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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures.

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L'ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

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La parole est à M. Guillaume Gouffier Valente, pour exposer sa question, n° 759, relative à l'aide publique au développement.

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La loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales a été adoptée quasiment à l'unanimité par le Parlement et promulguée le 4 août 2021. Ce texte, qui porte sur la période 2021-2025, a permis à notre pays d'adopter une trajectoire budgétaire ambitieuse et fixé pour l'aide publique au développement (APD) un objectif de 0,7 % du revenu national brut (RNB) en 2025. Cette loi nous a aussi permis de réagir rapidement et efficacement face aux crises. Grâce à notre philosophie de l'action publique et à cette dynamique, nous avons été à l'initiative de la réponse mondiale à la crise du covid et permis au monde et à nos concitoyens d'être protégés par des vaccins.

Aujourd'hui, de nombreux discours remettent en cause notre aide publique au développement et laissent penser que nos concitoyens n'y sont pas attachés. Je pense, au contraire, que les Françaises et les Français tiennent à cette politique et à la vision selon laquelle l'objectif de l'APD est de protéger les populations vulnérables et, à travers elles, la population de notre pays. Dans cette vision, le rôle de la France est d'agir efficacement, en s'appuyant sur des moyens et des objectifs clairs, pour défendre sa vision du monde.

Le monde n'est au fond qu'un petit village : ce qui se passe à des milliers de kilomètres a un impact direct sur nos vies. C'est la raison pour laquelle nous devons poursuivre nos efforts et renforcer notre politique d'aide publique au développement, et encore plus aujourd'hui, alors que des crises éclatent partout sur la planète, s'enchevêtrant les unes aux autres : aux crises sanitaires et alimentaires s'ajoutent des crises environnementales, des guerres, des conflits et des crises économiques. Face à ces phénomènes qui conduisent des milliers de personnes à se déplacer et des dizaines de pays à s'adapter, nous sommes toutes et tous directement concernés et touchés. L'aide publique au développement relève donc du périmètre régalien des politiques publiques. Elle concerne aussi bien l'action multilatérale que l'aide bilatérale de la France et vise à répondre avec efficacité aux crises et aux urgences du monde.

Nous le savons, la période budgétaire compliquée que nous traversons depuis plusieurs mois nous a obligés à faire des choix douloureux. C'est dans ce cadre que la décision a été prise de réduire de près de 900 millions d'euros le budget de l'APD cette année. Ma question est triple. Quels sont les programmes budgétaires concernés par les coupes budgétaires ? Comment pourrons-nous reprendre le plus rapidement possible la dynamique d'augmentation de notre APD ? À partir de l'évaluation de la loi de programmation de 2021, qui s'achèvera à la fin de l'année, quel cadre pluriannuel est-il envisagé pour sécuriser notre politique d'aide publique au développement ?

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La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du développement et des partenariats internationaux.

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Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement et des partenariats internationaux

Je vous remercie d'avoir reconnu l'action forte et constante du Président de la République et du Gouvernement en matière d'aide publique au développement. Le bilan de cette politique depuis 2017 est sans précédent : l'aide publique au développement de la France a augmenté de 50 % et son budget a doublé. La France figure aujourd'hui parmi les premières puissances solidaires. La représentation nationale a contribué à cette évolution en adoptant la belle loi de solidarité du 4 août 2021.

Vous avez raison de rappeler que cette politique est au service de nos concitoyens : elle sert leurs intérêts politiques, stratégiques et économiques ; elle les protège dans un monde interdépendant où un virus à l'autre bout du monde peut bouleverser leur vie, un monde dans lequel des tonnes de CO2 émises de l'autre côté de la planète contribuent à déclencher les feux de forêts qui dévastent nos territoires.

Alors oui, notre politique de développement contribue cette année à l'effort collectif de maîtrise des dépenses publiques. Une coupe budgétaire de 742 millions d'euros est prévue, dont 540 millions sur les crédits du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, Stéphane Séjourné, et moi-même sommes personnellement mobilisés pour préserver nos engagements, et nous continuerons de nous battre pour protéger les subventions françaises au bénéfice des populations les plus vulnérables, pour sanctuariser notre aide bilatérale, plus visible, et pour maintenir nos engagements humanitaires, qui font l'honneur de notre pays de Kiev à Gaza, de Khartoum à Port-au-Prince. Le Gouvernement maintiendra son engagement au service de la solidarité internationale, dans l'esprit de la loi de 2021. Le rapport sur sa mise en œuvre, qui sera rendu public dans les prochains jours, nous permettra d'examiner ensemble les moyens de renforcer l'efficacité de cette politique dans un contexte budgétaire contraint.

Mais ne nous focalisons pas uniquement sur la programmation budgétaire, car les besoins vont bien au-delà. Il faudrait 4 000 milliards par an pour assurer une vie digne à tous sur la planète. Or l'APD mondiale représente 200 milliards. Nous avons besoin d'une réforme ambitieuse du système financier international. Banque mondiale, Fonds monétaire international (FMI), dette, fiscalité internationale, secteur privé : tous les leviers doivent être mobilisés, dans l'esprit du Pacte de Paris pour les peuples et la planète, défendu par la France au niveau international et désormais soutenu par cinquante-quatre États.

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Je partage votre opinion selon laquelle, parallèlement à notre action dans le cadre de la loi de programmation, nous devons travailler à la rénovation du système de financement international. Je profite de la présence du ministre délégué chargé des comptes publics, Thomas Cazenave, pour lancer tout de même un appel : dans la continuité de la politique que nous menons depuis 2017, et au même titre que le ministère des armées, le ministère de l'intérieur et des outre-mer et le ministère de la justice, l'aide publique au développement doit être relancée et sécurisée dans le cadre d'une nouvelle loi de programmation pour les sept prochaines années.

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La parole est à Mme Caroline Parmentier, pour exposer sa question, n° 762, relative aux bateliers du Nord et du Pas-de-Calais.

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J'appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les inondations de novembre 2023 et janvier 2024, qui ont gravement touché et touchent toujours les bateliers du Nord et du Pas-de-Calais, en particulier à Béthune, dans ma circonscription. Selon les données récentes, les catastrophes naturelles ont entraîné des pertes d'exploitation massives pour la profession et eu un impact économique considérable sur leur chiffre d'affaires, qui a parfois baissé de plus de 50 %. Certains bateliers sont restés sans revenu pendant plus d'un mois, et ce à deux reprises. Leur trésorerie était à zéro, et la pérennité de leur activité directement menacée. Les témoignages affluent : ils perdent des contrats et leur chiffre d'affaires est durement touché, parfois de plusieurs dizaines de milliers d'euros. Plusieurs sociétés, inquiètes des aléas des voies fluviales, se tournent désormais vers le transport ferroviaire ou routier.

Nous ne pouvons accepter que des catastrophes naturelles mettent en péril la pérennité de toute une profession. Si le décret du 7 février 2024 portant création d'une aide pour les entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques résultant des inondations dans le Nord et le Pas-de-Calais en novembre 2023 et janvier 2024, complété par le décret du 2 avril 2024 abaissant le seuil d'éligibilité à 30 % de perte de chiffre d'affaires, a permis de débloquer des aides, elles sont insuffisantes pour répondre à l'ampleur des dommages subis.

Je ne suis pas la seule à vous alerter sur ce grave problème : quelle que soit leur sensibilité, les élus des deux départements sont inquiets. Pour soutenir la profession, nous savons qu'il existe des solutions, des mesures concrètes à la hauteur de la situation. Un plan d'urgence prévoyant une compensation financière substantielle, couvrant l'intégralité des pertes de chiffre d'affaires, assorti d'exonérations fiscales temporaires et d'un rééchelonnement des dettes, serait souhaitable pour permettre aux professionnels de faire face. Quelles actions supplémentaires le Gouvernement envisage-t-il pour soutenir durablement les professionnels durement touchés ?

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

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Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Vous appelez mon attention sur la situation des bateliers dans un contexte exceptionnel de crise lié aux épisodes de crue longs et répétés qui ont touché les habitants et les entreprises du Pas-de-Calais et du Nord. L'État a mis en œuvre d'importants dispositifs pour venir en aide, le plus rapidement possible, aux entreprises les plus fragiles – vous venez de le rappeler. Après le premier épisode de novembre 2023, le Gouvernement a instauré des aides transversales pour les entreprises relevant du plan de continuité de l'activité (PCA). Pour les bateaux bloqués sur la liaison à grand gabarit de l'écluse de Cuinchy, à Dunkerque, et sur la Lys, le remboursement des péages fluviaux acquittés auprès de Voies navigables de France (VNF) a également été décidé pour les épisodes de crue de novembre 2023 et janvier 2024. Trente-quatre entreprises ont déjà bénéficié du dispositif.

Le 7 février, le Gouvernement a publié un décret portant création d'une aide pour les entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques résultant des inondations dans le Nord et le Pas-de-Calais en novembre 2023 et janvier 2024. Ce dispositif, destiné aux bateaux concernés par le remboursement de leurs péages par VNF, prévoyait une aide pouvant aller jusqu'à 5 000 euros pour les petites entreprises réalisant leurs déclarations fiscales en France. Pour répondre aux difficultés spécifiques des bateliers, un nouveau décret est venu modifier, en mars, le plafond de cette aide pour le porter à 20 000 euros. Une nouvelle évolution du dispositif est examinée pour permettre de déclencher l'aide à partir d'une perte de chiffre d'affaires de 30 %, contre 50 % actuellement, en référence à la même période un an auparavant.

Plus largement, cette crise majeure liée aux effets du réchauffement climatique nous oblige à revoir la couverture de ce type de risque par les acteurs, VNF ne disposant pas des moyens juridiques et financiers permettant d'assurer les professionnels dans le cadre de catastrophes naturelles. Rappelons que nos voisins de Flandre, de Wallonie et des Pays-Bas n'indemnisent pas les entreprises en cas de crue induisant des arrêts de navigation. J'attache, comme vous, une importance particulière à la résilience de nos entreprises fluviales, compte tenu, notamment, de l'importance de ce secteur pour la décarbonation de l'économie.

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Nos bateliers attendent des aides substantielles et je serai très attentive, mois après mois, à l'action du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

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La parole est à M. Alexandre Vincendet, pour exposer sa question, n° 738, relative à l'entreprise Cotelle de Rillieux-la-Pape.

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La France va perdre son unique et dernier lieu de production d'eau de Javel. En effet, la direction de l'entreprise Cotelle, filiale du groupe Colgate-Palmolive, a annoncé fin janvier la fermeture de l'unique site français de fabrication et de conditionnement de l'eau de Javel La Croix.

Implantée depuis le début du XXe siècle dans ma circonscription, à Rillieux-la-Pape, l'entreprise Cotelle emploie aujourd'hui 104 salariés sur ce site de production. La fin de cette activité aura, bien sûr, un effet sur le territoire, mais également sur une centaine de familles. Un plan de sauvegarde a été présenté cette semaine aux salariés, mais, pour le moment, aucun élément n'a été communiqué. Par ailleurs, aucune information sur un plan de reclassement ou de reconversion du site n'est parvenue au maire de Rillieux-la-Pape ou à moi-même, lors de l'annonce de la fermeture du site. Nous savons pourtant que deux repreneurs se sont manifestés.

Je connais votre engagement en faveur de l'industrie française et de nos emplois, monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics. L'Insee vient d'ailleurs de publier les chiffres du chômage pour le quatrième trimestre 2023 : son taux est demeuré stable puisqu'il représente 7,5 % de la population active pour cette période.

À l'annonce de la fermeture de ce site de production de l'entreprise Cotelle, j'ai, par un courrier en date du 6 février 2024, tenu à informer directement Bruno Le Maire des inquiétudes légitimes des salariés et de leurs familles. Le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a-t-il été informé, par avance, par le groupe Colgate-Palmolive, de la fermeture du site de Rillieux-la-Pape ? A-t-il connaissance d'éventuels repreneurs et s'est-il assuré de leur sérieux ? Pouvez-vous m'assurer que l'État sera aux côtés des 104 salariés et les aidera à sauvegarder leur emploi ou à se reconvertir ?

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

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Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Le Gouvernement et les services de l'État se sont pleinement mobilisés sur ce dossier dès l'annonce du projet de fermeture du site de l'entreprise Cotelle à Rillieux-la-Pape, dans votre circonscription, entreprise appartenant au groupe Colgate-Palmolive.

Vous avez pu vous entretenir, le 12 mars, avec les équipes de Roland Lescure ainsi qu'avec la délégation interministérielle aux restructurations d'entreprise. Nous connaissons votre implication et votre mobilisation dans ce dossier.

Le groupe estime que la baisse très importante de la consommation d'eau de Javel et l'obsolescence du site de production justifient de fermer ce dernier et de relocaliser ses activités sur un autre site, dans la Meuse, et en Belgique.

Le 2 mai, après plusieurs semaines de négociations, un accord sur le plan de sauvegarde de l'emploi – vous l'avez évoqué – contenant des mesures de reclassement ainsi que d'accompagnement des salariés a été signé avec les organisations syndicales. Il devrait être bientôt validé par la Dreets – direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités – d'Auvergne-Rhône-Alpes.

L'entreprise a, en parallèle, missionné un cabinet spécialisé pour rechercher un repreneur. Des repreneurs potentiels ont déjà fait connaître leur intérêt, et des visites du site ont eu lieu, ou auront lieu bientôt.

Ces mesures ont été rendues possibles par l'action constante des services de l'État, au niveau national comme au niveau local.

Dans les semaines à venir, nous prêterons attention à la mise en œuvre de ce plan de sauvegarde de l'emploi, au reclassement et à la reconversion des salariés de cette usine ainsi qu'à la poursuite de la recherche d'un repreneur. Il en ira de même au sujet de la future convention de revitalisation des territoires, à laquelle l'entreprise sera prochainement assujettie. Je crois qu'il s'agit d'une disposition très importante. Sachez que l'ensemble des acteurs du territoire, dont vous faites partie, seront naturellement associés à cette démarche par la préfète du Rhône.

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Je vous remercie, monsieur le ministre délégué, de ces éléments de réponse.

Il est essentiel que nous puissions nous battre pour ces 104 familles et ces 104 salariés. La décision prise par le groupe Colgate-Palmolive, en dépit de ce qui a été communiqué, est en effet inepte : ce site était encore bénéficiaire dans sa production. Cette décision, purement économique, a été prise de très loin. J'ai pu voir sur le site, où je me suis rendu, des salariés très inquiets, malgré les possibilités de reclassement. On peut comprendre, tant l'ancienneté de certains d'entre eux est importante – avec parfois plus de trente ans dans l'entreprise –, qu'ils s'inquiètent de la perte de leur emploi.

Je vous remercie donc pour votre mobilisation. Il est important que nous puissions trouver des solutions, et accompagner un potentiel repreneur.

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La parole est à Mme Alma Dufour, pour exposer sa question, n° 742, relative à la filière automobile française.

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Ma question porte sur l'ensemble du secteur automobile. On vend souvent, à la télévision, le mirage de Dunkerque. Mais la réalité du secteur automobile français, vous le savez, est bien plus sombre.

Seulement 23 % des véhicules achetés en France sont fabriqués sur notre territoire, contre 56 % en 2003. Notre balance commerciale est clairement déficitaire dans ce secteur d'activité, et le nombre d'emplois y est passé de 300 000, en 2000, à 190 000, aujourd'hui. Les syndicats estiment que plus de 100 000 emplois pourraient encore disparaître d'ici dix ans, si vous ne changez pas de politique.

Le virage vers l'électrique est présenté comme une chance de nous réindustrialiser, et nous saluons le conditionnement du bonus écologique à un score CO2. Mais, sur ce sujet comme sur tant d'autres, le Gouvernement fait du « en même temps ». Vous cherchez à encourager la production en France, mais vous pénalisez en même temps la consommation de véhicules français.

Les ZFE (zone à faibles émissions), sans encadrement du prix des véhicules, ont été une aubaine pour les constructeurs qui ont augmenté leurs tarifs et se sont enrichis, comme jamais auparavant, sur les aides publiques. Le prix de la Dacia Spring de Renault a, par exemple, augmenté de 3 810 euros entre 2021 et 2023. Il a ensuite chuté de 2 400 euros après l'arrêt du bonus écologique, ce qui démontre la prédation à laquelle se livrent les constructeurs et au sujet de laquelle je vous avais alerté pendant toute l'année 2023.

En 2024, l'augmentation des prix pratiquée par les constructeurs, la limitation des aides publiques et l'exclusion de certains véhicules du bonus écologique, sans encadrement des prix, ont fait augmenter le reste à charge de 3 000 euros en moyenne, pour un consommateur français désireux d'acquérir un véhicule électrique.

L'arrêt brutal du leasing social, un à deux mois après sa mise en place, décourage définitivement les classes populaires d'accéder à un véhicule électrique.

Vendus trop cher, les véhicules électriques made in France trouvent peu de clients. En conséquence, les usines Renault de Cléon ou de Douai sont régulièrement au chômage partiel. Il y a quinze ans, le parking des salariés de l'usine de Cléon, dans ma circonscription, était rempli des véhicules qu'ils produisaient. Aujourd'hui, ces salariés ne peuvent plus se payer que la Dacia qui concurrence leur propre emploi. Voici le résultat de vingt ans de course à la compétitivité : des salariés obligés de creuser leur propre tombe.

Mais le pire est que les marges explosent dans le secteur : elles ont augmenté de 7 % pour Renault, tandis que Stellantis a réalisé en 2023 18 milliards de bénéfices, devenant le numéro 2 du CAC40. Pourtant Renault supprime 1 700 emplois en un an et va produire la Legend en Chine et en Slovénie ; on apprend que Stellantis va produire la C3 en Slovaquie, elle qui vient d'annoncer la mise à mort du dernier site de production automobile de Seine-Saint-Denis, celui de son sous-traitant MA France, qui employait 400 personnes.

Les conditions des salariés restant dans le secteur ne sont guère vivables. Les ouvriers commencent à peine au-dessus du Smic, pour faire les trois-huit. Les licenciements pour troubles musculo-squelettiques se multiplient.

Ma question est simple : avez-vous l'intention de continuer encore longtemps à arroser le secteur automobile d'argent public, sans demander de contrepartie sur la baisse du prix des véhicules made in France, sur la création d'emplois en France et sur des rémunérations décentes pour les salariés français ?

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

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Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Vous savez que la France a renforcé l'ambition environnementale du bonus écologique et a lancé – vous l'avez évoqué – le leasing social, avec une voiture électrique à 100 euros par mois pour les ménages les plus modestes.

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Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Ces aides contribuent à démocratiser les véhicules propres et à réduire l'écart de prix avec les véhicules thermiques : c'est l'enjeu auquel nous devons faire face. Une baisse de prix des véhicules électriques a d'ailleurs été constatée en 2024, encouragée par l'arrivée sur le marché de véhicules plus accessibles, produits en France, ainsi que par le développement d'un marché de l'occasion et par des solutions comme le rétrofit de véhicules thermiques, que nous continuons à encourager.

Après des années difficiles, liées à une succession de crises et à un marché de l'automobile en berne, la bonne santé financière retrouvée des deux constructeurs français historiques, Renault et Stellantis, mais aussi la production record de l'usine Toyota d'Onnaing, permettent à la filière d'investir en France et d'envisager sereinement l'électrification de la production. Les annonces de Renault autour du pôle ElectriCity à Douai ou l'engagement pris par Stellantis de produire plus de douze modèles en France témoignent de cette capacité d'investissement mais aussi de l'attractivité et de la compétitivité de la France en matière de production de véhicules. Ces nouvelles perspectives auront des retombées concrètes pour le site de Cléon, par exemple, qui doit produire plus d'un demi-million de moteurs électriques, ou pour le site de Douai, que vous avez cité, qui doit accueillir la production de nouveaux modèles, dont la nouvelle R5, attendue pour la fin de l'année 2024 et dont le prix de départ, hors bonus, devrait être inférieur à 25 000 euros.

Nous pouvons nous réjouir de ces investissements et de l'adoption, aussi rapide que possible, du véhicule électrique, alors que la filière, comme les citoyens, doivent prendre un virage important vers la décarbonisation de l'industrie et celle des déplacements du quotidien.

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Ce qui est agaçant, avec ce Gouvernement, c'est que vous répondez à côté.

Vous avez arrêté le leasing social au bout de deux mois, sans jamais prévenir les consommateurs français que l'enveloppe était limitée dans le temps. Les gens se sont rués dessus parce qu'ils en ont besoin, notamment dans les ZFE, et vous avez brutalement mis fin à cette politique. Ce n'est pas acceptable.

Vous dites ensuite que le prix des véhicules électriques baisse ; mais c'est parce que vous faites référence au prix de ceux qui sont fabriqués à l'étranger. C'est de cela que je vous parle : comment faire pour que baisse le prix des véhicules made in France, notamment par Stellantis ? Je veux bien attendre la Renault R5, mais je doute fortement qu'elle soit prête en 2025. Et où son moteur sera-t-il fabriqué ? En France ? Sera-t-elle assemblée en Slovénie ? Nous n'avons aucune garantie, ni chez Renault ni chez Stellantis, que les véhicules abordables pour les classes moyennes et les classes populaires seront fabriqués en France.

Vous pouvez faire des véhicules haut de gamme dans les usines françaises, mais ils ne se vendent pas, et les salariés se retrouvent en conséquence au chômage partiel. Et ce chômage partiel sera utilisé par les entreprises pour fermer des sites au prétexte qu'ils ne sont pas productifs. Je le répète : Stellantis vient de supprimer 400 emplois, en Seine-Saint-Denis, chez son sous-traitant MA France. Voilà la réalité : quels sont les engagements des constructeurs en termes d'emplois en France ?

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La parole est à Mme Brigitte Liso, pour exposer sa question, n° 753, relative aux attributions de compensation.

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Plusieurs maires de ma circonscription m'ont alertée au sujet des attributions de compensation.

Elles ont été décidées en 2001 pour compenser l'ancienne taxe professionnelle, sur la base d'une photographie de la situation d'alors. Le paysage économique, dans toutes nos circonscriptions, est mouvant : certaines communes ont ainsi vu des entreprises fermer, quand d'autres, au contraire, ont accueilli avec bienveillance des créations ou des reprises d'entreprise. Mais les attributions de compensation n'en ont pas été changées pour autant.

Si cela relève certes de la compétence des EPCI – établissements publics de coopération intercommunale –, on constate que rien ne change car ces attributions de compensation doivent être votées à l'unanimité. Certaines communes se trouvent bien entendu favorisées, si elles ont perdu des sociétés, d'autres sont au contraire largement pénalisées. C'est le cas de la commune de Wambrechies. Si la compensation était calculée en fonction de sa situation actuelle, la ville aurait touché 1,9 millions l'année dernière, au lieu de 900 000.

Vous imaginez comment ce problème peut susciter des tensions. Il est très difficile de répondre à un maire dynamique, qui fait tout pour valoriser sa commune, et qui ne se sent pas récompensé.

Je souhaiterais savoir ce qui, selon vous, pourrait être fait pour ces maires courageux.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

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Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Les attributions de compensation visent à garantir la neutralité budgétaire des transferts de ressources entre les communes membres d'un EPCI, lorsque ce dernier applique le régime de la fiscalité professionnelle unique.

Au regard des difficultés que vous soulevez, la loi offre plusieurs possibilités de révision du montant des attributions de compensation. Une révision libre peut intervenir à tout moment. Une révision obligatoire peut avoir lieu, en cas de nouveaux transferts. Une révision unilatérale, pour trois ans, peut survenir en cas d'intégration d'une nouvelle commune à l'EPCI. Une révision individuelle, qui nécessite un accord entre l'EPCI et une majorité qualifiée de ses communes existe également, pour le cas où une partie des communes dispose d'un potentiel financier par habitant supérieur de plus de 20 % au potentiel financier moyen. Une révision unilatérale est également possible, en cas de perte de fiscalité professionnelle liée à une perte de base d'imposition, si, par exemple, une entreprise vient à fermer dans une commune.

Ce n'est donc qu'en cas de cause extérieure ou bien d'écart dûment justifié entre les communes que le législateur a pu vouloir que soit dérogé à la règle de l'unanimité, qui vise aussi à protéger les communes en cas de révision de ces reversements de fiscalité.

Le président de l'EPCI est toutefois tenu, depuis 2016, de présenter un rapport, donnant lieu à débat, sur l'évolution du montant des attributions de compensation au regard des dépenses liées à l'exercice de ses compétences par l'EPCI.

Une dotation de solidarité communautaire, enfin, prévue par le CGCT, le code général des collectivités territoriales, permet de réduire les disparités de ressources et de charges entre les communes membres. Cette dotation peut être révisée à tout moment.

J'ajoute que, si une politique d'accompagnement des entreprises, menée par certaines communes, bénéficie à l'attractivité de l'ensemble de l'intercommunalité, alors tous les contribuables en bénéficient également.

Les dispositifs actuels offrent donc déjà une grande latitude aux communes membres d'une intercommunalité pour s'entendre sur la manière de partager les recettes de la fiscalité économique. Pour ce qui est la difficulté particulière que vous évoquez, je me tiens à votre disposition et à celle des élus concernés pour voir quelle solution concrète nous pouvons trouver ensemble.

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Je vous remercie de votre réponse très dense, qui permet de faire voir comment il peut être difficile, pour une commune, de faire valoir ses droits. Je vous remercie également de votre proposition : il faut vraiment renvoyer l'ascenseur à ces maires valeureux et courageux.

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La parole est à M. Laurent Panifous, pour exposer sa question, n° 744, relative au modèle économique des Ehpad.

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Ma question traite de l'accompagnement des aînés et, plus précisément, du financement des Ehpad et de celui des établissements médico-sociaux en général.

Les scandales à répétition dans certains Ehpad et, en conséquence, la perte de confiance de nos concitoyens en ces structures ont abouti à une situation difficile. Je tiens à préciser que je n'oppose pas les statuts – public, associatif, privé –, et je crois que chacun peut contribuer par sa gouvernance spécifique à l'accompagnement de nos aînés.

Je vais rappeler quelques éléments de contexte avant d'en venir à ma question.

Tout d'abord, le coût des séjours a connu une forte hausse, depuis plusieurs années voire plusieurs dizaines d'années. Cette hausse est notamment due à l'évolution en termes de qualité et d'effectifs. Cela pose une première question, même si ce n'est pas celle du jour : qui paiera ce prix de séjour important pour les usagers ?

Que dire également de la financiarisation à outrance de ces groupes privés, essentiellement financés par des fonds de pension ? Il s'agit d'investissements étrangers, et l'actionnaire est totalement déconnecté des responsabilités inhérentes à la gestion de tels établissements, accueillant des personnes âgées dépendantes, et donc fragiles.

Enfin, je n'ai pas besoin de vous rappeler le déficit budgétaire important de l'État et des comptes de la sécurité sociale.

C'est pourquoi la défiscalisation immobilière des investissements en Ehpad me semble aujourd'hui injustifiée – a-t-elle d'ailleurs jamais été justifiée ?

Elle permet, par un effet d'aubaine, d'accéder au statut de loueur meublé non professionnel (LMNP) ou professionnel (LMP), les logements en Ehpad et dans d'autres établissements médico-sociaux étant considérés comme une habitation.

C'est d'ailleurs devenu le principal argument de certains groupes privés pour vendre les chambres des Ehpad à la découpe, ce qui génère une forme de spéculation et une augmentation artificielle de la valeur des murs de ces chambres, financées par l'argent public.

Il ne s'agit pas de remettre en cause la possibilité pour le secteur privé d'investir dans ces établissements mais, je le répète, un tel dispositif de défiscalisation est discutable du point de vue de l'intérêt général. J'ai d'ailleurs déposé une proposition de loi visant à mettre un terme à ce dispositif et souhaiterais disposer de votre avis.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Le Gouvernement a pris plusieurs mesures pour soutenir les Ehpad, qui sont au cœur de l'accompagnement du vieillissement de la population et du grand âge.

En 2023, nous avons créé un fonds d'urgence de 100 millions d'euros pour aider les établissements en difficulté et, en 2024, la campagne budgétaire a permis de relever les crédits dédiés aux établissements à hauteur de 12 milliards d'euros, soit 650 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2023 et près de 4 milliards d'euros supplémentaires par rapport à 2019. Vous le constatez, nous continuons à investir dans les Ehpad.

Mais l'apport d'investisseurs privés constitue une source de revenus complémentaire pour les Ehpad. Si elle peut effectivement conduire les établissements à augmenter les tarifs, l'impact sur les résidents est limité par deux mécanismes.

D'abord, les tarifs des hébergements sont soumis à un dispositif de plafonnement : chaque année, un arrêté définit le plafond d'évolution du socle des prestations d'hébergement. Les prix ne sont donc pas totalement libres.

Ensuite, les résidents en Ehpad bénéficient d'une réduction d'impôt à hauteur de 25 % de leurs dépenses liées à la dépendance et l'hébergement.

Nous ne souhaitons pas décourager l'investissement dans les Ehpad car nous avons besoin d'investisseurs privés qui accompagnent la construction et la rénovation d'établissements. Je rappelle que les dispositifs fiscaux s'appliquent à tout le secteur, et que nous avons grandement réduit leur portée dans le cadre de la loi de finances pour 2024.

Je comprends votre objectif – éviter de potentielles dérives, notamment en cas de reprise de l'établissement. C'est la raison pour laquelle, localement, et en lien avec les conseils départementaux, les tutelles sont très vigilantes. Elles s'assurent que les reprises et les investissements privés ne génèrent pas de telles dérives, préjudiciables aux résidents.

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Monsieur le ministre délégué, ma question portait uniquement sur la défiscalisation. Je ne remets pas en cause l'investissement privé, mais uniquement cette dernière. L'argent public n'a pas vocation à soutenir de telles acquisitions.

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La parole est à Mme Béatrice Piron, pour exposer sa question, n° 756, relative à la dotation globale de fonctionnement.

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Ma question concerne le calcul de la dotation globale de fonctionnement (DGF), censée refléter les dynamiques démographiques.

Ces dernières années, certaines communes observent une croissance démographique significative liée à l'accroissement du nombre de logements, indispensable compte tenu des difficultés à se loger.

Pourtant, la population effective est sous-évaluée dans le calcul de la dotation globale de fonctionnement, ou sa prise en compte très tardive – plusieurs communes de ma circonscription m'ont alertée.

Ainsi, à l'Étang-la-Ville, le recensement réalisé en 2023 a mis en lumière une importante croissance démographique, notamment liée à la livraison d'un programme immobilier conséquent, le Clos des Vignes.

Or, j'ai constaté avec surprise que la DGF perçue par la commune cette année ne tient pas compte de ces données, publiées par l'Insee il y a pourtant quelques mois. En effet, la DGF a été calculée sur la base de 4 870 habitants, alors que le recensement dénombre 5 157 habitants, une hausse significative de 6 %.

Le Clos des Vignes a été livré en 2020, marquant le début d'une nouvelle phase de développement pour la commune, le nombre d'enfants scolarisés ayant ainsi augmenté, entraînant l'embauche d'agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem) et de personnels périscolaires.

Le recensement mené de janvier à mars 2023 a confirmé les contours précis de cette croissance démographique. Or, l'Insee précise que ces chiffres, communiqués en janvier 2024, ne seront pris en compte qu'à partir du 1er janvier 2026.

Ces années de retard – six dans mon exemple – privent les municipalités de ressources financières qui devraient légitimement leur revenir. Serait-il envisageable d'améliorer les délais de prise en compte des données transmises par l'Insee ou de s'appuyer sur d'autres indicateurs pour que le calcul de la DGF soit davantage en phase avec les besoins des communes ? Il ne faudrait pas que de tels décalages soient un frein à la construction, en pleine crise du logement.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Le recensement de la population a été réformé par la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité. Les premières enquêtes de recensement suivant ce nouveau schéma ont été réalisées par les communes en 2004, et l'Insee a publié les premières données démographiques légales en 2008, à la fin du premier cycle quinquennal.

Depuis cette date, les données démographiques d'une commune sont actualisées chaque année. Elles peuvent ainsi être prises en compte dans le calcul de la DGF – il n'est plus nécessaire d'attendre les résultats du recensement général. On peut se féliciter de ce progrès.

Néanmoins, les informations collectées sont ramenées à une même date pour toutes les communes, afin d'assurer l'égalité de traitement entre elles et d'obtenir une bonne fiabilité des données. C'est l'année médiane du cycle des recensements qui est retenue. Il faut en effet éviter qu'une commune reçoive une dotation calculée sur des chiffres plus anciens, ou plus récents, qu'une autre, du simple fait de sa taille ou de la date du recensement. Cette modalité garantit l'équité de la répartition des concours de l'État, puisqu'elle confère aux dénombrements de population – critère essentiel de cette répartition – un maximum de fiabilité.

Enfin, le recensement de la population fait l'objet d'une évaluation permanente par la Commission nationale d'évaluation du recensement de la population (Cnerp), instance présidée par le sénateur Éric Kerrouche, chargée de la concertation entre les producteurs et les utilisateurs de la statistique publique. Sollicitée par différents élus concernant des situations proches de celle que vous avez décrite, cette commission a mis en place fin 2023 un groupe de travail sur l'avancement du calendrier de publication des résultats du recensement.

Nous pourrons faire un point à l'issue de ces travaux et évoquer ensemble les conséquences concrètes de ses conclusions pour les modalités de calcul de la DGF.

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Je vous remercie et constate que je ne suis pas la seule à avoir rencontré ce problème. Je vais me renseigner sur ce groupe de travail et j'attends de votre part un retour sur leurs propositions. Les communes en croissance démographique devraient connaître une progression plus rapide de leur DGF.

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La parole est à Mme Justine Gruet, pour exposer sa question, n° 748, relative à la grotte des Planches.

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En juin 2023, j'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt de la stratégie nationale du ministère chargé des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme pour une meilleure gestion des flux touristiques.

Je partage pleinement son ambition : faire découvrir des sites méconnus de notre patrimoine – moins fréquentés mais tout aussi intéressants – afin de répartir les visiteurs et de mieux protéger les sites surchargés et leur biodiversité.

Dans le Jura, et plus particulièrement dans la troisième circonscription où je suis élue, nous disposons de sites librement accessibles qui se démarquent par leur beauté naturelle.

Ce n'est malheureusement pas le cas de la grotte des Planches, fermée depuis 2011 et dont la réouverture est compliquée, les élus locaux craignant les effets négatifs sur la biodiversité et la quiétude des riverains.

Il est pourtant essentiel de ne pas priver les touristes locaux, nationaux et internationaux des atouts pédagogiques et patrimoniaux de ce site – sa singularité géologique est très apprécié des spéléologues.

La grotte fait l'objet d'un bail emphytéotique, qui arrive bientôt à échéance, au bénéfice des descendants du premier exploitant de ce site naturel. Des travaux de consolidation et de modernisation sont indispensables avant sa réouverture et, si les bénéficiaires du bail sont prêts à les engager sur leurs fonds propres pour sécuriser les lieux, la commune propriétaire n'est pas disposée à renouveler le bail pour permettre la reprise d'une activité touristique. Sachant que le terrain d'accès à la grotte appartient au locataire porteur du projet, on peut craindre que la situation se fige, rendant impossible l'accès à ce site remarquable.

J'ai un profond respect pour le rôle essentiel des élus communaux, mais je recherche une solution qui répondrait au subtil équilibre entre préservation de l'environnement et respect de la tranquillité des riverains, d'un côté, et développement d'une activité économique et touristique favorable au dynamisme du territoire, de l'autre.

Dans un site patrimonial naturel d'intérêt environnemental et pédagogique, comment concilier les différents objectifs et sortir de l'impasse ? Quel est le rôle de l'État dans la conservation et la protection des sites d'exception, notamment en lien avec la stratégie nationale publiée en juin dernier ? Quels sont les moyens d'action de l'État lorsque les communes ne souhaitent pas de développement touristique alors qu'elles disposent d'un site unique, dont elles privent le grand public ? Avez-vous des exemples de blocages similaires ?

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Vous m'interrogez sur la place de l'État dans la coordination des politiques publiques afin de concilier développement touristique, protection du patrimoine, préservation de l'environnement et bien-être des riverains.

Le représentant de l'État dans le département joue un rôle majeur. Il l'exerce toutefois dans le respect de la libre administration des collectivités territoriales, auxquelles il revient d'apprécier l'opportunité de développer un site comme celui de la grotte des Planches. Vous avez raison, il s'agit d'un site remarquable, en raison du caractère exceptionnel de la grotte et des cascades.

En l'espèce, le préfet du Jura suit avec une très grande attention les enjeux de sécurité soulevés par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), qui suit le dossier de ce site classé soumis à prescription dans le cadre d'un plan de prévention des risques. Il est également à l'écoute des élus locaux, qui font état de la forte augmentation de la fréquentation de ce site du fait de la récente hausse de sa notoriété.

En revanche, il ne revient pas à l'État de déterminer les modalités d'exploitation d'un site appartenant à une personne privée ou à une collectivité territoriale, qui garde la maîtrise des choix d'aménagement local.

Je confirme néanmoins que les services de l'État présents dans les départements appuient les acteurs locaux, en les aidant à identifier les solutions les plus propices à la conciliation des enjeux économiques, touristiques, patrimoniaux et environnementaux. J'inviterai le préfet de votre département à se rapprocher de vous pour faire un point détaillé sur la situation et les perspectives.

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Je vous remercie pour votre réponse, et je remercie également M. le préfet du Jura pour son implication sur le sujet. Il me paraît essentiel de favoriser la diversification des flux touristiques pour éviter une affluence trop importante en un point donné du site. L'ouverture d'un nouvel accès à la reculée des Planches permettrait de répartir les touristes et d'éviter qu'ils ne se concentrent dans les lieux stratégiques.

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La parole est à Mme Sandrine Le Feur, pour exposer sa question, n° 757, relative à la filière française de l'échalote.

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Bavette, sauce au beurre blanc, béarnaise : l'échalote traditionnelle sublime les plats emblématiques de la gastronomie. Pourtant, malgré sa notoriété, l'échalote française n'est pas protégée, et son nom est parfois usurpé. De pâles copies livrent une concurrence déloyale à l'échalote, au détriment de la filière mais aussi du consommateur, trompé par des dénominations mensongères. Des variétés de semis issues botaniquement de l'oignon sont commercialisées depuis quelques années sous l'appellation d'échalion, habile dénomination marketing, qui entretient la confusion.

Par ailleurs, des variétés d'oignon de semis de petit calibre sont aussi commercialisées sous la dénomination d'échalote. Il s'agit d'une manœuvre pour normaliser des variétés qui ne présentent pas les caractéristiques botaniques de l'échalote. À la différence de ces oignons, dont le semis est mécanisé, les échalotes de Bretagne sont cultivées de manière traditionnelle : c'est la plantation d'un bulbe qui donne naissance à plusieurs bulbes d'échalote. L'authenticité de l'échalote repose sur cette division bulbaire, qui n'existe pas chez l'oignon. Elle suppose également un savoir-faire unique : l'arrachage se pratique toujours à la main – un hectare mobilise 150 heures de main-d'œuvre. L'échalote est donc sensible à la concurrence de variétés qui nécessitent moins de main-d'œuvre.

L'échalote traditionnelle est un exemple de distorsion de concurrence. Cette distorsion, contre laquelle vous vous battez, existe même entre voisins européens. L'exemple de l'échalote n'a rien d'anecdotique : l'empreinte économique de cette culture est importante, notamment dans le Finistère. Pas moins de 250 producteurs et une quinzaine de sociétés de négoce et de multiplicateurs y participent à la culture de l'échalote, ce qui représente 1 200 emplois directs, de la plantation au conditionnement.

L'arrivée récente de la variété Innovator, conçue par un semencier néerlandais, fait peser un risque considérable sur la filière de l'échalote traditionnelle dans la mesure où cette nouvelle variété présente un potentiel de rendement et de rentabilité inédit. En violation totale des principes et critères du protocole de l'Office communautaire des variétés végétales (OCVV), agence communautaire assurant la protection des variétés végétales, les Pays-Bas se sont permis d'ajouter l'oignon Innovator à la section de leur catalogue national officiel des espèces et variétés de plantes cultivées recensant les variétés d'échalote. Comme les tests établissent sans ambiguïté que cette variété n'est autre qu'un oignon ne présentant pas la capacité de multiplication végétative d'une échalote, j'ai saisi la Commission européenne et sa direction générale de la santé et de la sécurité alimentaire : elles ont reconnu un dysfonctionnement des règles européennes et m'ont indiqué retirer le certificat d'obtention végétale à la variété Innovator, qui sera donc soumise à un nouvel examen technique.

Il conviendrait d'exiger que les instances d'examen de nos deux pays mènent une analyse conjointe. Cette clause existait dans le protocole européen jusqu'en 2009 : en cas de variété se situant dans la zone grise, un échange de matériel végétal entre les instances était prévu, et, en cas de désaccord, un tiers neutre était chargé de trancher.

Défendre l'échalote face à la concurrence déloyale des oignons de semis, c'est pérenniser les exploitations familiales, maintenir le potentiel de production des territoires, conserver l'emploi et préserver le revenu des exploitants. Monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, les fermes du Finistère comptent sur vous pour protéger l'échalote des imitations et faire respecter les protocoles européens.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Vous appelez l'attention du Gouvernement sur la menace qui pèse sur l'échalote traditionnelle cultivée en Bretagne, du fait, notamment, d'une concurrence néerlandaise que vous estimez déloyale. Le Gouvernement est pleinement engagé pour préserver la filière de l'échalote traditionnelle, filière dont les savoir-faire et la qualité sont reconnus et que vous défendez inlassablement.

Comme vous le soulignez avec justesse, depuis que des sélectionneurs des Pays-Bas ont développé des variétés d'échalote de semis, un différend les oppose aux producteurs français. Ce désaccord porte sur la distinction botanique entre oignons et échalotes. Depuis une dizaine d'années, les services des ministères de l'agriculture français et néerlandais, les offices d'examen français et néerlandais, ainsi que la Commission européenne et l'Office communautaire des variétés végétales mènent des travaux conjoints pour définir des critères techniques de classement plus précis. Le Groupe d'étude et de contrôle des variétés et des semences (Geves) procède actuellement à une évaluation de marqueurs moléculaires pour essayer d'identifier des caractéristiques propres à l'échalote.

Vous avez raison de relever que nous avons obtenu gain de cause s'agissant spécifiquement de la variété néerlandaise Innovator. L'OCVV vient de revenir sur sa décision de lui octroyer une protection intellectuelle, compte tenu du fait que les caractères de la variété ne respectent pas toutes les exigences d'un classement en tant qu'échalote. La Commission européenne devrait désormais demander aux autorités néerlandaises de retirer la variété de leur catalogue national.

Nous sommes aussi mobilisés pour valoriser la spécificité des échalotes traditionnelles. En effet, certaines variétés d'échalotes de semis sont correctement classées selon les protocoles d'examen des variétés. Or, comme vous le soulignez, ces échalotes de semis sont nettement moins chères à produire que les échalotes traditionnelles. Mettre en place un signe distinctif mettant en valeur la qualité et l'origine de l'échalote traditionnelle permettra de la préserver. C'est pourquoi le Gouvernement soutient la démarche de l'association Collectif de l'échalote traditionnelle de Bretagne, qui demande la reconnaissance d'une indication géographique protégée (IGP). La commission permanente de l'Institut national de l'origine et de la qualité (Inao) a examiné cette demande le 12 décembre dernier ; une commission d'enquête a été nommée et l'instruction de cette IGP est en cours.

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La parole est à M. Antoine Villedieu, pour exposer sa question, n° 763, relative à l'hôpital de Gray.

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L'accès aux soins publics ne cesse de se dégrader. En seulement quelques décennies, nous sommes passés de services à la pointe de la technologie et d'une prise en charge complète et performante à la catastrophe que connaissent les hôpitaux publics aujourd'hui.

L'effondrement de l'hôpital public est encore plus visible dans les territoires ruraux où la désertification médicale continue de gagner du terrain. C'est le cas de l'hôpital de Gray dans mon département, en Haute-Saône, où l'offre de soins est progressivement démantelée. Carence de personnel et de lits, fermetures de service, régulation nocturne des urgences : pas un seul tourment n'est épargné aux soignants et aux patients, aujourd'hui à bout de souffle. C'est l'occasion pour moi de saluer le courage, la résilience et le travail de l'ensemble du personnel soignant que j'ai pu rencontrer lors de mes visites sur les différents sites du département.

Le quotidien des patients a été bouleversé par la situation désastreuse dans laquelle se trouve le service de radiologie. Abondamment relayée par la presse locale, la récente annulation d'une centaine de rendez-vous a provoqué la fureur des patients. L'exaspération est totale, au point que des patients abandonnent l'idée de se faire soigner à Gray, quand certains renoncent même à se faire soigner tout court.

Alors que la fusion du groupement hospitalier et du centre hospitalier était censée pérenniser les services, une régulation nocturne des urgences a récemment été instaurée. Désormais, un seul médecin est présent de nuit aux urgences. S'il doit se déplacer dans le cadre d'une prise en charge Smur (structure mobile d'urgence et de réanimation), plus personne ne sera disponible pour soigner les patients admis aux urgences. C'est une situation intolérable, qu'ont dénoncée les nombreux citoyens venus en masse exprimer leur colère au côté des soignants, lors des manifestations de mars 2023.

La politique de recrutement ne paraît pas adaptée aux réalités du terrain. Les conditions de mobilité imposées au personnel sur l'ensemble du territoire du groupe hospitalier de la Haute-Saône (GH70) dissuadent les candidats potentiels de venir exercer à Gray. Ma question est donc simple : que comptez-vous mettre en place à l'hôpital de Gray pour pérenniser les services et rétablir l'offre de soins ?

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Nous sommes attentifs à chaque territoire, et l'accès de tous, en toute sécurité, à des soins de qualité est notre priorité. Le groupe hospitalier de la Haute-Saône, seul établissement de santé public du département, est implanté sur quatre sites, dont celui de Gray, labellisé Hôpital de proximité. En semaine, le service d'imagerie du site de Gray repose sur un radiologue libéral, qui participe au service public ; en période de permanence de soins, un système de téléradiologie prend le relais.

C'est un fait, le radiologue libéral refuse depuis peu de réaliser certaines tâches ; à la suite d'un contentieux avec l'établissement, il a engagé des recours administratifs. Les autres examens externes ont toujours lieu ; les scanners des patients qui nécessitent un examen interne sont réalisés grâce à la téléradiologie, sous la surveillance du médecin urgentiste. De plus, un partenariat avec des radiologues libéraux de Besançon sera mis en place à compter du 1er juin 2024, ce qui permettra d'assurer l'intégralité de l'activité en journée, tant pour les examens internes qu'externes.

Depuis le 1er mars 2023, pendant la période nocturne, entre dix-neuf heures et sept heures trente, l'accès aux urgences de Gray est désormais régulé : l'unique médecin présent répond en priorité aux appels sur la ligne Smur – il faut donc préalablement appeler le 15 avant de se rendre aux urgences le cas échéant. Cette nouvelle organisation permet de garantir une réponse permanente et adaptée aux besoins de la population, vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept.

La mobilité entre les sites d'urgences du groupe hospitalier n'est jamais imposée aux urgentistes, mais proposée, discutée et négociée avec chaque médecin candidat. Depuis 2023, ce sont les médecins urgentistes de Vesoul qui viennent en appui aux personnels du site de Gray en complétant les tableaux de garde. L'enjeu est de préserver la solidarité des réponses au niveau du groupement hospitalier de territoire (GHT), ce qui implique un travail collaboratif de tous les professionnels de santé.

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La parole est à M. Francis Dubois, pour exposer sa question, n° 749, relative à la psychiatrie en milieu rural.

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L'état de la santé mentale en milieu rural est préoccupant. Les maux sont pluriels, notamment en Corrèze, où praticiens, responsables d'association et patients, inquiets, m'interpellent à ce sujet. L'après-covid et les incertitudes sociales et climatiques anxiogènes engendrent une forte hausse de l'activité des hôpitaux psychiatriques, et les besoins de soins augmentent, tant pour les enfants et les adolescents que pour les adultes.

Le centre hospitalier du pays d'Eygurande, un établissement privé à but non lucratif spécialisé dans la prise en charge des patients adultes, est l'établissement psychiatrique le plus important de Corrèze. Sa fréquentation est en nette hausse depuis 2019 : les hospitalisations de jour ont augmenté de 16 %, les soins ambulatoires de 35 %. Prévention du suicide, notamment chez les jeunes adultes et dans le secteur agricole, prise en charge des addictions et continuité de soins pour les pathologies psychiatriques classiques : il faudrait désormais proposer une offre de soins plus large, susceptible de se substituer à l'hospitalisation complète, ce qui implique de développer de nouveaux types de consultation, au plus près du domicile des patients, au sein des maisons de santé pluridisciplinaires et à proximité des médecins généralistes.

Pour déployer cette offre, il faut disposer de moyens humains. Or le constat est terrible : les postes de professionnels non pourvus sont très nombreux. Ainsi, le centre hospitalier du pays d'Eygurande recherche actuellement trois psychiatres, un généraliste en CDI et dix infirmiers. Des efforts de 2,8 millions sur trois ans ont pourtant été accomplis pour la formation, sans aide particulière. Le financement des réformes en cours doit respecter le principe d'égalité de traitement entre les établissements psychiatriques publics et privés à but non lucratif. L'élaboration du budget doit prendre en compte les spécificités rurales, notamment les surcoûts de fonctionnement.

Prochainement, les agences régionales de santé (ARS) devront délivrer les autorisations administratives en psychiatrie : elles devront choisir les acteurs autorisés à intervenir dans les années à venir. Économies d'échelle et rationalisation de l'offre de soins au seul bénéfice des patients devront guider cette réflexion.

Les défis en matière de santé mentale sont donc nombreux en Corrèze ; on y attend avec impatience des réponses concrètes : la psychiatrie ne peut plus se satisfaire d'effets d'annonce du type « grande cause nationale » – il faut agir vite et bien. Quelles mesures comptez-vous prendre pour favoriser le recrutement de médecins et d'infirmiers en psychiatrie ? Un plan national d'aide à la formation est-il prévu ? Garantirez-vous une juste répartition des financements entre les établissements privés à but non lucratif et les établissements publics ? Comment envisagez-vous de prendre en compte les spécificités rurales, en donnant du pouvoir et des moyens supplémentaires aux instances départementales ?

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Vous l'avez dit, monsieur Dubois, la crise du covid-19 a accentué les problèmes de santé mentale des Français, en particulier ceux de la jeunesse. Les établissements de santé font face à une hausse des demandes de soin, et les délais de prise en charge se sont allongés.

Pour relever ces défis, le Gouvernement œuvre depuis plusieurs années à renforcer l'offre de soins en psychiatrie, en mobilisant des moyens financiers inédits. Nous avons augmenté de 32 % les dépenses d'assurance maladie finançant ces activités : elles sont passées de 9 milliards en 2020 à plus de 12 milliards en 2023. Nous appliquons la réforme du financement de la psychiatrie dans les établissements de santé – réforme que vous avez d'ailleurs votée, monsieur Dubois –, qui vise à mieux répartir l'offre de soins sur le territoire d'ici à 2026.

Concernant plus spécifiquement le financement de la santé mentale en Corrèze, les opérateurs du département ont reçu un peu plus de 1,5 milliard en 2023 par le biais du fonds d'intervention régional. Les trois établissements de santé corréziens ont quant à eux bénéficié de plus de 50 millions de crédits, un montant en augmentation continue depuis plusieurs années, précisément pour répondre à ces enjeux.

Par ailleurs, le territoire accueille des dispositifs spécifiques innovants, en coordination avec l'ARS. Ainsi, le centre hospitalier du pays d'Eygurande développe un projet d'hôpital de jour intensif en pédopsychiatrie, afin de répondre aux besoins des enfants, notamment de ceux relevant de l'aide sociale à l'enfance. Son ouverture est prévue en septembre 2024, et je suis certaine que vous assisterez à son inauguration. En outre, le département bénéficie d'un projet territorial de santé mentale et dispose d'un conseil local en santé mentale. Ces outils renforcent la coopération entre les acteurs à l'échelle du territoire.

Vous l'aurez compris, si beaucoup reste à faire, nous sommes pleinement mobilisés pour relever ces défis et répondre aux attentes de nos concitoyennes et de nos concitoyens en matière de santé mentale.

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La parole est à M. David Amiel, pour exposer sa question, n° 755, relative au covid long pédiatrique.

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Les cas de covid long pédiatrique touchent de nombreuses familles, qui sont confrontées à des situations particulièrement douloureuses. Certaines d'entre elles, dans ma circonscription, m'ont fait part des trop nombreuses difficultés rencontrées dans le parcours de soins de leur enfant, depuis le diagnostic jusqu'à la prise en charge médicale.

Dans son avis paru le 7 novembre dernier, le Comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires (Covars) estime que le nombre de patients concernés par cette maladie avoisinerait plusieurs centaines de milliers. Il souligne également que les enfants sont tout autant exposés que les adultes, tout en présentant des risques à moyen et long terme potentiellement plus marqués. Conscient de cette situation, le ministère de la santé avait présenté, dès le mois de mars 2022, une feuille de route dotée de moyens renforcés, fixant des objectifs de prise en charge des patients atteints de covid long, avec, dès l'origine, une attention particulière portée aux enfants.

Les familles font pourtant état d'un décalage important entre les mesures annoncées et leur application effective. Leurs attentes portent sur l'amélioration de la détection de la maladie, la structuration d'une filière de soins ad hoc, comme pour les adultes, mais aussi le renforcement de la recherche, afin de trouver des réponses adaptées.

Quelles dispositions le Gouvernement entend-il prendre pour accélérer l'application de cette feuille de route ? Elles sont attendues par de trop nombreuses familles angoissées.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Le ministère de la santé et de la prévention est pleinement mobilisé pour faire progresser les connaissances et la prise en charge des adultes et des enfants atteints de symptômes prolongés post-covid. Vous l'avez rappelé, les enfants sont également concernés.

En mai 2023, un comité de pilotage s'est réuni pour effectuer un premier bilan de la feuille de route dédiée à ce sujet. L'assurance maladie, en lien avec l'association Tous partenaires covid, a élaboré un dispositif visant à faciliter l'orientation initiale des patients et la préparation de la première consultation. Des cellules de coordination post-covid ont été créées par les agences régionales de santé pour structurer les prises en charge dans les territoires. Elles ont pour mission d'informer, d'orienter et d'accompagner tous les patients, quel que soit leur âge. De façon inédite, 20 millions d'euros ont été mobilisés à ce titre, dans le cadre du fonds d'investissement régional 2022-2025.

La plateforme dédiée au covid long, prévue par la loi du 24 janvier 2022, est désormais ouverte sur le site internet sante.fr. Parallèlement, dès février 2021, la Haute Autorité de santé a publié des recommandations de bonnes pratiques, qui concernent aussi les enfants et les adolescents. À cela s'ajoute une fiche dédiée à la pédiatrie en phase aiguë de l'infection, portant sur le repérage et la prise en charge du syndrome inflammatoire multisystémique de l'enfant.

Enfin, le financement des restes à charge concernant les enfants peut s'effectuer dans le cadre du dispositif des affections longue durée (ALD) – sur les listes ALD 30, 31 ou 32 selon les situations. Permettez-moi d'ajouter une information supplémentaire : 9 360 demandes de reconnaissance d'affection longue durée pour covid long avaient été déposées au 30 juin 2023 ; 6 180 ont été acceptées sur les listes ALD 31 et 32. Comme vous le voyez, monsieur David Amiel, nous sommes pleinement mobilisés en matière d'impact du covid long, notamment sur les enfants.

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La parole est à M. Hendrik Davi, pour exposer sa question, n° 741, relative à la situation de l'hôpital public.

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Je voudrais aborder un sujet central pour la santé en prenant un exemple concret : l'hôpital Nord de Marseille, qui a connu cet automne une crise aiguë en radiologie. Il manquait des manipulateurs radio, ce qui a contraint les soignants à reporter de nombreuses interventions et à se contenter d'assurer les urgences. J'ai été indigné par cette situation. Comment une telle pénurie est-elle possible dans la deuxième ville de France ?

Des manipulateurs radio m'ont apporté des explications. Tout d'abord, les effectifs ont diminué, alors même que l'activité a augmenté de 20 %, les politiques de santé n'ayant pas anticipé les besoins croissants en imagerie médicale. Cette situation entraîne à la fois de la souffrance au travail et une baisse d'attractivité du métier, ce qui accroît le manque d'effectifs à l'hôpital public, accentué encore par la concurrence du secteur privé. Celui-ci a procédé à des ouvertures en série de cabinets libéraux de radiologie, de scanner et d'imagerie par résonance magnétique (IRM).

Le cas particulier des manipulateurs radio illustre le processus de financiarisation en cours dans le secteur de la santé, sur lequel le directeur de l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM) a appelé mon attention. Le manque chronique de moyens du secteur public favorise le secteur privé, qui prend en charge ce qui est rentable et facile, laissant au secteur public les cas les plus lourds. Ainsi, en matière de radiologie, l'hôpital public ne pouvait plus prendre en charge des cas graves, alors que des interventions mineures étaient maintenues dans les cliniques privées : c'est absolument scandaleux !

Ce processus de financiarisation est en cours dans de nombreux domaines. La biologie médicale est largement passée sous le contrôle de grands groupes. Bientôt ce sera le tour de l'imagerie médicale et de la médecine générale.

À Marseille, les moyens dédiés à la psychiatrie sont également largement captés par le secteur privé – il s'agit d'une spécificité de Marseille. Il est absolument nécessaire pour notre santé que nous mettions un terme à cette dérive, déjà à l'œuvre dans le travail social, les crèches, les maisons de retraite ou l'enseignement supérieur. Il est inadmissible que des établissements à but lucratif, dont les propriétaires sont des fonds de pension étrangers, aient pour seul objectif la rentabilité. Le scandale Orpea aurait dû nous vacciner.

Pour mettre un terme à cette dérive, il n'y a qu'une seule solution : renforcer le service public. Or les infirmiers, les aides-soignants et les médecins que j'ai rencontrés décrivent tous la même situation d'épuisement chronique. Pour briser cette spirale infernale, il faut cesser de prendre le secteur privé comme modèle et en finir avec un système où la sécurité sociale finance les profits des acteurs privés.

Le chantier est immense : nous devons lancer un grand plan d'urgence pour sauver l'hôpital public. Il faut embaucher massivement du personnel statutaire et augmenter les salaires dans les hôpitaux. Pour former plus de médecins, comme l'a promis Gabriel Attal, il faut recruter massivement des personnels hospitalo-universitaires : nous avons besoin d'enseignants, un point qui a été oublié. Avec quel argent, me demanderez-vous ? La réponse est assez simple : il faut rendre au secteur public l'argent dilapidé par le secteur privé, en commençant par le milliard d'euros non dépensé après le covid, que le Gouvernement a préféré laisser en partie au secteur privé. Enfin, il faut légiférer sur les rémunérations et les dividendes indécents du secteur privé : j'appelle votre attention à ce sujet. Notre santé ne doit pas être une marchandise : qu'attend le Gouvernement pour légiférer sur ces sujets ?

Mme Alma Dufour applaudit.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Le système de santé français connaît depuis quelques années des prises de participation croissantes d'acteurs financiers. Celles-ci ont d'abord été observées dans des groupes d'établissements de santé et médico-sociaux privés, y compris dans le secteur de la biologie médicale. Nous les constatons désormais dans tous les types de structure de soins, prenant la forme de montages financiers complexes. Cette dynamique a fait l'objet d'une attention toute particulière du Gouvernement, de l'assurance maladie et de la représentation nationale.

La commission des affaires sociales du Sénat mène une mission d'information sur ce sujet. Le Gouvernement a déjà agi, notamment par le biais de l'ordonnance du 7 février 2023, qui a renforcé les exigences en matière de transmission d'informations des sociétés d'exercice libéral aux ordres professionnels, notamment les conventions contenant des clauses portant sur l'organisation et les pouvoirs des organes de direction.

Nous menons actuellement des travaux de fond pour évaluer les conséquences de la financiarisation de l'offre de soins, sans pour autant occulter les importants besoins en investissement. Nous devons être vigilants quant aux risques réels de modification de la structure de l'offre de soins, mais aussi d'augmentation des tarifs ou de mise à mal de l'indépendance des professionnels de santé – ils doivent pouvoir rester indépendant. Monsieur Hendrik Davi, je souscris à vos propos relatifs à l'importance de réaliser un diagnostic complet du phénomène de financiarisation. Il faut absolument le mener à bien, ce qui permettra ensuite d'apprécier le besoin d'adaptation du cadre juridique. Je sais que vous êtes pleinement mobilisé sur ce sujet ; nous le sommes également.

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La parole est à Mme Eva Sas, pour exposer sa question, n° 735, relative à la situation de l'école à Paris.

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Ma question vise à connaître les moyens que vous comptez mobiliser pour défendre l'école publique à Paris. Depuis plus d'un an, nous vous alertons sur les fermetures de classe, accompagnés par les associations de parents d'élèves, les personnels de direction scolaire et des élus locaux – que je me permets d'associer à ma question.

À la rentrée 2023, 175 classes ont été supprimées, y compris dans des établissements de ma circonscription bénéficiant d'une convention académique pluriannuelle de priorité éducative (Cappe) – notamment l'école de la Brèche-aux-loups. En 2024, 183 fermetures de classes seraient programmées : c'est dire le choc pour l'école publique parisienne. Nous avons alerté le rectorat sur la nécessaire prise en compte des livraisons de logement à venir, du classement en Cappe de certains établissements et du niveau de leur indice de position sociale. Ces éléments, pourtant objectifs, ne semblent pas avoir été intégrés aux projections.

Nous sommes particulièrement inquiets d'une telle réorganisation à marche forcée de l'école publique parisienne et, avec elle, de l'abandon par le Gouvernement de la promesse républicaine que l'école défend. Ces fermetures constituent un véritable renoncement à la mixité sociale, que le Gouvernement accepte, voire promeut, en laissant l'enseignement privé devenir majoritaire à Paris. D'après les projections documentées du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), ce sera le cas d'ici à quelques années. Personnellement, je ne m'y résous pas, non seulement en tant que député écologiste parisienne, mais aussi en tant que mère dont les trois enfants n'ont connu et ne connaissent que l'école publique.

Comment le Gouvernement compte-t-il garantir que la rentrée 2024 soit synonyme d'un regain de confiance dans l'école publique à Paris ? Envisage-t-il des mesures concrètes qui s'appuieraient sur la baisse démographique pour réduire les effectifs par classe et rendraient son attractivité à l'école publique pour tous les parents d'élèves ?

Nous appelons également votre attention sur la situation des chefs d'établissement et des enseignants, qui sont confrontés à des difficultés quotidiennes et à une dégradation de leurs conditions de travail, tant ils doivent compenser les absences non remplacées et accompagner des familles dont les difficultés sociales s'accentuent. Il est impossible que l'académie ne connaisse pas ces difficultés, que vous choisissez visiblement d'ignorer.

Nous attendons de votre part les engagements suivants : poursuivre le dialogue avec les parents d'élèves et les élus parisiens ; renoncer à certaines fermetures de classes ; prendre en considération les profils sociaux des élèves parisiens ; en définitive, redonner des perspectives de développement et d'attractivité à l'école publique à Paris.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

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Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

L'académie de Paris est pleinement mobilisée, afin que tous les élèves et tous les personnels puissent envisager la prochaine rentrée scolaire le plus sereinement possible.

Il faut bien le reconnaître : dans l'académie de Paris, le déclin démographique s'accélère depuis à peu près dix ans et affecte tous les niveaux d'enseignement, du premier degré jusqu'au post-bac. Structurel et non conjoncturel, il perdurera, ce que nous ne pouvons que déplorer.

Les chiffres sont parlants : en dix ans, les classes du premier degré de l'enseignement public de l'académie de Paris ont perdu 30 000 élèves, ce qui correspond à une baisse de 22 % des effectifs. Après une baisse de 2 690 élèves à la rentrée 2023, on prévoit une nouvelle baisse de 2 031 élèves à la prochaine rentrée scolaire. Pour autant – et j'y insiste –, nous devons rappeler que l'académie de Paris présente, avec celle de Corse, le meilleur taux d'encadrement de France métropolitaine, soit 6,6 postes pour 100 élèves en 2023 : ce taux est bien supérieur à la moyenne nationale de 6 postes pour 100 élèves et dépasse celui de 5,1 professeurs pour 100 élèves constaté en 2013. Malgré la baisse des moyens, ce taux d'encadrement devrait poursuivre sa progression et garantir ainsi de bonnes conditions d'enseignement.

Par ailleurs, le nombre moyen d'élèves par classe atteint à Paris le niveau très favorable de 19,9 élèves par classe, contre 24,6 en 2013. Les classes comptent donc moins d'élèves, et les moyens sont bien là.

Ce sont également trente-neuf ouvertures de classe qui sont prévues dans la capitale, dont vingt et une sont liées à la poursuite du dédoublement des classes de grande section de maternelle, de CP et de CE1 des établissements des réseaux d'éducation prioritaire (REP) et seize sont la conséquence du plafonnement de l'effectif de ces classes à vingt-quatre élèves, dans les établissements hors REP. Au nom de l'égalité républicaine, à laquelle vous êtes sensible, nous mettons donc les moyens là où s'expriment les besoins.

S'agissant à présent des remplacements, nous prévoyons la création de dix postes de professeur remplaçant à Paris à la rentrée 2024. Comme à la rentrée 2023, chaque établissement disposera d'une dotation, dans le cadre du pacte enseignant : elle permettra ainsi la création de dispositifs d'accompagnement et de soutien au profit des élèves et plus particulièrement des élèves en difficulté.

J'ajouterai également que cinq postes de formateur-conseiller pédagogique seront créés, ainsi que cinq dispositifs dédiés à l'école inclusive. Nous devons en effet faire en sorte de mieux accueillir les enfants en situation de handicap.

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Vous ne tenez pas compte de la ségrégation sociale qui s'installe actuellement à Paris : la part des élèves désormais scolarisés dans des établissements privés y atteint désormais 29 %, pour un taux de 17 % à l'échelle nationale. L'enseignement privé pourrait, à terme, devenir majoritaire, et cette tendance concentre les difficultés sociales dans l'école publique. Or vos propos ne témoignent pas de la prise en considération de cet état de fait.

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La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat, pour exposer sa question, n° 758, relative à la surpopulation carcérale.

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Depuis plusieurs années, la surpopulation carcérale est un problème majeur pour le système pénitentiaire français : elle contrevient au respect des détenus et du personnel, et a conduit à plusieurs condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), pour conditions indignes de détention. Le 1er mars 2024, 76 766 détenus étaient incarcérés, alors que la France ne comptait que 61 737 places de prison ; le nombre de détenus a progressé de 6,1 % en un an, et 3 099 d'entre eux dorment sur un matelas posé à même le sol.

Le taux global d'occupation des établissements pénitentiaires s'élève à 124 %, mais varie : les maisons d'arrêt présentent la saturation la plus forte, avec un taux d'occupation de 148 % en moyenne. Dans ma circonscription, le taux d'occupation de la maison d'arrêt d'Angers atteint 197 %, et les agressions de surveillants y sont régulières. Par ailleurs, une récente visite de la prison de la Santé m'a permis de constater un taux d'occupation de 150 %.

La croissance du nombre de personnes condamnées ou en attente de jugement accentue les tensions entre détenus et surveillants, et empêche l'accès aux soins, au travail et aux activités sportives, entre autres. Elle ralentit le travail de réhabilitation et complexifie la gestion des établissements. Cette situation rend très difficiles les conditions de travail du personnel des maisons d'arrêt et compromet sa sécurité ; elle entraîne la souffrance et l'épuisement professionnel des agents, leurs arrêts de travail et leur réorientation professionnelle ; elle érode enfin l'attrait de leurs postes.

Depuis 2017, des mesures comme les alternatives à l'incarcération, les programmes de réhabilitation ou la construction d'établissements ont été prises afin d'améliorer la situation, mais les résultats ne sont pas là.

Par conséquent, la sortie anticipée des personnes condamnées à des peines de courte durée est-elle envisageable, comme elle avait été décidée au moment de la crise sanitaire du covid-19 ? Cette sortie serait autorisée sur la base de critères définis et précis, tels que ceux que prévoyait d'ailleurs l'ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 du 23 mars 2020. La contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), les directeurs d'établissements et les associations soutiennent cette demande.

Les probabilités d'incarcération pouvant augmenter avec les Jeux olympiques de Paris 2024, quels dispositifs avez-vous prévus pour éviter les accidents et les incidents graves, qui mettraient en difficulté les agents de l'administration pénitentiaire ?

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Madame la députée, je tiens tout d'abord à saluer votre engagement en faveur de la construction d'une nouvelle prison de 1 000 places dans votre département. La création de cet établissement permettra de soulager grandement les surveillants pénitentiaires de votre territoire, mais également de rendre effective la réponse pénale, tout en améliorant les conditions de détention.

La lutte contre la surpopulation carcérale passe par la lutte contre la récidive, je me dois de le rappeler. Aussi le Parlement a-t-il voté la création d'un dispositif de libération sous contrainte de plein droit, en vigueur depuis 2023 et applicable, sous certaines conditions, aux personnes incarcérées pour une durée inférieure ou égale à deux ans et dont le reliquat de peine serait inférieur ou égal à trois mois. Ce dispositif évite les sorties sèches, lesquelles multiplient par deux la probabilité d'une récidive.

Parallèlement, nous suivons un programme immobilier ambitieux, qui prévoit la création de 15 000 places de prison, réparties dans une cinquantaine d'établissements dont la moitié environ pourra accueillir des détenus dès cette année.

Vous avez évoqué à juste titre la crise sanitaire, et il faut rappeler que les mesures prises en 2020 l'ont été dans le contexte exceptionnel de pandémie généralisée, de diminution de la délinquance de rue et de forte baisse de l'activité des services judiciaires. Il ne me semble pas possible de les dupliquer dans le contexte actuel.

D'ailleurs, les Jeux de Paris 2024 constituent un défi et exigent une mobilisation totale de tous les acteurs de la sécurité, administration pénitentiaire comprise. Afin de le relever, 800 places de prison supplémentaires seront livrées en région parisienne avant l'été, et le ministre de la justice a inauguré un dispositif spécifique à l'événement. Le « centre opérationnel Vendôme » réunit ainsi les directions du ministère de la justice, dans l'objectif de centraliser l'ensemble des informations relatives aux Jeux olympiques, de garantir la cohérence des échanges et de coordonner les réponses.

En cas d'événement indésirable au sein d'une prison, nous serons donc prêts à apporter une réponse rapide et efficace. Vous pouvez donc constater, madame la députée, que le Gouvernement est pleinement mobilisé.

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La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour exposer sa question, n° 751, relative aux mineurs non accompagnés.

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Vingt-sept associations viennent de saisir le Conseil d'État pour contraindre la France à mettre son dispositif d'accueil et d'évaluation des mineurs isolés en conformité avec la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE).

Quant à moi, je souhaite vous interroger au sujet de l'évaluation de la minorité. Les mineurs non accompagnés (MNA) en attente d'évaluation sont actuellement 3 500 en France et 350 dans la métropole de Lyon, où j'ai été élu. Environ 80 % d'entre eux seront reconnus mineurs par la justice.

Dans de nombreux territoires, les demandes de mise à l'abri sont toujours plus nombreuses, et les départements font face à la saturation de leurs structures d'accueil. Lors du seul dernier trimestre 2023, près de 1 200 jeunes étrangers isolés sont arrivés sur le territoire de la métropole de Lyon. C'est autant que pendant toute l'année 2022 !

Malgré l'existence d'un dispositif unique en France – celui des stations, créées par la métropole de Lyon avec le soutien de la préfecture –, ces jeunes ont connu un hiver particulièrement difficile. À cet égard, je voudrais saluer les acteurs locaux – associations, élus, collectifs et riverains bénévoles – qui se sont remarquablement mobilisés pour venir en aide à ces jeunes.

Il y a urgence à remédier à la saturation des structures d'accueil, il y a urgence à ce que l'État réponde à ses obligations : il y va de la dignité des jeunes mais également du respect de la loi, comme l'ont rappelé le Défenseur des droits en 2016 et le Comité des droits de l'enfant des Nations unies en 2023. Votre prédécesseure, Charlotte Caubel, m'avait assuré, il y a six mois, de la pleine coopération de l'État avec les départements : qu'en est-il aujourd'hui ?

Alors que l'attente d'une évaluation renforce la vulnérabilité de ces jeunes, n'est-il pas possible d'envisager un mécanisme de répartition géographique ? Il est déjà en vigueur après l'évaluation de la minorité, mais pourrait aussi l'être avant, c'est la piste que nous suggèrent de nombreux acteurs locaux.

Il n'est pas acceptable que, dans notre pays, des jeunes isolés soient laissés à la rue pendant si longtemps, alors qu'ils ont déjà eu à souffrir beaucoup pendant leur parcours de migration.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Vous m'interpellez sur la situation des mineurs non accompagnés en attente d'évaluation et sur l'augmentation des demandes de mise à l'abri, laquelle met particulièrement en tension la métropole lyonnaise. En 2023, 19 370 décisions de placement ont été portées à la connaissance de la mission nationale mineurs non accompagnés (MMNA), leur nombre excédant de 31 % celui constaté en 2022.

Le traitement de la situation des enfants isolés – français ou étrangers – est une priorité et doit le rester. Chacun de ces enfants doit être protégé, et le conseil départemental est l'organe compétent pour accueillir, mettre à l'abri et évaluer la minorité et l'isolement des requérants, puis, le cas échéant, assurer leur prise en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance (ASE). Je le rappelle : cette mise à l'abri est obligatoire.

L'État intervient aux côtés des départements dans l'évaluation, dans la mise à l'abri et dans la prise en charge concrète des MNA, avec notamment la mise en place d'un traitement automatisé de données à caractère personnel, le fichier d'aide à l'évaluation de la minorité (fichier AEM). Les départements bénéficient également de l'appui financier de l'État pour la réalisation de leurs actions de mise à l'abri et d'évaluation ; à ce sujet, la ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles, Sarah El Haïry, a constitué des groupes de travail composés de représentants des deux parties. En 2018, l'État s'est engagé à verser aux départements une aide exceptionnelle à la prise en charge des MNA confiés à l'ASE par l'autorité judiciaire. Cette aide a été reconduite chaque année depuis et représente 18 millions d'euros.

Enfin, un projet d'instruction à l'attention des préfets de départements est en cours de rédaction. Il concerne l'accompagnement des présidents de conseils départementaux dans l'utilisation du fichier AEM, mais également l'identification de locaux permettant l'hébergement de personnes se déclarant MNA, notamment par la réquisition, tout à fait possible dans le cadre d'une mise à l'abri. Enfin, ce projet d'instruction porte sur le contrôle de la légalité des décisions prises par les conseils départementaux.

Vous le constatez, nous sommes pleinement mobilisés et devons le rester, dans l'intérêt de ces mineurs.

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La parole est à Mme Maud Gatel, pour exposer sa question, n° 732, relative au centre pénitentiaire de Paris-La Santé.

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L'établissement pénitentiaire de la prison de la Santé est situé au cœur de ma circonscription, dans le 14e arrondissement de Paris. À la suite de sa rénovation et de son évolution bâtimentaire, la sécurité des riverains est en jeu : projections par-dessus le mur d'enceinte et parloirs sauvages se multiplient. Malgré la mobilisation de la direction de l'établissement pénitentiaire et du commissariat du 14e arrondissement, les nuisances se poursuivent, et les habitants du quartier en pâtissent.

Le projet d'installation d'un filet, qui aurait permis de réduire drastiquement les projections et les nuisances qui en découlent, était à l'étude. Il a malheureusement été abandonné, je le regrette profondément.

Parallèlement, la surpopulation au sein de la prison de la Santé – son taux d'occupation, qui est proche du taux national, était évalué, hier encore, à 151 % – contraint les moyens d'action et exacerbe les nuisances subies par le voisinage. Si la prison est nécessaire pour punir et protéger nos concitoyens, les conditions d'incarcération doivent être dignes. Le respect de ce principe est une condition de la réinsertion future des détenus et un impératif pour le personnel pénitentiaire. La surpopulation carcérale empêche de donner la priorité au travail, à la formation, à l'hygiène ou encore à l'accès à la culture, qui sont un gage de réinsertion.

La loi du 20 novembre 2023 d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 prévoit des mesures fortes et inédites, notamment la création de plus de 15 000 places dans les prisons d'ici à 2027 et l'allocation de moyens à la libération sous contrainte et au développement de mesures alternatives à l'incarcération. Je salue ces dispositions que nous avons votées ainsi que l'engagement du Gouvernement de les appliquer. Alors que, dans la perspective des Jeux olympiques et paralympiques, la comparution immédiate est encouragée et que les opérations Place nette entraînent des conséquences, je crains un nombre important d'incarcérations dans les semaines à venir et une aggravation de la surpopulation dans les établissements franciliens, particulièrement à la prison de la Santé.

Quelles sont les mesures envisagées pour diminuer la surpopulation carcérale et ses conséquences sur les détenus, leur réinsertion, les personnels ? Comment améliorer, en zone dense, l'intégration d'une prison au voisinage ?

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Le Gouvernement est pleinement engagé dans la lutte contre la surpopulation carcérale. D'une part, nous poursuivons les transferts accélérés des condamnés vers des établissements pour peine disposant de places. À Paris, selon la direction interrégionale des services pénitentiaires, plus de 1 500 places sont vacantes. D'autre part, nous augmentons structurellement les capacités d'accueil des prisons. L'ambitieux programme immobilier prévoit la création de 15 000 places supplémentaires, ce qui contribuera à restaurer l'équilibre dans les établissements franciliens. Près de la moitié de ces établissements seront opérationnels dès cette année. Il est très important de se mobiliser sur cette question, eu égard à l'événement international que représentent les Jeux olympiques et paralympiques.

La rénovation d'un bâtiment désaffecté du centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis a permis l'ouverture de 406 nouvelles places au mois d'avril 2024 – c'est tout récent. Parallèlement, les détenus remplissant des conditions d'affectation sont orientés au sein des structures d'accompagnement vers la sortie, les fameuses SAS. Les SAS d'Osny et de Meaux, livrées à la fin de l'année dernière, comportent plus de 360 nouvelles places. La nouvelle SAS de Noisy-le-Grand créera 120 nouvelles places à Paris avant le lancement des Jeux olympiques et paralympiques.

Enfin, la question des nuisances aux abords du centre pénitentiaire de la Santé est bien identifiée par l'administration pénitentiaire. Je connais votre engagement sans réserve sur cette question ; soyez assurée que le garde des sceaux y accorde une attention toute particulière. Le chef d'établissement échange régulièrement avec le commissariat de police du 14e arrondissement et nous veillons à ce que chaque signalement fasse l'objet d'une intervention systématique des forces de l'ordre. Comme vous pouvez le constater, nous sommes pleinement mobilisés sur la question de la surpopulation carcérale.

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La parole est à Mme Martine Froger, pour exposer sa question, n° 745, relative à la surpopulation carcérale.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Au 1er mars, le nombre de détenus a atteint un nouveau record : selon les chiffres publiés par le ministère de la justice, plus de 76 000 personnes sont incarcérées, soit 4 415 de plus que l'année précédente. Face à cette surpopulation carcérale chronique, le Conseil de l'Europe a exprimé, à la mi-mars, sa profonde préoccupation. Au mois de juillet, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) avait condamné la France en raison de l'indignité des conditions de détention. Preuve que le problème est ancien, en 2020, la CEDH avait déjà épinglé Paris pour la surpopulation de ses prisons. En tout, 3 099 détenus sont contraints de dormir sur un matelas au sol et la densité carcérale s'établit désormais à 124,6 %.

Le département de l'Ariège n'échappe pas à ce triste constat. Identifiée depuis 2021 comme l'un des établissements pénitentiaires les plus surpeuplés de France au regard de ses capacités, la maison d'arrêt de Foix, qui compte 140 détenus pour une capacité de 65 places, est la quatrième prison de France la plus surpeuplée après celles de Nîmes, Perpignan et Carcassonne. La direction de l'établissement et les syndicats ne cessent d'alerter au sujet de cette situation intenable. Malgré les échanges hebdomadaires entre le tribunal de Foix et la direction de la prison pour tenter de désengorger les cellules, aucune amélioration de la situation n'a été constatée au cours des six derniers mois. À cette surpopulation chronique viennent s'ajouter les départs à la retraite du personnel pénitentiaire, difficiles à compenser. Cela illustre les grandes difficultés de recrutement, qui s'expliquent notamment par le manque d'attractivité du métier et les conditions de rémunération.

De fait, la surpopulation chronique affecte grandement les conditions de détention et dégrade sévèrement les conditions de travail de l'ensemble des personnels pénitentiaires. À la maison d'arrêt de Foix, où le taux d'occupation dépasse 220 %, la situation n'est plus viable, que ce soit pour le personnel, qui se trouve exposé à des risques grandissants, ou pour les détenus – les conditions de détention exacerbent les tensions et portent atteinte à leurs droits fondamentaux et à leur dignité.

Le Gouvernement a annoncé la création de 15 000 nouvelles places de prison d'ici à 2027. Pour beaucoup d'observateurs, la livraison globale ne permettra cependant pas d'atteindre l'objectif de 80 % d'encellulement individuel. Qu'entendez-vous entreprendre pour renforcer l'application de mesures alternatives à l'emprisonnement, telles que l'interdiction des peines de moins d'un mois, le placement à l'extérieur, le placement sous surveillance électronique (PSE) ou le développement des travaux d'intérêt général (TIG) ? Comment comptez-vous donner suite à la recommandation du Conseil de l'Europe, qui a invité les autorités françaises à « examiner sérieusement et rapidement l'idée d'introduire un mécanisme national contraignant de régulation carcérale » ?

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Depuis 2017, nous avons pris plusieurs mesures fortes contre la surpopulation carcérale, qui est un véritable enjeu. La loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire ont permis de favoriser les aménagements pour des peines inférieures ou égales à un an et de prohiber les peines inférieures à un mois.

La lutte contre la surpopulation carcérale passe notamment par la lutte contre la récidive. Notre majorité a voté la création d'une libération sous contrainte de plein droit, en vigueur depuis 2023 pour les incarcérations d'une durée inférieure ou égale à deux ans, lorsque le reliquat de peine est inférieur ou égal à trois mois et à condition de remplir certaines conditions. Cette mesure évite les sorties sèches, qui multiplient par deux le risque de récidive.

De plus, un travail de fond a été engagé pour favoriser le recours au travail d'intérêt général. Sa durée maximale a été accrue jusqu'à 400 heures pour les délits. Nous poursuivons cette démarche en donnant la possibilité de convertir des peines en TIG. Le nombre d'offres de TIG a doublé entre 2019 et 2024, passant de 18 000 à 38 000. L'instauration de réunions régulières avec les directions interrégionales des services pénitentiaires, au niveau de chaque cour d'appel, constitue un autre levier de régulation important – il importe en effet de s'adapter aux besoins des différentes régions. Toutefois, la création d'un mécanisme strict et généralisé de régulation carcérale, qui impliquerait de fait un numerus clausus, nous semble contraire à un certain nombre de nos principes fondamentaux, au premier rang desquels l'égalité devant la loi. En outre, il pourrait entraver l'effectivité de la réponse pénale. Vous pouvez constater que nous nous attachons à relever le défi de la surpopulation carcérale.

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Dans mon département, beaucoup d'associations proposent d'accueillir dans le cadre de placements à l'extérieur des détenus qui pourraient travailler en entreprise. La justice ne va pas dans ce sens ; il est dommage qu'on n'utilise pas davantage ce dispositif.

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La parole est à M. Marcellin Nadeau, pour exposer sa question, n° 737, relative à la sortie d'indivision en outre-mer.

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Vous connaissez – je suppose – les difficultés liées à la sortie de l'indivision aux Antilles, en particulier en Martinique. Cette question a d'ailleurs connu un regain d'actualité après les émeutes qui ont eu lieu à Fort-de-France, au début de l'année, à la suite de l'incarcération d'un justiciable révolté par l'occupation par un tiers de la propriété qu'il possédait en indivision avec certains membres de sa famille. Dans d'autres cas, ces propriétés sont vendues – parfois à plusieurs reprises – par des tiers, malgré l'existence de droits légitimes de propriété.

Ce phénomène dit des terres volées – bien que certains en fassent l'acquisition de bonne foi – pose la question de la sortie complexe de l'indivision dans nos pays. Elle fait l'unanimité chez les élus, tant elle soulève la question, cruciale dans des îles où la terre est contrainte, des mécanismes structurels d'accès à la terre et à la propriété immobilière – aux relents de colonialité par certains aspects –, qu'il faut absolument repenser. Je fais d'ailleurs partie de celles et ceux qui pensent qu'il est possible de sortir par le haut de ces affaires pour éviter toute dégénération ou récupération par la violence ou l'arbitraire.

Outre la création d'un espace de médiation qui prendrait à bras-le-corps les cas existants, à l'instar de l'agence des 50 pas géométriques pour la bande littorale, il me paraît nécessaire d'agir par la loi. Or la loi du 27 décembre 2018 visant à faciliter la sortie de l'indivision successorale et à relancer la politique du logement en outre-mer est jusqu'à présent inappliquée, car elle est jugée inapplicable par certains professionnels, notamment les notaires. Dès lors, ne serait-il pas opportun de créer une mission d'information qui analyserait tous les cas possibles de résolution définitive des conflits liés à la terre en Martinique, comme en Guadeloupe, et qui pourrait déboucher sur un texte normatif clair, transparent et équitable ?

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Les problèmes fonciers aux Antilles sont bien réels et font l'objet de nombreux travaux parlementaires, parmi lesquels un récent rapport sur le foncier agricole en outre-mer des sénateurs Thani Mohamed Soilihi et Vivette Lopez. C'est notamment sur le fondement de celui-ci qu'en juillet 2023, le comité interministériel des outre-mer s'est engagé à résorber le désordre foncier et à rétablir le droit de propriété sur l'île.

Le Gouvernement a tenu ses engagements, puisque la loi du 9 avril 2024 visant à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement a amélioré significativement les conditions d'application de la loi de 2018. Elle a prolongé le dispositif jusqu'en 2038 et allégé les formalités, sans remettre en cause le partage en cas d'omission d'un indivisaire ; elle a également introduit un partage par souche sur le modèle du régime dérogatoire polynésien.

La question de l'acquisition de la propriété de la terre par la prescription reste sensible. Dans les cas les plus complexes, c'est parfois le seul moyen juridique pour qu'une famille en possession d'une terre, mais dépourvue de titre, puisse régulariser sa situation. La loi de 2024 a raccourci le délai, qui est passé de trente à dix ans, ce qui permettra d'accélérer les régularisations avec le soutien du groupement d'intérêt public de Martinique, créé au mois de février 2023. Si des contestations persistent, le recours à la justice reste une protection contre l'arbitraire et la violence.

Le Gouvernement est conscient des difficultés et veillera à la bonne application des mesures adoptées par votre assemblée, afin de faciliter la sortie des indivisions non réglées depuis plusieurs générations. Vous avez demandé la création d'une mission. J'en ferai part au ministre chargé de ces questions, qui vous apportera sans doute une réponse.

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En dépit de quelques évolutions intéressantes, le problème – qui a été révélé en Martinique à l'occasion de l'affaire dite Pinto – demeure.

La création de cette mission est fondamentale, d'autant qu'une inquiétude pointe son nez : la réduction du délai de prescription acquisitive, qui passerait de trente à dix ans. Cela suscite de nombreuses inquiétudes, notamment chez les professionnels, qui sont actuellement sous pression à cause du peu de transparence qui caractérise les transferts de propriété. Faites comprendre à M. le garde des sceaux qu'il est nécessaire de lancer cette mission pour faire le point sur la question !

Debut de section - Permalien
Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées

Je n'y manquerai pas !

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La parole est à M. Philippe Ballard, pour exposer sa question, n° 761, relative à la loi « zéro artificialisation nette ».

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Le 24 octobre 2023, j'ai déposé et transmis par courrier une question écrite à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, restée sans réponse à ce jour malgré une relance en mars 2024. Elle portait sur la loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et à renforcer l'accompagnement des élus locaux.

Dans l'Oise, un projet piloté par Suez soulève des interrogations : l'extension, sur une emprise de 28 hectares, d'une installation de stockage de déchets non dangereux (ISDND) provenant majoritairement de la région parisienne. Ce projet implique trois communes : Liancourt-Saint-Pierre et Lavilletertre, qui s'y opposent ; Lierville, qui y est favorable et envisage, pour le rendre réalisable, de modifier son plan local d'urbanisme (PLU). Précision importante : selon les autorités, le projet actuel ne respecterait pas la législation en vigueur.

L'artificialisation des sols dans la communauté de communes du Vexin-Thelle a déjà atteint 128 hectares entre 2011 et 2021. Or selon les objectifs du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet), en cours de consultation, et après application du taux d'effort qui lui est imparti, elle ne disposerait plus que d'une enveloppe de 45 hectares pour assurer le respect de l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN). Le projet d'enfouissement de Suez représente 62 % de cette enveloppe pour les dix prochaines années. S'il devait en être décompté, nombre de projets actuellement en discussion, qui répondent à des enjeux nécessaires au développement du territoire, devraient être annulés. Il est donc crucial que la région Hauts-de-France puisse inclure ce projet dans l'enveloppe ZAN nationale, car son impact dépasse les frontières locales.

Les ISDND seront-elles comptabilisées dans les objectifs retenus par les schémas de cohérence territoriale (Scot) ? Quelle surface sera restituée aux territoires ? Pouvez-vous prendre un arrêté ministériel afin que l'artificialisation induite par le projet d'ISDND soit comptabilisée au niveau national et non local ? Nous attendons depuis trop longtemps une réponse claire et précise à ce sujet.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

Debut de section - Permalien
Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports

La loi « climat et résilience » du 22 août 2021 a fixé l'objectif zéro artificialisation nette des sols en 2050, avec un objectif intermédiaire : la réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) durant la décennie 2021-2031 par rapport à la précédente décennie. La loi du 20 juillet 2023 permet que la consommation d'Enaf résultant des projets d'envergure nationale ou européenne qui présentent un intérêt général majeur soit comptabilisée au niveau national – dans le cadre d'un forfait déterminé à cet effet – et non au niveau régional ou local. La liste de ces projets est fixée par un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme, soumis à une consultation des régions et du public, qui doit être publié d'ici à fin mai. Les ISDND ne figurent pas dans cette liste.

La loi permet en revanche de les considérer comme des projets d'envergure régionale, ce qui permet de mutualiser la consommation d'Enaf en les comptabilisant dans l'enveloppe régionale plutôt que dans l'enveloppe locale. Mutualiser la consommation d'espaces et l'artificialisation est également possible au niveau local, dans le cadre des Scot, pour des projets d'intérêt intercommunal. Dans le schéma d'aménagement régional, puis les documents d'urbanisme, la déclinaison de la trajectoire de sobriété foncière peut aussi tenir compte des projets lancés sur tel ou tel territoire, en minorant le taux d'effort pour l'un et en le majorant pour d'autres.

Enfin, depuis 2003, le code de l'urbanisme comporte une procédure de mise en compatibilité du plan local d'urbanisme, à la suite d'une déclaration de projet portant sur l'intérêt général d'une action, d'une opération d'aménagement ou d'un programme de construction.

Pour résumer, l'intérêt général du projet que vous évoquez devrait plutôt être pris en compte aux échelles régionale ou intercommunale.

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Je vous remercie pour cette réponse, même si ce n'est pas celle que nous attendions.

Alors que le logement et la filière du bâtiment et travaux publics sont en crise, le ZAN est perçu comme une menace. Il rend l'accès au foncier de plus en plus ardu et fait grimper les prix. Je vous invite à venir expliquer aux élus locaux de ma circonscription de l'Oise – où dans une très grande partie du territoire, les champs succèdent aux forêts, qui elles-mêmes succèdent à des espaces verts – que nous sommes saturés de béton. Cela ne passe pas ! Il ne fait aucun doute qu'il est temps de revoir le dispositif. Il y a quelques mois, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a d'ailleurs effectué une petite marche arrière. Il est fort regrettable que les groupes qui composent la majorité présidentielle aient rejeté la proposition du groupe Rassemblement national de permettre aux communes de moins de 5 000 habitants de déroger à l'objectif ZAN.

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La parole est à Mme Élisa Martin, pour exposer sa question, n° 740, relative aux Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2030.

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Les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2030 illustrent un modèle économique et politique qui nie les questions climatiques. À quel prix ? Un coût écologique faramineux : artificialisation des sols, pompage de l'eau dans les rivières et les glaciers pour créer de la neige artificielle, bilan carbone désastreux dû à l'organisation et à la venue du public – et ce pour la modique somme d'au moins 1,5 milliard d'euros.

Pendant ce temps, la température augmente deux fois plus vite dans les montagnes qu'ailleurs en France. Nous savons que vos promesses de durabilité sont incompatibles avec un événement d'une telle ampleur. Rappelons que le Comité international olympique (CIO) n'a retenu que la candidature des Alpes françaises. Pourquoi ? Parce qu'elle n'a pas été soumise à une consultation populaire, à l'inverse de ce qui s'est produit en Suisse et en Suède, où le soutien de la population était très incertain. Vous assumez l'absence totale de concertation des collectivités locales et vous ignorez l'opposition citoyenne, les élus et les ONG de défense de l'environnement : il s'agit finalement d'un argument de vente ! Les sondages Ifop ne font pas office de consultation populaire et ne présagent en rien du soutien à cet événement.

Selon le code de l'environnement, les projets d'équipements culturels, sportifs, scientifiques ou touristiques dont le coût prévisionnel est supérieur à 460 millions d'euros doivent faire l'objet d'une saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP). Cette dernière peut également être saisie par dix parlementaires, ce que des membres du groupe LFI – NUPES ont fait, par courrier officiel, le 5 avril dernier. Quand lancerez-vous une consultation populaire sur les projets d'aménagement et d'équipement liés à l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2030 ?

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

Debut de section - Permalien
Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports

Je ne partage évidemment pas votre constat sur la durabilité des Jeux. Nous pourrions en parler longuement. Les enjeux de développement durable touchent aussi à des questions de cohésion sociale et d'identification nationale, mais votre question ne porte pas directement sur ce point.

Dans un communiqué du 29 novembre 2023, le CIO a invité le Comité national olympique et sportif français à une phase de dialogue ciblé sur la candidature des Alpes françaises à l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2030. La décision définitive d'attribution est attendue en juin 2024. Le dossier de candidature, défendu par les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur, identifie un certain nombre de sites pour accueillir les épreuves et les villages olympiques. Ceux-ci ont été choisis notamment en raison des infrastructures dont ils disposent et de leur expérience dans l'organisation de compétitions internationales – ce qui est un élément de durabilité.

Il est évident que l'organisation d'un tel évènement à l'horizon 2030, sur un territoire qui est à la fois reconnu pour son environnement exceptionnel et à l'avant-poste des effets du réchauffement climatique, nous engage collectivement à un devoir d'exemplarité. C'est pourquoi les services de l'État, sans attendre la décision d'attribution, ont commencé à identifier les enjeux environnementaux et à anticiper les projets d'aménagement nécessaires.

L'année 2030 est également une échéance pour plusieurs de nos trajectoires nationales de planification écologique, qu'il s'agisse de la stratégie nationale de biodiversité, du plan Eau, de l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN) ou, plus globalement, des feuilles de route issues des travaux de territorialisation de la planification écologique. Il est crucial de garantir la cohérence avec ces ambitions écologiques. Une fois que la candidature des Alpes françaises sera officiellement retenue, ce qui n'est toujours pas le cas, l'État s'organisera donc immédiatement pour accompagner les organisateurs dans la recherche, puis la mise en œuvre, des options les plus à même d'éviter ou de réduire l'impact environnemental des Jeux – tout en intégrant la question de leur héritage.

L'organisation de cet événement constituera un défi collectif, mais également une chance. Ils seront l'occasion d'accompagner la mutation nécessaire – eu égard aux enjeux liés à l'adaptation au changement climatique – des territoires de montagne. La réalisation de cette ambition passera évidemment par une étroite collaboration et une grande solidarité de tous les acteurs, aux côtés du comité d'organisation, sans logique de concurrence entre les sites : solidarité des collectivités et des élus locaux, de l'État, des experts, des chercheurs, du monde de la montagne – bien au-delà des quelques stations identifiées à ce jour pour accueillir la compétition – et aussi du grand public, évidemment.

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Je crois que la question de l'impact climatique des Jeux – qui fait partie des raisons pour lesquelles la population s'y opposerait – est liée à celle de la consultation populaire. Vous dites que les stations de moyenne montagne seront, à cette occasion, particulièrement accompagnées par l'État. C'est un vrai sujet, en effet, mais ne soyons pas dupes et n'allons pas imaginer que cet accompagnement pourrait passer, en particulier, par de la neige artificielle.

En outre, une partie de la population se retrouvera chassée par la tenue probable – la France étant seule candidate – des Jeux olympiques. Briançon constitue à cet égard un exemple intéressant : 15 % de ses habitants, parmi les plus précaires et les plus vulnérables, quittent la ville en raison d'un développement de type libéral et capitaliste, notamment parce qu'ils ne peuvent plus s'y loger à des prix accessibles. Nous aurons, je l'espère, l'occasion d'en discuter à nouveau.

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La parole est à Mme Delphine Lingemann, pour exposer sa question, n° 734, relative à l'acceptabilité des grands projets environnementaux.

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Si la transition écologique bénéficie d'une image positive auprès de l'opinion publique et fait l'objet d'une vraie prise de conscience, un nombre croissant de projets d'envergure à vocation environnementale font l'objet de réticences, voire d'une opposition de plus en plus structurée et politisée. De ce fait, de nombreux projets sont ralentis, voire annulés, malgré la plus-value sociétale ou économique qu'ils représentent pour le territoire concerné et en dépit des garanties environnementales apportées au gré des étapes obligatoires pour leur mise en œuvre.

Aux critères de faisabilité technique, de viabilité économique et de préservation de l'environnement, s'ajoute en effet celui de l'acceptabilité sociale. Pourquoi ces résistances aux changements, ces difficultés croissantes à mettre en œuvre de grands projets d'infrastructure ? Les raisons de s'y opposer sont souvent liées aux répercussions directes sur la santé ou sur le confort des riverains – bruit, ondes, odeurs –, à la perturbation de la flore, de la faune et de la biodiversité qu'ils entraînent, à l'altération des paysages naturels et patrimoniaux, ou encore à la dépréciation des biens immobiliers situés à proximité.

Si de nombreuses disciplines scientifiques, médicales et sociales se penchent sur la question, une réponse politique doit être apportée en parallèle pour que ces projets puissent être menés à bien. Alors que l'acceptabilité est la pierre angulaire de la difficile mise en œuvre des projets d'envergure, passer de l'acceptabilité à l'acceptation est un processus souvent long, compliqué, et parfois douloureux, avec des oppositions plus ou moins violentes.

Des changements importants dans les modes de vie peuvent être acceptables, à condition d'être ressentis comme justes ; d'où l'importance d'associer les acteurs concernés. « Dans la vie, rien n'est à craindre, tout est à comprendre », disait Marie Curie avec beaucoup de justesse. Dans ce type de projets d'envergure, la compréhension passe par de longues phases d'explication et de pédagogie. La réponse politique passe aussi par l'accompagnement des porteurs de projets, afin de sécuriser le déploiement de ceux-ci dans une démarche de coconstruction et d'éviter les retards, voire les annulations.

Je pourrais vous parler de l'autoroute A69 ou de la liaison ferroviaire Lyon-Turin, deux dossiers qui vous concernent directement. Je m'arrêterai plutôt sur un projet de retenue d'eau – je parle bien de projet – dans ma circonscription du Puy-de-Dôme.

Le week-end dernier, une marche contre ce projet – j'insiste encore sur ce mot – a mobilisé de nombreux manifestants. Or ce projet n'a rien à voir avec celui de Sainte-Soline. Il ne s'agit pas du même type d'exploitation : ici, trente-six exploitations, souvent familiales, sont réunies dans un collectif. La différence est aussi technique : le pompage ne se fera pas dans les nappes phréatiques, mais dans l'Allier, trois mois par an, sur arrêté préfectoral, et seulement si un débit suffisant le permet. Si ce projet devait aboutir à l'issue du processus d'instruction, comment l'accompagner jusqu'au bout ?

Je l'ai dit, des pistes existent, comme l'association du public à la conception et à la mise en œuvre du projet, la participation financière des riverains à son capital ou la redistribution directe sur le territoire de ses retombées.

Comment instaurer un dialogue constructif avec les parties prenantes ? Comment passer de l'opposition à l'adhésion ? Comment enrichir le projet avec les propositions de ceux qui y étaient opposés ? Comment protéger les porteurs de projets, qui sont souvent inquiets ? Comment faire aboutir ces projets dans des délais respectables ? En bref, quels sont les leviers politiques pour assurer les conditions d'acceptabilité de ces projets, tout en apportant l'ensemble des garanties nécessaires aux porteurs de projets comme aux opposants ?

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

Debut de section - Permalien
Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports

Vous l'avez parfaitement souligné, il est impératif de veiller à ce que les projets d'envergure qui nous permettront de réussir la transition écologique soient acceptés par la population des territoires. Accompagner la transition écologique en embarquant la population, voilà l'essence et la fierté de notre démocratie.

Pour assurer une gestion équilibrée de la ressource en eau et répondre aux enjeux du changement climatique, le Gouvernement a défini en 2019 la méthode pour lancer les projets de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE). Cette démarche repose sur une approche globale et coconstruite avec l'ensemble des usagers de la ressource, à l'échelle d'un territoire cohérent du point de vue hydrologique. Elle peut aboutir à la création d'ouvrages de stockage d'eau, notamment à destination agricole.

Une mission d'appui pour l'aboutissement des PTGE a opéré durant l'année 2021 des retours d'expérience. Elle a rappelé que l'agriculture doit pouvoir sécuriser son accès à la ressource en eau et en améliorer la gestion. Répondre à cet enjeu implique de prendre en compte les attentes de l'ensemble des usagers et de garantir une gestion économe de cette ressource essentielle. Par ailleurs, le projet de loi d'orientation pour la souveraineté en matière agricole, en cours d'examen, prévoit une accélération du traitement des contentieux sur l'eau.

S'agissant du département du Puy-de-Dôme, un PTGE sur le bassin Allier aval est en cours d'élaboration. Le document final regroupant l'ensemble des volets du diagnostic sera bientôt prêt. Viendra ensuite la phase de construction des scénarios, déterminés à partir des volumes potentiellement prélevables définis dans les études. Pour choisir le programme d'actions à retenir, la gouvernance partagée de ce projet s'appuiera sur une analyse économique et financière. C'est par cette méthode de planification écologique, en mobilisant les territoires eux-mêmes, les acteurs et les outils objectifs, que nous parviendrons à dépasser les oppositions. J'ajouterai à cela l'importance d'éclairer nos populations, l'éducation populaire, comme je l'appelle dans le territoire qui m'est cher : mieux expliquer et faire comprendre à la population, au quotidien, les enjeux de la transition écologique.

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La parole est à Mme Anna Pic, pour exposer sa question, n° 766, relative à l'objectif zéro artificialisation nette.

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Je souhaite attirer votre attention sur les conséquences de la mise en œuvre de l'impératif zéro artificialisation nette (ZAN) prévu par la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi climat et résilience et adopté dans le cadre de la loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et à renforcer l'accompagnement des élus locaux.

Permettez-moi d'évoquer ses conséquences sur le territoire du Cotentin, en particulier dans le canton de Douve Divette. Avant même 2021, dans le cadre de l'élaboration du schéma de cohérence territoriale (Scot) du Pays du Cotentin, le canton de Douve Divette s'était engagé dans une logique de réduction et de densification de son empreinte foncière. Conscients des enjeux environnementaux et de la nécessaire préservation de sols non artificialisés, les élus ont ainsi fait le choix de la densification, notamment en têtes de réseau. Le Scot a établi un périmètre de 39 hectares – contre 61 hectares pendant la période 2010-2020 – consacré à la construction densifiée de logements dans ce territoire.

L'application de l'impératif zéro artificialisation nette a réduit la surface dite consommable à 18 hectares. La loi de 2023, qui confère à l'impératif ZAN un caractère rétroactif, le rend effectif dès le 1er janvier 2021. Cette rétroactivité plonge le territoire de Douve Divette dans une situation quasi impossible, malgré la solidarité remarquée de la ville de Cherbourg-en-Cotentin dans le cadre des négociations de l'agglomération. Alors que les élus anticipaient une baisse ultérieure de leur dotation d'espace constructible, 17,33 hectares sur une dotation de 18 hectares pour la période 2020-2040 ont déjà été consommés. Vous constatez, comme moi, que l'enveloppe est déjà largement entamée. Quels projets ces élus peuvent-ils engager sur vingt ans avec 6 700 mètres carrés ? Cet impératif pénalise les territoires qui avaient initié une démarche d'artificialisation raisonnée.

De plus, de nouveaux développements économiques de la péninsule sont à venir. M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a récemment annoncé la construction de nouvelles usines dans La Hague. Cela implique l'arrivée de plusieurs centaines, voire milliers de nouveaux travailleurs dans les sites industriels de La Hague. En effet, le taux de chômage du Cotentin est inférieur à 5 % de la population active. Ces travailleurs et leurs familles auront besoin de se loger. Or dans l'agglomération du Cotentin comme ailleurs, le besoin de logements est déjà criant : certaines entreprises sont contraintes d'héberger leurs salariés à l'hôtel. Les maires du canton de Douve Divette ont acheté des terrains afin de construire des logements ; ils ne pourront pas réaliser ce projet. L'impossibilité de construire un habitat densifié, qui entre en contradiction avec le besoin de logements et les futurs besoins de la population, met ces communes en difficulté.

Loin de remettre en cause l'impératif zéro artificialisation nette prévu par la loi « climat et résilience », j'aimerais savoir comment vous comptez répondre à ces injonctions contradictoires faites aux territoires comme Douve Divette. Quels sont les aménagements envisagés pour atteindre l'objectif global sans exercer de pressions intenables et contradictoires sur les collectivités ?

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

Debut de section - Permalien
Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports

La loi « climat et résilience » a fixé l'objectif d'atteindre l'absence d'artificialisation nette des sols en 2050. Un objectif intermédiaire de réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels agricoles et forestiers a été fixé pour la période 2021 à 2031. Je suis certain que vous partagez cet objectif.

L'édifice législatif et réglementaire nécessaire à la mise en œuvre de cette trajectoire est stabilisé. L'enjeu est désormais de faire comprendre la réforme, afin de la mettre en œuvre de manière progressive, souple et acceptée par tous les acteurs du territoire. Plusieurs outils permettent de décliner cette trajectoire de sobriété foncière selon le contexte local. Cette souplesse est permise par la territorialisation de la trajectoire dans les documents de planification et d'urbanisme. Elle permet d'adapter les efforts de sobriété foncière à la réalité des besoins et aux efforts déjà consentis par le passé, et de veiller à l'équité entre les territoires.

La possibilité de mutualisation à l'échelle nationale, à travers le forfait national, ou à l'échelle régionale ou intercommunale, a été introduite par la loi du 20 juillet 2023. Cette loi offre à chaque commune la possibilité de prévoir une consommation minimale de 1 hectare d'ici 2031, qui peut être mutualisée au niveau intercommunal. En outre, elle a introduit la possibilité de comptabiliser les opérations de renaturation en déduction de la consommation d'espaces naturels agricoles et forestiers dès la première décennie de mise en œuvre de la trajectoire ZAN. Sur votre territoire, ce mécanisme pourrait permettre de compenser les opérations de logement qui ne peuvent être réalisées au sein des espaces déjà urbanisés.

Notre pays traverse une crise inédite du logement. Permettez-moi de redire que la construction de logements n'est pas incompatible avec l'objectif de réduction de l'artificialisation des sols, mais implique de repenser l'aménagement du territoire et d'optimiser la densité des formes urbaines, qu'il s'agisse des zones existantes offrant des marges d'intensification ou de nouvelles constructions. J'en veux pour preuve les territoires qui accueillent de nombreux emplois industriels et se situent néanmoins dans la moyenne de la consommation de foncier. Si un bon repérage est effectué en amont, ils peuvent respecter les enjeux de sobriété foncière.

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La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour exposer sa question, n° 736, relative au quartier des Neiges au Havre.

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Fin 2019, le préfet de la Seine-Maritime a transmis au maire du Havre un porter à connaissance relatif aux « risques technologiques autour des infrastructures de marchandises dangereuses (ITMD) du Grand port maritime du Havre ». Depuis, les 1 800 habitants du quartier des Neiges sont soumis à des restrictions d'urbanisme qui non seulement ne mettent pas en sécurité les habitants exposés aux risques recensés, mais contribuent en plus à la dépréciation de leurs biens – c'est le genre de sujet que vous connaissez bien.

Face à cette situation qui a des répercussions sur la vie actuelle et future dans ce quartier historique du Havre, un travail a été engagé pour réduire le risque à la source. Le stockage de matières dangereuses dans les terminaux portuaires a été réorganisé autant que faire se peut et des études analysent les dangers complémentaires, selon les normes appliquées aux sites Seveso.

Le résultat de ce travail a été présenté aux habitants lors d'une réunion publique organisée le 12 avril dernier. En parallèle de ces démarches, j'avais pris l'initiative de déposer la proposition de loi n° 3266 afin que la loi instaurant les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) s'applique aux infrastructures de stationnement et de stockage temporaire de matières dangereuses. L'objectif était que les riverains affectés par les études de danger relatives à des ITMD bénéficient de mesures financières permettant une mise en sécurité de leur habitat au même titre que ceux affectés par les études de danger des sites Seveso. Cette proposition de loi, examinée le 17 juin 2021, n'a pas été adoptée.

Dans un rapport consacré aux risques industriels rendu public en février 2024, la Cour des comptes estime pourtant que trop de risques restent ignorés. Elle recommande d'accompagner techniquement et financièrement les communes afin de sécuriser les bâtiments situés en zone de danger, ajoutant que « les ouvrages d'infrastructures de transports de matières dangereuses sont ignorés. » Pour remédier à cette situation, elle recommande « de prévoir des mesures de protection foncière et des travaux pour les zones d'effets létaux qui y sont liées, mais aussi de modifier la législation pour généraliser la mise en place de commissions consultatives analogues aux commissions de suivi de site des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) ».

Grâce à la volonté conjuguée de l'État, des collectivités locales, des industriels faisant naître le risque et des associations de riverains, le PPRT défini sur la zone industrielle du Havre fut, de l'avis unanime, un exemple en matière de mise en sécurité des populations résidant dans les périmètres de danger. Même si la loi ne l'imposait pas, les riverains ont pu bénéficier de la prise en charge intégrale des travaux de mise en sécurité de leur habitat.

Compte tenu de ces éléments et parce qu'il importe de proposer des solutions concrètes aux riverains, je propose qu'un dispositif analogue au PPRT du Havre soit élaboré, sous l'égide de l'État, afin de mettre en sécurité les habitants du quartier des Neiges, situé à seulement 3 kilomètres des habitations bénéficiant des mesures du PPRT.

Je souhaite obtenir votre accord pour missionner M. le préfet de la Seine-Maritime afin qu'il engage ce travail collectif selon les mêmes modalités que celles ayant présidé à l'élaboration du PPRT en vigueur dans la zone industrielle du Havre. Je suggère qu'un projet de loi prenne en compte ce sujet, ou que votre ministère soutienne et enrichisse la proposition de loi que je pourrai alors déposer à nouveau.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

Debut de section - Permalien
Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports

Je vous remercie pour votre question qui évoque des réflexions de la Cour des comptes formulées en marge d'une mission menée en 2022 et 2023 sur le contrôle des installations classées pour la protection de l'environnement. Je salue votre engagement de longue date en faveur de la prévention des risques technologiques.

Permettez-moi de souligner que même si certaines infrastructures de transport de matières dangereuses font l'objet d'études de danger inspirées des ICPE, leur situation n'est pas comparable à celles-ci. Les acteurs impliqués, leurs responsabilités et l'utilisation des résultats des études sont très différents.

En matière de transport de marchandises dangereuses, l'application des règles internationales apporte un haut niveau de sécurité. Cette réglementation, réévaluée tous les deux ans, est au plus près des évolutions techniques. Les matières dangereuses sont conditionnées dans des emballages spéciaux qui résistent aux agressions, aux incendies et à tout ce qui pourrait provoquer leur dispersion dans l'environnement lors du transport. On parle de réduction du risque à la source. Pour cette raison, la probabilité d'accident grave est plus faible que dans les installations industrielles où ces matières sont produites, manipulées ou utilisées.

Cependant, ces accidents très improbables font l'objet d'études de danger au niveau des principales infrastructures de transport. Elles peuvent déboucher sur des mesures ad hoc d'exploitation de l'infrastructure, ce qui permet de réduire encore les risques. Enfin, dans un esprit de responsabilité, le préfet peut proposer de limiter l'urbanisation future en raison des risques présentés par ces installations. Ce sont les porter à connaissance, éléments forts de notre politique de prévention.

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Je maintiens qu'il y a un sujet. Alors que nous avons connaissance d'un danger de surpression – une explosion, pour le dire plus vulgairement – et que nous avons la possibilité d'en protéger la population, la prise en charge d'un même risque, entraînant les mêmes conséquences pour les riverains, diffère en fonction de son origine : dans un cas, on finance des infrastructures, comme un changement de fenêtres ; dans l'autre, on ne le fait pas, au seul motif qu'il s'agit de stockage de matières dangereuses. Il y a bien un problème d'égalité des citoyens devant le risque. Nous parlions tout à l'heure d'acceptabilité du risque : c'est un sujet que nous connaissons bien, dans le territoire havrais, et nous sommes prêts à expérimenter certaines solutions, comme je vous le propose, parce que nous avons envie que notre grand port maritime continue de vivre. Nous avons seulement besoin d'être accompagnés, monsieur le ministre.

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La parole est à Mme Rachel Keke, pour exposer sa question, n° 743, relative à l'autoroute A6.

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L'Haÿ-les-Roses, Fresnes, Chevilly-Larue : quatorze voies de circulation de l'autoroute A6 traversent ces communes de ma circonscription. Chaque jour, plus de 12 000 riverains subissent le bruit et la pollution provoqués par les 300 000 véhicules qui empruntent quotidiennement l'autoroute la plus large d'Europe, qui mène à Paris, au marché de Rungis et à l'aéroport d'Orly.

À proximité de ce tronçon de l'autoroute A6 se trouvent une crèche, un groupe scolaire, un collège, une résidence pour personnes âgées et un complexe sportif. Selon l'association Bruitparif, ces populations vulnérables doivent supporter un bruit d'au moins 80 décibels – soit le niveau sonore d'un aspirateur –, alors même que la limite légale est fixée à 70 décibels en journée. S'exposer à un tel niveau de bruit pendant trente ans, c'est perdre trois années d'espérance de vie. L'enrobé antibruit posé en 2017 et 2018 n'a aujourd'hui plus aucun effet sur les bruits de roulement. Et à ce bruit s'ajoute la pollution : cette autoroute génère à elle seule près de la moitié du bilan carbone l'haÿssien.

Depuis vingt-cinq ans, les résidents se battent, notamment avec l'association l'haÿssienne des Castors du Jardin parisien, pour que l'État agisse pour éviter les maladies respiratoires et cardiaques et que ces habitants de banlieue aient eux aussi le droit à la tranquillité et à un monde plus respirable. Mais aujourd'hui, ils sont abandonnés par l'État. Des mesures permettraient pourtant de diminuer le bruit et la pollution sur ce tronçon, comme la requalification de la zone en point noir bruit, l'abaissement de la vitesse, la pose d'un mur antibruit ou de tout autre dispositif efficace allant en ce sens.

Dès le début de mon mandat, j'ai alerté sur cette situation, notamment à travers une question écrite adressée au Gouvernement il y a plus d'un an. J'ai également saisi le préfet de région, M. Marc Guillaume, qui m'a annoncé par un courrier du 12 juillet 2023 l'abaissement de la vitesse maximale autorisée de 90 à 70 kilomètres à l'heure sur les tronçons concernés. Cette décision devait faire l'objet d'une concertation avec le public et les élus de L'Haÿ-les-Roses, pour être appliquée au premier semestre 2024. Un an plus tard, je n'ai toujours pas reçu de réponse à ma question écrite au Gouvernement, la concertation relative à l'abaissement de la vitesse n'a toujours pas eu lieu et la mesure n'est donc toujours pas entrée en vigueur. Pourquoi les engagements pris par l'État en matière d'abaissement de la vitesse sur l'autoroute A6 n'ont-ils pas été tenus ? Quand seront-ils enfin appliqués ?

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La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité.

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Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité

Tout d'abord, je vous prie de bien vouloir excuser Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports, qui a dû nous quitter en raison d'une obligation. Vous abordez un sujet essentiel pour les habitants de votre circonscription, en particulier ceux de l'Haÿ-les-Roses. Soyez assurée qu'en tant que gestionnaire de cette partie du réseau routier national, l'État y est attentif et travaille à la réduction les nuisances sonores auxquelles sont exposés les riverains de cette section de l'autoroute A6, qui est bien identifiée comme un secteur à améliorer en priorité au regard des points noirs bruit et du nombre d'habitants concernés.

L'État privilégie la réduction de la pollution sonore à la source par l'installation de murs antibruit ou, dans les zones le justifiant, par le renouvellement des chaussées avec des matériaux adaptés, comme les enrobés phoniques. C'est la solution qui a été utilisée en 2017 sur plus de 1 kilomètre de la section que vous avez mentionnée ; mais, comme vous l'avez souligné, leur efficacité décroît avec le temps. Des études plus précises seront donc engagées d'ici la fin de l'année pour identifier des solutions plus pérennes à déployer en complément des dispositifs de protection acoustique existants afin de réduire l'impact des nuisances sonores liées au transport routier. La réduction de la vitesse maximale autorisée constituant l'une des solutions possibles pour atténuer l'impact de l'infrastructure en matière de bruit, l'État a décidé de lancer, à la fin de l'année, une expérimentation d'abaissement de la vitesse sur certains tronçons autoroutiers proches de Paris. La portion que vous mentionnez pourrait en faire partie.

S'agissant de la pollution atmosphérique, selon les bilans publiés par Airparif, association agréée de surveillance de la qualité de l'air en Île-de-France, la qualité de l'air s'améliore chaque année depuis plusieurs années. Les émissions de dioxyde d'azote et de particules fines, en particulier, ont diminué de plus de 30 % en dix ans. La pollution de l'air est un enjeu clairement identifié dans les démarches de planification aux échelles nationale, régionale et locale. À cet égard, je tiens à souligner que le plan de protection de l'atmosphère pour la région Île-de-France, en cours de révision, était soumis à la consultation du public jusqu'au 10 avril. Ce travail permettra de réduire encore davantage les émissions de polluants liés au secteur des transports routiers, comme les particules fines et le dioxyde de carbone. La préoccupation que vous défendez, qui concerne à la fois la santé et le cadre de vie de nos concitoyens vivant en Île-de-France, est bien une priorité de l'État et du Gouvernement. Nous allons continuer à travailler avec vous pour réduire la pollution et le bruit.

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La vitesse sera abaissée sur l'A86. J'espère donc que les engagements pour l'A6 seront tenus l'année prochaine, et que les travaux commenceront enfin. Le bruit, les habitants n'en peuvent plus ! Cela les empêche de dormir, ce qui a des conséquences sur leur santé. J'espère donc que vous tiendrez votre parole.

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La parole est à M. Alexis Jolly, pour exposer sa question, n° 764, relative aux stations de montagne.

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Depuis quelque temps, nous assistons à un véritable battage médiatique au sujet de l'avenir de nos stations de montagne, soumises, comme chacun le sait, à des conditions climatiques de plus en plus hasardeuses. Ces variations interrogent sur le maintien à moyen terme des activités de loisirs – à commencer évidemment par le ski –, qui seraient condamnées, menaçant de fait l'équilibre économique de la montagne.

Cette inquiétude, qui agite de nombreux responsables publics, ne paraît cependant pas partagée par tous les professionnels du secteur de la montagne. L'évolution du climat ne semble pas paniquer les professionnels du secteur privé, qui sont moins pessimistes quant à l'avenir et à la pérennité de leurs activités. Preuve en est que les investisseurs privés continuent à engager des dépenses, parfois pharaoniques, pour les stations qu'ils gèrent ou qu'ils financent. Plus frappant encore, certains de ces investisseurs sont si confiants dans l'avenir qu'ils vont jusqu'à hypothéquer leurs biens personnels pour faciliter leur projet. Quand on va à leur rencontre, tous nous disent qu'ils croient en l'avenir et se sentent capables de réussir la transition qui permettra aux stations de continuer à tourner, notamment parce que les évolutions climatiques s'opèrent sur des cycles relativement longs et permettent par conséquent de s'adapter de façon organisée et concertée. Il s'agit donc de s'appuyer sur le savoir-faire et le travail de toutes ces personnes trop souvent mises à l'écart dans la stratégie globale que l'État développe pour nos montagnes.

Par nature, la montagne est un environnement où les contraintes en tous genres sont bien plus nombreuses qu'en vallée ou en plaine. De fait, la capacité d'adaptation et d'innovation de ceux qui y vivent et y travaillent est particulièrement développée. C'est un lieu où les idées abondent et où les technologies de pointe se développent à grande vitesse. Je m'interroge donc sur les raisons de l'inquiétude qui semble transir une partie de la classe politique et alimente un discours quasi apocalyptique sur l'avenir de la montagne, qui serait menacée d'un crash économique imminent. Il y a là un décalage entre les positions publiques des uns et des autres et la réalité du terrain, sur lequel je souhaiterais que vous apportiez quelques éléments de réponse.

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La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité.

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Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité

Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Dominique Faure, qui est en déplacement. Vous le savez, nous constatons que le réchauffement climatique est plus important dans les territoires de montagne qu'ailleurs : les températures peuvent y être jusqu'à deux fois supérieures en moyenne, ce qui n'est pas sans conséquences sur les activités touristiques organisées autour de la neige, rendant nécessaire leur adaptation, ne serait-ce que pour répondre à l'évolution de la demande.

L'accompagnement des stratégies d'adaptation a ainsi été au cœur du plan Avenir montagnes lancé par l'ancien Premier ministre Jean Castex. Dans ce cadre, l'État a déployé 30 millions d'euros en ingénierie et 300 millions d'euros en investissements, financés à parité avec les régions, dans tous les massifs français.

L'attractivité touristique de la montagne reste forte et connaît un véritable regain, notamment durant l'été, où elle propose une offre pour tous, qui donne envie à ceux qui connaissaient moins la montagne d'y retourner une fois qu'ils l'ont découverte. Nous voulons donc accompagner l'attractivité de la montagne et le développement de cette offre touristique. En raison du changement climatique, certaines stations de basse altitude doivent imaginer un avenir différent, les stations et villages d'altitude intermédiaire doivent consolider une offre touristique moins concentrée sur la période hivernale et les stations de plus haute altitude, notamment les stations alpines et pyrénéennes, doivent se moderniser et innover pour être moins consommatrices en termes d'énergie et de ressources naturelles.

Cette évolution repose sur deux principes : la confiance en la capacité des élus locaux à développer des stratégies locales, et la solidarité nationale pour les accompagner dans des objectifs partagés et définis avec eux, notamment dans le cadre des comités de massif, que vous connaissez bien. Loin de tout catastrophisme et de tout double discours, cette approche territoire par territoire vise à accompagner les élus locaux dans l'adaptation du tourisme au changement climatique en termes de diversification économique, de mobilité ou encore de logement, qu'il s'agisse d'un logement permanent, saisonnier ou touristique. À cette fin, nous nous appuierons sur le récent rapport de Joël Giraud, intitulé « Pour une montagne vivante en 2030 », ainsi que sur celui de la Cour des comptes, pour préparer une série de propositions qui seront dévoilées lors du prochain Conseil national de la montagne, qui se tiendra en Lozère. Je ne doute pas, monsieur le député, que vous y participerez.

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La parole est à M. Christophe Blanchet, pour exposer sa question, n° 733, relative aux sauveteurs en mer.

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Le 14 janvier 2021 à vingt-trois heures trente-cinq, le chalutier Breiz coulait au large de Ouistreham, avec à son bord trois marins-pêcheurs : Quentin Varin, 26 ans, et les frères Steven et Jimmy Gibert, 27 et 19 ans. J'ai évidemment une pensée pour leurs familles endeuillées et tout le monde de la pêche.

De nuit, par un temps dantesque, sous des rafales de 30 nœuds et avec une houle de plus de 2 mètres, les sauveteurs bénévoles de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) de Ouistreham ont essayé de sauver ce chalutier et ses pêcheurs. Mais rien n'y a fait et, en quelques secondes, après un début de remorquage, le navire disparaissait sous leurs yeux consternés et choqués. L'échec d'une mission, chaque sauveteur de la SNSM le vit toujours comme un échec personnel, d'autant plus lorsqu'une vie a été perdue.

Le capitaine Philippe Capdeville, dit Philibert, marin de profession ayant à son actif 900 missions opérationnelles pour la SNSM, était à la manœuvre cette nuit-là. Prix de son engagement : il a été requis contre lui un an de prison avec sursis et une interdiction de navigation de deux ans pour négligence et faux d'un document de bord. En effet, lorsque l'équipage de Ouistreham sort, c'est pour un remorquage, et non pour un sauvetage. Lorsqu'un sauvetage tourne mal, les équipiers ne sont pas inquiétés, mais si c'est un remorquage, ils peuvent l'être, et c'est bien pour cela que la justice a été saisie. La SNSM compte 11 000 bénévoles, que je tiens à saluer et remercier ici. Ils ont effectué plus de 9 000 sorties en 2023, et en 150 ans d'existence, c'est la première fois que l'un d'eux est poursuivi pour de tels faits.

Par respect pour la séparation des pouvoirs, je ne conteste pas ici cette action en justice, qui interroge néanmoins sur le devenir du bénévolat dans notre modèle de sécurité civile, toute la stratégie de sécurité en mer étant remise en cause. Les bénévoles de la SNSM sont prêts à risquer leur vie pour sauver un marin en danger, quel qu'il soit, parce qu'ils savent que d'autres le feraient aussi pour eux – c'est ce qu'on appelle la solidarité des gens de mer. Il n'y a qu'une chose qu'ils ne peuvent pas supporter au motif de porter secours : risquer la prison. Si l'on suit cette pente glissante, demain, lorsque des vies humaines ne seront pas en danger immédiat, les sauveteurs évalueront au cas par cas le risque judiciaire encouru par l'équipe et refuseront d'intervenir s'il leur paraît disproportionné. Le jugement qui sera rendu le 4 juin nous mettra devant notre responsabilité de législateurs : ces bénévoles ont-ils une obligation de moyens ou une obligation de résultat ? Monsieur le ministre, comment comptez-vous protéger tous les bénévoles de notre modèle de sécurité civile contre les risques extérieurs à leur mission, qui est de sauver des vies ? Comment mieux protéger les bénévoles de la SNSM quand ils assurent une mission d'intérêt général à la demande des services de l'État ?

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La parole est à M. le secrétaire d'Etat chargé de la mer et de la biodiversité.

Debut de section - Permalien
Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité

Je vous remercie de poser cette question fondamentale pour la dizaine de milliers de bénévoles de la SNSM, qui s'engagent au quotidien pour sauver des vies en mer. Plus de 11 000 bénévoles, partout sur nos façades maritimes, matin, midi et soir, jour et nuit, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, sont sur le pont pour sauver des navires, des pêcheurs ou des plaisanciers, au péril de leur propre vie. Ils le font dans un contexte difficile, marqué par l'augmentation du nombre de navires en mer, avec cette solidarité des gens de mer, que vous avez évoquée, et l'intérêt général chevillé au corps.

Je pense également à tous ceux qui, dans les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Cross), coordonnent ce sauvetage en mer. La France a la chance d'avoir en la matière un système efficace, que nous avons soutenu et continuerons à soutenir par des investissements financiers, mais aussi par un soutien à la formation.

Je tenais à remercier tous les bénévoles de la SNSM et à leur exprimer tout le soutien du Gouvernement dans les actions essentielles qu'ils mènent.

Il ne m'appartient pas non plus de commenter l'affaire judiciaire en cours à la suite du drame du Breiz. Je souhaite néanmoins redire notre soutien aux sauveteurs en mer : nous comprenons l'émoi que cet événement a pu provoquer parmi eux ; notre responsabilité, la mienne, est d'adapter les dispositifs à cette réalité, compte tenu de ce qui s'est passé. Des députés sont également engagés à leurs côtés, comme vous, monsieur Blanchet – nous étions, il y a quelques mois, dans votre magnifique département, auprès des sauveteurs de la SNSM pour travailler sur leurs conditions de travail et d'engagement.

Je vous annonce avoir demandé que le Parlement se saisisse de cette question : je lancerai une mission parlementaire pour réfléchir à l'adaptation du régime de protection juridique des bénévoles, qui sont engagés jour et nuit pour protéger les gens de mer, afin de leur éviter de se retrouver sur le banc des accusés lorsqu'ils sauvent des vies. Comptez sur moi pour mener à bien cette mission sur l'évolution du statut des bénévoles de la SNSM.

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Merci, monsieur le ministre. Il y a urgence car beaucoup de stations de la SNSM ne comptent pas que des retraités et des étudiants, mais aussi des professionnels de la mer. Ces personnes-là se désengagent en nombre, car elles craignent, non pas une sanction pénale, mais qu'on leur retire leur droit de naviguer, ce qui leur ferait perdre leur boulot. Il est donc urgent d'acter cette mission et de trouver des solutions pour sécuriser tous les bénévoles sauveteurs de la SNSM.

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La parole est à M. Hervé Saulignac, pour exposer sa question, n° 765, relative au transport ferré sur la rive droite du Rhône.

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En 2023, en Ardèche, nous avons célébré un anniversaire peu commun : celui de la fin du service public de transport. Les trains de voyageurs ont en effet quitté l'Ardèche en août 1973 ; je suis venu vous demander leur retour.

Cette hypothèse est à notre portée, comme en témoigne le compromis conclu entre les régions Auvergne-Rhône-Alpes (Aura) et Occitanie : il prévoit notamment la réouverture de la gare du Teil dans le cadre de la prolongation jusqu'à Valence de la ligne occitane qui arrive de Nîmes.

Les financements sont prêts, la gare existe, et pourtant le projet ne cesse d'être reporté. Après des négociations financières difficiles, c'est désormais l'Autorité environnementale qui retarde cette opération en exigeant une étude faune-flore sur quatre saisons sur l'ensemble de la rive droite du Rhône – étonnant quand on sait que l'impact de la réouverture sera négligeable, la gare n'ayant jamais été désaffectée, et que le seul aménagement nécessaire consiste en l'extension d'un quai pour la sécuriser.

Cette demande d'étude est donc absurde : elle nous fait perdre du temps alors que l'urgence écologique commande d'aller vite. Elle est d'autant plus absurde que les trains sont là : ils arrivent en gare du Teil, se retournent et repartent à vide, sans que les Ardéchois puissent monter à bord. Si cela n'est pas de l'humiliation, cela y ressemble.

L'État peut reprendre la main sur ce dossier, rouvrir très facilement la gare du Teil et mettre en œuvre le protocole d'accord signé par la région Aura et la SNCF en 2020 pour une réouverture de la ligne jusqu'à Romans-sur-Isère, assurant la desserte d'au moins trois gares ardéchoises – Le Teil, Cruas et Le Pouzin.

Dans son discours de politique générale, le Premier ministre s'était engagé à lever les blocages bureaucratiques. Dans ce même esprit, je vous demande d'accorder une dérogation qui permette aux Ardéchois de prendre le train en gare du Teil pendant la durée de l'étude, d'une part, et de vous engager à une réouverture globale et pérenne du transport ferré de voyageurs sur la rive droite du Rhône, d'autre part.

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La parole est à M. le secrétaire d'Etat chargé de la mer et de la biodiversité.

Debut de section - Permalien
Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité

En l'absence de Patrice Vergriete, je vous lirai sa réponse.

Comme vous le savez, l'État fait une priorité du financement de la régénération des lignes existantes, dont les besoins de financement sont très importants à l'échelle nationale, tout particulièrement en Auvergne-Rhône-Alpes.

Les études concernant le projet de réouverture de la ligne de la rive droite du Rhône, qui inclut la réouverture de trois gares en Ardèche, dont celle du Teil, pourraient relever d'un financement par la région, à laquelle il revient de décider, en tant qu'autorité organisatrice du train express régional (TER), si elle envisage une telle desserte. L'étude devrait tenir compte de l'importance majeure de cette ligne pour le fret ferroviaire.

Après la mise en service de la première portion, en Occitanie, fin août 2022, la gare du Teil n'est utilisée que comme point de retournement des trains, en l'absence d'aménagement ad hoc de la gare. La ligne et les gares ne sont en effet pas sécurisées pour le trafic de voyageurs. La desserte de cette gare suppose que les aménagements nécessaires soient financés par les acteurs concernés en Auvergne-Rhône-Alpes, et que les procédures réglementaires soient respectées.

L'État demeure, en tout état de cause, très attentif à l'avancement du dossier. Il jouera, si besoin, un rôle de facilitateur, comme il l'a fait lors de la première phase de réouverture, en Occitanie. Cela a permis de gagner plus d'une année par rapport à la date de mise en service initialement prévue, sans déroger aux impératifs environnementaux ou en matière de sécurité, notamment s'agissant des passages à niveau, dont vous comprendrez parfaitement le bien-fondé.

La décision de rouvrir la gare du Teil à la desserte de voyageurs depuis Nîmes et Avignon relèvera ensuite des régions, autorités organisatrices du TER, comme vous le savez. En vertu du principe de libre administration des collectivités territoriales, l'État n'interviendra pas dans ces choix.

Je me tiens à votre entière disposition, ainsi que le ministre Patrice Vergriete, et je vous remercie pour votre attention constante au sujet de la mobilité et de la desserte de nos magnifiques territoires.

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Je vous confirme mon attention constante. J'ai bien noté que l'État jouerait, si besoin, son rôle de facilitateur : le besoin est là, je vous l'assure. Ma question portait sur deux sujets : la réouverture de la ligne de la rive droite du Rhône, dont je concède qu'elle nécessite encore des études et des discussions ; et la réouverture d'une gare accueillant déjà des trains, qui pourrait déjà constituer une première étape.

La sécurisation que vous avez évoquée a été étudiée et est désormais financée. Il s'agit de prolonger un quai de 166 mètres pour s'assurer que les voyageurs puissent fréquenter cette gare dans toutes les conditions de sécurité requises. Or, l'Autorité environnementale exige, pour des raisons que personne ne comprend, une étude faune-flore quatre saisons qui porte sur l'ensemble du sillon, alors que nous voulons simplement permettre à des voyageurs de monter dans un train qui s'arrête chez eux.

Je vous le redis avec conviction : je demande à ce que l'État joue son rôle de facilitateur en intervenant auprès de l'Autorité environnementale – ce n'est pas un interlocuteur difficile à joindre pour l'État – et en accordant, comme cela a déjà été fait par le passé, une dérogation qui permette aux voyageurs de monter dans le train en gare du Teil pendant la durée de cette étude incompréhensible.

Les deux régions, Auvergne-Rhône-Alpes et Occitanie, ont conclu une convention. Nous sommes dans une absurdie bureaucratique totale : des trains arrivent et repartent à vide sans que les voyageurs puissent y monter. Que l'État joue donc son rôle de facilitateur.

Debut de section - Permalien
Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité

C'est noté s'agissant du rôle de facilitateur. Je suis cependant particulièrement attentif à l'enjeu de la sécurité. Or à l'heure actuelle, la gare ne comporte pas les éléments de sécurité qui permettraient aux voyageurs de pouvoir monter – c'est très important, vous le savez. S'il y avait un accident, c'est vers nous que l'on se retournerait. Cela doit être pris en compte dans la discussion.

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La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour exposer sa question, n° 746, relative aux réserves de biosphère.

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Ma question concernera la réserve de biosphère de Moselle Sud, mais aussi les quinze autres réserves de notre pays, chapeautées par le réseau du Programme sur l'homme et la biosphère MAB France – Man and Biosphere – de l'Unesco. Elles sont réparties sur tout le territoire : trois d'entre elles se trouvent en outre-mer, et les treize autres en métropole.

Elle préservent non seulement un patrimoine de biodiversité incomparable, mais vont également plus loin que les ambitions gouvernementales en matière environnementale, grâce aux initiatives des acteurs de terrain. Elles représentent des écosystèmes variés : zones marécageuses dans le nord de la France ; zones tropicales dans les départements d'outre-mer, notamment en Martinique et en Guadeloupe ; pays des étangs, le Piémont des Vosges, chez nous, avec des particularités tout aussi remarquables. Ce sont des territoires pilotes, à l'engagement incomparable.

Ils sont pilotés par des structures associatives, encadrés par des accords entre collectivités territoriales ou adossés à des parcs naturels. Ces réserves ne bénéficient cependant d'aucun soutien spécifique, hormis celui prévu par le contrat entre le réseau MAB France et l'Office français de la biodiversité, qui ne couvre qu'une partie de ses besoins de fonctionnement. Cette situation diffère de celle d'autres pays, où les réserves de biosphère sont parfois une composante de l'administration territoriale ou de l'État.

Chacune de ces réserves, dans sa spécificité, entreprend de grandes actions en matière de protection des écosystèmes, particulièrement riches et spécifiques, de sensibilisation et d'implication de la population, notamment des plus jeunes à l'échelle des écoles, et de préparation aux enjeux de demain tels que les sécheresses entraînées par le changement climatique, la gestion de la ressource en eau, la modification de nos écosystèmes ou la préservation de certaines espèces.

Ces programmes très ambitieux mériteraient, pour grandir encore et impliquer davantage de personnes, de bénéficier d'un soutien de l'État, qu'il soit versé directement à chaque réserve ou au MAB, qui le répartirait. Tel est le sens de ma sollicitation.

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La parole est à M. le secrétaire d'Etat chargé de la mer et de la biodiversité.

Debut de section - Permalien
Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité

Je vous remercie pour votre question. Nous nous sommes rencontrés la semaine dernière, en présence de votre collègue Bertrand Petit, pour réfléchir ensemble à l'action collective qu'il convient de mener en matière de protection de la biodiversité. Les réserves de biosphère représentent un trésor, en raison de la méthode qu'elles mettent en œuvre, portées par des acteurs de terrain, des collectivités locales, des associations ; mais aussi parce qu'elles visent à protéger la biodiversité et à nous permettre de mieux lutter contre le changement climatique, de nous y adapter, et de trouver des solutions fondées sur la nature.

Dans le cadre de la stratégie nationale pour les aires protégées, le Gouvernement soutient les réserves de biosphère, au même titre que toutes les initiatives, dans votre magnifique territoire de la Moselle comme partout ailleurs, qui visent à concilier activité économique et protection de l'environnement ainsi qu'à créer des espaces de protection renforcée.

Vous savez néanmoins que, depuis l'adoption de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, les réserves de biosphère relèvent de la compétence des collectivités locales.

Cela signifie-t-il que nous ne pourrons apporter aucun soutien ? Non. La preuve en est que chaque année, l'État soutient le réseau associatif MAB à hauteur de 150 000 euros. Dans le cadre du Fonds vert, nous pouvons financer des actions portées par des réserves de biosphère. Elles peuvent aussi bénéficier des financements en hausse dédiés aux parcs naturels régionaux et aux parcs nationaux, auxquelles certaines sont adossées. Enfin, nous avons augmenté les crédits alloués à la biodiversité en général, passant de 120 millions à plus de 270 millions d'euros. Tout cela concourt à soutenir les réserves de biosphère.

J'entends néanmoins votre point de vue. Comme je m'y suis engagé, nous verrons comment déployer la stratégie nationale pour la biodiversité, dans le cadre de la territorialisation – pardon du barbarisme –, afin de mieux accompagner les acteurs locaux et les bonnes volontés. Une attention particulière sera ainsi portée aux réserves de biosphère.

Permettez-moi, à cet égard, de remercier tous ceux qui promeuvent ces réserves de biosphère, labellisées par l'Unesco, et de leur dire que nous continuerons à mener ce travail avec tous les acteurs, au plus près des territoires, afin de protéger la biodiversité, de lutter contre le changement climatique et, en définitive, de valoriser notre patrimoine naturel.

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Je vous remercie de votre réponse et du dialogue engagé sur cette question. Il est possible d'aller bien plus loin que ce que l'on conçoit politiquement dans ces territoires. Les populations qui y vivent ont conscience d'être assises sur un trésor qu'elles veulent préserver et transmettre. L'État doit donc se tenir à leurs côtés, pour faire vivre l'animation de ces territoires.

Je vous invite à vous rendre au sein de la magnifique réserve de biosphère de Moselle Sud, que vous avez évoquée, afin de voir concrètement, sur le terrain, ce que les acteurs sont capables de faire lorsqu'ils se mobilisent.

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La parole est à M. Jean-Philippe Ardouin, pour exposer sa question, n° 752, relative aux inondations en Charente-Maritime.

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Moins de trois ans après une crue d'une ampleur historique dans la vallée de la Charente, un nouvel épisode d'inondations a touché les habitants de la Saintonge cet hiver. Dans ma circonscription, les habitants de la ville de Saintes, par exemple, ont été atteints à quatre reprises par des crues, qui sont montées de 4,20 mètres à 6,08 mètres selon les endroits, entre le 13 novembre 2023 et le 2 avril dernier.

Durant cette période difficile, je me suis rendu dans de nombreuses communes du département afin de mesurer l'ampleur des dégâts occasionnés. J'ai écouté, le cœur serré, nos commerçants, nos artisans, nos restaurateurs, nos viticulteurs, nos agriculteurs et les familles durement touchés par ces catastrophes et ces crues à répétition.

Je tiens à rendre hommage aux élus, aux services de l'État, aux sapeurs-pompiers, aux gendarmes, aux policiers, aux militaires, aux membres de la Croix-Rouge, aux bénévoles de la protection civile, aux services municipaux des communes touchées ou encore aux riverains, sans qui la situation aurait pu être encore plus préoccupante, pour leur aide précieuse.

Très vite, j'ai adressé un courrier au ministre de l'intérieur et des outre-mer et je tiens à le remercier d'avoir agi rapidement en déclarant l'état de catastrophe naturelle, ce qui a permis aux sinistrés de soixante-neuf communes de la Charente-Maritime, dont vingt-cinq de ma circonscription, de déclarer aux assurances les dégâts occasionnés dans un délai de trente jours, pour pouvoir être mieux indemnisés et plus rapidement.

À ce stade, je souhaiterais amorcer des pistes de réflexion, ainsi qu'un calendrier d'actions, en concertation avec les collectivités territoriales, afin de trouver des solutions préventives et de permettre une meilleure régulation de ces phénomènes sur le long terme. Nous ne pouvons plus nous contenter de constater les dégâts ; il faut agir en amont dès maintenant.

Dans un contexte de crues de plus en plus fréquentes, vraisemblablement liées aux changements climatiques et à des conditions météorologiques de plus en plus extrêmes, pouvez-vous nous présenter les principales mesures qui pourraient être engagées afin de renforcer les capacités de prévention, de sensibilisation et de lutte contre les inondations en Charente-Maritime, et plus particulièrement en Saintonge ?

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement.

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Marie Lebec, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement

Afin de faire face aux dégâts occasionnés en Charente-Maritime par les inondations de cet hiver et d'apporter une réponse rapide aux habitants sinistrés, les services de l'État se sont mobilisés pour une reconnaissance rapide de l'état de catastrophe naturelle. Soixante-treize communes ont ainsi été reconnues en état de catastrophe naturelle pour les inondations intervenues entre octobre et décembre 2023. Une dizaine de dossiers de communes touchées par les inondations de la fin du mois de février et du début du mois de mars 2024 sont en cours d'instruction. Afin de rendre plus efficace le dispositif de reconnaissance, le Gouvernement a rationalisé toutes les instructions par le biais d'une circulaire unique diffusée le 6 mai dernier.

Vous m'interrogez sur les pistes de travail à même d'améliorer la réponse à ces phénomènes. Je répondrai en trois points. Tout d'abord, les dispositifs de prévision ont été améliorés : le dispositif Vigicrues informe sur les risques de crue dans les vingt-quatre heures à venir, sur les 23 000 kilomètres de cours d'eau en France. Ce dispositif de vigilance couvre environ la moitié de la population qui réside en zone inondable et nous prévoyons de l'étendre à l'ensemble des cours d'eau. Nous développons, en parallèle, la vulgarisation de ces données et leur diffusion en modernisant l'application smartphone Vigicrues. De plus, des prévisions graphiques et des cartes d'inondation potentielle seront élaborées et améliorées dans les secteurs à fort enjeu du territoire.

Ensuite, de manière plus générale, il convient de mieux sensibiliser les élus, les citoyens et les exploitants industriels aux risques qu'ils encourent et de les informer sur les comportements à adopter en cas de crise. Le développement de la résilience des populations est un axe majeur de travail des préfectures, en lien avec les élus locaux. La journée nationale de la résilience, instaurée par la loi du 10 juillet 2023, est ainsi déclinée au plus près de la population, afin que chaque acteur développe une culture de la résilience et ait connaissance de son environnement.

Enfin, la prévention de ce type de phénomènes passe par l'adaptation des règles d'urbanisme. Les services territoriaux de l'État travaillent, en lien avec les collectivités locales, afin d'actualiser la connaissance des risques et d'améliorer continuellement les plans de prévention des risques naturels prévisibles.

Soyez donc assuré que le Gouvernement, en lien avec les acteurs sur le terrain, met tout en œuvre pour améliorer nos capacités de prévention, de sensibilisation et de lutte contre les inondations dans les territoires.

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Je vous remercie de votre réponse. Je suivrai avec attention les progrès réalisés en la matière, pour une meilleure prévention des risques et une meilleure sensibilisation à ceux-ci. Soyez assurée de ma parfaite disponibilité pour m'entretenir avec le ministre compétent sur ce sujet important pour notre territoire.

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La parole est à M. Jean-Pierre Pont, pour exposer sa question, n° 754, relative aux migrants dans le Pas-de-Calais.

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Les traversées de migrants dans le détroit du Pas-de-Calais n'ont jamais été aussi nombreuses : pour la seule journée du 20 mars 2024, 514 migrants syriens, albanais ou encore érythréens ont rejoint le Royaume-Uni, ce qui porte à 4 600 le nombre de migrants depuis janvier dernier – un record !

Les migrants ne cherchent plus à emprunter le tunnel sous la Manche ni le port de Calais, mais préfèrent partir en plein jour depuis les plages de Wimereux, de Boulogne-sur-Mer ou encore du Portel, embarqués sur des small boats. Une fois qu'ils sont en mer, il est légalement impossible d'intercepter leurs embarcations.

Cette impossibilité d'empêcher les migrants de traverser la Manche exaspère les autorités britanniques, compte tenu des crédits alloués par leur gouvernement – 543 millions d'euros sur trois ans. Cette situation exerce donc une pression énorme sur les forces de l'ordre françaises.

J'ai interpellé M. le ministre Darmanin à ce sujet en juin dernier, lors d'une réunion de la commission des lois. Il a alors annoncé l'envoi de forces de l'ordre supplémentaires. Elles sont bien arrivées et leur stratégie consiste en une forte présence sur les plages. Malheureusement, les réseaux de passeurs s'adaptent et les taxi boats attendent désormais en pleine mer, aux abords des plages, pour embarquer les migrants. Je rappelle qu'un passeur se met 250 000 euros dans la poche à chaque passage de bateau !

Afin de mettre un terme à cette situation et d'éviter de nouveaux drames humains – cinq personnes sont mortes le 23 avril dernier, dont une fillette de 7 ans, ce qui porte à dix le nombre de décès depuis le début de l'année –, il est indispensable de modifier les textes légaux qui interdisent l'intervention en mer des forces de l'ordre terrestres. C'est pourquoi je vous serais reconnaissant de nous indiquer si le Gouvernement entend agir en ce sens.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement.

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Marie Lebec, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement

Vous avez rappelé le mode opératoire des taxi boats, qui consiste à faire partir discrètement et rapidement une embarcation depuis les eaux fluviales ou une plage éloignée du point de rassemblement, puis à longer la côte afin de faire embarquer à proximité du rivage les candidats à la traversée. Ce procédé a émergé en 2022 et a été depuis très utilisé par les passeurs. Il limite les phases les plus favorables à l'intervention des forces de l'ordre, notamment celles de la mise à l'eau et de l'embarquement avant le départ en mer.

Dès le 10 mars 2023, une directive du préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord, relative au contrôle de ce type de transport illégal, rappelait le cadre juridique des contrôles en mer. Parallèlement, des moyens de lutte spécifiques contre ce procédé ont été déployés par la préfecture de zone et les forces de sécurité intérieure, tels que des barrages flottants installés notamment sur les embouchures des fleuves côtiers.

Le dispositif de la gendarmerie nationale sur la Côte d'Opale n'a eu de cesse de se renforcer au fil des ans, afin d'assurer une surveillance toujours plus adaptée aux flux migratoires observés sur le littoral. Financé en partie par des fonds britanniques, à la suite des accords de Sandhurst, il comporte à la fois des gendarmes mobiles, des réservistes et des gendarmes départementaux, soutenus par des moyens spéciaux de surveillance – hélicoptères, postes à cheval, drones – et des matériels adaptés à leur zone d'emploi et à leurs missions – embarcations nautiques, buggies ou encore jumelles à vision nocturne.

La bande littorale située dans la zone de compétence de la gendarmerie représente plus de 140 kilomètres pour ce qui concerne la région des Hauts-de-France. Pour couvrir ce trait côtier, ainsi que l'intérieur des terres, plus de 630 militaires de la gendarmerie, dont 411 réservistes, sont déployés chaque jour. Pour mémoire, le volume quotidien des réservistes employés était de 141 personnels en juillet 2022 ; il s'élève désormais à 411 depuis avril 2024 et atteindra 493 dès le 1er avril 2025 – ce qui traduit bien une progression des moyens.

La priorité est donnée aux contrôles en amont du littoral ou avant que les migrants n'embarquent. Ceux qui mettent en danger la vie des migrants sont les passeurs et les personnes qui les aident. S'agissant des modalités d'intervention, la nécessité de sauvegarder la vie humaine l'emporte sur toute autre considération.

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Je vous remercie et je vous invite à venir sur la Côte d'Opale rencontrer notamment les maires, qui gèrent ces problèmes, afin de mesurer leur désarroi face à un tel afflux. Nous venons d'ailleurs de découvrir un nouveau phénomène : des Vietnamiens arrivent en grand nombre sur les côtes afin de rejoindre la Grande-Bretagne.

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La parole est à Mme Bénédicte Auzanot, pour exposer sa question, n° 760, relative aux forces de l'ordre à Cavaillon.

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Le 9 mai 2023, il y a quasiment un an jour pour jour, le ministre de l'intérieur et des outre-mer annonçait, à la suite d'un énième règlement de comptes entre trafiquants de drogue à Cavaillon, un renfort de quarante-trois policiers dans le Vaucluse. Ceux-ci devaient arriver à la rentrée scolaire de 2023. Mais le 14 septembre, Mme la préfète de Vaucluse déclarait, dans l'hebdomadaire Vaucluse Hebdo, que seize policiers seulement étaient arrivés. En ce mois de mai 2024, le maire de Cavaillon affirme, dans le journal Objectif Méditerranée, que si des renforts sont bien parvenus à Cavaillon, ils n'ont servi qu'à remplacer des départs dus à des mutations.

Je souhaite donc connaître l'état des forces de police et de gendarmerie dans le Vaucluse au 1er mai 2023 et tel qu'il est actuellement. Je souhaite obtenir le même renseignement s'agissant du commissariat de Cavaillon : quel était son effectif en mai 2023 et à combien se monte-t-il aujourd'hui ?

Avec 36 000 faits de délinquance générale en 2023, soit près de 100 par jour, un record depuis dix ans, le Vaucluse est, comme l'a écrit un journal local, « drogué à la délinquance ». L'année 2023 a connu une hausse de 7 % des faits. Tel est le bilan du ministre pour notre département. Dans ce contexte, vos réponses permettront de savoir ce que vaut l'engagement du Gouvernement.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement.

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Marie Lebec, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement

Mieux protéger les Français est une priorité du Gouvernement et vous avez raison, la question des effectifs est centrale. C'est pourquoi un effort exceptionnel a été engagé depuis 2017, grâce au plan « 10 000 recrutements ». Il se poursuit grâce aux moyens financiers sans précédent – 15 milliards d'euros supplémentaires – que le Parlement a consentis avec la loi dite Lopmi – loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, adoptée le 24 janvier 2023. De 2023 à 2027, 3 900 policiers supplémentaires et 3 158 gendarmes ont ainsi été recrutés. Nous agissons aussi pour accroître fortement leur présence sur la voie publique, dans les transports en commun et dans les quartiers gangrenés par la drogue.

J'en viens aux éléments précis que vous avez demandés. Dans le Vaucluse, l'effectif opérationnel des gradés et gardiens de la paix affectés dans les services de la sécurité publique est passé de 383 agents à la fin de l'année 2016 à 497 à la fin de l'année 2023. L'effectif opérationnel des gradés et gardiens de la paix de la circonscription de police de Cavaillon est passé de 52 à 56 agents sur cette même période. Au 31 mai 2023, cet effectif se montait à 54 agents.

J'ajoute que cette année, les mouvements de mutation prévoient, d'ici au 31 août, six arrivées et un départ dans cette circonscription de police, soit encore cinq arrivées supplémentaires. L'engagement de 2021 – de cinq corps d'encadrement et d'application (CEA) supplémentaires – a donc été tenu et, vous le voyez, la progression se poursuit. Tous corps confondus, cette circonscription de police bénéficiait de 70 agents à la fin de l'année 2016 et de 74 agents à la fin du mois de mars 2023 ; elle compte 79 agents à la fin du mois de mars 2024 – dont 62 gradés et gardiens de la paix.

Au-delà de ces effectifs de policiers de la sécurité publique, les principaux mobilisés sur la voie publique pour assurer la sécurité du quotidien, je souhaite souligner que la police nationale dispose, à ce jour, dans le département, tous corps et tous services confondus, de 885 agents, alors que ses effectifs étaient de 786 à la fin de l'année 2016 et, pour répondre à la comparaison avec l'an dernier que vous avez demandée, de 868 à la fin du mois de mars 2023. Ce sont donc près de 100 agents supplémentaires qui ont été affectés dans le Vaucluse.

Quant au nombre de 43 policiers que vous évoquez, il concernait les postes ouverts au mouvement général des gradés et des gardiens de la paix en 2023 pour le département : 13 pour Avignon, 20 pour Carpentras et 10 pour Cavaillon. Au total, ce mouvement s'est traduit par 26 arrivées et 13 départs.

L'évolution notable des effectifs de la gendarmerie nationale entre 2023 et 2024 est due à la densification des pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie, à la création de 7 escadrons de gendarmerie mobile et de 80 nouvelles brigades de gendarmerie. Pour ce qui concerne les effectifs réalisés sur le groupement du Var, on note une baisse temporaire des postes de sous-officiers (SOG), alors que les effectifs autorisés sont stables. En effet, dans le cadre de la densification des pelotons de surveillance et d'intervention, les Psig, 20 postes de gendarmes adjoints volontaires (GAV) ont été transformés en postes de sous-officiers de gendarmerie, ce qui s'est traduit par une augmentation du nombre de postes de SOG et une baisse de celui des postes de GAV.

Pas moins de 15 sous-officiers supplémentaires ont été affectés en 2024, notamment pour la création d'une nouvelle unité à Cuers. Les postes de sous-officiers de gendarmerie créés n'ont pas encore été pourvus, mais le trou à l'emploi sera résorbé au plus tard à l'été, grâce au plan annuel de mutation et aux affectations de sous-officiers en sortie d'école.

Enfin, les statistiques de la délinquance enregistrée dans le département sont contrastées. Des indicateurs importants sont orientés à la baisse : les cambriolages de logements ont diminué en 2023 de 12 % par rapport à 2022, les vols violents sans arme de 7 %, et les destructions et dégradations volontaires de 7 %. La hausse d'autres indicateurs, tels que les homicides, les coups et blessures volontaires, les vols avec arme et les vols de véhicules, témoigne du combat difficile que nous devons continuer à mener.

À Cavaillon, la police nationale obtient des résultats encourageants : par exemple, en 2023, une baisse des vols, des cambriolages de logements et des vols de véhicules a été observée. Les violences contre les personnes ont en revanche augmenté de 5 % – on note toutefois une diminution de près de 3 % des coups et blessures volontaires et de près de 49 % des violences sexuelles. L'État est au rendez-vous et il poursuivra sans relâche ses efforts, grâce au soutien indispensable de tous les acteurs locaux, au premier rang desquels les maires et leur police municipale.

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La parole est à M. Jean-Louis Thiériot, pour exposer sa question, n° 747, relative à la licence IV.

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Ma question porte sur les modalités d'obtention d'un duplicata de la licence IV. Ce sujet qui peut paraître futile, j'en conviens, constitue parfois un réel irritant dans les territoires étant donné l'importance des débits de tabac.

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La licence IV, dite grande licence, comporte l'autorisation pour un débit de boissons de vendre tout type de boissons alcoolisées. Contrairement aux autres licences du code de la santé publique, l'ouverture de tout nouvel établissement de cette catégorie est interdite.

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Une « grande licence » ne peut donc être obtenue que par mutation, c'est-à-dire en achetant la licence comme un élément du fonds de commerce.

La date d'émission des licences IV en cours de validité étant souvent ancienne, il n'est pas rare que l'original de la licence ait été égaré au fil des années et des mutations, ce qui pose de réels problèmes au nouvel acquéreur.

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Ma question résulte d'un cas rencontré dans la troisième circonscription de Seine-et-Marne. Le détenteur d'un établissement installé à Ville-Saint-Jacques a acquis un fonds de commerce suite à une liquidation judiciaire. Alors que le numéro de licence est mentionné dans l'acte notarié, il se trouve dans l'impossibilité d'en obtenir une copie. Malgré le recours à la cellule d'appui juridique du ministère, ni le maire de la commune, ni le préfet, à qui je rends hommage, ne parviennent à lui fournir un tel document – il n'existerait pas de fichier des licences. Alors que le préfet a précisé que l'acte notarié faisait foi pour l'administration fiscale et qu'il devrait donc s'en contenter, les banques exigent une copie pro forma de la licence pour financer les opérations nécessaires à l'établissement pour se développer. La région Île-de-France le demande aussi pour octroyer des subventions.

Quelles solutions proposez-vous ? Quelles évolutions législatives ou réglementaires envisagez-vous pour surmonter cette difficulté ? Même si cela ne semble pas le dossier du siècle, je vous garantis que dans les territoires – où ces établissements redonnent vie aux villages en remettant de la proximité –, cette question constitue un sujet de fond – et un irritant qui nourrit les populismes.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement.

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Marie Lebec, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement

Ce n'est pas un sujet léger : la vie des villages est une question essentielle. Afin de réduire le nombre de débits de boissons sur le territoire national et de concourir à la lutte contre l'alcoolisme, le code de la santé publique interdit en effet la création de nouvelles licences de quatrième catégorie. Pour prendre en compte la situation des petites communes, confrontées à la disparition des licences IV, le législateur a permis, par la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, dite loi engagement et proximité, aux communes de moins de 3 500 habitants ne disposant pas d'un débit de boissons de quatrième catégorie de créer une nouvelle licence IV pendant une durée de trois ans. Dans les autres cas, la seule possibilité pour ouvrir un nouvel établissement doté d'une licence de quatrième catégorie est de recourir à une mutation, à une translation ou à un transfert.

Lorsque la preuve de la possession de la licence fait défaut, le professionnel peut saisir le maire de la commune dans lequel se trouve l'établissement, ou, à Paris, le préfet de police, en apportant tout élément permettant de prouver l'existence de la licence. Si elle existe et est toujours valide, un duplicata d'un récépissé de licence de débits de boissons lui sera remis. Chaque municipalité s'organise librement pour répondre aux demandes. À Paris, où la compétence appartient au préfet de police, un téléservice a été mis en place. À défaut de disposer de ce duplicata, un contrat de vente, un acte notarié, ou même un acte établi sous seing privé, permettent de justifier de la possession d'une licence IV. Le Gouvernement n'envisage pas de modifier ces dispositions, ni de créer un fichier national des licences IV, au vu du coût que cela représenterait pour l'État comme pour les collectivités territoriales. Au demeurant, les associations d'élus ne demandent pas la création d'un tel fichier.

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Merci pour ces éléments de réponse très satisfaisants. En tout état de cause, vous clarifiez les choses et je pourrai transmettre votre réponse écrite aux intéressés et, éventuellement, aux autorités ou aux banques. Le maire peut-il délivrer un duplicata à partir du document notarié qui mentionne le numéro de licence ? On m'a indiqué que le seul acte notarié ne suffisait pas. Dans le cas contraire, le maire pourrait le délivrer. Je suis preneur de telles solutions, mais je souhaite davantage d'informations.

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Nous avons besoin d'un engagement au banc, madame la ministre !

Sourires.

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Marie Lebec, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement

Je me permets de préciser la partie de ma réponse qui indique qu'à défaut du duplicata, un contrat de vente, un acte notarié ou même un acte établi sous seing privé permettent de justifier de la possession de la licence IV. Si je comprends bien votre question, il me semble qu'un acte notarié suffit – les modalités sont précisées dans la loi dite engagement et proximité.

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La parole est à M. Jean-François Portarrieu, pour exposer sa question, n° 739, relative au retrait-gonflement des argiles.

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Je souhaite évoquer le problème de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle consécutive à la sécheresse et la réhydratation des sols. Il y a six mois, dans cet hémicycle, j'ai alerté le Gouvernement sur la situation de nombreuses habitations dans le Nord toulousain, dont les structures ont été endommagées à la suite de la canicule estivale. Il y a quelques semaines, le maire de Bouloc et moi-même sommes allés à la rencontre de plusieurs habitants du Frontonnais pour suivre et évaluer l'évolution de leurs maisons. Murs lézardés, carrelages éclatés, piscines fissurées, fosses septiques effondrées font partie des dégâts que j'ai pu constater sur le terrain. Après plusieurs épisodes pluvieux, les terres argileuses sont gorgées d'eau et les habitants craignent que les sols se contractent à nouveau, dans quelques mois, à l'arrivée de chaleurs importantes.

Ces nouveaux rétrécissements des sols auront des conséquences inévitables sur les maisons : ils augmenteront les fissures sur les murs et les planchers. La vive inquiétude des familles occupantes se conjugue avec l'interrogation persistante sur la prise en charge de ces dégâts par les assurances si l'état de catastrophe naturelle n'est pas reconnu cette année encore. Alors que la France connaît chaque été des épisodes de sécheresse de plus en plus importants et enregistre un nombre record de demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, qu'envisagez-vous pour aider ceux de nos concitoyens qui sont concernés dans leurs démarches d'indemnisation ?

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement.

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Marie Lebec, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement

Face à la multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes, le Gouvernement a poursuivi l'adaptation du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles en assouplissant les critères de reconnaissance du phénomène de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols. Un décret publié le 6 février et une circulaire diffusée le 6 mai modifient les critères de reconnaissance et renforcent la prévention.

Concrètement, le Gouvernement a souhaité assouplir de manière significative les critères utilisés pour analyser l'intensité des épisodes de sécheresse et de réhydratation des sols survenus depuis le 1er janvier 2024. Les critères quantitatifs qui permettent de qualifier une sécheresse de catastrophe naturelle ont été revus. Il est désormais possible de reconnaître l'état de catastrophe naturelle dans les communes pour lesquelles l'intensité des épisodes de sécheresse et de réhydratation mesurée année par année n'est pas exceptionnelle, lorsqu'elles ont subi une succession anormale de sécheresses d'ampleur significative au cours des cinq dernières années. Enfin, en vue de limiter les effets de bord, la situation hydrométéorologique des communes limitrophes aux communes ayant demandé une reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle peut être prise en compte.

Afin de rendre les textes plus accessibles et compréhensibles – c'est un enjeu en soi –, le Gouvernement a diffusé le 6 mai 2024 une circulaire unique, actualisée, qui consolide et regroupe l'ensemble des procédures de reconnaissance, des règles d'instruction et des modalités de recours et de réexamen relatives aux arrêtés de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Par ailleurs, le décret publié le 6 février 2024 renforce la prévention : il oblige à affecter, sauf cas d'exception, l'indemnité d'assurance perçue au titre d'un sinistre reconnu à la réalisation effective des travaux de réparation durable des habitations. Le texte renforce aussi l'information des citoyens en cas de vente du bien assuré ayant subi des désordres indemnisés ou indemnisables.

Afin de mieux cibler l'indemnisation, celle-ci est désormais concentrée sur les sinistres susceptibles d'affecter la solidité ou d'entraver l'utilisation normale du bâtiment endommagé. Il s'agit d'accompagner en priorité les sinistrés confrontés à des dommages matériels susceptibles de créer à terme des dommages graves s'ils ne sont pas traités précocement. Enfin, un décret visant à mieux encadrer l'activité des experts missionnés par des entreprises d'assurance dans le cadre de dommages sur des bâtiments liés à la sécheresse est en préparation. Ces dispositions entreront en vigueur d'ici au 1er janvier 2025. Soyez assuré de la détermination du Gouvernement à améliorer la prise en charge des propriétaires sinistrés.

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L'assouplissement du régime d'indemnisation détaillé dans la circulaire la semaine dernière constitue une première réponse, qui peut s'avérer satisfaisante pour une partie des familles. Toutefois, je vous demande de prendre en considération l'ampleur du phénomène, qui ira croissant, et la vive inquiétude de certaines familles. Cette situation mérite d'être prise en compte et les critères d'indemnisation doivent être formulés de la manière la plus claire possible.

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La parole est à M. Jean-Charles Larsonneur, pour exposer sa question, n° 750, relative au collège Joséphine-Baker de Brest.

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Depuis de nombreuses années, je demande la révision de la carte de l'éducation prioritaire en Bretagne. Il est nécessaire de revoir le classement du collège Joséphine-Baker de Brest en réseau d'éducation prioritaire (REP), car il présente toutes les caractéristiques qui justifient un classement en réseau d'éducation prioritaire renforcé (REP+). Je salue au passage l'extraordinaire travail de ses équipes enseignantes et de sa communauté éducative

Les résultats aux évaluations nationales des élèves de quatrième en français et mathématiques sont les plus faibles de l'académie de Rennes : la part des élèves appartenant aux groupes satisfaisants s'élève à 12 % en français et à 5 % en mathématiques, contre respectivement 21 % et 15 % pour le collège les Hautes Ourmes de Rennes, qui est le seul établissement de l'académie classé en REP+. Par ailleurs, les résultats au diplôme national du brevet atteignent 65 à 70 % ces dernières années contre 80 % pour l'établissement REP+ précité – et plus de 90 % de réussite dans l'académie.

Enfin, son indice de position sociale (IPS), qui s'élève à 74,4, le plus faible de l'académie de Rennes, se situe dans la moyenne de ceux des établissements classés en REP+ à l'échelle nationale. Le classement de cet établissement en REP+ est donc une impérieuse nécessité. Ses élèves, ses enseignants, la jeunesse de Kerhallet et des quartiers environnants le méritent.

Plus généralement, la carte de l'éducation prioritaire n'a pas été mise à jour depuis qu'elle a été établie en 2015. Malgré l'annonce qu'a faite en décembre 2022, si ma mémoire est bonne, le ministre de l'éducation d'alors, M. Pap Ndiaye, sa révision est toujours attendue. Je ne méconnais pas les difficultés liées à son évolution, d'un point de vue budgétaire notamment, mais j'ai la conviction qu'elle est urgente. Quand pouvons-nous espérer une mise à jour ?

Permettez-moi, pour finir, de citer Joséphine Baker : « Vous devez obtenir une éducation. Vous devez aller à l'école et apprendre à vous protéger. Mais vous devez apprendre à vous protéger avec un stylo et non avec un pistolet ». Faites en sorte que cela soit possible pour les jeunes de Kerhallet et des quartiers environnants.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement.

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Marie Lebec, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement

La carte actuelle de l'éducation prioritaire, résultat de la refondation effectuée en 2014-2015, est constituée de 1 093 réseaux. Conformément aux annonces faites par les ministres de l'éducation nationale Pap Ndiaye, en 2022, puis Gabriel Attal, en 2023, les services de l'éducation nationale, se fondant sur un indicateur robuste, mènent des travaux sur la carte, travaux dont l'aboutissement figure bel et bien dans la feuille de route de la ministre Nicole Belloubet.

Nous visons une convergence entre la carte des quartiers prioritaires de la ville et celle de l'éducation prioritaire. C'est la raison pour laquelle nous travaillons avec les acteurs impliqués dans la politique de la ville. La révision de la carte avait été repoussée, dans le prolongement de la mission Territoires et réussite en novembre 2019, afin d'expérimenter le nouvel outil que constituent les contrats locaux d'accompagnement. Déployés sur trois ans et destinés aux écoles et aux établissements proches de l'éducation prioritaire, ils intensifient la prise en charge éducative des élèves en répondant au mieux à leurs besoins. Les premiers contrats arrivant à terme, des bilans académiques et un bilan national vont être établis prochainement.

Lorsqu'interviendra la révision de la carte de l'éducation prioritaire, seront pris en compte les indicateurs du collège Joséphine-Baker de Brest et les conditions de travail de ses enseignants. Soyez assuré que la ministre Nicole Belloubet suit personnellement cette situation.

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Je vous remercie, madame la ministre, de nous confirmer que ces travaux sont engagés et qu'un calendrier comportant des échéances raisonnables est sur la table. Nous saluons l'esprit dans lequel cette révision est menée : faire coïncider la carte des quartiers prioritaires de la ville et celle des établissements les plus en difficulté.

Je ne doute pas qu'au terme de cette évaluation et de cette révision, le collège Joséphine-Baker sera justement récompensé pour les immenses mérites de sa communauté éducative, de son équipe enseignante et de tous ses jeunes.

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Nous avons terminé les questions orales sans débat.

Madame la ministre, je profite de votre présence pour vous faire part d'une demande. L'organisation de cette séance a été quelque peu chaotique puisque les députés ont été prévenus hier soir à dix-neuf heures treize de l'heure à laquelle ils devaient intervenir, ce qui, compte tenu de l'éloignement des circonscriptions de certains, est problématique. Je souhaiterais que le Gouvernement, comme il avait coutume de le faire, transmette désormais l'ordre de passage au plus tard le vendredi précédant la séance de questions orales sans débat, ce qui fluidifiera son organisation.

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Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion du projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral pour les élections au Congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie ;

Élection d'un juge suppléant à la Cour de justice de la République ;

Discussion du projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture.

La séance est levée.

La séance est levée à douze heures vingt.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra