Comment combiner réduction et partage des risques ? Il faut donner plusieurs impulsions et prendre le problème sous divers angles.

D'abord, il est très important de couper le lien entre la dette souveraine et le secteur bancaire, ce qui est le sens même de l'Union bancaire, conçue dans les années 2012-2013 pour aller vers une supervision du secteur et une résolution bancaire intelligente. Les mécanismes fonctionnent et ils le feront encore mieux le jour où ils s'appuieront sur un fonds, même si ce dernier est un peu différent de celui qu'André Chassaigne appelle de ses voeux. La question de la garantie des dépôts se pose, même si le contexte des élections allemandes ne permet pas d'engager le débat. La Commission européenne veut finaliser l'Union bancaire.

Il faut réduire l'endettement par l'assainissement financier et les réformes. Il existe un lien évident entre le déficit public et la dette. C'est pourquoi il a été établi que le déficit public ne devait pas dépasser 3 % du PIB, niveau à partir duquel la courbe de la dette peut s'inverser. Observons que la moyenne est actuellement à 1,3 %. S'il y avait un lien direct entre l'augmentation des déficits et la croissance, cela se saurait. Les pays qui bénéficient de la plus forte croissance en Europe ne sont pas ceux qui enregistrent les déficits les plus élevés, ni ceux qui sont les plus endettés. Pour ma part, je suis même convaincu que la dette est l'ennemie des services publics. Tout euro consacré au remboursement de la dette est un euro en moins dans le budget que vous allez adopter pour l'éducation, la sécurité, la justice, l'hôpital. Il faut donc des réformes – je vais revenir plus tard sur le rabot.

Il faut relancer la croissance, ce qui passe par l'investissement. Il faut aussi compléter l'union économique et monétaire, afin qu'elle intègre les dimensions politiques, économiques et démocratiques précédemment évoquées. Mais au coeur de tout, il y a la question de la dette. Nous vivons dans un régime de dette – publique et privée – excessive.

Monsieur Abad, vous avez raison de souligner le paradoxe sur la critique et le besoin de l'Europe. Cela étant, il y a une prise de conscience du fait que nous ne pouvons pas avancer sans l'Europe. Monsieur Chassaigne, vous avez fait référence à Victor Hugo. Je ne crois pas que l'Europe soit une grande France mais je pense qu'on ne peut pas construire la France sans l'Europe ni que l'on puisse construire l'Europe sans la France. Les deux dimensions s'articulent de manière tout à fait étroite. Nous avons besoin d'idées françaises pour l'Europe et nous avons aussi besoin d'idées européennes en France. Il nous faut créer cette culture commune.

En ce qui concerne le budget, je n'ai pas à me prononcer sur les moyens. Quelle baisse d'impôt faut-il privilégier ? Quelle coupe faut-il faire dans les dépenses ? Je ne vais pas entrer dans ces débats. En revanche, j'ai la solide conviction que la France doit respecter ses engagements sur la réduction de son déficit nominal et de son déficit structurel, que ce soit en 2017, en 2018 ou au cours des années suivantes.

Je persiste aussi à penser qu'une réduction de la dépense publique maîtrisée et intelligente est une voie à privilégier. J'en ai fait l'expérience à plusieurs niveaux, ayant été un parlementaire comme vous, ministre des finances puis commissaire. Mon message ne s'adresse d'ailleurs pas seulement à la France.

En Europe, nous essayons de mettre en place des examens de dépenses – des spending reviews. On peut faire des choses plus intelligentes en procédant à des examens par politiques plutôt qu'en donnant des coups de rabot. Avec cette dernière technique ont réduit uniformément les dépenses mais, à un moment donné, on arrive à l'os et on est obligé de trancher dans le vif. Ce n'est pas la meilleure méthode. Il faut inventer – et pas seulement en France – une gouvernance budgétaire plus intelligente et plus structurelle. Les réformes structurelles ne font pas forcément mal ; elles ne sont pas punitives ; elles privilégient ce qui prépare l'avenir. En la matière, le maître mot est l'investissement, tout ce qui concourt à développer le capital humain. Il faut, sans aucun doute, un changement de méthode.

Vous m'avez aussi interrogé, Monsieur Abad, sur la filière équestre dont je suis conscient des difficultés pour avoir rencontré ses responsables lorsque j'étais à Bercy. Lorsque je suis allé au salon de l'agriculture, j'ai choisi le stand de cette filière. Mes services ont aidé les autorités françaises à utiliser toutes les flexibilités permises par la directive TVA pour autoriser l'usage le plus large possible du taux réduit dans le secteur équin. Cependant, en l'état actuel du droit européen, il n'est pas possible d'aller au-delà.

L'an dernier, j'ai proposé une réforme ambitieuse de la TVA au niveau européen, permettant d'octroyer une plus grande autonomie aux États membres dans l'utilisation des taux réduits. Je pense que la liste ne doit pas être fixée à Bruxelles. Il faut décentraliser et rendre cette compétence aux États membres. Je souhaite sortir de la situation ubuesque actuelle : l'unanimité empêche toute mise à jour de la liste des produits éligibles au taux réduit de TVA. Je travaille à une proposition législative qui devrait être adoptée par la Commission européenne d'ici à la fin de l'année. Elle permettra au Gouvernement français de dire ensuite ce que sont ses propres priorités.

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Il faudra un cavalier législatif pour la faire passer !

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Pierre Moscovici, Commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l'Union douanière

Nous nous intéressons de près au canal Seine-Nord Europe. Soyez consciente, Madame Deprez-Audebert, que la participation européenne de 40 % est déjà très élevée. Le plan Juncker est une voie à explorer. Il faut sans doute passer par la Commission européenne, par la Banque publique d'investissement (BPI) et la Banque européenne d'investissement (BEI). M. Ambroise Fayolle, vice-président de la BEI, suit ces affaires pour la France. Cela étant, le plan Juncker sert effectivement à aider au financement d'infrastructures mais aussi de projets de PME qui concourent à l'avenir.

Le plan Juncker est une formidable réussite : plus de 200 milliards d'euros ont déjà été investis sur le montant de 315 milliards d'euros prévu jusqu'à la mi-2018. La France est leader en la matière, que ce soit pour les grands projets ou ceux des PME. Je regrette que nous n'ayons pas les moyens de faire plus de publicité sur tout ce que cela a déjà apporté à nos territoires. Sans vouloir susciter d'espoirs injustifiés ou retirer au Gouvernement français sa propre responsabilité, je signale que la porte est ouverte et qu'il est possible de discuter.

Monsieur Chassaigne, il est vrai que l'aide aux banques a été massive. Il ne faut pas perdre de vue qu'elle visait aussi à sauver l'épargne des citoyens. Dans la zone euro, personne n'a perdu d'argent sur son compte en banque au moment de la crise, contrairement à ce qui s'est passé aux États-Unis. Ces plans ont produit ensuite des retours très importants.

Cela étant, je vous l'accorde, on ne peut pas rester dans l'épure budgétaire actuelle. Je plaide pour un budget de la zone euro parce que je pense que nous avons besoin d'une capacité d'investissement beaucoup plus importante, d'un bazooka d'investissements, afin de réduire les divergences qui existent encore au sein de la zone euro entre les pays, au sein des pays, entre les citoyens. En tant que parlementaire dans votre assemblée, j'ai été élu d'une région ouvrière où le Front national tangentait encore le taux de 50 % lors des dernières élections présidentielles ; je sais ce que peut ressentir un ouvrier de Sochaux à l'égard de la mondialisation. L'existence d'un tel outil est décisive et nous en discutons dans le cadre du débat sur l'Union économique et monétaire.

Peut-on transformer le budget actuel, qui représente 1 % de la richesse créée dans l'Union européenne ? Dans un univers parfait, on ne devrait pas se contenter de cela. Le fédéralisme budgétaire supposerait que l'on soit au-dessus du taux de 3 %. Dans un système où ce sont encore les États membres qui alimentent le budget, nous nous heurtons à des limites.

Cela nous conduit tout d'abord à vous engager à mener dès maintenant une réflexion sur ce qu'on appelle les ressources propres de l'Union européenne. Sous l'égide de Mario Monti, un groupe de travail – auquel j'appartenais – a rendu un très bon rapport qui offre une boîte à outils en la matière.

J'invite aussi la représentation nationale à se montrer vigilante en ce qui concerne les cadres pluriannuels financiers futurs pour les années 2020 et suivantes. Je vous incite notamment à choisir vos priorités : innovation, cohésion, éducation, recherche, etc. Il est important de défendre une stratégie dans le cadre des limites de l'épure, tout en étant conscient que ce seront les prévisions pluriannuelles les plus compliquées de l'histoire à établir compte tenu de la perte d'un État membre contributeur net, la Grande Bretagne, et de l'augmentation des contraintes : la défense, l'accueil de réfugiés, l'innovation, la recherche, le maintien de la politique agricole commune (PAC), le renforcement de la cohésion. À un moment, il faut faire entrer l'édredon dans la valise, ce qui conforte mon idée sur la nécessité d'avoir un budget d'investissement.

À la fin de mon passage à la Commission européenne, j'espère avoir fait en sorte que l'appréhension des politiques budgétaires soit un peu plus intelligente que par le passé, c'est-à-dire que l'on ait introduit de la flexibilité. Je suis très heureux que nous n'ayons pas infligé des amendes à l'Espagne et au Portugal durant l'été dernier. Cela aurait été stupide. Je suis très content que l'Italie ne soit pas en procédure pour déficit excessif et je pense qu'il faut que la France trouve les moyens de respecter ses engagements. L'austérité n'est pas une solution. Sanctionner et punir ne sont pas les attitudes les plus intelligentes.

J'espère aussi que la Grèce va vraiment sortir la tête hors de l'eau, comme elle en prend le chemin. Vous parliez de dette, Monsieur Mendes. Pour le coup, je pense qu'il faut traiter la question de la dette grecque. On ne peut pas en rester à la situation actuelle. Il faudra voir comment il est possible d'alléger la dette grecque au-delà du programme qui s'achève en 2018.

J'espère enfin que nous aurons mis en place des mécanismes qui fassent reculer l'évasion fiscale de manière très sérieuse. C'est une vraie cause pour la Commission européenne et j'ai l'intention de continuer à aller dans cette direction.

Madame Auconie, vous m'avez interrogé sur l'image de l'Europe. Il n'y a pas de mystère. Il arrive que l'on entre dans la politique tout à coup mais on peut aussi y être depuis un certain temps. Pour ma part, j'appartiens à une formation politique, même si on ne peut pas dire que je la fréquente tous les jours. Je suis socialiste et, pendant vingt ans, j'ai exercé des responsabilités politiques de diverses natures – locales, nationales, européennes – dont je suis fier. À présent, je suis à la Commission européenne. Nous sommes vingt-huit collègues – quatorze conservateurs, huit socialistes, cinq libéraux et un Britannique qui est aussi conservateur – et nous fonctionnons au compromis. Nous essayons de trouver des accords entre nous. Je connais mes collègues et je les respecte même quand je ne partage pas leurs convictions. Vous en avez cité trois qui ne partagent pas mes convictions.

Jean-Claude Juncker, je l'ai rencontré pour la première fois il y a plus de vingt ans, à une époque où il était Premier ministre du Luxembourg. Il faut sortir des idées reçues et ne pas abuser des slogans. C'est un homme pont : il est un pont entre la France et l'Allemagne, entre la démocratie chrétienne et la social-démocratie. C'est un homme qui a une sensibilité sociale beaucoup plus développée que bien d'autres, y compris dans les partis que je connais. Je n'ai pas à me prononcer sur ce que le Premier ministre du Luxembourg a fait du business model luxembourgeois. En revanche, je peux dire que le président de la Commission européenne ne m'a jamais freiné dans mon action de commissaire à la fiscalité. Il m'a, au contraire, choisi en connaissance de cause. Il savait que j'avais suivi ces sujets en tant que ministre des finances. Aucun dossier n'a fait l'objet d'un blocage dans cette commission. Dans le cas du reporting par pays, contrairement à Jean-Claude Juncker, beaucoup de commissaires ne souhaitaient pas la transparence.

Mon collègue hongrois appartient, certes, au parti de M. Orbán, mais ce n'est pas trahir un secret que de dire que, lors de nos délibérations, lorsque nous abordons des sujets relatifs à la liberté, l'éducation ou la culture, il adopte une position européenne.

La commission Juncker est comme toute entité humaine, constituée de gens très forts et d'autres qui le sont moins, de personnes sympathiques et d'autres qui le sont moins. C'est un bon groupe où, honnêtement, les gens tirent dans le même sens. J'ai un très grand plaisir à en faire partie, aux côtés de collègues qui ont des convictions politiques très différentes. Il ne faut pas se livrer à des attaques un peu faciles.

S'agissant de M. Barroso, pour lequel j'ai le plus grand respect, j'ai eu l'occasion de m'exprimer sur son recrutement. Que le président d'une institution soit allé dans une banque qui avait été impliquée dans l'affaire grecque à un moment donné, ce n'était pas ce qu'il y avait de plus approprié. Je l'ai dit et redit et je le répète ici. En même temps, il a aussi contribué à l'action de la Commission européenne. Notez d'ailleurs que les décisions de la Commission sont collectives et non pas individuelles. Je suis un commissaire social-démocrate mais je ne prends pas les décisions tout seul. Chaque décision a été adoptée à l'unanimité.

Vous n'avez pas eu l'occasion de poser votre question – très importante – sur l'influence française. À la Commission européenne, nous veillons à l'influence française qui est plutôt bonne : il y a sept directeurs généraux français – ce sont les plus nombreux – ; le management est assez largement français ; les Français sont très présents dans les cabinets, y compris dans celui du président, même si nous avons moins de chefs de cabinet que les Allemands. En revanche, vous devez être vigilants sur la présence du français dans les institutions européennes. Reconnaissons que le reflux est extrêmement préoccupant dans ce domaine. Quand vous avez, comme moi, le recul d'une vingtaine d'années, vous constatez une chute vertigineuse de l'usage de la langue française. Avec le Brexit, théoriquement, la langue de l'Union européenne est le français avec l'allemand. Il faut y veiller de manière sérieuse.

Madame Obono, vous m'avez interrogé sur l'harmonisation fiscale, sujet tout à fait décisif. En la matière, les limites tiennent à nos procédures de décision et à nos compétences. Dans le registre fiscal, les décisions doivent être prises à l'unanimité, ce qui constitue une très puissante limite. En outre, nous n'avons pas de compétence sur les taux. Je peux avoir mon sentiment – qui peut d'ailleurs être le même que le vôtre – sur les taux d'imposition de tel ou tel pays de l'Union européenne. En tant que commissaire, je suis obligé de concéder que nous n'y pouvons rien, que nous ne pouvons pas y toucher.

Venons-en à l'assiette commune consolidée, essentielle pour que nous puissions offrir un cadre commun aux entreprises. La déclaration commune permettra aux États membre de vérifier les bénéfices par pays des entreprises. La mise en place de cette ACCIS constituera une première étape vers une harmonisation qui ne dit pas son nom.

S'agissant des taux, on peut tout de même définir des seuils minimums, des fourchettes. Le travail effectué par mes services et ceux de la commissaire à la concurrence, Margrethe Vestager, vise à définir un taux effectif. Il s'agit de faire en sorte qu'il n'y ait pas de taux zéro, d'entreprises qui ne paient pas des impôts appropriés et qui seraient donc considérées comme bénéficiant d'une aide d'État, comme c'est le cas pour Apple en Irlande. À l'issue de nombre d'enquêtes menées par les services de la commissaire à la concurrence, nous avons pu au moins imposer ce taux effectif qui n'est pas un taux minimal.

Pour terminer, j'en viens à la taxe sur les transactions financières qui n'est plus une affaire de la Commission puisque sa proposition n'a pas abouti. Onze États membres, dont la France, l'Allemagne, l'Espagne et l'Italie, ont proposé une coopération renforcée. J'étais à l'origine de cette initiative avec mon homologue allemand, Wolfgang Schäuble, entre la fin de 2012 et le début de 2013. Nous avons beaucoup travaillé depuis trois ans. En l'état de l'art, si on veut, on peut. Un projet est pratiquement prêt. Comme il ne regroupe que des pays de la zone euro, il ne dépend pas du Brexit dont il faut, malgré tout, examiner les impacts économiques et financiers. À titre personnel et en tant que participant à cette coopération renforcée où la Commission est présente, je continue de penser que l'instauration d'une taxe sur les transactions financières reste un objectif politique tout à fait souhaitable, à un moment où l'on constate le caractère crucial des défis du développement, de la lutte contre le réchauffement climatique. Je ne peux qu'encourager les différents États membres à avancer. S'ils le font, nous sommes disponibles pour avancer avec eux.

Je continue de croire à la pertinence de cette taxe, même s'il ne faut pas négliger les obstacles nés du Brexit. On peut gérer le calendrier et intégrer le Brexit dans la réflexion mais il ne faut pas tuer la taxe sur les transactions financières. En outre, cette taxe peut faire partie des ressources propres d'un budget de la zone euro, permettant d'investir davantage. Voilà une ressource disponible. André Chassaigne a parlé des banques. Il ne paraît pas totalement illégitime que le secteur financier contribue à la lutte contre le réchauffement climatique et au développement.

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Merci, Monsieur Moscovici, d'avoir répondu aux représentants des groupes. Compte tenu des nombreuses demandes de prises de parole, j'invite les membres de la commission à être concis en posant leurs questions.

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La majorité des produits contrefaits qui circulent en Europe sont fabriqués par des pays tiers et ne sont pas détectés aux frontières extérieures de l'Union européenne. Toutefois, au cours des dernières années, des recherches menées conjointement par Europol et l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (OHMI) ont mis en lumière des cas de fabrication de contrefaçons dans de nombreux pays de l'Union européenne, prouvant de fait l'accroissement de la production de tels produits.

L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estimait récemment que jusqu'à 5 % des marchandises importées, pour un montant de 85 milliards d'euros, sont des produits contrefaits ou piratés. Le phénomène prive l'Union européenne d'à peu près 800 000 emplois et de 14,3 milliards d'euros de taxes chaque année. Le Comité économique et social européen (CESE) vient de publier un rapport sur l'industrie des produits contrefaits ou piratés, qui met en garde sur le caractère fragmenté et variable de la mise en oeuvre nationale des règles et normes de l'Union européenne ainsi que sur les différences d'efficacité des contrôles douaniers.

Quel regard portez-vous sur ce dossier ? Quelles sont vos préconisations ? Quelles pistes envisagez-vous pour renforcer la législation et les initiatives prises dans le domaine de la lutte contre la contrefaçon au sein de l'Union européenne ?

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La France est résolument engagée dans la lutte contre le terrorisme islamiste afin de défendre nos libertés et un certain modèle de civilisation européenne et afin de sécuriser l'ensemble du continent. Rappelons que 4 000 hommes sont engagés dans l'opération Barkhane au Sahel et que 1 300 hommes sont engagés dans l'opération Chammal en Irak et en Syrie.

Se pose donc la question du coût de ces opérations extérieures qui, pour nombre d'entre nous, sont menées pour l'ensemble du continent et la sécurité de tous les Européens. La question du coût de ces opérations revient donc régulièrement dans le débat politique français et européen. Le dernier rapport de la Cour des comptes a encore mis le doigt sur la sous-budgétisation, et la récente démission du chef d'État-major des armées n'était pas étrangère à cette thématique douloureuse.

Qu'en est-il d'un éventuel assouplissement des règles du pacte de stabilité, fondé sur l'exclusion des dépenses militaires et notamment du coût des opérations extérieures du montant du déficit ? D'autres pistes circulent mais que pensez-vous de celle-là ?

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Vous avez insisté sur la volonté de renforcer la démocratie dans le fonctionnement de l'Union européenne, afin de limiter le phénomène souvent dénoncé de technocratie. La semaine dernière, avec la ministre des affaires européennes, nous avons abordé les futures élections européennes et la possibilité de coller aux nouvelles régions françaises pour une plus grande proximité. Quelle est votre position sur ce sujet ?

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Le 30 novembre 2016, la Commission européenne a présenté un quatrième paquet énergie très ambitieux dont le vice-président Maroš Šefčovič souhaite l'adoption avant octobre. Si les mesures proposées par la Commission sont globalement positives, certaines d'entre elles ont pu susciter des réserves.

Lors de la précédente législature, notre commission avait examiné les quatre textes réorganisant le marché de l'électricité et préconisé un certain nombre d'aménagements concernant notamment la suppression des tarifs réglementés de vente de l'électricité, l'instauration des centres de conduite régionaux et l'élargissement du rôle de l'Agence de coopération des régulateurs de l'énergie (ACER).

Le 19 juillet 2017, le Conseil d'État, à la suite d'une décision de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), a annulé le décret du 16 mai 2013 relatif aux tarifs réglementés de vente de gaz car il imposait à certains fournisseurs de proposer au consommateur final la fourniture de gaz naturel à des tarifs réglementés, ce qui a été considéré comme une entrave à la réalisation d'un marché concurrentiel.

Peut-on considérer que cette décision augure d'une nouvelle position de la France concernant le paquet électricité ? Plus généralement, pourriez-vous nous faire part de la position de la France sur l'ensemble du paquet énergie ?

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Monsieur le commissaire, vous avez évoqué certains enjeux tels que la position de l'Europe face à la mondialisation. Face au défi de la modernisation économique, réalité qui dépasse les frontières françaises, pouvez-vous présenter les actions qui sont envisagées par la Commission européenne afin de renforcer la croissance induite par l'innovation et le numérique dans les pays membres ?

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Au cours des derniers jours, nous avons reçu des signaux économiques et financiers encourageants concernant la Grèce : retour de ce pays sur les marchés, prévisions de croissance encourageantes publiées par la Commission européenne.

Vous avez indiqué, Monsieur le commissaire, qu'il était temps de fermer le chapitre de l'austérité et que le pays devait revenir à la normale c'est-à-dire être réformé et doté de structures économiques et sociales solides. Les Européens ont une responsabilité à l'égard de la Grèce, avez-vous également dit.

Que devons-nous faire à l'avenir pour soutenir la reprise économique ? Faut-il notamment alléger la dette ? Que devons-nous faire pour aider aussi le pays à reconstituer son modèle social ? Rappelons qu'un tiers des Grecs vit actuellement sous le seuil de pauvreté. Quels actes et gestes pouvons-nous faire pour signifier à la Grèce sont inclusion politique réelle et sa capacité de décision en Europe ?

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Vous avez dressé un panorama de l'Europe et de ses perspectives sur lequel tout le monde ne s'accorde pas. Il en va de l'économie comme de la température : il y a le ressenti et les réalités. En général, quand la situation s'améliore, on reporte les réformes ou on y renonce.

Les États-Unis s'intéressent de nouveau à un serpent de mer : la séparation des activités bancaires. Vous avez été à l'origine d'un certain nombre de réflexions et de réformes en la matière. Que pensez-vous de la nécessité d'aller plus loin dans ces réformes à l'échelon européen ou français ? De nouvelles technologies arrivent, notamment la chaîne de blocs (blockchain) qui va bousculer les éléments de la fintech, du monde de la finance. Ce qui est une formidable opportunité pourrait aussi encourager des excès. Quel regard portez-vous sur cette évolution technologique et ses apports futurs au monde économique européen ?

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Pierre Moscovici, Commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l'Union douanière

Les contrefaçons constituent en effet un axe important de l'action de l'Union européenne dans le domaine douanier. Notre rôle est de promouvoir l'unification des technologies, de renforcer la réglementation et de nous assurer d'une bonne coordination entre administrations douanières. Je constate que la coopération douanière s'améliore au sein de l'Union européenne, même si beaucoup reste à faire, ce qui dépend de la volonté des États.

Nous devons encore renforcer les douanes dans nos différents États membres et améliorer notre coopération. Le code des douanes, qui est entré en vigueur il y a quelques mois, constitue un pas dans cette direction. Il s'en suit toute une série d'enjeux en termes d'équipement informatique et de législations nationales. Je vous invite à faire preuve de vigilance en la matière. Sachez que la Commission européenne sera à vos côtés.

Madame Le Grip, vous m'avez interrogé sur la possibilité de tenir compte du coût des opérations extérieures dans la manière d'évaluer notre respect du pacte de stabilité. C'est un débat franco-français, notamment parce que la France joue le premier rôle dans ces opérations militaires. Comme Jean-Claude Juncker, j'estime que la France joue un rôle éminent dans la défense pour le compte de l'Europe. Il n'y aurait pas de défense européenne s'il n'y avait pas la France, mais toutes les opérations lancées par la France ne le sont pas pour le compte de l'Europe, loin de là.

Un principe assez simple pose la question de l'européanisation de la défense : il pourrait y avoir une prise en compte de ces dépenses dans le pacte si les opérations étaient décidées au niveau européen. Dans ce cas, il y aurait une décision européenne, un financement européen, une prise en compte européenne. Pour le reste, nous avons des réflexions sur le pacte qui portent davantage sur le décompte des investissements que sur celui des opérations. Quand des opérations sont ainsi décidées, comme dans le cas du Mali, on peut faire des choses.

Nous avons d'ailleurs accepté une certaine flexibilité dans le contexte du pacte. Nous avons ainsi accepté que certaines augmentations de dépenses, notamment pour la sécurité et la lutte contre le terrorisme, soient prises en compte hors du pacte. Ce fut le cas après les attentats de janvier 2015. Il faut trouver la bonne distinction entre ce qui est investissements ou défense européenne proprement dite. C'est un sujet politique qui ne doit pas être traité uniquement ou principalement sous l'angle budgétaire. Il faut avoir une vision plus large.

Monsieur Simian, ce n'est pas à la Commission européenne de dire ce que doit être le mode de scrutin pour les prochaines élections européennes. Premièrement, le mode de scrutin doit donner un enjeu à ces élections. Les députés français ont été élus avec une participation quasi européenne – 42 %, c'est à peu près le même score que pour les élections européennes de 2014 – et si nous suivons la même tendance, nous allons être assez bas. Comment faire en sorte qu'il y ait un enjeu ? Les partis politiques doivent s'interroger sur leur structuration, sur leurs plateformes, sur le maintien ou la suppression des têtes de listes, sur l'existence éventuelle de listes transpartisanes.

Deuxièmement, le mode de scrutin pour les élections européennes doit respecter les régions. Il peut être national mais régionalisé.

Troisièmement, c'est un scrutin proportionnel. Il faut être conscient que plus on a de régions et moins la proportionnelle est garantie. Pour avoir été tête de liste dans la région Grand Est en 2004, je sais que le résultat aurait été différent si je l'avais été dans ma petite région de Bourgogne Franche-Comté. Ce n'est pas tout à fait pareil de faire respecter la proportionnelle dans une région qui compte 2 millions d'habitants et où le nombre de sièges est restreint que dans une région de 9 millions d'habitants. Il revient au Gouvernement français d'y réfléchir. On lui fait toute confiance.

Puisqu'il y a une volonté européenne, il faut aussi faire en sorte que ces élections soient un succès. C'est très important. J'ai été membre de votre assemblée ; j'ai été élu ici trois fois ; j'ai été élu deux fois au Parlement européen. Il faut renforcer les relations avec ce dernier parce qu'il va devenir encore plus important pour nos concitoyens qu'il ne l'est actuellement si nous allons vers la démocratisation de la zone euro que j'appelle de mes voeux.

Madame Grandjean, le numérique représente un chantier essentiel qui doit être appréhendé sous de nombreux angles : l'investissement, ce qui correspond au plan Juncker ; la protection des données ; la responsabilisation des plateformes en matière de contenu ; la fiscalité des entreprises et des opérations en Europe, ce qui est de mon ressort. En outre, un débat est engagé sur l'économie collaborative et des plateformes comme Uber, Airbnb, etc. La Commission européenne a lancé ses filets et nous sommes en contact étroit avec les autorités françaises – dont je sais que c'est l'une des priorités – pour travailler notamment sur la fiscalité du numérique. J'ai eu l'occasion d'en parler très récemment avec les principaux responsables de ce pays.

Madame Petit, je ne peux qu'approuver vos propos sur la Grèce. Je pense que l'objectif doit être de trouver un chemin pour que dans un an, en août 2018, la Grèce réussisse à conclure son programme d'une manière favorable et qu'elle entre ensuite dans une situation normale où elle respectera les mêmes règles que les autres pays. Elle sera soumise à un peu plus de contrôles que les autres dans le cadre de la surveillance post-programme, mais celle-ci portera sur la fin et non sur les moyens. Pour cela, il faut suivre le chemin, réussir la dernière revue du programme qui portera davantage sur la mise en oeuvre des mesures. Pour le reste, vous avez raison, il faut encourager la Grèce, la meilleure des solidarités étant de créer les conditions de la reprise qui se profile. Vous pouvez être sûre que c'est une priorité absolue de la Commission européenne.

Vous parliez d'inclusion politique. Compte tenu de son histoire et de son rôle géopolitique, la Grèce est bien présente sur le plan politique. Elle a une armée ; elle est au contact de la Turquie ; elle est une terre d'accueil pour les réfugiés. La Grèce a subi deux crises en même temps. Elle sera encore plus présente une fois sortie, politiquement plus forte, de cette affaire. La Commission européenne, comme la France d'ailleurs, est aux côtés de la Grèce. Je dis bien de la Grèce, du peuple grec, même si nous travaillons avec les gouvernements grecs, car c'est une bonne chose.

Monsieur Bothorel, en réponse à votre question, je vais vous donner un sentiment personnel, un peu nourri par l'expérience. Quand je suis arrivé ici, en 2012, comme ministre des finances, j'avais un cahier des charges ambitieux, un grand discours de l'ancien Président de la République qui expliquait qu'il fallait scinder les banques. Assez vite, j'en suis arrivé à l'idée qu'il fallait séparer les activités bancaires mais garder les structures. En France, nous avons des banques plutôt grandes et systémiques ; elles sont sur le modèle de la banque universelle qui associe les banques de dépôts et les banques d'affaires. Si vous les coupez en deux, vous allez créer des banques de dépôts plus faibles et des banques d'affaires qui ne seront pas à la hauteur. C'est la raison pour laquelle, à l'époque, j'avais proposé que l'on sépare les risques, les activités, en conservant les structures. Cela ne m'avait pas valu que des amis.

Je persiste à penser qu'il faut éviter le prêt-à-porter dans ce domaine et qu'il est préférable de faire du sur-mesure. Il y a autant de modèles de loi bancaire qu'il y a de modèles bancaires. La situation n'est pas la même aux États-Unis, en Grande Bretagne et en France. Il est très important de se protéger face aux risques et de s'assurer de l'existence d'un contrôle, mais il ne faut pas pour autant détruire les structures économiques et bancaires.

C'était ma réflexion en 2012-2013, lors de l'adoption de la loi bancaire qui, après coup, est plutôt considérée comme un succès. Certains m'ont critiqué mais j'assume tout à fait ma position. Toujours à titre personnel, je pense que c'est la même chose à l'échelle européenne : il faut faire du sur-mesure, se montrer très ambitieux dans la séparation des activités, mais très prudents quand il s'agit de scinder des structures. Je pense qu'il faut laisser une certaine latitude aux différents États membres, ce qui n'est pas forcément la tendance. Les gouvernements français doivent se montrer vigilants sur ce point.

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Merci beaucoup, Monsieur le commissaire. Nous aurons l'occasion de poursuivre nos échanges le 4 octobre et même au-delà.

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Pierre Moscovici, Commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l'Union douanière

Je suis à votre disposition pour venir aussi souvent que vous le souhaiterez.

II. Nomination de rapporteurs d'information

Sur proposition de la Présidente, la Commission a nommé rapporteurs d'information :

- M. Alexandre Freschi et M. André Chassaigne, sur la Politique agricole commune (PAC) ;

- M. Pieyre-Alexandre Anglade et M. Joaquim Pueyo, sur la défense européenne et son articulation avec l'OTAN ;

- M. Ludovic Mendes et M. Christophe Naegelen, sur la zone Schengen et la maîtrise des frontières extérieures de l'Union européenne ;

- M. Éric Bothorel et Mme Constance Le Grip, sur le marché unique numérique ;

- M. Thierry Michels, sur la transition énergétique au sein de l'Union européenne ;

- Mme Laetitia Avia et M. Vincent Bru, sur la politique commerciale de l'Union européenne face à l'Organisation Mondiale du Commerce.

III. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application des articles 88-4 et 88-6 de la Constitution

Mes chers collègues, compte tenu du report à la semaine prochaine des communications des référents des commissions des affaires culturelles et du développement durable, je vous propose de réserver le texte E 12152, que nous examinerons lors de notre réunion du 3 août.

Sur le rapport de la Présidente Sabine Thillaye, la Commission a décidé de réserver le texte suivant :

Ø TRANSPORTS

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil visant à préserver la concurrence dans le domaine du transport aérien et abrogeant le règlement (CE) n° 8682004 (COM(2017) 289 final – E 12152).

S'il n'y a pas de remarques sur les autres textes qui vous ont été transmis, je vous propose de les acter.

Sur le rapport de la Présidente Sabine Thillaye, la Commission a poursuivi l'examen des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

l Textes « actés »

Aucune observation n'ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :

Ø BUDGET COMMUNAUTAIRE

- Projet de budget rectificatif n° 4 au budget général 2017 accompagnant la proposition de mobilisation du Fonds de solidarité de l'Union européenne pour venir en aide à l'Italie (COM(2017) 541 final - E 11335-4).

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil fixant le taux d'ajustement prévu par le règlement (UE) n° 13062013 pour les paiements directs en ce qui concerne l'année civile 2017 (COM(2017) 150 final - E 12012).

- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilisation du Fonds de solidarité de l'Union européenne aux fins du paiement d'avances dans le cadre du budget général de l'Union pour 2018 (COM(2017) 270 final - E 12188).

- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilisation de l'instrument de flexibilité aux fins du financement de mesures budgétaires immédiates pour faire face aux défis actuels liés à la migration, à l'afflux de réfugiés et aux menaces pesant sur la sécurité (COM(2017) 271 final - E 12189).

- Décision de la Commission modifiant la décision 2010670UE de la Commission en ce qui concerne l'affectation des recettes non versées provenant du premier appel de propositions (D05108602 - E 12223).

Ø CLIMAT

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (UE) n° 10312010 afin d'aligner la mise aux enchères des quotas sur la décision (UE) 20151814 et d'enregistrer une plate-forme d'enchères devant être désignée par le Royaume-Uni (D05068202 – E 12220).

Ø DROIT CIVIL

- Proposition de décision du Conseil autorisant le Luxembourg et la Roumanie à accepter, dans l'intérêt de l'Union européenne, l'adhésion de la Géorgie et de l'Afrique du Sud à la convention de La Haye de 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants (COM(2017) 357 final - E 12234).

- Proposition de décision du Conseil autorisant la Croatie, les Pays-Bas, le Portugal et la Roumanie à accepter, dans l'intérêt de l'Union européenne, l'adhésion de Saint-Marin à la convention de La Haye de 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants (COM(2017) 359 final - E 12235).

- Proposition de décision du Conseil autorisant la Roumanie à accepter, dans l'intérêt de l'Union européenne, l'adhésion du Chili, de l'Islande et des Bahamas à la convention de La Haye de 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants (COM(2017) 360 final - E 12236).

- Proposition de décision du Conseil autorisant l'Autriche et la Roumanie à accepter, dans l'intérêt de l'Union européenne, l'adhésion du Panama, de l'Uruguay, de la Colombie et de l'El Salvador à la convention de La Haye de 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants (COM(2017) 369 final - E 12237).

Ø DROIT DES SOCIÉTÉS

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) n° 11262008 portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) n° 16062002 du Parlement européen et du Conseil, en ce qui concerne la norme comptable internationale IAS 7 (D05094201 - E 12222).

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) nº 11262008 portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) nº 16062002 du Parlement européen et du Conseil, en ce qui concerne la norme internationale d'information financière IFRS 4 (D05130002 - E 12227).

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) nº 11262008 portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) nº 16062002 du Parlement européen et du Conseil, en ce qui concerne la norme comptable internationale IAS 12 (D05148201 - E 12228).

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) nº 11262008 portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) nº 16062002 du Parlement européen et du Conseil, en ce qui concerne la norme internationale d'information financière IFRS 15 (D05148801 - E 12229).

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) nº 11262008 portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) nº 16062002 du Parlement européen et du Conseil, en ce qui concerne la norme internationale d'information financière IFRS 16 (D05161701 - E 12230).

Ø ÉNERGIE

- Règlement (UE) de la Commission établissant un code de réseau sur l'état d'urgence et la reconstitution du réseau électrique (D04613502 - E 12218).

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) nº 10992008 du Parlement européen et du Conseil concernant les statistiques de l'énergie, relativement aux mises à jour pour les statistiques annuelles et mensuelles de l'énergie (D05067502 - E 12219).

Ø ENVIRONNEMENT

- Règlement (UE) de la Commission modifiant l'annexe II du règlement (CE) n° 662010 du Parlement européen et du Conseil établissant le label écologique de l'UE (D05162902 - E 12231).

Ø ESPACE LIBERTÉ SÉCURITÉ JUSTICE

- Proposition de décision d'exécution du Conseil arrêtant une recommandation pour remédier aux manquements constatés lors de l'évaluation de 2016 de l'application, par l'Allemagne, de l'acquis de Schengen en matière de retour (COM(2017) 308 final LIMITE - E 12215).

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l'importation de biens culturels (COM(2017) 375 final - E 12239).

Ø FISCALITÉ

- Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 201116UE en ce qui concerne l'échange automatique et obligatoire d'informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l'objet d'une déclaration (COM(2017) 335 final - E 12174).

Ø POLITIQUE ÉCONOMIQUE, BUDGÉTAIRE ET MONÉTAIRE

- Proposition de décision d'exécution du Conseil modifiant la décision d'exécution (UE) 20151411 du Conseil portant approbation du programme d'ajustement macroéconomique de la Grèce (COM(2017) 314 final - E 12158).

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l'harmonisation du revenu national brut aux prix du marché (règlement RNB) abrogeant la directive 89130CEE, Euratom du Conseil et le règlement (CE, Euratom) no 12872003 du Conseil (COM(2017) 329 final - E 12171).

- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilisation du Fonds de solidarité de l'Union européenne pour venir en aide à l'Italie (COM(2017) 540 final - E 12209).

- Recommandation de décision du Parlement européen et du Conseil portant modification de l'article 22 des statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne (10850217 REV 2 - E 12213).

- Recommandation de décision du Conseil abrogeant la décision 2009415CE sur l'existence d'un déficit excessif en Grèce (COM(2017) 380 final - E 12240).

Ø POLITIQUE SOCIALE - TRAVAIL

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et aidants et abrogeant la directive 201018UE du Conseil (COM(2017) 253 final - E 12054).

Ø RELATIONS EXTÉRIEURES

- Proposition conjointe de décision du Conseil relative à la position à adopter par l'Union au sein du Conseil de coopération institué par l'accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et la République d'Arménie, d'autre part (JOIN(2017) 24 final - E 12224).

Ø SANTÉ ENVIRONNEMENTALE

- Règlement (UE) de la Commission modifiant l'annexe XVII du règlement (CE) n° 19072006 du Parlement européen et du Conseil concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), en ce qui concerne l'octaméthylcyclotétrasiloxane ("D4") et le décaméthylcyclopentasiloxane ("D5") (D05070402 - E 12221).

Ø SERVICES FINANCIERS (BANQUES - ASSURANCES)

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) nº 6482012 en ce qui concerne l'obligation de compensation, la suspension de l'obligation de compensation, les obligations de déclaration, les techniques d'atténuation des risques pour les contrats dérivés de gré à gré non compensés par une contrepartie centrale, l'enregistrement et la surveillance des référentiels centraux et les exigences applicables aux référentiels centraux (COM(2017) 208 final - E 12101).

Ø TRANSPORTS

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux statistiques des transports par chemin de fer (refonte) (COM(2017) 353 final - E 12216).

l Textes « actés » de manière tacite

Accords tacites de la Commission, du fait de la nature du texte

En application de la procédure d'approbation tacite, dite procédure 72 heures, adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), 29 octobre 2008 (virements de crédits), 28 janvier 2009 (certains projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines autres nominations), 16 octobre 2012 (certaines décisions de mobilisation du fonds européen d'ajustement à la mondialisation), et 1er décembre 2015 (mesures de dérogations en matière de TVA, de décisions relatives à la réduction facultative de droits d'accise et de décisions relatives aux contributions nationales pour financer les tranches du Fonds européen de développement), celle-ci a approuvé tacitement le document suivant :

Ø INSTITUTIONS COMMUNAUTAIRES

- Comité consultatif pour la coordination des systèmes de sécurité sociale Nomination de Mme Caroline RIETBERGEN, membre titulaire pour les Pays-Bas, en remplacement de M. G. VELDHUIS, démissionnaire (1117217 - E 12242).

Accords tacites de la Commission liés au calendrier d'adoption par le Conseil

La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour le texte suivant :

Ø ESPACE LIBERTÉ SÉCURITE JUSTICE

- Décision d'exécution du Conseil portant approbation de la conclusion, par Eurojust, du mémorandum d'accord entre l'agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d'information à grande échelle au sein de l'espace de liberté, de sécurité et de justice et Eurojust (753617 - E 12232).

Sur le rapport de la Présidente Sabine Thillaye, la Commission a déclaré conforme au principe de subsidiarité le texte suivant transmis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-6 de la Constitution :

Ø POLITIQUE ÉCONOMIQUE, BUDGÉTAIRE ET MONÉTAIRE

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) nº 10952010 instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité européenne des marchés financiers) et modifiant le règlement (UE) nº 6482012 en ce qui concerne les procédures d'agrément des contreparties centrales et les autorités qui y participent, ainsi que les conditions de reconnaissance des contreparties centrales des pays tiers (COM(2017) 331 final - E 12233).

La séance est levée à 11 heures 53.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Damien Abad, M. Patrice Anato, M. Pieyre-Alexandre Anglade, Mme Sophie Auconie, Mme Aude Bono-Vandorme, M. Éric Bothorel, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Vincent Bru, M. André Chassaigne, Mme Typhanie Degois, Mme Marguerite Deprez-Audebert, M. Benjamin Dirx, M. Alexandre Freschi, M. Bruno Fuchs, Mme Valérie Gomez-Bassac, Mme Carole Grandjean, Mme Christine Hennion, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. Jean-Claude Leclabart, Mme Constance Le Grip, Mme Nicole Le Peih, M. Ludovic Mendes, M. Thierry Michels, M. Christophe Naegelen, Mme Danièle Obono, Mme Valérie Petit, M. Damien Pichereau, Mme Maina Sage, M. Benoit Simian, Mme Liliana Tanguy, Mme Sabine Thillaye

Excusées. - Mme Laetitia Avia, Mme Françoise Dumas, Mme Marietta Karamanli

Assistait également à la réunion. - M. Fabien Gouttefarde