La réunion

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La séance est ouverte à dix-sept heures trente.

(Mme Isabelle Rauch, Présidente)

La commission auditionne M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.

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Monsieur le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications, je vous remercie d'avoir répondu favorablement à notre invitation. Notre commission n'avait pas encore pu échanger avec vous sur les domaines relevant de votre portefeuille ministériel. Je suis donc très heureuse de vous avoir parmi nous, dans un contexte de forte actualité des problématiques numériques.

À titre personnel, ces thématiques me passionnent et je considère depuis longtemps – davantage encore depuis que j'ai l'honneur de présider cette commission – que la transition numérique est le fait de société majeur de ce début de XXIe siècle. Nos modes de vie, l'ensemble de nos usages et de nos pratiques, le travail, les loisirs, la santé, la communication, la culture ou l'éducation : aucun champ de la vie sociale n'échappe à la révolution numérique. Celle-ci est loin d'être achevée et nous peinons parfois, du fait de la vitesse de son déploiement, à l'accompagner. L'enjeu de l'action publique réside pourtant dans la nécessité de poser des garde-fous, de faire respecter la loi dans un espace qui échappe encore trop souvent à l'ordre républicain, en un mot, de réguler.

Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour saluer la décision du Gouvernement d'inscrire à l'ordre du jour du Sénat la proposition de loi du président Laurent Marcangeli, laquelle vise à garantir la vérification de l'âge des utilisateurs sur les réseaux sociaux, condition nécessaire de la protection des mineurs dans l'espace numérique.

La protection des mineurs constitue justement l'un des grands axes du projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique, sur lequel je souhaite que notre commission formule un avis. Pouvez-vous nous en présenter les objectifs et le contenu, en particulier s'agissant des nouvelles compétences de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), de la lutte contre la cybercriminalité et de l'exposition des mineurs à des contenus pornographiques ? Par ailleurs, avez-vous des éléments de calendrier à nous communiquer ?

Je souhaite également vous interroger sur la stratégie française de recherche en matière d'intelligence artificielle. Grâce aux investissements du Gouvernement, la France s'est d'ores et déjà dotée de quatre instituts interdisciplinaires d'intelligence artificielle, à Paris, Grenoble, Toulouse et Nice. Face aux progrès exponentiels des technologies américaines, quelles sont les actions supplémentaires que pourraient mettre en œuvre les pouvoirs publics pour faire de notre nation, qui a toutes les compétences pour y parvenir, un leader dans ce domaine ?

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Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications

Je suis très heureux d'être parmi vous pour aborder un sujet qui façonne notre présent autant que notre futur, en l'occurrence le rôle du numérique dans la culture et dans l'éducation et son impact sur le fonctionnement de nos industries culturelles et créatives.

Le numérique est un formidable vecteur de communication, de partage et d'échange. Il a permis à l'humanité d'accéder plus facilement à l'information, de diffuser dans le monde entier la connaissance accumulée et de démultiplier les canaux de création. Alors que l'intelligence artificielle nous place à l'aube d'une nouvelle révolution, nos modes de création et de production de contenu se trouvent bouleversés.

Le numérique n'est pas une fin en soi. Il est un moyen de dépasser certaines frontières, de briser certaines barrières, et de nous réunir dans des espaces communs d'apprentissage et de découverte. C'est en tout cas ce qu'il devrait être ! Les outils numériques ont révolutionné la formation ; l'accès à l'éducation n'est plus limité par la géographie, le statut social ou les contraintes financières ; les cours en ligne et les plateformes d'apprentissage ont démocratisé l'éducation, permettant à chacun, quel que soit son âge ou son lieu de résidence, de se former, d'acquérir de nouvelles compétences et de s'épanouir intellectuellement.

Le numérique a également redéfini les frontières du possible en matière culturelle. Les musées, les bibliothèques et les centres culturels du monde entier ont ouvert leurs portes virtuelles, offrant ainsi un accès inédit à des trésors artistiques, littéraires et historiques. Il n'est plus nécessaire de voyager pour admirer La Joconde, explorer les hiéroglyphes égyptiens et se plonger dans l'immensité de notre patrimoine culturel et informationnel. Celui-ci est désormais « à portée de clic », même si se trouver physiquement devant La Joconde provoque toujours une émotion particulière.

Les avancées numériques ne se limitent pas à la démocratisation de l'accès à la culture et à l'éducation. Elles ouvrent aussi de nouveaux espaces d'interaction et d'échange. Les technologies immersives et le métavers ont suscité beaucoup de promesses au cours des dernières années. Ces espaces numériques, dans lesquels chacun peut créer un avatar et interagir avec d'autres utilisateurs, offrent, potentiellement, de vastes possibilités en matière d'apprentissage collaboratif, d'expérimentation artistique et de découverte culturelle.

Comme la présidente l'a rappelé tout à l'heure, le développement du numérique s'est toutefois accompagné de l'apparition de nouvelles menaces, qui plongent nos concitoyens dans des difficultés, des inquiétudes, voire des souffrances auxquelles nous devons apporter des réponses concrètes. Nous avons principalement relevé trois séries de problèmes : la déstabilisation des chaînes de valeur au sein des industries culturelles et créatives ; la propagation de fausses nouvelles et la désinformation, ; l'exposition des mineurs à des contenus inappropriés.

S'agissant de la déstabilisation des chaînes de valeur au sein des industries culturelles et créatives, le Gouvernement a créé un fonds d'aide à l'innovation numérique dans le secteur culturel. Celui-ci soutient des projets comme le site #culturecheznous, qui offre un accès en ligne à des œuvres culturelles françaises. Il reste cependant à trouver comment mieux répartir les revenus entre les acteurs culturels et les plateformes numériques, afin de disposer d'un écosystème équilibré.

Des questions se posent également concernant la rémunération de la presse. L'émergence des réseaux sociaux a suscité un débat au sujet du partage de la valeur. En 2019, la France a été le premier pays de l'Union européenne à transposer en droit national la directive sur les droits d'auteur dans le marché unique numérique à travers une loi, souvent dite « sur les droits voisins », qui vise à protéger les droits des éditeurs de presse et des journalistes face aux géants du numérique tels que Google et Facebook. Elle oblige ces plateformes à les rémunérer pour l'utilisation de leurs articles et de leurs contenus en ligne. Des accords ont été conclus, notamment, en 2021, entre Google et l'Alliance de la presse d'information générale française, pour rémunérer équitablement la reprise de contenus dans Google Actualités.

L'émergence des systèmes de dialogue et des agents conversationnels va toutefois nécessiter de remettre l'ouvrage sur le métier. Si nous ne faisons rien, les médias et les journalistes risquent, une nouvelle fois, de se voir confisquer une partie de la valeur qu'ils créent.

Pour lutter contre la désinformation, le Gouvernement a lancé, dans les écoles, un programme d'éducation aux médias et à l'information qui vise à développer l'esprit critique des élèves face aux informations diffusées en ligne. Des partenariats ont également été conclus avec des médias comme Le Monde et France Télévisions, afin de proposer des ressources pédagogiques de qualité. Il convient cependant de poursuivre ces efforts pour renforcer la résilience des citoyens face aux fausses nouvelles et aux manipulations en ligne. À ce sujet, je tiens à saluer le travail remarquable effectué par les députés Violette Spillebout et Philippe Ballard, dans le cadre de leur mission flash sur l'éducation critique aux médias.

S'agissant de l'exposition des mineurs à des contenus inappropriés, l'Assemblée nationale a récemment adopté une proposition de loi de Laurent Marcangeli. Elle vise à renforcer la protection des mineurs sur internet, en imposant aux plateformes d'instituer des mécanismes de signalement des contenus inappropriés et de vérification de l'âge des utilisateurs, en les obligeant à recueillir l'autorisation parentale avant 15 ans. Ce texte a le mérite de nous rappeler que les limites d'âge que nous respectons dans l'espace physique depuis de nombreuses décennies ne sont pas appliquées en ligne. Les réseaux sociaux fixent des règles dans ce domaine, mais ils ne les font pas respecter.

De nombreuses associations interviennent par ailleurs auprès des élèves pour les aider, en développant leur esprit critique, à adopter des pratiques responsables en matière d'utilisation d'internet et de médias numériques. Je peux notamment citer Génération Numérique, l'Union nationale des associations familiales (Unaf), l'Observatoire de la parentalité et de l'éducation numérique (Open) ou Tralalere, qui gère le programme Internet sans crainte.

Malgré ces efforts, il est indispensable de continuer à surveiller et à réguler les contenus numériques afin de garantir la sécurité des mineurs en ligne et d'accompagner leurs parents dans cette démarche. Nous allons prochainement lancer, avec le ministre des Solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, Jean-Christophe Combe, le programme Parents, parlons numérique, que certains connaissent sous le nom de Campus de la parentalité numérique. De très nombreuses offres existent, mais elles manquent de lisibilité et ne correspondent pas toujours aux attentes des familles ou à la diversité de leurs situations. Nous allons donc labelliser des structures, qui seront habilitées à effectuer cet accompagnement et qui lui donneront plus de visibilité.

En matière de protection des mineurs, deux autres propositions de loi ont été examinées en mars dernier par l'Assemblée nationale : celle de Bruno Studer concernant le droit à l'image des enfants et celle de Caroline Janvier concernant l'addiction aux écrans. Elles apportent, chacune, des réponses à la multitude de problèmes auxquels sont confrontés les parents qui essayent, tant bien que mal, d'accompagner leurs enfants vers un usage responsable et adéquat des outils numériques.

Puisque nous célébrons aujourd'hui la Journée de l'Europe, je terminerai mon propos liminaire en abordant la question de la régulation. La France joue un rôle moteur à ce sujet au niveau européen. L'objectif est de créer un ensemble de règles qui, prises de manière globale, constitueraient un marché unique du numérique. Elles s'imposeraient aux acteurs de l'économie numérique souhaitant intervenir au sein du plus grand marché du monde, c'est-à-dire le marché européen.

Le règlement sur les services numériques a été adopté l'année dernière, pendant la présidence française de l'Union européenne. Le règlement sur l'intelligence artificielle – au sujet de laquelle vous m'avez interrogé, madame la présidente – fait encore l'objet de discussions au Parlement européen. Il sera négocié dans les prochaines semaines avec le Conseil et la Commission.

Le règlement sur les services numériques est une petite révolution, car il fait entrer les plateformes dans l'ère de la responsabilité. Nous avions jusqu'à présent considéré que celles-ci – réseaux sociaux comme places de marché – étaient des hébergeurs et que, à l'instar des propriétaires d'entrepôts qui ne peuvent pas être mis en cause si leurs locataires y stockent des produits illicites, elles n'étaient pas responsables des contenus mis en ligne. L'objectif était de ne pas entraver la liberté de circulation des biens, des services ou des messages.

Au fil des années, cette approche a toutefois montré ses limites, entraînant la prolifération de messages illicites sur les réseaux sociaux et de contrefaçons sur les places de marché. Ces problèmes existent dans le monde entier, mais l'Europe est la première à faire évoluer sa réglementation pour introduire un régime de responsabilité pour les plateformes.

À l'avenir, les plateformes devront retirer les contenus illicites qui leur sont signalés et être vigilantes quant à la qualité des informations qu'elles diffusent. Les plus grandes d'entre elles devront en effet analyser le risque systémique qu'elles représentent pour la santé et le bien-être de leurs utilisateurs, ainsi que pour le débat public. Elles auront des obligations en matière de transparence. Leurs algorithmes devront être audités et les chercheurs devront avoir la possibilité d'accéder aux données pour exercer leur esprit critique et mettre en évidence des failles éventuelles. La publicité ciblée sur les mineurs sera interdite, de même que, pour les adultes, la publicité ciblée sur des données sensibles au titre du règlement général sur la protection des données (RGPD), comme l'orientation sexuelle ou les convictions religieuses.

En Europe, les plateformes, en particulier les plus grandes d'entre elles, vont donc se retrouver assujetties à un niveau de responsabilité bien plus élevé que celui qui existait jusqu'à présent. En ne respectant pas leurs nouvelles obligations, elles s'exposeront à des amendes pouvant atteindre 6 % de leur chiffre d'affaires et, en cas de récidive, à une interdiction d'exercer sur le territoire européen.

Le règlement sur les services numériques est d'application directe dans l'ensemble des pays de l'Union européenne. La Commission européenne vient de désigner les dix-sept plateformes, considérées comme les plus importantes, qui seront assujetties au niveau de responsabilité le plus élevée.

Pour que ce texte puisse s'appliquer correctement, nous devons faire évoluer certaines dispositions du droit français. Je présenterai demain au Conseil des ministres un projet de loi allant dans ce sens. Il sera inscrit à l'ordre du jour du Sénat au début de l'été et probablement à l'ordre du jour de l'Assemblée à la fin de l'été. Il attribuera à l'Arcom un rôle central de coordinateur des services numériques. Elle interviendra en appui de la Commission européenne, qui s'assurera du respect du règlement par les plus grandes plateformes.

Le règlement sur l'intelligence artificielle, qui n'est pas encore adopté, mais qui est au cœur de l'actualité, privilégie une approche par les risques. Il ne dit pas que l'intelligence artificielle est bonne ou mauvaise en soi, mais encadre son utilisation en fonction des usages. Elle sera ainsi interdite pour la surveillance généralisée des populations, par exemple. Dans certains domaines sensibles, comme la santé ou les transports, où des défaillances de logiciels peuvent mettre en danger des vies humaines, la mise sur le marché de systèmes enrichis par l'intelligence artificielle sera conditionnée à des obligations de transparence et d'audit. Elle pourra, en revanche, être librement exploitée dans d'autres activités, comme les jeux vidéo.

Les négociations qui s'achèvent intègrent les questions nouvelles posées par l'apparition de ChatGPT et d'autres outils comparables, dont les droits d'auteur, le respect de la vie privée ou la désinformation. Je souhaite que le législateur puisse renforcer le dispositif en cours d'élaboration afin d'apporter toutes les garanties nécessaires pour la confiance, donc pour un développement équilibré de l'intelligence artificielle en Europe.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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De nombreuses mesures ont été adoptées pour fixer un cadre optimal au fonctionnement de l'écosystème numérique en France. Elles avaient notamment pour objectifs de combattre la propagation de fausses informations ou de renforcer la protection des plus jeunes. Chaque année, nous constatons toutefois un besoin de renforcer notre arsenal législatif. Depuis 2017, la majorité présidentielle n'a cessé de s'y atteler. Dans le secteur de la culture, la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information ou la loi relative à la régulation et à la protection de l'accès aux œuvres culturelles à l'ère numérique ont permis de valoriser le patrimoine et d'assurer une plus juste répartition de la rémunération entre les acteurs. L'Arcom, dont vous souhaitez renforcer les moyens, a également été créée.

La France a souvent été pionnière – ou motrice, pour reprendre vos mots – dans l'évolution de la législation sur le numérique, inspirant certains de ses voisins. Il est toutefois nécessaire d'avoir un véritable dialogue au sein de l'Union européenne. En ce 9 mai, Journée de l'Europe, nous ne pouvons que souligner les bienfaits de cette coopération internationale.

Le projet de loi que vous présenterez demain au Conseil des ministres permettra d'adapter nos règles aux dispositions du règlement sur les services numériques (DSA). Vous avez également cité le règlement relatif à l'intelligence artificielle. Nous avons récemment évoqué les travaux de Cédric Villani, qui démontraient l'utilité d'une maîtrise de cette technologie. La semaine dernière, le président du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres) exprimait sa confiance dans la capacité de la France à préserver son avance, en matière de compétences et d'infrastructures, tout en nous appelant à la vigilance.

L'intelligence artificielle affecte fortement le secteur de la culture, même si nous n'en identifions pas encore tous les risques. Comment pouvons-nous protéger les œuvres de l'esprit, que l'intelligence artificielle utilise sans mentionner leurs auteurs ? Par ailleurs, qui détient les droits sur les contenus générés par une intelligence artificielle conversationnelle comme ChatGPT ? Les concepteurs de l'intelligence artificielle ou ses utilisateurs ?

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Quel que soit le terme utilisé – internet, numérique, digital ou informatique –, nous assistons à une transformation profonde de nos manières de travailler, de consommer, d'enseigner, de nous former, de dialoguer avec la banque, les services publics ou le médecin. De la boucle WhatsApp familiale aux courses en ligne en passant par les devoirs de nos enfants, toute notre vie est concernée par les écrans et les technologies qui les sous-tendent.

Le bouleversement est majeur dans l'éducation, comme nous l'avons constaté lors des confinements. En quelques années, les évolutions qu'ont connues des générations d'élèves à l'âge relativement proches sont frappantes.

Les textes se succèdent dans l'hémicycle. Vous avez notamment évoqué la loi relative à la prévention de l'exposition excessive des enfants aux écrans. Votre ministère a lui-même déployé une campagne de sensibilisation à ce sujet en février. Cependant, toutes ces initiatives ne me paraissent pas exprimer une vision claire de ce qui devra être fait dans les mois et les années à venir.

Nous sommes à l'aube d'un changement violent de civilisation, certainement bien plus violent que celui de l'ère post-Gutenberg. Le rôle de l'État est de faire en sorte que nos concitoyens vivent au mieux cette période de transition. Néanmoins, je crains que celle-ci ne nous entraîne dans une perpétuelle course à l'adaptation technologique. Or le monde de l'éducation a besoin de stabilité. Quelle est votre vision, monsieur le ministre délégué, de l'accompagnement à mettre en œuvre pour réussir la transformation numérique ?

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À l'image des vieux médias, le numérique est aujourd'hui entre les mains de quelques milliardaires. Dans un monde démocratique, juste et humaniste, leur priorité serait de faire du numérique un outil d'émancipation, de partage des savoirs, sûr pour toutes et tous, grâce auquel pourraient s'épanouir le pluralisme et l'indépendance de l'information et de la création. Malheureusement, nous ne vivons pas dans ce monde. La priorité de ces quelques milliardaires est ailleurs et leurs intérêts privés, qu'ils soient idéologiques, politiques ou économiques, régissent le numérique pour l'ensemble des utilisateurs.

Au cours des deux dernières décennies, le numérique a étendu son domaine d'influence et révélé ses menaces, parmi lesquelles la censure, les libertés prises avec le droit national, les fake news, le cyberharcèlement, les « influvoleurs », la surveillance automatique généralisée, la vente de données personnelles, les ingérences dans les processus électoraux – et j'en passe !

Le droit à l'information libre et indépendante, pilier de la citoyenneté et de nos démocraties, n'est clairement pas assuré dans l'espace numérique actuel. La jeunesse est en première ligne face à cette réalité. Pour la protéger, vous prévoyez d'instaurer une majorité numérique, mais ce dispositif ne pourra-t-il pas être contourné par un simple réseau privé virtuel (VPN) ? Plutôt que de s'appuyer sur des solutions technologiques qui portent souvent atteinte à la protection des données et qui seront probablement inefficaces à plus ou moins long terme, ne serait-il pas préférable de renforcer l'éducation et l'information ?

Nous avons compris que l'éducation au numérique n'était pas votre priorité, comme en témoigne la certification Pix. Les enseignants ne sont pas formés et les contenus sont inadaptés. Le matériel et le temps qui y sont consacrés sont en outre insuffisants.

Vous présenterez demain votre projet de loi sur la sécurité de l'espace numérique. Comment, concrètement, entendez-vous encadrer le pouvoir des grands groupes et garantir aux plus jeunes utilisateurs un espace numérique sûr ?

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L'Italie a considéré que le robot conversationnel développé par les États-Unis enfreignait, de multiples façons, la réglementation européenne protégeant les internautes et a donc décidé d'en bloquer l'accès pour atteinte à la législation sur les données personnelles. Vous considérez qu'il s'agit d'une « mauvaise réponse » et vous souhaitez que la France adopte une approche plus modérée.

Depuis 2021, le Parlement européen examine un projet de règlement encadrant l'usage et la commercialisation de l'intelligence artificielle. Pouvez-vous nous préciser le cadre dont vous souhaiteriez disposer ? Par ailleurs, comment réguler sans freiner l'essor de ces technologies, dont l'Europe ambitionne de devenir l'un des leaders ?

Selon Goldman Sachs, l'intelligence artificielle pourrait avoir des conséquences majeures pour le marché du travail et affecter 300 millions d'emplois à temps plein. L'étude porte sur les États-Unis, mais les effets pourraient être identiques en Europe. Paradoxalement, certains affirment, comme Bill Gates, que le plus grand risque serait de ne pas adopter assez rapidement ces technologies et de laisser s'installer un clivage entre les entreprises qui les utiliseraient et les autres. Quel est votre avis à ce sujet ?

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Les réseaux sociaux nous offrent le pire comme le meilleur. S'ils sont vecteurs d'échanges, de connaissances, d'idées et d'opinions dans le monde entier, leur raison d'être n'est pas la philanthropie. Les réseaux sociaux sont d'abord des entreprises, dont le modèle économique repose sur la publicité. Un tel modèle induit un ciblage précis des utilisateurs, qui sont considérés comme des consommateurs dont le profil et les données personnelles sont exploités. Pour générer des revenus, ce modèle suppose en outre que la publicité soit vue. Les réseaux sociaux font donc en sorte de valoriser les contenus qui suscitent l'engagement des utilisateurs et les font rester en ligne. Leurs algorithmes visent à nous exposer le plus possible à la publicité et à tous les contenus qui rémunèrent la plateforme, y compris de manière insidieuse par le biais des placements de produits et des partenariats. Notre attention est devenue un vaste marché, version 2.0 du « temps de cerveau humain disponible » selon la formule d'un ancien PDG de TF1.

Je m'interroge sur la réglementation actuelle de la publicité en ligne, probablement insuffisante, et je souhaitais connaître votre avis sur l'état du droit. En matière de protection des mineurs – au sens de la majorité numérique –, quelles actions envisagez-vous de déployer pour que nos enfants ne soient pas « les grandes victimes de la société numérique », pour reprendre l'expression que vous avez utilisée ce matin sur Europe 1 ?

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Le 15 janvier 2018, Parcoursup devenait la plateforme nationale d'admission en première année pour les formations du premier cycle de l'enseignement supérieur. Alors qu'elle est en place depuis cinq ans, elle reste opaque. La complexité de son fonctionnement, la hiérarchisation des vœux, les problèmes de connexion et le manque d'équipements sont autant de freins pour les jeunes, notamment dans les territoires ruraux, où la fracture numérique est une réalité.

Comptez-vous doter l'enseignement supérieur des moyens nécessaires pour permettre aux étudiants d'accéder à la transition numérique lors de leur admission et tout au long de leur cursus ?

La plateforme « Mon master », récemment apparue, marque un pas de plus vers la transition numérique. Malheureusement, elle ne fait qu'exacerber les difficultés et limites déjà observées depuis le lancement de Parcoursup. Indépendamment de la charge de travail supplémentaire qu'elle impose aux enseignants, nous pouvons nous interroger sur le respect du RGPD. En effet, elle suppose le téléchargement individuel de dossiers d'étudiants contenant des données personnelles, éventuellement médicales. Si la transition numérique est nécessaire, elle ne doit pas être réalisée à n'importe quel prix. Que comptez-vous faire pour protéger les données des candidats utilisant cette plateforme ?

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Le projet de loi que vous présenterez demain au Conseil des ministres s'inscrit dans la lignée de plusieurs projets de texte, notamment celui du groupe Horizons relatif à la majorité numérique, dont l'objectif est d'encadrer l'accès aux réseaux sociaux des moins de 15 ans, ou celui relatif aux influenceurs.

L'idée que l'espace numérique doit être régulé fait consensus dans la classe politique et dans l'opinion publique. Votre projet de loi répond à ce besoin urgent de régulation, essentiel pour lutter contre les arnaques, la pornographie ou le cyberharcèlement dont sont victimes beaucoup d'enfants et de jeunes, mais aussi un grand nombre de femmes.

Le cyberharcèlement constitue un délit sanctionné par des peines d'emprisonnement et des amendes, mais chacun sait que ces sanctions sont peu appliquées. Votre texte propose de nouvelles mesures, notamment l'interdiction pure et simple d'accéder aux réseaux sociaux pour les personnes condamnées pour un délit lié à la haine en ligne – harcèlement, racisme, sexisme, etc.

Certains juristes semblent sceptiques quant à l'efficacité de ces nouvelles dispositions, qui seraient, selon eux, contournables. Si le pseudonyme n'est pas un « totem d'immunité », l'adresse internet protocol (IP) ne permet pas nécessairement de remonter jusqu'à la personne incriminée. En effet, environ 80 % des accès aux réseaux sociaux se font avec des mobiles. Or ceux-ci utilisent une adresse IP dynamique, qui change à chaque extinction du téléphone.

Pouvez-vous nous rassurer sur l'efficacité des nouveaux dispositifs de sanctions que vous proposez, et plus particulièrement sur votre volonté d'adapter sans cesse les parades, afin que les harceleurs soient plus souvent punis ?

Par ailleurs, la proposition de loi du président Marcangeli soulignait que les réseaux sociaux ne jouent pas leur rôle de modérateur. Les messages de haine ou les incitations à la violence ne sont pas suffisamment contrôlés et supprimés. Il faut donc mettre les réseaux sociaux devant leurs responsabilités, en France comme au niveau européen. En cette Journée de l'Europe, qu'en est-il des avancées de nos voisins dans ce domaine ?

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Le robot conversationnel ChatGPT, lancé en novembre dernier, a fait beaucoup parler de lui et il ne s'agit probablement que d'un début. Ses capacités impressionnantes de rédaction de contenu, sur n'importe quel sujet, donnent un avant-goût de la puissance des technologies d'intelligence artificielle et de leur potentiel pour assister le travail humain, voire le remplacer. Selon l'étude déjà citée menée par les économistes de Goldman Sachs, 18 % des emplois pourraient être menacés à terme.

S'il est permis de douter des promesses de remplacement de l'éreintant travail humain par la machine, certains effets du développement du numérique sont d'ores et déjà concrets. L'extraction de minerais rares utilisés pour élaborer des composants électroniques, dont l'obsolescence programmée n'est plus à démontrer, constitue des sacrifices environnementaux importants. L'explosion du partage de données entraîne en outre une augmentation continue de la consommation énergétique des centres de données, qui nécessitent un refroidissement constant. Selon l'Agence de la transition écologique (Ademe), l'activité du secteur représente 2,5 % des émissions de gaz à effet de serre.

Par ailleurs, à défaut d'avoir supprimé un seul emploi à ce jour, l'intelligence artificielle en morcelle des centaines de millions à Madagascar, au Venezuela ou en Colombie. Les « petites mains » de l'intelligence artificielle travaillent dans des cybercafés, à leur domicile ou dans des sociétés qui ont pignon sur rue. Cette main-d'œuvre très peu qualifiée n'a pas de contrat de travail, car elle s'organise en microentreprises connectées à des plateformes en ligne. Les travaux du sociologue Antonio Casilli ont montré que la rémunération médiane de ces métiers tournait autour de 2 dollars de l'heure, sans assurance maladie, retraite ou autre forme de couverture sociale.

Monsieur le ministre délégué, n'ayant pas trouvé les réponses que je cherchais dans votre interview donnée à Libération la semaine dernière au sujet des garde-fous nécessaires au développement de l'intelligence artificielle, je vous poserai trois questions. Quand dépasserons-nous cette fascination technologique qui nous empêche de voir les dérives sociales et environnementales de cette industrie ? Quand exigerons-nous des entreprises technologiques qu'elles assument la responsabilité des destructions du travail et de l'environnement qu'elles risquent d'entraîner ? Comment faire pour que les promesses d'automatisation ne cachent pas des projets de microtravail, dans lesquels les investisseurs récupèrent les gains liés à la sous-traitance dans d'autres pays ?

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Si l'intelligence artificielle n'est pas nouvelle, nous faisons face à une démocratisation rapide de ses usages. Le caractère ludique de ces derniers ne doit pas occulter les nombreuses questions que posent ces technologies.

Il est difficile de ne pas évoquer l'enjeu de la désinformation. La production massive de photos, de vidéos et d'articles fallacieux rend de plus en plus difficile la distinction entre ces créations et la réalité. La protection des données des utilisateurs est également une question fondamentale, comme celle de la souveraineté. L'Italie a ainsi décidé d'interdire ChatGPT, qu'elle accuse de ne pas respecter la législation européenne. Dans l'enseignement supérieur et la recherche, les établissements ne savent pas encore comment appréhender l'utilisation de ces outils par les étudiants. Les conséquences seront aussi majeures en matière d'emploi et de formation. Dans le secteur de la culture, comment considérer les œuvres créées grâce à l'intelligence artificielle ? Le statut d'artiste doit-il être repensé ? Je ne reviendrai pas sur la sécurité, puisque mon collègue Jean-Félix Acquaviva avait soumis, lors de l'examen du projet de loi sur les Jeux olympiques et paralympiques (JOP), le premier amendement parlementaire rédigé par ChatGPT.

Considérer que nous avons besoin d'anticiper est inexact, tant nous sommes déjà fondamentalement avancés dans le développement de ces technologies. À quel point le Gouvernement est-il engagé pour maîtriser l'intelligence artificielle, mais aussi et surtout pour se prémunir de ses conséquences négatives ? Le règlement européen en cours de rédaction ne sera certainement pas suffisant pour traiter l'ensemble des sujets. Par conséquent, comment comptez-vous agir au niveau national ?

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Jean-Noël Barrot, ministre délégué

Des réflexions sont en cours, madame Calvez, pour trouver comment les créateurs de contenu, en particulier les journalistes, les artistes et les auteurs, pourraient être dûment rétribués. Lorsque j'ai rencontré, au début du mois de janvier, Sam Altman, le fondateur de l'entreprise OpenAI, qui a développé certains de ces systèmes de dialogue, je lui ai expliqué que nous étions face à une question de justice, mais aussi d'efficacité. S'ils ne sont pas rétribués, les créateurs d'œuvres ou de contenus originaux refuseront de les mettre à disposition pour l'entraînement de ce type d'outil. Il en a convenu. Aux États-Unis, des procédures judiciaires ont d'ailleurs été engagées par des organismes représentant la presse à l'encontre d'OpenAI. Au niveau européen, les négociations du règlement sur l'intelligence artificielle sont entrées dans la dernière ligne droite. Si elles devaient ne pas aboutir, nous pourrions éventuellement anticiper certaines dispositions en droit français.

Je ne sais pas quels sont les titulaires d'une œuvre créée avec l'intelligence artificielle. Est-ce que ce sont les concepteurs du logiciel ou ses utilisateurs ? Un partage des droits est-il envisageable ? Ces questions sont probablement trop récentes pour avoir des réponses définitives. Nous devons en revanche y réfléchir ensemble.

Pour répondre à Mme Blanc, je ne peux pas résumer en une phrase notre vision concernant le numérique et l'éducation, sachant en outre que je partage cette compétence avec le ministre de l'Éducation nationale et la ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche.

Plutôt que de considérer le numérique comme un obstacle et de chercher à l'exclure de l'école ou de l'université, ou, à l'inverse, de considérer qu'il faudrait en généraliser l'usage et tout basculer sur les tablettes, je crois que nous devons essayer de comprendre comment il peut renforcer les apprentissages et comment il peut les affaiblir.

Il est essentiel de développer l'esprit critique des élèves face au nouvel espace informationnel dans lequel ils devront, en tant que citoyens, évoluer. Des progrès doivent également être réalisés concernant la maîtrise des outils, afin de les utiliser à bon escient et de ne pas les subir. De ce point de vue, les annonces du ministre de l'Éducation nationale sur l'apprentissage du code dès la classe de cinquième, le retour des mathématiques pour tous en terminale ou la création de nouveaux bacs professionnels consacrés au numérique, constituent des avancées.

Certains usages du numérique sont nocifs ou toxiques. Un écran peut être un formidable outil d'apprentissage s'il est utilisé de manière active, pour développer la créativité. Il peut toutefois devenir un vecteur d'abêtissement lorsqu'il est utilisé de manière passive. À l'école et à l'université, nous devons donc être vigilants et concentrer le « temps de cerveau humain disponible » sur les usages les plus bénéfiques du numérique.

Je partage l'avis de Mme Amiot s'agissant des monopoles qui, dans l'économie numérique, abusent de leur position dominante et placent nos entreprises dans une situation de dépendance et d'assujettissement. Il faut mettre fin à la loi du plus fort et libérer nos entreprises de leur joug ou, si je puis m'exprimer ainsi, de leurs « chaînes numériques ». Il s'agit de l'objectif poursuivi par un autre règlement adopté pendant la présidence française de l'Union européenne.

Le règlement sur les marchés numériques (DNA) introduit certainement l'une des régulations commerciales les plus importantes depuis le début du siècle. Il reconnaît l'existence de pratiques commerciales déloyales et, plutôt que de les laisser être constatées et éventuellement sanctionnées a posteriori par des autorités de la concurrence, érige des interdictions administratives a priori. L'économie numérique va si vite que lui imposer les mêmes délais qu'aux autres secteurs causerait trop de dégâts.

Le texte fixe vingt-six nouvelles obligations et interdictions, qui correspondent à des pratiques commerciales déloyales, aux géants du numérique. S'ils ne s'y conforment pas, les amendes peuvent atteindre 10 % du chiffre d'affaires, voire 20 % en cas de récidive. Ainsi, il sera désormais interdit de vendre dans l'Union européenne un smartphone dans lequel un navigateur, un moteur de recherche ou un assistant personnel est préinstallé. Procéder ainsi revient en effet à fermer l'accès au marché à tous les autres fournisseurs. De même, les entreprises qui proposent un moteur de recherche ne pourront plus privilégier les services qui appartiennent à leur périmètre d'activité dans l'affichage des résultats, car ce type de pratique pénalise leurs concurrents.

Dans le projet de loi que je présenterai demain, nous appliquons le même principe au secteur du cloud. Celui-ci est détenu par trois acteurs, qui se partagent 70 % du marché et qui, par des pratiques déloyales, rendent les entreprises françaises et européennes dépendantes de leurs services. Cette situation pose un problème de souveraineté, qui, avec Bruno Le Maire, nous mobilise pleinement.

S'agissant de la question de Mme Meunier, la décision de l'homologue italienne de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), la Garante per la protezione dei dati personali, nous renvoie à l'un des sujets les plus préoccupants que nous devons régler concernant l'intelligence artificielle générative.

La Cnil italienne a relevé deux difficultés. La première concernait le traitement des données des utilisateurs de ChatGPT – je sais que ce n'est pas lui qui a rédigé votre question, madame la députée ! –, qui étaient conservées dans des conditions qui n'étaient pas conformes aux principes du RGPD. Les corrections étaient faciles à apporter et, grâce à l'intervention de la Cnil italienne, ces problèmes ont été en partie résolus.

La seconde reste en revanche en suspens. Si nous voulons développer ce type d'outils en Europe, plutôt que de les emprunter à d'autres puissances, nous devons trouver une solution pour rendre l'utilisation de grands échantillons de données compatible avec le RGPD et avec notre conception de la protection des données personnelles. Ceux-ci sont en effet indispensables au fonctionnement de l'intelligence artificielle.

Je ne pense pas que nous devons avoir une lecture rigoriste du RGPD, comme semblait vouloir le faire la Cnil italienne, et interdire le développement de l'intelligence artificielle en Europe. Une telle approche me paraît insensée. Nous devons au contraire essayer de trouver un équilibre entre innovation et régulation, en mobilisant des moyens techniques et technologiques d'une part, en faisant évoluer notre cadre réglementaire d'autre part. Nous fêtons cette année le cinquième anniversaire du RGPD, qui a donc été conçu bien avant l'émergence de l'intelligence artificielle générative.

Pour répondre à Mme Folest, le modèle d'affaires des plateformes pose effectivement des questions très préoccupantes concernant la santé des enfants. Leur intérêt pour ce public devrait toutefois être considérablement réduit par l'interdiction de la publicité ciblée sur les mineurs, prévue dans le règlement sur les services numériques. Il faudra certainement aller plus loin et analyser les pratiques commerciales de ces opérateurs. L'Autorité de la concurrence a d'ailleurs rendu une décision la semaine dernière, qui indique que Meta se livrait à des pratiques anticoncurrentielles, afin de préserver les profits associés à ses activités publicitaires. Nous devons donc avancer parallèlement au DSA, notamment avec la proposition de loi de Laurent Marcangeli, qui a été adoptée par l'Assemblée nationale et qui est inscrite à l'ordre du jour du Sénat la semaine prochaine.

S'agissant de la question de Mme Keloua Hachi, je crois que Parcoursup constitue un très bon exemple des forces et des faiblesses du numérique. Le fonctionnement de son algorithme n'a pas été compris, ce qui est très dommageable lorsqu'il est question d'un service public. Des corrections doivent donc être apportées à l'outil, y compris pour résoudre les éventuels problèmes de respect de la vie privée. Le système a toutefois de grands mérites. Avec le nouveau dispositif InserSup, les élèves pourront connaître le taux d'insertion dans l'emploi et le taux de continuation vers une autre formation de chacune des formations qui les intéressent. Ces indicateurs vont être insérés dans Parcoursup et permettront aux jeunes de faire leurs choix en ayant conscience des débouchés réels des formations proposées.

La question de Mme Carel portait sur le cyberharcèlement. Le DSA va harmoniser les pratiques au niveau européen. Certaines plateformes ont également commencé à déployer des processus de signalement et de retrait des contenus lorsqu'ils leur sont signalés, notamment parce que la France leur a imposé des règles de modération dans le cadre de la loi Avia et de la loi confortant le respect des principes de la République.

Le cyberharcèlement se propage comme un incendie sur les réseaux sociaux. Il est parfois lancé par des internautes qui se protègent – ou se croient protégés – derrière des pseudonymes, mais il peut aussi être l'œuvre d'internautes qui ont pignon sur rue et qui embrasent leur communauté pour déclencher des raids contre des victimes désignées. Le projet de loi que je présenterai demain au Conseil des ministres reprend une proposition issue des discussions que nous avons eues, dans le cadre du Conseil national de la refondation, avec des créatrices de contenu – que l'on appelle parfois les « streameuses » –, et des plateformes. Elles nous ont indiqué que lorsque leurs comptes sont suspendus, ces mêmes personnes se réinscrivent sur le réseau social concerné ou sur d'autres réseaux sociaux.

Avant d'évoquer la mesure proposée dans le projet de loi, je voudrais rappeler que la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur, défendue par Gérald Darmanin, va permettre le dépôt de plainte en ligne ou accompagné d'un avocat. Des kits de sensibilisation au cyberharcèlement seront en outre distribués aux forces de l'ordre, comme la Première ministre l'a annoncé à l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes du 8 mars. Par ailleurs, la loi d'orientation et de programmation du ministère de la Justice devrait permettre, en accordant des moyens supplémentaires à la justice, d'accélérer les enquêtes et de condamner les agresseurs, comme nous l'avons vu dans les affaires de Mila ou d'Eddy de Pretto.

La mesure que nous proposons s'apparente à ce qui est, dans un autre domaine, une interdiction de stade. Elle permettra aux juges de prononcer une peine complémentaire d'interdiction de réinscription sur le réseau social concerné pendant une période de six mois. Elle ne résoudra pas tous les problèmes de cyberharcèlement mais, pour les « chefs de meute » qui s'affichent fièrement comme étant des cyberharceleurs, elle pourra avoir une vertu dissuasive, en affectant directement leur communauté et leur notoriété.

Jean-Claude Raux m'a interrogé sur l'empreinte environnementale et sociale de l'intelligence artificielle. Je reconnais que ces deux sujets ne sont pas encore totalement pris en compte, même si le devoir de vigilance, dont le principe a été adopté au niveau européen, devrait progressivement permettre de les traiter.

Nous disposons désormais de chiffres concernant l'empreinte carbone du numérique. Elle représente 2,5 % de l'empreinte carbone du pays et a vocation à augmenter dans les prochaines années si nous n'agissons pas. Elle provient à 80 % des équipements et de leur fabrication. Pour la contenir à son niveau actuel en 2030, soit 17 millions de tonnes d'équivalent carbone, il nous suffirait de conserver nos smartphones, tablettes, ordinateurs et téléviseurs deux années supplémentaires.

Enfin, pour répondre à Béatrice Descamps, la désinformation constitue effectivement un problème majeur. Le règlement sur l'intelligence artificielle anticipait presque l'apparition des hypertrucages, puisqu'il impose de mentionner qu'une intelligence artificielle a été sollicitée pour la fabrication d'une image. Toutefois, compte tenu de la facilité à créer de fausses images et de leur prolifération, nous serons peut-être obligés de revoir le cadre dans lequel nous régulons et sanctionnons ces montages dans notre droit national.

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Nous en venons aux questions des autres députés.

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Monsieur le ministre délégué, je connais votre engagement pour protéger les mineurs des dangers du numérique, de la désinformation au cyberharcèlement, en passant par la pornographie. Le règlement DSA prévoit que les grandes plateformes devront coopérer avec des « signaleurs de confiance », comme des associations reconnues pour leur expertise dans le repérage des contenus illicites, et que leurs signalements devront être traités en priorité. Quelles garanties aurons-nous quant à l'effectivité de cette coopération ?

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Je n'évoquerai pas les progrès ou les menaces de l'intelligence artificielle, des métavers ou de toutes les évolutions du numérique. J'ai choisi de vous parler du numérique pour tous. L'illectronisme constitue en effet un réel enjeu en France. Selon une étude de l'Insee publiée en 2021, 17 % de la population française âgée de 16 à 74 ans n'ont pas, ou trop peu, de compétences numériques. Le Gouvernement a consacré 250 millions d'euros en faveur de l'inclusion numérique au sein de son plan de relance et a créé plus de 2 600 maisons France Services depuis 2019. Des conseillers numériques sont chargés d'accompagner les citoyens. Toutefois, les attentes restent bien supérieures à l'offre.

Alors que de nouvelles formations sont créées dans les lycées professionnels, avez-vous imaginé de nouveaux diplômes, par exemple des bacs professionnels, qui pourraient s'intituler « accompagnant numérique », « agent d'accueil numérique » ou « support utilisateurs » ? Avez-vous engagé, avec le ministère de l'Éducation nationale, une réflexion sur le développement de ces métiers d'accompagnement au numérique pour tous ? Ils pourraient en outre permettre de rompre avec l'image de l'informaticien masculin, spécialiste du codage ou expert en cybersécurité, et ouvrir le numérique à des métiers requérant moins d'années d'études et, je l'espère, plus féminisés.

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Monsieur le ministre délégué, vous avez déclaré vouloir faire de l'année 2023 celle de la fin de l'accès des mineurs aux sites pornographiques. Pour y parvenir, vous envisagez d'instaurer un dispositif de certification d'âge numérique dès septembre. En effet, 82 % des mineurs ont déjà été exposés à des contenus pornographiques et 62 % ont visionné leurs premières images avant 15 ans. Cette exposition précoce à des stéréotypes et parfois à des scènes de violence peut contribuer à façonner le rapport des enfants et des adolescents à la sexualité et au consentement.

Nous partageons votre préoccupation, mais il nous paraît illusoire de ne recourir qu'à des moyens d'interdiction, tant leur contournement paraît accessible à un grand nombre d'enfants et d'adolescents. Un simple VPN pourrait suffire. Nous pensons donc qu'il faut privilégier une approche éducative. L'Éducation nationale est chargée, depuis 2001, d'assurer une éducation à la sexualité. Trois séances annuelles sont en principe obligatoires. Or elles ne sont actuellement suivies que par 15 % des élèves. La certification d'âge n'est-elle qu'un moyen, qui pourrait par ailleurs se révéler inefficace, de pallier l'incapacité du Gouvernement à offrir à tous les élèves les cours d'éducation à la sexualité auxquels ils ont droit ?

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Lors de la Conférence nationale du handicap qui s'est tenue le 26 avril, a été annoncée une série de mesures visant à améliorer le quotidien des 12 millions de personnes en situation de handicap qui vivent dans notre pays. Parmi ces mesures, je souhaite appeler votre attention sur le plan de rattrapage pour l'accessibilité numérique des démarches et sites internet publics.

Je me réjouis évidemment que le Gouvernement souhaite « parvenir à l'accessibilité numérique à 100 % », mais cette obligation existait depuis 2019 pour le service public et pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 250 millions d'euros. Nous devons reconnaître collectivement qu'il s'agit d'un échec. Acheter un billet d'avion ou de train, faire ses courses ou postuler à une offre d'emploi sont autant de démarches qui restent difficiles à effectuer. La plupart des sites internet ne sont pas conçus pour être utilisés par des personnes en situation de handicap, ce qui entrave leur accès à bon nombre de services et complique leur vie quotidienne.

Le plan de rattrapage ne peut pas se contenter d'un objectif de 100 % d'accessibilité pour le service public. L'ambition doit être beaucoup plus grande. Que compte faire le Gouvernement pour que l'égalité d'accès au numérique soit enfin une réalité ?

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Vous connaissez l'intérêt du groupe Horizons pour la question du numérique et son nécessaire encadrement. Nous avons déjà évoqué la proposition de loi du président Marcangeli.

Je partage votre souhait de protéger nos concitoyens, de restaurer la confiance et de garantir l'ordre public en ligne, ce qui nécessite de faire respecter les lois déjà existantes et votées par le Parlement.

La question de la pornographie en ligne, accessible à tous, y compris aux mineurs, doit trouver une réponse concrète. Le projet de loi que vous allez présenter doit permettre de soustraire nos enfants au déferlement d'images pornographiques sur internet. Pouvez-vous nous préciser les mesures que vous envisagez en la matière et le mécanisme que vous souhaitez instaurer pour renforcer le pouvoir de l'Arcom ?

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Je souhaite vous interroger sur le sujet de la recherche en santé, dans le cadre de l'utilisation du numérique au sein de nos écoles. L'Étude longitudinale française depuis l'enfance (Elfe), conduite par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et l'Institut national d'études démographiques (Ined), parue dans le Bulletin épidémiologique d'octobre 2022 et disponible sur le site de Santé publique France, met en évidence, recherches pluridisciplinaires à l'appui, de nombreux effets délétères liés au temps excessif d'utilisation des écrans chez les enfants de 2 à 5 ans et demi.

Même si le numérique présente un réel intérêt pédagogique et inclusif, son incidence nocive et toxique pour la santé de notre jeunesse doit être considérée avec gravité. Notre système éducatif en a fait un levier pédagogique en milieu scolaire. Or, dans la petite enfance notamment, la surexposition aux écrans tend à accentuer les pathologies chroniques, comme le surpoids ou l'obésité. Je m'interroge également sur les aspects cognitifs et neurologiques et les effets sur l'axe stylo-bras-cerveau.

Comment le ministère compte-t-il limiter la place du numérique en milieu scolaire pour les moins de 5 ans et demi ? Sa généralisation est-elle tenable, dès lors que l'utilisation du numérique dans les foyers dépasse déjà les normes recommandées par les autorités sanitaires et médicales ?

Connaissez-vous les études en cours, en France ou à l'international, qui prônent une approche plus globale de l'impact du numérique sur le développement cérébral et sur la capacité d'attention – donc d'apprentissage – des enfants ?

La feuille de route que vous présenterez demain comportera-t-elle un volet sur la santé et la prévention, notamment concernant les aspects cognitifs et neurologiques ?

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Une fois n'est pas coutume, je viens porter la voix de la ruralité !

Sécurité sociale, chômage, impôts, retraite, billets de train : la plupart des démarches se font désormais en ligne. Or 17 % de la population, soit 13 millions de nos concitoyens, majoritairement en zone rurale, sont exclus du numérique. La moitié de ces personnes sont âgées de 75 ans ou plus, mais le taux d'illectronisme dépend également de la catégorie socioprofessionnelle.

Les départements ruraux sont particulièrement touchés par cet isolement numérique. Votre prédécesseur avait annoncé un plan de relance, doté de 250 millions d'euros, en faveur de l'inclusion numérique. Les initiatives locales déployées dans le cadre de ce plan se sont révélées efficaces. En Corrèze, une application numérique, un pass numérique et une plateforme collaborative ont notamment été lancés. Pour permettre l'accès de tous à internet en milieu rural, nous devons cependant aller plus loin. Ce sujet nécessite de la complémentarité et de la coordination entre les différents acteurs locaux. Les départements, les communautés de communes et les communes connaissent précisément les besoins du terrain et peuvent articuler au mieux les actions nécessaires pour réduire l'isolement numérique.

Est-il envisagé de reconduire les aides pour lutter contre l'illectronisme et de donner un véritable coup d'accélérateur à l'inclusion numérique dans nos territoires ruraux ?

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La loi créant la fonction de directrice ou de directeur d'école, que j'ai défendue, prévoyait, dans son article 5, que le directeur d'école pouvait, après consultation du conseil d'école, organiser l'élection des parents d'élèves par voie électronique. Cette disposition correspondait à une demande du terrain et était soutenue par les syndicats et les parents d'élèves. Le vote électronique représente un gain de temps et simplifie l'organisation du scrutin, particulièrement pour le directeur d'école ou les parents bénévoles. Il permet en outre aux parents éloignés de l'établissement de participer plus facilement à la vie démocratique, tout en réduisant fortement l'impact environnemental de ces élections.

Pourtant, alors que la loi est votée depuis plus de deux ans, le vote électronique n'est toujours pas effectif. Le ministre de l'Éducation nationale a fait part de difficultés techniques importantes, liées notamment à un manque de moyens informatiques. Lors de son audition à l'Assemblée le 2 août dernier, Pap Ndiaye a indiqué qu'il n'était pas possible, en l'état, de garantir la sécurité du vote pour les 24 millions de parents d'élèves concernés.

Monsieur le ministre délégué, pouvez-vous nous indiquer les actions que vous pourriez engager, avec le ministère de l'Éducation nationale, pour garantir un vote électronique sécurisé dans l'ensemble des établissements souhaitant utiliser cette possibilité ?

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Il est urgent de lutter contre le cyberharcèlement, qui touche 20 % de notre jeunesse. Il représente une violence insupportable, à laquelle nous nous sommes trop habitués. Nous ne sommes pas à la hauteur, face à une situation qui pousse 50 % des victimes à envisager la mort et qui conduit certains à se la donner.

Depuis le début de cette mandature, les enjeux de cyberharcèlement ont néanmoins été pris à bras-le-corps, avec une volonté transpartisane de trouver des réponses au désarroi des parents et des enfants. Je pense par exemple au texte de notre collègue Laurent Marcangeli, qui a été examiné par notre commission, et qui vise à instaurer une majorité numérique.

Monsieur le ministre délégué, je connais votre engagement en faveur de la protection des enfants. Il est aussi fort que le nôtre. Vous avez à cœur de concrétiser les annonces faites par Emmanuel Macron à ce sujet. Par conséquent, pouvez-vous nous préciser les mesures de lutte contre le cyberharcèlement que prévoit votre projet de loi ? Sachez qu'en la matière, les députés de notre commission, compétente pour traiter les questions liées à la jeunesse et à la communication, seront à vos côtés !

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Jean-Noël Barrot, ministre délégué

À la question de Fabienne Colboc, je répondrai que l'un des grands mérites du règlement européen sur les services numériques est de créer une nouvelle catégorie d'acteurs : les « signaleurs de confiance ». Ils seront désignés par le coordinateur des services numériques au niveau français et auront un accès privilégié aux plateformes lorsqu'ils auront identifié des contenus qui leur semblent devoir être retirés.

Je traiterai conjointement les questions de Béatrice Piron et de Francis Dubois. Un Français sur trois est aujourd'hui éloigné du numérique, soit parce qu'il n'est pas internaute, soit parce qu'il ne se sent pas compétent. Ce phénomène est plutôt en progression qu'en régression. Il n'est pas seulement générationnel, mais également social. Les personnes éloignées du numérique sont des ouvriers et des employés. Faiblement diplômées, elles habitent des communes rurales, plutôt que les grandes agglomérations.

En 2021, Cédric O et Jacqueline Gourault avaient annoncé le recrutement de 4 000 conseillers numériques, qui ont rejoint les maisons France Services, les collectivités, les chambres d'agriculture et des associations. Désormais, notre objectif est de structurer cette politique publique au niveau des bassins de vie et de désigner un chef de file dans chaque territoire. Toutes les personnes qui contribuent à cette politique – conseillers numériques évidemment, mais également responsables de médiathèque, secrétaires de mairie et l'ensemble de ceux qui accompagnent d'une manière ou d'une autre les personnes éloignées du numérique – auront accès à des formations et verront leur action coordonnée localement.

Les associations parties prenantes de cette politique ont, sous l'égide du Conseil national de la refondation, travaillé pendant six mois sur un projet de feuille de route. Celui-ci nous a été remis il y a quelques semaines et fait actuellement l'objet de consultations. Quelques amendements y seront apportés avant qu'il soit signé. Ce texte engagera ensuite tous les acteurs de cette filière d'accompagnement des personnes éloignées du numérique.

Paul Vannier a évoqué le sujet du VPN. Le projet de loi que je présenterai demain comprend des mesures pour protéger les enfants contre les contenus inappropriés, en particulier à caractère pornographique. Il en est de même de la proposition de loi de Laurent Marcangeli, qui prévoit d'imposer une vérification d'âge sérieuse sur les réseaux sociaux. Parmi les 2 millions d'enfants qui sont exposés chaque mois à des contenus pornographiques et le tiers d'enfants de moins de 12 ans qui ont déjà été exposés à de tels contenus, beaucoup l'ont été de manière involontaire, en effectuant des recherches sur internet. Les mesures de vérification et de blocage que nous souhaitons instaurer éviteront ces situations. Cette raison me semble suffisante pour les mettre en place.

S'agissant de la question d'Alexandre Portier, le Gouvernement s'est engagé à ce que les 250 sites publics les plus consultés soient accessibles en 2025 et à ce que tous le soient en 2027. Nous avons effectivement pris du retard dans ce domaine. En outre, pour que l'égalité d'accès aux services numériques devienne une réalité, il faudra aussi que les entreprises et les collectivités engagent les efforts nécessaires.

Nous devons par ailleurs revoir la manière dont nous concevons la dématérialisation de nos procédures. Dématérialiser des procédures complexes ne les rend pas plus simples, au contraire. Avant de les numériser, nous devons donc commencer par simplifier les démarches que nous imposons aux usagers des services publics. J'étais, la semaine dernière, au G7 des ministres du numérique. Le ministre indien et la ministre ukrainienne, qui y étaient invités, nous ont expliqué de manière magistrale comment la numérisation des services publics pouvait améliorer l'inclusion numérique et non renforcer l'exclusion, comme nous le constatons souvent lorsque nous dématérialisons un peu brutalement des procédures que nous n'avons pas, au préalable, cherché à rendre plus accessibles.

Pour répondre à Béatrice Bellamy, une loi, adoptée en 2020, impose aux sites pornographiques de vérifier sérieusement l'âge de leurs utilisateurs. Si ce n'est pas le cas, l'Arcom a le pouvoir de les mettre en demeure et, à l'issue d'une période de quinze jours, elle peut saisir le tribunal judiciaire de Paris. Elle l'a fait il y a un an et demi pour cinq sites pornographiques, qui ne vérifiaient pas l'âge de leurs utilisateurs. Cette procédure judiciaire est en cours et le verdict devrait être rendu le 7 juillet. Je souhaite de tout cœur qu'il soit exemplaire. Nous voulons toutefois aller plus vite et plus fort, en donnant à l'Arcom le pouvoir d'ordonner, à l'issue d'une période de quinze jours, le blocage et le déréférencement des sites n'effectuant pas ces vérifications d'âge. Ces sanctions pourraient être assorties d'une amende, pouvant atteindre 4 % du chiffre d'affaires mondial. Notre objectif est de pouvoir mettre fin beaucoup plus rapidement aux situations dans lesquelles des mineurs peuvent se trouver exposés à des contenus pornographiques.

Nous partageons le diagnostic fait par M. Philippe Berta. Un consensus scientifique émerge concernant les conséquences de l'exposition excessive aux écrans sur le développement et la santé des enfants. Une étude réussira toujours à montrer que l'usage intelligent d'un écran peut être source d'apprentissage. Néanmoins les preuves scientifiques qui s'accumulent ont justifié la proposition de loi de Caroline Janvier, qui vise à la fois à sensibiliser les professionnels de la petite enfance et à imposer aux constructeurs d'indiquer sur les emballages de leurs équipements les risques associés à une exposition excessive aux écrans.

Je m'engage, madame Rilhac, à relancer le ministre de l'Éducation nationale pour savoir où en est la mise en place du vote électronique pour les parents d'élèves.

Enfin, pour répondre à Laurent Esquenet-Goxes au sujet du cyberharcèlement, le projet de loi qui sera présenté demain au Conseil des ministres viendra compléter d'autres mesures adoptées récemment par le Parlement dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur. Nous pourrons en outre nous appuyer sur le renforcement des moyens de la justice, qui figurent dans la loi d'orientation et programmation du ministère de la Justice. Grâce à cet arsenal, j'espère que nous parviendrons à enrayer ce phénomène, que vous décrivez parfaitement et qui est tout à fait intolérable.

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La place que prend le numérique dans nos vies doit nous amener à nous interroger sur la société que nous voulons. Les plus âgés et les plus jeunes sont confrontés à des problématiques exactement inverses. Les premiers souffrent d'une méconnaissance de l'outil numérique qui rend leur vie de plus en plus compliquée, tandis que les seconds connaissent une surexposition croissante aux écrans. Qui n'a pas observé, au restaurant, des parents qui confient à leurs enfants une tablette pendant une heure ou deux, voire davantage, pour les tenir tranquilles ? Votre ministère a-t-il engagé une réflexion, presque philosophique, sur ces sujets ?

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Les inégalités dans l'accès et l'usage des technologies numériques sont à l'origine d'un fort isolement social, en particulier pour les 27 % de plus de 60 ans qui n'utilisent jamais internet. Celui-ci est devenu incontournable pour garder le contact, se cultiver, se divertir, faire des démarches ou des achats et même pour se soigner – prise de rendez-vous en ligne, téléconsultation, partage de données médicales. Les objets connectés sont également de plus en plus nombreux.

La fracture numérique touche particulièrement nos aînés, par l'absence d'équipements, leur prix ou leur usage estimé complexe, mais également par manque d'intérêt ou peur du piratage et de l'arnaque. Si de nombreux dispositifs permettent de sécuriser les données, beaucoup de risques résident dans les usages. Je pense notamment à cette personne qui a été dupée lors d'un appel téléphonique par un pseudo-agent bancaire, qui a réussi à lui soutirer les données de son compte. Quels moyens mettez-vous en œuvre pour protéger nos concitoyens les plus âgés, qui apparaissent beaucoup plus vulnérables que les autres usagers du numérique ?

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Le plan France très haut débit prévoyait le déploiement de la fibre optique jusqu'à l'abonné dans 80 % du territoire en 2022. Or les zones rurales restent fortement lésées, puisque, selon l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep), nous n'en sommes qu'à 65 %. De nombreuses zones blanches demeurent en outre s'agissant de la couverture téléphonique ou FM. Quand les engagements pris seront-ils respectés ?

Par ailleurs, j'ai écouté attentivement votre intervention ce matin sur Europe 1 au sujet du filtre antiarnaque. Vous avez indiqué que celui-ci s'activerait à la suite d'une notification de l'arnaque auprès de l'Arcom. Le projet de loi prévoit de mettre à contribution les opérateurs de télécommunications, qui seront chargés de créer une liste rouge des sites frauduleux. Quelles garanties avons-nous qu'ils joueront le jeu ? Nous savons en effet que les pratiques de nombreux opérateurs restent très opaques concernant les abonnements abusifs, facturés sur les abonnements téléphoniques des clients sans que ceux-ci aient au préalable donné leur accord.

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Depuis le 26 avril dernier, nous savons que le Gouvernement présentera demain un projet de loi sur l'espace numérique. La quasi-totalité des mesures dont nous avons eu connaissance, souvent par voie de presse, relève d'une vision réductrice de la protection des mineurs face aux dangers d'internet. Elles privilégient l'interdiction et la sanction. Aucun dispositif ne semble prévu pour informer, sensibiliser, encadrer et éduquer les plus jeunes aux dangers d'internet. Il existe pourtant de nombreux outils pour accompagner les familles et les milieux éducatifs et scolaires. Je peux notamment citer l'association e-Enfance, le programme Internet Sans Crainte ou le Centre pour l'éducation aux médias et à l'information (Clemi). Le recours à ces dispositifs semble malheureusement relégué au second plan dans les interventions publiques des membres de l'exécutif. Quelle sera la place accordée à l'accompagnement et à la formation des enseignants, des enfants et de leur famille ?

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Je vous remercie pour le projet de loi que vous présenterez demain, car il est très attendu par nos concitoyens. Internet est certes un formidable outil, mais les dérives actuelles imposent de le réguler, notamment pour protéger la jeunesse.

Un renforcement du dispositif de blocage est prévu pour les sites pornographiques qui laisseraient les mineurs accéder à leurs contenus. Les obligations actuelles peinent très clairement à être appliquées par l'Arcom. J'en veux pour preuve les témoignages sidérants que j'ai pu entendre de la part d'élèves de CM1 ou de CM2, qui confirment malheureusement que la consultation de ces sites est à la fois fréquente et extrêmement simple. Comment comptez-vous faire pour rendre les nouvelles dispositions plus efficaces ?

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Vous considérez que l'intelligence artificielle générative, incarnée par le désormais célèbre ChatGPT, n'est qu'un « perroquet approximatif ». Toutefois, ce type de logiciels soulève de nombreuses questions, notamment en matière de propriété intellectuelle. Cette intelligence artificielle génère en effet des textes ou des images à partir de créations originales, qui lui servent de données d'entraînement. Il s'agit donc de créer à partir d'autres créations. Dans ce cas, que vaut l'idée de création ?

Notre exception culturelle française a toujours visé à défendre les créateurs, sources de toute matière artistique et intellectuelle. Face aux défis que représente cette intelligence artificielle générative, nous devons défendre les droits d'auteur. Ne pensez-vous pas qu'il faille imposer des droits voisins aux applications d'intelligence artificielle entraînées à partir de données relevant de la propriété intellectuelle ?

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Je suis membre de la délégation aux droits des femmes et, à la demande de sa présidente Véronique Riotton, je souhaite vous interroger sur la question du cyberharcèlement à l'égard des femmes. Celles-ci sont en effet vingt-sept fois plus victimes que les hommes de cette forme de harcèlement. Ces violences sont en outre invisibilisées. Secret de la correspondance, banalisation du phénomène et utilisation d'anglicismes – revenge porn, grooming, etc. – ont pour conséquence de les minimiser et d'exacerber la difficulté à les quantifier et à les qualifier, pour les décideurs publics, comme pour les victimes.

De nombreux dispositifs existent pour venir en aide aux victimes. Proposés par divers acteurs institutionnels, comme la Plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (Pharos), par des associations ou émanant des plateformes, ils sont dans la grande majorité des cas méconnus des victimes.

Pouvez-vous nous préciser la politique de votre ministère en matière de lutte contre les cyberviolences sexistes et sexuelles et nous indiquer si le texte que vous préparez comportera des mesures pour le mettre en lumière ce fléau et le combattre ?

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La protection des mineurs face à la haine en ligne, les propos racistes et sexistes, ainsi que le harcèlement, est un enjeu très important de notre époque. En effet, 25 % des collégiens déclarent avoir connu au moins une atteinte à leur vie privée en ligne et 60 % des jeunes adultes ont déjà été harcelés sur internet.

Il ne faut malheureusement pas compter sur les plateformes pour limiter d'elles-mêmes ces contenus, car ce sont ceux qui recueillent le plus de vues et qui génèrent le plus de recettes publicitaires.

Les solutions techniques que vous proposez ne suffisent pas. Toutes semblent pouvoir être contournées à plus ou moins long terme. Par conséquent, l'éducation aux usages numériques apparait comme la mesure la plus efficace. Cet apprentissage doit se faire le plus tôt possible et l'école doit pleinement jouer son rôle, ce qui nécessite de véritables moyens pour remplir cette mission. Or ceux-ci se réduisent. Les cours de technologie sont par exemple supprimés en classe de sixième.

Quels moyens envisagez-vous de déployer, dans le cadre scolaire, pour apprendre à nos enfants à se protéger dans des espaces où la règle est justement de s'exposer et pour leur apprendre quels sont leurs droits et leurs devoirs sur les réseaux sociaux ?

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Nous savons que 62 % des jeunes ont vu leurs premières images pédopornographiques avant d'entrer au lycée, soit avant 15 ans, et un tiers avant 12 ans. L'accès des enfants et des adolescents à la pornographie est doublement facilité par la navigation autonome sur internet et par des contenus gratuits et libres d'accès proposés par des sites pornographiques illégaux.

La Cnil a récemment conduit une vaste étude sur les pratiques numériques des jeunes, selon laquelle 82 % des enfants de 10 à 14 ans déclarent aller régulièrement sur internet sans leurs parents. En 2019, seulement 44 % des parents avaient paramétré l'appareil de leur enfant et 38 % recouraient à des dispositifs dits de contrôle parental. Alors que la loi a récemment renforcé ces derniers, quel bilan pouvons-nous tirer après quelques mois ? Quelles améliorations sont nécessaires ? Par ailleurs, connaissant votre engagement à ce sujet, monsieur le ministre délégué, quels enseignements tirez-vous de la consultation publique lancée sur le projet de décret visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d'accès à internet ?

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La radio, qui rassemble 40 millions d'auditeurs quotidiens, reste le média préféré des Français. Toutefois, depuis quelques années, elle est confrontée à la concurrence de nouvelles offres de services en ligne, comme les plateformes de musique ou les podcasts. Le fait d'avoir supprimé la puce radio FM DAB+ des smartphones oblige les citoyens à utiliser la 4G, donc à consommer des données pour accéder à la radio.

L'écoute en mode digital de la radio reste cependant minoritaire. Par conséquent, il est indispensable de généraliser en France la radio hertzienne numérique terrestre de qualité HD, le DAB+. Comme la bande FM vieillissante, il échappe à la mainmise des géants du numérique. Gratuit et anonyme, il est accessible à tous.

La diffusion en DAB+ coûte huit fois moins cher que la FM. Ce standard a mis dix ans pour s'installer en France, notamment à cause du blocage de grands groupes privés. Grâce à l'impulsion de Radio France et de nouveaux entrants nationaux, tels Crooner Radio, la diffusion en DAB+ est adoptée par toutes les grandes radios. Quels sont vos objectifs en matière de DAB+ ? Quels moyens pourraient être alloués à son développement ?

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La stratégie E-sport 2020-2025 a pour objectif de faire de la France le leader européen du secteur. Les Assises de l'e-sport, organisées par les ministres en charge de l'économie numérique et des sports au premier trimestre 2019, avaient marqué une première étape majeure. Elles ont permis d'engager une réflexion de fond sur la structuration de l'écosystème de l'e-sport français, en vue d'établir une feuille de route à l'horizon 2025. Imaginez, monsieur le ministre délégué, que vous êtes en 2025 : quel bilan dresseriez-vous de cette politique, un an après les Jeux olympiques ?

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Comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre délégué, le numérique n'est pas une fin en soi, mais un moyen pour briser des barrières et nous réunir dans un espace commun. Il entraîne cependant de nouvelles menaces, inquiétudes et même souffrances, en permettant notamment la propagation de fausses informations.

J'ai auditionné aujourd'hui l'équipe du Conseil national du numérique, qui déploie l'opération Itinéraires numériques partout en France depuis un an. Celle-ci est riche d'enseignements, qui rejoignent ma conviction qu'il faudrait instaurer un véritable service public d'éducation populaire au numérique et aux médias, en s'appuyant sur les conseillers numériques France Services, les centres sociaux et les maisons des jeunes et de la culture. Que pensez-vous de cette proposition ?

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Alors qu'elle n'en est qu'à ses prémices, l'intelligence artificielle bouleverse déjà notre siècle. Elle va déboucher sur des transformations radicales de nos sociétés. Si elle promet de nombreuses innovations, elle pose légitimement beaucoup de questions. Afin de limiter les risques, d'éviter les dérives qui pourraient encore creuser les inégalités et surtout de placer l'intelligence artificielle au service d'une société humaniste, il est essentiel d'anticiper et de créer un cadre réglementaire européen adapté. Pouvez-vous nous préciser les intentions et exigences du Gouvernement concernant le projet de règlement européen sur l'intelligence artificielle ?

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Jean-Noël Barrot, ministre délégué

Les deux catégories de la population que vous avez citées, madame Genevard, à savoir les plus jeunes et les plus âgés, ont un point commun : ce sont les plus vulnérables. Ils sont les principales victimes des désordres ou des agressions qui prospèrent aujourd'hui en ligne et contre lesquels nous devons agir.

Monsieur Fait, le filtre antiarnaque est l'une des mesures qui figurera dans le projet de loi qui sera présenté demain. Ce dispositif, souhaité par le président de la République, sera simple et gratuit. Il filtrera préventivement les adresses des sites clairement identifiés comme malveillants, pour éviter que les personnes les plus vulnérables, en particulier les plus éloignées du numérique, soient dupées par un faux SMS de la banque, de l'assurance maladie ou du compte personnel de formation.

Pour répondre à M. Ballard, le plan France très haut débit et le New Deal mobile pour la téléphonie mobile sont deux très grands succès français. Nous avons atteint les objectifs que nous nous étions fixés il y a dix ans pour la fibre et il y a cinq ans pour le mobile, en l'occurrence 80 % des Français raccordables à la fibre en 2022 et la disparition de milliers de zones blanches pour le mobile. Dans les deux cas, nous y sommes parvenus grâce à un accord intelligent, dans lequel chacun se respecte, entre l'État, les collectivités et les opérateurs.

Le filtre antiarnaque ne sera pas une compétence de l'Arcom. Plusieurs autorités administratives seront mises à contribution. Certaines d'entre elles reçoivent déjà notification de sites correspondants à des arnaques. Elles compileront l'ensemble de leurs données dans une liste unique, actualisée très fréquemment, qui permettra de protéger nos concitoyens. Vous savez comment ces attaques fonctionnent. Vous trouvez une idée, par exemple demander le règlement urgent d'une amende, et vous envoyez un SMS à des dizaines ou des centaines de milliers de personnes en espérant qu'elles soient très nombreuses à tomber dans le piège, à cliquer sur le lien et à renseigner leurs coordonnées bancaires. Le filtre évitera que ce type d'arnaque se propage.

La question d'Idir Boumertit rejoignait celle de Hendrik Davi. Je ne l'ai pas mentionné tout à l'heure mais, dès l'an prochain, tous les élèves de sixième seront sensibilisés aux risques et aux gestes à adopter en ligne, lorsque l'on crée un compte sur un réseau social, que l'on est victime ou témoin de cyberharcèlement, etc. Ce module, dispensé par Pix dans les salles informatiques de tous les collèges de France, entrera dans le cadre du passeport numérique.

Pour répondre à Bertrand Sorre, nous allons mettre en place des mesures permettant à l'Arcom de bloquer et de déréférencer les sites pornographiques.

S'agissant de la question d'Emmanuelle Anthoine, j'avais bien en tête, en convoquant la figure du perroquet – même si je le qualifiais « d'approximatif » –, le problème des droits d'auteur. Nous avons réussi à le résoudre concernant les réseaux sociaux. La situation n'est pas totalement identique, mais nous allons maintenant devoir le faire pour l'intelligence artificielle.

Pour répondre à Graziella Melchior, la mesure de bannissement complétera notre arsenal pour lutter contre le cyberharcèlement, dont les femmes sont en effet les principales victimes.

Concernant le contrôle parental, sur lequel m'a interrogé Karl Olive, le décret est au Conseil d'État et devrait en sortir à la mi-mai. Les industriels auront ensuite une petite année pour se mettre en conformité avec les nouvelles dispositions et permettre au contrôle parental d'être généralisé.

En matière d'e-sport, monsieur Belhaddad, l'objectif est de concrétiser les ambitions annoncées par le président de la République dès 2025. Trois compétitions internationales devraient être organisées dans notre pays. La première le sera la semaine prochaine. J'assisterai au Blast.tv Major de Counter-Strike le dimanche 21 mai : si vous êtes disponibles, vous y êtes les bienvenus !

L'idée proposée par Violette Spillebout est tout à fait intéressante. Elle rejoint l'esprit dans lequel nous voulons construire cette politique de l'inclusion numérique au niveau local, en nous appuyant sur des aidants numériques et des lieux labellisés, qui pourront contribuer à l'accompagnement des personnes éloignées du numérique et développer une forme d'éducation populaire.

Enfin, pour répondre à Laurent Croizier, la France a négocié le règlement sur l'intelligence artificielle en plaçant l'humain au centre de ses exigences. Il s'agit à la fois de protéger les utilisateurs de systèmes fondés sur l'intelligence artificielle, tout en permettant – c'est un enjeu de souveraineté – d'assurer le développement de ces derniers en Europe.

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Monsieur le ministre délégué, nous vous remercions.

La séance est levée à dix-neuf heures dix.

Présences en réunion

Présents. – Mme Ségolène Amiot, Mme Emmanuelle Anthoine, M. Rodrigo Arenas, M. Philippe Ballard, M. Quentin Bataillon, M. Belkhir Belhaddad, Mme Béatrice Bellamy, M. Philippe Berta, M. Bruno Bilde, Mme Sophie Blanc, M. Idir Boumertit, Mme Céline Calvez, Mme Agnès Carel, M. Roger Chudeau, Mme Fabienne Colboc, M. Laurent Croizier, M. Hendrik Davi, Mme Béatrice Descamps, M. Francis Dubois, M. Laurent Esquenet-Goxes, M. Philippe Fait, Mme Estelle Folest, M. Jean-Jacques Gaultier, Mme Annie Genevard, M. Frantz Gumbs, Mme Fatiha Keloua Hachi, Mme Graziella Melchior, Mme Sophie Mette, Mme Frédérique Meunier, M. Karl Olive, M. Emmanuel Pellerin, Mme Béatrice Piron, Mme Lisette Pollet, M. Alexandre Portier, Mme Isabelle Rauch, M. Jean-Claude Raux, M. Bertrand Sorre, Mme Violette Spillebout, M. Paul Vannier

Excusés. – Mme Aurore Bergé, Mme Soumya Bourouaha, Mme Yaël Braun-Pivet, Mme Martine Froger, M. Raphaël Gérard, M. Stéphane Lenormand, M. Alexandre Loubet, M. Frédéric Maillot, M. Maxime Minot, Mme Véronique Riotton, M. Boris Vallaud

Assistaient également à la réunion. – Mme Virginie Duby-Muller, Mme Cécile Rilhac