Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mardi 11 juillet 2023 à 17h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • chef
  • france ruralités
  • ingénierie
  • logement
  • mobilité
  • rurale
  • ruralité
  • ruraux
  • ville

La réunion

Source

La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a auditionné Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, sur le plan France ruralités.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous avons le plaisir d'accueillir Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, pour discuter notamment du plan France ruralités, qui a été présenté par la Première ministre le 15 juin dernier.

Madame la ministre déléguée, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Les questions d'aménagement du territoire, en particulier en zone rurale, passionnent les membres de cette commission. Qu'il s'agisse des mobilités, de la localisation des activités productives ou énergétiques, de la gestion des espaces naturels, agricoles et forestiers, ou encore du développement des territoires, nous avons toujours eu à cœur de débattre de la situation particulière des espaces ruraux. Ils constituent un enjeu de réflexion à part entière, sachant que 22 millions de nos concitoyens y vivent, et que 88 % des communes françaises sont rurales.

On ne peut, cependant, s'en tenir à ce constat, car il n'y a pas qu'une seule ruralité. Les caractéristiques de ces territoires sont, par nature, très diverses et il faut pouvoir apporter des réponses adaptées.

Dès votre prise de fonction, vous avez entrepris d'évaluer les mesures de l'Agenda rural. Je salue cette démarche, qui était un préalable indispensable. Il en résulte un plan, avec la mise en place de nouveaux outils, comme Villages d'avenir, au sujet desquels nous souhaiterions avoir des précisions. Des mesures concrètes ont aussi été annoncées en matière de mobilité ou pour remédier aux déserts médicaux. La question des moyens financiers se pose et notre commission sera à vos côtés lorsqu'il s'agira d'élaborer des mesures législatives.

Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

C'est avec un plaisir non dissimulé que je viens vous présenter le plan France ruralités. On peut ne pas être d'accord avec les mesures de ce plan, mais j'ai voulu qu'il soit aussi simple et compréhensible que possible, en quatre axes.

France ruralités est le résultat d'un travail d'analyse de près de douze mois. L'évaluation de la mise en œuvre de l'Agenda rural a été coordonnée par M. Jean-Jacques Kéjelart, de l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd). Le directeur adjoint de mon cabinet, M. Pierre Manenti, a procédé aux concertations qui ont associé plus de 300 personnes, dont les représentants de toutes les associations d'élus locaux et beaucoup de parlementaires intéressés par ces questions. Nous avons présenté en janvier le fruit de nos travaux à la Première ministre et, après des modifications qui ont suivi de nouvelles rencontres, elle a présenté officiellement le plan France ruralités il y maintenant un mois.

En introduction, je souhaite mettre en exergue deux notions. L'égalité, d'abord, car nous souhaitons tous que les territoires ruraux bénéficient de l'égalité des chances, dans une période où l'ascenseur social connaît beaucoup de difficultés. L'équité territoriale, ensuite, car elle est au cœur de France ruralités. Ne nous voilons pas la face, nos concitoyens qui vivent dans les zones rurales ont le sentiment d'être relégués et abandonnés.

Bien entendu, on n'a pas attendu que je sois ministre pour travailler sur les ruralités, et beaucoup de choses ont déjà été faites par le Parlement et par mes collègues Mme Jacqueline Gourault et M. Joël Giraud.

Le Gouvernement a ainsi mis en place les plans Action cœur de ville (ACV), pour les villes de 20 000 à 100 000 habitants, et Petites villes de demain (PVD), pour celles de 2 000 à 20 000 habitants – ces seuils sont des approximations, car nous n'avons pas souhaité qu'ils soient contraignants. Il manquait une aide à l'ingénierie en faveur des villages, et c'est ce qui est proposé au sein de France ruralités avec le programme Villages d'avenir.

L'Agenda rural avait déjà permis de consacrer plusieurs milliards d'euros à 181 mesures, le tout manquant peut-être de lisibilité – c'est en tout cas la conclusion du rapport de M. Kéjelart. Nous poursuivrons le plan Avenir montagnes, qui a vu le déploiement d'une soixantaine de chefs de projet aider les intercommunalités à accomplir les évolutions nécessaires. Je pourrais détailler longuement les très nombreux résultats concrets dans bien des domaines. Toutes les actions menées par l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) portent la marque de l'Agenda rural – mais nos concitoyens ne l'ont pas forcément perçu. Les responsables d'intercommunalités savent à quel point le programme Territoires d'industrie a été extrêmement intéressant. Beaucoup a été fait en matière d'aménagement numérique, même si la tâche reste encore importante. Les mesures de l'Agenda rural ont été mises en œuvre à 92 %, et il continue à être appliqué. C'est notamment le cas avec le recrutement de volontaires territoriaux en administration (VTA), grâce à la reconduction du budget destiné au financement de cette mesure par l'État. Cela permet d'affecter dans des territoires ruraux de jeunes diplômés en aménagement du territoire ou en ingénierie culturelle de niveau bac + 3 à bac + 5. C'est un succès : ces jeunes sont extrêmement précieux pour les collectivités qui les emploient et ils améliorent leur employabilité en acquérant une superbe expérience.

Nous avons souhaité que le plan France ruralités, élaboré de manière collective, repose sur trois principes.

Il s'agit, tout d'abord, d'une approche partenariale. Ce n'est pas l'État seul qui délivrera ce qu'il croit avoir compris des besoins. Il viendra accompagner toutes les initiatives locales qui émaneront d'associations, de collectivités et de commerces du monde rural. L'État ne peut rien seul ; il faut travailler avec le tissu associatif et socioprofessionnel ainsi qu'avec les collectivités locales.

Ensuite, nous voulons que ce plan soit simple et lisible, ce que ses quatre axes permettent.

Enfin, il s'agit de mesurer l'efficacité des actions conduites en définissant des indicateurs – je suis un peu lasse de l'évaluation a posteriori des politiques publiques. Le rapport de M. Kéjelart sur l'Agenda rural est très pertinent, mais, pour le plan France ruralités, mieux vaudrait, me semble-t-il, prévoir des indicateurs de performance dès le départ.

Quels sont les quatre axes de ce plan ?

Le premier, « Soutenir les villages dans leurs projets », consiste à fournir une aide en matière d'ingénierie. J'ai effectué quatre-vingt-trois déplacements depuis juillet 2022 et tous les acteurs, qu'ils soient maires ou membres d'un pôle d'équilibre territorial et rural (PETR), m'ont indiqué qu'il leur fallait des moyens dans ce domaine pour pouvoir constituer des dossiers de demandes de subventions d'investissement auprès de l'État, des régions ou des départements. Nous répondons à ce besoin. Il est évident que les situations en ce qui concerne l'ingénierie sont extrêmement diverses selon les collectivités. Il faut prendre en compte cette diversité, qui est heureusement à l'image de la France.

Le deuxième axe, « Reconnaître et rémunérer les aménités rurales », consiste à faire des collectivités territoriales rurales des acteurs de la transition écologique. Elles sont riches d'air pur, de forêts et d'eau, mais elles ne perçoivent pas de rémunération à ce titre – à l'exception de celles situées dans des parcs naturels ou des zones Natura 2000. Il s'agit d'en prévoir pour toutes les communes pour leur contribution au captage du CO2 et à la neutralité carbone.

Le troisième axe est intitulé : « Apporter des solutions au quotidien et répondre aux attentes des habitants ». Il s'agit, tout d'abord, de lutter contre les logements vacants, car il y en a dans presque tous les villages de France. On estime leur nombre à 900 000, ce qui permettrait de loger aisément deux millions de personnes. Il faut aussi se préoccuper de la mobilité. On investit à juste titre des milliards d'euros dans le train et les bus, mais comment répondre aux besoins des personnes qui ne sont pas motorisées et qui habitent à 30 ou 40 kilomètres de la gare ou de l'arrêt de bus ? Il faut s'occuper de la mobilité dite du dernier kilomètre. Enfin, il faut renforcer l'attractivité économique des territoires ruraux et y renforcer l'artisanat et les industries existantes. C'est notamment la raison pour laquelle des mesures législatives sont nécessaires.

L'objectif du quatrième axe est précisément celui de son intitulé : « Refonder les zones de revitalisation rurale (ZRR) ».

Nous voulons que le citoyen soit au cœur de France ruralités. Pour améliorer la qualité de vie en zone rurale, nous devons travailler avec tous ceux qui sont volontaires, qu'il s'agisse d'associations, d'acteurs économiques ou, bien entendu, de collectivités territoriales.

Le programme d'ingénierie prévu dans le cadre de Villages d'avenir repose sur le déploiement de 100 chefs de projet par l'ANCT, en complément de ce qui est déjà réalisé avec Action cœur de ville et Petites villes de demain. À la différence de ces deux derniers programmes et conformément à la demande des maires concernés, chacun de ces chefs de projet sera rattaché directement au préfet de département afin de favoriser une véritable mutualisation, comme c'était le cas dans le passé. Il s'agit de très beaux postes et ces chefs de projet seront recrutés conjointement par l'ANCT, qui pilotera le programme Villages d'avenir, et le préfet. Les chefs de projet devront travailler de manière partenariale. Ils consacreront un temps important au début de leur mission à l'analyse de l'existant et des besoins en ingénierie, afin de pouvoir ensuite utiliser au mieux les 20 millions d'euros disponibles. Cette somme permettra de financer des compléments d'ingénierie, par exemple en commandant des prestations temporaires à des organismes comme le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema). Elles pourront porter sur tous les domaines susceptibles d'intéresser les collectivités territoriales, comme la culture et le patrimoine, l'aménagement du territoire ou les finances.

Au terme de ce travail d'ingénierie, qui prendra quelques mois mais certainement pas des années, il faudra accompagner les projets d'investissement des communes. J'ai déjà commencé à discuter avec les commissions compétentes des associations représentatives des régions, des départements et des intercommunalités pour voir dans quelles conditions ces collectivités accepteront de participer au financement des projets.

Le label Village d'avenir garantira un financement des investissements par l'État à hauteur de 40 %, soit 10 points de plus que ce qui est consenti en moyenne au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). Nous espérons que les régions et les départements contribueront respectivement, par exemple, à hauteur de 20 %. Ces projets intéressent tout le monde, quelle que soit l'appartenance politique. Je pense donc qu'on peut y arriver. Pour l'instant, les commissions précitées de l'Association des maires et des présidents d'intercommunalités de France (AMF) et de l'Association des maires ruraux de France (AMRF) sont très favorables à cette démarche collective, à partir du moment où le projet est présenté par le maire du village. Il serait utile que ce dernier puisse savoir très rapidement sur quel pourcentage de cofinancements il peut compter.

J'en viens à la reconnaissance des aménités rurales, deuxième axe du plan France ruralités. Lors de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2023, la dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité et pour la valorisation des aménités rurales a été doublée et elle atteint désormais 40 millions d'euros. Nous le devons à M. Joël Giraud et au sénateur M. Bernard Delcros, qui ont travaillé d'arrache-pied. Je venais de succéder à Mme Caroline Cayeux comme ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et j'ai relayé leur demande. Ce doublement est une mesure extrêmement précieuse, comme l'ont souligné de nombreux maires. Notre ambition est de faire passer cette dotation de 40 à 100 millions d'euros, indépendamment du travail en cours de l'Igedd sur la possibilité d'utiliser une partie des sommes versées par les entreprises au titre des certificats d'économies d'énergie (CEE) pour financer les collectivités rurales.

Pour apporter des solutions aux besoins du quotidien, troisième axe de France ruralités, il faut notamment s'attacher aux mobilités dites du dernier kilomètre. Je suis très heureuse d'avoir obtenu 30 millions d'euros par an pendant trois ans pour améliorer les mobilités en zone rurale, là où il n'y a ni train ni bus. Cela permettra de financer des projets très divers. Ils pourront émaner d'associations – Familles rurales dans les Vosges, par exemple, a présenté un service d'aide au déplacement lors de la visite de la Première ministre – ou encore de départements, dans certains desquels nous investissons pour acheter des véhicules électriques et installer des bornes de recharge. Le département de la Creuse a fait un travail d'ingénierie remarquable pour améliorer la mobilité en apportant des compléments au train et au bus. Des intercommunalités peuvent aussi jouer un rôle en prolongeant l'action des régions. Peu importe qui est à l'origine du projet, nous serons à ses côtés pour investir, qu'il s'agisse de vélos électriques, de projets associatifs ou bien de la mise en place d'un service public. La mobilité décarbonée est une nécessité absolue.

Il s'agit aussi d'aider les territoires ruraux à renforcer leur attractivité économique. Cela implique de saisir l'opportunité que constituent les VTA. J'ai pu obtenir 3 millions d'euros pour accompagner les acteurs qui proposent des projets dans le domaine de l'économie sociale et solidaire (ESS) en milieu rural, en complément du soutien apporté à de nombreuses têtes de réseau par Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'ESS et de la vie associative.

Comme vous avez pu le constater, le dossier de presse comprend les contributions de quatorze membres du Gouvernement. Cela témoigne de la dimension interministérielle du plan France ruralités.

Pour lutter contre les logements vacants, il faut avant tout aider en matière d'ingénierie. Cela suppose de mettre en place des établissements publics fonciers (EPF) et des établissements publics fonciers locaux (EPFL), ainsi que des sociétés d'économie mixte (SEM). Sans ces instruments, les maires sont démunis face aux logements vacants, ce qui explique qu'il en existe 900 000 dans le monde rural. Plusieurs aides sont prévues dans ce domaine, mais je n'en cite qu'une : la prime de sortie de vacance, que nous rétablissons. Elle permet d'aider, à hauteur de 5 000 euros, les propriétaires qui rénovent un logement vide pour l'occuper ou le louer.

Je ne m'étends pas sur les nombreuses mesures adoptées en faveur de l'égalité des chances et de l'éducation, car vous connaissez bien ces politiques publiques. Nous essayons d'accompagner les initiatives associatives ou de collectivités locales.

La culture n'est pas en reste puisque, avec ma collègue Mme Rima Abdul Malak, nous avons obtenu 7 millions d'euros en 2024 pour financer le recrutement de VTA contribuant à l'ingénierie culturelle dans les territoires ruraux.

La santé est fondamentale. En nous inspirant de l'initiative très réussie de gynécobus dans le Var, nous lançons 100 médicobus. Si cette expérience cofinancée par les agences régionales de santé (ARS) est concluante, nous doublerons leur nombre. Chaque bus permettra d'organiser des consultations médicales un jour par mois dans vingt localités différentes. Cela fonctionne très bien dans certains départements et nous étendons ce dispositif. Il ne faut pas baisser les bras en ce qui concerne les maisons de santé. Vous pouvez nous indiquer quelles sont les collectivités qui disposent de locaux, car nous pouvons les aider à les rénover pour y installer ces maisons de santé. L'ARS peut aussi contribuer au budget de fonctionnement de ces dernières lorsqu'elles sont en déficit, ce qui est souvent le cas les premières années.

Le quatrième axe du plan France ruralités vise à renforcer les ZRR. L'attractivité des territoires ruraux dépend aussi de la présence d'industries, de commerces et de professions libérales. Les 14 000 communes situées en ZRR continueront à bénéficier d'exonérations fiscales et de charges sociales. Le projet de loi prévoira en outre des exonérations et des aides à l'ingénierie supplémentaires pour les 4 000 communes en ZRR les plus en difficulté.

Six indicateurs de performance sont prévus, mais ils ne sont pas définitifs. Je souhaite en remplacer deux et en ajouter quelques-uns plus qualitatifs.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous en venons aux questions des orateurs des groupes.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Au nom du groupe Renaissance, je vous félicite pour la qualité et la richesse du plan France ruralités.

Comme le disait Jacques Chirac en 2002, la France rurale est « Une France trop souvent négligée et pourtant si dynamique et innovante. Notre espace rural mérite une véritable ambition. Il est de plus en plus perçu par les Français comme une richesse, comme un facteur d'équilibre social et comme un lieu d'épanouissement. » Le sentiment que le monde politique ne comprend pas la réalité de la ruralité et qu'elle est délaissée par les politiques publiques ne date donc pas d'hier. C'est pourquoi le plan France ruralités, qui fait suite à l'Agenda rural de 2019, est le bienvenu.

Deux éléments de méthode me semblent fondamentaux. Il s'agit tout d'abord de la concertation réalisée avec des élus nationaux et locaux pour aboutir aux 181 mesures de l'Agenda rural. Celles-ci ont été utiles pour développer les ruralités – par exemple, le programme Petites villes de demain, le réseau France Services, la généralisation de la 4G, les maisons de santé et le soutien aux commerces de proximité. Il faut ensuite saluer votre volonté d'évaluer avec les différents acteurs les résultats des mesures de l'Agenda rural. Nous devons généraliser la culture de l'évaluation des politiques publiques, qui a longtemps fait défaut. C'est grâce à cette évaluation que vous avez bâti le plan France ruralités.

Les maisons France Services sont une réussite indéniable de l'Agenda rural. Pourtant, de nombreux maires signalent des difficultés pour financer les dépenses de personnel. Ce point a été souligné dans le récent rapport de la députée Marie-Agnès Poussier-Winsback et du sénateur Bernard Delcros, et ses auteurs plaident en faveur d'une augmentation de la contribution annuelle de l'État. Quel est votre avis sur cette question ? Une mesure est-elle prévue dans le plan France ruralités ?

Comment le travail des chefs de projet de l'ANCT qui seront recrutés grâce au plan France ruralités s'articulera-t-il avec celui des sous-préfets référents ruralité, afin d'aider le mieux possible les collectivités à accomplir leurs projets ?

Avez-vous abordé plus particulièrement le sujet de la simplification, qui est très attendue par les élus locaux ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le plan France ruralités comporte des axes intéressants, mais nous sommes habitués à ce que vos intentions ne se transforment que très rarement en propositions concrètes. La revitalisation de la ruralité est un tout, et elle devrait faire l'objet d'un projet de loi global incluant le transport, le développement des axes routiers, l'aide à la rénovation, l'attractivité économique, la médecine et les services publics. Votre plan, bien qu'il aille dans le bon sens, semble juridiquement vide, et l'enveloppe allouée à vos ambitions est bien mince par rapport aux besoins de nos territoires, qui ont été délaissés depuis six ans par votre politique de métropolisation.

Vous proposez le déploiement de 100 médicobus : nous ne pouvons que soutenir cette mesure, puisqu'elle a été défendue par les candidats du Rassemblement national lors des élections départementales de 2021. Vous parlez de planification écologique, mais vous ne prévoyez à aucun moment d'intégrer dans les discussions et dans votre projet nos agriculteurs, nos chasseurs et nos pêcheurs, qui sont les premiers défenseurs de la biodiversité et les premiers acteurs écologistes de nos territoires. Vous dites que vous voulez soutenir un peu plus nos communes qui, regroupées, pourront défendre devant les préfets des projets en matière d'habitat, de transport, de patrimoine ou encore de santé, mais comment mener des projets de restauration du patrimoine quand, dans un département comme le mien, le préfet répète aux maires qu'il n'y aura pas un euro de DETR pour les églises ? Enfin, vous annoncez vouloir pérenniser les zones de revitalisation rurale : c'est une bonne chose, mais nous attendons plus, notamment que vous considériez de la même manière nos territoires et les quartiers de reconquête républicaine.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Après France Services et France Travail, voici France ruralités, mais cette nouvelle manière de faire repose sur du mépris : le nom même de ce plan montre bien votre absence de compréhension de ce que sont les ruralités – car oui, la ruralité est plurielle. Mon territoire, que vous avez évoqué, la Creuse, n'a pas les mêmes exigences ni la même population que les territoires désindustrialisés de la Somme ou les plaines céréalières du centre de la France.

Vous avez parlé de la mobilité, qui est un véritable souci en matière d'emploi. Ce que vous prévoyez, dans votre plan, représente un peu plus de 1 euro par habitant, soit à peu près 117 000 euros dans la Creuse – c'est-à-dire un bus d'occasion.

Pour lutter contre le manque d'ingénierie dans les communes rurales, vous avez créé le programme unique Villages d'avenir, alors que toutes les associations d'élus réclament une aide au cas par cas. Ce programme ne concerne que 500 communes françaises ; faut-il comprendre que seules 500 communes sont concernées par la fermeture chronique de classes – sachant qu' a priori on aura plutôt recours au service civique pour remplacer des enseignants –, par la disparition des bureaux de poste ou par la désertification hospitalière et médicale ? Face aux déserts médicaux, votre solution est les médicobus. Peut-être vivez-vous dans le monde des sorciers, mais les magicobus et la distribution de dragibus, cela ne marche pas ; il faut arrêter de se faire des films.

Votre gouvernement accumule, une fois encore, des dispositifs restreints et complexes, et met les collectivités en concurrence pour bénéficier de quelques miettes d'argent public. Quand allez-vous réellement vous en prendre à la source des problèmes, en renforçant les dotations de fonctionnement des collectivités territoriales, en finançant les services publics, en rouvrant des guichets physiques pour accueillir nos concitoyens ? Ne me répondez pas, s'il vous plaît, que vous allez créer des maisons France Services : elles sont en partie une charge financière, non compensée, pour les communes, et elles emploient du personnel pas ou peu formé, voire en service civique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce nouveau plan pour la ruralité arrive à un moment clef pour nos campagnes, dont le sentiment d'abandon ne se dément pas, au fil de difficultés quotidiennes qui vont croissant, malgré les 181 mesures de l'Agenda rural et la brève embellie qui a suivi le covid. Nous aurions aimé nous réjouir de votre plan, mais il retombe dans le piège du saupoudrage de mesures qui ne font que corriger les reculs imposés par ailleurs.

Votre plan, opportunément dévoilé à trois mois des élections sénatoriales, ajoute un peu d'ingénierie, grâce à des techniciens en préfecture qui ne pourront être saisis que par des groupes de deux à huit communes. En matière d'efficacité, cette méthode laisse perplexe. Il y a dans l'Oise 679 communes, dont 670 rurales ou très rurales.

Viennent ensuite des mesures censées gonfler le montant des dotations en échange d'une contribution des communes à la protection de la nature ou à la production d'énergies renouvelables. C'est une vision dégradante de la ruralité, qui ne serait là que pour nourrir et divertir le citadin, mais n'existerait pas pour elle-même.

Le Gouvernement, qui avait d'abord pensé supprimer les ZRR, va finalement les proroger, mais nous manquons de précisions sur leurs contours futurs, que ce soit pour les critères d'éligibilité, les dispositifs ciblés ou les montants alloués.

L'Igedd a elle-même regretté dans un récent rapport que l'Agenda rural ait consisté en un catalogue de mesures, même si toutes n'étaient pas inutiles, au lieu d'une stratégie cohérente pour sortir la ruralité de ses difficultés. Avec France ruralités, vous retombez dans cet écueil : ce plan prévoit une quarantaine de mesures et un éparpillement des moyens nuisible à une action de l'État dans les territoires véritablement efficace.

Il y aurait ainsi 60 millions d'euros de plus pour les commerces et 90 millions supplémentaires pour le transport à la demande : est-ce vraiment cela qui va changer les choses, ces crédits étant éparpillés sur nos 35 000 communes ? En réalité, les efforts sont loin de compenser les pertes infligées par la politique du Gouvernement. Je pense à l'insuffisance des dotations face à l'explosion du coût de l'énergie, à la perte d'autonomie financière des collectivités à la suite de la suppression de la taxe d'habitation, au zéro artificialisation nette (ZAN), aux zones à faibles émissions (ZFE) et à la dégradation progressive de la présence de l'État, malgré le déploiement du label France Services, qui est mal financé.

Derrière cet agrégat confus de mesures louables, qui sont prises les unes après les autres, se cache une méconnaissance profonde de la ruralité, c'est-à-dire de la réalité des territoires ruraux, que le Gouvernement se contente d'opposer à la ville et essaie de remettre à niveau par des moyens financiers insuffisants. Malheureusement, le sentiment d'abandon demeure.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre déléguée, je salue votre travail et celui de vos prédécesseurs, que vous avez cités, Mme Jacqueline Gourault et M. Joël Giraud, à qui l'on doit Action cœur de ville, Petites villes de demain, Avenir montagnes, les maisons France Services et Fabriques de territoire. Dans ma circonscription, quatre communes bénéficient d'Action cœur de ville : Auray, Quiberon, Le Palais et Plouhinec. Vous avez aussi aidé les tiers-lieux – beaucoup d'entre eux ont su en profiter un peu.

Dans le présent plan, je voudrais vous rappeler de ne pas oublier les petites îles non reliées au continent, sur lesquelles nous avons travaillé dans le cadre de la loi dite « 3DS ». Je retiens aussi l'enveloppe de 100 millions d'euros prévue pour soutenir les communes qui préservent la nature, ainsi que les actions en faveur de la mobilité du quotidien.

Parfois, on en fait presque trop. Je pense à la protection du littoral, et aux fameuses SPPL, les servitudes de passage des piétons le long du littoral, qui deviennent en certains endroits de vraies autoroutes piétonnes, ce qui me fait un peu craindre pour le respect de la biodiversité et le recul du trait de côte – il faudra les refaire dans dix ans. On doit arriver à trouver un bon équilibre entre passage et vrai sentier.

Il faudrait peut-être aussi remettre un peu d'argent – même si je sais que ce n'est pas tout à fait votre domaine, madame la ministre déléguée – dans les contrats de plan État-région (CPER). La Bretagne est satisfaite de ce dispositif, mais nous ne voudrions pas qu'on oublie les petites lignes de demain. Vous avez failli prendre le « Tire-bouchon », il y a quinze jours, pour venir naviguer dans la baie de Quiberon ; je voudrais que vous puissiez le faire la prochaine fois.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce plan, que vous avez présenté d'une manière tout aussi concise que précise, était très attendu par les élus locaux, car les besoins sont criants dans nos territoires, mais va-t-il permettre concrètement à la ruralité d'aller mieux demain, de retrouver des commerces et des services publics de proximité, de lever les contraintes en matière de mobilité, de stopper les fermetures de classe et de permettre à tous d'accéder aux soins ? Ce sont autant de problématiques qui affectent nos concitoyens, lesquels se sentent abandonnés, tandis que de nombreux élus des territoires ruraux se sentent impuissants.

Si les financements et les solutions que vous avancez nous paraissent bien maigres, nous saluons le lancement de ce plan, qui marque une évolution dans la reconnaissance des ruralités. Certaines mesures vont, en effet, dans la bonne direction. Je pense au programme Villages d'avenir, qui répond à un véritable besoin en ingénierie des plus petites communes. De même, la mise en place d'un référent ruralité traduit la volonté d'un retour de la présence de l'État aux côtés des élus locaux, après des années de retrait de ses services dans nos territoires.

Néanmoins, je le redis, le compte n'y est pas. Alors qu'un habitant rural sur trois a pour première préoccupation l'accès aux soins, le déploiement de 100 médicobus n'est pas une réponse à la hauteur des enjeux. Un groupe de travail transpartisan, piloté par mon collègue Guillaume Garot, avait proposé des mesures concrètes pour mettre fin à la désertification médicale, mais beaucoup d'entre elles ont été rejetées lors de l'examen de la proposition de loi de Frédéric Valletoux. Une autre déception concerne la question du logement. La prime de 5 000 euros pour les propriétaires de logements vacants qui remettent ces derniers sur le marché après rénovation n'est pas suffisante. Des leviers fiscaux doivent être explorés et, à l'image de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, une Anru rurale de la rénovation des centres-bourgs doit voir le jour pour répondre au double défi de la rénovation énergétique des bâtiments et de la préservation du foncier agricole.

Je relaie aussi les interrogations de nombreux maires ruraux au sujet de l'élargissement de la dotation pour la protection de la biodiversité à un plus grand nombre de communes : à qui cette dotation profitera-t-elle et quelles seront les actions subventionnées ? Malgré l'annonce d'une augmentation de l'enveloppe, qui serait portée à 100 millions d'euros, les montants prévus paraissent dérisoires en comparaison des 6 milliards de plus qui seraient nécessaires chaque année pour atteindre nos objectifs en matière de transition écologique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce plan est ambitieux, malgré toutes les caricatures qui peuvent en être faites. Les territoires ruraux sont l'avenir de la France. C'est là que se joueront les enjeux de la transition énergétique et écologique, et rien ne pourra se faire sans les territoires, en particulier les ruralités.

Les territoires ruraux représentent 90 % des communes françaises et un tiers de la population. Par ailleurs, 80 % de ces territoires sont en croissance démographique. Il faut plus que jamais les valoriser. Ils ont souvent un sentiment d'abandon ou de double peine, notamment face à la crise énergétique – c'est là qu'on se chauffe au fioul et que les habitants ont besoin de se déplacer. C'est là aussi qu'on subit l'éloignement des services publics dits de proximité, malgré la mise en œuvre, ambitieuse, des maisons France Services.

Ces territoires sont au cœur de nos politiques depuis 2017, avec Action cœur de ville, l'Agenda rural et Petites villes de demain. Rien qu'Action cœur de ville représente plus de 10 milliards d'euros jusqu'en 2026. L'ensemble de ces programmes a produit des résultats concrets, mais nous restons très soucieux de l'accompagnement des territoires, notamment ruraux, dans des logiques de bassins de mobilité, d'emploi et de consommation, bien souvent ignorées.

Dans les appels à projets, malheureusement, ce sont très fréquemment les meilleurs élèves qui sont les mieux lotis, tout simplement parce que tous les territoires ne bénéficient pas de l'ingénierie nécessaire pour monter les dossiers. Nous nous réjouissons de l'ingénierie locale qui est proposée dans le cadre de ce plan, grâce à 100 chefs de projet, mais il faut mobiliser beaucoup plus : les régions, par les CPER, et d'autres partenaires tels que l'Association nationale des pôles d'équilibre territoriaux et ruraux et des pays (ANPP) et l'AMRF. Comment souhaitez-vous mobiliser l'ensemble de ces partenaires pour faire du plan France ruralités une réussite concrète ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

« Que pouvez-vous bien trouver à faire à la campagne ? Tout. Excepté le temps de le faire », disait Kipling. Le temps, dans nos petits villages, ne va pas aussi vite qu'ailleurs. Je pense aux kilomètres de routes sinueuses qu'il faut emprunter pour rejoindre l'école des enfants, quand leur classe n'a pas fermé, le bureau de poste ou le commerce le plus proche ; à l'attente avant d'avoir enfin un rendez-vous médical ; au temps nécessaire, quand on est un maire rural, pour intervenir à chaque urgence – il n'y a bien qu'eux qui peuvent le faire ; au temps pour qu'un animateur d'une maison France Services, à trente kilomètres de là, puisse vous dépêtrer d'un dossier d'aide ; au temps de la connexion internet par le réseau téléphonique. Le seul temps qui est finalement bien raccourci dans nos campagnes, c'est, de la façon la cruelle, celui de la vie. L'espérance de vie y est, en effet, de deux ans inférieure à celui des villes.

On n'a pas le droit aujourd'hui de ne pas être radicalement ambitieux pour nos campagnes. On n'a pas le droit de lâcher quelques millions d'euros, 100 chefs de projet de France ruralités dans quelques sous-préfectures, quelques médicobus et une aide pour entretenir les monuments aux morts, et se dire que le travail est fait. Je sais, madame la ministre déléguée, que le sujet vous tient à cœur et j'aimerais tant, quand je rentre dans ma circonscription, entre Lus-la-Croix-Haute, Mirabel-aux-Baronnies et Grignan, pouvoir dire à toutes celles et à ceux qui y vivent que nous comptons autant que les habitants des villes, au cœur de la République. Nous ne demandons pas l'aumône.

Pourtant, nous avons l'impression que la France est à deux vitesses. En matière de mobilité, tandis que nos concitoyens vivant dans les métropoles ont le choix entre le vélo, la marche et les transports en commun, et que 35 milliards d'euros seront investis dans le Grand Paris Express, vous consacrez seulement 30 millions d'euros, soit un peu plus d'un euro par habitant, à la mobilité dans les campagnes, en laissant la gestion d'un service public absolument essentiel à des associations de bénévoles. Il faut encore deux jours, en comptant les correspondances, pour faire les 88 kilomètres qui séparent Crest de Nyons en transport en commun. Dans le domaine du logement, les opérations de revitalisation de territoire (ORT) sont une première étape bienvenue, mais l'« Airbnbisation » est rampante, les terrains s'achètent à prix d'or et les enfants du pays ne peuvent plus se loger dignement. Rien n'est prévu, ou si peu, en ce qui concerne l'énergie, la fracture numérique, l'aide à l'installation paysanne et le tourisme durable.

Pourtant, je crois sincèrement que l'avenir se joue dans ces 88 % de la France. Nous en avons marre de vivre sous cloche ou d'être misérabilisés. Nous voulons des politiques climatiques et écologiques ambitieuses pour les ruralités, tout aussi ambitieuses que pour les villes, pour qu'enfin on ait aussi le temps de changer le monde à la campagne.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il y a quatre ans, Édouard Philippe, alors Premier ministre, annonçait la création de l'Agenda rural, qui avait vocation à répondre aux préoccupations des habitants de nos territoires. Quel en est le bilan ? L'accès aux soins et aux services publics reste compromis, les commerces, souvent éloignés, continuent de fermer, et la dépendance à la voiture est de plus en plus problématique, alors que le prix de l'essence ne cesse d'augmenter.

Le plan France ruralités fera-t-il mieux que son prédécesseur ? À première vue, nous avons des doutes, puisque les moyens financiers semblent en deçà des ambitions. On ne lutte pas contre le sentiment d'abandon des territoires avec seulement des promesses.

Sur un certain nombre de points, nous reconnaissons cependant l'existence d'avancées. Le programme Villages d'avenir, par exemple, va dans le bon sens. Il permettra d'aider les élus à concevoir et à porter leurs projets grâce à l'appui de 100 chefs de projet. Reste à déterminer combien de communes pourront effectivement être accompagnées. Le chiffre de 500 a été mentionné : le confirmez-vous ?

La valorisation des aménités, grâce à une dotation qui sera portée à 100 millions d'euros, est un autre sujet d'importance. Pour l'instant, la dotation est réservée aux communes situées dans un parc national, un parc naturel régional ou une zone Natura 2000. D'autres communes pourront-elles désormais prétendre à cette dotation et, surtout, qu'est-ce qui sera qualifié d'aménité rurale ?

Quant au dispositif des zones de revitalisation rurale, il sera prolongé, mais suivant quel zonage ? J'appelle votre attention sur les difficultés et les disparités au sein d'un même territoire – les communautés de communes, qui risquent d'être le périmètre choisi, comptent ainsi des territoires périurbains, connaissant des revenus médians élevés, et des territoires hyperruraux, beaucoup plus en difficulté.

Concernant le projet de loi relatif à France ruralités, qui est destiné à permettre de nouveaux progrès et à restructurer les services publics en milieu rural, quels en seront le calendrier et les principales ambitions ?

Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Une grande partie d'entre vous, quelle que soit son appartenance politique, a reconnu qu'il y avait des avancées, et je vous en remercie. Nous y avons mis toute notre énergie depuis un an.

Vous avez demandé, notamment Mme Pochon, si cela suffirait, et si on allait changer le monde de la ruralité grâce à ce plan. Vous avez raison de poser la question en ces termes, mais il faut être conscient que nous pourrons, grâce aux indicateurs que nous avons prévus, faire des évaluations tous les six mois et qu'il y aura à la fin de l'année une petite dizaine de territoires d'expérimentation. On pourra ainsi voir si on a investi de l'argent d'une manière qui n'est pas très utile, parce que personne ne s'en saisit, et si certains besoins, auxquels nous n'avons pas répondu, émergent dans d'autres domaines. Cela peut paraître surprenant, mais nous avons conçu France ruralités comme un plan évolutif et adaptable, sur la base d'indicateurs de mesure.

Si vous avez des propositions concrètes, sur la base du fonctionnement de ce que nous allons mettre en œuvre dans les six mois qui viennent, et des témoignages, ne vous privez donc pas de nous les faire remonter. L'idée est que France ruralités doit être utile à nos concitoyens. Nous avons bâti ce plan avec nos convictions et à la suite de rapports et de concertations, mais nous restons humbles. Il y aura une capacité d'adaptation si vous pensez qu'il faudrait faire d'autres choses qui ne sont pas prévues à ce stade.

Vous êtes nombreux à avoir dit que 30 millions d'euros pour la mobilité, 100 millions pour les médicobus et 100 millions encore pour la dotation en faveur de la biodiversité, c'était bien mais pas assez. Commençons déjà par utiliser ces moyens ! Soyez nos porte-parole dans les territoires, non pas pour dire que ce que fait le Gouvernement est génial – ceux qui sont dans l'opposition ne le diront jamais –, mais pour inviter, parce qu'ils aiment la ruralité, les communes à se saisir de ces dispositifs. Nous regarderons si elles le font parce qu'elles apprécient ces mesures, et inversement, si elles ne s'en saisissent pas car elles ne les connaissent pas.

Si au bout du compte, les 100 médicobus sont insuffisants et qu'il faut en prévoir 200, nous trouverons les ressources. Je doute qu'on utilise intégralement en 2024 les 30 millions d'euros prévus pour la mobilité du dernier kilomètre, mais je peux me tromper : il faudra peut-être 40 ou 50 millions d'euros. Portons des projets d'ingénierie en matière de mobilité, et essayez de me faire remonter les manques éventuels. En tout cas, dire qu'il n'y a pas assez de moyens, ce n'est pas une raison pour ne rien faire. Nos ruralités sont demandeuses, et nous devons agir collectivement, quel que soit notre bord politique.

Madame Miller, vous avez dit que les maires demandent plus d'accompagnement financier pour les maisons France Services – je le sais, vous avez raison. Certains maires sont en difficulté, et nous les accompagnons avec les outils dont dispose la direction générale des collectivités locales (DGCL). Nous avons remis de l'argent pour l'accompagnement par les maisons France Services et nous avons prolongé les conseillers numériques. Nous sommes conscients, M. Stanislas Guerini et moi-même – nous travaillons d'une façon très partenariale sur ce sujet –, que beaucoup de maires nous demandent de faire plus. Nous avons pérennisé le dispositif et nous l'avons renforcé, mais j'entends ce qui nous est dit – nous ne sommes pas sourds et nous allons voir ce que nous pouvons faire.

S'agissant des chefs de projet en ingénierie dans les territoires, ils feront les diagnostics que j'ai évoqués, puis ils convoqueront tous les acteurs de l'ingénierie et ils feront venir tous les maires qui le souhaitent, lors de deux ou trois séances par circonscription. Ils verront, d'ici à la fin du mois d'octobre, l'ensemble des maires ruraux, afin que chacun d'entre eux connaisse, dans les départements où nous aurons recruté un chef de projet, celui qui a rejoint le préfet et comment il procédera. Les maires pourront alors lever le doigt, et les projets émaneront des territoires. Les chefs de projet se donneront deux mois pour faire le tour des premiers projets et pour leur apporter soit de l'ingénierie qui existe déjà, soit leur propre ingénierie, soit de l'ingénierie qui sera achetée, afin d'assurer un accompagnement.

En ce qui concerne la simplification, nous sommes vraiment sur la bonne voie grâce au document unique qui résultera de l'ingénierie et qui pourra donner lieu à des financements des départements et des régions, mais il faudra que vous me laissiez du temps en la matière : je n'ai pas encore convaincu tout le monde. Il faut que je m'adresse à tous les départements et à toutes les régions. Je m'appuierai, évidemment, sur les associations d'élus, Régions de France et Départements de France. Nous devrions arriver à assurer la simplification que tous les maires appellent de leurs vœux, si les départements concernés jouent le jeu, bien sûr.

S'agissant de l'évaluation, j'ajoute que nous avons mis en place ce que nous appelons, par référence au Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, un « Giec de la ruralité ». Il s'agit tout simplement de scientifiques qui ont l'habitude de travailler avec une entité dénommée Popsu – la Plateforme d'observation des projets et stratégies urbaines. Nous avons la chance qu'environ 200 scientifiques soient pilotés par Popsu dans notre pays. J'ai fait leur rencontre grâce à Mme Sandra Marsaud – je connaissais déjà Popsu métropoles, puis j'ai découvert, il y a un an, Popsu territoires. Popsu a trouvé une vingtaine de scientifiques qui vont nous aider à évaluer, au fil de l'eau, l'efficacité des politiques publiques en matière de prise en compte de la biodiversité et de l'environnement.

M. Antoine Villedieu a dit que le plan était vide juridiquement et qu'il aurait fallu faire ceci et cela. Je ne peux pas vous dire « non », et c'est peut-être ce que vous auriez proposé si vous étiez au Gouvernement. En tout cas, nous ne pensons pas que la loi réglera tout, mais plutôt qu'il y a un besoin en la matière dans deux domaines. Le premier est la définition et les critères des zones de revitalisation rurale, qui font l'objet de deux propositions de loi au Sénat et d'un projet de loi sur lequel nous travaillons – nous sommes ainsi en train de regarder la question posée par M. Taupiac au sujet des communes et des intercommunalités. Il faut aussi inscrire dans la loi les critères définissant quelles collectivités pourront bénéficier de la dotation en faveur de la biodiversité. Un inspecteur de l'Igedd y travaille.

Le projet de loi permettra de reconnaître les ruralités dans la loi, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, mais je ne pense pas qu'il soit nécessaire de tout mettre dans la loi. Pourquoi les mots « chasseurs » ou « pêcheurs » ne sont-ils pas présents ? Nous les aimons et nous ne faisons pas preuve de dogmatisme : les chasseurs et les pêcheurs ont leur rôle à jouer. Il ne faut pas se placer dans un camp plutôt que dans un autre : dans la ruralité, on aime les chasseurs et les pêcheurs, la biodiversité, l'environnement et l'écologie. Tout cela, on l'aime et je pense qu'on peut arriver, ensemble, à le concilier.

Y a-t-il deux poids, deux mesures, entre les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les ruralités ? Notre objectif est qu'il y ait plus d'équité territoriale et d'aller chercher de l'argent pour des sujets qui nous semblent pertinents. S'il n'y en a pas suffisamment, nous saurons en trouver. Vous aurez en moi une ambassadrice lorsqu'on verra que cela marche et qu'il faut plus d'argent, mais en attendant commençons, si vous le voulez bien, par nous saisir de ce qui est déjà proposé.

D'où sort le nombre, évoqué par Mme Catherine Couturier, de 500 communes accompagnées ? S'il y en a 800, nous serons très contents, et s'il n'y en a que 200, nous serons aussi très contents. J'ai dit que nous répondrons aux maires qui lèveront le doigt, et tout dépendra des sujets sur lesquels ils voudront se positionner. Villages d'avenir vise à accompagner en matière d'ingénierie les communes qui le souhaiteront, pour leurs politiques culturelles, pour leur vision prospective en matière d'aménagement du territoire ou pour leurs besoins en ingénierie financière. Nous n'avons pas fixé un nombre de communes ; vous avez peut-être entendu parler, quelque part, de 500, ce qui nous irait très bien, mais ce n'est pas un objectif ou une fin en soi. L'idée est d'accompagner les ruralités : plus les maires nous saisiront en matière d'accompagnement pour leurs projets, plus nous serons heureux.

Oui, des classes ferment, mais nous ne sommes pas là pour en parler.

Vous avez évoqué, à propos des médicobus, un monde de « sorcières », de « magibus ». Je ne comprends pas bien pourquoi vous accablez de moqueries cette proposition qui vise tout simplement à améliorer la qualité de vie de nos concitoyens, alors que j'ai l'humilité de vous dire que si personne n'utilisait ce dispositif, nous pourrions tout à fait évoluer, pour faire d'autres choses, que vous pourriez, notamment, nous proposer.

Monsieur Pierre Vatin, vous nous dites que les choses vont dans le bon sens mais que nous saupoudrons les mesures. J'accepte certaines critiques – ceux qui ont travaillé avec moi savent que je les considère comme un vecteur de progrès –, et je sais que toute proposition d'action peut donner lieu à critiques. Mais si nous prévoyons des mesures pour le logement et pas pour la mobilité, on va nous dire que nous ne comprenons pas la ruralité. Or nous avons essayé de couvrir un large spectre de sujets après avoir écouté, avec mon équipe, les maires des villages, les associations et les habitants, que j'ai beaucoup rencontrés. Vous dites que j'ai une vision dégradante de la ruralité : je le prends presque comme une insulte. Je respecte votre point de vue, mais nos propositions ne donnent pas une vision dégradante de la ruralité. Au contraire, nous voulons une ruralité encore plus heureuse, dont on rémunère les richesses en aménités rurales, et à laquelle on essaie de fournir des services en matière de lutte contre les logements vacants et d'accompagnement des projets de mobilité. Nous verrons bien si ces actions suffisent. En attendant, dialoguons, échangeons, soyons constructifs, aimons la ruralité, appliquons les mesures proposées et évaluons ce qui fonctionne et ce qui marche moins bien.

La Première ministre a annoncé la pérennisation du dispositif des ZRR dès novembre 2022, et les contenus du dispositif seront présentés à l'automne prochain. Nous prolongeons les ZRR, car la définition de critères de rémunération des aménités rurales est complexe – peut-être que si vous étiez au pouvoir, vous auriez déjà trouvé, mais nous y travaillons depuis un an, et nous avons fini par mandater un inspecteur de l'Igedd. Nous consultons et nous cherchons à dégager des critères pertinents pour élargir les zones Natura 2000. Ce n'est pas facile, et les décisions feront sûrement l'objet de critiques. Deux propositions de loi ont été déposées sur le sujet, mais elles ne sont pas convergentes ; je suis néanmoins très confiante sur le fait que nous aboutissions à un texte de compromis entre votre assemblée, le Sénat et le Gouvernement, dans l'intérêt des ZRR.

Monsieur Jimmy Pahun, je vous prie de m'excuser de ne pas avoir évoqué les tiers-lieux, qui se trouvent également au cœur de France ruralités ; certains d'entre eux relèvent de l'économie sociale et solidaire et plaisent beaucoup. Le plan y consacre 12 millions d'euros. Portez des projets de tiers-lieux ! Quand il n'y aura plus d'argent pour les financer, nous irons chercher des crédits supplémentaires, mais cette enveloppe de 12 millions est énorme par rapport à ce que l'on a effectivement dépensé pour ces projets dans les territoires ruraux : il faut donc sensibiliser les collectivités territoriales et leur parler de Fabriques de territoire pour leur donner envie. Nous serons au chevet de ces projets, qui se développent souvent dans des centres-bourgs.

Toutes les mesures que je vous présente et que je vous invite à examiner plus en détail viennent en complément du CPER, du fonds Vert, de la DETR et de la DSIL. Pour financer les médicobus, nous avons trouvé, avec le ministère de la santé et de la prévention, de l'argent qui s'ajoute à tous les moyens déjà mobilisés. Le volet consacré aux transports collectifs dans les contrats de plan État-région satisfait plus ou moins les régions, mais que celles-ci travaillent avec mon collègue M. Clément Beaune sur toutes les mobilités à l'échelle régionale ! France ruralités interviendra pour les fins de parcours à partir des gares et des arrêts de bus.

Monsieur Stéphane Delautrette, je partage votre constat sur l'existence de besoins criants. J'ai travaillé avec beaucoup d'entre vous et des élus locaux, et c'est vous qui nous direz si les choses s'améliorent. Vous saurez m'interpeller sur ce qui ne va pas dans le cadre des questions au Gouvernement, et nous saurons effectuer les ajustements qui se révéleront nécessaires. Lançons déjà ce programme, que nous avons élaboré en toute humilité avec la Première ministre et quatorze collègues du Gouvernement, au service des habitants de la ruralité. La capacité à ajuster les mesures est un facteur essentiel de la réussite du programme.

Vous estimez que la prime de 5 000 euros versée aux propriétaires remettant sur le marché des logements vacants après leur rénovation n'est pas assez élevée ; vous avez raison. Concernera-t-elle 10 000, 5 000, 3 000 ou 2 000 logements ? Nous verrons. Nous nous sommes bagarrés pour qu'elle soit plus importante, mais au moins sommes-nous parvenus à la rétablir ; réjouissons-nous-en et voyons combien de propriétaires s'en saisissent. Avec 5 000 euros, on peut quand même couvrir la moitié des frais d'installation d'un chauffage plus moderne dans une maison de taille moyenne.

Quant à la dotation pour la protection de la biodiversité, vous avez été nombreux à dire que l'enveloppe de 100 millions d'euros était insuffisante, mais commençons par la consommer et nous ferons le point ensuite.

Madame Marie Pochon, vous avez fait une jolie intervention avec des références au temps. Certes, cette dimension est importante, mais je suis dans l'action. Il est en effet plus long de se connecter à internet dans les territoires ruraux qu'en ville et l'espérance de vie y est plus brève. Je partage votre diagnostic et j'espère que France ruralités améliorera les choses. Je vous soutiendrai si vous voulez amender et compléter notre plan en cas de besoin.

Monsieur David Taupiac, vous avez raison de dire que l'essence est chère dans les territoires ruraux. Il faut lutter contre la vie chère dans ces territoires ; voilà pourquoi le développement d'un service public de mobilité à l'échelle intercommunale est essentiel. Les EPCI veulent s'occuper de logement et jouer un rôle de complément de celui des régions dans l'organisation de la mobilité : qu'ils se lancent ! Nous avons des crédits pour les accompagner.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous en venons aux questions des autres députés.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Deux programmes ont bien fonctionné : Action cœur de ville, lancé à Saint-Dié-des-Vosges, le 18 avril 2018, par le Président de la République, sur une idée originale de M. Jacques Mézard, et Petites villes de demain, lancé en 2020 sous l'égide de Mme Jacqueline Gourault. Avec ma collègue Laurence Maillart-Méhaignerie, nous pensons qu'un pilotage national fort de ces programmes est indispensable ; or certains maires ont le sentiment que la volonté du Gouvernement faiblit dans ce domaine : pourriez-vous les rassurer ? Quel premier bilan tirez-vous de ces deux programmes de revitalisation ?

Quel sera le seuil d'éligibilité des communes à la nouvelle dotation pour la valorisation des aménités rurales ? Sera-t-il le même que celui de la dotation pour la protection de la biodiversité qu'elle remplace ou comptez-vous la réserver aux communes rurales, alors que certaines villes moyennes possèdent parfois quelques centaines voire quelques milliers d'hectares de forêt ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La ressource en eau se raréfie, et il est de notre devoir de la protéger et de bien la gérer, afin de garantir durablement une eau de qualité à nos concitoyens. Comment entendez-vous soutenir les petites communes pour la gestion de l'eau et de l'assainissement, notamment en ce qui concerne l'ingénierie territoriale, l'entretien et le renouvellement des réseaux ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous avez soulevé de nombreux espoirs chez les élus locaux, dont je fais partie. En Ardèche, de nombreux territoires cumulent plusieurs complications, par exemple des problèmes de zone blanche téléphonique et numérique, de manque de soignants et de logements, d'eau ou de mobilité contrainte, la voiture étant le seul mode de déplacement. Comment les élus locaux pourront-ils se saisir de ce plan pour faire avancer leurs projets ? Comment seront-ils accompagnés pour affronter concrètement cette multiplicité de contraintes ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les députés, les sénateurs et le Gouvernement ont travaillé ensemble sur la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie. Les obligations légales de débroussaillement étaient au cœur de ce texte, dans lequel nous avons dressé le constat de la difficulté pour les communes rurales forestières de contrôler et, le cas échéant, de sanctionner les propriétaires qui ne remplissent pas leurs obligations légales.

Dans le cadre du plan France ruralités, le recrutement du garde champêtre est une réponse adaptée à la prévention des risques d'incendie des forêts et, plus généralement, aux enjeux environnementaux liés au dérèglement climatique. Nous avons conscience que la valorisation du métier de garde champêtre passe par une augmentation indemnitaire. Vous souhaitez appliquer cette disposition au 1er septembre : pouvez-vous nous confirmer l'avis favorable du Conseil d'État et du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne vous apprends rien en vous disant que l'accès aux soins est particulièrement difficile dans les territoires ruraux. Des centres de soins non programmés et des maisons pluridisciplinaires de santé ont été créés : ils font preuve de leur efficacité, mais ces structures sont surtout implantées dans des villes de taille moyenne, comme c'est le cas dans mon département de Vendée où vous vous êtes rendue récemment.

Pourriez-vous nous préciser les contours du volet du plan consacré aux 100 médicobus ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le réseau France Services est un vrai succès qu'il faut pérenniser, en garantissant le financement du dispositif et en formant et qualifiant le personnel.

Les élus ruraux, notamment les conseillers municipaux et les maires adjoints, font vivre la ruralité : les agressions que certains d'entre eux subissent rendent nécessaire le déploiement de dispositifs destinés à les protéger.

Je défends l'opportunité d'autoriser à nouveau les financements croisés entre les départements, les régions et l'État pour les petites communes de moins de 1 000 habitants. Comme leur autofinancement est faible, il serait également opportun de leur permettre de déroger à la règle qui empêche le total des aides publiques de dépasser 80 % du financement d'une opération ; je vous remercie d'avoir accepté cette entorse, qui sera très utile, pour les pistes de défense des forêts contre l'incendie (DFCI), mais il faudrait l'étendre aux petites communes rurales souhaitant financer de petits établissements publics : cela constituerait un grand bol d'air pour elles.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous ai accueillie en novembre dernier dans le Pas-de-Calais, et vous connaissez mon attachement à la recherche d'ingénierie pour les maires ruraux. La désignation de 100 chefs de projet pour les territoires ruraux est positive, mais vous comptez les implanter dans les chefs-lieux d'arrondissement. Chez moi, ce chef de projet sera donc installé à Arras, ville située en dehors de ma circonscription, la première du Pas-de-Calais, qui compte 294 communes. Arras est la ville-centre d'une communauté urbaine et elle se trouve donc éloignée des questions rurales ; Marquion est plus proche de Cambrai dans le Nord, et Auxi-le-Château ou Le Transloy sont plus proches de Péronne dans la Somme. Le chef de projet doit être implanté en territoire rural, afin de garantir une mise en œuvre du plan qui soit cohérente et attentive aux spécificités rurales.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les ZRR ont été créées par ordonnance en 1995. Les gouvernements successifs ont toujours tenu de belles paroles sur la ruralité dans une perspective électoraliste, mais quel bilan tirez-vous de ces zones ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La Première ministre affirme que le plan France ruralités répondra au sentiment d'abandon des territoires ruraux. Nous avons très bien ressenti cet abandon lorsque vous avez décidé, le 28 juin, de mettre un terme, le 1er septembre prochain, à l'activité de la dernière trésorerie de ma circonscription, située à Arreau dans les Hautes-Pyrénées, département qui a compté treize trésoreries. Celle-ci se trouve dans une zone montagneuse très rurale : vingt-deux conseils municipaux ont pris une délibération pour demander son maintien, mais rien n'y a fait. En outre, cinq postes de professeur des écoles seront supprimés à la rentrée prochaine, ce qui entraînera la fermeture de douze classes et de quatre écoles. Vous avez même dit, en présence des maires d'Ardengost et de Vignec, que les Français étaient réfractaires au changement. Ce n'est pas vrai, madame la ministre déléguée, car ce sont ces mêmes Français qui font de notre pays la septième puissance économique mondiale.

Avec vous, la ruralité ne se sent pas abandonnée mais méprisée. Votre fameux plan est une « boîte à outils », selon vos propres mots, mais avant d'en vendre, ne faudrait-il pas arrêter de tout casser ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour les ruralités, c'est toujours la même sentence : les miettes. Pour la mobilité, votre plan prévoit 90 millions d'euros sur trois ans quand Emmanuel Macron a annoncé des milliards pour les métropoles et leurs RER. Pour les écoles, vous proposez des services civiques et des points info jeunes, alors qu'il suffit de venir chez nous une seule fois pour se rendre compte que nous avons besoin de maîtresses et de maîtres d'école – dans la Haute-Vienne, nous nous battons tous les ans contre les fermetures de classe dues aux pertes d'effectifs décrétées par le Gouvernement, sans parler des non-remplacements qui laissent nos enfants sans professeur. Pour lutter contre les déserts médicaux, vous proposez des médicobus. Tous ces pansements ne feront pas longtemps illusion.

Pourquoi le plan ne comprend-il aucun investissement de long terme dans les services publics ? Il s'agit pourtant du seul moyen de casser le cercle vicieux qui persiste depuis des années : si vous voulez que des médecins, des professeurs et des cheminots s'installent chez nous, il faut leur montrer que des services sont là pour eux et pour leur famille.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est le journal Les Échos qui a révélé, le 14 juin, que les 100 chefs de projet travailleraient avec des collectivités locales, qui obtiendraient ainsi un label. L'article citait un objectif de 500 communes ; vous l'avez démenti puisque vous venez de préciser que vous iriez au-delà de ce chiffre.

Les plans Action cœur de ville, Petites villes de demain et Avenir montagnes ont permis à certains de réaliser des projets. Vous avez évoqué les 900 000 logements vacants, ce phénomène constituant une véritable préoccupation dans les territoires ruraux. Si nous voulons rendre nos territoires attractifs, il faudra donner aux maires des outils pour préempter et acquérir des logements vacants, afin de les réhabiliter et d'attirer des populations. Au-delà de cet aspect, la problématique des mobilités demeure centrale.

Vous n'avez pas répondu à ma question sur le renforcement des dotations de fonctionnement.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous nous sommes longtemps plaints de l'abondance des aides versées aux banlieues et aux quartiers urbains et de leur faiblesse pour la ruralité. Progressivement, on s'est aperçu que la révolte grondait également dans les territoires périphériques ruraux.

Les collectivités territoriales doivent financer de plus en plus d'études et recruter de plus en plus de personnes en ingénierie pour ne serait-ce que concourir à l'obtention des aides. Les moyens que les collectivités doivent ainsi déployer réduisent beaucoup leur autonomie.

Les critères d'éligibilité à la dotation pour la protection de la biodiversité concernent certaines zones protégées, mais ils laissent de côté les réserves mondiales de biosphère de l'Unesco : je souhaitais soumettre cette question à votre réflexion.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il y a deux semaines, un jeune homme qui conduisait sans permis est mort. Chez moi, dans mon petit village, nous conduisions sans permis des scooters, car nous n'avions pas le choix ou pas les moyens de le passer. Thomas Piketty a récemment expliqué dans Le Monde que les banlieues qui s'enflamment avaient beaucoup plus en commun avec les bourgs et les villages abandonnés que ce que l'on imagine.

La surconcentration, dans quelques hauts lieux de richesse, d'offre médicale, de commerces et de lignes TGV contraste avec le cri de désespoir poussé partout ailleurs devant la réduction de tous les services. Le revenu annuel moyen atteint tout juste 9 000 euros par habitant à Creil, stagne à 17 000 euros dans de nombreuses communes rurales de ma circonscription et dépasse 100 000 euros là où nous sommes, dans le 7e arrondissement de Paris.

Tandis que certains montent les précaires des campagnes contre les précaires des villes, qu'allez-vous mettre en place pour résorber la fracture territoriale et ses inégalités abyssales ? Cette fracture abîme tant ce qui nous est commun, à savoir la promesse républicaine de liberté, d'égalité et de fraternité pour chacun de nos concitoyens.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Plan chaleur, plan logement, plan eau et maintenant plan France ruralités, autant d'outils qui donnent l'illusion de prendre la mesure des enjeux alors que la réalité est fort différente puisque vous laissez des territoires dépérir. Comme tous les plans précédents, France ruralités déçoit ; le diagnostic est bon, mais les propositions et les moyens sont faibles. L'attente sera très longue sur les parkings où s'arrêteront les médicobus : il faudra s'armer de patience ou avoir beaucoup de chance pour voir un médecin dans certains territoires. Des solutions transpartisanes existent pour favoriser un accès aux soins permanent, mais vous les avez rejetées. De la même manière, les 100 chefs de projet risquent d'être tellement sollicités par les élus que certains villages ne verront pas l'avenir de sitôt. Dans les ruralités, les habitants et les habitantes ne demandent pas l'aumône mais la mise en œuvre effective de la promesse républicaine d'égalité, notamment pour l'accès aux mêmes droits, quel que soit son lieu de résidence.

Comment allez-vous convaincre le Gouvernement de sortir d'une vision misérabiliste des ruralités, et quand celui-ci prendra-t-il les mesures nécessaires pour assurer l'équité territoriale, que vous avez évoquée au début de votre intervention ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La ruralité profonde s'organise autour des bourgs-centres ; elle n'est pas résidentielle, car elle est proche des grandes villes, ni touristique, car ces zones sont éloignées de la mer et de la montagne : elle est donc souvent oubliée.

Ces territoires subissent une baisse de leur population, laquelle plombe leur dynamisme, car la démographie conditionne l'équilibre financier des services, publics comme privés, les investissements dans les infrastructures et le règlement du problème des logements vacants. Les politiques déployées, par exemple dans le domaine du logement, ne font qu'accompagner la métropolisation – libération du foncier, accélération et verticalisation de la construction. Vous procédez à des chocs d'offre pour la ville, mais nos territoires attendent un choc de demande : déconcentrer l'économie fait partie des solutions, car celle-ci fige les populations. Quand allez-vous rééquilibrer le territoire par l'économie ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous nous félicitons de certaines décisions particulièrement positives, telles que la pérennisation des ZRR, le renforcement de l'ingénierie à la disposition des maires ruraux et l'augmentation des aides aux territoires ruraux pour leur planification écologique. Comment avez-vous prévu de désigner les communes ayant le plus besoin des ZRR à l'avenir ? J'ai lu que vous deviez poursuivre la négociation avec nous, parlementaires, mais également avec des associations d'élus et des acteurs économiques pour définir les critères d'élaboration de la nouvelle carte des ZRR. Comment comptez-vous nous inclure dans cette réflexion et quel est le programme prévu à cet effet ?

La Première ministre a déclaré que, dans le cadre du déploiement de ce plan, soixante-quinze premiers commerces allaient ouvrir : confirmez-vous cette annonce ? Comment ces ouvertures peuvent-elles être si rapides ? Sur quels critères les commerces ont-ils été choisis ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les ruralités sont très diverses. La Première ministre s'est récemment exprimée sur un droit à la différenciation, qui autoriserait l'adaptation des politiques publiques aux territoires. Cette mesure épouserait la diversité des ruralités françaises – le département du Vaucluse et l'Aisne de Jean-Louis Bricout sont deux mondes opposés. Que pensez-vous du droit à la différenciation et de la possibilité de donner aux élus locaux et aux préfets de département l'opportunité de déployer des politiques publiques dans un cadre normé défini par l'État ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le plan France ruralités manque de clarté dans la définition des objectifs poursuivis et de la ruralité de demain. Dans le Gers, la population augmente artificiellement car le solde migratoire est positif alors que le solde naturel est négatif. La population active est très peu nombreuse – l'une des plus faibles de la région Occitanie – et le taux de chômage est faible, de l'ordre de 5 %. L'enjeu est de rendre nos territoires attractifs pour les jeunes actifs afin que les entreprises puissent recruter. Dans ma circonscription de 190 000 habitants, il y a 22 000 offres d'emploi à pourvoir car les entreprises éprouvent d'énormes difficultés à trouver des salariés. Nous devons fixer des objectifs de rééquilibrage de la pyramide des âges dans la ruralité.

Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Monsieur David Valence, il est probable que le pilotage des plans Action cœur de ville et Petites villes de demain souffre de quelques faiblesses – j'ai déjà entendu ce reproche. Un nouveau directeur général, M. Stanislas Bourron, vient d'être nommé à l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et un nouveau président vient d'y être élu, en la personne de M. Christophe Bouillon. Ils réfléchissent à une nouvelle organisation de l'agence et vont procéder à de nombreux recrutements. Une personne a été embauchée pour piloter Action cœur de ville (ACV) et Petites villes de demain (PVD), alors que cette responsabilité était auparavant séparée entre les deux plans. Le nouveau directeur général lutte contre le cloisonnement qu'il a constaté à l'ANCT et cherche à développer la mutualisation. J'ai rencontré la responsable des deux programmes : laissons-lui le temps de s'installer et d'organiser une première réunion avec les deux chefs de projet pour relancer le pilotage, dont le manque se fait surtout sentir pour Petites villes de demain car nous avons lancé la deuxième phase d'Action cœur de ville.

Le bilan des deux dispositifs est très positif – nous pouvons vous communiquer celui qu'a dressé l'ANCT. J'ai pu constater dans plusieurs communes, et encore dernièrement à La Roche-sur-Yon, le succès qu'ils rencontrent : les maires et les habitants sont heureux ; les villes changent. Je reçois de partout des demandes de financement qui font suite à la réalisation de l'ingénierie ; et je travaille, avec la DGCL et l'ANCT, pour que les communes labellisées ACV ou PVD reçoivent en priorité les financements d'investissement.

Le pilotage de France ruralités sera également confié à l'ANCT : trois ou quatre personnes seront les interlocuteurs des chefs de projet qui, placés sous la responsabilité des préfets, auront bien besoin d'une animation, comme pour PVD et ACV.

Plusieurs d'entre vous souhaitent connaître les critères qui rendront les communes éligibles à la rémunération des aménités rurales, certaines disposant de centaines de milliers d'hectares de forêts et d'autres pas. Nous n'avons pas encore décidé si la taille des communes sera la référence, comme elle l'est pour les zones Natura 2000 ou les parcs naturels. J'attends le rapport que les deux inspecteurs de l'Igedd doivent me remettre fin juillet pour déterminer ces critères, qui feront l'objet du troisième article du projet de loi.

Pour ce qui concerne les ZRR ou les aménités rurales, je souhaite vous associer à l'élaboration du projet de loi, au stade que vous souhaiterez et selon les modalités que vous définirez. Monsieur le président, que proposez-vous en la matière ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Un groupe de travail transpartisan associé à votre cabinet permettrait à notre commission de prendre toute sa part à l'aspect législatif du travail.

Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Monsieur Haury, les objectifs du plan « eau » du Président de la République sont clairs, et la ruralité jouera son rôle en matière de sobriété. Des communes ou groupements de communes pourront tout à fait se saisir de l'ingénierie pour engager une réflexion sur les moyens de transférer leur compétence en matière d'eau aux intercommunalités, lorsqu'elles y sont contraintes, ou de préserver la pureté de l'eau d'une source de leur territoire. Le chef de projet ne sera pas forcément le plus compétent sur ces questions, mais il s'appuiera sur l'agence de l'eau, sur l'Ademe et sur les acteurs du territoire et s'assurera que l'on répond bien au cahier des charges du maire, et que l'on n'apporte pas une solution venue d'en haut.

Madame Heydel Grillere, les projets partent du territoire, c'est-à-dire du maire, du président de l'intercommunalité ou d'un PETR fort qui a déjà conduit des travaux d'ingénierie. Les élus doivent émettre un souhait, qui correspond soit à un engagement de campagne, soit à un projet qu'ils soutiennent. Que leur projet porte sur l'eau, les zones blanches, le logement, ou encore les mobilités, le chef de projet leur accordera une demi-journée pour faire un prédiagnostic et définir les pourtours du projet et les compétences à mobiliser pour le faire aboutir.

Si le projet concerne la mobilité du dernier kilomètre, par exemple, le chef de projet invitera d'abord le maire à se regrouper avec d'autres élus pour élargir la maille au bassin de vie, puis il mettra en œuvre l'ingénierie adaptée en matière de mobilité – associer les habitants à l'écriture du projet, trouver les sachants, s'assurer que le département ne mène pas un projet de même nature… Une fois que la solution aura émergé, les investissements viendront l'accompagner.

Si le maire arrive avec un projet concernant à la fois les zones blanches, le logement, l'eau et les voitures, l'ingénierie à déployer étant différente, le chef de projet lui demandera d'indiquer des priorités ou d'envisager de s'associer à d'autres maires des alentours. Une petite commune dynamique qui souhaite se lancer dans un projet culturel – un festival, par exemple – a ainsi tout intérêt à travailler avec les villages et les bourgs voisins pour trouver davantage de bénévoles et d'accompagnements.

Il faut encourager le regroupement lorsque cela a du sens. En revanche, pour un projet sur le logement vacant, le chef de projet ou les professionnels du Cerema identifieront les outils nécessaires pour la seule commune concernée.

Concrètement, le chef de projet organisera une réunion avec l'ensemble des maires afin que ceux-ci lui signifient leurs projets, qu'ils lui préciseront par écrit avant la demi-journée de prédiagnostic. Puis commencera le programme d'ingénierie, éventuellement sous-traité, qu'il coordonnera. J'ai imaginé que le dispositif démarre d'un projet qui émerge des maires ; à vous de nous dire s'ils n'osent pas ou s'ils soutiennent des projets pluriels et rencontrent des difficultés à définir des priorités. Nous nous adapterons.

Madame Panonacle, nous avons en effet travaillé sur les communes forestières, avec M. Stanislas Guerini et les associations d'élus, et les gardes champêtres sont au cœur de notre projet : il faut revaloriser ce beau métier. À ce stade, nous n'avons pas reçu d'avis de la fonction publique territoriale ni du Conseil d'État, mais nous défendons cette reconnaissance. La population des gardes champêtres diminue car on ne s'est pas suffisamment occupé d'eux. Ils ne peuvent pas évoluer dans leur métier ; il faut organiser des passerelles avec d'autres métiers pour en renforcer l'attractivité auprès des jeunes, comme nous l'avons fait pour les secrétaires de mairie. Au besoin, cela pourrait passer par une proposition de loi que vous déposeriez. Je vous redis toute ma détermination, ainsi que celle de M. Stanislas Guerini.

Monsieur Buchou, dans un désert médical, il faut identifier qui est désireux d'insuffler une dynamique. En tant que député de la circonscription, vous connaissez déjà les trois ou quatre maires qui ont envie de s'engager sur la question. C'est à vous de nous désigner un porteur de projet, car nous ne définirons pas nous-mêmes s'il faut installer un médicobus ni où le faire circuler – c'est l'inconvénient de ne pas imposer une politique publique top-down. Un maire qui dispose d'un bâtiment pourrait vouloir le destiner à l'accès aux soins. Nous avons ainsi aidé une commune dont la maire avait déjà trouvé par elle-même un partenariat avec un centre hospitalier universitaire (CHU) ; nous avons apporté 80 % de DETR pour la rénovation du lieu, où des spécialistes viennent exercer une demi-journée par mois. S'il y a une dynamique au départ, nous sommes là pour accorder les financements.

Dans le cas d'un projet de médicobus, l'État finance entièrement le budget de fonctionnement – c'est l'agence régionale de santé qui trouve le médecin, celui-ci participant par choix, et le finance – et, pour moitié, les coûts d'investissement ; le reste est à trouver auprès des départements, dont plusieurs se sont d'ailleurs dits prêts à financer entièrement les médicobus. Le porteur de ce type de projet sera davantage un département ou une intercommunalité qu'une commune.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous avez bien dit que l'ARS trouve le médecin ?

Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Vous avez l'air d'en douter, et je conviens que cela risque d'être difficile. En tout cas, le dispositif est ainsi conçu. Nous sommes contents d'avoir pu travailler avec M. François Braun sur cette question.

Monsieur Lovisolo, le dispositif du plan contre les agressions d'élus est similaire pour tous les élus, qu'ils soient dans les territoires ruraux ou non. Parmi les principales mesures annoncées figure la création d'un réseau de 3 400 gendarmes spécialistes des violences à l'encontre des élus, qui doivent se faire identifier comme référents. Cet « aller vers » se déploie admirablement bien dans les départements. Le directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN) m'a dit que, sur cette question, les messages passent.

Les élus doivent également enregistrer leurs numéros de téléphone mobile dans la base de données du dispositif « Alarme élu », pour être secourus rapidement quand ils appellent le 17, car ils sont des personnes à risque.

Vendredi dernier, j'ai encore annoncé quatre axes de protection pour les élus.

D'abord, la protection juridique et psychologique. Après la réunion que le Président de la République a organisée avec quelque 300 maires, j'ai pu m'entretenir avec une quinzaine d'entre eux, dont l'un n'a pu retenir ses larmes : comme le maire de L'Haÿ-les-Roses, il avait été victime d'une attaque à la voiture-bélier, qui avait été arrêtée à temps par les gendarmes. Tous sont courageux – la première adjointe de Saint-Brevin-les-Pins m'a dit que l'équipe municipale ne démissionnera pas, que la République fera front. Nous le savons, les maires sont notre front républicain.

On nous dit que les 5 millions d'euros du plan ne suffisent pas. Nous avons prévu 1 million d'euros pour que les élus soient accompagnés par des associations spécialisées dans l'aide aux victimes de toute sorte de violences, avec lesquelles le garde des sceaux travaille. Elles vont créer un guichet unique auprès duquel trouveront désormais une protection fonctionnelle automatique et gratuite les élus des communes de moins de 10 000 habitants : une délibération du conseil municipal ne sera plus nécessaire ; les frais d'assurance et de procédure seront pris en charge. Cette somme sera-t-elle suffisante ? Les élus seront-ils nombreux à utiliser cette protection juridique et psychologique ? Je ne sais pas ; nous commençons déjà avec cet argent.

La protection physique est le deuxième axe. Nous rencontrons des difficultés pour identifier les auteurs des violences, faute de caméras de vidéosurveillance. Il ne s'agit pas de celles financées dans les communes par le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), mais de caméras qui peuvent être placées autour du domicile du maire, le temps de trouver les auteurs des attaques – bien sûr, toujours après un jugement reconnaissant que le maire est menacé, et sur autorisation du procureur. Or les gendarmes et la police ne disposaient pas de ces caméras. Nous apportons donc 3 millions d'euros pour acheter le matériel qui permettra d'élucider ces affaires.

Troisième axe : la protection judiciaire. Il s'agit, d'une part, de sanctionner celui qui s'attaque à un élu de la même façon que l'auteur de violences à l'encontre d'un gendarme ou d'un policier. La disposition adéquate ne pouvait être intégrée dans la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi) ni dans le projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice, sans risquer d'être considérée comme cavalier législatif ; elle le sera donc dans un autre texte, car nous avons besoin de telles sanctions pour montrer que l'on ne s'attaque pas à un élu de la République.

D'autre part, il s'agit de favoriser le rapprochement entre les maires et le Parquet. Lors des premières de mes nombreuses visites dans les territoires, je n'avais jamais rencontré de procureur ; dernièrement, tous étaient présents aux réunions organisées par l'AMF ou par le préfet. Il faut dire qu'avec le garde des sceaux et M. Gérald Darmanin, nous avions rédigé une circulaire enjoignant aux procureurs de se rapprocher des maires – ceux-ci, très occupés, n'avaient guère donné de suite aux cinq précédentes sur le sujet. Tous ont présenté les chiffres des actes de violences traités par leurs tribunaux respectifs, ce qui a permis de donner de la lisibilité à l'action judiciaire, à rebours du sentiment d'impunité qui nous agace tous.

Pour faciliter la reconstruction de tous les bâtiments détruits dans 500 communes, M. Christophe Béchu a indiqué que serait autorisé un reste à charge zéro pour la commune, donc, que la subvention dépasserait le plafond de 80 %. Comme le dit souvent la Première ministre, l'exception est possible : la dérogation pour aller jusqu'à 100 % est à la main des préfets, selon des conditions précises.

On ne se saisit pas assez du droit à la différenciation, qui est un marqueur de notre Gouvernement. Comme M. Lovisolo, je pense qu'il faut aller plus loin : certains territoires requièrent davantage de financements pour la mobilité, d'autres, pour la lutte contre le logement vacant. Il faudra créer des outils, et je vous invite à lire dans le détail le plan France ruralités. La Banque des territoires pourra aller jusqu'à créer une foncière par département, pour lutter contre le logement vacant. Avec un retour sur investissement en quarante-cinq ans et des loyers intéressants, ces logements offriront des possibilités de location.

Monsieur Blairy, vous ne souhaitez pas que le chef de projet s'installe à Arras. Or, pour qu'il puisse agir vite, il doit être proche du préfet et de tous les services de l'État présents en région – Ademe, agence de l'eau, direction départementale des territoires (DDT) ou Cerema. Seul dans la campagne, il ne serait proche que de quelques maires alors qu'il y en a 294 dans votre circonscription. Il faudra donc qu'il soit à un endroit d'où il pourra se rendre vite auprès de chacun, en voiture, en train ou en bus. Si la sous-préfecture est mal située ou trop grande, le préfet d'arrondissement saura trouver une organisation de sorte que le chef de projet puisse être très présent sur le terrain tout en rendant compte au préfet, qui connaît bien le territoire et pourra lui donner des informations utiles. N'hésitez pas à présenter des candidats à ces postes : au moins dix sont à pourvoir dès maintenant, même si le projet ne sera lancé qu'en 2024. Les candidats passeront un double entretien, avec l'ANCT et le préfet.

Monsieur Villedieu, le bilan des ZRR est assez discutable en raison du taux de recours. Si de nombreux rapports les critiquent, c'est que certaines communes n'ont pas su en faire un outil d'attractivité. En réalité, les ZRR marchent très bien là où les communes s'en saisissent. Le problème, comme pour toute politique publique, c'est de les faire connaître. En 2023, ce sont tout de même 380 millions d'euros qui sont consacrés aux ZRR. Une nouvelle définition du périmètre des ZRR intégrera, en plus du critère économique, ceux de la santé et de l'éducation, de sorte que toutes les politiques publiques participent à redonner de l'attractivité à ces territoires.

Madame Ferrer, je comprends votre déception. Moi-même, je me suis investie dans ce dossier en organisant deux rendez-vous avec vous-même et le délégué CGT, en étudiant la pertinence de la fermeture de cette trésorerie. Je suis intimement convaincue que l'organisation future sera plus efficace, vous êtes convaincue du contraire ; n'y revenons pas. Les conseillers financiers appliqueront le « aller vers » en se déplaçant auprès des maires concernés autant de fois que nécessaire. Attendons leur retour.

Il n'y a aucun mépris de ma part – je prends comme une insulte que vous considériez le contraire – à dire que les Français sont réfractaires au changement. Moi-même, je le suis et je dois parfois me faire violence, car on est attaché à ses pratiques. En tant que maire, il m'est arrivé de soutenir des programmes impopulaires, dont trois qui ont maintenant près de dix ans – j'avais donc raison. Parfois, on se trompe, mais, en l'espèce, je crois que l'on va vers une amélioration. Ne refaisons donc pas la discussion que nous avons eue à plusieurs reprises. En matière de services de trésorerie, les maisons France Services fonctionnent, et les citoyens en sont satisfaits.

Que tout le monde l'entende, la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité ne méprise personne ! Elle aime l'autre, elle aime le citoyen et veut améliorer sa qualité de vie. Il n'y a pas une once de mépris dans mes propos.

Mme Catherine Couturier demande une augmentation de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Tous les maires le voudraient et nous aimerions bien, nous aussi, que l'argent coule à flots. Mais nous cheminons sur un chemin de crête, en soutenant du mieux possible les collectivités locales confrontées aux multiples crises, sans aggraver encore davantage la dette publique. Bien sûr, nous pouvons toujours faire mieux, mais c'est la première fois depuis de nombreuses années que la DGF a été augmentée – de 320 millions d'euros en 2023. Nous travaillerons d'arrache-pied pour la renforcer encore davantage en 2024, mais comprenez bien qu'il ne suffit pas de le vouloir pour y parvenir. C'est facile de vouloir 1 milliard d'euros plutôt que 320 millions, mais nous ne devons pas oublier nos 3 000 milliards d'euros de dette !

Monsieur Di Filippo, vous m'avez interrogée à brûle-pourpoint au sujet de la biosphère. Je n'ai pas la réponse, mais mon cabinet vous écrira. En tout cas, vous avez de bonnes idées et nous ne manquerons pas de les étudier.

Mme Pochon me demande ce que nous comptons faire pour renforcer la cohésion des territoires. Un jeune homme est mort, les banlieues s'enflamment ; à vous entendre, nous resterions les bras ballants. Vous avez le droit de le penser et je respecte votre opinion mais, en l'espèce, nous agissons et nous avons pris de nombreuses mesures. Le plan France ruralités est un outil de cohésion des territoires et je regrette que vous n'en ayez pas pris la mesure. Le Président de la République a rappelé l'importance des sommes investies dans les plans Banlieue, bien plus élevées que celles qui l'auraient été dans le plan Borloo, s'il avait été retenu. Nous n'avons pas ménagé nos efforts pour soutenir les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) ou doter l'Agence nationale pour la rénovation urbaine des moyens nécessaires, mais est-ce seulement une affaire d'argent ? Je ne le crois pas. Nous analysons les événements pour tenter de les comprendre. Le travail est engagé, ne tirons pas de conclusions trop hâtives ; prenons le temps nécessaire. Parmi les 500 communes qui ont été le théâtre de violences, 200 ne comptaient pas de QPV. Ce ne sont donc pas forcément les banlieues qui sont en cause. Qu'allons-nous faire ? Je suis triste si vous ne voyez pas dans France ruralités une volonté forte, délibérée, d'accorder des moyens supplémentaires en faveur de la cohésion des territoires, pour restaurer l'équilibre et l'équité.

Monsieur Raux, vous avez proposé des solutions transpartisanes. Je suis en charge des collectivités locales, j'ai travaillé avec quatorze ministères et je n'ai pas besoin de vous rappeler ce que je pense de l'idée d'imposer aux médecins de s'installer en zone rurale. Mme Agnès Firmin-Le Bodo et M. François Braun vous ont répondu : cette proposition n'a pas été retenue, essentiellement parce que les médecins s'y opposent frontalement, jusqu'à se mettre en grève pour manifester leur mécontentement. N'interprétez donc surtout pas mon attitude comme une réticence à accepter une proposition transpartisane. Au contraire, j'écoute avec attention les questions que vous posez et je vous sais modéré : ce type de proposition est donc bienvenu, en général, du moins dans mon champ de compétences, c'est-à-dire les collectivités locales et la ruralité. Vous serez toujours entendu par mon cabinet mais je ne fais pas la pluie et le beau temps au Gouvernement, où nous sommes quarante ! Mes collègues vont ont répondu.

Par ailleurs, je n'ai pas une vision misérabiliste de la ruralité. Au contraire, j'en ai une très belle et j'ai envie que les gens s'y sentent heureux. Le sentiment de relégation que l'on peut percevoir naît de ce que les gens ne se sentent pas suffisamment heureux dans leur milieu. Essayons d'éviter d'employer ce terme de misérabilisme, car il pourrait renforcer l'impression des gens qui y vivent de ne pas être assez écoutés ou pris en considération. Nous verrons si, ensemble, nous réussissons à faire évoluer la situation.

Monsieur Jean-Louis Bricout, vous avez raison, nous avons favorisé un choc de l'offre de logement, mais à présent, nous devons créer un choc de la demande. J'ai un « dada », celui de pactes à conclure entre les métropoles et les territoires ruraux. Lorsque j'étais première vice-présidente de la métropole de Toulouse, je suis parvenue à faire signer des contrats de réciprocité entre la métropole et les territoires ruraux alentours, dans le secteur de l'agroalimentaire. Nous avons ainsi réussi à éviter la fermeture d'un abattoir dans le Gers, en lui achetant la viande pour approvisionner toutes les cantines des écoles toulousaines. Ce schéma pourrait être reproduit pour le logement.

Les métropoles construisent des métros, mais pas des trains qui permettraient à tous ceux qui le souhaitent de vivre en dehors de la métropole, jusqu'à une heure de trajet, tout en continuant à y travailler. Vous trouverez toujours en moi une alliée pour lutter contre la métropolisation. Du reste, ce n'est pas le Gouvernement qui est à l'origine de ce phénomène ; il nous a été imposé. Cependant, les temps ont évolué et, même si des jeunes veulent encore le métro en bas de chez eux pour aller facilement au cinéma, ils sont de plus en plus nombreux à préférer vivre à la campagne. Nous devons répondre à leurs attentes grâce à ces contrats de réciprocité entre les métropoles et les territoires ruraux.

Il faudra également déconcentrer l'économie. Un énorme travail a été accompli par le préfet M. Rollon Mouchel-Blaisot, auparavant à la tête du programme Action cœur de ville. Il a évalué les montants que nous devrions investir dans les friches, qui se situent quasiment toutes dans des villes moyennes ou en milieu rural. Nous investirons l'argent nécessaire pour les réhabiliter et permettre d'y installer des activités industrielles. Cette opération coûtera cher, mais c'est le prix à payer si on ne veut pas artificialiser de nouveaux sols. Ces crédits ne seront pas ceux dédiés à France ruralités, ce sera de l'argent supplémentaire.

Je vous associerai, bien évidemment, à ce travail, comme je vous l'ai promis, et la première réunion du groupe de travail pourrait se tenir mi-septembre.

Information relative à la Commission

La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a désigné M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur sur les pétitions renvoyées à la commission.

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mardi 11 juillet 2023 à 17 h 20

Présents. - M. Emmanuel Blairy, M. Jean-Yves Bony, M. Guy Bricout, M. Jean-Louis Bricout, M. Anthony Brosse, Mme Danielle Brulebois, M. Stéphane Buchou, M. Sylvain Carrière, Mme Annick Cousin, Mme Catherine Couturier, M. Stéphane Delautrette, Mme Sylvie Ferrer, M. Yannick Haury, Mme Laurence Heydel Grillere, Mme Chantal Jourdan, M. Jean-François Lovisolo, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, Mme Manon Meunier, Mme Laure Miller, M. Hubert Ott, M. Jimmy Pahun, Mme Sophie Panonacle, M. David Taupiac, M. Vincent Thiébaut, Mme Huguette Tiegna, M. David Valence, M. Pierre Vatin, M. Antoine Villedieu, M. Jean-Marc Zulesi

Excusés. - Mme Nathalie Bassire, Mme Lisa Belluco, M. Jorys Bovet, M. Jean-Victor Castor, M. Lionel Causse, Mme Sandrine Le Feur, M. Marcellin Nadeau, Mme Claire Pitollat

Assistaient également à la réunion. - M. Pierre Cordier, M. Fabien Di Filippo, Mme Marie Pochon, M. Jean-Claude Raux