Commission de la défense nationale et des forces armées

Réunion du jeudi 13 octobre 2022 à 9h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à neuf heures.

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Je vous prie d'excuser l'absence du président Thomas Gassilloud, retenu par une réunion de la délégation parlementaire au renseignement.

Mon général, nous vous accueillons pour la première fois au cours de cette législature, puisque vous étiez retenu au Niger lors de notre audition sur l'armée de l'air et de l'espace, en juillet 2022.

Vous êtes chef d'état-major de l'armée de l'air et de l'espace depuis septembre 2021. Auparavant, en qualité de pilote de chasse, vous avez notamment participé à des opérations au Tchad, en ex-Yougoslavie, en Arabie Saoudite ou encore au Kosovo. Vous avez au total cumulé plus de 2 600 heures de vol, dont 150 heures lors de 55 missions de guerre.

Nous souhaitons vous entendre sur les principales orientations du projet de loi de finances pour 2023 pour l'armée de l'air et de l'espace, ainsi que sur les conséquences concrètes de ce projet de budget pour nos aviateurs et les capacités de votre armée. Lors de l'audition du ministre des armées, Sébastien Lecornu, le mercredi 5 octobre 2022, vous avez mis trois thèmes en exergue : les ressources humaines, notamment l'enjeu de la fidélisation ; le niveau d'activité opérationnelle de l'aviation de chasse, en lien avec la cession de vingt-quatre Rafale à la Grèce et à la Croatie ; enfin l'espace, avec le développement des services spatiaux.

Le contexte stratégique nous rappelle combien la maîtrise de l'espace aérien est cruciale lors d'un conflit. Nous souhaiterions donc également vous entendre sur les défis à venir pour l'armée de l'air et de l'espace, notamment dans le cadre de la prochaine loi de programmation militaire (LPM).

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Général Stéphane Mille, chef d'état-major de l'armée de l'air et de l'espace

Le travail sur la LPM étant en cours, je ne pourrai peut-être pas répondre à toutes vos questions à ce sujet.

La France est une puissance aérienne et spatiale reconnue, car ses moyens aériens et spatiaux lui permettent d'agir sur l'ensemble du spectre des opérations militaires : depuis l'anticipation et la compétition, jusqu'à la contestation et, si besoin, l'affrontement. Elle est une puissance aérienne et spatiale complète, capable d'opérer dans les domaines conventionnel et nucléaire.

Elle est innovante et s'adapte en permanence, comme l'illustrent les missions Pegase ( projection d'un dispositif aérien d'envergure en Asie du Sud-Est), lancées en 2021 et consistant en un déploiement de forces en moins de quarante-huit heures, en complète autonomie, avec exécution de missions de combat à l'arrivée. Ces missions intègrent les dimensions spatiale et cyber et sont commandées depuis le Centre air de planification et de conduite des opérations (Capco), à Lyon. L'édition 2022, qui vient de s'achever, a marqué les esprits dans l'ensemble de l'Indo-Pacifique.

L'armée de l'air et de l'espace française est capable d'exploiter l'ensemble des qualités intrinsèques de l'arme aérienne, notamment la souplesse d'emploi, la puissance et l'allonge.

La France a édité sa stratégie spatiale militaire et créé le commandement de l'espace (CDE) en 2019, puis a transformé l'armée de l'air en armée de l'air et de l'espace en 2021. Dans le cadre de la montée en puissance du CDE, nous nous apprêtons à accueillir les premiers officiers du centre d'excellence espace de l'Otan dans les prochaines semaines. Pour plus de détails, je vous renvoie à ma vision stratégique, élaborée début 2022 mais qui conserve toute sa pertinence à la lumière des leçons tirées de la situation en Ukraine.

La France est enfin une puissance aérienne et spatiale industrielle. Cette industrie produit d'importants retours sur investissement pour l'emploi et les régions concernées. Elle garantit aussi au pays une certaine autonomie, particulièrement utile dans le contexte actuel.

En ce qui concerne le contexte géostratégique, notre environnement se durcit et les rivalités de puissance sont une réalité. L'évolution est la même dans tous les milieux – terre, air, mer, cyber, espace – et dans tous les champs de confrontation, dont la guerre informationnelle.

L'espace est en outre devenu un lieu de compétition stratégique. Les menaces gagnent ce milieu, alors que le nombre d'objets en orbite augmente significativement chaque année. Ainsi, 900 000 objets de plus d'un centimètre sont en orbite autour de la terre – satellites ou débris spatiaux. Certains de ces objets ont souvent des capacités duales.

Dans l'espace, les menaces se développent. En 2018, un satellite espion russe s'est approché d'un satellite européen. En novembre 2021, la Russie a effectué un tir Asat (missile antisatellite), après que la Chine a démontré la même capacité dès 2007. Fort de ces constats, j'ai demandé aux aviateurs, dans ma vision stratégique, d'être audacieux dans leurs choix pour moderniser l'armée de l'air et de l'espace, comme l'ont été leurs aînés, pionniers de l'aviation ; d'être agiles, ouverts et connectés, en restant attentifs aux aspirations de la société ; enfin, de se préparer aux combats les plus durs et de réfléchir aux besoins pour former l'aviateur de demain.

Depuis le 24 février 2022, la guerre en Ukraine fait rage. J'insisterai sur quelques points qui orientent nos travaux sur le PLF et sur la LPM.

Lors du déclenchement des hostilités de la Russie contre l'Ukraine, l'armée de l'air et de l'espace a projeté des Rafale en moins de six heures aux frontières orientales de l'OTAN. Ce tour de force a démontré que sa préparation opérationnelle lui permet de s'intégrer très rapidement dans un dispositif de l'Otan. Il confirme également que nos bases aériennes sont capables de monter en puissance dans un délai très bref. Il souligne enfin la cohérence de nos moyens – Rafale, Mirage 2000-5, MRTT (Multi Role Tanker Transport), E-3F, A400M, Samp-T que nous avons depuis projeté en Roumanie.

Un des enseignements majeurs de ce conflit, au-delà du retour des combats de haute intensité conventionnels aux portes de l'Europe, c'est la remise en lumière de la grammaire de la dissuasion nucléaire.

Autre constat : ceux qui croyaient que les seules forces matérielles suffisaient pour gagner avaient oublié le courage des hommes, la résilience collective des Ukrainiens et la solidarité stratégique au sein de l'OTAN et de l'UE.

Je retiens également que l'absence de supériorité aérienne a eu pour conséquence un retour au combat classique pour les forces au sol, avec la violence et l'attrition associées. Le général Brown, commandant de l'US Air Force, l'analyse de façon simple et un peu caricaturale en disant qu'en l'absence de maîtrise du ciel, la guerre reprend les caractéristiques de la première guerre mondiale, marquée par la prédominance de l'artillerie.

J'en viens à la présentation de l'armée de l'air et de l'espace. Elle apporte un avantage décisif à notre outil de défense. Elle est avant tout un moyen de défense et de protection de nos concitoyens, grâce à ses deux missions permanentes que sont la composante nucléaire aéroportée et la posture permanente de sûreté (PPS). Les forces aériennes stratégiques, qui tiennent la posture de dissuasion sans interruption depuis le 8 octobre 1964, jouent à cet égard un rôle essentiel de crédibilisation des forces nucléaires dans leur ensemble.

En ce sens, l'opération Poker, simulation d'un raid nucléaire d'envergure, est la manifestation la plus visible et la plus emblématique de la capacité de ces forces à s'entraîner pour accomplir leur mission nucléaire dans les environnements les plus hostiles. Cette opération est également un signe fort adressé à tout agresseur potentiel.

La posture permanente de sûreté aérienne (PPSA) est quant à elle exercée sous l'autorité de la Première ministre et placée sous la direction du commandant de la défense aérienne et des opérations aériennes. Elle garantit la souveraineté nationale dans l'espace aérien français, en surveillant 15 000 mouvements aériens par jour, et assure la défense du territoire contre toute menace aérienne, terroriste ou étatique. Elle repose sur des moyens aériens, des centres de détection et de contrôle, un centre de commandement enterré et des règles d'engagement validées par la Première ministre.

À chaque instant, 400 aviateurs sont directement concernés par la PPS-A. Ils sont au service de la protection de notre territoire et de nos concitoyens. Pendant les huit premiers mois de l'année 2022, la PPS-A a donné lieu à 177 décollages sur alerte, dont 120 d'avions de chasse et 57 d'hélicoptères, à la suite de plus de 100 pertes de contact radio et de 150 violations d'espaces aériens interdits. Cela représente une augmentation de plus de 40 % des missions de police du ciel par rapport à l'année passée. Enfin, 36 opérations de recherche et de sauvetage ont permis de sauver 17 vies.

Outre ces deux missions fondamentales, l'armée de l'air et de l'espace est au service de notre politique extérieure. Elle l'a démontré depuis plusieurs décennies en Afghanistan ou sur le continent africain. Plus ponctuellement, elle l'a prouvé lors des opérations Hamilton, en Syrie, et Apagan, pour le rapatriement de nos ressortissants depuis Kaboul. Au cours des premières semaines de la guerre en Ukraine, elle a su maintenir deux patrouilles de combat dans les airs dix heures par jour sur le flanc oriental de l'Alliance atlantique.

L'armée de l'air et de l'espace est aussi un outil de crédibilité et de solidarité stratégique. Grâce à elle, la France peut être nation-cadre d'une coalition. C'est le cas, par exemple, avec la NRF, la Nato Response Force (Force de réaction de l'Otan), au sein de laquelle l'armée de l'air et de l'espace peut être amenée à conduire des opérations aériennes d'un volume de 200 sorties par jour, avec une centaine d'aéronefs de tous types et de toutes nationalités, au profit de l'Otan et sous commandement du Capco. La modernisation en cours de ses moyens, notamment le triptyque Rafale-A 400M-MRTT employé lors des missions de projection de puissance Pegase et Heifara, contribue à cette crédibilité. Ces capacités renforcent la solidarité stratégique.

En somme, vous pouvez avoir confiance dans l'outil de combat que nous mettons en œuvre au service des intérêts des Français. Mais, comme le rappelait le général de Gaulle : « rien ne dure qui ne se renouvelle constamment ». L'environnement stratégique évoluant, il exige que nous nous renouvelions pour faire mieux encore.

L'effort consenti dans le PLF pour 2023 va précisément dans ce sens et accompagne cette adaptation indispensable. En ce qui concerne les ressources humaines, tout d'abord, nous avons besoin d'aviateurs de haut niveau pour faire face à une conflictualité qui s'intensifie et se complexifie chaque jour davantage. En parallèle, les succès de la BITD (base industrielle et technologique de défense) créent un appel de spécialistes. L'enjeu pour l'armée de l'air et de l'espace est donc d'attirer et de fidéliser les aviateurs.

Le PLF pour 2023 apporte à cet objectif un soutien significatif, grâce à un budget de 135 millions d'euros pour la sous-action Ressources humaines des forces aériennes, soit une augmentation de 10 %. Ce budget permettra une politique volontariste de recrutement, ainsi que le financement des actions de formation, d'instruction et d'activité. Sur les 1 500 postes créés dans l'armée, 349 le seront dans l'armée de l'air et de l'espace. Ils concerneront pour l'essentiel les priorités globales du ministère, le renseignement en particulier. Ils permettront aussi d'accompagner la montée en puissance des nouvelles flottes d'A400M et de MRTT, en créant des postes dans le domaine du MCO (maintien en condition opérationnelle) aéronautique.

Les forces morales, un élément de toute première importance, sont consolidées dans le PLF grâce notamment aux efforts faits sur la NPRM (nouvelle politique de rémunération des militaires), mais aussi l'activité et les équipements.

L'activité chasse revêt un intérêt particulier dans le contexte des limitations imposées par le prélèvement des Rafale destinés à la Grèce et à la Croatie. Le PLF ne prévoit pour l'entraînement des pilotes de l'aviation de chasse qu'environ 150 heures de vol par personne et par an, puisque les livraisons de Rafale à la France reprendront dès décembre 2022, avant une remontée progressive en 2024 et 2025. Treize appareils vont nous être livrés en 2023, mais dix nous seront parallèlement retirés. Les prélèvements d'avions seront donc compensés par les livraisons et nous devrions assister à une remontée progressive du nombre de Rafale disponibles.

Outre ces treize Rafale au standard F3-R, le PLF pour 2023 permettra la livraison de trois avions ravitailleurs MRTT, de deux avions de transport A400M Atlas et de neuf avions d'entraînement Pilatus PC-21. Nous réceptionnerons également treize avions de chasse Mirage 2000D rénovés et un satellite de télécommunication Syracuse 4, qui devrait être envoyé au début de l'année 2023. Nous réceptionnerons également 37 stations tactiques satellitaires.

Lorsque l'on parle de spatial, on parle de gros satellites, comme le Syracuse, mais aussi de location de services, pour laquelle les crédits doublent par rapport à la loi de finances de l'année 2022, pour s'établir à 51 millions d'euros. C'est bien la location de services qui nous permettra en effet d'atteindre l'objectif d'avoir un taux de rafraîchissement élevé des données pour suivre l'évolution d'une situation, en complément de nos moyens souverains

Pour ce qui est des commandes, le PLF pour 2023 formalise celle de quarante-deux Rafale, c'est-à-dire les trente appareils prévus dans le cadre de la LPM, auxquels s'ajoutent les douze qui viendront remplacer ceux cédés à la Croatie. L'effort portera également sur la remontée des stocks de munitions. Nous commanderons ainsi des missiles air-air, des Hellfire et des obus, et nous recevrons la livraison d'un lot de missiles Scalp (système de croisière conventionnel autonome à longue portée) rénovés et des missiles air-air Mica (missile d'interception, de combat et d'autodéfense).

L'exercice budgétaire 2023 renforcera d'autres projets structurants, qui garantissent la cohérence de l'ensemble. Il s'agit de moyens de lutte antidrones, essentiels dans la perspective des Jeux olympiques de Paris en 2024, mais aussi de la modernisation des moyens de formation. À ce sujet, je voudrais insister plus particulièrement sur les neuf Pilatus PC-21, qui seront livrés cette année dans le cadre du projet Mentor. Le basculement de la formation des pilotes de chasse sur cet appareil va nous permettre de gagner quasiment une année sur un cursus complet, tout en nous faisant économiser 70 % de carburant. Si les économies d'énergie ne peuvent pas être au centre de nos préoccupations lorsque nous sommes en opération, elles sont en revanche prises en compte sur nos bases aériennes dans l'emploi de nos moyens au quotidien et concernant tout ce qui peut faire l'objet d'optimisations.

Le PLF pour 2023 cible enfin la construction et l'amélioration d'infrastructures technico-opérationnelles importantes pour nos bases aériennes. À Toulouse, par exemple, l'objectif est de disposer des bâtiments définitifs qui, à l'horizon 2025, accueilleront le CDE et le centre d'excellence espace de l'Otan. Des travaux de construction significatifs seront également menés à Évreux, pour préparer l'arrivée de l'escadron Poitou, et à Cognac, pour accueillir les PC-21.

Nos aviateurs ont également de grandes attentes dans le domaine de l'hébergement. Plusieurs chantiers importants débuteront ou se termineront en 2023. La construction de 200 places d'hébergement, sur notre site-école de Rochefort, débutera également en 2023. À Istres, un bâtiment de 50 places sera livré et permettra d'accompagner la montée en puissance du hub des armées. Un autre bâtiment de 50 places sera achevé à Mont-de-Marsan en fin d'année.

Les investissements dans l'armée de l'air de l'espace sont justifiés et bien utilisés. Ils servent les intérêts des Français dans un monde plus incertain. Vous êtes toutes et tous les bienvenus sur nos bases aériennes comme dans nos états-majors, où vous pourrez rencontrer les aviateurs et, ainsi, mieux comprendre leur mission et les enjeux du moment. Vous pourrez apprécier l'engagement, la passion et le professionnalisme dont ils font preuve au quotidien.

Pour l'armée de l'air et de l'espace, l'année qui s'achève a été marquée par trois événements principaux. La guerre en Ukraine, d'abord ; l'opération Marne ensuite, au Mali, au cours de laquelle 35 % du transport aérien a été effectué par la flotte A400M ; la mission Pegase enfin.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Lors de la précédente législature, ma collègue Isabelle Santiago et moi-même avons rédigé un rapport d'information sur la transition écologique du ministère des armées. Cette transition, écologique et énergétique, doit être prise en compte dans la stratégie de notre défense nationale. Les effets du dérèglement climatique sont indéniables et ses conséquences de plus en plus violentes et visibles ; le besoin de transition concerne toute la société, dont notre armée. Dans le cadre de la cinquième année de la LPM, le projet de loi de finances prévoit différentes mesures bienvenues telles que la mise en œuvre d'armement écoconçu à hauteur de 68 % ou encore l'utilisation de 1 % de biocarburant aéronautique, le fameux biojet. Comment l'armée de l'air et de l'espace s'est-elle approprié les sujets de la transition énergétique et du développement durable, en dépit des contraintes opérationnelles que l'on peut imaginer ?

Le ministre des armées a rendu compte, devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, de la décision du Président de la République, sur proposition du chef d'état-major des armées, de renforcer la posture de défense de la France et de l'Alliance atlantique sur le flanc est de l'Europe au vu de la violence des combats en Ukraine. Des Rafale de l'armée de l'air et de l'espace vont être déployés en Lituanie. Ces appareils s'ajoutent à ceux qui effectuent des patrouilles au-dessus de la Pologne et de l'Estonie depuis le début du conflit, en février 2022. Toutes ces opérations ne seront sûrement pas sans conséquence sur la disponibilité des flottes de l'armée de l'air et de l'espace.

Quel impact ces déploiements multiples auront-ils sur nos aéronefs ? Une usure prématurée des appareils est-elle à craindre ? Si tel est le cas, quelles mesures prévoyez-vous pour assurer le maintien opérationnel des avions et pour éviter des manques capacitaires ?

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Je vous renouvelle mes remerciements pour l'accueil que vous m'avez réservé notamment, mais pas seulement, en ma qualité de rapporteur pour avis du budget de l'armée de l'air et de l'espace. Je vous assure de mon plein soutien et de celui de mon groupe.

Le déclenchement de la guerre en Ukraine a été l'occasion d'une prise de conscience de la faiblesse des stocks de munitions destinées à notre artillerie et à notre armée de l'air. Ce problème n'est cependant pas nouveau : lors de la guerre du Golfe, en 1991, au Kosovo, en Libye, en Afghanistan et même au Levant, l'engagement de l'armée de l'air est resté tributaire de la disponibilité des bombes, surtout des corps de bombes. Mais la France pouvait se tourner vers ses alliés – Allemagne, Italie, États-Unis – afin de compléter ses stocks – on parle ici de milliers de composants – et de maintenir son engagement. Dans ces conflits de basse intensité, les pays fournisseurs, parfois peu concernés par les combats, se trouvaient relativement éloignés de la ligne de front. Avec la guerre à haute intensité en Ukraine, la menace pèse désormais sur l'ensemble du continent européen : le recours aux alliés n'est plus envisageable, chacun conservant, légitimement, son stock pour assurer sa propre défense. Du moins ne pourront-ils plus fournir autant, ni aussi vite. En conséquence, l'armée de l'air française ne peut plus assurer ses missions dans la durée.

Le retour d'expérience à chaud que j'ai pu avoir à l'issue de l'exercice Volfa 2022 confirme l'énorme quantité de munitions consommées lors de ces entraînements aux combats de haute intensité. Face à cette nouvelle réalité, la France doit pouvoir ne compter que sur elle-même. Il s'agit d'une problématique de souveraineté nationale.

Il est urgent d'agir selon deux axes : reconstituer un stock de munitions et consolider les capacités françaises de production. Nous devons être capables d'accélérer cette production et de développer une capacité souveraine. L'objectif est donc pour la France d'accéder à l'autonomie afin de pouvoir entrer en économie de guerre. La prochaine loi de finances et la future LPM devront nécessairement intégrer cette urgence.

Selon vous et d'après les éléments budgétaires dont nous disposons déjà, comment aider l'outil industriel français à augmenter ses capacités de production ?

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Pourriez-vous nous dresser un tableau de l'état de la défense antiaérienne, à l'échelle française d'abord, puis à celle du continent ?

Vous avez évoqué, concernant le conflit en Ukraine, l'importance de pouvoir neutraliser les défenses antiaériennes de l'adversaire, notamment avec des missiles antiradar Harm. Quel est l'état de l'armée française à cet égard et qu'est-ce qui pourrait être fait ?

Lorsque nous avons mené notre mission d'information sur la préparation à la haute intensité, nous avons évoqué le dossier du FMTC (Future Mid-Size Tactical Cargo), c'est-à-dire du cargo de taille moyenne potentiellement destiné à remplacer nos Transall et nos Casa. Ce dossier a-t-il avancé et considérez-vous qu'il est prioritaire en vue de la prochaine LPM ?

Sur le segment des hélicoptères lourds, dont nous sommes démunis, j'aurais souhaité avoir votre opinion.

Conséquence de l'attaque contre le pont de Kertch, l'Ukraine a essuyé des frappes massives. Pensez-vous que la Russie dispose de stocks de munitions suffisants pour poursuivre durablement cette guerre de terreur ?

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La France est une puissance aérospatiale et nous en sommes fiers. Le groupe Démocrate a conscience du fait que cette caractéristique est un atout extraordinaire pour notre pays, sur le plan tant militaire et diplomatique qu'industriel et économique. C'est une garantie de souveraineté, de liberté d'action. C'est une arme politique d'autant plus indispensable que de nouvelles conflictualités apparaissent, sur terre comme dans l'espace.

La question de la sûreté et de la confiance dans l'espace se pose dans de nouveaux termes. La guerre dans l'espace couve, au risque d'en faire un nouveau terrain de confrontation, de velléités d'hégémonie, d'affirmation de sa souveraineté, voire de redéfinition des frontières. Depuis quelques années, certains pays n'hésitent pas à expérimenter des armes antisatellites, comme la Russie l'an dernier. Face à cette évolution inquiétante, notre stratégie spatiale de défense s'appuie sur trois idées fondamentales : le renforcement des capacités actuelles de veille stratégique et d'appui aux opérations militaires ; le développement des capacités de connaissance de la situation spatiale pour surveiller l'activité de toutes les orbites ; le développement d'une capacité de défense spatiale.

Le projet de loi de finances vous donne-t-il les moyens d'assurer pleinement ces trois missions, de décourager les actions hostiles dans l'espace et d'éviter les dégâts collatéraux potentiels contre nos moyens en orbite ?

Depuis 1984, les moyens militaires renforcent les moyens de nos pompiers sous le nom d'opération Héphaïstos. Or, si les feux étaient circonscrits au Sud de la France jusqu'à présent, ils concernent désormais l'ensemble du territoire. Les perspectives climatiques sont inquiétantes : nous pourrions être confrontés au cours des étés prochains à des situations similaires à celles de cet été. Comptez-vous renforcer le soutien potentiel aux pompiers par une formation ou une spécialisation de vos militaires ? Des moyens supplémentaires seraient-ils nécessaires ?

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J'ai eu la chance d'assister à l'opération Poker l'année passée ; je confirme que c'est quand on va sur le terrain, aux côtés de vos aviateurs, que l'on voit la réactivité et l'engagement qui sont les leurs. J'ai également travaillé sur le plan « famille », en lien avec les questions de fidélisation que vous avez évoquées. Nos militaires doivent en effet pouvoir concilier leur engagement professionnel et leur vie familiale.

La discussion budgétaire est modifiée par le contexte de la guerre en Ukraine. Depuis quelques années, la supériorité aérienne incontestable des Occidentaux a été quelque peu mise à mal. Vous l'expliquez dans votre vision stratégique, l'investissement massif d'autres puissances dans l'aérien a contribué à l'affaiblir. En Ukraine, la supériorité aérienne est une question cruciale, pour les Ukrainiens comme pour les Russes. Les Ukrainiens ne cessent d'ailleurs de nous demander d'intervenir, ce que nous ne faisons pas pour l'instant.

En tenant compte du présent budget et du précédent, grâce aux commandes et aux livraisons à venir, on devrait in fine arriver à un parc total de 205 Rafale en 2030. Ce chiffre ferait de la France la première force européenne. Est-ce bien cela ou de nouvelles livraisons à d'autres pays pourraient-elles encore être faites ?

Pour ce qui est des missiles, le PLF pour 2023 correspond-il à vos attentes ou le stock, qui devait être largement renouvelé, est-il encore un peu juste ?

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L'espace fait l'objet de grandes annonces, alors que la France représente déjà 50 % du spatial européen. Lors de l'ouverture du 73e congrès international d'astronautique (IAC), Mme Borne a annoncé l'investissement de 9 milliards d'euros sur trois ans. Il s'agit de financer les lanceurs, la compétitivité industrielle, l'exploration, le climat et la défense. Espérons qu'il ne s'agit pas seulement de satisfaire industriels et start-up, mais d'une vraie ambition pour la souveraineté de la France comme du point de vue écologique, vis-à-vis du problème des déchets et des débris dans l'espace.

Alors que la plupart des autres budgets ont diminué, le PLF pour 2023 prévoit une enveloppe de 702 millions d'euros de crédits de paiement pour l'espace, soit une augmentation de 10 % par rapport à 2022. Les études opérationnelles et technico-opérationnelles prévues au programme 144 (Environnement et prospective de la politique de défense) pour les systèmes de force de l'espace ont pour objectif, d'une part, de contribuer à l'amélioration des capacités de surveillance depuis le sol et, d'autre part, de faciliter l'émergence d'une capacité de défense active. À ce titre, la commande de 2023 mentionne, dans le cadre de Syracuse IV, dix hubs de théâtre, un satellite de télécommunication et trente-sept stations satellitaires, ainsi que quatre-vingt-dix récepteurs P3TS (Plug and Play Positioning and Timing System) et cinquante-neuf postes d'exploitation imagerie.

Diriez-vous que cette commande est conforme à la demande de préparation à la haute intensité ? Quelles sont les priorités du budget alloué à l'espace ? Enfin, existe-t-il une trajectoire à moyen terme qui confirme la montée en puissance de la défense spatiale et, si tel est le cas, selon quelle priorité ?

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Général Stéphane Mille, chef d'état-major de l'armée de l'air et de l'espace

Monsieur Fiévet, si l'écologie est une préoccupation du quotidien, dans le cadre de nos engagements opérationnels ce qui compte est avant tout la réussite des opérations. En dehors de ces opérations, les aviateurs sont pleinement mobilisés, comme l'ensemble du ministère, notamment pour réduire les consommations de carburant. J'ai cité l'exemple du cursus de formation des pilotes de chasse, mais beaucoup d'autres illustrent notre engagement en ce sens sur les bases, au quotidien. À Tours, nous allons ainsi mettre en service une navette autonome électrique, qui va permettre au personnel de se déplacer sur la base. Il leur suffira de l'appeler avec leur téléphone pour qu'elle vienne les chercher. Ce moyen de transport collectif et non polluant nous permettra de faire des économies de carburant. Nous allons lancer l'expérimentation d'ici à la fin de l'année. Selon une démarche dite du bas vers le haut, les commandants de base nous font part des bonnes pratiques que tout le monde, à commencer par le militaire du rang, peut proposer et qui, une fois consolidées, peuvent être déployées massivement sur nos bases.

Pour ce qui est des biocarburants, ils ne représentent que 1 % de nos consommations en 2022, mais compteront pour 2 % en 2024 ; une augmentation progressive de leur utilisation est envisagée.

Je voudrais également évoquer le projet Euroglider, que nous développons en coopération avec l'Aedevv (Association européenne pour le développement du vol à voile) et l'école Isae-Supaéro. Il s'agit d'un planeur électrique que nous testons à Salon-de-Provence et sur lequel nous fondons de gros espoirs, notamment pour l'utiliser comme outil d'activité aéronautique à l'École de l'air et de l'espace dans les années à venir.

Rapace est un autre projet prometteur, mené au sein du Centre de recherche de l'École de l'air et de l'espace. Rapace est un drone qui fonctionne grâce à une pile à combustible. Les premiers essais sont attendus début 2023 et les perspectives sont assez encourageantes. Je suis ce projet de très près, car il nous donnerait une certaine avance quant à l'utilisation de ce genre de modèle.

L'engagement de la France sur le flanc est de l'Europe est un choix souverain. Il résulte dans sa mise en œuvre de travaux impliquant le commandement de l'Otan et l'armée de l'air et de l'espace. Nous veillons à ne pas user prématurément nos appareils, tout en prenant en compte les besoins exprimés par l'Otan. Concrètement, nous avons fait le choix, dans un premier temps, de maintenir les Rafale en métropole et de ne projeter que des Mirage 2000-5 à l'est de l'Europe. Pourquoi ? Parce qu'un avion envoyé à l'extérieur est utilisé à 100 % pour cette mission. C'est par conséquent un avion qui nous manque pour la formation de nos pilotes alors que, comme je l'ai rappelé en introduction, vingt-quatre de nos Rafale ont été cédés. Dès lors qu'on nous demande moins de douze sorties par semaine, je préfère faire décoller les avions depuis la métropole, plutôt que de les déployer à l'Est. En revanche, dans le cadre du renforcement du dispositif de l'Otan, nous déploierons quatre Rafale, pendant quatre mois.

L'Otan est en train de modifier sa posture permanente dans l'Est et assure désormais aussi des missions d'entraînement. Ces missions permettent d'entraîner les pilotes qui, au lieu de pratiquer en métropole, le feront dans l'est de l'Europe. Et nous ne perdrons plus de temps pour les déploiements.

À ce stade, je n'ai pas de préoccupation majeure ni sur l'usure du matériel ni sur la préparation opérationnelle des pilotes.

Monsieur Giletti, je suis d'accord avec vous quant au besoin d'augmenter nos stocks – au-delà du PLF pour 2023, cette dynamique doit se poursuivre dans la prochaine LPM – et de passer à une économie de guerre. Et il faut aussi, en effet, convaincre nos industriels qu'il est nécessaire de produire plus rapidement quand la situation l'exige. Sans doute devraient-ils avoir des stocks en propre. Peut-être aussi faudrait-il qu'ils acceptent de produire sans pour autant être sûrs de vendre instantanément. Certains matériels se prêtent probablement mieux que d'autres à une telle approche. Leurs fabricants savent que les productions seront vendues, sans pour autant savoir quand. Peut-être faut-il faire preuve d'un peu plus d'audace…

Il y a de toute façon un travail à mener en commun, dans le cadre de cette économie de guerre. C'est l'objet des réunions que nous avons en ce moment sous la présidence du ministre des armées, M. Sébastien Lecornu, pour réduire les délais. Chaque chaîne de production doit être scrupuleusement étudiée afin de repérer les éventuels goulets d'étranglement qui ralentissent ou bloquent la production.

Pour ce qui est de l'impossibilité d'utiliser l'armement de nos partenaires et alliés, lancer des programmes en coopération est une solution. Grâce à cette option, il est possible de mutualiser des munitions identiques, qui peuvent être utilisées par différents appareils. Les deux premières voies sont évidemment très nationales, mais je crois que cette troisième n'est pas à négliger non plus, puisqu'elle autorise la constitution de stocks communs à plusieurs pays.

Monsieur Thiériot, la défense aérienne consiste à acquérir la supériorité aérienne et à dénier l'utilisation de l'espace aérien à un mobile dans la troisième dimension. Mais la défense aérienne, c'est aussi la défense sol-air, qui est affaire de nombre, et pas uniquement de qualité – comme dans tous les pays membres de l'Otan.

La LPM que nous sommes en train de construire doit nous permettre d'aller plus loin, en matière de défense sol-air comme pour la SEAD (Suppression of ennemy air defense). La Sead est une capacité que nous imaginions développer dans le cadre du Scaf (Système de combat aérien du futur). Compte tenu des leçons que l'on peut tirer de la guerre en Ukraine, j'ai demandé qu'on anticipe et qu'on retrouve plus rapidement cette fonction, que nous maîtrisions mais que l'on a abandonnée il y a quelques années.

S'agissant du FMTC (Future Medium-size Tactical Cargo), les choses avancent. Des études sont désormais lancées au niveau de l'Union européenne, puisque c'est un appareil que nous n'imaginons pas développer seuls. Pour nous, l'horizon se situe au début des années 2030, voire 2035. Il s'agit de remplacer les C-130H et les Casa 235 largement employés outre-mer.

Quant à l'hélicoptère lourd, nous avons vu ce qu'il pouvait nous apporter en Afrique ou sur des terrains d'opération similaires. Qu'en est-il sur d'autres théâtres ? Selon moi, mais ce n'est qu'un avis personnel, l'hélicoptère lourd n'est pas forcément une priorité.

Monsieur Bru, vous avez détaillé les priorités de la stratégie spatiale et les objectifs que l'on se fixe : utilisation du spatial en soutien des opérations ; surveillance de ce qui se passe dans l'espace ; défense spatiale. Nous prenons en compte toutes ces priorités dans le cadre du PLF pour 2023.

Pour en venir aux feux de forêt, l'armée de l'air et de l'espace a été essentiellement impliquée et très sollicitée dans la région de Cazaux. Il se trouve que notre brigade de pompiers de l'air est basée à Cazaux. Cette coïncidence a permis à nos pompiers de prendre une part active à la lutte contre les feux, d'autant qu'ils disposaient d'hélicoptères sur place. Organiser cela à l'échelle de la nation est, en revanche, plus compliqué à envisager. Cette lutte contre les incendies de forêt relève avant tout de la sécurité civile. Les forces armées ne sont que des acteurs complémentaires. Toutes nos bases aériennes ont des pompiers, donc nous ferons tout ce qui peut être fait si besoin est. D'ailleurs, chaque fois qu'un événement se déroule à proximité d'une de nos bases, nous n'hésitons pas à faire sortir nos pompiers.

Madame Santiago, vous avez évoqué le chiffre de 205 Rafale en 2030 (Armée de l'air et de l'espace et Marine Nationale). Je suis toujours très prudent avec les chiffres et je préfère vous donner rendez-vous à la fin des travaux sur la LPM. Mais, effectivement, l'ordre de grandeur est celui-là. Vous dites qu'avec 205 Rafale, la France serait la première puissance aérienne en Europe. Mais comment mesure-t-on cette puissance ? Doit-on se fier au nombre d'avions, à la capacité opérationnelle, à l'entraînement des pilotes ? Je préfère avoir une armée de l'air et de l'espace plus réduite mais cohérente, qui inclut des appareils opérationnels, des pilotes bien formés, entraînés et en nombre suffisant ainsi que des munitions. C'est au chef d'état-major des armées qu'il incombe de donner sa cohérence à cet ensemble, afin qu'il soit disponible et efficace quand on a besoin de lui.

Les munitions dont dispose l'armée de l'air et de l'espace sont-elles suffisantes ? Ce que je peux dire, c'est que les carences mentionnées dans de précédents rapports sont prises en compte, dans le cadre du PLF, mais doivent aussi – car il est impossible de les corriger en un an – être discutées dans le cadre de la prochaine LPM.

Monsieur Piquemal, je vous renvoie aux propos de M. Bru, qui a rappelé les trois grandes priorités de nos stratégies spatiales. Ce que vous avez évoqué – stations de communication, stations d'exploitation des images… – relève pour l'essentiel de la première, c'est-à-dire l'utilisation de l'espace sur les théâtres d'opérations.

La surveillance de l'espace, l'intervention et la défense de l'espace arriveront quant à elles au cours des prochaines années. Nous avons cependant déjà des solutions opérationnelles qui nous permettent de surveiller l'espace, notamment le système Graves (Grand réseau adapté à la veille spatiale), mais aussi des télescopes. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons une relation privilégiée avec les Américains : nous voyons dans l'espace des choses que beaucoup de nos partenaires ne voient pas.

Le démonstrateur Yoda (Yeux en orbite pour un démonstrateur agile) doit pour sa part nous permettre de faire la preuve, fin 2024 ou début 2025, de notre capacité à agir directement dans l'espace.

Nous venons en outre d'acquérir le supercalculateur qui nous permettra de réaliser des millions de milliards d'opérations par seconde, autant de calculs qui sont indispensables si l'on veut mener des opérations dans l'espace. Enfin, les travaux de construction du futur bâtiment du CDE, qui sera inauguré en 2025, vont prochainement débuter.

Comme vous pouvez le constater, au-delà des paroles, les ambitions de la France et de l'armée de l'air et de l'espace sont réelles. Vous verrez, dans les années à venir, des contributions concrètes, pour l'ensemble des priorités affichées.

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Nous en venons aux questions des autres députés.

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Depuis le milieu des années 2010, l'armée de l'air et de l'espace fait face à de nombreux départs de ses personnels navigants, en raison de la forte attractivité du secteur aéronautique civil. La concurrence du secteur privé, qui offre généralement des conditions de vie et des salaires bien meilleurs, est en outre forte pour des spécialités de haute technicité ou pour le personnel mécanicien. Même si de nombreux efforts ont déjà été accomplis par la DRH de l'armée de l'air et de l'espace, la fidélisation et le taux de renouvellement du premier contrat restent des défis de première importance. Avez-vous identifié des domaines et des métiers plus spécifiquement concernés par ces tensions et pour lesquels nous devons améliorer la fidélisation ? Ces besoins ont-ils, selon vous, été pris en compte dans le cadre des créations de postes prévues par le PLF pour 2023 ?

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Le PLF pour 2023 prévoit près de 25 millions d'euros pour développer le lien armée-nation, auquel nous sommes très attachés et attentifs, notamment par la journée défense et citoyenneté (JDC), le service militaire volontaire (SMV) et le service national universel (SNU).

L'École d'enseignement technique de l'armée de l'air et de l'espace de Saintes forme chaque année avec excellence les jeunes arpettes qui sont l'avenir de cette armée. L'établissement s'engage également auprès des plus jeunes – les escadrilles air jeunesse (EAJ) – permettent de faire découvrir aux 13-16 ans l'environnement de la défense et de l'aéronautique. Par la suite, 95 % des élèves poursuivent leur cursus à l'école de formation des sous-officiers de Rochefort ou rejoignent la base de Cognac, à proximité. J'ai régulièrement l'occasion de mesurer leur implication et la fierté que représente l'engagement au service de la nation pour ces jeunes et leur famille.

Quel regard portez-vous sur l'attractivité de l'armée de l'air et de l'espace auprès de la jeunesse ? Les capacités budgétaires de recrutement sont-elles suffisantes pour qu'elle assume les missions qui lui sont confiées ?

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Dans la brochure que vous avez mise à notre disposition, j'ai lu des chiffres qui concernent des avions de chasse, des hélicoptères, des drones et des avions de transport, dans le Haut-Karabakh. Ils datent de la fin 2021. Pourriez-vous nous dire quelques mots sur la situation actuelle des appareils dans cette région ?

J'ai lu dans la presse qu'il y a actuellement des opérations sur l'aéroport de Périgueux. Pourriez-vous me donner quelques explications ?

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Général Stéphane Mille, chef d'état-major de l'armée de l'air et de l'espace

Monsieur Sorez, la fidélisation est en effet une des préoccupations majeures de l'armée de l'air et de l'espace, davantage encore que l'attractivité et le recrutement. Pourquoi ? Parce qu'une fois nos aviateurs instruits, ils sont très convoités sur le marché civil, à la fois par l'aéronautique générale et par les industriels de la défense, en raison notamment de la croissance des exportations. Toutes les initiatives qui peuvent contribuer à fidéliser nos pilotes – rémunérations, accompagnement au quotidien grâce au plan « famille » – sont donc pour nous de première importance.

Paradoxalement, chez les pilotes, la tension est moindre qu'il y a quelques années. Ainsi, nous avons recruté l'année dernière douze pilotes de ligne issus du secteur civil. Ce n'est pas, grâce aux conditions salariales que nous les avons convaincus de nous rejoindre, mais grâce à l'intérêt des missions proposées – d'autant qu'ils étaient sous-employés au sein de leur compagnie. Ces pilotes, qui sont embauchés pour des périodes de trois ans renouvelables une fois, sont très intéressants pour nous alors que notre flotte d'Airbus MRTT monte en puissance.

En revanche, les tensions sont réelles dans les secteurs d'activité les plus technologiques, comme la cybersécurité – ces professionnels sont très difficiles à fidéliser et nous devons trouver des solutions pour les retenir –, et le MCO aéronautique : nos mécaniciens sont très courtisés…

Que faire ? Outre le plan « famille » déjà cité, nous avons mis en place certains dispositifs qui favorisent la fidélisation. Nous versons par exemple des primes de lien au service. Nous révisons également tout le parcours professionnel des sous-officiers, pour les inciter, dès leur arrivée chez nous, à devenir sous-officiers de carrière. Actuellement, ceux que ce parcours intéresse doivent se manifester après plusieurs années. Avec cette nouvelle approche, ce sont ceux qui ne sont pas intéressés qui devront le faire. Nous changeons de logique et inversons, en quelque sorte, le processus.

Monsieur Ardouin, l'école de Saintes est une pépite. J'ai d'ailleurs une pensée pour la famille de l'élève qui s'est tué en début de semaine dans un manège. Non seulement le taux de réussite au bac y est de 100 % depuis six ans, mais 80 % des jeunes qui en sortent rejoignent l'école de Rochefort et font une carrière dans l'armée de l'air et de l'espace. Pour revenir rapidement aux métiers en tension, nous venons justement d'ouvrir à Saintes une classe supplémentaire, dont l'objectif est l'orientation des jeunes vers les fonctions SIC (systèmes d'information et de communication).

Pour ce qui est de la vie de tous les jours, le plan « famille » offre un accompagnement et un soutien quotidien aux aviateurs, pour qu'ils soient débarrassés des soucis d'intendance et puissent se concentrer sur leur mission – même si les questions de logement et d'hébergement restent prégnantes. Dans le cadre de la prochaine LPM, nous travaillons sur un plan « famille » 2 pour compléter et améliorer cet accompagnement.

Monsieur Cubertafon, l'activité sur l'aéroport de Périgueux est liée à l'exercice Volfa, qui se déroule depuis notre base aérienne de Mont-de-Marsan. Il s'agit d'un exercice majeur pour l'armée de l'air et de l'espace, auquel participent plusieurs pays et qui permet de tester de nouvelles tactiques et de nouveaux dispositifs. Volfa provoque une concentration importante de moyens aériens qui sont déployés sur les aéroports alentour, à Périgueux notamment. Il y a donc, effectivement, une activité un peu particulière dans la région pendant les quinze jours que dure l'opération. Cet exercice est aussi l'occasion de montrer à nos concitoyens les outils dont dispose l'armée de l'air et de l'espace. Je suis toujours ravi de pouvoir le faire.

Les chiffres auxquels vous faites allusion correspondent au nombre d'appareils abattus dans le Haut-Karabakh au cours des dix dernières années. Je n'ai pas d'éléments plus récents à vous communiquer.

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Quelle sera l'implication de l'armée de l'air et de l'espace dans le déroulement de la Coupe du monde de rugby et des Jeux olympiques, notamment en ce qui concerne l'utilisation du système Parade (Protection déployable modulaire antidrones) ?

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Général Stéphane Mille, chef d'état-major de l'armée de l'air et de l'espace

L'armée de l'air et de l'espace s'impliquera comme elle le fait à chaque événement majeur organisé en France, par un dispositif particulier de sûreté aérienne (DPSA) proportionné à l'importance des événements.

Les prochains Jeux olympiques figurent dans le haut du spectre. Les moyens de la PPS standard seront évidemment présents et couvriront la totalité de la manifestation. Des moyens spécifiques contribueront à mettre en place une défense multicouche pour protéger le dispositif. La Coupe du monde de rugby est également un rendez-vous important.

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Merci, mon général. Merci notamment d'avoir rappelé que la puissance de l'armée de l'air et de l'espace ne se limite pas au nombre des avions, mais qu'elle intègre aussi la formation, l'entraînement et la force morale de celles et ceux qui les pilotent. Et merci d'avoir insisté sur la nécessaire cohérence de l'ensemble.

La séance est levée à dix-heures quarante.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Jean-Philippe Ardouin, M. Vincent Bru, M. Jean-Pierre Cubertafon, M. Jean-Marie Fiévet, M. Frank Giletti, M. Loïc Kervran, Mme Lysiane Métayer, M. François Piquemal, M. Julien Rancoule, Mme Isabelle Santiago, M. Philippe Sorez, M. Jean-Louis Thiériot

Excusés. - M. Julien Bayou, M. Christophe Blanchet, Mme Yaël Braun-Pivet, M. Steve Chailloux, Mme Cyrielle Chatelain, M. Yannick Chenevard, M. Yannick Favennec-Bécot, M. Thomas Gassilloud, Mme Anne Genetet, M. Olivier Marleix, M. Pierre Morel-À-L'Huissier, Mme Natalia Pouzyreff, Mme Valérie Rabault, M. Fabien Roussel, M. Mikaele Seo, Mme Nathalie Serre, M. Bruno Studer, Mme Mélanie Thomin