Séance en hémicycle du lundi 4 décembre 2023 à 10h30

La séance

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La séance est ouverte à dix heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'informe l'Assemblée que Mme la présidente a pris acte du dépôt, le 1er décembre 2023 à dix-huit heures cinq, d'une motion de censure déposée, en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, par Mme Mathilde Panot, M. André Chassaigne, Mme Cyrille Chatelain, M. Boris Vallaud et 143 membres de l'Assemblée, la Première ministre ayant engagé la responsabilité du Gouvernement sur l'adoption en lecture définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024. En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion et le vote sur cette motion de censure.

La parole est à Mme Ségolène Amiot.

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Nous nous retrouvons une nouvelle fois pour nous prononcer sur une motion de censure et, partant, pour dénoncer l'usage excessif, antidémocratique et bâillonnant du 49.3 – le vingtième. Nous, députés du groupe La France insoumise – NUPES, refusons de rendre acceptable, dans une démocratie, cette pratique qui vise à réduire au silence les élus et, parce qu'ils le représentent, le peuple lui-même. Par ces 49.3 successifs, non seulement vous refusez d'écouter les représentants du peuple, mais vous privez les Françaises et les Français du débat public qu'ils méritent.

Si vous n'y entendez rien, madame la Première ministre, pour ma part, je vous ai écoutée, notamment vous plaindre de la lenteur de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Il est vrai que l'examen d'un budget de 640 milliards d'euros devrait être bouclé en trois ou quatre heures, à vue de nez…

Laissez-moi donc me plaindre, en ce qui me concerne, de la lenteur avec laquelle vous intégrez la notion de coconstruction, celle-là même que vous invoquez dans vos discours, chaque fois que vous engagez la responsabilité de votre gouvernement sur un texte. Non, cela ne signifie pas que c'est vous qui décidez et que c'est comme ça, ni que vous pouvez nous transmettre un projet de budget le lundi en espérant que nous le signerons le mardi sans y apporter la moindre modification.

D'ailleurs, ce que vous avez décrit comme la dénaturation de votre budget s'appelle en réalité la démocratie parlementaire. La coconstruction, en effet, c'est la conduite d'un travail concerté avec l'ensemble des forces en présence, y compris les vôtres qui, je vous en informe, sont également en colère de ne pas pouvoir participer à l'élaboration de la loi. C'est un travail concerté au cours duquel chacune et chacun fait des compromis, voire des concessions. « Compromis » est d'ailleurs l'autre mot que vous prononcez dans tous vos discours : c'est un autre mot creux, que vous n'utilisez que pour cacher le fait que vous n'en faites aucun.

En engageant la responsabilité de votre gouvernement, vous avez une fois de plus agité le chiffon rouge du déficit public pour justifier les coupes budgétaires, les économies et les défauts d'investissement. Vous oubliez cependant de dire que vous avez rejeté des amendements visant à accroître les recettes de plusieurs milliards d'euros, recettes qui permettraient d'appliquer une tout autre politique : par exemple, une gouvernance qui ne suivrait pas les envies de la minorité des plus riches, mais les besoins du plus grand nombre.

Vous passez donc sous silence les 8 milliards d'euros que le président Coquerel proposait de récolter pour soutenir les centres médicaux de santé de nos communes, ou encore la possibilité qui vous était donnée de rendre transparents les prix des médicaments.

Encore une fois, vous faites croire que sans votre budget, et uniquement votre budget, la totalité de nos institutions ne seraient plus financées et que nos fonctionnaires ne seraient plus payés. Mensonges ! Et de quelle suffisance faut-il faire preuve pour croire, non une seule fois mais deux années de suite, que vous seule êtes absolument dans le vrai, que vous ne faites aucune erreur et que votre gouvernance est parfaite ! Quel mépris !

Oui, de quel mépris faut-il faire preuve pour rester sourde aux cris d'alarme des parents qui, faute de place en pédopsychiatrie, pleurent leurs enfants ; des mères qui, faute de maternité ouverte, accouchent sur le bord d'une autoroute ;…

Rires sur certains bancs du Gouvernement

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Un peu de sérieux, franchement !

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Un peu de sérieux, oui, justement ! Écoutez-moi au lieu de rire !

De quelle suffisance faut-il faire preuve pour ne pas entendre ces femmes, dont les chances de survie diminuent parce qu'elles doivent attendre près d'un an avant de passer une mammographie ; ces enfants, dont les parents résident dans un Ehpad sous-doté ; ces soignantes et ces soignants, qui disent ne pas avoir les moyens de prendre soin de leurs patients et, pire, qui avouent en pleurant qu'ils en deviennent maltraitants !

Ne faut-il pas être aveugle pour ne pas voir que votre politique accentue la pauvreté et les inégalités, et fait monter une colère qui pousse à trouver un coupable, une colère qui pousse à la haine de l'autre – haine meurtrière, qui fait le lit de l'extrême droite ! J'ai honte !

J'ai honte de notre démocratie malade qu'à chaque 49.3, vous poussez un peu plus vers l'autoritarisme.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Oh là là…

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J'ai honte de vous entendre affirmer qu'on ne peut priver nos concitoyens des services publics dont ils ont cruellement besoin, alors même que votre politique les détruit. J'ai honte de vous entendre avouer que vous ne chercherez pas davantage à coconstruire à l'avenir puisque, pour reprendre vos mots, il n'existe aucune majorité capable de s'entendre sur un budget.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

C'est vrai !

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Aucune majorité alternative !

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Ce faisant, Mme Borne nous informe que ce sont bien encore trois ans et demi de 49.3 qui nous attendent. Or, madame Borne,…

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Madame la Première ministre !

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…ce n'est pas le contrat républicain !

Collègues, combien de 49.3, combien de consultations citoyennes sans suites, combien d'assises fantoches, combien d'invitations à l'Élysée, combien de recours à des cabinets de conseil – pour des millions d'euros d'argent public –, combien de promesses en l'air vous faudra-t-il encore pour vous rendre compte que le Président de la République et le Gouvernement font tout pour contourner le Parlement et la démocratie ? Comment, en tant que députés, pouvons-nous nous en satisfaire ?

Puisque le Gouvernement lui-même avoue qu'il n'existe aucune majorité capable de s'entendre autour de son budget, nous avons le devoir de changer de gouvernement en votant cette motion de censure.

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

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Sans surprise, nous voici de nouveau réunis pour examiner une énième motion de censure consécutive à un énième 49.3 sur le PLFSS pour 2024. Il s'agit d'un rendez-vous habituel, quoique le dernier, car ce texte sera considéré comme définitivement adopté si cette motion est rejetée.

Je ne reviendrai pas sur les revendications du Parlement au sujet du 49.3. J'appellerai plutôt votre attention sur trois enjeux majeurs, relatifs à la santé de nos concitoyens.

Tout d'abord, je souhaite aborder la question de la santé mentale et de la psychiatrie, dont la situation alarmante devrait tous nous interpeller. N'oublions pas, en effet, qu'un Français sur trois souffrira de troubles mentaux à un moment de sa vie. Pourtant, depuis la rentrée 2023, la crise que traverse la santé mentale s'aggrave un peu partout en France, certains patients étant pris en charge tardivement, voire ne l'étant pas du tout.

Près de deux ans après les assises de la santé mentale et de la psychiatrie, madame la Première ministre, le secteur est donc toujours en état d'urgence et manque cruellement de moyens. C'est le parent pauvre des politiques publiques en matière de santé.

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Souvenez-vous de l'infirmière tuée à Reims. Elle est morte non seulement sous les seuls coups de son agresseur, mais aussi sous les décombres de la psychiatrie française qui, faute de moyens, laisse des patients dangereux en liberté. Les rapports d'information ne manquent pourtant pas, tout comme les deniers publics puisque la psychiatrie demeure le premier poste de dépenses en matière de santé, soit 14,5 % de la facture annuelle et 23,4 milliards d'euros pour l'assurance maladie.

Comment expliquer ce paradoxe ? Le constat est le suivant : la psychiatrie est en crise, mise à mal par les conséquences de la crise sanitaire et par les plus de 30 % de postes non pourvus dans les hôpitaux publics selon les données de la Fédération française de psychiatrie. Je connais les efforts consentis depuis plusieurs années, mais ils ne valent rien en l'absence d'un grand plan dédié à ce secteur. À cet égard, notre ambition pour la psychiatrie doit être triple : promouvoir le bien-être mental et repérer plus facilement les situations de souffrance psychique ; garantir une offre de soins accessible et diversifiée ; améliorer l'insertion des personnes en situation de handicap mental.

J'évoquerai également le dispositif Mon soutien psy, d'ailleurs instauré à la suite des assises de la santé mentale et de la psychiatrie. En effet, s'il vise à améliorer l'accès aux soins et à lutter contre les inégalités dans le domaine de la santé, il est boycotté par de nombreux psychologues. Un an après son lancement, le dispositif ne compte que 2 200 praticiens volontaires conventionnés, soit 7 % des psychologues libéraux, pour une moyenne de 4,1 séances par patient. Les praticiens dénoncent le plafonnement du prix des séances, très inférieur aux tarifs couramment pratiqués, qui les décourage de se conventionner. De plus, le nombre maximal de séances remboursées, fixé à huit, n'est pas toujours suffisant pour assurer un suivi complet, ce qui peut entraîner une rupture de soins chez les patients les plus précaires, qui ne peuvent poursuivre leurs séances. Il est donc de votre responsabilité de faire évoluer ce dispositif.

Enfin, quand, à la suite de l'attentat de ce week-end, j'entends le ministre de l'intérieur et des outre-mer appeler de ses vœux la possibilité de demander une injonction de soins psychiatriques, j'espère que nous aurons les moyens d'y répondre, mais j'en doute.

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Nous n'aurons sûrement pas les moyens d'y répondre.

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Le deuxième élément que je souhaitais évoquer, madame la Première ministre, concerne les addictions, responsables du décès de près de 130 000 personnes par an dans notre pays et sources de coûts sanitaires et sociaux considérables, la dépense directe, pour nos finances publiques, s'élevant à plus de 22 milliards d'euros, soit près de 1 % du PIB.

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Si, au sein de la population française, la consommation de substances est importante à l'âge adulte, c'est parce qu'elle débute très précocement. Voilà pourquoi la consommation de drogues, d'alcool et de tabac par les adolescents constitue un problème majeur de santé publique auquel il faut apporter des réponses prioritaires.

Croyez-moi, la situation chez les jeunes est alarmante. S'agissant des boissons alcoolisées, par exemple, une enquête réalisée en 2022 révèle que 37 % des jeunes de 17 ans ont déjà vécu une alcoolisation ponctuelle importante, ce qui correspond à la consommation de six verres ou plus en une seule occasion. Cette même enquête montre aussi qu'il existe une grande hétérogénéité dans les comportements, selon la situation des jeunes. En effet, la consommation de drogues licites et illicites est nettement plus fréquente chez les jeunes en apprentissage ou sortis du système scolaire que chez ceux scolarisés dans le secondaire. Ainsi, outre l'enjeu de santé publique majeur qu'elle représente, la consommation de drogues chez les jeunes revêt des enjeux sociaux encore plus grands.

L'Académie nationale de médecine elle-même rappelle la vulnérabilité extrême de l'adolescent vis-à-vis des addictions – vulnérabilité qui justifie de mener des actions particulièrement fortes en matière d'information et de prévention. Il revient aux pouvoirs publics de se saisir de cette question, afin de limiter les conséquences des addictions sur les jeunes. Toutefois, force est de constater que la France est un très mauvais élève dans le domaine de l'éducation à la santé et que nous peinons à informer et à prévenir la consommation de drogues et les risques d'addiction. Il conviendrait de créer des programmes d'éducation à la santé obligatoires, de l'école primaire jusqu'à l'université, ou encore de former efficacement les enseignants chargés de cette question, en lien les acteurs du secteur médico-social et les autorités compétentes.

Enfin, le dernier point sur lequel je tenais à appeler l'attention est le financement insuffisant des soins palliatifs en France, particulièrement à l'aube d'une éventuelle légalisation de l'euthanasie. D'après la Cour des comptes, seuls 48 % des besoins estimés en soins palliatifs seraient couverts, alors que leur accès universel suppose une couverture totale. La dépense publique dans ce domaine s'étant élevé à 1,5 milliard d'euros en 2021, une simple extrapolation arithmétique permet d'estimer les besoins de financement à 1,6 milliard d'euros supplémentaires. Eu égard aux 80 millions prévus dans ce PLFSS, il faudrait vingt ans, si nous suivons ce rythme, pour rendre les soins palliatifs accessibles partout et pour tous.

En outre, on estime que les besoins vont progresser dans les années à venir, du fait du vieillissement de la population – le nombre de personnes de plus de 75 ans augmentera d'environ 60 % d'ici à 2050. Or les objectifs d'équipements en lits spécialisés ne sont toujours pas atteints dans six départements métropolitains, en Corse du Sud et dans l'ensemble des départements et régions d'outre-mer.

Les lits en unités de soins palliatifs sont encore moins bien répartis : vingt-deux départements n'en disposent pas et trois autres restent en dessous du seuil d'un lit pour 100 000 habitants. La couverture de tout le territoire devrait devenir un objectif de santé publique, et il faut soutenir le développement des soins palliatifs à domicile. Si la prise en charge palliative en Ehpad est l'un des enjeux pour développer l'accès aux soins palliatifs, le principal obstacle à son développement tient dans l'insuffisante formation des personnels soignants et des personnels non médicaux intervenant en Ehpad. En l'absence d'infirmière dans 80 % de ces Ehpad, l'hospitalisation à domicile pourrait donc être une solution intéressante.

Autrement dit, madame la Première ministre, nous sommes bien loin du compte. C'est pourquoi Les Républicains proposeront ce jeudi une résolution visant à rendre effectifs les soins palliatifs sur tout le territoire national, car c'est un droit fondamental pour nos concitoyens, consacré dans le code de la santé publique.

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Enfin, lors de la dernière discussion générale sur ce texte, j'avais évoqué les revendications des infirmières. Je ne vous ai pas sentie convaincue, madame la Première ministre, quand je vous ai alertée sur le fait que les infirmières ne pouvaient coter que le premier soin à 100 %, le suivant l'étant à 50 % et le troisième devant être effectué gratuitement.

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J'ai revu l'ensemble des syndicats infirmiers et je vous confirme la dégressivité des tarifs infirmiers. Quelle profession – plombiers, électriciens ou autre –accepterait d'offrir le troisième acte si elle était amenée à en effectuer trois à domicile ? Les professionnels de santé de nos territoires sont garants des virages ambulatoire et domiciliaire de notre système. Afin de garantir leur pouvoir d'achat, en complément de la revalorisation de l'indemnité forfaitaire de déplacement, il serait urgent de vous saisir du problème.

M. Maxime Minot applaudit.

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Notre assemblée examine une nouvelle tentative de la NUPES pour renverser le Gouvernement, celui-ci ayant engagé sa responsabilité sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 – une NUPES ressuscitée pour l'occasion, au pire moment, compte tenu des propos ignobles tenus hier.

Une fois encore, dans un réflexe quasi pavlovien, il a fallu que vous déposiez une motion de censure. Madame Amiot, une fois encore, vous prouvez qu'il n'existe pas de majorité alternative. Et d'ailleurs, avez-vous fait l'effort de présenter un budget alternatif ? Dans vos centaines d'amendements, on peine à trouver trace d'une quelconque cohérence ou d'un réel projet d'alternance.

Vous ne l'avez pas dit dans votre discours mais, dans la motion de censure, vous dénoncez un projet qui « détricote la sécurité sociale et brutalise notre hôpital public et ses soignants ».

Mmes Caroline Fiat et Ségolène Amiot protestent.

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J'insiste : les mots ont un sens ! Est-ce détricoter la sécurité sociale que de porter l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) à 255 milliards en 2024 contre 190 en 2017, soit une augmentation de plus de 65 milliards ?

Mme Caroline Fiat proteste.

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« Brutaliser notre hôpital public et ses soignants », est-ce ainsi que vous qualifiez la continuité des revalorisations salariales issues du Ségur, pour un montant de 3,3 milliards d'euros ?

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Le PLFSS, c'est un tiers de la richesse nationale. Quel autre pays consacre autant à la solidarité que la France ?

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On peut parfaitement ne pas être d'accord sur les évolutions et les priorités données à notre système de santé, mais arrêtons de faire croire aux Français que notre pacte social est mis en cause, au risque de saper les fondements d'un modèle qui fait notre fierté.

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Pas besoin de le leur faire croire, ils le vivent !

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Au contraire, ce projet répond aux défis à venir, notamment au vieillissement de notre population, tout en renforçant notre pacte social. À force de jouer ainsi avec les mots, on abîme profondément et – je le crains, durablement – notre démocratie.

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Le groupe Démocrate salue ce projet de loi qui perpétue les principes et les exigences du modèle social dont nous sommes les héritiers, près de quatre-vingts ans après la fondation de la sécurité sociale.

C'est en répondant à une triple exigence – de solidarité, de responsabilité et d'émancipation – que nous ferons œuvre utile en matière d'action sociale, tant à l'égard de nos aïeux du Conseil national de la Résistance (CNR)…

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Vous n'avez pas le monopole du CNR, monsieur Jumel !

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… qu'envers les générations qui nous succéderont. Si nous avons une dette envers les esprits novateurs de 1945, nous avons aussi des devoirs à l'égard de nos enfants et de nos petits-enfants.

C'est dans cet esprit que les députés du groupe Démocrate ont abordé l'examen du texte. Les amendements que nous avons présentés permettaient de garantir une meilleure protection sociale à tous, mais sans obérer notre capacité à faire face à nos engagements budgétaires et financiers. Plusieurs n'ont pas été retenus dans la version du texte sur laquelle la Première ministre a engagé la responsabilité du Gouvernement ; nous le regrettons. Mais le groupe Démocrate continuera d'agir et de défendre ses convictions, dans un esprit de concertation, au service de nos concitoyens.

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Au cours de la navette parlementaire, le Sénat a apporté des modifications substantielles au texte adopté par notre assemblée. Le groupe Démocrate souligne l'esprit de responsabilité dont les sénateurs ont su faire preuve, malgré des désaccords évidents avec notre majorité, notamment concernant la trajectoire budgétaire proposée par le Gouvernement. Il est sain que différentes visions de la protection sociale puissent s'affronter, sans perdre de vue l'intérêt supérieur de la nation.

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Je suis convaincue que ces visions peuvent même se compléter, comme c'est par exemple le cas de l'ambition partagée avec le Sénat en matière de prévention ou de soutien à l'innovation en santé.

Plusieurs dispositions du projet de loi traduisent l'exigence de solidarité. C'est en étant solidaires que nous serons fidèles à l'esprit des ordonnances du 4 octobre 1945 portant organisation de la sécurité sociale et du 19 octobre 1945 relative au régime des assurances sociales applicable aux assurés des professions non agricoles, dites Laroque.

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Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 vise ainsi à mieux articuler les droits à la complémentaire santé solidaire (C2S) avec les minima sociaux, comme l'allocation aux adultes handicapés (AAH), l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI) ou celle destinée aux chômeurs en fin de droits.

Solidarité aussi, grâce à la suppression des jours de carence en cas d'arrêt de travail dû à une interruption médicale de grossesse. Solidarité enfin, pour mieux accompagner celles et ceux qui prennent soin d'un proche malade plusieurs fois au cours de leur vie, puisque la collectivité prendra en charge un renouvellement de l'allocation journalière du proche aidant (AJPA).

Outre la solidarité, depuis l'après-guerre, notre modèle social repose sur une logique de responsabilité ; c'est même la condition sine qua non pour garantir aux générations futures un système solide, aussi protecteur que celui nous connaissons. Les dépenses doivent être compensées par des recettes équivalentes – c'est aussi simple que cela. Transmettre à nos enfants des comptes en grave déficit année après année, cela revient à les condamner à porter le fardeau d'une dette sociale qui n'est pas la leur, mais la nôtre.

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La vôtre ! Mettez un terme aux exonérations de cotisations sociales !

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C'est pourquoi le texte de notre majorité prévoit des mesures d'économies : sur la consommation et le prix des médicaments, mais également sur les sommes versées à l'Unedic pour tenir compte des effets des réformes de l'assurance chômage et de l'amélioration du marché de l'emploi. Il s'agit également de diminuer le nombre d'arrêts de travail non justifiés et d'inciter au recours aux transports partagés.

Ce PLFSS veille également à ce que les grandes plateformes paient ce qu'elles doivent, en renforçant leurs obligations déclaratives, tout en améliorant la couverture sociale des micro- et autoentrepreneurs. La lutte contre la sous-déclaration des revenus, qui crée un manque à gagner estimé à plusieurs centaines de millions pour nos comptes sociaux, est essentielle pour les comptes publics, comme pour l'acceptabilité des prélèvements sociaux.

Enfin, agir de manière responsable, c'est être mieux préparés aux crises. Le projet de loi présente plusieurs mesures pour lutter contre les pénuries de médicament afin de répondre à l'inquiétude, justifiée, de nos concitoyens.

La sécurité sociale remplit pleinement son rôle lorsqu'elle permet à chacun d'être acteur de son destin, notamment face à la dégradation de son état de santé. C'est l'objet des rendez-vous aux âges clés de la vie, que le projet de loi propose de généraliser, mais aussi de la prise en charge inédite des moyens de contraception, ou de la généralisation de la vaccination contre les papillomavirus humains (HPV).

Solidarité, responsabilité, émancipation : pour toutes ces raisons, le groupe Démocrate s'opposera à la motion de censure.

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Vendredi après-midi, madame la Première ministre, vous êtes montée à la tribune et, avant que les députés n'aient pu piper mot, vous avez déclenché votre vingtième 49.3.

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Elle aussi, il faudrait lui donner une carte de fidélité !

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C'est peut-être votre côté bonne élève, madame la Première ministre : 20/20, franchement bravo ! Vous aurez mention « très bien », avec les félicitations du Président de la République, pour avoir rudoyé sans vergogne le Parlement avec votre projet de loi de financement de la sécurité sociale qui continue de détruire notre modèle social.

Néanmoins, il n'est pas certain que les Français vous en soient aussi reconnaissants. Le petit sourire satisfait que vous affichez désormais à chaque fois que vous déclenchez un 49.3 est perçu par certains comme le signe d'une déconnexion, voire d'une ignorance, de la réalité vécue par beaucoup de nos concitoyens.

Puisque vous êtes présente, tentons de leur donner la parole : « On n'en est même plus à choisir entre les loisirs ou manger – les loisirs, ça fait belle lurette qu'on s'en passe. On en serait plutôt à choisir entre les œufs et le lait – mais pas les deux –, ou entre le liquide vaisselle et le gel douche – de nouveau, pas les deux – quand on peut encore en prendre un… »

Des mots comme ce message posté sur ma page Facebook la semaine dernière à la suite de votre précédente motion de censure, nous touchent depuis un an et demi, alors que l'inflation, nous ne cessons de le marteler, pèse sur les ménages.

Et vous, vous revalorisez généreusement le RSA de 4,6 % au 1er avril, et les pensions de retraite de 5,4 % ! Bravo, cela représente 90 centimes de plus par jour pour un allocataire du RSA. Effectivement, comment se plaindre quand, comme Juliette, on réduit le montant de votre allocation parce que vous avez oublié de déclarer 40 euros de vente d'objets sur Le Bon Coin ? Je vous transmettrai une copie de l'excellent article du Monde de ce matin. Franchement, c'est indécent ! Eh oui, des assistés au bout du rouleau osent encore se plaindre d'un contrôle technocratique et inhumain !

Mais peut-être ces éléments sont-ils encore trop abstraits ? Que dire d'un lot de yaourts à 3,45 euros sur le site de Carrefour il y a moins d'une heure, quand ce produit coûtait 2,72 euros il y a un an. Une telle différence vous paraît ridicule ? C'est pourtant le quotidien de nos concitoyens.

Madame la Première ministre, puisque, pas plus que le ministre du travail, vous ne m'écoutez, allez-vous prêter attention aux rapports des banques alimentaires qui décrivent méthodiquement comment la précarisation de l'emploi allonge les files d'attente aux distributions organisées par des bénévoles ? Savez-vous que, parmi les actifs qui sollicitent l'aide des banques alimentaires, 60 % travaillent à temps partiel ? L'emploi précaire renforce la pauvreté et ceux qui perçoivent de bas salaires – comme d'ailleurs toute la classe moyenne – sont pénalisés par l'inflation, trappe à pauvreté.

Puisque vous avez souhaité interrompre notre parole pour la vingtième fois, laissez-moi vous citer celle des acteurs de la solidarité, dernier refuge de ceux que vos politiques précarisent. Vendredi matin à onze heures, pendant que vous fourbissiez votre vingtième 49.3, j'étais à la banque alimentaire du Calvados, aux côtés des bénévoles et des deux salariés et demi, afin de les écouter. Je leur ai promis de relayer leur parole : à Bretteville-sur-Odon, « l'entrepôt est trop petit – il faudrait qu'il soit trois fois plus grand pour gérer la demande. Quand les aides, comme le RSA, ne sont pas encore versées, les gens sont en difficulté, isolés et perdus. Lors de la faillite d'un commerce, les gens n'ont pas de chômage, ni de revenus. Ils ne touchent plus rien. Si Les Restos du cœur refusent désormais les cent plus « riches » sur leur liste, ceux-ci vont aller toquer à d'autres portes, mais lesquelles ? Personne n'a envie de refuser des gens, de trier entre les pauvres. Pourtant, de plus en plus de travailleurs viennent, ça pose des questions. Pour les banques alimentaires du Calvados, c'est Amazon qui donne un chèque de 12 000 euros pour acheter des conserves, Amazon qui met des camions et des chauffeurs à disposition ! »

Oui, vous avez bien entendu : l'entreprise Amazon, championne de l'optimisation fiscale, professionnelle des conditions de travail dégradées, des cadences infernales, des rotations à la chaîne, se substitue à l'État pour financer les banques alimentaires. Quel symbole ! Assumerez-vous devant la représentation nationale le montant des exonérations d'impôts qu'entraîne la politique de responsabilité sociale et environnementale (RSE) de l'entreprise américaine ?

Le lendemain, samedi, à dix heures, j'étais invité en Ardèche pour parler de travail et d'emploi et pour défendre une autre vision que celle prônée par votre ministre du travail, Olivier Dussopt.

Au Teil, j'ai rencontré l'association Territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD), qui promeut un ambitieux projet de transformation du territoire et dont vous vouliez réduire les subventions.

À Privas, nous sommes allés à la rencontre des salariés d'une ressourcerie. Ils déplorent que votre gouvernement détourne le modèle des ateliers et des chantiers d'insertion : « Nous accompagnons de plus en plus de personnes de plus de 50 ans et de moins de 25 ans. La semaine dernière, une dame âgée de 66 ans est venue nous voir : elle n'avait pas de solution. La dernière réforme de l'assurance chômage a beaucoup changé les choses. Des personnes qui auparavant pouvaient payer leurs factures n'y arrivent plus. Nous avons même une bénéficiaire qui a une licence de langues étrangères appliquées (LEA). Tout est déréglé : les réformes comme celle de l'assurance chômage renvoient les gens vers le RSA. Il y a une colère forte, les gens vivent dans des logements pourris, ce sont des invisibles. » Vous n'avez pas augmenté les plafonds des chantiers d'insertion et les personnes susceptibles de bénéficier des dispositifs d'insertion sont donc de moins en moins nombreuses : c'est votre politique.

Une heure plus tard, je suis allé à la rencontre des bénévoles du Secours populaire : « Il n'y a pas eu de distributions en novembre car nous n'avons plus de stocks. C'est difficile. Notre secrétaire générale a alerté Mme Borne sur l'utilisation des fonds européens de l'aide alimentaire qui ne sont pas consommés par la France. Nous n'avons pas d'étudiants sur notre territoire, mais nous avons désormais des lycéens qui viennent prendre des paquets de biscuits. Dans nos territoires ruraux, même l'accès aux droits est en danger, puisque se déplacer coûte trop cher. Les gens n'ont plus les moyens de venir chercher à manger. Quand ils viennent, on n'est pas prêts, on n'est pas « France Services bis », on ne peut pas compenser par des appels à projets à durabilité limitée. À un moment, on se pose la question : jusqu'à quand devra-t-on se battre pour obtenir quelques subsides que l'État attribue pour accompagner son désengagement ? »

Ce désengagement de l'État, je ne peux que le constater dans le Calvados, votre département, madame la Première ministre. À Ouistreham, des hommes sont frigorifiés – j'ai pu le constater dimanche dernier. Ils attendent une mise à l'abri qui est de votre devoir, mais qui tarde : faute de moyens, l'hébergement d'urgence est saturé. Il gèle, madame la Première ministre, il pleut. Comme ils n'ont pas assez de tentes, ils doivent se relayer pour dormir. Plus de la moitié d'entre eux ont déposé une demande d'asile. En attendant, ils n'ont droit à rien, ne possèdent rien et sont considérés comme des moins que rien.

À Ouistreham, comme on me le rappelait à la banque alimentaire, « il y a de plus en plus de jeunes, certains ont 12 ou 13 ans. » À cause de la gale et de la tuberculose, la Croix rouge a du mal à trouver des bénévoles pour leur donner à manger : « Nous n'avons pas de ligne de crédit sur la maraude à Ouistreham pour avoir de l'aide alimentaire. »

Il y a Ouistreham, mais aussi Dunkerque, Calais… Partout des campements de fortune et des exilés qui cherchent tout simplement à survivre et qui, pour la plupart, ne désirent qu'une chose : travailler, s'intégrer en France, vivre dignement. Pendant ce temps-là, votre ministre délégué chargé du logement déclare dans Le Monde : « J'ai 1 600 migrants à Dunkerque, je les « gère ». Ce qui me paraît plus important, c'est que les gens ne soient pas étranglés par leur rythme de vie et leur pouvoir d'achat. »

Bravo, monsieur le ministre délégué ! Mais, voyez-vous, malgré votre « en même temps » qui divise, les gens sont quand même étranglés par leur rythme de vie et leur pouvoir d'achat – à cause de vos politiques ! Et « en même temps », votre devoir – notre honneur –, devrait aussi consister à considérer les exilés autrement que comme des chiffres qu'on « gère ».

Au-delà de ces propos, l'indignité, c'est celle des conditions dans lesquelles nous accueillons ceux que l'on arrête à la frontière.

Madame la Première ministre, laissez-moi vous raconter ce que j'ai vu à Menton. Le poste-frontière de Menton comprend un local de mise à l'abri. Parfois, des dizaines d'hommes attendent dans une courette, en plein cagnard. Quelques-uns dorment sur des bancs en métal, mais la plupart doivent s'allonger à même le sol goudronné. À l'intérieur, dans une salle de trente mètres carrés, une quarantaine de personnes – des mineurs, des familles, des bébés – se partage quatre matelas de sol, des toilettes à la turque putrides et un point d'eau. Des bébés, madame la Première ministre, des bébés dorment là !

Je garderai toujours en mémoire l'image de ce couple avec leur toute petite fille de 9 mois, arrivant à vingt heures trente au poste-frontière. Ils vont passer la nuit là, à même le sol. Le lendemain à dix heures, je les retrouve par hasard à Vintimille. Ils n'avaient évidemment pas dormi ; ils ont fui la Guinée et l'excision. Au poste, on leur a demandé leur identité, mais pas s'ils voulaient demander l'asile ou voir un médecin, alors que leur petite fille était malade depuis trois semaines. On les a conduits dans cette pièce surpeuplée, où la petite fille a dormi sur l'épaule de son père allongé sur le carrelage sale. À huit heures, on les a remis dehors : ils ont dû marcher deux heures sur le bas-côté pour retourner en Italie. Madame la Première ministre, cela ne devrait pas être la France – mais c'est la France !

Vendredi dernier, de retour à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, j'ai assisté, médusé, à vos renoncements : durcissement du regroupement familial et du droit au titre de séjour pour étrangers malades, exigence d'un niveau de maîtrise de la langue française – alors même que les centres de langue n'ont pas de places !

Pour finir, je vais vous parler de Samassa, qui fait le ménage à l'Assemblée nationale. Elle est en France depuis quarante ans. Depuis plus de trente ans, elle nettoie les bancs sur lesquels vous êtes assis. Elle peine à joindre les deux bouts. Elle a abandonné sa demande de naturalisation, dont elle a été déboutée parce qu'il manquait une pièce. Sans rancune et avec le sourire, elle vient toujours nettoyer vos banquettes : elle a 68 ans et des problèmes de santé, mais elle continue de travailler. Aujourd'hui, je pense à elle, à ceux qui, malgré vos politiques, font tourner la France avec abnégation et sens du devoir.

Madame la Première ministre, en raison de l'inhumanité technocratique qui vous sert de politique, nous voterons la censure.

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

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L'article 49.3 de la Constitution est une disposition légale, démocratique au sens où elle est inscrite dans notre Constitution.

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Elle permet de dépasser les situations de blocage lorsque l'essentiel est en jeu : donner un cadre budgétaire à toutes nos politiques sanitaires et sociales relève bien de l'essentiel.

En revanche, la motion de censure, qui est, le cas échéant, son pendant, est aussi une disposition légale, mais c'est aussi un outil politique.

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Son efficacité se mesure au résultat obtenu, au nombre de voix qu'elle fédère.

De ce point de vue, mesdames et messieurs les députés de la NUPES, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'en dégainant toutes ces motions comme mus par un réflexe pavlovien, vous avez fait pschitt !

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C'est notre côté soda, on aime bien les bulles !

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Vous avez fait pschitt dès la première fois, vous avez persisté, puis vous avez fait de nouveau pschitt et une nouvelle fois pschitt, puis encore pschitt, avant de faire patatras et encore une fois pschitt.

Ce n'est plus avec de vrais arguments politiques que vous montez à l'assaut à l'occasion de toutes ces motions de rejet, de renvoi ou de censure : ce sont malheureusement des pistolets à eau que vous brandissez.

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L'idée est certainement d'éclabousser large, mais quelques gouttes d'eau, cela sèche et, surtout, cela ne laisse pas beaucoup de traces.

Et nous, motion après motion, nous vous écoutons vous empêtrer dans vos contradictions et vos arguments tirés à boulet rouge,…

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Nous sommes des pacifistes, nous ne tirerons jamais qu'avec des pistolets à eau !

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…nous vous voyons être de moins en moins suivis par vos alliés, de moins en moins nombreux dans cet hémicycle pour la soutenir.

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Les députés de la majorité ne sont pas là non plus !

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Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Elle est sur les bancs du Gouvernement !

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Nous regrettons que, dans l'hémicycle, cet état d'esprit ait pris le pas sur l'échange constructif, tel que nous en avons eu en commission à plusieurs reprises.

Pour la cinquième fois, nous avons beau vous écouter – patiemment ! –, nous n'entendons rien : aucune proposition structurée, aucun projet alternatif…

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Nous en avons un, il s'appelle L'Avenir en commun !

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…qui puisse fédérer largement dans cet hémicycle et servir de base à une majorité alternative.

Hélas, chers collègues, critiquer ce que proposent le Gouvernement et la majorité ne suffit pas à construire une majorité responsable, cohérente et capable de proposer aux Français un projet différent du nôtre.

Finalement, ce rejet systématique fait surtout naître une forme de regret, celui de ne pas avoir pu percevoir le modèle social que vous auriez souhaité dessiner dans le cadre du PLFSS pour 2024. Mais la réalité demeure : vous avez plutôt opté pour les critiques, les mensonges, les contre-vérités, les approximations et les postures.

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Dont acte. Au nom du groupe Horizons, je salue ceux qui ont donné la primauté à l'intérêt général et qui n'ont pas cédé à la tentation simpliste des carcans idéologiques.

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De la part du Gouvernement, cette attitude constructive s'est manifestée par une main souvent tendue aux oppositions, dont il a repris certains amendements. En commission, nous autres, députés de la majorité, avons aussi repris certains des amendements de l'opposition.

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Rappelons quelques chiffres : en 2024, nous consacrerons 105 milliards d'euros à l'hôpital, 254 milliards au titre de l'Ondam, 294 milliards à l'assurance vieillesse ou encore 58 milliards aux politiques familiales. Tous ces postes budgétaires sont en augmentation…

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Notre majorité n'a pas à rougir de ces chiffres.

Il faut aussi prendre en compte la revalorisation des pensions de retraite de plus de 5 %, et les plus de 3 milliards de revalorisation des personnels sanitaires, médico-sociaux et de la petite enfance.

En parallèle, il nous incombe aussi de maîtriser les dépenses, quand elles peuvent l'être, grâce à des économies raisonnées, garantissant l'équilibre global du système, tout en maintenant les droits des Français. Je l'ai indiqué à plusieurs reprises à cette tribune depuis le début de l'examen du texte : il est indispensable de s'inscrire pleinement dans une trajectoire de maîtrise des dépenses publiques, à l'heure où la menace de déficit est présente et que l'inflation commence à refluer. Le PLFSS, en visant cet objectif, se fie à la même boussole que le groupe Horizons : chaque euro des Français doit être dépensé de façon juste et efficace.

Dans ce contexte, nous notons un objectif national des dépenses d'assurance maladie qui reste dynamique en 2024, à 3,2 %, et qui va de pair avec l'esquisse des réformes structurantes nécessaires et d'une trajectoire de 3,5 milliards d'économies, fondées sur l'efficience de la politique de santé publique. Ces économies s'accompagnent de mesures de responsabilisation des acteurs du système de santé et de mesures de lutte contre la fraude sociale, impératif d'équité et de justice pour l'ensemble des assurés.

Le PLFSS pour 2024 s'attaque aussi à plusieurs priorités, dont l'accélération du virage préventif, la lutte contre toutes les inégalités d'accès à la santé et le financement de l'hôpital et des Ehpad.

S'agissant de la prévention, qui est historiquement le parent pauvre des politiques de santé, je me réjouis – nous devrions tous nous en réjouir – du lancement de la grande campagne de vaccination contre les infections liées au papillomavirus, prise en charge à 100 % dans tous les collèges pour les élèves de cinquième, de la gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans, et de celle des protections menstruelles réutilisables pour les jeunes femmes, notamment les plus précaires.

L'accès aux soins est une préoccupation majeure des Français. Là encore, vous auriez pu vous réjouir de plusieurs avancées prévues dans ce texte. Je pense notamment à l'élargissement des compétences des pharmaciens, leur permettant de prescrire des antibiotiques après la réalisation d'un test rapide d'orientation diagnostique pour les angines et les cystites. Je pense aussi à la généralisation d'une expérimentation réformant l'organisation des soins dentaires, déjà déployée dans dix régions et vingt-six départements. C'est une mesure de bon sens, qui permettra de répondre aux besoins de soins urgents de la population.

Enfin, ce PLFSS marque une étape importante dans les réformes de financement de tous les secteurs. D'une part, il pose le premier jalon de la sortie du « tout-T2A (tarification à l'activité) » à l'hôpital, que beaucoup appelaient de leurs vœux depuis si longtemps,…

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…et promis par le Président de la République au début de l'année. D'autre part, il entame une réforme importante du financement des Ehpad, en donnant la possibilité aux départements qui le souhaitent de fusionner les sections de financement « soins » et « dépenses », et de transférer leur financement à la branche autonomie.

Ce PLFSS représente ainsi un pas de plus sur le long chemin de redressement de notre système de soins. J'ai bien entendu, j'ai quelques regrets, notamment s'agissant du sport santé, des rendez-vous non honorés, mais aussi de la lutte contre l'alcool et le tabagisme. Je sais cependant que notre politique sociale ne peut résider dans le seul véhicule législatif du PLFSS. Pour faire évoluer notre système de santé, nous devons engager des réformes structurelles. Cela pourra être fait prochainement au niveau local – c'est l'objet de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, dont j'ai l'honneur d'être rapporteur. C'est une étape supplémentaire vers la territorialisation de notre système de santé.

Il faut en effet faire confiance aux acteurs de terrain. La question de l'efficacité des dépenses publiques doit être débattue au plus près de ces dépenses : il nous faut prendre en considération les priorités de santé publique et garantir des rémunérations justes et équitables. Il faut aussi changer d'époque en matière de prévention et obtenir des acteurs de santé qu'ils changent certaines de leurs habitudes. Moderniser notre système de santé passe par des réformes audacieuses, qui bousculeront certes les rangs et les habitudes – mais c'est seulement à ce prix que nous pourrons le pérenniser.

Nous sommes à un moment historique, qui oblige chacun à débattre avec sincérité, et donc, avec l'envie de chercher des compromis et des solutions, plutôt que de s'opposer à tout par posture et par plaisir. Cet état d'esprit, cette volonté de privilégier l'intérêt général plutôt que les intérêts partisans, ne sont pas partagés sur tous les bancs de cet hémicycle – c'est bien dommage.

Le groupe Horizons a pris, lui, toute sa part dans l'élaboration de ce PLFSS. Sur certains points, notamment sur la santé des femmes, il a permis des avancées très concrètes.

En conclusion, le 49.3 n'est pas un déni de démocratie, mais un outil de stabilité de notre Ve République. C'est pourquoi, madame la Première ministre, le groupe Horizons vous renouvelle tout son soutien et ne votera évidemment pas cette nouvelle motion de censure.

Mme Maud Gatel applaudit.

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Madame la Première ministre, vous avez banalisé l'usage du 49.3 sur les textes budgétaires. Imperturbable, vous continuez de le dégainer, texte après texte. Si l'année dernière, vous aviez maintenu l'illusion du débat parlementaire en attendant quelques jours avant d'enclencher le 49.3, cette année, vous ne vous donnez même plus la peine de jouer la comédie. Votre dernière annonce en la matière – la vingtième – a pris à peine deux minutes ; preuve du caractère dérisoire, banal, presque anodin que revêtent à présent ces 49.3. Vous amputez les discussions avant même qu'elles aient pu avoir lieu ; vous clôturez le débat avant même qu'il ait commencé.

Mais, en réalité, recourir à cette procédure révèle votre profonde fragilité. Force est de constater que vous êtes dans l'incapacité de réunir une majorité pour faire passer vos textes austéritaires. Même les députés de votre propre camp désertent dorénavant les réunions de commission préalables aux discussions budgétaires, sachant qu'aucune modification ne se jouera là. Vous imposez du haut, sans laisser la démocratie emprunter cette voie essentielle, celle pour laquelle nous, parlementaires, avons été élus par le peuple : la représentation de la pluralité.

Projet de loi de finance (PLF) après projet de loi de finance, PLFSS après PLFSS, vous continuez de déconstruire le pacte républicain et le fondement de notre démocratie. Les 49.3 sont l'aveu de votre faiblesse. Ce mépris de la démocratie est loin d'être sans conséquence pour notre pays : au-delà de l'affront fait aux parlementaires, il a une répercussion très concrète sur la vie des Françaises et des Français, bien loin des joutes politiques et des querelles parlementaires.

À chaque fois que vous montez à la tribune pour user et abuser de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, vous ne méprisez pas seulement la représentation nationale, vous méprisez toutes les Françaises et les Français ; vous méprisez l'espoir d'une démocratie qui prend en compte chacune et chacun, et la promesse républicaine de ne laisser personne au bord de la route. En passant en force, réforme après réforme, texte après texte, vous contribuez à dégoûter un peu plus encore les Françaises et les Français de la politique. Vous méprisez leurs préoccupations et les répercussions de ces réformes sur leur quotidien. Vous donnez l'impression que le politique et la politique ne sont l'affaire que de quelques-uns, mais pas du peuple. Vous affaiblissez ainsi considérablement la promesse républicaine et démocratique. À quoi bon alors participer, manifester ou voter ?

À force de refuser de taxer les superprofits, en étant la main et l'oreille des grandes entreprises et des lobbys, vous renforcez la perception qu'ont les Français d'être dirigés par une élite faible avec les forts et forte avec les faibles. Aux puissants, on cède tout ; aux faibles, rien.

En passant en force sur la réforme des retraites, vous dédaignez les souffrances physiques et psychologiques des plus vulnérables ; en cela, vous creusez encore le gouffre entre ceux qui gouvernent et ceux qui subissent. Vous avez choisi d'ignorer des millions de Françaises et de Français qui ont marché contre votre réforme, lors d'une mobilisation historique. Vous n'avez pas entendu les sincères revendications de celles et ceux qui en ont dénoncé le caractère profondément injuste.

Plutôt que de contribuer à relever l'un des défis majeurs de notre siècle – la lutte contre le réchauffement climatique –, vous choisissez de criminaliser celles et ceux qui ne parviennent pas à se résoudre à laisser les pétroliers forer les sols et les élites construire des autoroutes pour les riches, en dépit de toutes les alertes des scientifiques, qu'ils soient climatologues ou environnementalistes.

En choisissant de passer en force, madame la Première ministre, vous trahissez la promesse républicaine et démocratique, vous manquez à votre responsabilité consistant à trouver le meilleur compromis social pour une société déjà très fragilisée et profondément fracturée. Face à l'extrême droite, votre gouvernement n'est plus le rempart qu'il a prétendu être ; il en est devenu le tremplin. À force de creuser les inégalités sociales et économiques et de mener des politiques antisociales et antiécologiques, vous devenez acteurs de la montée du populisme.

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Alors que vous avez été élus avec les voix de la gauche et des écologistes pour faire barrage à l'extrême droite,…

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…vous donnez aujourd'hui raison au discours populiste, haineux, xénophobe et nationaliste de celle-ci.

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Vous mettez à l'agenda des sujets de débat sur lesquels l'extrême droite prospère – comme l'immigration –, dans le vain espoir de détourner l'attention et de capter la colère de celles et ceux qui sont exclus.

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Vous assumez de faire une pause dans les politiques environnementales, alors que leur arrêt marque le refus de croire en l'avenir. Plutôt que d'agir réellement pour lutter contre le réchauffement climatique, vous crédibilisez un peu plus le discours de l'extrême droite, qui dénonce l'écologie comme étant à l'origine de tous les maux et de toutes les contraintes. Même les COP deviennent un prétexte pour disséminer votre idéologie technosolutionniste, aux côtés des pétroliers.

Vous continuez surtout de déconstruire méthodiquement les services publics, qui constituent le patrimoine de celles et ceux qui n'en possèdent pas : protection sociale, assurance chômage, retraites, mais aussi égalité d'accès au soin, à l'hôpital public et à l'éducation. Une société qui n'investit plus dans sa jeunesse ni dans l'éducation – un pilier de la démocratie et de la promesse républicaine ! – est une société qui abandonne toute forme de progrès social et ne croit plus en son avenir. C'est pourtant ce que vous faites : vous contribuez à saboter le système d'éducation nationale en voulant créer des classes de niveau. L'école publique pour les pauvres, le privé pour les privilégiés.

L'explosion du nombre d'enfants qui dorment dans la rue, au sujet de laquelle nous tentons d'agir et de vous interpeller par tous les moyens – mon collègue Charles Fournier a ainsi mis à disposition les locaux de sa permanence parlementaire…

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C'est interdit : c'est un détournement d'argent public !

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…est la conséquence de ces politiques défaillantes. Vous refusez de mettre à contribution les industries les plus polluantes pour financer notre système de santé. Vous refusez de débloquer les financements nécessaires pour mener une véritable politique de rénovation des logements. Vous laissez de plus en plus de ménages aux prises avec la précarité énergétique. Vous continuez de fermer les yeux sur un système judiciaire qui demande aux femmes de prouver l'agression sexuelle ou le viol dont elles ont été victimes plutôt que de demander aux agresseurs de prouver leur innocence. Vous laissez notre système de santé publique se détériorer, sur le dos des aides-soignantes, des infirmières et des médecins qui le portent à bout de bras. Notre système de santé mentale est en lambeaux, avec, là aussi, des conséquences dramatiques.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Carrément !

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En agissant ainsi, en creusant les inégalités socio-économiques, en appauvrissant le modèle de solidarité, vous créez une brèche dans laquelle l'extrême droite n'a qu'à s'engouffrer ; elle s'y engouffre déjà. Vous crédibilisez ses discours ; pire, vous les faites prospérer. À quoi mènent les inégalités économiques, la crise de confiance envers les gouvernements, le dégoût de la politique et la perte de foi dans le système ? Que nous enseignent l'Italie, la Hongrie, la Suède, la Slovaquie et plus récemment, à mon grand désespoir, les Pays-Bas ? L'accroissement des inégalités et la défiance envers les élites politiques mènent à la montée du populisme. Ne tirez-vous donc aucune leçon de tous ces exemples ? Où votre irresponsabilité nous mènera-t-elle ?

Je pourrais vous parler de ma colère ou de mon dégoût, mais il s'agit aujourd'hui de ma grande inquiétude. Nous choisissons de censurer votre gouvernement pour marquer notre opposition à cette montée du populisme, que vous assumez puisque vos politiques la nourrissent directement. Madame la Première ministre, la démocratie en Europe brûle et votre gouvernement, en recourant systématiquement au 49.3, jette de l'huile sur le feu.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Systématiquement ?

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Mesurez-vous véritablement les répercussions de ce déni de démocratie à répétition ? Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste – NUPES votera la motion de censure ; j'invite tous les parlementaires à faire de même.

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Évidemment !

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Ce matin, en me réveillant grippé, je me suis demandé si votre politique m'avait rendu malade, madame la Première ministre, mais je n'oserais pas formuler cette suggestion devant vous.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Merci de partager vos miasmes avec nous !

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C'est de bonne guerre, puisque nous parlons du budget de la sécurité sociale !

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« Permettre au Parlement de se prononcer chaque année sur le financement de la sécurité sociale est à la fois une nécessité démocratique et la condition de l'instauration d'un équilibre durable de notre système de protection sociale. […] Il est essentiel que le Parlement puisse voter chaque année une loi de financement de la sécurité sociale. » Ces mots ne devraient pas vous choquer puisqu'ils viennent de votre camp ; ils ont été prononcés par Alain Juppé en 1996, alors qu'une révision constitutionnelle reconnaissait enfin que le budget de la sécurité sociale exigeait un débat politique et le vote du Parlement. Ces mots n'ont pas pris une ride et il est bon que vous les entendiez ce jour, alors que pour la vingtième fois, nous ripostons par une motion de censure à votre décision de priver les représentants de la nation du débat qui est la respiration de la démocratie ; de ce débat qu'aucune autre démocratie parlementaire ne songerait à passer à la trappe comme vous le faites.

Le budget de la sécurité sociale est une affaire politique. Il n'y a pas plus politique que la santé, puisqu'il n'y a rien de plus important : quand la santé va, tout va ! Qui, mis à part vous et le Président de la République, oserait remettre en cause les prérogatives du Parlement : débattre et voter le budget de la sécurité sociale ? Je ne peux me tourner vers mes collègues marcheurs, puisqu'ils sont absents.

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Ils doivent pourtant mesurer le poids de l'acte d'autorité qu'ils approuvent. Comment prétendre fixer les dépenses de santé sans véritablement tenir compte des besoins ? Comment prétendre déterminer les recettes qui seront affectées à la sécurité sociale, sans avoir au préalable un débat politique sur la nature des ressources ?

Madame la Première ministre, contre la volonté du constituant de 1996, vous décidez que le budget de la sécurité sociale peut être arrêté par l'exécutif seul, sans débat politique, entre technocrates plus soucieux de la carte bleue que de la carte Vitale, et sans aucune contradiction. Le 49.3 abîme la démocratie ; le 49.3 appliqué au budget de la sécurité sociale abîme la démocratie sociale. Le budget de la sécurité sociale pour 2024, arrêté de manière autoritaire, n'aurait pas été le même si nous en avions débattu.

Je ne sais pas si vous êtes allée dans un hôpital récemment, pas pour une visite organisée et ripolinée, mais pour une vraie visite – une visite vérité.

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Peut-être avez-vous regardé, sur la chaîne de service public France 3, le documentaire éloquent intitulé Nous, soignants ? Il s'agit d'une enquête de plus, qui met des mots sur les maux du système de santé et qui permet de mesurer que le budget que vous imposez n'est pas à la hauteur des besoins. Si un vrai débat avait eu lieu, nous aurions pu faire montrer le gouffre qui sépare ce que vous mettez sur la table pour le système de santé et les besoins réels. Nous aurions pu vous dire pourquoi ce que l'on voit à l'hôpital, ce qui est diffusé à la télévision et ce qu'analyse la Fédération hospitalière de France (FHF), disqualifie le PLFSS pour 2024, comme le précédent.

Pour l'année 2023, les besoins de financement supplémentaires s'élevaient à 3 milliards d'euros ; pour 2024, ils s'élèvent à 5 milliards. Quelle nouvelle crise ce fossé va-t-il creuser ? S'il y avait eu un débat, nous aurions pu examiner de nouvelles sources de recettes pour la sécurité sociale et discuter de l'urgence de la resocialiser, afin qu'elle continue de tenir son rôle précieux d'amortisseur de crises et de chocs.

La sécurité sociale est le bien de ceux qui n'en ont pas ; à l'inverse, ceux qui comme vous, choisissent d'en diminuer le budget représentent les gens qui ont du bien et qui ont le moins besoin d'elle ! Ce sont eux que vous écoutez lorsque vous présentez ce budget, qui n'est pas à la hauteur et que vous imposez sans débat ; c'est à eux que vous obéissez en activant le 49.3 ! Ce n'est pas à la France des classes moyennes et populaires, ni à la France souffrante, que vous vous référez.

La crise est profonde : 6,7 millions de personnes, dont 800 000 en affection longue durée (ALD), n'ont pas de médecin traitant à ce jour – vous refusez toutes les mesures que nous proposons ; pour dix personnes de plus de 75 ans, les Ehpad ne disposent que d'une seule place avec un reste à charge mensuel moyen de 1 957 euros ; l'été dernier, 163 services des urgences ont fermé, au moins ponctuellement ; le délai moyen d'accès à des consultations à l'hôpital varie d'un à quatre mois dans plus de la moitié des établissements ; en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, 45 % des établissements font état de délais d'accès aux soins ambulatoires compris entre cinq mois et plus d'un an – c'est vous dire la détresse de ce secteur ; le manque criant de reconnaissance et la pénibilité croissante nourrissent un absentéisme de l'ordre de 10 % et expliquent pourquoi les 5 % de postes de soignants non pourvus dans les hôpitaux et les centres médico-sociaux ne risquent pas d'être pourvus.

Je suis président d'un conseil territorial de santé (CTS) – cette instance locale de démocratie sanitaire – et ce que je m'apprête à dire pourrait concerner tous les hôpitaux de France et de Navarre. Savez-vous ce qu'on me dit dans les couloirs de l'hôpital ? « Monsieur le député, on s'habitue au pire. Quand les gens nous disent "de quoi vous plaignez-vous, ça va mieux que l'année dernière, la situation épidémique est moins pire !", au mieux on hausse les épaules, au pire on s'agace, mais le plus souvent, la lassitude l'emporte. »

Le « ça va mieux » est un trompe-l'œil qui rassure les agences régionales de santé (ARS) et le ministère. Pour l'instant, les épidémies hivernales sont sous contrôle, mais l'hiver est loin d'être terminé et de nombreux établissements ne disposent même pas d'un plan Hôpital en tension à la hauteur des standards demandés. Prenons l'exemple des lits d'hôpital – des lits physiques, du matériel sur lequel on allonge les malades. De nombreux établissements ont différé les investissements ces dernières années, faute de moyens. Ils ont tiré sur la corde et se retrouvent parfois avec un nombre insuffisant de lits, ce qui les empêche de cocher toutes les cases du plan Hôpital en tension – c'est vous dire ! L'hôpital a une dette d'obsolescence du matériel, par défaut d'investissement, que vous ne soupçonnez pas. Elle est invisible pour le public, mais les soignants la mesurent chaque jour dans leur travail ; cela constitue une sorte de violence institutionnelle qui pèse sur leur moral.

L'absence de capacité d'investissement et de perspectives conduit à une perte d'espoir dans le système, surtout chez les jeunes qui démarrent leur carrière. Les plus anciens supportent, parce qu'ils attendent la retraite – dont vous avez pourtant différé l'échéance.

Si le quotidien semble aller un peu moins mal que l'année dernière, sur le plan financier, c'est la douche froide : alors même que leur activité croît, les hôpitaux voient leurs déficits se creuser, réduisant comme peau de chagrin leur capacité d'investissement. L'inflation fait mal, les taux d'intérêt font mal, les banques se font prier pour prêter à l'hôpital, le système de financement fait mal. Malgré vos annonces, la tarification à l'acte reste à l'ordre du jour, et les mesures de compensation, sous la ligne de flottaison.

De nombreuses annonces sont faites sur les efforts financiers consacrés à l'hôpital, mais on n'en constate aucune traduction concrète sur le terrain. Observez les promotions des futurs directeurs et directrices : elles diminuent. C'est bien la preuve que l'absence de perspectives et d'espoir provoquée par l'incapacité de l'hôpital à investir décourage les vocations, y compris au sein des directions des établissements.

Il est compliqué de demander à une équipe de travailler sur un projet de santé en faveur de son territoire. Les professionnels estiment qu'ils ne parviennent déjà pas à accomplir leurs missions au jour le jour. Dès lors, dans ces conditions, comment établir un tel projet pour demain et après-demain ? Désormais, cette situation fait tache d'huile dans le secteur médico-social.

Madame la Première ministre, faut-il rappeler que nous ne débattons pas dans cet hémicycle dans une sorte d'entre-soi ? Les débats sont publics, ils intéressent la population pour autant qu'ils existent. Vous privez de parole les Français, ce qui provoque la colère et contribue à fragiliser la démocratie.

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Elle ne vous écoute pas ! Elle n'a pas écouté une seule phrase !

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Oui, j'ai constaté que personne ne m'écoutait ; c'est une question d'habitude.

M. Arthur Delaporte applaudit.

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Depuis que vous gouvernez, la situation en matière d'accès aux soins n'a cessé de se dégrader. Ce n'est pas à coups de 49.3 que vous parviendrez à faire disparaître cette réalité et à éteindre la voix de ceux qui nous alertent. Cette motion de censure est là pour vous le rappeler et pour rappeler que, dans notre esprit, le combat politique pour un droit à la santé pour tous ne s'arrête pas ce 4 décembre. Je vous remercie pour votre inattention.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.

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Nous voilà arrivés au terme d'un exercice fondamental pour notre société, frustrés et déçus. Pour la seconde année consécutive, nous avons le sentiment de ne pas avoir joué notre rôle de parlementaires. Nous avons la mauvaise impression d'avoir été les simples spectateurs de décisions prise par le seul Gouvernement. Nous ne sommes même pas commentateurs, puisqu'il n'y a pas eu de débats. Ne nous risquons pas à compter le nombre d'heures consacrées à la discussion des articles et des amendements de ce projet de loi ; il est inversement proportionnel à l'importance des sujets qu'il aborde.

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Quelle a été l'intention du législateur s'agissant du budget de la sécurité sociale pour 2024 ? Nul ne le sait vraiment. Celui-ci comporte des mesures majeures, sans qu'aucun mot n'ait pu être prononcé ni aucune explication n'ait pu être donnée ici même.

Nous n'avons eu aucune discussion sur la réforme attendue de la tarification à l'activité, qui est ni plus ni moins le moyen de financer nos hôpitaux. Nous n'avons pas débattu de la politique relative aux médicaments, alors que les pénuries obligent certains patients à traverser la frontière pour se procurer leurs traitements.

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J'oserai rappeler une information : l'élection du Président et celle des députés qui composent sa minorité au Parlement ne suffisent pas à vous donner les mains libres pour appliquer votre politique. La configuration quasi inédite de notre assemblée devrait chaque jour vous inciter au dialogue. C'est d'ailleurs la promesse qui avait été faite au lendemain des élections législatives ; nous vous la rappellerons aussi longtemps qu'il le faudra.

En effet, vous êtes loin de l'avoir tenue. La consultation des groupes parlementaires, en amont de la présentation du texte, lors des comptes du Ségur, n'a pas été l'exercice de coconstruction attendu. Il faudra faire bien mieux pour sortir de l'impasse dans laquelle vous vous êtes engagés, et qui vous a conduits à recourir au vingtième 49.3 – un triste record.

Je le dis d'autant plus facilement que le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires a toujours été, et demeure, ouvert à la discussion. Notre opposition n'est pas sourde, et nous sommes prêts à faire des compromis, pourvu qu'ils relèvent de l'intérêt général et bénéficient à nos concitoyens. C'est la raison pour laquelle nous maintiendrons la position qui a été la nôtre depuis le début de l'examen de ce texte : nous ne voterons pas cette motion de censure.

Nous ne la voterons pas, non pas parce que nous soutenons ce projet de loi et ce gouvernement,…

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…mais parce que nous avons obtenu deux engagements de votre part : celui de ne pas recourir à une ponction arbitraire des caisses de retraite complémentaire pour financer le régime général ; et celui de ne pas appliquer votre plan d'augmentation des franchises médicales, bien que Bruno Le Maire l'ait de nouveau mentionné récemment. Pour le reste, nous continuons de dénoncer un projet de loi de financement de la sécurité sociale insuffisant pour répondre aux défis présents et à venir.

Nous dénonçons un PLFSS fondé sur des économies. Nous ne critiquons pas la volonté d'équilibrer le budget des comptes sociaux, particulièrement après la crise sanitaire qui les a fragilisés, mais nous regrettons que ces économies interviennent à mauvais escient. Sous couvert d'un renforcement des modalités de lutte contre la fraude, vous affaiblissez les droits des assurés sociaux, comme en attestent la limitation de la durée des arrêts de travail par téléconsultation et la possibilité de mettre un terme aux arrêts de travail sur le fondement d'un rapport rendu par un médecin diligenté par l'employeur. Vous prenez le risque d'affaiblir un peu plus l'accès aux soins, et ce, alors même que la désertification médicale s'intensifie dans les territoires, que les services d'urgences ferment et que les médecins sont de plus en plus nombreux à prendre leur retraite.

En l'absence de mesures d'ampleur de la part du Gouvernement, les initiatives parlementaires s'accumulent, telles la loi de 2023 portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, dite loi Rist, ou la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, dite Valletoux, qui fera l'objet d'une commission mixte paritaire dont l'issue est inconnue.

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Aucune disposition de votre texte ne semble prendre la mesure de ce phénomène, préoccupation majeure de nos concitoyens.

Nous dénonçons un PLFSS insuffisant pour faire face à l'inflation et aux besoins des établissements de santé. Les fédérations hospitalières sont unanimes : la hausse de l'Ondam ne suffira pas à compenser l'inflation, qui augmente les coûts de fonctionnement et affecte les projets d'investissement dans tous les secteurs, ni à couvrir les revalorisations salariales. Il manquera 2 milliards d'euros pour 2024, au bas mot.

Nous vous avons alertés sur la faiblesse des coefficients géographiques, en particulier ceux s'appliquant en outre-mer et en Corse, qui stagnent depuis de nombreuses années. Il s'agit pourtant du principal levier permettant de rattraper les retards structurels, mais également de compenser les surcoûts et les effets de seuil liés à l'insularité et à l'éloignement. Vous vous disiez ouverts à la discussion sur ce point : elles n'ont malheureusement pas abouti à une réévaluation.

Enfin, nous dénonçons un PLFSS insuffisant pour répondre aux besoins des aînés et pour doter la branche autonomie de moyens humains et financiers à la hauteur. Face à l'absence de ressources nouvelles, notre déception est immense. Le transfert d'une fraction de CSG – contribution sociale généralisée – à la CNSA – Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie – pour 2024 ne représentera que 2,6 milliards d'euros. Nous appelons à l'augmentation de la CSG sur les revenus du capital ou à l'instauration d'une contribution spécifique sur les grandes donations et successions. J'insiste également sur la question des métiers. Mon collègue Laurent Panifous n'a cessé de vous poser la question : combien de postes ont effectivement été créés sur les 3 000 budgétés en 2023 ? Pour 2024, vous annonciez la création de 6 000 ETP – équivalents temps plein –, soit à peine un poste par établissement. Chaque jour, votre promesse de recruter 50 000 postes d'ici à 2027 s'éloigne, perspective d'un échec considérable.

Il est encore temps d'y remédier. Vous vous êtes engagés à faire adopter une loi de programmation pluriannuelle sur le grand âge l'an prochain. Notre groupe, qui a défendu avec d'autres ce projet, sera évidemment au rendez-vous pour la coconstruire. Mais prenez garde à ne pas créer de nouvelles déceptions.

Notre système de protection sociale mérite mieux que de simples économies : il a besoin de ressources nouvelles et pérennes. Des ressources pérennes sont nécessaires pour appliquer une politique de prévention efficace, pour garantir un accès aux soins partout et pour tous, pour bâtir un vrai système de soins psychiatriques et une politique solide en faveur de la santé mentale. Des ressources nouvelles doivent être prévues pour financer la branche autonomie, garantir les retraites actuelles et futures, et consolider la branche famille – il en est très peu question dans le texte. Nous appelons à une réflexion d'ampleur sur l'avenir des comptes sociaux. Notre groupe a fait, en vain, plusieurs propositions en ce sens. L'idée de renoncer aux exonérations de cotisations sur les salaires supérieurs à 2,5 Smic était pourtant partagée par une majorité de députés ; il a été démontré que cette mesure n'avait pas d'effet négatif sur l'emploi, et qu'elle pouvait rapporter 1,6 milliard d'euros par an.

Pour soutenir l'emploi, vous avez fait des choix plus que contestables, en fragilisant les plus fragiles. Après le durcissement des règles d'indemnisation chômage et la conditionnalité du RSA, jusqu'où irez-vous ? Bruno Le Maire, qui s'est autoproclamé nouveau ministre chargé du travail, souhaite désormais réduire la durée d'indemnisation des seniors au chômage ainsi que le délai de recours des salariés contre un licenciement, ou encore, limiter les ruptures conventionnelles. Pourquoi l'objectif du plein emploi ne devrait-il être atteint qu'au détriment des droits des salariés, sans jamais demander un quelconque effort aux employeurs ? Toutes ces annonces sont faites, alors même que les partenaires sociaux doivent négocier un accord sur l'emploi des seniors. Ne reproduisez pas l'erreur que vous avez commise lors de la réforme des retraites ; n'enjambez pas le dialogue social après avoir contourné le dialogue parlementaire.

Madame la Première ministre, appliquer le 49.3 est votre droit, la Constitution vous y autorise. Mais accepter sa banalisation, c'est renoncer à prendre le temps de débattre ; c'est renoncer à l'expression des clivages et des divergences au sein du Parlement, au risque que des conflits violents naissent à l'extérieur, atteignant un point de non-retour.

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Renoncer à débattre, c'est se résigner à cette violence. Quel risque prendriez-vous en acceptant d'écouter les oppositions ? C'est à vous de créer les conditions du dialogue ; vous pourriez même être surprise de parvenir parfois à des consensus utiles pour nos citoyens.

Article 49.3, motions de censure, article 49.3, motions de censure… Attention, tant va la cruche à l'eau qu'à la fin, elle se casse !

M. Maxime Minot sourit.

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Il y va de notre démocratie, de notre santé, de notre crédibilité vis-à-vis de la société française qui ne cesse de se fracturer et de se diviser. Nous avons des défis à relever, mais le refrain « 49.3, motions de censure » n'est certainement pas le plus pertinent, il est même mortifère.

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Il y a au moins une députée Renaissance ! J'espère qu'elle sera écoutée par la Première ministre !

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Je suis au regret d'annoncer aux auteurs de la motion de censure que même les meilleures choses ont une fin. La fin de la navette du PLFSS pour 2024 signifie celle des simagrées et des postures insoumises et frontistes néfastes à notre sécurité sociale. De la proposition visant à conditionner les aides sociales à la préférence nationale, aux tombereaux de taxes étouffant notre économie ; des bidouillages douteux de l'Ondam aux invitations massives à la fraude sociale, le rideau tombe désormais sur l'une de vos mascarades budgétaires.

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Vous êtes au courant de la pénurie d'amoxicilline pédiatrique ? Plutôt que de bavasser, quelles solutions proposez-vous ?

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Les admirateurs de la première heure peuvent néanmoins être rassurés : la lecture définitive du projet de loi de finances pour 2024 leur donnera une dernière occasion d'être éblouis par vos meilleurs tours de passe-passe financiers et par vos plus impressionnantes acrobaties idéologiques. Nul doute qu'ils auront également apprécié les épisodes remarquables que vous leur avez donnés à voir en parallèle des discussions budgétaires.

Prenons par exemple la niche parlementaire du groupe LFI – NUPES, qui s'est tenue la semaine dernière, plus particulièrement la proposition de loi visant à lutter contre l'inflation par l'encadrement des marges des industries agroalimentaires, du raffinage et de la grande distribution et établissant un prix d'achat plancher des matières premières agricoles, présentée par M. Bompard. De prime abord, l'examen d'un énième texte aussi démagogique qu'inconséquent ne constituait pas une intrigue prometteuse. Malgré tout, vous êtes parvenus à en faire un moment pour le moins pathétique de la vie parlementaire.

Mais rendons à César ce qui lui appartient : si l'ordre du jour vous réservait la tête d'affiche, le Rassemblement national vous a remarquablement donné la réplique, maîtrisant à la perfection son second rôle, toujours fidèle à vos côtés.

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Tandis que la majorité présidentielle s'évertuait tant bien que mal à protéger les consommateurs contre vos idées saugrenues, la NUPEN – la Nouvelle union populaire, écologique et nationaliste – a finalement été empêchée in extremis de mettre en branle sa terrible machine à créer de l'inflation. Quel suspense, quel coup de théâtre, le tout en préservant les Françaises et les Français d'un heureux dénouement ! Décidément, vous n'avez aucun talent.

Mais prenons un autre exemple, plus proche de nous : la représentation de votre tragique Ugo furioso en commission des lois jeudi dernier. Un seul en scène un tantinet forcé, puisque notre collègue Ugo Bernalicis a, avec une effarante et excessive violence,…

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…empêché les députés du groupe LIOT, qui ne demandaient qu'à contribuer aux débats sur le projet de loi pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration, de défendre leurs amendements.

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Une outrance d'autant plus incompréhensible que ces misérables gesticulations et cet égosillement auraient trouvé leur source dans l'incapacité prétendue de notre collègue à se rendre en séance afin de voter, alors que seule une discussion générale était en cours et qu'aucun vote n'avait encore eu lieu.

Collègues insoumis, nous savons que, chez vous, la voix d'un seul peut sans peine couvrir celle de tous les autres – ou plutôt de ceux qui auraient le malheur d'exprimer des opinions contraires aux siennes. Sur ce point, vous rejoignez d'ailleurs nos collègues frontistes, qui obéissent chaque jour sans sourciller au moindre mouvement de baguette de leur cheffe.

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Collègues, nous sommes ici à l'Assemblée nationale ! Notre parole est libre et nos 577 voix sont toutes égales. C'est de l'union de ces voix que provient la force de la légitimité de la démocratie, et certainement pas de celui qui crie le plus fort.

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Vous en aurez incessamment un nouvel exemple, une fois cette motion rejetée. Mais puisque celle-ci est encore en discussion, parlons-en.

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Y a-t-il de l'amoxicilline pédiatrique ou pas ? On n'a pas compris !

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Elle débute par une grave accusation, selon laquelle la sécurité sociale serait privée de précieuses recettes. Grave, et étonnante, car quelques paragraphes plus loin, vous déplorez la disposition visant à permettre une récupération optimale des cotisations des travailleurs indépendants recourant aux plateformes numériques. Or, outre le fait qu'elle abondera les caisses de la sécurité sociale, elle permettra surtout à ces travailleurs de bénéficier de l'ensemble de leurs droits sociaux.

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Les exonérations pour les sociétés qui font beaucoup de profits, vous ne voulez pas en parler !

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Dans la même veine, souvenons-nous des regrets que vous exprimiez au sujet d'une éventuelle contribution de l'Agirc-Arrco tirée des excédents de recettes générés par la réforme des retraites. Remplir les caisses, ici encore, n'est pas une fin en soi mais un moyen : en l'espèce, celui de revaloriser les petites pensions de retraite du régime général.

On ne peut que vous comprendre difficilement quand vous nous accusez, d'une part, de servir docilement les intérêts du patronat et que, d'autre part, vous applaudissez des deux mains celles de ses décisions qui vont dans le sens de vos desseins politiques.

La myopie de vos accusations ne s'arrête pas là, puisque vous prétendez que nous soutenons sans contreparties les intérêts de l'industrie pharmaceutique.

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Puisque vous parlez de l'industrie pharmaceutique, qu'en est-il de la pénurie d'amoxicilline pédiatrique, en pleine saison de bronchiolite ?

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Si tant est que vous en soyez capables, je vous invite à faire preuve de bonne foi, pour une fois : ce PLFSS comporte de nombreuses mesures visant à responsabiliser les acteurs du secteur, avec l'objectif clairement affiché d'assurer notre souveraineté sanitaire.

Il en est de même concernant le financement des hôpitaux : comment expliquer, alors que vous êtes visiblement capables de partager le constat du Président de la République lui-même, que vous ne parveniez pas à saluer le recul de la tarification à l'activité prévu par le texte ? Admettez que c'est quand même très curieux !

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Avez-vous fait une simulation pour chaque budget hospitalier ?

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Bis repetita concernant l'attractivité des métiers du soin et du lien, qui fait l'objet de vos griefs, alors que nous œuvrons depuis plusieurs années en faveur de la revalorisation de ces professionnels. Le PLFSS traduit d'ailleurs les engagements récemment pris par le Gouvernement, en vue, notamment, de mieux considérer le travail effectué par les soignants la nuit et les week-ends.

Je passerai rapidement sur la référence indécente à une fraude sociale fantasmée, dont on sait qu'elle représente un manque à gagner de l'ordre de 17 milliards d'euros pour la sécurité sociale. Un jour sans doute comprendrez-vous que chaque euro présent dans une poche où il ne devrait pas être contribue à priver un autre assuré des droits auxquels il pourrait prétendre.

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Vous voulez lutter contre l'évasion fiscale ? Excellente nouvelle ! Chaque euro compte, en effet !

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Il convient de souligner néanmoins que le plus intéressant dans votre motion n'est pas tant ce qu'elle contient que ce qu'elle ne contient pas.

Vous omettez sciemment de mentionner que ce PLFSS, que vous dénoncez, comporte des mesures de justice sanitaire et sociale, à l'instar de la prise en charge des protections périodiques réutilisables et des préservatifs pour les jeunes de moins de 26 ans, ou de l'extension de l'attribution simplifiée de la complémentaire santé solidaire (C2S) aux bénéficiaires de certains minima sociaux.

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Vous omettez sciemment de mentionner que le PLFSS contient des mesures permettant de renforcer l'accès aux soins, à l'instar de la faculté nouvelle pour les pharmaciens de délivrer – sous conditions – certains antibiotiques,…

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Avec, dans les pharmacies, des cabines privées de téléconsultation fournies pas vos amis !

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…ou encore de la possibilité pour les services d'accès aux soins de proposer des réponses spécifiques en matière de psychiatrie.

Vous omettez sciemment de mentionner que le texte contient des mesures permettant de renforcer les politiques publiques en faveur des aidants, à l'instar de la création d'un droit rechargeable à l'allocation journalière du proche aidant, ou encore de la prolongation de l'expérimentation du relayage à domicile de longue durée.

Je vous épargnerai la liste exhaustive des avancées majeures du PLFSS – elles sont légion. Mais je ne manquerai pas de vous rappeler que s'opposer par posture à un budget et chercher à censurer systématiquement le Gouvernement qui vous le présente,…

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Ce n'est pas par posture ! Vous censurez systématiquement les parlementaires !

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…c'est aussi, ne vous en déplaise, faire barrage à ces mesures humanistes.

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En bref, cette ultime prestation dans le cadre du PLFSS est à la hauteur de toutes les précédentes : mention passable. Il est temps de vous reprendre d'ici à 2027, à peine d'exclusion. La route est manifestement encore longue et le temps vous est compté, collègues des oppositions.

Aujourd'hui, comme hier et comme demain, nul raccourci : vous échouerez à faire chuter le Gouvernement de Mme la Première ministre, à laquelle nous réaffirmons notre entier soutien et notre confiance renouvelée.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

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Nous voilà à nouveau réunis à la suite du 49.3 déclenché par la Première ministre, après un examen partiel du PLFSS martyrisé par les recours multiples au 49.3 et la menace constante de son déclenchement, qui empêchent les débats de se dérouler sereinement. Le texte en devient illisible voire incompréhensible, alors même qu'il engage toute la nation quant à son système de santé et qu'il y va de la solidarité nationale, donc de la protection et de la cohésion sociales.

Madame la Première ministre, vous avez dégainé un vingtième 49.3 vendredi dernier : vingtième passage en force, vingtième marque de mépris de la représentation nationale et donc des Français. Vous l'avez déclenché avant même que ne débutent le débat et la discussion générale sur la dernière lecture du texte. Ce n'est pas neutre : vous n'avez même pas voulu écouter une seule seconde les arguments des groupes politiques qui composent l'Assemblée nationale, l'assemblée du peuple.

Nous refusons de nous habituer à ces salves de 49.3 car nous considérons que vous faites un usage abusif de cet outil constitutionnel en le dévoyant de sa vocation d'origine. En plus d'être méprisante envers la démocratie représentative, vous avez, tout comme l'an dernier, profité des 49.3 pour retirer des amendements adoptés en commission ou, au contraire, ajouter des dispositions qui n'ont pas été discutées par le Parlement. Vous avez fait votre petit tri, votre petite cuisine à la sauce gouvernementale qui laisse un goût amer aux Français.

Ce passage en force, au mépris des parlementaires et donc des millions de Français qu'ils représentent, dissimule très mal les limites de votre politique, vos choix contestables, vos erreurs et votre absence de maîtrise comptable en matière de santé.

Pire encore, en recourant au 49.3, vous avez, vous, gouvernement d'Emmanuel Macron, supprimé un amendement important et de bon sens, pourtant adopté par les sénateurs du Rassemblement national, qui prévoyait la possibilité, pour les employeurs et les travailleurs indépendants ultramarins, de conclure avec les organismes de recouvrement des plans d'apurement de leurs dettes de cotisations et de contributions sociales. Cette suppression est inacceptable pour nos compatriotes d'outre-mer.

Grâce au 49.3, votre gouvernement a également réintroduit les dispositions prévoyant une contribution de l'Agirc-Arrco au titre de la solidarité financière du système de retraite ; la compensation intégrale par l'État des conséquences de l'adossement des régimes spéciaux fermés pour le régime général ; ainsi que les dispositions permettant au Gouvernement de geler les taux de la contribution tarifaire d'acheminement (CTA). Ces dispositions obèrent le pouvoir d'achat des Français.

En outre, le Gouvernement a supprimé l'extension aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de l'exonération patronale pour l'emploi des aides à domicile, dont bénéficient les centres intercommunaux d'action sociale ; l'exonération de cotisations patronales pour les entreprises de la filière vitivinicole ; ou encore l'extension aux employeurs publics du dispositif de réduction des cotisations patronales en contrepartie de la mise à disposition de salariés engagés en tant que sapeurs-pompiers volontaires – autant de mesures que nous avions soutenues car elles auraient renforcé nos entreprises, nos collectivités et le pouvoir d'achat des Français.

Enfin, grâce au 49.3, vous avez supprimé la création d'une somme forfaitaire versée à l'assurance maladie par les assurés n'honorant par un rendez-vous médical. Nous avions déposé un amendement en ce sens lors de la discussion de la proposition de loi dite Valletoux, afin de compenser ces désistements qui équivalent à l'activité à temps plein de 4 000 médecins chaque année.

Par ailleurs, la revalorisation des revenus et honoraires de tous les professionnels de santé par le biais des discussions conventionnelles, tout comme le prix du médicament, restent, semble-t-il, les variables d'ajustement de votre incapacité à établir un prévisionnel juste et réaliste.

Au-delà de ces suppressions, que nous déplorons – c'est-à-dire de vos mauvais choix au moment de la construction du PLFSS –, votre budget demeure financièrement déséquilibré. Tous les paramètres économiques qui ont permis de le bâtir sont erronés et totalement irréalistes par rapport aux données de croissance et d'inflation retenues par la Banque centrale européenne (BCE) et la majorité des économistes français.

En définitive, le budget retenu dans la version finale du texte ne tient pas compte de la majorité des observations votées par les parlementaires, députés comme sénateurs : vous vous asseyez sur le travail des parlementaires.

J'ajouterai qu'une partie des dépenses sont très mal ciblées : les grands enjeux de santé publique dans les territoires, comme la désertification médicale accélérée, la grave dégradation – voire la tiers-mondisation – de l'hôpital public ou le recul général des services de santé de proximité, ont été sous-estimés sinon oubliés. Nous déplorons l'absence de solutions pertinentes, adaptées, durables et donc efficaces aux crises dont les Français sont victimes.

En résumé, nous n'avons pas davantage confiance dans votre gouvernement que dans votre texte, car il manque de crédibilité et aggrave encore une dérive : la financiarisation de la santé. Ce PLFSS – comme le PLF et la plupart de vos textes – nous fait douter de votre sincérité, tout en étant convaincus de votre opacité.

Pour finir, le temps du bilan de cette séquence budgétaire est venu. Comme l'année dernière, elle aura été chaotique, car vous n'avez ni voulu ni su composer avec l'opposition. Se pose une question de fond, madame la Première ministre : combien de temps allez-vous encore gouverner sans la représentation nationale, c'est-à-dire gouverner sans les Français, voire contre leur volonté ?

À propos de la santé de nos compatriotes, vous êtes aveugle, déconnectée et sans vision. Malheureusement, vous êtes encore aux responsabilités, à la tête des destinées de la nation française. Aveugle, car à aucun moment vous ne vous remettez en cause, ne remettez en question votre politique ou n'acceptez de voir la réalité. Déconnectée, car votre budget est hors sol : il ne correspond pas aux besoins cruciaux et aux réalités des territoires. Il n'est pas à la hauteur des véritables enjeux de santé, de solidarité et de cohésion sociale. Sans vision, enfin, car vous ne fixez aucun cap à long terme : vous gérez péniblement, à la petite semaine, le budget de la sécurité sociale.

Les députés du Rassemblement national, premier groupe d'opposition à la Macronie, souhaitent sincèrement à la France un gouvernement qui soit doté à la fois d'une vision, d'un sérieux budgétaire et, surtout, d'un pragmatisme politique qui permettent d'apporter aux Français des solutions concrètes et durables aux difficultés qu'ils rencontrent au quotidien depuis trop longtemps.

J'en viens à présent à la motion de censure elle-même. Chers collègues de l'extrême gauche, vous aussi, à votre manière, vous dévoyez les outils institutionnels en les détournant de leur mission d'origine. Certes, comme vous, nous rejetons le projet de loi de financement de la sécurité sociale du Gouvernement, car, sur le fond, il n'est pas à la hauteur des enjeux et, sur la forme, il n'est pas acceptable, étant donné les 49.3 à répétition.

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Merci, monsieur le député d'extrême droite !

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Mais nous tenons toujours au débat car nous espérons faire entendre raison au Gouvernement.

Le systématisme avec lequel vous déposez des motions en tout genre est fatigant. Sur tous les textes, quasiment sans exception, vous défendez machinalement une motion de rejet préalable. Ce réflexe presque pavlovien dénature l'objet et l'objectif de ces motions. Vous les rendez, en définitive, inopérantes, donc inefficaces.

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Vous avez toujours voté pour avec nous. Il faudrait savoir !

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L'opposition, ce n'est pas cela ; ce n'est pas une caricature d'opposition.

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Vous êtes un très bon soutien de la Macronie !

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Vous reprenez les éléments de langage du Gouvernement !

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L'opposition, c'est le pouvoir de contrer efficacement les politiques de la majorité, au bénéfice et au service des Français qui nous ont fait confiance pour les défendre et les protéger des erreurs et des errements de cette majorité relative et du Gouvernement.

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Comme lorsque vous votez contre l'augmentation du Smic, par exemple !

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On ne vous a pas beaucoup vu dans l'hémicycle pendant la réforme des retraites !

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Votre acharnement dans l'erreur, votre volonté de « bordéliser » l'Assemblée nationale et votre sectarisme viscéral vous déshonorent ; ils vous desservent et desservent les Français.

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En déposant systématiquement une motion de rejet préalable sur chaque texte et une motion de censure après chaque 49.3, vous décrédibilisez et dévalorisez ces outils politiques que la Constitution confère à l'opposition, à l'instar du Gouvernement et de ses 49.3 frénétiques.

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Les outils politiques de l'opposition sont pourtant précieux. Les utiliser abusivement leur fait perdre de la valeur et de la force. Votre jeu politique est tellement lisible et votre stratégie tellement prévisible, que votre posture devient risible. Votre jeu stérile fait, à n'en pas douter, le bonheur d'Emmanuel Macron, pour qui vous avez d'ailleurs appelé à voter au second tour de l'élection présidentielle !

Au demeurant, vous ne pouvez pas, dans le même temps, vous plaindre du manque de débats dû aux multiples 49.3 et chercher à les écourter dès que l'occasion se présente, en déposant une motion de rejet préalable sur la plupart des textes que notre assemblée examine.

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Ni motion de censure ni motion de rejet préalable : on ne peut donc rien faire !

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Nous sommes d'accord sur le fond, c'est-à-dire le rejet du PLFSS et le refus des 49.3 en pagaille, mais nous ne sommes franchement pas d'accord sur la forme. C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas, cette fois, pour votre motion de censure.

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Il est dans le « en même temps ». Quand on vous dit que c'est un macroniste !

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Nous en avons, quant à nous, déposé une au début du tunnel budgétaire, mais vous ne l'avez pas votée. Vous n'avez pas voté pour la seule motion de censure qui avait une chance de faire tomber le Gouvernement ! C'est pourtant une absolue nécessité. Nous ne voulons pas altérer nos chances de censurer la politique d'Emmanuel Macron, car les Français nous le demandent. Nous avons un devoir d'efficacité dans notre travail d'opposition.

En cohérence, nous refusons tous les abus : abus du 49.3 par la Macronie, abus des motions systématiques et en tout genre par l'extrême gauche.

La demande du groupe Rassemblement national est simple : respectez les institutions, respectez la représentation nationale, respectez la démocratie ; en somme, respectez les Français !

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Élisabeth Borne, Première ministre

Nous étions le 6 juillet 2022 ; la session parlementaire avait un jour et, déjà, les mêmes députés déposaient une motion de censure. Le ton était donné. Peu importe ce que le Gouvernement dit ou fait, peu importent les résultats obtenus ou les investissements réalisés, peu importe la demande que nous ont faite les Français de construire ensemble : la censure serait le cap et le plus petit dénominateur commun de la NUPES.

Bien sûr, les motifs et les styles diffèrent. Certains agissent avec une outrance méthodique,…

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Élisabeth Borne, Première ministre

…dans le seul but de plonger le pays dans l'instabilité. Ils espèrent tirer profit du chaos mais ne voient pas qu'à l'autre extrémité de l'hémicycle, le Rassemblement national les regarde avec reconnaissance se discréditer un peu plus auprès des Français à chaque injure. D'autres, je le sais, ne partagent pas cette stratégie du pire. Ils sont les prisonniers d'une alliance baroque qu'ils croient être leur seule planche de salut électoral.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

J'observe, à l'occasion de cette motion de censure, le retour de ceux qui avaient, pendant quelques semaines, refusé de mêler leurs signatures à celles de La France insoumise. Ils en faisaient un acte de résistance ; j'ai voulu y voir un acte de cohérence. J'avais tort.

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Essayez donc d'avoir un gouvernement cohérent !

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Il faut dire que le tempo de ce retour interroge : en fin de semaine dernière, un député insoumis s'en est pris violemment à plusieurs de ses collègues et, dans un énième débordement, Jean-Luc Mélenchon a parlé de la « volonté génocidaire » d'Israël.

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Élisabeth Borne, Première ministre

Comme quoi, certaines indignations sont de courte durée.

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Élisabeth Borne, Première ministre

Certaines convictions pèsent peu face à la peur des représailles insoumises.

En réalité, cette motion de censure n'est que la devanture factice d'une NUPES divisée politiquement,…

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Élisabeth Borne, Première ministre

…dispersée électoralement, écartelée idéologiquement.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Le constat est simple : vous avez galvaudé les motions de censure.

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Élisabeth Borne, Première ministre

Elles ne sont plus que le camouflage grossier de vos divisions.

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Et dans les hôpitaux publics, comment ça va ? Cela va leur apporter de l'amoxicilline pédiatrique ?

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Élisabeth Borne, Première ministre

Mais vous ne dupez personne, mesdames, messieurs les députés censeurs.

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Élisabeth Borne, Première ministre

« La NUPES est morte », a déclaré le leader de La France insoumise, jeudi dernier.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

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Élisabeth Borne, Première ministre

La NUPES, c'est finalement lui qui en parle le mieux.

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On n'est pas là pour écouter vos commentaires politiques sur la NUPES. C'est la motion de censure qui nous intéresse !

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Élisabeth Borne, Première ministre

Alors, je le dis aux députés de la gauche républicaine : n'ayez pas peur d'assumer vos convictions !

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Élisabeth Borne, Première ministre

N'ayez pas peur de porter une opposition ferme mais constructive ! En somme, n'ayez pas peur de la liberté !

En attendant, nous voici réunis pour l'examen de la vingt-huitième motion de censure déposée depuis dix-huit mois.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Au cours de cette séance, comme au cours des précédentes, j'ai entendu les mêmes orateurs parler dans les mêmes termes et se livrer aux mêmes caricatures.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Je vous ai entendus comparer ces débats à du théâtre, à du cinéma. J'y vois un aveu saisissant : vous n'y croyez pas vous-mêmes. Vous savez que le Gouvernement respecte la lettre et l'esprit de la Constitution. Vous savez que la France a besoin d'un budget. Vous savez que ces 49.3 s'imposent.

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Et vous, vous savez qu'il n'y a plus d'amoxicilline dans les pharmacies ?

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Élisabeth Borne, Première ministre

Mais vous faites semblant : vous jouez les indignés. Vous dites regretter le manque de débat mais vous déposez systématiquement une motion de rejet préalable…

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Pour pouvoir retravailler les textes, déposer des amendements, faire des propositions !

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Élisabeth Borne, Première ministre

…qui aurait précisément pour effet de mettre immédiatement fin au débat. Quelle hypocrisie !

À chacune de vos interventions, vous rappelez que le Gouvernement n'a pas de majorité absolue. C'est un fait incontestable ; personne ne le nie. Mais voici un autre fait : vous n'avez pas non plus de majorité, ni absolue, ni relative, ni alternative.

Vous nous reprochez d'avoir employé le 49.3 sur six projets de loi depuis juin 2022. Il s'agissait uniquement de textes financiers. Cela n'a rien d'étonnant, car le 49.3 a précisément été conçu pour que le pays puisse être gouverné, même en l'absence de majorité absolue au Parlement. Ce qui est notable, en réalité – je parle de la réalité et non du monde parallèle sur lequel vous discourez, mesdames, messieurs les orateurs de la NUPES –, ce qui est notable, en réalité, disais-je, c'est que 54 des 58 textes définitivement adoptés, soit plus de 90 % d'entre eux, l'ont été en forgeant des majorités avec les groupes d'opposition.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Ce qui est notable, c'est que les réformes et les textes sont adoptés grâce au dialogue et à la coconstruction.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Un jour, les oppositions de l'arc républicain accepteront peut-être de travailler avec nous sur les textes budgétaires, comme elles le font sur les autres textes. Je l'espère et nous y sommes toujours prêts. En attendant, avec la majorité,…

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

…avec mon Gouvernement, nous avançons, nous prenons nos responsabilités.

Mesdames et messieurs les députés, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 est un texte de progrès social. Nous l'avons enrichi grâce à la discussion parlementaire…

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

…et à des amendements de la majorité comme des oppositions, de l'Assemblée nationale comme du Sénat.

Ce texte, ce sont des investissements massifs et un budget de 640 milliards d'euros pour notre sécurité sociale. Ce texte, ce sont des avancées concrètes, attendues. C'est une hausse des dépenses d'assurance maladie supérieure à l'inflation, pour continuer à moderniser notre système de santé et mieux rémunérer les soignants. C'est le renforcement de la politique de prévention et un meilleur accès aux médicaments du quotidien. Ce sont des mesures fortes pour lutter contre la fraude sociale. Ce sont 6 000 postes supplémentaires en Ehpad l'année prochaine. Ce sont 7 000 nouvelles solutions d'accompagnement pour les personnes en situation de handicap. C'est une amélioration de la retraite des indépendants. Ce sont des places d'accueil supplémentaires pour les jeunes enfants et des rémunérations en hausse pour les femmes et les hommes qui travaillent dans le secteur de la petite enfance.

Pouvons-nous en priver les Français ? La réponse est non. Avec la majorité et mon gouvernement, nous agissons. Je suis fière de défendre un texte qui enrichit et consolide notre modèle social !

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.

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La discussion est close.

Je vais maintenant mettre aux voix la motion de censure déposée par Mme Mathilde Panot, M. André Chassaigne, Mme Cyrielle Chatelain, M. Boris Vallaud et 143 de leurs collègues.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je rappelle que seuls les députés favorables à la motion de censure participent au scrutin, et que le vote se déroule dans les salles voisines de l'hémicycle.

Le scrutin va être ouvert pour vingt minutes : il sera donc clos à douze heures trente.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à douze heures trente.

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La séance est reprise.

Voici le résultat du scrutin :

Majorité requise pour l'adoption de la motion de censure, soit la majorité absolue des membres composant l'Assemblée 289

Pour l'adoption 108

La majorité requise n'étant pas atteinte, la motion de censure n'est pas adoptée.

En conséquence, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 est considéré comme adopté en lecture définitive.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Yes !

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Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Discussion de la proposition de résolution visant à défendre les démocraties face aux multiples menaces et tentatives de déstabilisation ;

Discussion de la proposition de loi visant à adopter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels ;

Discussion de la proposition de loi relative au contentieux du stationnement payant ;

Discussion de la proposition de loi visant à lutter contre les discriminations par la pratique de tests individuels et statistiques ;

Discussion de la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue ;

Discussion de la proposition de loi visant à soutenir l'engagement bénévole et à simplifier la vie associative.

La séance est levée.

La séance est levée à douze heures trente-cinq.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra