Projet de loi de finances rectificative pour 2020 — Texte n° 3074

Amendement N° CF985 (Non soutenu)

Publié le 24 juin 2020 par : Mme Bessot Ballot, M. Blanchet, M. Cabaré, Mme Leguille-Balloy, Mme Lenne, M. Batut, Mme Brulebois, M. Cazenove, M. Daniel, M. Lejeune, M. Fugit, M. Girardin, M. Martin, Mme Provendier, M. Testé, Mme Vanceunebrock, Mme Mirallès.

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I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

A. - L’article 1519 D est ainsi modifié :

a). – Le premier alinéa est ainsi rédigé : « I. – A.L’imposition forfaitaire mentionnée à l’article 1635‑0 quinquies s’applique aux installations terrestres de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent dont la puissance électrique installée au sens des articles L. 311‑1 et suivants du code de l’énergie est supérieure ou égale à 100 kilowatts. »

b). – Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « B. - L’imposition forfaitaire mentionnée à l’article 1635‑0quinquies s’applique aux installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique hydraulique des courants situées dans les eaux intérieures ou dans la mer territoriale dont la puissance électrique installée au sens des articles L. 311‑1 et suivants du code de l’énergie est supérieure ou égale à 10 mégawatts. »

B. – L’article 1519 E est ainsi modifié :

a) – Au premier alinéa du I, les mots : « 50 mégawatts », sont remplacés par les mots « 10 mégawatts ».

b) – Au IV de l’article, les mots « 50 mégawatts » par les mots « 10 mégawatts ».

C. – L’Article 1519 F est ainsi modifié :

a) – Au premier alinéa, avant le mot : «L'imposition », il est inséré la référence : « A. ».

b) – Au premier alinéa, le mot : « hydraulique » est supprimé.

c) – Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« B. – –L’imposition forfaitaire mentionnée à l’article 1635‑0 quinquies s’applique aux centrales de production d’énergie électrique d’origine hydraulique, à l’exception de celles mentionnées à l’article 1519 D, dont la puissance électrique installée au sens des articles L. 311‑1 et suivants du code de l’énergie est supérieure ou égale à 10 mégawatts. »

d) – Au deuxième alinéa, avant le mot : «L'imposition », il est inséré la référence : « C. ».

D. – L’article 1519 G est ainsi modifié :

Au II après le deuxième alinéa, il est inséré un troisième alinéa ainsi rédigé : « Le montant forfaitaire de l’imposition est diminué de moitié pour les transformateurs d’une unité de production d’électricité renouvelable au sens de l’article L. 211‑2 du code de l’énergie. »

II. – La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Exposé sommaire :

La crise économique entraînée par le Covid-19 oblige à examiner un troisième projet de loi de finances rectificatif (PLFR3). En effet, le constat est sans appel : les effets de la crise du COVID19 seront longs et durables sur l’économie française, avec notamment une baisse de l’investissement des entreprises cette année de l’ordre de 24,2 %.

De même, l’investissement des ménages est aussi en baisse en 2020, de l’ordre de 19,5 %.

Au vu de la conjoncture économique et des besoins sociaux qui explosent, l’investissement des collectivités publiques risque d’être fortement impacté.

La baisse des recettes fiscales, l’augmentation du recours à l’emprunt, la baisse des investissements et le besoin d’accentuer notre ambition en matière d’écologie rendent indispensable une politique économique affirmée, tournée vers des secteurs économiques d’avenir.

Dans ce sens, ce troisième projet de loi finances rectificative pour 2020 a pour objectif premier de soutenir la reprise économique et d’adapter les finances publiques à la situation exceptionnelle.

Aussi, la crise du COVID19 nous donne une véritable opportunité de réorienter notre politique fiscale, non pas de repartir à zéro mais en ajustant la fiscalité aux objectifs recherchés.

Toute politique, fiscale ou non, poursuit un objectif clair. La fiscalité doit servir, outre à permettre à l’État de mener une politique, à changer le comportement des administrés.

A titre d’exemple, la fiscalité sur le tabac a pour objectif d’en réduire sa consommation et ainsi, protéger la santé publique de nos concitoyens.

Toutefois, force est de constater qu’en matière de production énergétique, la fiscalité actuelle est à rebours des objectifs que nous nous sommes fixés.

Les unités de production électrique sont aujourd’hui soumises, en terme d’impôts directs, à :

- l’Impôt sur les sociétés, - la contribution économique territoriale - l’Imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (IFER).

Une centrale électrique est imposable à l’IFER à partir d’un seuil de puissance électrique installée. Ce seuil varie en fonction du type de centrale concerné, et pour les centrales hydroélectriques, éoliennes et photovoltaïques, ce seuil est de 100 kilowatts (kW) de puissance installée : un seuil relativement faible. A contrario, les centrales thermiques sont, quant à elles, imposées au titre de l’IFER à partir d’une puissance de 50 mégawatt (mW) de puissance installée.

Face à cette situation, l’ensemble des acteurs de la filière hydroélectrique sont unanimes : ils souhaitent reprendre des droits fondés en titre, et pouvoir réhabiliter des moulins à l’arrêt. Cependant, ils se heurtent à une fiscalité en vigueur qui représente un réel frein au développement du secteur.

A ce jour, notre fiscalité en matière de production électrique incite plus à investir dans les centrales thermiques à charbon ou à fuel, plutôt que dans des centrales hydroélectriques, alors même que la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prévoit une baisse de la consommation de charbon de 37 % en 2023 par rapport à 2012, et une baisse de consommation de pétrole de 23,4 %.

Si nous voulons atteindre nos objectifs, nous devons alors relancer l’investissement dans les énergies renouvelables. Il nous faut donc modifier notre politique fiscale en matière de production électrique pour transmettre le bon message aux acteurs de la filière en faveur d’une relance de l’investissement.

Cette nécessaire évolution de notre fiscalité répondrait ainsi aux objectifs énergétiques de la France. Par ailleurs, elle répondrait aux besoins de l’économie française de demain tels qu’exposés par le Ministre de l’Economie et des Finances M. Bruno Le Maire : selon le ministre, ce projet de loi de finances a pour « objectif de construire un modèle économique compétitif et décarboné ». Pourtant, en matière de production électrique, rien n’encourage à développer davantage les énergies vertes.

C’est donc le but premier de cet amendement : répondre à nos objectifs énergétiques en construisant un modèle économique de production électrique décarbonée, et ce par une modification de notre politique fiscale.

Cet amendement s’axe principalement sur la réduction de la fiscalité des centrales hydroélectriques. Cela s’explique par la place de l’hydroélectricité, la filière hydroélectrique représente la deuxième source d’énergie française. Elle totalise 12 % de la production électrique totale, et 49 % de l’énergie renouvelable produite en 2018, faisant donc de cette énergie la première source d’énergie renouvelable en France. Le développement de l’hydroélectricité a été prévu par le Gouvernement, ainsi le Programme pluriannuelle de l’énergie, prévoit l’objectif d’augmenter le parc de l’ordre de 200 MW d’ici 2023 et de 900 à 1200 MW d’ici 2028. Ce qui, au vu des avantages de l’hydroélectricité sur les autres énergie verte, est naturel.

L’hydroélectricité est ainsi l’électricité la plus propre en matière d’émissions de gaz carbonique.

En effet, les énergies renouvelables qui n’utilisent pas de combustibles, comme l’éolien, le photovoltaïque ou l’hydroélectrique, émettent du CO2 uniquement lors de la construction des installations.

Ainsi, par kilowattheure (kWh) produit, un kWh de solaire photovoltaïque émet entre 60 et 150 g de CO2 selon le lieu de fabrication des panneaux photovoltaïques, un kWh éolien 3 à 22 g, et 1 kWh d’hydraulique 4g.

La filière hydroélectrique est donc l’énergie renouvelable avec le plus faible impact écologique ; l’émission de gaz à effet de serre intervenant au moment de la réalisation des ouvrages, et de très nombreux ouvrages étant déjà construits et en attente de l’installation d’une turbine, les seuls gaz à effet de serre sont émis uniquement lors de l’entretien des centrales. L’impact environnemental est donc faible au regard de l’ensemble de l’impact de l’activité humaine sur l’environnement en matière de production d’électricité.

L’énergie hydroélectrique est aussi la plus rentable en matière énergétique, comme le montre le facteur de charge (rapport entre l’énergie électrique effectivement produite sur une période donnée et l’énergie qu’elle aurait produite si elle avait fonctionné à sa puissance nominale durant la même période). Plus la valeur du facteur de charge est élevée, plus l’installation considérée s’approche de sa capacité de production maximale. Ainsi, en 2015, le facteur de charge de l’énergie éolienne était de 24 %, celui du photovoltaïque de 14 %, celui des centrales hydroélectriques au fil de l’eau de 57 %. C’est donc une énergie rentable, notamment par rapport aux autres énergies renouvelables : tant qu’il y a de l’eau, le production de courant est assurée.

D’un point de vue économique, le secteur hydroélectrique représente 12 300 emplois en France en 2016, et un marché de 3,6 milliards d’euros dont 91 millions d’euros liés à l’exportation.

La petite hydroélectricité comprend les centrales dont la puissance est inférieure à 10 mW, de telles centrales sont aujourd’hui assujetties à l’IFER. Pour de nombreux acteurs de la filière cette imposition ne fait pas beaucoup de sens au vu des avantages présentés par la petite hydroélectricité. Ne nécessitant ni retenues, ni vidanges ponctuelles susceptibles de perturber l’hydrologie, la biologie ou la qualité de l’eau, elle présente un bilan écologique positif, non seulement en ne perturbant pas les écosystèmes, mais en permettant un entretien des cours d’eau. Outre la protection de la biodiversité, ces centrales protègent aussi la faune piscicole, notamment avec l’utilisation de nouvelles générations de turbines qui, avec des pales très larges, permettent le passage des espèces piscicoles.

Les petites centrales évitent ainsi les principaux inconvénients des centrales hydroélectriques traditionnelles, c’est pourquoi nous devons encourager leur développement.

La seconde caractéristique de la petite hydroélectricité réside dans le fait que celle-ci est composée principalement de centrales dites « au fil de l’eau ».

Ces centrales fonctionnent continuellement, et forment un apport stable en énergie.

Elles produisent donc une énergie prédictible. Elles ne sont pas soumises aux variations imprévisibles dues aux aléas climatiques, comme l’énergie solaire ou photovoltaïque.

Aujourd’hui, les centrales au fil de l’eau représentent 26 % de la production hydroélectrique.

Ainsi, comme l’énergie hydroélectrique est, en règle générale, prévisible, elle sert de variable d’ajustement.

En effet, l’offre et la demande électriques doivent toujours être à l’équilibre, puisqu’il n’existe pas de moyens de stocker de l’électricité. Pour parvenir à cet équilibre, EDF utilise le mécanisme d’ajustement, qui repose sur les barrages avec retenue et sur les centrales thermiques. Or, la fermeture des centrales thermiques oblige à anticiper l’avenir.

Dans ce cadre, le nucléaire ne peut assurer ce mécanisme d’ajustement : le changement de la quantité produite devant être quasi instantané, le nucléaire ne peut pas réagir à une soudaine demande d’électricité. Seule une source d’énergie réactive peut assurer cette fonction, d’où le recours actuel aux centrales thermiques et à l’hydroélectricité, notamment par le biais des centrales de lacs.

La petite hydroélectricité contribue ainsi à couvrir la base de notre consommation d’électricité en énergie renouvelable. En fournissant une électricité stable et prévisible, elle s’inscrit comme un complément indispensable des autres énergies renouvelables variables pour sécuriser l’approvisionnement électrique du pays en énergie propre.

Inscrite de longue date dans le paysage énergétique, la petite hydroélectricité se distingue des autres énergies renouvelables pour la durabilité de ses infrastructures.

Les infrastructures ont une durée de vie supérieure à 100 ans, permettant ainsi une succession de plusieurs générations d’exploitants qui produisent encore aujourd’hui une électricité renouvelable. Entretenues et rénovées, les petites centrales hydroélectriques représentent aussi un véritable patrimoine à transmettre aux générations à venir.

La petite hydroélectricité, en couvrant tout le territoire de centrales, permettrait un regain de l’emploi dans des secteurs bien souvent en difficultés.

En facilitant et en encourageant l’investissement dans les petites centrales, la disposition proposée par cet amendement aura un effet bénéfique pour l’emploi dans des filières très diverses : fabricants d’alternateurs et de turbines, cabinet d’études et nouveaux gestionnaires de centrales, BTP... Tous participeront directement ou indirectement à ce regain d’activité, tout comme la maintenance des futurs sites, qui nécessitera l’embauche de nouveaux employés.

Surtout, le regain d’activité concernera les entreprises du bâtiment durement touchées par la crise (avec 38 % des chantiers arrêtés), facilitant ainsi une reprise d’activité plus sereine.

Cependant, au-delà de la volonté affirmée du Gouvernement de développer l’hydroélectricité et de mettre en lumière tous ses avantages, de nombreux freins subsistent au développement de la filière, notamment en raison d’une à une réglementation particulièrement abondante et stricte et une fiscalité « oppressante ».

Concernant les règles, une proposition de rationalisation de celles-ci avait été déposée lors de la précédente session parlementaire (mais n’a, à ce jour, pas encore été discutée). Nous devons donc modifier la fiscalité si nous voulons constater un véritable regain d’activité.

La baisse de la fiscalité libérera des capitaux pour les ré-investir dans la filière, que ce soit en modernisant les centrales existantes, ou en ré-ouvrant des centrales désaffectées.

En réduisant la fiscalité sur les énergies vertes, nous favorisons l’investissement et renforçons la confiance des investisseurs, permettant alors d’injecter dans la filière des capitaux provenant, à ce jour, d’acteurs extérieurs au secteur de l’hydroélectricité.

Ces capitaux permettront une reprise nécessaire de l’activité économique dans nos territoires. Les capitaux « ruisselleront » entre les différents acteurs de la filière : des entreprise du bâtiment, en passant par les industries fabriquant les turbines et les alternateurs dont la France est le leader mondiale, et également les entreprises d’entretiens et les gestionnaires de centrale.

De plus, l’existence de nouvelles usines hydroélectriques signifie de nouvelles recettes fiscales, notamment pour les collectivités locales, augmentant ainsi durablement les ressources dans nos territoires.

Le présent amendement propose de relever le seuil d’assujettissement à l’IFER pour ne plus imposer les petites centrales et relancer l’investissement. Concernant la modification de l’imposition des transformateurs, toutes les centrales de production électrique sont équipées de transformateurs. Pourtant, aucune distinction n’est faite entre la production d’électricité verte et l’électricité issue de combustible fossile : cet amendement vise ainsi à remédier à cette situation en prévoyant une diminution de l’IFER pour les usines de production d’électricité verte.

Quant à l’abaissement du seuil pour les centrales thermiques, il permet d’éviter toute perte financière pour l’État, tout en unifiant le seuil d’assujettissement à l’IFER à 10 mW de puissance installée.

Ici, une réduction de la fiscalité en faveur de la production d’énergie hydroélectrique a la même visée : encourager les acteurs de la filière à (ré)investir, à développer l’hydroélectricité au maximum de ces capacités, tout en augmentant la fiscalité sur des produits polluants afin de compenser la perte pour l’État.

Cet amendement se pose dans la continuité de la politique gouvernementale inscrite dans la Programmation pluriannuelle de l’énergie qui vise à augmenter la production hydroélectrique, en proposant une solution concrète à une problématique souvent soulevée dans nos territoires.

Ainsi, la relance de l’économie passera par l’investissement, par l’innovation, et par l’écologie : cet amendement contribue donc à l’objectif commun de construire ensemble un plan de relance ambitieux pour une reprise économique plus verte, sociale et solidaire.

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