Mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques — Texte n° 3298

Amendement N° CE30 (Rejeté)

(14 amendements identiques : CD12 CD25 CD16 CD30 CD6 CD46 CD57 CD4 CE42 CE4 CE12 CE16 CE20 CE6 )

Publié le 21 septembre 2020 par : M. Potier, Mme Battistel, M. Letchimy, M. Garot, Mme Jourdan, M. Naillet, M. Aviragnet, Mme Biémouret, M. Jean-Louis Bricout, M. Alain David, Mme Laurence Dumont, M. Faure, M. David Habib, M. Hutin, M. Juanico, Mme Karamanli, M. Jérôme Lambert, Mme Manin, Mme Pau-Langevin, Mme Pires Beaune, Mme Rabault, Mme Rouaux, M. Saulignac, Mme Tolmont, Mme Untermaier, Mme Vainqueur-Christophe, M. Vallaud, Mme Victory, les membres du groupe Socialistes apparentés.

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Supprimer l’alinéa 3.

Exposé sommaire :

Cet amendement du Groupe Socialistes et apparentés vise à supprimer les dispositions de l'article unique de ce projet de loi ayant pour objet de ré-autoriser, jusqu'au 1er juillet 2023, l’utilisation de certains produits phytopharmaceutiques actuellement interdits.

Il convient de supprimer ces dispositions pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, si nous partageons la volonté du Gouvernement de soutenir la filière française de la betterave, nous regrettons que la ré-autorisation des néonicotinoïdes ait été présentée comme la seule solution valable. En effet, l’impact des néonicotinoïdes, tout particulièrement sur les abeilles, la biodiversité et la qualité des sols, nous oblige à considérer toutes les autres options pour soutenir la filière.

Des solutions alternatives (biocontrôle, génétique, date de semis, gestion des intrants, rotations, mosaïques paysagères...) existent. Même si nous savons qu’elles nécessitent du temps pour être mises en place, nous savons aussi que la filière de la betterave est prête à se mobiliser, d’autant plus que ces alternatives peuvent ouvrir la voie vers des mentions valorisantes comme l’AB ou la HVE. La dérogation proposée par le Gouvernement, qui remet en cause une avancée écologique majeure actée sous le précédent quinquennat, freinerait d’un coup sec les efforts mis en œuvre par la filière pour déployer ces alternatives.

A noter que cette dérogation ouvrirait par là même la voie à d’autres dérogations de ce type. En effet, le champ d'application de cet article est extrêmement vaste. Il s'applique non seulement aux néonicotinoïdes mais aussi à des substances « présentant des modes d’action identiques » dans l'ensemble des filières agricoles. Les listes des produits et des filières concernés sont renvoyées à des textes réglementaires, dont il est impossible à ce stade de connaître le contenu précis.

Ainsi, à travers cet amendement, nous réaffirmons que la ré-autorisation de produits phytopharmaceutiques n'est ni la seule solution à court-terme pour les betteraviers ni celle permettant à terme d’assurer la pérennité de la filière.

Le Gouvernement a agi dans la précipitation, préférant ne même pas à attendre l'automne afin d'identifier les variétés les plus résilientes et d’isoler l’effet d’autres facteurs comme la sécheresse. Il n’a pas non plus attendu la publication, prévue au plus tard au mois de janvier, d’une nouvelle étude de l’ANSES sur les alternatives à l’usage de néonicotinoïdes dans la culture de la betterave. Au lieu d'annoncer d'emblée cette dérogation au cœur de l'été, l'exécutif aurait pu prendre plus de temps pour mieux comprendre, concerter et examiner d'autres pistes.

Parmi ces pistes, figure notamment celle consistant à garantir aux betteraviers une compensation économique suffisante pour leur assurer un revenu décent, le cas échéant, sur plusieurs années. Plusieurs modalités de financement de cette compensation sont envisageables, dont une majoration de la taxe sur les produits phytopharmaceutiques prévue à l’article L. 253‑8‑2 du code rural et de la pêche maritime.

Ce mécanisme de garantie, qui devrait à terme être étendu à toute filière agricole en difficulté pour accompagner les transitions, doit être considéré comme un investissement dans l’innovation agroécologique française. Car tout recul sur la question des produits phytosanitaires risque de freiner durablement le développement de produits de substitution et de méthodes alternatives.

L’exemple italien montre que les premières alternatives à l’usage de produits phytosanitaires peuvent parfois prendre la forme d’innovations socio-économiques plutôt que techniques. En réaction à l’interdiction de certains néonicotinoïdes par le gouvernement italien en 2008, quatre ans plus tard a en effet été créé un fonds mutualisé (agissant comme une assurance-récolte) fédérant un ensemble d’agriculteurs représentant près de 50 000 hectares. Chaque maïsiculteur désirant adhérer au consortium verse une somme de l’ordre de 3 à 5 euros par hectare (une somme inférieure au coût de l’usage de néonicotinoïdes), et se voit indemnisé s’il perd sa récolte ou si ses rendements ont été affectés par une attaque de ravageurs. Cet exemple montre que des solutions économiques existent en attendant la généralisation des solutions techniques.

Plus globalement, cette crise doit être l’occasion de réengager une vraie politique de réduction de notre dépendance à la phytopharmacie, interrompue depuis plusieurs années. Le plan Écophyto est en effet au point mort, avec une ordonnance sur les CEPP (Certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques) qui supprime toute possibilité de sanction pour les distributeurs ne respectant pas leurs obligations légales, un manque de financement pour les fermes DEPHY et une volonté délibérée de freiner l’interdiction de la production, du stockage et de l’exportation des pesticides interdits d’usages dans l’UE...Une des seules véritables innovations mises en œuvre depuis la publication du rapport de 2014 sur le plan Ecophyto concerne la gouvernance partagée du plan, relevant à la fois des champs de compétence des ministères chargés de l’agriculture, de l’environnement, de la santé et de la recherche. Il est regrettable que cette pluralité de voix ne soit pas entendue aujourd’hui.

Face à cette inertie dans la mise en œuvre du Plan Ecophyto, il convient donc d’investir massivement dans la formation aux nouvelles pratiques agroécologiques et de prévoir des mécanismes efficaces d’accompagnement durant les phases d’apprentissage, s'adressant à l'ensemble des professions agricoles (pas uniquement aux betteraviers).

Une autre leçon que nous pouvons tirer des problèmes rencontrés par la filière betteravière est le danger de dérégulations économiques.

En effet, les betteraviers français, malgré une position dominante en Europe, se retrouvent confrontés à une baisse importante du prix du sucre, faute de protection face au dumping de pays comme le Brésil. En justifiant la dérogation au nom de la sécurité et de la souveraineté alimentaire, le Gouvernement commet une erreur majeure : celle d’opposer environnement et sécurité alimentaire. Car, c’est bien parce que nous avons trop délégué la sécurité alimentaire européenne aux marchés et aux multinationales que nos producteurs sont en difficulté. C’est pourquoi, plus que jamais, nous devons défendre l’organisation des marchés pour un juste partage de la valeur, garant de la bonne évolution des pratiques agricoles.

Enfin, alors que l'UE se prépare à la mise en place du Pacte vert européen, avec pour objectif la diminution de moitié des pesticides et la défense de la biodiversité, cette initiative du Gouvernement décrédibilise la parole de la France dans ce contexte et risque de constituer un immense pas en arrière pour la transition agroécologique en Europe.

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