La réunion

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La commission procède à l'audition, ouverte à la presse, de M. Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France.

Présidence de M. Jean-Louis Bourlanges, président.

La séance est ouverte à 9 h 05.

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Mes chers collègues, permettez-moi de vous indiquer en préambule que nos collègues du Sénat ont approuvé hier, à une très large majorité, la proposition de loi dont j'avais pris l'initiative en notre nom à tous, modifiant la loi du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, et plus précisément les dispositions concernant la commission d'évaluation de l'aide publique au développement (APD), dont nous souhaitions la création. Nous considérions que le décret d'application pris par le Gouvernement n'était pas conforme à la loi, puisqu'il excluait notamment que le président de la commission d'évaluation fût élu par ses membres. Nous avons donc décidé de modifier la loi par un texte, que le Sénat a finalement voté hier. Les deux chambres ayant approuvé les dispositions dans les mêmes termes, il ne sera donc pas nécessaire de procéder à une commission mixte paritaire, ni à une seconde lecture.

Nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui M. Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France. Monsieur le directeur général, soyez le bienvenu devant cette commission, qui suit avec la plus grande attention les enjeux de l'aide publique au développement et l'action des principaux opérateurs en la matière, dont Expertise France. À titre liminaire, je rappelle qu'Expertise France est, si vous me permettez cette expression, le « nom de marque » de l'Agence française d'expertise technique internationale, établissement public œuvrant sous la double tutelle des ministères chargés des affaires étrangères et de l'économie, dans le cadre de la politique extérieure de développement, de solidarité et d'influence de la France.

Créée fin 2014 sur une initiative parlementaire, dans le cadre du débat sur la loi relative à la politique de développement et de solidarité internationale, Expertise France a permis de mettre un terme à l'atomisation de l'expertise technique française en nous dotant, à l'instar de nombre de pays voisins, d'un opérateur puissant et unique – en lieu et place de six entités séparées –, capable de projeter le savoir-faire de nos experts dans le monde entier. En février 2018, il a été décidé de l'intégrer au groupe de l'Agence française de développement (AFD).

Vous-même, Monsieur le directeur général, avez pris la tête d'Expertise France en novembre 2018, après avoir exercé les fonctions de directeur général délégué de l'AFD. À bien des égards, ainsi que vous avez eu l'occasion de me le dire lors d'un entretien l'an passé, Expertise France est l'histoire d'une renaissance. En 1998, au moment de la fusion des ministères des affaires étrangères et de la coopération, le maintien de l'universalité du réseau diplomatique a été obtenu au prix d'une déflation des moyens auparavant dévolus à la coopération. De 30 000 en 1980, le nombre des coopérants techniques a chuté à 4 000 au moment de la réforme de la coopération en 1998, puis à moins de 500 en 2015, dont 250 transférés à Expertise France.

Votre agence compte aujourd'hui 625 salariés au siège et 1 000 intervenants sur le terrain, dont 440 experts et 220 experts techniques internationaux. Elle mène à bien quelque 380 projets dans 145 pays, l'Afrique représentant 65 % de ses activités. Celles-ci croissent de 15 % chaque année, le chiffre d'affaires étant passé de 100 millions d'euros en 2015 à environ 400 millions d'euros en 2023. L'envie des pays étrangers de coopérer avec la France est donc bien présente. Mais si notre pays s'est engagé sur la voie d'un rattrapage de son retard, celui-ci reste néanmoins encore important, notamment vis-à-vis de l'Allemagne qui consacre 3,5 milliards d'euros à la coopération technique chaque année contre 60 millions d'euros en France.

Les moyens d'Expertise France reposent sur deux piliers principaux : les financements publics français au sens large, à hauteur de 42 % environ, et ceux de l'Union européenne, pour 51 %. Nous avons le plaisir de vous entendre, Monsieur le directeur général, alors que nous devrions être prochainement appelés à nous prononcer sur le contrat d'objectifs et de moyens (COM) relatif à votre agence portant sur les années 2024 à 2027, conformément à la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'État.

Ce document trace la feuille de route d'Expertise France pour les années à venir. Son examen nous offrira l'occasion de nous pencher avec attention sur les orientations et l'action de votre agence pour les années qui s'annoncent, en lien avec les axes de la politique extérieure de développement, de solidarité et d'influence de notre pays. Dans cette perspective, c'est donc un rendez-vous important qui nous réunit ce matin et je suis certain que vos échanges avec la commission traduiront l'intérêt de nos collègues sur les missions que vous poursuivez.

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Je suis très heureux de m'exprimer pour la troisième fois depuis 2018 devant cette commission, à un moment charnière pour l'agence : d'une part, nous allons fêter à la fin de l'année les dix ans de l'agence et, d'autre part, nous sortons d'un premier cycle de contrats d'objectifs et de moyens avec l'État. Nous vous transmettrons d'ici quelques jours la nouvelle version de ce COM qui fixe la stratégie de l'agence à trois ans.

Vous avez rappelé les chiffres, monsieur le président, de ce qu'on appelait historiquement la coopération technique. Depuis la création de l'agence, sous l'impulsion des gouvernements successifs, les comités interministériels de la coopération internationale et du développement (CICID) de 2018 et de 2023 ont permis la reprise de cette coopération technique sous une forme nouvelle. Nous ne parlons plus de « coopérants techniques » mais d'experts techniques internationaux.

Ensuite, la majorité de notre activité s'effectue dans le cadre de projets structurés de renforcement de politiques publiques, comme aujourd'hui toutes les agences de coopération technique dans le monde. Ces actions se sont effectivement traduites par un renforcement et un déploiement sur le terrain de 1 250 personnes, dont 500 Français, loin des 22 000 personnes de notre homologue allemande, la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ). Cependant, nous sommes devenus au fil des années la deuxième agence de coopération technique en Europe, même si nous devrions être plus nombreux compte tenu de l'importance de notre politique étrangère.

La reprise de cette coopération est liée à la qualité de nos actions. Notre expertise des politiques publiques et l'appui que nous sommes capables de fournir pour aider les pays à renforcer leurs finances publiques, leurs politiques sociales, leur défense et leur justice sont très appréciés. Il était donc indispensable de rationaliser le dispositif français, tant nous étions très en retard. Il a fallu l'impulsion du Parlement pour aboutir à la création, en 2014, de l'Agence de coopération technique internationale. Depuis 2014, l'activité de celle-ci a ainsi quadruplé et elle continuera à croître jusqu'en 2027, l'horizon de notre futur contrat d'objectifs et de moyens.

Notre modèle économique est désormais stabilisé, conformément à la promesse que j'avais formulée lors du précédent COM. L'agence ne bénéficie plus de subventions de fonctionnement depuis 2019 ; elle est à l'équilibre et se finance sur les marges tirées de ses projets. Ceux-ci se fondent à peu près à parts égales, d'une part, sur l'activité que nous menons avec la France – 25 % avec l'AFD et 25 % avec le ministère de l'Europe et des affaires étrangères – et, d'autre part, sur l'activité avec l'Union européenne, qui était de l'ordre de 60 % il y a encore quelques années.

Depuis la loi du 4 août 2021, l'architecture française de l'aide au développement est plus lisible et plus cohérente. D'abord, elle définit notre mission de service public, qui a pour objet de mobiliser l'expertise française à l'international, sur ressources bilatérales et multilatérales, dans tous les domaines. Notre rôle consiste, quant à lui, à être un ensemblier de compétences. Nous mobilisons l'expertise issue de l'État, des collectivités locales, des organisations non-gouvernementales (ONG) et du secteur privé, au service d'un objectif : l'appui aux politiques publiques de nos partenaires. Ce métier s'est extrêmement professionnalisé et renforcé dans sa gestion au quotidien. Nous sommes également soumis au contrôle de la commission d'évaluation de l'aide publique au développement, qui s'assurera de la bonne utilisation de l'argent public.

Nous sommes actifs dans quatre grands domaines. Le premier concerne la gouvernance et l'appui à la réforme de l'État. Nous avons à ce titre contribué au doublement des recettes fiscales sur les petites et moyennes entreprises (PME) en Guinée et au renforcement du ministère de la justice en Ukraine.

Ensuite, nous intervenons dans les domaines du développement durable, du climat et de la biodiversité. Nous avons travaillé avec la Colombie pour préparer sa stratégie bas carbone 2050. Nous sommes également actifs dans les domaines de la santé, de l'éducation et de la protection sociale. À ce titre, le travail que nous avons mené dans le cadre de notre dispositif en santé mondiale appelé « L'Initiative » a été essentiel depuis dix ans pour éliminer quasiment la malaria dans le bassin du Mékong.

Nous agissons enfin dans le champ des fragilités, de la paix et de la sécurité. Je pense notamment à l'action que nous menons dans un pays comme la Libye, où nous travaillons à la diversification des ressources économiques depuis quelques années. Nous accompagnons également la coopération l'Assemblée nationale avec la chambre des représentants du Maroc.

La loi de 2021 a intégré Expertise France au sein du groupe Agence française de développement. Depuis bientôt deux années d'intégration, le bilan est très positif. Au sein du groupe AFD renforcé, Expertise France est la plateforme de mobilisation de l'expertise, notamment l'expertise publique, en compagnie de Proparco. Avec le financement des contreparties publiques, ce groupe permet de proposer une offre complète. De nombreux pays s'intéressent maintenant au modèle français pour renforcer leurs efficacité et lisibilité.

Nous structurons les offres du groupe dans différents secteurs : l'accès aux produits de santé, le développement de la finance durable, la protection civile, le climat. Cette action nous permet également de renforcer le dialogue avec les instances européennes et notre présence dans les « équipes Europe ». Elle nous permet aussi de nourrir le dialogue politique avec nos partenaires locaux, en accroissant également leurs capacités. Aux termes de la loi de 2021, le législateur a souhaité que nous conservions un mandat spécifique et une gouvernance particulière, à l'image de notre conseil d'administration auquel participent quatre parlementaires, dont deux députés : Mme Ersilia Soudais et M. Mansour Kamardine.

Notre cadre stratégique est par ailleurs défini avec l'État dans le cadre d'un COM, qui vous sera soumis, au même titre que celui de l'AFD. Notre mandat n'est pas exactement le même que celui de l'Agence française de développement. Il s'en distingue notamment par son champ géographique : Expertise France n'est pas limitée au champ des pays en développement, même s'ils représentent près de 90 % de notre activité. Je pense par exemple à l'appui que nous fournissons à la diplomatie européenne sur les questions de cybersécurité ou de sécurité maritime en Indopacifique, où nous travaillons avec le Japon, avec Singapour, avec l'Inde.

Je pense également au travail que nous menons au sein de l'Union européenne. En effet, nous accompagnons la Grèce depuis la crise financière de 2012, avec succès d'ailleurs. Les Grecs sont extrêmement reconnaissants de l'assistance technique apportée par la France, qui n'est sans doute pas étrangère à la trajectoire positive de ce pays aujourd'hui. Ensuite, notre action n'est pas strictement limitée aux questions de développement. Nous sommes ainsi actifs dans la sécurité et la défense et nous sommes également exposés dans les pays en conflit comme le Yémen. Enfin, nous sommes l'une des très rares agences actives dans les zones du Nord-Est syrien non contrôlées par le régime central.

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Exactement.

Grâce à ce mandat pérennisé que le législateur a bien voulu nous confier, nous avons pu développer un certain nombre de domaines d'excellence, comme la gestion des risques nucléaires, bactériologiques ou chimiques, la sécurité portuaire, la criminalité environnementale. Cette offre de coopération technique internationale de la France pourrait sans doute être encore mieux coordonnée.

Nous disposons en notre sein de presque tous les opérateurs de coopération technique. Nous avons accueilli en 2021 nos collègues de Justice Coopération Internationale, l'opérateur du ministère de la justice, ce qui s'est traduit depuis lors par un doublement du portefeuille des projets « justice ». Peu de ministères ont souhaité conserver leurs opérateurs. Dans le champ de l'éducation nationale, France Éducation International réalise une petite partie de ses activités sur la coopération éducative, qui n'est cependant pas exclusive : nous pouvons nous-mêmes mobiliser l'expertise du ministère de l'éducation nationale. De son côté, pour les sujets concernant la police et la gendarmerie, le ministère de l'intérieur a souhaité passer par l'entreprise Civipol, elle-même accréditée auprès de Bruxelles. Nous avons d'ailleurs signé une convention ensemble en 2018, pour clarifier le champ de compétences entre nos deux maisons.

L'ensemble nécessite néanmoins une coordination interministérielle renforcée. À notre niveau, nous travaillons de manière sectorielle avec tous les ministères sur leurs priorités. Nos ministères souhaitent d'ailleurs aller encore plus loin, notamment dans le champ de la coopération sur les sujets de migration.

Avant d'achever mon propos liminaire, je souhaite brièvement mentionner sur le contrat d'objectifs et de moyens qui vous sera soumis pour avis lors des prochaines semaines. Désormais proches de sa finalisation, ses objectifs stratégiques sont établis par le comité interministériel de la coopération internationale et du développement.

Nous devons répondre au double enjeu de lutte contre la pauvreté et de préservation des biens publics mondiaux, en nous engageant sur trois points spécifiques. Le premier concerne la protection de la planète, à travers une action en faveur de l'atténuation et de l'adaptation au changement climatique et pour la préservation de la biodiversité. En outre, nous poursuivrons notre implication dans les enjeux d'économie bleue, qui seront valorisés lors de la convention des Nations Unies sur les océans qui se tiendra à Nice en 2025. La préservation de la biodiversité et le soutien aux démarches locales visent à atténuer l'effet des changements climatiques.

Le deuxième point porte sur le développement économique et social et la lutte contre les inégalités mondiales. Je pense tout particulièrement à des enjeux essentiels : le renforcement des systèmes de santé, la protection sociale, l'éducation, l'enseignement supérieur, l'égalité de genres mais aussi l'entrepreneuriat, le soutien à l'emploi et la formation professionnelle. À titre d'exemples, mentionnons notre action en accompagnement de la formation professionnelle au Rwanda, l'activité de renforcement de l'entrepreneuriat et de l'innovation en Tunisie ou notre action dans le champ du patrimoine et des industries culturelles en lien avec les sujets de restitution sur le palais d'Abomey au Bénin ou le Musée national au Cameroun.

La troisième priorité sectorielle de l'agence – sa marque de fabrique, son « ADN » – a trait au renforcement de la promotion de la gouvernance démocratique, économique et financière, des droits humains, de l'Etat de droit et de la participation citoyenne. Il concerne enfin la gestion et la gouvernance des migrations, sujets sur lesquels nous continuerons à apporter notre pierre à l'édifice de la consolidation de la paix et de la sécurité humaine.

À travers ces grands objectifs, nous cherchons à davantage mobiliser la société française vers l'international, et en particulier trois acteurs principaux. Il s'agit d'abord des entreprises. Par nos financements, nous accompagnons le développement d'un secteur privé sur place, ainsi que la structuration d'un cadre juridique et économique permettant le développement de l'activité de nos entreprises sur le terrain. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si les deux pays qui ont le plus conservé de coopération technique – l'Allemagne et le Japon – sont deux grands pays exportateurs.

Ensuite, nous souhaitons mobiliser davantage la jeunesse française sur nos projets, même si nos experts sont plutôt expérimentés. Nous mobilisons par ailleurs l'expertise de nos territoires, de nos collectivités, la région Nouvelle Aquitaine, la région Île-de-France, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, le département de la Charente maritime. Mais nous pouvons encore aller plus loin en lien avec l'AFD.

Géographiquement, notre activité demeure encore très concentrée sur l'Afrique, pour environ 50 %. L'Afrique continuera à être une zone prioritaire pour nous, dans son intégralité. Dans le cadre du nouveau contrat d'objectifs et de moyens, nous fixerons comme objectif d'être présents dans les pays les moins avancés et les plus vulnérables, dont la quasi-totalité se trouvent sur le continent africain. Nous sommes aujourd'hui beaucoup plus présents sur l'Afrique de l'Est, sur l'Afrique centrale, sur l'Afrique australe. Notre présence est désormais très équilibrée sur l'ensemble du continent africain, comme le Rwanda, la République démocratique du Congo, les Comores, l'Éthiopie, l'Angola.

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Votre désengagement de l'Afrique de l'Ouest, traditionnellement marquée par la présence française, est-il récent, à la suite des crises qui ont secoué le Sahel ? Ce retrait est-il antérieur, plus structurel, en raison d'une attention plus prononcée vers l'Afrique de l'Est ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Notre activité continue de croître en Afrique de l'Ouest mais il est vrai qu'elle a encore plus progressé dans les autres régions. En Afrique de l'Ouest, nous avons dû interrompre notre coopération technique à la demande de certains pays. Au Niger, notre agence comportait 40 personnes il y a un peu plus d'un an mais nous avons stoppé la quasi-totalité de nos projets. En revanche, nous continuons d'enregistrer une demande renforcée de la part de nos partenaires, par exemple l'ensemble des pays du golfe de Guinée.

Au-delà de l'Afrique, trois zones géographiques sont prioritaires dans le cadre de notre futur contrat d'objectifs et de moyens. L'Amérique latine représente un continent très intéressant. Une récente étude de l'AFD montre ainsi les efforts sensibles fournis par la France pour l'aide publique au développement sur le continent latino-américain, au-delà de ceux de l'Espagne, le bailleur de fonds historique. Cet effort n'est pas forcément valorisé à la mesure de son engagement, mais aussi de la demande de nos pays partenaires dans la région. Nous sommes actifs dans le champ du social, du climat et de la sécurité sur ce continent de l'Amérique centrale à l'Amérique latine ; et nous continuerons à l'être.

La deuxième zone concerne l'Indopacifique, zone stratégique pour la France. La troisième zone est celle du « voisinage », en particulier les Balkans et l'Ukraine, où je me suis rendu il y a quinze jours. Dans ce pays, nous avons considérablement renforcé notre coopération, en très peu de temps, à travers dix projets en cours et 45 personnes déployées sur des sujets aussi divers que la justice, la santé mais aussi l'appui au ministère de l'économie et des finances, sur deux volets : la reconstruction et le projet d'intégration à l'Union européenne.

En conclusion, je souhaite évoquer les moyens du contrat d'objectifs et de moyens. Ils sont particulièrement modestes au regard de la mission budgétaire d'aide publique au développement de l'AFD. De quoi avons-nous besoin ? Nous avons d'abord besoin de crédits d'intervention, pour conduire la coopération technique. Monsieur le président, vous avez rappelé l'effort allemand de 3,7 milliards d'euros cette année. Nous en sommes loin : nous demandons 140 millions d'euros, dans le cadre de l'enveloppe dédiée à l'Agence française de développement. Ce montant est également complété par l'enveloppe consacrée aux experts techniques internationaux – 50 à 60 millions d'euros chaque année – et la part bilatérale de la contribution de la France au fonds mondial de lutte contre le syndrome d'immunodéficience acquise (SIDA), le paludisme et la tuberculose, soit à peu près 100 millions d'euros par an, dans le cas de notre programme « L'Initiative », qui nous permet d'être actifs dans la santé mondiale.

Nous mobilisons également 1,5 milliard d'euros à Bruxelles sur trois ans. Je rappelle à ce titre que le montant global du développement européen s'élève à peu près à 80 milliards d'euros sur la période 2022-2027. Pour atteindre cet objectif, nous avons besoin de la part de l'État d'un fonds de soutien pour nous permettre d'intervenir sur les projets déficitaires, soit entre 12 et 17 millions d'euros de crédits de paiement, avec un effet de levier de un à vingt, et une enveloppe de cofinancement des projets européens, d'environ 10 millions d'euros par an.

Ces montant représentent à peu près 1,6 % des autorisations d'engagement et 1,7 % des crédits de paiement de la mission de l'APD. En conséquence, nous ne représentons qu'une petite ligne dans le projet annuel de performances de l'aide publique au développement annexé au projet de loi de finances (PLF). Cependant, j'ai la faiblesse de croire que notre action, l'influence positive que nous pouvons avoir auprès de nos partenaires et l'effort de projection de la France à l'international excèdent très largement la modestie de ces moyens. Vous disposez aujourd'hui, mesdames et messieurs les députés, d'un instrument au service de notre politique étrangère.

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Je cède à présent la parole aux orateurs des différents groupes politiques.

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Depuis 2017, la solidarité internationale est érigée en priorité nationale. La France se situe au quatrième rang mondial des bailleurs d'aide au développement. En 2022, plus de 15 milliards d'euros ont été investis dans la solidarité internationale. Cette hausse significative de 50 % par rapport à 2017 reflète notre volonté d'accroître nos investissements, avec une attention particulière apportée à l'Afrique, qui a bénéficié de plus d'un tiers de cette aide internationale en 2021.

Sur le plan opérationnel, la mise en œuvre des projets de coopération technique internationale dans les domaines clés du développement est assurée par l'acteur interministériel que vous dirigez. Vous l'avez rappelé, Expertise France a doublé son activité en cinq ans. Ces projets s'opèrent dans le cadre du renforcement de nos actions en matière de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales.

Dans ce contexte de croissance rapide, la récente intégration d'Expertise France au sein du groupe de l'AFD marque une étape significative dans notre stratégie de coopération internationale. Celle-ci a notamment permis l'ouverture de nouvelles perspectives géographiques au-delà des frontières européennes et le développement de vos actions dans de nombreux domaines clés tels que la transition écologique, la santé et l'éducation. Cette évolution a non seulement diversifié notre portée d'action à l'échelle internationale mais elle a également renforcé les partenariats existants, notamment dans le secteur privé et l'entrepreneuriat.

Sous votre direction, Expertise France s'est distinguée par son soutien rapide et substantiel à l'Ukraine dans le cadre de la guerre d'agression menée par la Russie, renouvelant une fois de plus la solidarité indéfectible de la France à l'égard du peuple ukrainien. Si l'Ukraine est un partenaire historique d'Expertise France, l'agression russe en Ukraine a entraîné une restructuration de l'aide apportée au travers des programmes de coopération technique européens et des programmes bilatéraux français. En effet, l'année 2023 a marqué un tournant significatif dans notre coopération technique avec Kiev. Avec l'allocation d'une enveloppe de plus de 14 millions d'euros par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, Expertise France s'est vue confier une mission capitale dans l'aide à la reconstruction du territoire ukrainien. L'ouverture récente d'un bureau d'aide à Tchernihiv, dans le Nord de l'Ukraine, constitue une étape clé dans le soutien aux autorités locales, notamment en matière de réhabilitation des infrastructures sanitaires. Pouvez-vous préciser la nature des projets, que vous avez brièvement évoquée ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Comme je l'ai indiqué, nous travaillons autour de deux axes principaux en Ukraine : la reconstruction et l'intégration européenne. De manière plus précise, une part importante de notre activité consiste à renforcer le ministère ukrainien de la justice, action que nous conduisons depuis une dizaine d'années. Les réformes effectuées au niveau du ministère de la justice ont d'ailleurs constitué l'un des éléments ayant permis à la Commission européenne de donner un avis favorable à la perspective du processus d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne.

Nous agissons également dans le domaine de la santé, sur des besoins très spécifiques. À Tchernihiv, une ville située à quatre-vingts kilomètres seulement de la frontière russe et biélorusse il est absolument essentiel de disposer d'hôpitaux qui puissent accueillir des patients et des enfants malades dans de bonnes conditions. Dans la même ville, l'une de nos actions a également pour objet de reconstruire le toit du théâtre.

Enfin, dans le cadre du renforcement des pouvoirs publics ukrainiens à Kiev, nous apportons un appui au State Audit Service, en compagnie de l'inspection générale des finances et de l'organisme de gestion des participations publiques ukrainien. Notre activité est ainsi assez diversifiée, avec à la fois le soutien du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et celui de l'Union européenne qui nous permettent aujourd'hui d'aider l'Ukraine en étant bien plus présents dans ce dans ce pays.

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Jusque dans les années 1980, la politique d'aide au développement de la France était largement assurée par la coopération technique internationale. Elle avait l'avantage d'être peu coûteuse, tout en garantissant un échange d'expertise technique de haute qualité. Avec le virage entamé au cours des années 1980, la part de la coopération technique de l'aide publique au développement s'est fortement contractée, en atteignant environ 15 %, pour laisser une plus grande place aux politiques d'aides bilatérale et multilatérale, plus engageantes pour nos finances publiques.

Expertise France, qui met en œuvre notre coopération technique, est fortement mise à contribution par l'Union européenne, qui constitue environ 52 % de son chiffre d'affaires sur la période 2019-2021. S'agissant des modalités de financement des coûts engagés par Expertise France pour la mise en œuvre des programmes financés par l'Union, plusieurs points méritent d'être éclaircis. Lorsque Expertise France intervient pour répondre à une commande publique nationale, le principe est celui de la juste rémunération, qui garantit la couverture complète des charges engagées. Ce principe ne s'applique pas lorsque le bailleur d'Expertise France est l'Union européenne.

Un rapport sénatorial indique que les opérations engagées par Expertise France pour l'Union sont généralement déficitaires. Dans ce cas, l'État français apporte son soutien financier pour assurer l'équilibre d'Expertise France, en particulier quand il s'agit de projets européens jugés stratégiques par l'opérateur français. L'Union européenne et les autres bailleurs internationaux sont-ils toujours, en 2024, exonérés du respect du principe de la juste rémunération ? Le cas échéant, quelle est la part moyenne du soutien financier de l'État français dans le financement total de ces projets ? Enfin, quel est l'intérêt de la France à suppléer le financement lacunaire de l'Union européenne ? Nous permet-il de peser plus fortement dans les orientations données à ces missions et, si tel est le cas, dans quelle mesure ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

S'agissant de la commande publique française, nous sommes à l'équilibre sur la base des marges de ces projets. S'agissant de l'Union européenne, les marges confiées aux opérateurs sont définies par un règlement financier révisé tous les cinq à sept ans. Ce règlement financier fixe une norme – valable pour tous les opérateurs, dont Expertise France – d'encadrement des frais de gestion lorsque les fonds sont confiés directement aux opérateurs via la gestion déléguée. Cette marge est fixée à un niveau limité – 7 % –, qui ne permet pas de couvrir nos charges, de l'ordre de 12 % de frais de structure par rapport à notre activité totale. Le fonds de soutien vient ensuite combler les 4 % à 5 % qui manquent sur certains projets, les plus petits. Le montant oscille entre 10 millions d'euros et 17 millions d'euros, à comparer aux 600 millions d'euros mobilisés, soit un fort effet de levier.

Le principe est intéressant dans la mesure où ces 600 millions d'euros annuels mobilisés sont très utiles pour nous. D'abord, il s'agit en quelque sorte d'un retour vis-à-vis de la contribution de la France à la politique européenne de développement. Il s'agit également d'un moyen d'être présents sur des actions de très grande importance financées par l'Union européenne, comme la lutte contre la criminalité organisée en Amérique latine, notre action en Ukraine ou en Indopacifique. Le système que nous avons élaboré lors du précédent COM, qui sera maintenu dans le prochain, nous permet d'atteindre nos objectifs.

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Chaque jour nous rapproche un peu plus de l'année 2030, date butoir fixée pour la réalisation des objectifs de développement durable. Chaque jour, nous prenons la mesure que, si nous n'intensifions pas nos efforts, nous ne serons pas au rendez-vous. Dans un récent rapport, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) sonnait l'alerte. L'indice de développement humain est en quasi-stagnation mais, surtout, les inégalités entre les pays riches et les pays pauvres ne cessent de se creuser. Les crises économiques, l'inflation mais aussi les politiques néolibérales réclamées par le Fonds monétaire international ou le remboursement d'intérêts bien trop élevés sont, pour les pays en voie de développement, autant d'obstacles aux investissements dans les services publics, l'éducation, la santé, l'égalité femmes-hommes.

Alors que la situation appelle d'urgence un engagement renouvelé pour la solidarité internationale, le gouvernement français nous offre un double discours. D'un côté, lors des sommets internationaux, nous tenons celui d'une France engagée pour accompagner les pays en voie de développement et établir une réforme en profondeur du système financier mondial. D'un autre côté, nous constatons les renoncements à la loi de 2021 et le report de l'atteinte de l'objectif de 0,7 % du revenu national brut consacré à l'aide publique au développement.

Récemment, les ministres Bruno Le Maire et Thomas Cazenave ont annoncé une véritable cure austéritaire pour 2024. L'aide publique au développement fait particulièrement les frais de ce coup de rabot : 13,5 % de son budget, soit 742 millions d'euros, lui seraient retirés. Monsieur le directeur général, pouvez-vous nous indiquer les conséquences concrètes de cette coupe budgétaire pour votre agence ? Allez-vous devoir dépendre encore davantage de bailleurs tiers externes à l'État ? Allez-vous être obligé de réduire votre effectif ? Les ministres ont en outre déclaré que d'autres réductions de dépenses seraient nécessaires, c'est-à-dire 20 milliards d'euros en 2025, soit le double de celles envisagées pour 2024. Quel sera impact de cette décision sur votre agence ?

Ensuite, je souhaite vous interroger sur l'activité d'Expertise France en Afrique. Nous critiquons régulièrement la stratégie de l'aide publique au développement française consistant à s'appuyer sur des prêts, ce qui incite les opérateurs de l'APD, dont l'Agence française de développement, à investir dans des pays à revenu intermédiaire et dans des secteurs considérés profitables, au détriment des pays moins avancés. Quels sont les critères retenus par Expertise France pour choisir les terrains d'action et propositions d'intervention en Afrique ? Enfin, pouvez-vous revenir sur les conséquences de la suspension de l'APD bilatérale française pour le Mali, le Burkina Faso et le Niger ? Pouvez-vous notamment nous indiquer comment les ressources financières et les personnels ont été redéployés et vers quels projets ?

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Il s'agit là de rudes et de nombreuses questions. Sur la première de ces questions, je tiens à souligner que, indépendamment du degré de soutien ou de critique des différents groupes à l'égard du Gouvernement, il existe une préoccupation générale au sein de la commission des affaires étrangères sur la diminution des montants consacrés à l'aide publique au développement du fait d'efforts budgétaires dont nous voyons bien par ailleurs la nécessité.

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

S'agissant de l'impact de la maîtrise des finances publiques sur notre activité, il ne m'appartient pas de commenter de manière générale l'effort entrepris. Cette politique avait augmenté de manière significative ces dernières années pour atteindre les objectifs de développement durable. Puisque le budget d'Expertise France est limité et pèse très faiblement sur les finances publiques, je demeure assez confiant sur la trajectoire de croissance de notre activité.

Ensuite, l'activité en prêts est essentielle pour financer un certain nombre d'infrastructures demandées dans tous les pays, quel que soit leur stade de développement. Notre action est complémentaire de celle de l'AFD : lorsque cette dernière effectue un prêt, notamment un prêt de politique publique, nous mettons en œuvre l'assistance technique qui permet de l'appuyer En effet, notre activité concerne l'assistance technique et se structure autour de projets qui concernent tous les pays, mais essentiellement les pays les moins avancés, comme cela est défini par le CICID et le conseil présidentiel du développement (CPD).

Enfin, il n'y a pas eu de suspension de l'aide publique au développement à destination des pays du Sahel : ces pays nous ont demandé d'arrêter la coopération dans la plupart des domaines. En conséquence, nous avons réduit notre présence dans ces pays et nos personnels ont été redéployés assez rapidement dans les pays voisins, grâce à la croissance de notre activité sur ces autres territoires. Cependant, je n'oublie pas que les besoins des populations de ces pays, en particulier les populations du Sahel, demeurent intacts, notamment dans le domaine de la santé.

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Nous nourrissons effectivement une inquiétude vis-à-vis des 10 milliards d'euros d'effacement de crédits, qui pourraient affecter votre action sur le terrain. Membre de la commission des affaires étrangères depuis 2017, j'ai le souvenir de collègues de la majorité et de l'opposition qui se réjouissaient de la tenue des objectifs en matière d'APD. Malheureusement, quelques mois plus tard, ce château de cartes s'écroule : les engagements pris par le président de la République il y a quelques années sur l'APD ne sont pas tenus. La situation compliquée de la France est non seulement liée à la conjoncture mais aussi à des questions structurelles. Pensez-vous que le modèle français est exportable partout, au vu des remises en cause qui devront être conduites sur le modèle français lors des prochains mois ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Le cœur de nos moyens d'intervention est financé par les 140 millions d'euros de crédits confiés à l'AFD et mis en œuvre par Expertise France. Cet effort est, en résumé, assez modeste. Par exemple, la Belgique, dont le produit intérieur brut (PIB) est six fois moindre que celui de la France, consacre 204 millions d'euros à son opérateur de coopération technique et le Luxembourg accorde 86 millions d'euros au sien. Notre budget doit donc être mesuré à l'aune des différents programmes budgétaires sur l'aide publique au développement en France, qui totalisent 5,7 milliards d'euros de crédits en loi de finances initiale pour 2024.

Notre modèle est-il exportable ? Si nous sommes souvent critiques sur nous-mêmes, de nombreux pays envient notre modèle, particulièrement la manière dont nous avons organisé et articulé nos finances publiques, notre système de protection sociale et notre système de gestion de nos services publics et de nos infrastructures. Au-delà, nous travaillons de plus en plus avec nos partenaires européens pour croiser les expériences. Par exemple, lorsque nous travaillons avec les pays du voisinage, il est aussi important de mobiliser les pays qui sont entrés récemment dans l'Union européenne. Je pense notamment à l'Estonie et à son modèle d'administration digitale, qui est plus avancé que le nôtre.

Par ailleurs, nous ne faisons pas qu'exporter le modèle français. Nos experts travaillent avec des pays dans des domaines où ils sont plus en avance. À ce titre, je souhaite que nous puissions tirer bénéfice de ce retour d'expérience au sein de notre propre administration, par exemple en matière de numérique, d'égalité femmes-hommes, de budgétisation verte.

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Votre confiance dans la modestie de vos moyens et la sécurité qu'elle devrait normalement vous conférer nous fait plaisir mais ne nous rassure pas complètement. En effet, cette commission est bien placée pour savoir qu'il ne suffit pas d'être pauvre pour être épargné : l'administration française a comme tradition sociologique bien établie de ne pas réaliser des économies là où l'argent existe mais plutôt là où elle perçoit une faiblesse. Le destin du ministère des affaires étrangères est à ce titre accablant : compte tenu du budget qui lui est accordé, les demandes d'économies qui lui sont appliquées sont complètement disproportionnées par rapport aux autres postes budgétaires. Je tiens à vous assurer que nous serons très attentifs au sort qui vous sera réservé : nous serons à vos côtés.

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Rapporteur pour avis du programme n° 185 de la mission Action extérieure de l'Etat du budget, j'ai également été administrateur d'Expertise France et le suis aujourd'hui à l'AFD. À ce titre, je souhaite adresser un salut amical à notre ancienne collègue Bérengère Paulette, qui m'avait accompagné de manière extrêmement significative dans ce précédent mandat.

Dans mes rapports de 2017 et 2018, j'ai indiqué que l'évolution de l'expertise technique en France était exemplaire. Expertise France me semble fort dans sa manière de travailler : son travail d'action publique est coordonné et efficace. Dans les années 1980, la coopération s'est émancipée, pour ne plus être le faux-nez de la post-colonisation. Aujourd'hui, d'autres opérateurs devraient s'inspirer de votre exemple en matière d'action coordonnée. Le groupe AFD-Expertise France a mené un très grand effort pour coordonner leurs deux COM, que nous serons bientôt conduits à examiner. À ce titre, je considère que tous les autres COM de l'action de l'État devraient également être coordonnés.

Ma question porte sur le moral de vos équipes. Votre agence a connu quelques secousses, il y a trois à quatre ans. Comment se porte aujourd'hui le personnel d'Expertise France ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Je vous remercie de poser une question sur le moral des équipes, qui est bon. Notre agence est en forte croissance et nos équipes sont fortement engagées. Le renforcement auquel nous avons procédé depuis plusieurs années, en matière de gestion du personnel, de structuration des process de l'agence et de clarification de l'architecture de l'aide publique au développement, joue positivement en ce sens. Dans le cadre du prochain COM, nous accorderons une attention particulière à ces sujets, afin que nos équipes soient toujours aussi motivées pour remplir leur belle mission.

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Nous avons eu plusieurs fois l'occasion de débattre, au sein de cette commission, de l'application de la loi du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. Cette loi a permis le changement de statut d'Expertise France et son intégration à l'AFD. Quel bilan tirez-vous de cette intégration statutaire ? Votre exposé a en effet indiqué que les voyants sont au vert, comme en témoignent votre chiffre d'affaires et vos activités en progression constante. Je note cependant que l'Allemagne demeure la première agence mondiale avec un chiffre d'affaires de 4 milliards d'euros, à comparer avec le vôtre, qui s'établit environ à 341 millions d'euros. Cette différence est-elle due à un dynamisme particulier de l'agence allemande, à des considérations statutaires ?

Ensuite, de quelle manière les soubresauts politiques qui agitent les pays du Sahel, au Mali, au Niger, au Burkina Faso, affectent-ils l'activité de votre agence ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

La loi de 2021 a permis de renforcer considérablement les synergies entre Expertise France et l'AFD. Elle a ainsi contribué à aligner les opérateurs en charge de la politique du développement, notamment la banque de développement et l'agence de coopération technique. Il s'agit là d'une des différences avec le système allemand : l'Allemagne investit des montants élevés dans ses deux branches, coordonne peu l'action de la GIZ et celle de la branche développement de la Kreditanstalt für Wiederaufbau (KFW), l'équivalent de l'AFD.

La croissance des actions de coopération technique de l'Allemagne est moins due à des considérations statutaires qu'au fait que ce pays n'a jamais abandonné cette politique, à la différence de la France. La politique de coopération allemande a augmenté significativement, particulièrement après 2016, en lien avec l'effort financier consenti par l'Allemagne lors de la crise des réfugiés.

Enfin, la gestion des situations de pays en crise est notre lot quotidien. Au-delà du Sahel, nous sommes très présents en Haïti, où nous sommes fiers d'être le dernier pays actif en matière de coopération et de développement. Evidemment, cette activité est particulièrement compliquée dans les conditions sécuritaires actuelles. Nous sommes également actifs au Soudan, où nous avions dû interrompre nos projets il y a maintenant un peu plus d'un an. Nous sommes en train de les reprendre, même si la situation n'est pas totalement stabilisée.

Notre agilité, notre capacité à nous adapter en fonction des circonstances, tout en assurant évidemment en permanence la sécurité de l'ensemble de nos personnels, constituent notre raison d'être. Nous devons à la fois être capables de suspendre nos activités en cas de nécessité mais aussi de les reprendre le plus rapidement possible dès lors que les conditions sont réunies.

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Monsieur Garot, je suis tenté de vous citer les propos du grand historien Ernest Lavisse, précepteur du prince impérial. À l'impératrice qui lui avait demandé à quel moment l'histoire se déroulait de façon satisfaisante, il lui avait répondu : « Je crains, Madame, que les choses se passent toujours mal ». L'état de crise est un état permanent dans lequel le directeur général d'Expertise France est conduit à agir.

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Ma question était quelque peu différente, Monsieur le président. Elle consistait à savoir comment les soubresauts enregistrés au Sahel affectaient Expertise France, en comparaison des effets produits sur d'autres agences.

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Monsieur le directeur général, lors de votre intervention, vous avez à plusieurs reprises mentionné qu'Expertise Français était impliquée régulièrement dans des missions de soutien à la justice et, finalement, au renforcement de l'État de droit. Dans le cadre des missions que vous exercez sur le sol européen, travaillez-vous avec le Conseil de l'Europe, organisation dont la philosophie et les missions visent justement à renforcer l'État de droit, la démocratie et le respect des droits de l'Homme ?

Pouvez-vous nous éclairer sur ces missions ? En effet, si le Conseil de l'Europe est présent dans quarante-six pays, il peut également mener des missions à l'extérieur. En outre, je souhaite plus particulièrement vous interroger sur le rôle que vous jouez dans les Balkans, et plus particulièrement au Kosovo, aujourd'hui au cœur de l'actualité. Enfin, Expertise France mène-t-elle des missions en Arménie ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Nous travaillons bien sûr avec le Conseil de l'Europe, comme avec d'autres organisations régionales ou multilatérales, à l'image de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ou des agences des Nations Unies. Un effort doit être conduit afin de travailler encore plus davantage ensemble, en nous assurant d'ailleurs que ces structures se soumettent elles-mêmes aux mêmes obligations de redevabilité que celles auxquelles nous nous astreignons. De notre côté, nous devons rendre des comptes en permanence sur la gestion de nos enveloppes. En revanche, lorsque nous mobilisons une agence internationale qui applique ses propres procédures, elle nous répond souvent qu'elle ne peut pas en faire de même. Quoi qu'il en soit, depuis plusieurs années, je sollicite nos différents partenaires, afin de mieux travailler ensemble.

Nous agissons de la sorte dans les Balkans, notamment dans le domaine de la justice, et particulièrement en Bosnie-Herzégovine, un pays très compliqué. Nous travaillons également dans d'autres domaines, comme l'énergie, l'égalité femme-homme, et des éléments liés aux conditions d'intégration pour les pays candidats à l'Union européenne.

Enfin, nous menons une activité en Arménie, que nous allons renforcer à la demande du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Je me rendrai d'ailleurs dans les prochains mois en Arménie et en Géorgie.

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Vous nous avez indiqué qu'Expertise France assiste, sur les aspects techniques, la coopération de l'Assemblée nationale avec le Parlement marocain. Dans ce cadre, accompagnez-vous le Maroc dans sa colonisation du Sahara occidental ? Faites-vous partie des acteurs qui, contrairement au droit international, aident à piller des ressources interdites ?

Ensuite, vous avez déclaré que les demandes de certains États, notamment les pays africains, dépassent parfois notre capacité à y répondre. Dans quelles proportions ? Ces États sont-ils conduits de ce fait à se tourner vers les Russes sur des modalités techniques ou vers les acteurs chinois sur des aspects financiers, afin de compenser les faiblesses de la France dans ces domaines ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Nous menons depuis longtemps une coopération fructueuse avec le Maroc. Je tiens d'ailleurs à souligner, de manière générale, que la coopération parlementaire constitue selon moi un élément majeur de la promotion de l'État de droit. À ce titre, la mobilisation de l'Assemblée nationale, des députés et des fonctionnaires parlementaires est absolument essentielle. Je suis donc très content que nous puissions le faire avec le Maroc, à travers un programme européen de jumelage.

Ensuite, vous avez mentionné les cas de la Russie ou de la Chine. Pour ma part, je considère que notre coopération technique et le renforcement des politiques publiques représentent des « briques » qui ne sont pas fournies par les autres pays et qui donnent toute la valeur de l'apport de la France et de l'Europe, au-delà des investissements. D'autres pays n'agissent pas de la sorte, ou en suivant des intérêts qui ne sont pas ceux des États partenaires à long terme.

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Je souhaite préciser et compléter mes questionnements. La participation d'Expertise France est-elle utilisée par le Maroc pour l'aider à coloniser le Sahara occidental ? Conduisez-vous des projets sur le territoire occupé par le Maroc au Sahara occidental et qui seraient dans ce cas contraires au droit international ?

Ensuite, je suis déjà intervenu au sein de cette commission pour évoquer l'aide de la France en matière fiscale et monétaire vis-à-vis des pays africains. Lors des élections qui viennent de se dérouler au Sénégal, plusieurs programmes comportaient la sortie du pays du franc CFA. Votre expertise a-t-elle également pour objet d'aider les pays africains à créer leur propre monnaie ou portez-vous le message politique français soutenant le maintien du franc CFA ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Nous ne conduisons pas d'activité dans le Sahara occidental.

Ensuite, nous sommes une agence de coopération technique et n'avons pas pour vocation de dire à un État d'agir de telle ou telle manière. Ces questions relèvent de décisions politiques internes à ces pays. En revanche, nous travaillons avec les banques centrales pour renforcer la gestion de leur politique monétaire et avec les ministères des finances pour mobiliser davantage de ressources domestiques pour financer leur développement.

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La France ne peut pas vouloir donner des leçons au monde entier et simultanément réduire de manière totalement disproportionnée les budgets du ministère des affaires étrangères et de l'aide au développement. Il y a là un véritable problème de cohérence entre les discours et la pratique.

Ensuite, vous avez rejoint l'AFD depuis maintenant quelques années. À chaque déplacement que j'ai pu effectuer à l'étranger, les ambassadeurs que j'ai rencontrés se plaignent, avec beaucoup de délicatesse et de diplomatie, de la difficulté à coordonner sur le terrain leurs actions avec celles de l'AFD. Quel est votre sentiment sur ce problème de coordination ?

Par ailleurs, je souhaite revenir sur la concurrence des autres pays. Un dirigeant que j'ai rencontré récemment me disait qu'il avait voulu emprunter de l'argent pour financer une infrastructure. S'il s'était adressé à la France ou à l'Europe, il lui aurait fallu deux à trois ans pour obtenir une décision. En revanche, en quinze jours seulement, les Chinois lui ont proposé un prêt de 2 milliards de dollars sur vingt-cinq ans, avec une franchise d'intérêts pendant huit ans et un taux d'intérêt à 1 %. Il a conclu en me disant : « Dans ces conditions, comment voulez-vous que l'Afrique reste fidèle à la France ? »

J'aimerais connaître votre avis sur cet éparpillement des décisions, des structures et cette absence de cohérence générale.

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Permettez-moi de ne pas partager votre point de vue sur la première question. Je rappelle en effet que la programmation des crédits de l'Agence française de développement fait l'objet d'une validation ex ante, en début d'année, de tous les projets par pays et par secteur, par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères. En conséquence, l'AFD est particulièrement pilotée et elle l'est d'autant plus maintenant au niveau local, avec les conseils locaux de développement. Je pense donc que les reproches adressés en ce sens ne sont clairement pas fondés.

Vous avez ensuite évoqué la concurrence des autres pays, et notamment de la Chine. Il convient naturellement de réagir rapidement aux demandes de nos partenaires. En revanche, je ne suis pas sûr qu'une réponse rapide consistant à réaliser un prêt lié, en associant des personnels importés, un endettement massif et une captation des recettes et des ressources naturelles du pays pour les vingt prochaines années – ce qui est aujourd'hui la situation d'un certain nombre de pays africains – constitue une bonne réponse. Le temps de l'instruction est certes parfois long mais il permet aussi de s'assurer de l'effectivité de retombées économiques pour le pays partenaire en termes d'emploi local, de développement, de coopération et de renforcement des politiques publiques. Il importe donc d'être à la fois réactif et réellement utile.

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Je cède à présent la parole aux députés qui souhaitent poser des questions complémentaires à titre individuel.

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Je fais partie de ceux qui pensent que la France doit continuer ses investissements en Afrique. Je pense même que nous avons plus besoin de l'Afrique qu'elle n'a besoin de nous. Nous l'avons bien compris sur mon territoire de Marseille, où nous avons créé l'événement « Emerging Valley », auquel Expertise France participe chaque année. Nous organisons ainsi la rencontre entre les start-up africaines et leurs homologues françaises. À ce titre, plus de 350 start-up africaines répondent à des appels d'offres de sociétés françaises. Grâce à notre expérience et à notre savoir-faire, nous faisons grandir ces entreprises africaines avec Expertise France, qui est au cœur de la transmission de ces savoirs. Quel rôle pourrait jouer Expertise France dans le développement du numérique en Afrique ? Votre intégration au sein de l'AFD a-t-elle engendré de nouvelles opportunités sur ce continent ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

L'initiative « Emerging Valley » constitue effectivement un très bel événement. J'ai participé au lancement de la première édition, en compagnie de Samir Abdelkrim. Il permet en effet d'établir un lien sur un enjeu essentiel : le développement du numérique et des écosystèmes entrepreneuriaux, partout en Afrique. Nous avons d'ailleurs obtenu de beaux succès dans des pays d'Afrique du Nord. Je pense en particulier à la Tunisie, où nous avons accompagné le principal incubateur local « The Dot », l'équivalent tunisien de la Station F.

Nous agissons aujourd'hui de la sorte dans de nombreux pays, en particulier de l'Afrique de l'Ouest, où émerge un écosystème entrepreneurial très fort. Nous sommes pionniers sur des sujets comme le géospatial ou l'intelligence artificielle. Nous avons ainsi réuni, hier, un certain nombre de partenaires africains au Campus Cyber, à La Défense. Il s'agit là d'un sujet d'avenir sur lequel il est très important d'investir car, demain, il offrira à l'Afrique les possibilités d'emploi et de développement économique.

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Monsieur le directeur général, Expertise France est l'agence publique française de conception et de mise en œuvre des projets internationaux de coopération technique en direction des pays en développement et émergents, ce qui démontre le savoir-faire français, reconnu dans le monde entier. Notre pays, au cours de son histoire, a toujours eu une vocation de coopération internationale et de partage de ses compétences auprès d'autres puissances, ce qui renforce nos liens dans la diplomatie internationale.

Dans vos différents domaines de compétences, votre agence a participé au projet Esiwa, lancé en 2020 sur des enjeux tels que la cybersécurité, la gestion de crise ou la lutte anti-terroriste, ainsi qu'à la mise en œuvre du projet européen Crimario permettant de réduire les risques maritimes et de sécuriser les routes en renforçant les échanges d'informations. Quels sont le bilan et les résultats de ces deux actions ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Je vous remercie pour votre question, qui permet d'éclairer votre commission sur les actions concrètes que nous menons dans le domaine de la sécurité maritime, notamment aux Philippines. Ce pays fait en effet face, chaque jour, à des problèmes liés à des bateaux chinois qui pénètrent dans ses eaux territoriales. Comme vous le savez, en mer, il est absolument indispensable de se coordonner entre pays pour arriver à suivre les flux maritimes. Très concrètement, notre action consiste à faciliter le travail entre administrations pour développer les logiciels qui permettent de tracer les bateaux et les phénomènes de piraterie.

Nous mettons ainsi en œuvre un programme dans le golfe de Guinée pour effectuer le suivi de la piraterie maritime, qui s'est aujourd'hui déplacée de près de deux cents kilomètres au-delà des côtes car les administrations ont renforcé la traçabilité et l'interception des bateaux dans cette zone. De son côté, le projet Crimario vise à renforcer la sécurité et la sûreté maritimes dans la région Indopacifique et nous intervenons avec l'Union européenne, pour appuyer les besoins de coordination des États.

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Monsieur le directeur général, je vous remercie de nous avoir expliqué le fort développement et l'évolution d'Expertise France. Cet effort doit se développer encore plus. À titre d'exemple, sur la plupart des budgets, les Allemands consacrent 50 % d'investissements aux infrastructures et 50 % à la coopération, c'est-à-dire en accompagnement. Il y a une trentaine d'années, 10 000 coopérants français agissaient sur le terrain. Aujourd'hui, vous êtes presque les seuls à représenter la coopération en France. Ma question porte sur le rayonnement de l'image de la France. Comment contribuez-vous à l'image de la France et à son rayonnement en valorisant toutes les actions menées sur le terrain ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Il s'agit effectivement d'une question essentielle, concernant un domaine dans lequel nous pouvons encore nous améliorer. Notre savoir-faire est réel et il n'est pas anecdotique que les meilleurs promoteurs de notre action soient les ministres de nos pays partenaires, qui nous connaissent très bien.

Nous devons donc améliorer notre faire-savoir, dans une optique d'ailleurs partagée par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères et par l'AFD. Il nous faut ainsi renforcer nos moyens de communication.

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Je souhaite faire un point avec vous sur votre présence dans les Balkans occidentaux. Quels sont vos leviers d'action dans ces pays ? Nous savons qu'ils doivent fournir de nombreux efforts pour respecter les critères de Copenhague mais également l'acquis communautaire, dans le cadre de leur procédure d'adhésion potentielle à l'Union européenne. À ce titre, quels moyens mettez-vous en place ? Quels pays ciblez-vous plus particulièrement ? Prévoyez-vous une montée en charge de votre expertise dans ces pays ?

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Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France

Dans cette zone effectivement très importante, les moyens mis en œuvre par la France sont relativement limités par rapport à ceux d'autres pays, comme l'Allemagne, l'Autriche ou l'Italie, qui y sont extrêmement présents. Nous l'étions moins historiquement mais la situation a quelque peu changé. Avec le Quai d'Orsay, nous mettons en place un réseau d'experts techniques internationaux dans un certain nombre de domaines, comme l'intégration européenne ou la récupération des avoirs de biens mal acquis en Moldavie, par exemple.

Ensuite, le renforcement des moyens du groupe AFD dans la zone est tout autant nécessaire. Un séminaire des administrateurs de l'AFD a précisément porté sur ce sujet cette semaine. Nous avons besoin à la fois de notre présence dans les infrastructures mais aussi du renforcement de l'État de droit dans des pays comme l'Albanie, le Monténégro ou la Bosnie-Herzégovine.

L'Union européenne y consacre des moyens importants, sur lesquels nous nous positionnons. Nous continuons par ailleurs à avoir besoin du soutien de la France pour être plus présents sur le terrain. Dans la perspective de l'intégration d'un certain nombre de pays à l'Union européenne, il est indispensable de continuer à renforcer notre effort dans ce domaine.

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Je vous remercie infiniment pour vos réponses aux diverses questions des membres de notre commission.

Je tiens à rappeler que cette commission est vivement préoccupée par la façon dont l'action internationale de la France peut être affectée par des mesures d'économies budgétaires dans tous les domaines, qu'il s'agisse des postes diplomatiques, de l'action culturelle, de l'action de développement, de l'action humanitaire ou des expertises. Il nous apparaît en effet que ces mesures sont disproportionnées pour l'action extérieure de la France. Ainsi l'ensemble du ministère de l'Europe et des affaires étrangères est prié de contribuer à hauteur d'environ 8 % au premier train d'économies décidé par le Gouvernement alors même qu'il ne représente que 1,5 % des dépenses publiques. J'ai toute confiance en M. Stéphane Séjourné, ministre en titre, et en ses services pour essayer de gérer de façon la plus intelligente possible et avec le minimum de réduction d'opérations importantes les mesures de restrictions qui sont imposées.

J'ai bien mesuré que vous aviez confiance dans la capacité de votre agence à se frayer un chemin à travers ces difficultés, ces restrictions, sans en supporter excessivement des conséquences négatives. Nous sommes heureux de l'entendre et tenons à vous dire que nous surveillerons la situation de très près, dans le souci de vous aider, tant nous estimons que la mission qui est la vôtre est absolument essentielle. Nous avons ainsi parlé de renaissance, de remontée en puissance de l'action d'expertise technique de la France, qui demeure malgré tout loin de celle mise en œuvre par l'Allemagne.

Si vous sentez que les choses ne se passent pas exactement comme vous le souhaitez, votre devoir est de rendre ces difficultés transparentes, pour que nous puissions nous-mêmes en être pleinement conscients. Nous formulons pour la poursuite de votre action des vœux de plein succès et vous remercions de la disponibilité dont vous faites preuve à l'égard de la représentation nationale.

La séance est levée à 10 h 55.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Delphine Batho, Mme Élisabeth Borne, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Bertrand Bouyx, M. Jérôme Buisson, M. Pierre Cordier, Mme Julie Delpech, M. Pierre-Henri Dumont, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Olivier Faure, M. Nicolas Forissier, M. Bruno Fuchs, Mme Stéphanie Galzy, M. Guillaume Garot, M. Hadrien Ghomi, M. Michel Guiniot, M. David Habib, M. Éric Husson, M. Jean-Michel Jacques, M. Alexis Jolly, Mme Brigitte Klinkert, Mme Stéphanie Kochert, M. Arnaud Le Gall, Mme Élise Leboucher, M. Jean-Paul Lecoq, Mme Nathalie Oziol, M. Jimmy Pahun, M. Didier Parakian, M. Frédéric Petit, M. Kévin Pfeffer, Mme Béatrice Piron, M. Jean-François Portarrieu, M. Adrien Quatennens, Mme Mereana Reid Arbelot, Mme Laurence Robert-Dehault, Mme Laetitia Saint-Paul, M. Olivier Véran, Mme Laurence Vichnievsky, M. Lionel Vuibert

Excusés. - Mme Eléonore Caroit, M. Sébastien Chenu, M. Alain David, M. Meyer Habib, Mme Amélia Lakrafi, Mme Marine Le Pen, Mme Karine Lebon, M. Laurent Marcangeli, M. Nicolas Metzdorf, M. Bertrand Pancher, Mme Mathilde Panot, Mme Ersilia Soudais, Mme Michèle Tabarot, Mme Liliana Tanguy, M. Éric Woerth, Mme Estelle Youssouffa

Assistait également à la réunion. - M. Karim Ben Cheikh