La réunion

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La commission procède à l'audition, ouverte à la presse, de Mme Laurence Boone, secrétaire d'Etat auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes, sur le sommet de la Communauté politique européenne du 1er juin 2023 à Chisinau.

Présidence de M. Jean-Louis Bourlanges, président

La séance est ouverte à 11 h 00

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Notre recevons pour la deuxième fois depuis le début de cette législature la secrétaire d'État auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Le deuxième sommet des chefs d'État et de gouvernement des pays de la Communauté politique européenne, la CPE, s'est réuni dans les environs de Chisinau, la capitale de la Moldavie, le 1er juin dernier.

Le sujet de la CPE est important et difficile à cerner. Il ne faudrait pas que cette instance informelle de coopération intergouvernementale, voulue par le président de la République, se limite à être une sorte de « Davos politique européen ». Comment cette instance, assez intéressante, s'articule-t-elle avec l'Union européenne ?

Composée des vingt-sept États membres de l'Union européenne, des quatre États parties à l'Espace économique européen, de neuf États candidats à l'adhésion à l'Union, du Royaume-Uni, de l'Arménie, de l'Azerbaïdjan, de l'Andorre, de Monaco, de Saint-Marin et du Kosovo, la CPE est un attelage pour le moins étrange, même si l'on saisit l'intérêt de disposer d'un aréopage correspondant à une aire civilisationnelle précise, avec des pays faisant montre d'une solidarité géopolitique et d'intérêts communs mais dans un cadre informel.

Cette logique n'est pas inédite. Le Concert européen s'est ainsi établi après la défaite de l'Empire napoléonien. Même s'il a été discrédité par le fait que les puissances de l'époque étaient réactionnaires et s'étaient engagées dans des politiques conservatrices, l'idée de Talleyrand, selon laquelle les pays s'améliorent les uns les autres en coopérant, était forte. Le Concert européen était une société d'entraide, qui visait à éviter la constitution de blocs hostiles, lesquels ont été rétablis dans la seconde partie du XIXe siècle, largement à l'initiative de Bismarck, désireux d'organiser l'Europe autour d'alliances qui se sont révélées fatales en 1914.

Plus tard, après la dissolution de l'Union soviétique et la libération de l'Europe centrale et orientale, M. François Mitterrand avait lancé l'idée d'une Confédération européenne. Lors de la première réunion, à Prague, une carte avait été distribuée représentant l'Europe et la Russie mais pas les États-Unis, ce qui donnait l'impression que ceux-ci auraient été vaincus et que l'armée rouge occupait l'ensemble du continent : tout cela sous les auspices du président Vaclav Havel, qui sortait de prison ! La tension qui en a découlé a hypothéqué ce projet.

Le fait que le rapport entre les États européens soit régi par la clause, implicite mais souveraine, de la nation la plus intégrée est également de nature à hypothéquer ce type de démarche : dès qu'un schéma un peu moins intégré est proposé, les pays concernés y voient une salle d'attente et se sentent discriminés.

L'objectif de la CPE est d'éviter ces écueils. Son statut composite présente d'ailleurs cet avantage, avec des pays qui doivent entrer, des pays qui veulent entrer et des pays qui ne veulent pas entrer dans l'Union européenne, mais avec lesquels celle-ci entend conserver des relations.

La principale question est donc celle de son articulation avec l'Union européenne. À quoi la CPE sert-elle ? L'Union européenne ne reste-t-elle pas la seule instance avec les institutions, le budget, les traditions et le corpus juridiques qui permettent d'animer de vraies politiques communes dans les domaines d'intérêt partagé ?

S'agissant plus précisément du sommet de la CPE du 1er juin, qu'avez-vous fait, que voulez-vous faire et que ferez-vous par la suite ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes

Merci pour cette introduction chaleureuse et pour ce panorama de l'histoire européenne.

Le deuxième sommet de la CPE s'est tenu le 1er juin à Chisinau. Je commencerai par présenter les principaux éléments qui ont expliqué son succès, dans la continuité du sommet de Prague. J'évoquerai ensuite les livrables, à la fois politiques et concrets, qui permettent d'ancrer la CPE dans notre paysage géostratégique, de la faire vivre et de la renforcer dans la perspective des prochains sommets en Espagne, le 5 octobre, puis au Royaume-Uni, en 2024.

J'ai eu le plaisir d'accompagner le président de la République à ce sommet, rendu très spécial par sa géographie. Il s'est en effet tenu à proximité de la capitale moldave et a rassemblé les chefs d'État et de gouvernement de quarante-sept pays, puisque plusieurs pays l'ont rejoint depuis sa première édition. Étaient également présents la présidente de la Commission européenne, le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, la présidente du Parlement européen, le président du Conseil européen, ainsi que, le matin, Volodymyr Zelensky. Le message le plus fort était celui de l'unité et du soutien de l'Ukraine et de la Moldavie face à la Russie mais ce sommet a également marqué la détermination à réunir des pays qui ne sont pas dans l'Union européenne et ne tiennent pas nécessairement à y entrer, avec lesquels nous avons à relever des défis communs, comme autant de membres de la famille européenne.

Ce sommet s'est inscrit dans notre paysage de discussion géopolitique. En cela, la CPE est un succès dont nous pouvons être fiers.

Il a fallu mener un travail de conviction auprès de nos partenaires européens, pour lever leurs doutes quant à nos intentions. D'aucuns, rappelant la Confédération européenne que vous avez mentionnée, pensaient que l'objectif était d'éviter l'élargissement de l'Union. Il fallait aussi les convaincre de l'intérêt politique de cette communauté.

Le travail effectué a visé à clarifier plusieurs points.

Concernant l'articulation entre la CPE et l'élargissement, un travail de conviction restait nécessaire. Grâce aux paroles du président de la République, tout le monde a compris, en particulier les pays candidats, que la CPE permettrait de renforcer l'ancrage européen avec des projets concrets, sans attendre l'aboutissement du processus d'élargissement et sans constituer pour autant une chambre d'attente.

S'agissant de la nature institutionnelle de la CPE et du risque de concurrence avec d'autres structures, il nous importait de défendre un format à la fois intergouvernemental et souple. Aussi associons-nous les institutions européennes, tout en respectant l'autonomie décisionnelle de l'Union et sans considérer cette dernière comme un secrétariat. De surcroît, nous avons la volonté de ne pas dupliquer des organisations européennes existantes.

Sur le fond, notre premier objectif visait à envoyer un message d'unité dans le contexte persistant de la guerre en Ukraine et à renforcer le dialogue politique à l'échelle du continent autour de sujets faisant l'objet d'un intérêt commun et d'inquiétudes partagées : la paix, la stabilité du continent, l'énergie, le climat et l'économie.

Les nombreux échanges bilatéraux qui se sont tenus, illustrant l'ampleur politique de la CPE, sont eux aussi cruciaux pour la stabilité du continent. À Prague, le président Macron, le président du Conseil européen Charles Michel et les dirigeants d'Arménie et d'Azerbaïdjan avaient échangé et conclu un accord pour l'envoi d'une mission européenne d'observation dans la zone de conflit entre ces deux pays. À Chisinau, le président de la République a eu des échanges de qualité avec plusieurs interlocuteurs des Balkans, ainsi qu'avec son homologue moldave.

Le deuxième objectif visait à avancer dans plusieurs champs de coopération. Tel a été le cas dans trois champs prioritaires – sécurité ; énergie ; connectivité et mobilité – et plusieurs livrables concrets ont été produits.

Le premier concerne l'extension de la cyber-réserve de l'Union européenne aux pays qui le souhaitent, avec l'envoi d'experts dans le domaine cyber en cas d'attaque. Un deuxième a trait au développement de centres communs d'expertise, selon le modèle du centre franco-slovène de capacités cyber pour les Balkans, basé au Monténégro. L'objectif est de former aux métiers du cyber, pour faire face à la désinformation et à la mésinformation qui sapent la confiance dans nombre de pays de la CPE. Un troisième livrable a consisté dans le lancement d'une coopération dans la lutte contre les manipulations d'informations. Quiconque se rend dans l'Est ou le Sud-Est de l'Europe constate nécessairement les ravages de la désinformation. Peuvent également être cités la protection des infrastructures critiques, sur le fondement d'une directive européenne, les avancées dans les projets d'interconnexion énergétiques ou l'approfondissement de travaux pour l'harmonisation des infrastructures ferroviaires, tant sur le plan pratique – comme la largeur des rails – qu'en matière de sécurité.

Tous les membres de la CPE ont pu exprimer leur soutien à la Moldavie, là encore de façon concrète, avec le lancement d'une série d'actions.

La première, qui est la plus symbolique pour les citoyens, concerne la réduction des frais d'itinérance entre l'Union européenne et ce pays. Cet accord volontaire, qui sera effectif au 1er janvier 2024, a bénéficié d'une mobilisation française importante et du rôle de la Commission européenne. Un soutien économique et financier supplémentaire est également apporté par le triplement des investissements potentiels dans le cadre du plan économique et d'investissement pour la Moldavie, sous forme de garanties, de prêts ou de subventions. Une nouvelle aide de 100 millions d'euros pour les besoins de court terme illustre le soutien au secteur énergétique moldave, alors qu'une grande part de l'énergie passe par la Transnistrie ou des régions touchées par la guerre en Ukraine. Le soutien civilo-militaire européen est matérialisé par une mission civile de l'Union européenne visant à renforcer les capacités moldaves de lutte contre les menaces hybrides et l'ingérence étrangère, et en matière de cybersécurité. Enfin, le soutien aux réformes liées à l'adhésion de la Moldavie à l'Union européenne est très attendu. En l'occurrence, les effectifs de la délégation de l'Union européenne à Chisinau seront renforcés.

Ces avancées démontrent l'utilité de la CPE à la fois comme laboratoire géopolitique ou outil de politique régionale et comme enceinte de discussions stratégiques. Pour la faire vivre, de prochains sommets se tiendront à Grenade, le 5 octobre, puis au Royaume-Uni au printemps 2024. À ce stade, l'Espagne souhaite centrer les travaux sur les mobilités douces, la connectivité, les échanges interpersonnels, les infrastructures, l'énergie et la jeunesse, tandis que le Royaume-Uni envisage comme priorités l'énergie, la sécurité et la lutte contre les migrations illégales.

Montrer l'unité du continent est essentiel pour peser davantage face à la Russie. Ce signal diplomatique et géopolitique permet aussi de montrer que la France est une puissance d'initiative européenne. Il convient de continuer et d'avancer avec des propositions concrètes, sans rien dupliquer. Toutes vos propositions en ce sens seront les bienvenues.

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Nous en venons aux questions des orateurs des groupes.

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Au nom du groupe Renaissance, je vous remercie pour votre présence. Par le biais de réunions semestrielles, la CPE vise à renforcer les liens entre l'Union européenne et les États qui partagent ses valeurs sans en être membres. Cette communauté politique élargie complète ainsi l'Union européenne par une communauté de valeurs, en créant des conditions de coopération accrues. Cette initiative, lancée sur proposition du président de la République après la conférence sur l'avenir de l'Europe en juin 2022, puis présentée au Conseil européen du 23 juin sous présidence française, est à l'évidence positive tant nous devons favoriser le dialogue entre États et renforcer notre coopération au niveau européen.

Vous indiquez que cette plateforme de coordination politique vise à favoriser le développement de projets concrets de coopération dans les domaines d'intérêt commun. Lors du sommet inaugural de Prague, les participants ont ainsi échangé autour de la paix et la sécurité, du climat, de l'énergie et de l'économie. La lutte contre le changement climatique et la préservation de la biodiversité sont aussi des domaines d'intérêt commun. Pensez-vous que la CPE puisse obtenir l'extension de normes européennes environnementales, comme celles du règlement européen interdisant la déforestation importée, à des États non-membres de l'Union européenne mais qui partagent ses préoccupations ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

La CPE n'a pas de structure institutionnelle fixe et ne cherche pas à imposer de normes aux pays qui ne sont pas membres de l'Union européenne. Néanmoins, le marché intérieur a pour objet d'influencer les normes et les standards des pays avec lesquels nous entretenons des échanges commerciaux.

L'Europe compte 440 millions de consommateurs, avec un produit intérieur brut (PIB) par tête annuel de 25 000 euros, ce qui en fait une région influente à laquelle nombre d'entreprises de pays tiers souhaitent avoir accès. En leur demandant d'appliquer les mêmes normes environnementales et sociales qu'à l'intérieur de l'Union, nous exerçons un pouvoir d'influence, ou soft power, car les entreprises des pays extérieurs ne voudront pas multiplier leurs standards, pour des raisons évidentes de coût. C'est particulièrement le cas avec le règlement que vous évoquez, par lequel nous entendons mettre un terme à l'importation des principaux produits – soja, huile de palme, cacao –, qui entraînent la déforestation ou la dégradation des forêts. Grâce à ce dispositif, nous pouvons suivre les entreprises importatrices et exportatrices, et veiller à ce qu'elles s'approvisionnent auprès de producteurs qui ont instauré des chaînes de valeur durables et sans déforestation.

En somme, affirmer que la CPE servira à étendre les normes serait aller un peu loin. Toutefois, le marché unique est un instrument efficace et influent pour diffuser les normes européennes.

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Le premier sommet de la CPE s'est tenu à Prague, le 6 octobre 2022, dans un contexte de guerre en Ukraine, et sa deuxième édition a eu lieu en Moldavie le 1er juin. Cette initiative reste en proie à de nombreuses incertitudes. Aucune déclaration n'a été adoptée et les sept priorités définies par les quarante-quatre pays représentés sont au point mort.

S'agissant de la sécurité énergétique, la France subit de plein fouet les dogmes écologiques de ses voisins et voit la facture énergétique des Français s'envoler.

La deuxième priorité concerne les infrastructures – gazoducs, câbles sous-marins, hôpitaux, autoroutes et lignes ferroviaires. Alors que les besoins sont colossaux, soit les travaux sont en retard, soit les infrastructures sont vulnérables et ce, malgré les remarques de nombreux pays européens.

Troisième priorité : la cybersécurité. Bien que les pays baltes disposent d'une avance considérable dans ce domaine, la France et de nombreux pays européens sont encore trop en retard par rapport aux États-Unis, à la Russie ou à la Chine et, de ce fait, vulnérables.

Quatrième priorité : les migrations. L'Europe est une vraie passoire et jamais la France n'aura accueilli autant de migrants que sous la présidence d'Emmanuel Macron. Malheureusement, l'attaque d'Annecy en est encore une preuve tangible.

Cinquième priorité : la coopération régionale. Les relations aux frontières de l'Europe sont ténues et les territoires ultramarins de France, comme Mayotte, peinent à être intégrés.

Sixième priorité : le financement de la résilience. Les gouvernements nationaux de l'Union européenne se sont opposés à plusieurs parties fondamentales du plan de la Commission européenne de novembre 2022, qui visait la résilience des infrastructures critiques, pour laquelle la France a versé beaucoup plus qu'elle n'a reçu.

Enfin, septième priorité : la jeunesse. Avec une démographie particulièrement faible et une fuite des cerveaux qui ne cesse de s'accroître, estimée à 3,5 millions entre 2015 et 2020, l'Europe n'attire plus les jeunes et le « vieux continent » n'aura jamais aussi bien porté son nom.

La Communauté politique européenne souhaitée par Emmanuel Macron reste floue quant à ses perspectives : projet d'intégration de nouveaux pays dont les Français ne veulent pas, alliance géopolitique face à la Russie dont les Américains se méfient. Quelles ont été les avancées du sommet dans les sept domaines que j'ai rappelés ?

Par ailleurs, comment analysez-vous l'état de la corruption – reconnue – dans des pays comme la Moldavie et l'Ukraine, alors que des investissements massifs y sont effectués par notre pays ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Permettez-moi de vous dire que vous confondez la Communauté politique européenne et l'Union européenne. Si la seconde est fondée sur la norme et sur la règle, auxquelles adhèrent vingt-sept pays par un traité, la structure de la CPE vise à rassembler la famille européenne et des gens de bonne volonté pour traiter des problèmes du continent face à l'agression injuste de la Russie en Ukraine.

Heureusement, tout le monde n'a pas réagi comme vous à Chisinau ! Au contraire, tous les dirigeants des pays de la CPE ont exprimé leur enthousiasme à se retrouver et à tenir des discussions de fond.

Les déclarations et les communiqués, dans les G20 ou ailleurs, demandent des mois de discussions. La CPE vise à permettre à des responsables de haut niveau de partager des discussions intelligentes, concrètes et pratiques. C'est aussi grâce à elle qu'une mission d'observation de l'Union européenne à la frontière de l'Arménie et de l'Azerbaïdjan a mis fin à la détérioration de la situation entre ces deux pays. C'est également grâce à la réunion entre le président Macron, le chancelier Scholz, le haut représentant Borrell, la présidente du Kosovo et le président serbe, à Chisinau, que nous avons pu calmer la situation et obtenir de nouvelles élections au Kosovo, dans le respect des accords. La CPE est donc politiquement majeure pour la stabilité du continent.

Par ailleurs, la CPE n'est pas une chambre d'attente pour l'élargissement : ce n'est pas l'objectif. Le Royaume-Uni est dans la CPE. Or, cela n'a échappé à personne, il est sorti de l'Union européenne. La Norvège y est aussi représentée alors qu'elle n'a pas envie d'entrer dans l'Union européenne, et je pourrais citer bien d'autres pays. L'objectif est de travailler en coopération, à haut niveau politique. Je sais que la coopération ne semble pas toujours évidente dans un hémicycle. Pourtant, dans le cas d'espèce, c'est une réalité, avec du fond.

La cyber-réserve a pour objectif de mettre fin aux attaques cyber. Vous n'avez pas mentionné l'expérience ukrainienne, qui est supérieure à l'expérience russe en la matière. C'est d'ailleurs l'Ukraine qui, la première, a proposé de partager son expérience avec l'ensemble des pays de la CPE. C'est l'Ukraine qui, la première, a poussé la CPE dans les pays qui ne font pas partie de l'Union européenne.

Les pays de la CPE partagent leur expérience et leurs experts. Ils les forment. Ce sont des résultats concrets pour tous les pays, dont la Moldavie qui fait l'objet d'attaques quotidiennes de la Russie, notamment de la part de manifestants payés par cette dernière.

Si l'Union européenne n'était pas attractive et si elle perdait constamment des cerveaux, pensez-vous que les gens auraient envie de venir s'installer chez nous ? Pas du tout ! De très nombreuses personnes veulent venir, pour des raisons économiques ou de talent, avec des visas : c'est une réalité. La démographie fait que nous avons besoin de talents ; quand je dis « nous », c'est toute l'Union européenne et pas seulement la France.

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Il s'agit d'une immigration « bas de gamme ».

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Nous manquons d'aides-soignants, de médecins, de formateurs, d'ingénieurs : allez dire à ces professionnels que les postes non pourvus dans leurs métiers engendrent un afflux d'immigration « bas de gamme » !

Avec l'Union européenne, nous disposons du meilleur atout pour valoriser et lutter pour l'Etat de droit, lequel inclut l'indépendance de la justice, l'indépendance et la pluralité des médias mais aussi des processus anticorruption et des règles saines en matière de financement des partis politiques.

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La CPE, récemment créée, a fait de la sécurité, de la paix et de la prospérité en Europe son cheval de bataille. Le président Macron, adepte du « faites ce que je dis, mais pas ce que je fais », a récemment réclamé des garanties plus fortes, tangibles et claires en matière de sécurité concernant l'Ukraine, tandis que le conflit continue de s'enliser en Europe et que notre pays est au bord de l'implosion sociale, économique et écologique. Quel regard porte la CPE sur la répression du peuple en France et sur les écarts de richesse qui s'accroissent entre les riches et les pauvres ?

Oui, parlons de paix et de dialogue lorsque le gouvernement français piétine ce dernier lorsqu'il s'agit des partenaires sociaux et des représentants du peuple ! Oui, parlons de sécurité lorsque le gouvernement français n'a cure des droits humains, réprime violemment les manifestations populaires et bafoue la démocratie par des manœuvres grotesques qui bâillonnent la volonté du peuple !

Selon le président de la Ligue des droits de l'Homme, le glissement autoritaire de l'État français, la brutalisation des rapports sociaux par le truchement de sa police, les violences de tout ordre et l'impunité sont un scandale majeur. Amnesty International dénonce des cas d'usage illégal et disproportionné de la force. Alors oui, continuons à disserter de sécurité lorsque celle-ci n'est plus assurée, ni pour nos concitoyens, ni pour les élus, tant le Gouvernement s'accommode des groupuscules et des idées d'extrême droite qui pullulent et nourrissent la haine jusqu'à provoquer la démission d'un élu.

Oui, dissertons sur la prospérité lorsque les écarts continuent à se creuser entre les plus riches et les plus pauvres, sous le regard indifférent de la Macronie qui refuse de taxer les superprofits et d'augmenter le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) à 1 600 euros !

Être animé d'une volonté de garantir la sécurité, la stabilité et la prospérité devrait mener, dans un élan internationaliste, à être vigilant à toute dérive autoritaire à travers le monde, du Sénégal au Guatemala, en commençant par soi-même. C'est une question de crédibilité.

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Chers collègues, un peu de calme. Seuls les orateurs ont la parole à ce stade des échanges.

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Cette commission n'est pas un monastère : nous n'observons pas la règle de Saint-Benoît.

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Chacun ici est libre de ses propos même si l'on peut juger en l'espèce – opinion qui semble être partagée par certains – qu'ils sont quelque peu décalés par rapport à l'objet de nos débats.

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Je crois que vous vous trompez de pays, madame la députée, et que vous devriez vous rendre dans les pays de la CPE pour voir ce que sont une démocratie menacée et un État de droit menacé. Les mots ont un sens : le simple fait que vous puissiez vous exprimer comme vous venez de le faire – j'en suis très heureuse –, que vous puissiez manifester dans la rue et que nous ayons un hémicycle avec des débats certes animés mais dans lesquels chacun a le droit de parler, n'est un acquis pour personne dans le monde.

Je ne crois pas qu'ici les manifestants soient payés ; c'est parfois le cas ailleurs. Je ne crois pas que nous n'ayons aucune pluralité des médias : ils rapportent d'ailleurs toutes les manifestations. Je ne crois pas que notre justice ne soit pas indépendante.

Quand on commence à attaquer l'État de droit dans un pays démocratique, comme vous venez de le faire avec vos paroles, je m'inquiète. Dans certains pays, l'État de droit est chahuté et menacé. Des procédures sont d'ailleurs en cours, dans l'Union européenne, pour le rétablir. Nous essayons de former les pays, notamment les candidats à l'adhésion, pour assurer et solidifier les institutions de l'État de droit.

Un État de droit menacé, c'est un État dans lequel la presse est détenue par une personne ou un monopole ; un État de droit menacé, c'est un État dans lequel les juges ne sont pas indépendants. Ici, il y a une presse de gauche et une presse de droite. On peut ne pas aimer l'une ou l'autre mais le fait est qu'elles existent.

Un État de droit, c'est un État dans lequel on fait des enquêtes pour corruption. On peut déplorer qu'il y ait de la corruption mais des enquêtes sont conduites.

Un État de droit, c'est un État dans lequel on protège le financement des partis politiques. S'il est un pays où on le fait bien, c'est le nôtre.

Cela fait partie des piliers de l'Union européenne.

Je vois partout, aux frontières de l'Union européenne, ce qu'est une démocratie en danger. Je suis choquée et effrayée que l'on fasse une analogie avec la France. Cela signifie qu'on ne prend pas la mesure des choses et qu'on a oublié ce que peut être un vrai danger pour la démocratie. Je vous enjoins à aller vous promener dans les pays autour de l'Union européenne.

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Je vous remercie de ces propos fermes. Nous devons, nous autres responsables politiques, hiérarchiser. Aucune situation n'est jamais satisfaisante par rapport aux principes. Mais les atteintes à ces principes sont totalement différentes selon les pays. Il suffit de regarder le monde qui nous entoure pour voir qu'au cours des trente dernières années, le camp de la liberté, le camp de la séparation des pouvoirs, le camp du respect de l'État de droit, le camp de la pluralité des opinions et le camp de la liberté de la presse se sont, à l'échelle mondiale, constamment réduits comme une peau de chagrin.

Certains ont eu l'illusion, en 1980, en 1989 et en 1992 que ces valeurs seraient désormais acquises et établies. Force est de déchanter en Chine, en Russie, au Moyen-Orient, en Afrique ; mais pas en France, même si l'on peut discuter de la façon dont évolue le système politique.

Alors que les valeurs de l'État de droit sont menacées partout, l'un des objectifs de l'Union européenne est d'essayer de les préserver et l'un des objectifs de la CPE est d'organiser une prise de conscience et une solidarité élargies au service de ces valeurs.

Il est essentiel de bien hiérarchiser. Si nous n'effectuons pas ce travail, nous passons à côté de notre responsabilité.

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Alors que le deuxième sommet de la CPE s'est tenu à Chisinau, celle-ci se matérialise surtout par des échanges informels. Hormis dans le domaine des cybermenaces et de la cybersécurité, le sommet n'a pas abouti à des résultats très concrets. Comment pensez-vous que cette communauté politique peut s'articuler avec l'Union européenne ? N'y a-t-il pas un risque de voir l'Union européenne affaiblie par la CPE ? Le fonctionnement institutionnel de l'Union européenne est complexe. À côté d'elle existe le Conseil de l'Europe. Le développement de la CPE ne risque-t-il pas de rendre l'Europe encore plus complexe et lointaine pour nos concitoyens ?

Concernant le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, avez-vous senti une envie commune des États de la CPE d'aider l'Arménie ? La France est en pointe sur ce dossier mais qu'en est-il des autres États ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Cette question, qui revient souvent, mérite clarification. Je distingue l'Union européenne – qui est un socle de droits, de normes et de traités sur lesquels vous avez à vous exprimer quand nous voulons les changer –, l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) – qui est aussi une structure avec des traités –, le Conseil de l'Europe – qui se concentre sur l'État de droit – et la CPE – qui a un caractère informel.

Tous les chefs d'État et de gouvernement qui assistent aux sommets de la CPE aiment cette instance informelle, dans laquelle ils peuvent parler entre eux de sujets qui nous concernent tous. Le premier ministre albanais peut ainsi rencontrer ses homologues sur un pied d'égalité pour évoquer la fuite des cerveaux de son pays vers l'Allemagne. Quant au Royaume-Uni, qui est sorti de l'Union européenne, il continue d'avoir besoin d'échanger avec nous, que ce soit sur le plan économique ou sur le plan commercial, militaire ou énergétique. La liberté de ton et la capacité d'aborder les sujets sont rendues possibles par ce caractère informel et par l'absence de communiqué. Cela rapproche tout le monde.

Vous avez mentionné l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Le président de la République s'est réuni avec les dirigeants de ces deux pays à Prague : c'était la première fois en onze ans que les deux responsables de ces pays se retrouvaient face à face pour discuter. Le résultat concret a été la mission de l'Union européenne à la frontière entre ces deux Etats. Ces dirigeants se sont à nouveau réunis à Chisinau et tous les Européens sont intéressés puisque cette réunion s'est effectuée en présence du chancelier Scholz, de Charles Michel, qui représente l'Union européenne, et du président Emmanuel Macron. Cette réunion a permis de confirmer l'engagement qui avait été formulé à Prague quant au respect des frontières telles qu'elles figurent dans la déclaration d'Alma-Ata et au respect mutuel de l'intégrité territoriale de l'Azerbaïdjan et de l'Arménie. Vous connaissez le travail de l'EUMA – European Mission in Armenia. Depuis le 20 février, plus de 322 patrouilles ont été effectuées. Cela contribue à diminuer le nombre d'incidents et à maintenir le dialogue entre ces deux populations. C'est aussi un facteur de maintien de la stabilité.

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Merci, madame la ministre, pour votre intervention et pour la déclaration que vous venez de faire. Je représente des personnes qui vivent dans des démocraties menacées. J'ai deux filles qui habitent en Pologne et qui y sont confrontées. Ne confondons pas les situations et ne faisons pas les mauvaises comparaisons. Je vous remercie aussi pour cette patience à laquelle vous invitez notre commission vis-à-vis de la CPE. Pour reprendre cette image, nous construisons à nouveau des cathédrales. Cela prendra une dizaine de générations et nous devons nous interroger au sujet de choses que nous ne verrons pas.

Bravo pour le symbole de la Moldavie, pour ce sommet. Bravo pour les Moldaves. Oui, la CPE fait partie du paysage. Oui, on en entend parler. J'en parle plusieurs fois par semaine, or je ne savais pas que la CPE était aussi implantée en Allemagne, dans les Balkans, dans les pays baltes, en Pologne.

Non, la CPE n'est pas un effort du centre vers une périphérie. Ce n'est pas un grand frère vers un petit frère. Ce qui est fondamental et qui séduit, c'est le pied d'égalité et le fait que ça aille dans tous les sens. Dans le domaine du cyber, nous ne sommes pas les meilleurs et nous apprenons des autres, qui ne se situent pas nécessairement dans ce qu'on appellerait le centre. L'agriculture sera chamboulée et transformée par ces alliances et ces nouvelles perspectives. Être capable de défendre ses idées et de répondre du tac au tac, c'est aussi de la vaillance.

Ma question concerne le Bélarus, qui se trouve dans une zone grise. La réponse du président de la République, lors de son intervention au forum GLOBSEC de Bratislava, a été mal comprise. On ne saisit pas, en France, le fait qu'il existe formellement une union entre le Bélarus et la Russie dans des domaines qui concernent notamment la guerre. Comment voyez-vous la place du Bélarus dans une future architecture, sa place démocratique et territoriale ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Vous avez raison d'évoquer le cas de la Biélorussie. J'ai croisé, au forum de Bratislava, la plus emblématique des représentantes de l'opposition biélorusse, avec laquelle nous entretenons des rapports constants, tout comme le Parlement puisque vous la recevez régulièrement.

L'opposition biélorusse réfléchit à la façon de construire des interactions plus poussées avec les États-Unis et avec l'Union européenne. Commencer à aborder ce sujet était d'ailleurs l'objet de notre rencontre à Bratislava.

Nous souhaitons construire une solution avec l'opposition biélorusse, en incluant tous ses représentants. Nous distinguons les représentants de l'opposition de la Biélorussie elle-même, laquelle est sous sanctions européennes, comme la Russie. Nous sommes conscients des menaces que ce pays représente et la France est à la manœuvre pour renforcer les sanctions envers le régime de la Biélorussie.

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Vous avez assisté, le 1er juin, au sommet de la CPE qui rassemblait trois pays de plus que lors de la première édition à Prague, avec en outre la participation du président Zelensky. Dès le 8 mars, vous aviez réaffirmé le soutien de la France et de l'Europe à la Moldavie. Ce sommet était donc, entre autres, l'occasion de manifester la cohésion des Européens en soutien à ce pays. Les dernières déclarations de Sergueï Lavrov, selon lesquelles la Moldavie pourrait être la prochaine Ukraine, laissent craindre une opération de renversement du pouvoir moldave au profit des pro-Russes. Ce pays vit ainsi dans la crainte constante d'une déstabilisation, par exemple à partir de la région séparatiste pro-russe de Transnistrie, où Moscou compte quelque 1 500 soldats et d'importants stocks de munitions.

Comment réagissez-vous à ces menaces à peine voilées, si ce n'est de guerre, du moins de déstabilisation politique ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Tenir le deuxième sommet de la CPE à Chisinau avait une valeur symbolique : montrer à la Russie que la Moldavie fait partie de la famille européenne. La situation est compliquée, marquée par des tentatives de déstabilisation, des manifestations – avec des manifestants payés par des agents russes –, et de la désinformation. La Moldavie a dû cesser de diffuser la télévision russophone et sa propagande. La France l'a aidée à renforcer ses capacités à s'attaquer à la désinformation. En outre, la chaîne franco-allemande Arte diffuse du contenu gratuit en Moldavie, pour que les écrans de télévision relaient autre chose que la propagande russe.

Nous aidons aussi la Moldavie pour son énergie. Contrairement à ce que certains peuvent penser, dans ce pays comme dans d'autres, il ne s'agit pas de fourniture gratuite mais de vente d'énergie, en s'adaptant à chaque situation.

Le lancement d'une mission civile de l'Union européenne a également été annoncé, pour contrer les tentatives de déstabilisation.

Enfin, des sanctions ont été prononcées au niveau européen contre les oligarques moldaves. L'objectif est d'aider la présidente Maia Sandu, qui s'est fait élire avec un agenda de lutte anticorruption et de réformes. Pour un pays comme celui-là, la présence sur son territoire de députés de pays de l'Union européenne, notamment français, revêt une grande valeur. Si vous en avez l'occasion, allez lui témoigner votre soutien et parler à la population. La diplomatie parlementaire est incroyablement précieuse.

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La présidente de l'Assemblée nationale s'y déplacera prochainement et notre commission sera représentée par M. Michel Herbillon.

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Comme l'a souligné le président de la République à l'issue du sommet de la CPE, cet événement diplomatique a permis de réaffirmer notre soutien au peuple ukrainien et de l'accompagner dans l'organisation de sa contre-offensive. On ne peut que saluer les efforts qui ont été confirmés lors de ce sommet : la formation de pilotes de chasse ukrainiens et les engagements à continuer de fournir du matériel militaire pour renforcer la défense aérienne ukrainienne.

Mais, alors que l'Ukraine se bat pour protéger sa démocratie, il nous faut aussi protéger la nôtre. Les démocraties européennes sont prises d'assaut par des forces externes. Les cyberattaques constantes contre nos services publics, conduites par des organisations proches de Wagner ou du pouvoir russe, entament la résilience et la crédibilité de nos institutions. Aussi peut-on se féliciter de l'ambition d'étendre la réserve cyber de l'Union européenne à un ensemble plus large d'États européens. Certaines attaques viennent aussi des forces internes, car les crises énergétique, migratoire, environnementale et économique favorisent la montée en puissance du repli sur soi et d'un sentiment populiste, avec un terreau pour les thèses eurosceptiques. Recul de l'État de droit, atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, restriction des droits civils et politiques, politiques discriminatoires : telle est la kyrielle des risques encourus par les populations dans leur vie quotidienne. L'illibéralisme devient un sujet d'inquiétude croissante pour nos partenaires dans l'Union européenne. La question de l'État de droit est souvent poussée au premier plan des débats dans nos institutions.

Alors que plusieurs États de la CPE sont candidats ou pourraient se porter candidats à l'adhésion à l'Union européenne, il conviendrait de garantir que les principes et les valeurs de l'État de droit soient intégrés en amont. Cette question a-t-elle été abordée au sommet de la CPE, qu'il s'agisse de la protection de l'État de droit contre les menaces externes ou de son renforcement pour les États qui pourraient rejoindre l'Union européenne ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Tout d'abord, lorsque le président de la République a dessiné la CPE, la question s'est posée d'imposer le respect d'un État de droit équivalent au nôtre pour former cette communauté politique. La réponse a été qu'il ne s'agissait pas de reproduire le Conseil de l'Europe. Tous les pays de la CPE sont attachés à l'État de droit et le manifestent à travers leur soutien à l'Ukraine, puisque le respect de l'intégrité territoriale d'un pays relève de l'État de droit.

Ensuite, il faut distinguer la CPE de l'adhésion à l'Union européenne. Lorsque le président de la République affirme que la question de l'élargissement n'est pas celle de savoir « si » il aura lieu, ou « quand » mais « comment », il fait explicitement référence à l'État de droit, qui est l'un des piliers de l'Union européenne. Au moment d'ouvrir les négociations d'adhésion, il conviendra de réfléchir à la façon de mieux accompagner les pays candidats pour renforcer leur État de droit, sur le chemin vers l'adhésion comme à l'intérieur de l'Union européenne.

Enfin, l'un des critères pour l'ouverture de négociations d'adhésion est l'État de droit, notamment la désoligarchisation. Nous, Européens de l'Union européenne, avons une responsabilité majeure à aider les pays concernés à installer une administration permettant de consolider les institutions et de bâtir un État de droit résilient.

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Nous sommes attachés à ce que les conditions d'adhésion à l'Union européenne en matière d'État de droit soient traitées par l'Union européenne. Il y aurait une confusion des genres, si l'on demandait à des États que l'on réunit sans critère précis dans ce domaine de se prononcer. Ce serait une ingérence dans les affaires de l'Union européenne. Les conditions d'élargissement de l'Union européenne relèvent de ses membres.

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Laurence Boone, secrétaire d'État

C'était le sens de la première partie de ma réponse. La CPE est une communauté. Il n'y a pas d'autre engagement que celui d'être unis et de se soutenir.

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La CPE ne doit pas fixer les conditions de l'adhésion à l'Union européenne.

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Elle ne le fera pas. La CPE réunit des pays pour échanger sur des sujets politiques. Le socle de l'Union européenne est l'État de droit et ses quatre composantes. L'adhésion à l'Union européenne ne relève pas de la CPE.

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Tout d'abord, je vous remercie d'accepter de parler franchement avec nous, non pas à huis clos mais devant le peuple français. La Gauche démocrate et républicaine apprécie cette attitude.

Par ailleurs, je partage pleinement votre analyse quant à l'état de la démocratie dans le monde, monsieur le président, mais acceptez l'idée que la France soit aussi concernée par ce rétrécissement de l'espace démocratique ; peut-être pas au point d'être un État autoritaire mais la démocratie souffre aussi dans notre pays. Si vous ne l'acceptez pas, les Français le mesurent. Le Parlement doit donc être en phase avec eux.

La CPE apparaît comme un mini-multilatéralisme. Plusieurs réunions se tiennent dans le monde, avec le G7, le G20, la CPE... Où est l'Organisation des Nations Unies (ONU) ? Qu'en est-il de ses décisions ? On parle de non-formalisme. Certes, mais les démocraties ont quand même des comptes à rendre ! Normalement, dans les démocraties, on agit sous le contrôle du peuple, pour le peuple. Le caractère informel soulève légitimement des questions. Vous parliez de diplomatie parlementaire – ce qui fait plaisir aux députés – mais il existe une Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, qui traite régulièrement des questions de démocratie et de droits de l'Homme. Affirmer que les choses se règlent plus facilement dans des instances informelles pose problème. En revanche, je partage l'idée selon laquelle il faut se parler car c'est un gage de paix et cela facilite sa construction. Je ne m'opposerai jamais à des rencontres de responsables qui décident de se parler. Toutefois, il faudra trouver l'équilibre entre l'Union européenne, la CPE, le Conseil de l'Europe, etc. Il faudra préciser qui fait quoi, qui dit quoi et qui formalise.

Par ailleurs, la question de la pêche dans les eaux du Sahara occidental sera posée fin juin. L'Union européenne envisage-t-elle d'engager des négociations avec la République arabe sahraouie démocratique pour permettre aux pêcheurs européens d'aller dans ses eaux territoriales ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Vous soulignez une certaine fragmentation du multilatéralisme, qui doit conduire à réfléchir au rôle de chaque instance. S'agissant de l'ONU, la question des biens publics mondiaux, à commencer par le climat, s'impose. Nous aurons toujours besoin de tous les pays de l'ONU pour régler le problème climatique.

La CPE, pour sa part, crée un lieu de dialogue fréquent et facile, à visée politique. Ce dialogue n'est pas formalisé, raison pour laquelle il n'y a pas de communiqué – lequel engagerait pour les années à venir. En revanche, certains ministres viennent rendre compte à l'Assemblée nationale car il doit y avoir un rendu démocratique. En outre, il n'y aura pas de décision formelle que les députés ne pourraient entériner. Si nous envisagions un accord plus engageant et multilatéral concernant des liaisons ferroviaires, les députés auraient à voter pour ou contre. Enfin, il faut laisser la CPE prendre corps, en Espagne puis au Royaume-Uni, avant de décider de son éventuelle formalisation.

Le G7 ou le G20 n'ont pas de secrétariat général et ils fonctionnent assez bien.

Concernant la pêche dans les eaux du Sahara occidental, l'Union européenne et le Maroc ont dû renégocier leur accord de pêche à la demande de la Cour de justice de l'Union européenne, en 2018, pour y inclure les eaux adjacentes au territoire du Sahara occidental. Pour nous, ce texte est conforme au principe des intérêts des habitants des territoires non autonomes, ainsi qu'à l'obligation de favoriser leur prospérité. Dit autrement, cet accord est dans l'intérêt des Sahraouis. La Commission européenne a rendu plusieurs rapports, dont un datant de 2021 qui concluait que les Sahraouis en bénéficieraient à 75 %. Plus simplement, on peut considérer que cet accord crée des emplois et favorise le développement économique et social dans le domaine de la pêche. D'un point de vue juridique, nous sommes toujours dans l'attente du pourvoi devant la Cour de justice. Durant cette période, l'accord reste en vigueur.

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Nous en venons à présent aux questions individuelles des députés.

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Tout d'abord, je vous félicite pour vos paroles fortes concernant l'État de droit, la liberté d'expression et la pluralité des médias. Je formule le rêve que nos collègues de l'opposition, tout en continuant à critiquer le Gouvernement, parce que c'est la règle du jeu, adoptent des mots qui ne soient pas blessants pour les militants des droits humains en plaçant sur le même plan la situation française et celle de pays illibéraux, vassalisés ou sous régime autoritaire.

Le Parlement européen a adopté un projet de directive sur le devoir de vigilance des multinationales. Cet outil est très puissant pour inciter les entreprises à éviter les atteintes aux droits sociaux et environnementaux dans leur chaîne de valeur. Or les pays de la CPE, parce qu'ils sont proches et présentent des coûts bas, pourraient être des sous-traitants d'entreprises européennes. Sont-ils conscients qu'ils doivent respecter les droits sociaux et environnementaux lorsqu'ils créent de l'emploi chez eux, ce qui est souhaitable ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

La France est le premier pays au monde à avoir adopté une loi sur le devoir de vigilance, en 2017. L'objectif central de la directive est d'améliorer le level playing field dans le marché unique. Les entreprises devront appliquer le devoir de vigilance en aval de leur chaîne de valeur, donc à leurs sous-traitants. Les pays de la CPE désireux d'entrer dans l'Union européenne devront reprendre les acquis européens. En outre, avec la pression d'un marché de 440 millions de consommateurs, cette excellente initiative, qui devrait s'imposer naturellement à toutes les entreprises, fera des petits au-delà des frontières de l'Union européenne.

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Dès 2019, Ursula von der Leyen avait annoncé sa volonté d'organiser une conférence consacrée à l'avenir de l'Europe. Celle-ci s'est tenue, en apparence, comme une vaste consultation civique par voie numérique. Avec 721 000 participants seulement, dont 53 456 réellement inscrits sur la plateforme, pour près de 450 millions d'habitants, cette conférence est un échec cuisant. Dans vingt-deux États sur vingt-sept, la participation a été quasi-nulle. Rien d'étonnant à cela car on se rappelle que dès le lancement de cette conférence, il n'était question d'ouvrir une réflexion ni sur le fond de la construction européenne, ni sur la nature des traités. Les propositions qui en découlent sont de belles lettres d'intention, sans application concrète et sans moyens. Elles se heurtent directement au carcan néolibéral des traités européens. Quand tirerons-nous le bilan des effets dévastateurs de ces traités, que les Français ont souverainement rejetés lors du référendum de 2005 ? Quand la France s'engagera-t-elle résolument pour leur révision ?

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Je précise qu'en 2005, le peuple français n'a pas rejeté les traités : il les a maintenus. Nous avons, lors du référendum, rejeté leur modification par la Constitution européenne.

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Je répondrai en évitant d'utiliser le bréviaire eurosceptique que vous étalez avec persistance. Notre pays n'est pas néolibéral. C'est faux et archifaux. Je vous invite à aller voir un pays néolibéral, par exemple le Royaume-Uni.

Depuis toujours, le président de la République a indiqué qu'il n'y aurait ni totem, ni tabou concernant les changements de traités. Avec l'élargissement, parce que des pays ont envie de se réformer et d'adopter nos institutions et nos modes de fonctionnement, nous devrons organiser une consultation populaire. Il y aura alors de fortes chances que nous changions la façon dont fonctionne l'Union européenne car elle ne sera plus la même.

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Quelles sont les réflexions en cours concernant une réforme du marché de l'électricité, en particulier le découplage du prix de l'électricité et du gaz souhaité par la France ou l'Espagne mais rejeté par la majorité des États membres ? Régulièrement invoquée pour limiter l'incidence de la crise de l'énergie, la décorrélation du prix du gaz et de l'électricité ne fait pas l'unanimité à l'échelle européenne. Ce sujet, largement évoqué lors du Conseil européen du 21 octobre, pourrait ne pas être tranché avant le début de l'année prochaine. Quelles sont les avancées et les orientations en la matière ? Qu'envisage de faire le Gouvernement dans les prochains mois ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

S'agissant de la réforme du marché de l'électricité, un texte est sur la table. Son objectif est de permettre des contrats de long terme, qui décorrèleront le prix de l'électricité de celui du gaz sur le marché dit « spot », de très court terme, mais aussi de permettre des investissements dans les énergies décarbonées. Les consommateurs et les usagers, qu'ils soient des entreprises ou des ménages, devront pouvoir bénéficier de coûts d'électricité moins élevés, soit au travers de contrats de long terme, soit au travers de contrats sur la différence, qui permettent de capter les rentes pour les redistribuer à tous les consommateurs – et ce, conformément au principe de neutralité technologique qui nous est cher, puisqu'une grande part de notre électricité est nucléaire.

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J'ai bien écouté votre réponse quant à la Communauté politique européenne comme antichambre de l'adhésion à l'Union européenne…

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Non, vous n'avez pas écouté ! J'ai dit le contraire.

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En effet, je me suis trompé. Quoi qu'il en soit, non seulement votre réponse ne nous a pas convaincus mais elle nous a semblé de mauvaise foi. Les Français ont besoin de clarté dans les mandats, pas de prises de décisions ou de réunions informelles. Ils ont besoin de périmètres clairs dans les institutions. Quant à la parole du président de la République, que vous avez évoquée dans l'une de vos réponses, vous savez ce que les Français en pensent : nous en avons eu un exemple lors de la réforme des retraites.

Je pose la question suivante en tant que président du groupe d'amitié France-Grèce. Peut-on avoir des nouvelles de Fredi Beleri, candidat à la mairie d'Himarë en Albanie, d'origine grecque, arrêté pour des raisons floues après sa victoire aux élections ? Nous n'avons pas eu de réponse de la part de Mme Catherine Colonna, hier.

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Si vous considérez que la CPE est une antichambre de l'adhésion, j'en déduis que vous considérez que le Royaume-Uni est candidat à l'Union européenne – ce dont je me réjouis ! En effet, nous aurions aimé qu'il n'en sorte pas. Merci de votre enthousiasme pour cette Union européenne !

Plus sérieusement, la CPE n'est pas l'antichambre de l'adhésion. La variété des pays qui en font partie est le signal le plus clair que l'on puisse en donner. Mais quand quelqu'un ne veut pas entendre, il devient sourd. C'est d'ailleurs sans doute pour cela que vous n'entendez pas non plus la parole du président de la République quand il s'agit des retraites. Pour notre part, nous l'entendons, et nous répondons avec respect à ce que vous dites, même quand c'est faux, en particulier concernant le pacte sur la migration et l'asile.

Je vous répondrai ultérieurement au sujet de Fredi Beleri.

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Je vous remercie pour cet échange ouvert et franc sur les avancées du sommet de la CPE en Moldavie. Je suis convaincue que cet espace de coopération politique entre nations européennes est indispensable pour maintenir l'unité et la stabilité de notre continent et soutenir les démocraties libérales.

Vous avez souligné l'importance des échanges qui ont lieu dans la CPE pour dénouer des situations compliquées dans la région, comme ceux qui ont lieu entre le président Macron et le chancelier Scholtz, en présence de Josep Borrell, au sujet du Kosovo. Pensez-vous qu'ils aboutiront à une normalisation ? Ne risquent-ils pas de mettre en péril le processus d'intégration de la Serbie ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Depuis les incidents du 26 mai dernier, la situation reste tendue. Lors des échanges entre la Serbie, le Kosovo, le président de la République française, le chancelier allemand et le haut représentant de l'Union européenne, priorité a été donnée à la désescalade et à la reprise de discussions pour l'application de l'accord de Bruxelles. Il a également été demandé de tenir les élections dans les quatre municipalités qui ont fait l'objet de tensions tant de la part du Kosovo que de la Serbie. La semaine dernière, des avancées ont été observées. Nous continuerons de les encourager, de normaliser les relations et d'inciter à la tenue de nouvelles élections. C'est une condition essentielle pour assurer la perspective européenne du Kosovo et de la Serbie.

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Lors du sommet à Chisinau, l'Allemagne et la France ont demandé que de nouvelles élections soient organisées dans les quatre municipalités du Kosovo dans lesquelles ont éclaté des heurts avec les manifestants serbes. Au-delà de l'intervention de l'OTAN, j'aimerais vous entendre sur le fond du problème : les raisons du boycott des élections par la population serbe. Si l'on veut éviter une contagion aux Balkans du conflit en Ukraine, il faut inciter le gouvernement kosovar à respecter les accords signés en 2013 avec la Serbie. Alors que le président Macron a dénoncé la responsabilité des autorités kosovares, pouvez-vous nous en dire plus sur la médiation qui s'est tenue en marge du sommet de Chisinau et sur l'échec du précédent accord, qui n'a pas été respecté par le Kosovo ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

La désinformation et la mésinformation dans la région contribuent à tendre les relations entre le Kosovo et la Serbie. Comme l'a indiqué le président de la République, plusieurs accords ont été signés et doivent être appliqués. Nous devrions peut-être appuyer davantage sur la séquence car chacun se renvoie la balle en considérant qu'ils n'ont pas été appliqués par l'autre partie. Le chancelier, le président et le haut représentant ont obtenu de la présidente kosovare et du président serbe que des élections puissent se tenir dans les quatre municipalités dans lesquelles le taux de participation était de 3,4 %, dans le respect de l'engagement des citoyens serbes à y participer et de celui du Kosovo à respecter les accords.

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Je profite de votre présence pour vous poser une question que j'aurais voulu poser à Mme Catherine Colonna hier et qui pourrait intéresser la CPE, dont les discussions ont aussi concerné, en dehors du soutien à l'Ukraine, la sécurité, le climat et l'énergie. Mais quid des migrants ? Où en est la coopération entre l'Italie et la France, dans ce domaine ? Les 46 000 personnes qui ont débarqué en Italie depuis le début de l'année sont pour moitié francophones. Le président Macron a déclaré en mai qu'il fallait que l'Union européenne aide davantage l'Italie, qui se plaint de l'absence d'aide. Le chancelier allemand et le premier ministre britannique ont reçu Mme Giorgia Meloni, la présidente du conseil des ministres de la République italienne. La France envisage-t-elle également de la recevoir aussi ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

La France et l'Italie partagent la conviction qu'une plus grande coopération franco-italienne et européenne est nécessaire concernant les migrations. J'en ai discuté hier, au Parlement européen, avec mon homologue italien Raffaele Fitto.

À cause de la pression migratoire accrue, nous lancerons cet été l'expérimentation d'une force aux frontières, à la frontière italienne, qui associera plus étroitement les forces de sécurité intérieure, les douaniers et les militaires. Cette force s'inscrira dans le cadre des échanges entre les ministres de l'intérieur français et italien pour lutter contre les migrations irrégulières.

Même si l'Italie aurait peut-être souhaité aller plus loin, nous avons trouvé un accord concernant le pacte sur la migration et l'asile. Il permettra de renforcer les frontières extérieures de l'Union européenne, de traiter plus rapidement le cas des migrants arrivant chez nous en ayant peu de chances d'obtenir le statut d'asile et de les raccompagner là d'où ils viennent. Cette démarche sera importante pour la sécurisation mais aussi pour la solidarité et l'humanité puisque nous accueillerons les demandeurs d'asile qui en ont besoin avec une répartition dans l'Union européenne.

Enfin, le volet financier de l'accord avec la Tunisie, qui est à la fois européen et bilatéral, vise à aider le développement économique de ce pays. Ce volet est conditionné à l'application de réformes économiques et à une coopération dans le domaine migratoire, pour éviter que des personnes prennent la mer depuis la Tunisie.

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La CPE a vocation à réunir des États très divers du point de vue des niveaux de vie, des systèmes de sécurité sociale et des normes sociales et environnementales. Lors de son dernier sommet, cette instance a évoqué des thématiques aussi variées qu'importantes pour la vie quotidienne des peuples concernés : l'énergie, la sécurité et les transports. Au-delà de l'aspect symbolique de ces rencontres, les réunions de la CPE ont-elles vocation à déboucher sur des résultats, des actes ou des instruments concrets et opposables, qui affecteront potentiellement la vie de millions de personnes ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Ces réunions n'aboutiront pas à des mesures opposables, l'objectif étant de favoriser le dialogue politique et des coopérations plus concrètes dans les domaines que vous avez évoqués. Si des accords devaient être envisagés, comme un contrat ferroviaire entre deux pays de la CPE, la discussion redescendrait au niveau des pays concernés, de leurs institutions et de leurs entreprises privées et publiques. La CPE est un facilitateur et un catalyseur, qui offre aussi la possibilité d'apprendre les uns des autres.

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Le pacte sur la migration et l'asile constitue une grande avancée. Il est indispensable de réfléchir à ces questions avec les pays de la CPE et d'aider les pays en première ligne, en particulier l'Italie.

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Ce pacte est un accord majeur. Alors que les pays de l'Union européenne discutaient de ce sujet depuis dix ans, cet accord a permis de trouver un excellent équilibre – qui recouvre largement les positions françaises – entre responsabilité, protection des frontières, accueil des demandeurs d'asile qui en ont besoin en faisant la distinction avec la migration économique dont nous aurons à débattre, aide aux pays de première entrée et solidarité.

L'Allemagne accueille 44 % des demandeurs d'asile, contre 17 % pour la France, ce qui est une part bien moins élevée.

Nous aurons d'autres discussions sur ce sujet lors des prochaines CPE, pour faire face au mieux aux afflux migratoires et de demandeurs d'asile dans l'intérêt mutuel des pays de départ et de première entrée.

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La Moldavie, pays le plus pauvre d'Europe, partage deux-tiers de ses frontières avec l'Ukraine ; elle est le théâtre d'un jeu d'influence entre l'Occident et le monde russe. Au-delà de la volonté d'adhésion à l'Union européenne de l'exécutif moldave, se pose la question géostratégique de la Transnistrie, une petite région séparatiste pro-russe dans laquelle sont nichés les plus importants stocks d'armes de la période soviétique, à quelques kilomètres de la ville d'Odessa, que la plupart des gouvernements et des services occidentaux reconnaissent comme l'objectif ultime de l'opération militaire russe car elle lui offrirait un contrôle total de la mer noire. Ce contrôle est le principal enjeu militaire, économique et diplomatique de la Russie depuis sa constitution en tant qu'empire par Pierre le Grand, il y a trois siècles. Quel regard portez-vous sur le destin politique de la Moldavie, qui se trouve au cœur d'enjeux géostratégiques gigantesques ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

La Moldavie a le statut de candidat à l'adhésion à l'Union européenne. Dans une première étape, si elle satisfait aux conditions relatives à l'État de droit et à la désoligarchisation d'ici à décembre, et si la Commission européenne émet un rapport positif en ce sens, nous pourrons ouvrir les discussions sur son adhésion. Cela ne veut pas dire qu'elle adhérera demain ; prendre tout l'acquis de l'Union européenne peut demander cinq, dix ou quinze ans. S'agissant de l'élargissement, le président de la République a été très clair quant au « comment ». Savoir quelle Union européenne nous voulons demain est un sujet qui nous occupera longtemps.

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La CPE vise à favoriser le dialogue politique et la coopération afin de répondre aux questions d'intérêt commun, notamment dans le domaine de l'énergie. Depuis le début de la guerre menée par la Russie sur le sol ukrainien, l'Europe subit de fortes répercussions sur les prix de son énergie. En France, nous avons instauré un bouclier tarifaire inédit dans son ampleur, pour protéger nos concitoyens. Toutefois, cette solution n'est que temporaire. Pour abaisser le coût des énergies, tendre vers une indépendance énergétique européenne et réduire notre empreinte carbone, nous encourageons le développement du nucléaire en Europe tout en acceptant une part d'énergies renouvelables dans notre mix énergétique. Nous avons d'ailleurs voté deux textes sur ce sujet. En parallèle, la Commission européenne a proposé, le 14 mars dernier, une réforme ciblée du marché de l'électricité afin de stabiliser les prix et d'assurer l'approvisionnement en électricité dans l'Union. Comment envisagez-vous la coopération stratégique européenne en matière d'énergie, notamment dans le domaine du nucléaire et des énergies renouvelables ?

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Laurence Boone, secrétaire d'État

Depuis 2012, la France a augmenté de 46 % la part d'énergies renouvelables dans son mix énergétique. Cette augmentation, comparable à celle de ses grands voisins, lui a permis d'atteindre un niveau de 19,3 % en 2021, légèrement supérieur à celui de l'Allemagne.

Par ailleurs, tout au long des discussions sur l'énergie depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, nous avons milité pour la neutralité technologique de tous les textes, afin que le nucléaire et les renouvelables ne soient pas mis en concurrence. Cela explique la mention de l'hydrogène bas carbone dans certains d'entre eux. Nous continuerons, parce que tous les pays européens ne sont pas sur cette ligne. Comme avec l'Alliance du nucléaire créée par Agnès Pannier-Runacher, la réforme du marché de l'électricité favorable au nucléaire ou le Net Zero Industry Act en réponse à l' Inflation Reduction Act, la France sera systématiquement à l'avant-garde pour maintenir le nucléaire et la neutralité technologique.

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Je vous remercie pour la clarté de vos propos sur ce que fait et ne fait pas la CPE.

En réalité, quand vous vous adressez à des personnes en difficulté, vous ne commencez pas par leur demander leur curriculum vitae. Il existe des moments où il faut parler avec les personnes concernées. La CPE, en permettant ce dialogue direct et rapide, s'avère très utile, à condition de ne pas en attendre plus que ce qu'elle peut donner. En l'occurrence, la CPE n'est certainement pas une machine à produire des politiques et laisse intactes les compétences de l'Union européenne sur son mode d'élargissement et de fonctionnement, ainsi que sur son financement, sujets pour lesquels vous êtes compétente dans le Gouvernement, ce qui nous conduira à vous réinviter.

Je souhaite aussi exprimer ma reconnaissance, à laquelle mes collègues s'associeront, pour la façon dont vous vous êtes prêtée à cet exercice difficile des questions-réponses, dans le délai imparti, de façon directe et en acceptant la confrontation. Cette commission l'apprécie profondément.

La séance est levée à 12h 50

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Damien Abad, Mme Clémentine Autain, Mme Véronique Besse, M. Carlos Martens Bilongo, Mme Chantal Bouloux, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Louis Boyard, M. Jérôme Buisson, Mme Eléonore Caroit, Mme Mireille Clapot, M. Pierre Cordier, M. Alain David, M. Pierre-Henri Dumont, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Frédéric Falcon, M. Olivier Faure, M. Nicolas Forissier, M. Thibaut François, M. Bruno Fuchs, M. Guillaume Garot, Mme Maud Gatel, M. Hadrien Ghomi, Mme Olga Givernet, M. Philippe Guillemard, Mme Marine Hamelet, M. Michel Herbillon, M. Alexis Jolly, Mme Brigitte Klinkert, Mme Stéphanie Kochert, M. Jean-Paul Lecoq, M. Sylvain Maillard, Mme Emmanuelle Ménard, Mme Nathalie Oziol, M. Frédéric Petit, M. Jean-François Portarrieu, M. Adrien Quatennens, Mme Laurence Robert-Dehault, Mme Laetitia Saint-Paul, M. Vincent Seitlinger, Mme Ersilia Soudais, Mme Liliana Tanguy, M. Lionel Vuibert, M. Christopher Weissberg, Mme Caroline Yadan

Excusés. - M. Sébastien Chenu, Mme Julie Delpech, M. Michel Guiniot, M. Meyer Habib, M. Hubert Julien-Laferrière, Mme Amélia Lakrafi, M. Tematai Le Gayic, Mme Marine Le Pen, M. Vincent Ledoux, M. Laurent Marcangeli, M. Nicolas Metzdorf, M. Bertrand Pancher, Mme Mathilde Panot, Mme Barbara Pompili, Mme Sabrina Sebaihi, Mme Michèle Tabarot, M. Aurélien Taché, Mme Laurence Vichnievsky, M. Éric Woerth, Mme Estelle Youssouffa, M. Frédéric Zgainski

Assistaient également à la réunion. - M. Belkhir Belhaddad, Mme Martine Etienne, M. Christophe Naegelen