La réunion

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La séance est ouverte à 15 heures

Présidence de M. Sacha Houlié, président.

La commission auditionne M. Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.

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Mes chers collègues, nous avons le plaisir d'accueillir, pour entamer notre cycle d'auditions, M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le ministre, votre portefeuille, très large, excède le champ de compétences de la commission des lois. Néanmoins, en votre qualité de ministre de la cohésion des territoires, vous êtes chargé des relations avec les collectivités locales, attribution que vous partagez avec le ministre de l'intérieur. Je vous serais reconnaissant, mes chers collègues, d'interroger en priorité M. le ministre sur les volets de son action qui concernent directement notre commission.

Quelles seront les modalités d'application et le calendrier de mise en place des fonds dont la création a été annoncée par la Première ministre : le fonds de 500 millions d'euros destiné à la renaturation des villes et le fonds vert visant à aider les collectivités locales à lutter contre le changement climatique – sujet prégnant cet été ?

Face à la montée de l'inflation, comment allons-nous assurer la continuité des services publics, notamment des services publics locaux, qui ont été – pour ne citer que ces deux exemples – confrontés à des difficultés dans le domaine de la restauration scolaire et à la fermeture de piscines ?

Quels moyens l'État peut-il apporter aux collectivités pour les aider à affronter la crise, qui met à mal les finances locales ?

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Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

La feuille de route de mon ministère, qui a été dévoilée officiellement par le Président de la République et la Première ministre, est ambitieuse. Le simple fait d'avoir lié transition écologique et cohésion des territoires atteste le rôle essentiel des collectivités territoriales pour atteindre les objectifs environnementaux de la France. Notre pays s'est engagé sur un certain nombre d'entre eux à l'échelle internationale : je pense non seulement au Fit for 55, mais aussi à la protection de la biodiversité. Pour être efficace, il faut unir les énergies et faire converger les actions aux échelles nationale et locale. En effet, si beaucoup de décisions peuvent être prises au niveau de l'État, une partie des solutions relève en effet des territoires. On ne peut développer les transports en commun en l'absence d'une autorité organisatrice des mobilités ambitieuse en matière de décarbonation ; il est difficile de lutter contre l'artificialisation des sols si l'autorité qui délivre les permis de construire ne veille pas à ce que les nappes phréatiques se rechargent ; on peinerait à construire des îlots de fraîcheur si les maires ne lançaient pas les programmes de déminéralisation des cours d'école.

J'axerai mon propos sur la cohésion des territoires, conformément à l'orientation que vous souhaitez, sans préjuger pour autant du contenu de vos questions – d'autant que certains aspects concernant la transition écologique ont aussi vocation à être examinés par votre commission.

La cohésion des territoires repose d'abord sur une nouvelle méthode de travail avec les collectivités, caractérisée par la confiance et la responsabilité. Les aides financières aux collectivités que vous avez citées témoignent de cette confiance. Quant à la responsabilité, on ne peut pas défendre le principe d'une République décentralisée et considérer que l'État est seul compétent pour prendre une décision ou arbitrer en présence d'une difficulté. Dès mon arrivée au ministère, j'ai beaucoup consulté les onze associations d'élus locaux, en coordination étroite avec la Première ministre – celle-ci étant responsable de la feuille de route de la transition écologique et les arbitrages budgétaires étant évidemment sensibles dans le contexte actuel.

Nos échanges nous ont déjà permis d'avancer sur plusieurs sujets, preuve que la méthode est bonne, même si elle encore doit être généralisée. Nous nous sommes d'abord accordés sur l'élaboration d'un agenda territorial. Nous avons proposé aux associations d'élus de nous faire part des sujets intéressant les collectivités afin d'élaborer une feuille de route, ce qui nous permettra de traiter ces questions, une par une, à partir du début de l'année prochaine – au lieu de les aborder sur un coin de table ou par le biais d'un cavalier budgétaire ou législatif. L'objectif est de rendre cette feuille de route publique, afin de nourrir l'agenda gouvernemental, dans une logique interministérielle.

La méthode de travail gouvernementale et le fait d'y adjoindre les collectivités occupent une place centrale dans notre démarche. Nous nous emploierons ainsi à anticiper certains chantiers de réforme et à associer les collectivités à la réflexion, voire à tester les solutions auprès d'elles, puisque leur nombre nous permet d'établir des comparaisons entre elles : avant d'imaginer une mesure nationale, il faudra regarder s'il n'existe pas déjà une solution locale à même d'être généralisée.

Le premier sujet très concret auquel nous nous attelons concerne les budgets verts, qui sont au croisement de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Plutôt que de concevoir un budget vert de manière théorique, avec Bercy, nous avons décidé de jouer la confiance et de demander à chaque bloc d'associations de nous faire remonter ses bonnes pratiques. Nous déterminerons ainsi, d'ici à la mi-2023, s'il existe des points consensuels entre les collectivités. L'objectif est que la première copie ne soit pas celle de l'État mais émane des collectivités. Cette proposition a reçu un accueil très favorable, tant de l'AMF (Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité) que de l'ADF (Assemblée des départements de France), de l'ADCF (Intercommunalités de France) et de Régions de France.

Nos politiques doivent être ajustées aux réalités de chaque territoire. Pour que cette adaptation soit respectueuse des prérogatives de chacun, nous privilégierons la voie contractuelle, en nous appuyant, en particulier, sur les CRTE (contrats de relance et de transition écologique), en articulation avec les contrats de plan État-région. La contractualisation territoriale doit être le levier de l'accélération de la transition écologique. L'État a vocation à être présent, non seulement par l'octroi de crédits, mais également en appui à l'ingénierie, en mobilisant ses satellites et des structures telles que l'ANCT (Agence nationale de la cohésion des territoires), le CEREMA (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement) ou encore l'ADEME (Agence de la transition écologique).

La politique de cohésion des territoires est centrale. Il ne faut oublier aucun d'entre eux, ni les territoires ruraux – c'est la raison d'être du secrétariat d'État à la ruralité, placé au sein de mon ministère –, ni les territoires urbains, à travers la politique de la ville, également comprise dans le périmètre du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires et prise en charge par le ministre délégué, Olivier Klein.

Un certain nombre de sujets institutionnels sont traités par le ministère de l'intérieur, au titre du droit électoral : je pense au statut de la Corse ou à l'évolution du Grand Paris, auxquels s'ajoute la question du conseiller territorial.

En matière de décentralisation, le volet du logement n'a pas encore été abordé. On sent, sur cette question qui faisait partie des engagements du Président de la République, une appétence des élus locaux. On constate parfois de grands écarts entre les budgets et la réalité de terrain, tant en termes de mises en chantier que d'adaptation des chantiers aux enjeux actuels, y compris écologiques.

Le respect de nos engagements appelle une planification écologique territoriale. Nous avons signé un accord prévoyant, d'ici à 2030, une baisse de 55 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport à leur niveau de 1990. Or, à la fin 2021, la diminution atteignait 23 %. Nous devons donc doubler le rythme de baisse de nos émissions. C'est ce que nous avons fait entre 2017 et 2022 par rapport aux cinq années antérieures, mais ce n'est pas encore suffisant pour atteindre l'objectif. Pour diminuer les émissions de CO2 de 16 millions de tonnes par an, il faut non seulement engager une planification, mais aussi veiller à l'absence de divergence entre les actions conduites sur le terrain et celles menées aux échelles nationale et internationale.

Le fonds de 1,5 milliard d'euros annoncé par Élisabeth Borne s'inscrit dans le cadre de cette planification. Au sein du plan de relance, une ligne dédiée au fonds friches, dotée de 300 millions, permet de « flécher » l'aide aux collectivités locales pour dépolluer des friches et, partant, rendre leur reprise moins coûteuse que l'étalement urbain et l'artificialisation. Au printemps dernier, la Première ministre avait émis l'idée de créer un fonds de renaturation, doté de 500 millions sur la durée du quinquennat – soit 100 millions par an – pour accompagner les collectivités conduisant des actions en la matière.

À la suite de nos échanges, cet été, Mme Borne a accepté que l'on globalise les crédits au sein d'un fonds unique de 1,5 milliard d'euros, qui se substituera aux dispositifs en silo : le fonds friches, le fonds de renaturation, le fonds appelé à accompagner les collectivités souhaitant prendre de l'avance sur la création de zones à faibles émissions… Ce fonds unique, simple d'accès, ne reposera pas sur des appels à projets, ce qui nous prémunira contre une ingénierie trop complexe et des frais de montage si élevés qu'ils empêchent parfois les plus petites collectivités de réunir les sommes. Les objectifs ne seront pas nécessairement énumérés de manière exhaustive, car ils tiendront compte de la réalité des territoires. À titre d'exemple, pour aider les communes du littoral face à l'érosion du trait de côte, on pourrait piocher dans ce fonds vert plutôt que de créer un fonds ad hoc. Il en ira de même pour la reprise des friches, l'électrification des flottes et, plus largement, pour tout ce qui peut contribuer à l'atténuation du changement climatique ou à l'adaptation à ce dernier.

Sous réserve de procéder ensuite à une évaluation, j'ai le sentiment que l'on répond de la sorte à un besoin de souplesse. Des questions restent à trancher, qui relèvent, à mes yeux, du débat parlementaire : faudra-t-il une commission départementale, sur le modèle de la DETR (dotation d'équipement des territoires ruraux) ? Les crédits seront-ils « fléchés » à l'échelle nationale ou appliquera-t-on un mécanisme plus rapide s'inspirant de la mobilisation de la DSIL (dotation de soutien à l'investissement local) dans le cadre du plan de relance ? J'ai demandé à l'AMF, à l'ADF, à l'ADCF, à Villes de France et à Régions de France de nous suggérer les modalités qui leur paraissaient les plus simples pour garantir le versement le plus rapide possible des crédits et l'accompagnement des collectivités. Les crédits engagés en la matière contribueront à réduire les dépenses de fonctionnement des collectivités, puisqu'elles diminueront notre dépendance aux fluides et faciliteront la sortie des énergies fossiles.

Nous devons actionner tous les leviers pour parvenir à une planification écologique digne de ce nom. Les émissions de gaz à effet de serre dans notre pays se répartissent de la manière suivante : 30 % émanent des transports, 19 % de l'agriculture, 18 % de l'industrie, 18 % du logement, 10 % de l'énergie, 4 % du piégeage du carbone. Il nous faut accentuer nos efforts dans les secteurs pour lesquels nous sommes le plus en retard par rapport à la feuille de route, à l'image des transports et de l'agriculture. En matière de transports, qui relèvent de mon ministère, il convient de décliner un plan d'accès aux véhicules électriques et de continuer à promouvoir les mobilités actives. À cet égard, nous fêtons le quatrième anniversaire du plan Vélo et mobilités actives. Il est à noter qu'en la matière, nous avons dépensé en quatre ans le budget prévu pour sept années.

Nous avons pour objectif de rénover 700 000 logements. Cela étant, compte tenu des sommes en jeu, il nous faut aussi prêter attention à l'efficacité énergétique de la rénovation, indépendamment du nombre de logements. Au-delà des rénovations monogeste, il convient de favoriser des pratiques qui massifient une partie de la baisse des émissions.

En matière de protection de la biodiversité, la stratégie nationale 2030 sera dotée de moyens financiers accrus, intégrés dans l'ensemble de nos actions.

En ce qui concerne l'aménagement du territoire et la sobriété foncière, nous avons besoin du fonds d'accélération des investissements industriels dans les territoires, mais pas seulement. Pour continuer à suivre la trajectoire du Zéro artificialisation nette (ZAN), nous devons objectiver auprès des élus les pourcentages d'artificialisation qui les concernent et les perspectives qui s'offrent à eux.

La réduction des déchets concerne au premier rang les collectivités territoriales, qui en ont la responsabilité. Nous avons accéléré notre action en ce domaine, dans la continuité de la loi dite antigaspillage pour une économie circulaire (AGEC), en valorisant des solutions innovantes.

Plus largement, nous agissons en faveur de la prévention des risques. Une journée dédiée à ce thème – le 13 octobre – a été officialisée par les ministères de l'intérieur et de la transition écologique. Elle a pour objet de sensibiliser nos concitoyens à l'ensemble des risques naturels, qui sont malheureusement aggravés par le réchauffement climatique.

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Monsieur le ministre, mes questions porteront sur la feuille de route de votre ministère. La première d'entre elles concerne l'évaluation et le suivi des CRTE. Le Gouvernement a proposé en 2020 aux élus des bassins de vie de conclure ces contrats afin d'accélérer la relance dans les territoires et d'accompagner leur transition écologique, démographique, numérique et économique. Conclu pour six ans entre l'État et les collectivités territoriales, le CRTE associe une pluralité d'acteurs des territoires, privés comme publics. Il permet de nourrir le dialogue et de traduire de façon opérationnelle les projets du territoire en matière de développement et de cohésion.

Une circulaire du Premier ministre de janvier 2022 a précisé que ce contrat devait devenir le cadre de déclinaison de droit commun des politiques publiques territorialisées. Au 28 juin, 819 CRTE avaient été signés, qui couvrent la quasi-intégralité du territoire métropolitain et ultramarin. Ils concernent aussi bien des projets très simples que des actions à entreprendre dans la durée, à l'image de l'un des onze contrats de la communauté de communes de l'Est lyonnais, dans ma circonscription, à Saint-Bonnet-de-Mure. Il s'agit d'effectuer la rénovation énergétique complète d'un bâtiment de 1960 en centre-bourg, qui abritera plusieurs appartements. Cependant, on en est toujours au stade de l'étude, bien que le contrat ait été signé en 2021.

Où en sont les territoires dans l'application du CRTE et quel bilan tirer des premières contractualisations ? Quelles ambitions le Gouvernement nourrit-il en ce qui concerne la déclinaison de ces contrats, notamment dans le cadre de la planification ?

Ma seconde question concerne l'objectif Zéro artificialisation nette à l'horizon 2050, fixé par la loi « climat et résilience ». Ce texte a prévu une division par deux du rythme de l'artificialisation des sols au cours des dix prochaines années à l'échelle nationale. Toutefois, le législateur n'a pas défini les moyens à mettre en œuvre. La situation est aujourd'hui très tendue dans les territoires. Pour de nombreux élus, l'objectif Zéro artificialisation nette des sols paraît démesuré, tant du point de vue de la pertinence de l'objectif que des rigidités dans son application – notamment concernant la nomenclature des sols artificialisés – et de l'ingénierie qui sera mise à la disposition des élus. Comment accompagner les collectivités pour atteindre cet objectif ?

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Je souhaiterais en premier lieu vous interroger sur l'avenir du plus gros employeur de la onzième circonscription de la Gironde, à savoir la centrale nucléaire du Blayais. Celle-ci fait vivre près de 2 000 familles et est à l'origine de nombreux emplois indirects dans les services, l'artisanat et le commerce, ainsi que de retombées financières importantes pour les collectivités locales. Je regrette que ces dernières n'aient pas été sélectionnées pour accueillir une partie des six réacteurs nucléaires de nouvelle génération annoncés par le Président de la République en février 2022. Le site avait pourtant tous les atouts humains et techniques, ainsi qu'en matière d'installations et de disponibilité du foncier. Surtout, contrairement à ce qui existe dans d'autres endroits, il existe un consensus politique pour prolonger l'aventure du nucléaire à Braud-et-Saint-Louis. Une motion en faveur de l'implantation de deux réacteurs de nouvelle génération a été adoptée à l'unanimité en novembre 2021 par la communauté de communes de Blaye. Bruno Le Maire a indiqué que huit réacteurs de nouvelle génération supplémentaires allaient être mis à l'étude. La centrale du Blayais sera-t-elle partie prenante de ce projet ? Si la question n'est pas encore tranchée, que doivent faire les élus du territoire pour retenir votre attention ?

En second lieu, en réponse à l'interpellation de M. Aymeric Caron, député de la NUPES, au sujet de la signature des arrêtés ministériels relatifs à la capture de l'alouette des champs au moyen de filets pour la prochaine saison, vous avez déclaré attendre la décision au fond du Conseil d'État sur le recours qui a été intenté l'année dernière contre ces textes. Votre position est pénalisante à plusieurs titres. D'abord, les consultations publiques, qui se sont achevées le 10 août, ont connu une issue favorable. Ensuite, l'ouverture de cette chasse ancestrale est prévue le 1er octobre. Je vous demande de penser aux centaines de chasseurs d'ex-Aquitaine, et plus particulièrement de Gironde, qui attendent légitimement, avec impatience, de savoir s'ils auront le droit de chasser, s'ils devront subir les mêmes déboires et désordres que l'année dernière ou si vous allez plier face aux pressions des militants antichasse et antispécistes. Allez-vous signer ces arrêtés et, le cas échéant, à quelle date ?

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J'avais précisé que les questions devaient prioritairement porter sur les domaines de compétence de la commission des lois.

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En juillet dernier, monsieur le ministre, vous avez déclaré : « Le ministère de la transition écologique, c'est celui de la prévention, pas celui qui éteint les incendies quand ils ont commencé. »

Certes, ce n'est pas vous qui éteignez les incendies, mais c'est bien la Macronie, dont vous faites partie, qui rejette depuis cinq ans toutes nos propositions tendant à planifier la réponse à l'urgence climatique. C'est bien la Macronie qui a réprimé les pompiers en octobre 2019, alors qu'ils défilaient pour dénoncer le manque d'effectifs et demander davantage de reconnaissance pour leur profession. C'est bien l'exécutif – vous vous inscrivez dans la continuité de son bilan – qui n'a pas renouvelé la flotte de Canadair, alors que les deux tiers d'entre eux ont plus de 25 ans ; nous avons dû faire appel à la solidarité européenne pour combler ce manque d'investissement ! C'est bien le même exécutif qui a poursuivi la saignée dans les effectifs de l'Office national des forêts (ONF), ce qui explique en partie la situation actuelle.

Ainsi, non seulement vous ne prévoyez ni n'anticipez rien, mais vous détruisez tout ce qui fonctionne... Voilà pourquoi nous avons du mal à croire à la cohérence et à l'efficacité des éléments de feuille de route que vous nous avez présentés.

Surtout, au-delà de l'inaction, votre logiciel en la matière est daté, et vous conduit même à faire le contraire de ce qu'il faudrait, à savoir une bifurcation écologique et solidaire, comme nous le proposons. Cette bifurcation passe notamment par le recrutement massif de personnels et de fonctionnaires à la sécurité civile, à l'ONF et à Météo-France. Elle nécessiterait en outre de repenser totalement la politique de cohésion des territoires, dont vous avez la charge, notamment en mettant fin à l'hyperconcentration du pouvoir politique et économique dans les grandes métropoles et agglomérations, qui assèche les territoires, et en redonnant à la commune sa place primordiale, comme échelon de base non seulement de notre démocratie, mais aussi de la planification écologique. Nous proposons de confier aux communes la réalisation du « goutte-à-goutte » des 200 milliards d'euros d'investissements nécessaires pour la planification écologique. Vous pourriez aussi revoir la carte des régions, qui n'a aucune cohérence. Il faudrait la repenser en fonction des bassins versants, ce qui permettrait de coordonner les politiques publiques de maîtrise du cycle de l'eau et faciliterait le travail nécessaire pour atteindre l'objectif « zéro pollution et zéro épuisement de la ressource en eau ».

Ce ne sont là que quelques exemples, qui jettent le doute et montrent que, malheureusement, votre gouvernement et votre minorité présidentielle ne sont pas écolos pour un sou. Compte tenu de l'urgence, l'ensemble des mesures que vous avez proposées ne fera pas la maille, comme on dit. De toute évidence, plus tôt nous serons aux affaires, mieux cela vaudra.

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Vous avez évoqué le budget vert et la planification de la transition écologique, qui fait partie de votre feuille de route. Or il nous manque une méthode et des outils pour réussir cette transition. Je pense à l'évaluation climatique des lois, question que j'ai souvent abordée au cours de mon précédent mandat et que je continuerai à soulever.

Actuellement, nous évaluons l'implication financière des textes de loi, mais la France ne dispose pas des moyens lui permettant de mesurer efficacement leur effet au regard de nos objectifs climatiques. Les études d'impact sont réalisées avant le débat législatif. Or le texte final est parfois très différent du projet initial – tel a été le cas de la loi « climat et résilience ». Dès lors, les mesures ne sont pas toutes évaluées, et leurs effets sont difficilement contrôlables.

Lors de l'examen de la loi « pouvoir d'achat », un amendement complètement contraire à notre ambition climatique – pourtant partagée, je crois – a été adopté, sans aucune évaluation. Il s'agit de la mesure de 230 millions d'euros en faveur du chauffage au fioul, votée dans un grand moment de joie et d'allégresse par les députés insoumis – qui nous parlent aujourd'hui de « bifurcation écologique » –, mais aussi par une bonne partie des écologistes.

À votre avis, de quelle méthode et de quels outils devons-nous nous doter pour évaluer nos politiques publiques au regard de nos objectifs climatiques ? Si nous voulons réussir la transition écologique, il nous faut planifier, évaluer, puis ajuster. Avez-vous des pistes en ce sens ? Le groupe Démocrate en a : au cours de la précédente législature, nous avons déposé trois propositions de loi relatives à l'évaluation climatique des lois.

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L'inflation touche de plein fouet un grand nombre de collectivités territoriales, partout en France. Les prix explosent, non seulement ceux des matières premières et de l'énergie – gaz, électricité –, mais aussi ceux des matériaux – enrobé, acier – utilisés dans les travaux publics. Les conséquences sont brutales pour les dépenses de fonctionnement des collectivités, malgré la dotation exceptionnelle que nous avons votée cet été.

Comme d'autres collègues, je rencontre actuellement les maires de ma circonscription et j'entends beaucoup parler de ce sujet. À Fécamp, d'après les prévisions de nos services, le surcoût s'élève à plus de 1 million d'euros, sachant que 300 000 euros supplémentaires avaient déjà été budgétés par rapport aux années précédentes. Pour vous donner un ordre de grandeur, le budget total s'établit à 29 millions.

Dans un grand nombre de cas, sans mesures compensatoires, seules d'importantes augmentations des tarifs des services publics ou de la fiscalité permettront aux collectivités de continuer à assurer leurs nécessaires missions. Certains maires ont le sentiment d'être pris en étau : l'augmentation des frais de fonctionnement aura des conséquences non seulement sur le pouvoir d'achat des familles, mais aussi sur la capacité de la collectivité à investir – laquelle est liée aux marges de manœuvre dégagées en fonctionnement.

Les collectivités manifestent une vraie volonté de commencer ou de poursuivre leur travail en matière de transition écologique. Avec quels moyens et avec quel soutien pourront-elles le faire ? Vous avez évoqué des outils, notamment le CRTE. Or la démarche a pris du retard à certains endroits, notamment, vous l'avez dit, du point de vue de l'ingénierie. Comment les choses se passeront-elles pour les petites communes ?

La nécessité de consolider les territoires grâce au couple maire-préfet – ou maire-sous-préfet – a été évoquée à de nombreuses reprises. Il nous paraît urgent de réactualiser cette relation, qui semble très variable d'un territoire à l'autre, et de fixer une méthode très claire. Que comptez-vous faire en la matière ? Quels moyens pouvez-vous mettre en œuvre ?

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En matière de climat et de biodiversité, il n'est plus temps de constater ou d'alerter ; il est temps de faire – l'été que nous venons de vivre nous le rappelle brutalement. La France n'est pas au rendez-vous des engagements qu'elle s'est elle-même fixés. Notre action reste très en deçà des efforts consentis par nos partenaires européens : la dernière évaluation de la Commission européenne, remise il y a quelques jours, montre que nous sommes très en retard par rapport aux moyennes européennes, qu'il s'agisse de préserver la ressource en eau, de protéger la biodiversité ou d'améliorer la qualité de l'air. Nous pourrions aussi évoquer le défaut d'anticipation en matière de rénovation thermique des bâtiments, de transports ou de politique de l'eau.

On a promis de « faire de la France une grande nation écologique ». Quatre mois après l'élection présidentielle, les actes contredisent les paroles. J'en donnerai seulement quelques exemples : la réouverture de la centrale à charbon de Saint-Avold, en Moselle ; l'installation d'un terminal méthanier au Havre pour importer du gaz de schiste américain ; la publication d'une circulaire demandant aux préfets de lever le pied dans la mise en œuvre du Zéro artificialisation nette des sols, alors que la question de l'eau et celle de la souveraineté alimentaire sont plus essentielles que jamais.

Dans son rapport annuel, publié en juin dernier, le Haut Conseil pour le climat appelle le Gouvernement à un sursaut. Si vous ne souhaitez pas écouter les écologistes, entendrez-vous le HCC ?

Par ailleurs, que doit faire un ministre de l'écologie lorsque les actes du gouvernement auquel il appartient vont objectivement à contresens des nécessités en matière d'écologie ?

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Élue d'une circonscription qui comprend sept quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), je suis en cette rentrée plus inquiète encore que les années précédentes : après avoir subi la crise sanitaire, les habitants de ces villes populaires sont très durement touchés par l'inflation dans leur vie quotidienne. De nombreux chiffres le montrent, mais je m'appuie sur des faits très précis que j'observe dans ma circonscription. Les enfants, en particulier, ont de plus en plus conscience de la pauvreté dans leur entourage, comme l'a souligné le Secours populaire dans des alertes que vous avez certainement entendues. De nombreux lycéens en viennent à garder de la nourriture pour leurs camarades qui ne peuvent pas payer la cantine. Ces phénomènes s'aggravent de manière très significative dans les quartiers populaires.

On entend souvent de belles paroles au sujet de ces quartiers ou, à l'inverse, des propos très stigmatisants, mais ce que nous attendons, ce sont des actes très forts : il n'y a que par la solidarité, donc par une action intense de l'État, que nous pourrons leur venir en aide. En réalité, je ne vous en demande pas plus, monsieur le ministre, car je sais que la politique d'augmentation des inégalités menée sous le précédent quinquennat va se poursuivre ; bien évidemment, nous nous la combattrons.

J'en viens à des questions précises concernant les QPV.

Des élus proposent qu'un pourcentage significatif du fonds vert soit attribué à ces quartiers. Qu'en pensez-vous ?

Certaines villes, comme Gennevilliers, demandent une révision du périmètre des QPV. Elles souhaitent qu'un travail chirurgical soit réalisé pour objectiver l'entrée dans cette catégorie. La présence d'une petite zone pavillonnaire en périphérie d'un quartier suffit parfois à occulter toutes les autres données qui justifieraient son inclusion dans les QPV.

Comme d'autres villes et intercommunalités, les villes populaires sont affectées par l'augmentation du prix de l'électricité et du coût des matériaux utilisés dans le bâtiment et les travaux publics (BTP). Ne pourrait-on pas indexer les subventions et dotations sur le taux réel d'inflation ? Cette demande émane de plusieurs villes de la banlieue parisienne et de l'Île-de-France.

Les collectivités souhaitent avoir des indications sur les conditions de renouvellement des contrats de ville. Elles demandent fortement d'être mieux associées à ce processus.

Pour finir, l'aide annoncée pour aider les communes à isoler les bâtiments municipaux est loin d'être à la hauteur. J'espère que d'autres mesures sont prévues.

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Après l'été que nous avons connu – incendies, intempéries, sécheresse, crise énergétique –, notre groupe salue le fait que notre commission reprenne ses travaux en abordant la question écologique. En cette rentrée, le Gouvernement élabore sa grande feuille de route en la matière. C'est une démarche nécessaire, mais nous espérons qu'il ne s'agira pas d'un énième plan dont les objectifs ne seront pas tenus. Aux yeux des citoyens, les changements climatiques sont de plus en plus manifestes, mais les efforts induits par nos politiques publiques sont jugés invisibles ou trop discrets. Telle est la réalité que nous constatons au niveau territorial.

Il importe que nous agissions main dans la main avec les collectivités territoriales, position que notre groupe a toujours soutenue. Il faut une relation partenariale étroite entre l'État et les élus territoriaux. Nous accueillons favorablement la création, annoncée par la Première ministre, d'un nouveau fonds vert doté de 1,5 milliard d'euros pour aider les collectivités. Le montant affiché est satisfaisant, mais tout cela reste encore flou : de quoi parle-t-on concrètement ? Quels territoires seront concernés en priorité ? Ce fonds, que l'on imagine pluriannuel, sera-t-il inscrit dans le budget dès 2023 ? Pour quelle somme ? Vous avez évoqué un appui aux communes littorales et insulaires pour faire face à la montée des eaux. Avez-vous déjà des idées de projets ou de thématiques à financer en priorité ?

La Première ministre indique que la protection de nos forêts est une priorité et évoque des mesures écologiques « radicales ». L'actualité nous ramène encore une fois à la question des feux de forêt. Quelle action « radicale » proposez-vous ? Le changement climatique se déroule devant nous ; nous ne pouvons pas y assister en restant impuissants. Il y a une forte concentration des incendies : en 2020, 90 % des surfaces brûlées se trouvaient dans les trois régions du Sud de l'Hexagone et en Corse. Il a été beaucoup question du rôle de l'ONF. Pour être un acteur majeur, cet établissement, placé sous votre cotutelle, doit retrouver des marges de manœuvre et étendre son périmètre d'intervention. Allez-vous revenir sur la suppression prévue de 500 postes d'ici à 2025 ?

Je termine par une question propre à mon territoire, la Corse. Nous devons régler un gros problème, celui des déchets. De ce point de vue, la Corse subit des contraintes spécifiques liées à son insularité. C'est un dossier qui avance trop lentement pour les insulaires. Le plan territorial de prévention et de gestion des déchets a été adopté par la collectivité et par l'Assemblée de Corse, notamment par la commission consultative dédiée, à l'unanimité. Nous espérons que les nouvelles réserves formulées par l'État seront levées. Le problème, c'est que nous avons un accord politique mais que, sur le terrain, les choses stagnent. La volonté des élus corses – tant de la collectivité, qui agit au-delà de ses compétences, que des intercommunalités – est forte, mais la question est le partenariat avec l'État. Nous souhaitons une simplification des procédures, que nous estimons trop lourdes.

Il faut aussi envisager, à terme, un changement de la fiscalité, dans le cadre des discussions institutionnelles. Je pense à l'extension à la Corse du dispositif en vigueur dans les îles d'outre-mer, à savoir une prise en charge des coûts de collecte à 100 % par les éco-organismes, en vertu du principe pollueur-payeur.

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Christophe Béchu, ministre

S'agissant des CRTE, madame Tanzilli, les chiffres sont même un peu meilleurs que ceux que vous avez donnés : au moment où je vous parle, 828 ont été signés, sur les 850 prévus. La couverture des bassins de vie est désormais presque totale. Dans ces 828 CRTE figurent 40 000 projets, dont 25 000 sont déjà engagés. Il ne s'agit donc pas seulement de déclarations. Il est possible qu'il y ait des retards dans certains secteurs, mais, globalement, le dispositif est en train de se déployer sur le terrain.

Ma conviction est qu'il faut de la stabilité vis-à-vis des échelons locaux. Si nous modifions les règles, les périmètres et la gouvernance, alors même que des actions de fond sont engagées, nous risquons de multiplier les réunions pour nous mettre de nouveau d'accord sur tel ou tel sujet. L'heure n'est plus au diagnostic, mais au financement et à l'action. Les projets sont là. Dans le cadre d'une relecture ou d'un approfondissement des CRTE, nous aurons sans doute un travail à faire sur l'accompagnement et les moyens permettant d'aller plus loin en matière de transition écologique, mais sans revenir sur les périmètres ni sur la gouvernance.

Pour ce qui est du Zéro artificialisation nette des sols, évoqué par vous-même et par M. Iordanoff, il ne faudrait pas interpréter la circulaire du 4 août dernier de manière erronée.

La loi « climat et résilience », votée par la quasi-totalité des députés et des sénateurs à l'issue d'une commission mixte paritaire conclusive de douze heures, a fixé un cap très clair – zéro artificialisation nette des sols en 2050 – et une règle tout aussi claire – diviser par deux, à compter de la promulgation de la loi, la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF).

Toutefois, les décrets du 29 avril 2022 ont suscité l'émotion dans de nombreux endroits. Pour certains parlementaires, ils comportent des dispositions qui ne sont pas conformes à la volonté du législateur – ce que vous avez relevé, madame Tanzilli. Pour d'autres, ils aboutissent à des aberrations ou à des incohérences.

La plus belle de ces incohérences est que le décret relatif à la nomenclature classe les parcs et jardins parmi les espaces artificialisés. C'est ce qui m'a amené à adresser aux préfets la circulaire du 4 août. Autre incohérence ou oubli, qui m'a été présenté comme contraire à la volonté du législateur : si l'on s'en tient à une lecture littérale, les actions de renaturation et de dépollution des friches réalisées entre 2020 et 2030 ne donneront pas de droits à construire ; ce dispositif, pourtant prévu par le législateur, ne s'appliquerait qu'à partir de 2030. Ce point méritait lui aussi que les préfets « lèvent le stylo ».

D'aucuns se demandent s'il est bien sérieux d'empêcher toute artificialisation nette, si cela vaut la peine de faire tant d'efforts pour préserver quelques hectares à l'échelle du territoire – même si personne ne l'exprime exactement en ces termes. À ce sujet, je veux être très clair : on a artificialisé davantage en cinquante ans qu'en cinq siècles. Où sont les lotissements du XVIIIe ou du XIXe siècle ? Ce sont bien les nouveaux modèles appliqués à partir des années 1970 qui ont abouti à un gaspillage de terres, de tels volumes de construction n'étant pas reproductibles dans la durée.

Néanmoins, quelques angles morts demeurent. D'une part, nous devons apporter des clarifications concernant l'accompagnement des collectivités territoriales, afin de rendre crédibles toutes ces perspectives. D'autre part, se pose la question de la maille. Une dizaine d'agences d'urbanisme et des collectivités sont en train de confronter la nomenclature au réel, en vue de proposer des modifications du décret relatif à cette nomenclature, sans remettre en cause ni l'esprit, ni les termes, ni les échéances.

Les conférences des schémas de cohérence territoriale (SCOT) devront rendre leurs conclusions à la fin du mois d'octobre. Comme je l'ai précisé aux sénateurs, cette date ne sera pas modifiée. S'il n'y a pas de consensus – et on s'oriente vers ce cas de figure –, la question sera transférée aux régions, chargées d'adopter le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET). J'ai une préoccupation : certaines régions expliquent qu'elles pourraient, en l'absence de consensus, appliquer de manière aveugle la règle de division par deux de la consommation des ENAF, alors que c'est précisément ce que les parlementaires cherchaient à éviter, souhaitant que l'on tienne compte du bilan vertueux de certaines collectivités, de la densité et des dynamiques de population. C'est sur ces points que porte la réflexion, mais cela ne modifiera en rien l'échéance du 22 février 2024 – date limite de modification des SRADDET –, ni celle de 2031, ni celle de 2050.

J'ai demandé aux préfets de ne pas se précipiter pour appliquer des décrets qui ont fait l'objet de remarques de la part de parlementaires et dont certains points sont objectivement améliorables. Ce n'est pas une remise en cause des perspectives. L'AMF, l'ADF et Régions de France se réjouissent d'ailleurs de ce temps d'échange et de dialogue.

Madame Diaz, le nucléaire relève de la compétence de la ministre de la transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. La carte d'implantation des nouveaux réacteurs fera l'objet d'un texte de loi spécifique ; vous pourrez alors déposer des amendements et faire valoir vos orientations. En matière de nucléaire, la feuille de route du Gouvernement est claire : tirer parti des bienfaits de cette énergie très décarbonée. D'autres pays se rallient d'ailleurs à cette approche, compte tenu du contexte.

Concernant l'alouette des champs, je vous fais la même réponse qu'à Aymeric Caron : j'attends la décision du Conseil d'État. Il ne serait pas rationnel de signer un arrêté sans connaître sa position de fond, alors que tout est parti d'un référé. Plus que celle de l'alouette des champs, la question est celle des modes de piégeage – la pante, la matole –, de leur caractère létal et des espèces qui sont ainsi capturées. C'est parce qu'ils ne distinguent pas selon les espèces que le Gouvernement a interdit l'usage du collet et de la glu.

Plut tôt vous exercerez les responsabilités, mieux cela vaudra, avez-vous dit, madame Obono. C'est davantage aux électeurs qu'il appartient de vous répondre sur ce point. Vous me permettrez de ne pas nécessairement être d'accord.

Sur le fond, je me réjouis que la France ait bénéficié cet été de la solidarité européenne en matière de moyens aériens, ce qui n'avait pas été le cas les années précédentes. Par ailleurs, le bilan de l'été 2022 ne doit pas occulter les progrès accomplis par les services d'incendie et de secours – prépositionnement de véhicules, actions de repérage dans certains territoires –, qui nous ont permis de réduire de manière constante les surfaces brûlées au cours des vingt dernières années.

Le problème est non seulement la concentration des feux dans le Sud du pays, monsieur Acquaviva, mais aussi, désormais, leur extension au nord de la Loire, qui témoigne des effets du réchauffement climatique tels qu'ils sont décrits depuis un moment dans les rapports du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), notamment de l'assèchement des sols. Il faut donc se préoccuper non seulement des moyens, mais aussi de leur prépositionnement, selon une carte qui devra sans doute couvrir, demain, le nord du pays.

S'agissant des effectifs de l'ONF, la tutelle est entièrement exercée par le ministère de l'agriculture. Seuls 4 % des espaces qui ont brûlé cet été étaient gérés par l'office, alors même que celui-ci est chargé de 25 % de la forêt française environ. Établir un lien entre la baisse des effectifs et la surface ayant brûlé n'est donc pas honnête intellectuellement. On peut discuter de la nécessité d'augmenter les effectifs pour mieux connaître les forêts, ou encore pour améliorer la politique de piégeage du carbone, mais il est faux de prétendre que cela permettrait d'éviter les incendies.

À cet égard, il faut regarder en face certains problèmes tels que le respect de leurs obligations de débroussaillement par les propriétaires ou la réalisation de corridors d'incendie et de secours, y compris lorsque des collectifs locaux s'y opposent. En effet, si l'on n'applique pas les dispositifs élaborés par les autorités, on ne peut pas, ensuite, pleurer sur les hectares brûlés.

Des assises de la forêt se tiendront à la fin du mois. Elles permettront d'évoquer ces divers aspects, ainsi que la replantation des essences et la stratégie globale concernant la forêt.

La commune est l'échelon de base de notre démocratie, mais j'assume pleinement qu'elle ne le soit pas nécessairement pour toutes les politiques. Du fait de la diversité de taille des communes, c'est une bonne chose que certaines politiques ne soient pas conduites à cet échelon – je pense évidemment aux transports et à la gestion de l'eau, par exemple, pour lesquels se sont développées des habitudes de coopération qui permettent de tenir compte de la nécessité pour plusieurs communes de travailler ensemble.

Je n'ai pas de mandat pour aborder la question de la carte des régions. Du reste, je ne me souviens plus très bien du contexte dans lequel ce que vous avez évoqué a été fait…

Monsieur Balanant, vous avez pleinement raison en ce qui concerne l'évaluation. Il y a là un chantier considérable, et la question n'est pas seulement d'ordre législatif : ce sont d'abord les citoyens qui doivent s'en saisir.

Il est très frappant de constater que, dans le débat public, le seul chiffre avancé est celui du critère de déficit fixé par Maastricht, comme si c'était l'alpha et l'oméga de nos engagements internationaux. À force de compter, on oublie les engagements climatiques. Depuis mon premier jour au ministère de la transition écologique, j'essaie de faire entrer dans le débat la notion de tonne de CO2 évitée et la stratégie Fit for 55 : il faut objectiver le gain que représente de ce point de vue chaque décision que nous prenons. En disant cela, j'apporte un élément de réponse à M. Iordanoff, qui voulait savoir ce qu'un ministre de la transition écologique pouvait faire en avance de phase. C'est le seul moyen d'obtenir, à budget public constant, des arbitrages budgétaires qui tiennent compte de l'urgence climatique.

Il ne vous a pas échappé, car vous avez travaillé sur le sujet par le passé, qu'il n'existe aucun « article 40 environnemental » permettant de déclarer certains amendements irrecevables. Indépendamment de ce que peut faire un ministre pour intégrer des outils d'objectivation dans la feuille de route de planification écologique et pour susciter le débat citoyen, il appartient au Parlement de déterminer la façon dont il peut contribuer au débat – vous avez avancé plusieurs pistes à ce propos.

Madame Poussier-Winsback, en ce qui concerne le couple maire-préfet, le rapport de la mission flash de la Cour des comptes qui a été publié au mois de mai est précieux : il pointe le fait qu'une part excessive de la réduction des effectifs de l'État a porté sur les préfectures, affaiblissant la capacité d'action dans le dernier kilomètre. C'est la raison pour laquelle, depuis deux ans, les baisses d'effectifs ne sont pas plus importantes à l'échelon déconcentré qu'aux échelons supérieurs. Il faut conserver cette orientation. Le Président de la République réunira demain tous les préfets ; ce sera certainement l'occasion pour lui d'insister sur la complémentarité entre le maire et le préfet et sur la nécessité de faire en sorte qu'ils travaillent de concert.

En ce qui concerne l'inflation que subissent les collectivités, en particulier dans le domaine de l'énergie, il convient, d'abord, de distinguer deux catégories : les plus petites communes, ayant moins de dix agents et dont les recettes ne dépassent pas 2 millions d'euros de recettes, et les autres. Les premières bénéficient des tarifs publics d'EDF et le bouclier tarifaire y joue pleinement son rôle. Pour les secondes, plusieurs décisions ont été prises, d'ailleurs améliorées par l'Assemblée nationale et par le Sénat. Je pense notamment aux 550 millions d'euros qui ont été « fléchés » à l'occasion de la loi de finances rectificative. Je pourrais également insister sur le fait que la perte de recettes pour l'État de 8 milliards d'euros liée à la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) a entraîné indirectement une remise de 400 millions d'euros. La progression des volumes gérés par l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH) a elle aussi permis de limiter la hausse. Cela dit, l'essentiel des problèmes est devant nous.

Il existe, pour la détermination des impôts locaux, un mécanisme d'indexation obligatoire des valeurs locatives sur l'inflation. Quand celle-ci reste au même niveau d'une année sur l'autre, on ne remarque pas de conséquence visible, mais quand elle progresse par rapport à l'année précédente, on observe un effet de ciseaux, les recettes augmentant moins que les dépenses ; en revanche, lorsque viendra le moment de revaloriser forfaitairement les valeurs locatives sur la base des douze derniers mois, qui ont été marqués par l'inflation, il n'est pas exclu que, compte tenu du niveau d'inflation de l'année 2023, l'augmentation des recettes devienne équivalente à celle des dépenses. Quoi qu'il en soit, le niveau de revalorisation automatique des bases locatives sera significativement plus élevé que l'année dernière.

Par ailleurs, il faut faire très attention à ne pas aborder la question de l'inflation en considérant les objets un par un. L'enjeu n'est pas d'apporter une réponse aux sociétés privées gérant des piscines communales au titre d'une délégation de service public, en oubliant d'ailleurs les communes qui assument cette charge en régie, ni de se concentrer sur les piscines en négligeant les bibliothèques, ou encore les patinoires. Dans la réflexion quant à la manière d'accompagner les collectivités face à la hausse du prix de l'énergie, l'approche doit être globale.

Monsieur Iordanoff, la France est en retard, en effet : comme je l'ai dit, il faut doubler le rythme de baisse des émissions, même si nous sommes déjà passés de 5 % de réduction pendant le quinquennat de M. Hollande à 10 % ou 12 % pendant le premier quinquennat d'Emmanuel Macron. Ce n'est pas parce que seuls vingt pays sur l'ensemble de la planète ont entamé un cycle de baisse des émissions qu'il faut se réjouir par rapport à ce que font les autres. Si nous ne sommes pas exemplaires pour prendre notre part de l'effort, nos annonces perdront toute crédibilité.

Pour être crédible, il faut également faire attention à ne pas tout mélanger. Un gouvernement soutenu par une force politique dont l'engagement écologiste ne me semble pas contesté par certains membres de l'opposition en France – je peux parler des Verts allemands – a installé des méthaniers flottants et rouvert des centrales à charbon, considérant que, sur le plan social, la situation dans laquelle risquait de se trouver une partie des habitants le justifiait. Cet été, face au risque d'explosion sociale, la représentation nationale a décidé, quant à elle, par un vote très large, de soutenir temporairement les énergies fossiles ; de nombreux amendements allant dans ce sens, provenant de tous les bancs, avaient été présentés et avaient recueilli un avis défavorable du Gouvernement. Si l'ensemble des partis politiques représentés à l'Assemblée s'entendent pour soutenir les énergies fossiles afin d'éviter un récif social sur la trajectoire de décarbonation, on peut le comprendre, du moment que la mesure est à durée limitée et ne remet pas en cause l'objectif final que notre pays s'est engagé à atteindre. L'Assemblée a manifestement fait un constat qui l'a conduite à privilégier le social par rapport à l'écologie. Je respecte cette décision, qui a été prise de manière démocratique ; je rappelle simplement le cap.

Madame Faucillon, il y a sept quartiers prioritaires de la politique de la ville dans la commune dont j'ai été maire jusqu'au début du mois de juillet ; je connais donc un peu le sujet. En ce qui concerne le zonage et les moyens, la politique de la ville a vocation à être recentrée sur ses fondamentaux et réexaminée pour la période suivante à la fin de l'année 2023.

Vous proposez de « flécher » une partie du fonds vert en direction de la politique de la ville. Je ne suis pas favorable à ce que le fonds soit segmenté, une partie des crédits se trouvant affectés à la politique de la ville, tandis que d'autres le sont à la ruralité, aux territoires intermédiaires ou encore aux petites villes. Attribuer des moyens à la politique de la ville est une nécessité, mais en piochant dans une enveloppe à vocation généraliste, on prend le risque d'opposer les territoires entre eux, dans un contexte où il faut, au contraire, qu'ils tirent tous dans le même sens.

Monsieur Acquaviva, je confirme que les crédits du fonds vert seront à la main des collectivités locales. J'ai d'ailleurs eu une réunion de travail avec Gilles Simeoni, en sa qualité de président de la commission transition écologique de Régions de France, afin de détailler la manière dont les fonds pourraient être utilisés.

La gestion des déchets en Corse est une question suffisamment sensible pour faire partie des enjeux dont je discuterai sur place dans le courant du mois d'octobre. Néanmoins, la politique en la matière est d'abord à la main des élus locaux. La situation en Corse nécessite des décisions rapides pour sortir du conflit qui, si j'ai bien compris, oppose Syvadec et la collectivité. La mise en œuvre des mesures prévues par le plan d'élimination a pris du retard et le niveau de performance peut être très nettement amélioré.

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D'autres critères de richesse seront-ils pris en compte pour évaluer l'éligibilité des collectivités territoriales à l'aide que vous avez évoquée ? À combien pouvons-nous d'ores et déjà estimer les montants ? Selon quelles modalités et à quelle période cette aide sera-t-elle versée ? Les collectivités territoriales nous interrogent ; elles sont impatientes. Enfin, d'autres voies sont-elles envisagées pour soutenir les collectivités face à l'inflation ? Merci de bien vouloir nous réexpliquer le dispositif pour qu'il soit parfaitement clair, notamment pour la ruralité.

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Je voudrais vous parler des lumières toujours allumées, même la nuit, alors qu'il n'y a personne, dans les bureaux de votre ministère de l'« escrologie » ; de toutes vos taxes pseudo-écolos ; des dégâts des éoliennes ; des eaux des centrales nucléaires de Saint-Alban Saint-Maurice et du Bugey, que vous déversez encore bouillantes dans le Rhône et qui arrivent jusque chez nous, dans les Bouches-du-Rhône ; de la sécheresse… Mais, puisque vous ne me laissez que deux petites minutes, ma question sera simple.

À Marseille, la zone à faibles émissions mobilité (ZFE-m) est entrée en vigueur le 1er septembre. Elle vise à interdire certains types de véhicules. Comment voulez-vous que les automobilistes se plient à cette règle socialement injuste, alors que Marseille est sous-dotée en transports en commun ? Elle prive les conducteurs marseillais, bien souvent les plus pauvres, de leur moyen de transport principal. On dirait que vous tentez de stigmatiser les classes populaires. L'écologie ne devrait pas être un sujet partisan. Alors arrêtez votre « escrologie » punitive et vos coûts antisociaux, et développez les transports en commun – voire, dans notre département, le fret ferroviaire et fluvial.

À qui tout cela profite-t-il, sinon à vos amis du lobby des voitures électriques polluantes ? Eh bien, aux plus riches, qui pourront se payer une grosse voiture de 2 tonnes, consommant 20 litres aux 100 kilomètres, mais – ouf ! – auront la vignette Crit'Air 1 et pourront aller partout.

Qui y perd ? Nous, les plus modestes, que vous chassez loin du centre, sans solution alternative de transport, dans notre vieille Clio à 1 000 balles, qui consomme moins mais n'a que la vignette Crit'Air 5 et se voit interdite. Bref, c'est une écologie Porsche Cayenne, une écologie bourgeoise, qui vise à exclure les plus modestes des centres-villes.

Monsieur le ministre, vous qui travaillez la nuit, qu'avez-vous prévu, en plus de ces mesures dérisoires et injustes, pour aider les gens à changer de véhicule ? Allez-vous mettre un terme aux ZFE-m ?

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Monsieur le ministre, je suis étonné. Je vous ai connu comme maire d'Angers. Lors d'un conseil municipal, vous aviez eu une colère très remarquée contre une autre élue qui vous avait interpellé à propos de la construction d'une énième zone commerciale sur des terres agricoles. Vous aviez accusé vos opposants de vouloir réguler les naissances et fermer les frontières, et le reste de votre réponse consistait à dire, pour l'essentiel, qu'il ne fallait pas lutter contre l'artificialisation des sols – et que, de toute façon, il n'était pas possible de le faire. Je vois que le fond de votre pensée a changé.

Comme vous l'avez dit vous-même, nous payons cinquante ans d'artificialisation, pendant lesquels nous avons construit davantage qu'au cours des cinq siècles précédents. Mais, depuis votre nomination, vous n'avez pas fait tant de choses que cela. Le moins que l'on puisse dire, c'est que vous vous êtes fait remarquer par votre absence pendant la crise estivale, cachant mal votre absolue incompétence en matière d'écologie.

Vous menez toujours la même politique qu'à Angers, mais vous êtes passé des cris aux chuchotements, puisque vous avez suspendu en toute discrétion l'application de l'un des décrets relatifs à l'objectif Zéro artificialisation nette, condamnant le zèle de certains préfets qui protégeaient l'environnement contre l'urbanisation galopante. Vous avez cédé aux sirènes de vos vieux amis de la droite, qui pourront ainsi continuer à faire la part belle, dans leurs plans locaux d'urbanisme, aux lotissements, aux routes et aux centres commerciaux, sans prendre en compte les limites de notre environnement. Du béton, encore du béton, toujours du béton ! Dans le béton, tout est bon ! Ça, c'est du dogmatisme. Pourtant, le décret en question n'avait rien de très ambitieux, mais il semble que respecter les accords conclus lors de la Convention citoyenne pour le climat, c'était déjà un peu trop pour le gris « Horizons » et pour Renaissance…

Comment comptez-vous réécrire ce décret ? Le ferez-vous en tant que maire bétonneur d'Angers ou en tant que ministre de l'écologie écoutant les alertes du GIEC ? Comment allez-vous répondre au besoin de débétonner pour rendre nos villes résilientes face aux canicules – dont nous avons vu les conséquences avec les feux – et de stopper la métropolisation, qui continue d'aggraver les inégalités entre nos territoires et détruit l'environnement ?

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Je me fais la porte-parole de Blandine Brocard, qui n'a pas pu rester et vous prie de l'en excuser.

Le développement du parc photovoltaïque est un objectif majeur de la transition énergétique. J'aimerais toutefois appeler votre attention et recueillir votre point de vue sur deux éléments qui pourraient être améliorés.

D'une part, l'arrêté du 6 octobre 2021 fixant le prix d'achat de l'électricité d'origine photovoltaïque va, sans conteste, permettre la mise en chantier rapide de nouvelles installations, notamment du fait de l'extension aux puissances jusqu'à 500 kilowatts, contre 100 kilowatts auparavant. Toutefois, cette extension négociée avec la Commission européenne empêche le cumul avec les aides proposées par les collectivités et risque de créer des inégalités territoriales. S'il est compréhensible de fixer des limites à la perfusion d'argent public destinée à ces installations, ne pensez-vous pas qu'il serait possible de moduler le prix d'achat, par exemple selon un critère d'ensoleillement, afin de lisser la rentabilité sur l'ensemble du territoire ? On pourrait également dresser une liste claire des dispositions que les collectivités seraient susceptibles de prendre pour aider au développement de ces installations, comme l'accompagnement dans l'étude des dossiers et la préparation du terrain, le recyclage ou encore la rénovation d'installations.

D'autre part, de nombreux dossiers se heurtent à un refus de l'architecte des bâtiments de France. Ne pourrait-on envisager, par exemple, d'opposer la notion d'intégration paysagère en cas de refus, notamment lorsque l'installation, bien que située dans le périmètre d'un bâtiment classé, n'est visible conjointement avec celui-ci qu'à partir du ciel ?

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Vous avez dit que le moment était non plus au diagnostic mais à l'action, et qu'il fallait mesurer à partir de maintenant chaque tonne de CO2 évitée. Je vous le dis très franchement : nous serons derrière vous pour défendre ces orientations, à supposer que les mots soient suivis d'actes.

Toutefois, j'ai un léger doute. Pour l'étayer, je ne citerai pas mes propres études ni celles des associations, mais je rappellerai les mises en accusation émanant de la Commission européenne, dont le point de vue ne peut pas vraiment être accusé d'être partisan. Le 15 juillet, la Commission a rappelé à l'ordre la France pour trois motifs.

Premièrement, notre politique en matière de gestion des émissions du secteur industriel. À ce moment, la Commission ne savait pas encore que l'Assemblée allait adopter un projet de loi autorisant de nouveau les gaz de schiste et les centrales à charbon… À cet égard, puisque vous vous êtes permis d'adresser un clin d'œil à mes amis des Grünen, je me permets de faire de même avec votre ami Édouard Philippe : celui-ci a dû apprécier particulièrement de voir sa promesse ainsi piétinée.

Deuxième raison de mettre la France à l'amende : notre incapacité à œuvrer en faveur de la conservation des espèces marines protégées, malgré un premier avertissement en 2020.

Troisièmement, la législation en matière d'évaluation des incidences environnementales est trop floue, ce qui permet de faire n'importe quoi.

Il y a quelques jours, la Commission a également critiqué l'absence de financement de notre politique en faveur du climat, de la biodiversité et de l'économie circulaire. Elle souhaite que le peuple mette la pression sur son gouvernement pour que la France agisse enfin. Notre pays devrait consacrer 15 à 20 milliards à ces politiques pour être enfin à la hauteur des enjeux.

Vous comprendrez donc, monsieur le ministre, que je sois un peu inquiète…

Je vais vous donner une petite piste d'action : il ne manque qu'un décret pour que se concrétise enfin l'interdiction des avions pour les trajets de moins de deux heures trente, promesse faite à la Convention citoyenne pour le climat. Pourquoi ce décret n'a-t-il toujours pas été publié ?

Enfin, je vous ai posé par écrit une question très précise sur la situation de Stocamine. Je serais ravie que vous répondiez dans des délais très brefs à des militants qui, depuis vingt ans, essayent d'empêcher que la plus grande nappe phréatique d'Europe soit polluée par quarante-deux tonnes de déchets toxiques.

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Vous avez placé les relations entre l'État et les collectivités sous le signe de la confiance et de la responsabilité. J'ai aussi entendu votre souhait de ne pas modifier la gouvernance des CRTE. En revanche, pour les nouveaux dispositifs, serait-il envisageable d'améliorer la contractualisation ? Il faudrait notamment s'appuyer davantage sur le couple formé par le préfet et le maire – ou le représentant du bloc communal compétent, y compris, donc, celui de l'intercommunalité et de la métropole. Il importe, par ailleurs, comme le demande avec insistance notre collègue Erwan Balanant, d'élaborer des indicateurs précis, comme nous avons su le faire pour les contrats de Cahors. Surtout, le conventionnement devrait prévoir des financements pluriannuels, de façon à donner de la visibilité et de la stabilité, d'autant que les projets concernés ne peuvent pas être bouclés sur une période d'un an.

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Il n'y a pas que les SDF qui meurent plus de froid l'hiver que l'été, comme l'a quasiment dit une éminente intellectuelle de notre assemblée : cet hiver, les foyers équipés de poêles à granulés risquent de ne pas pouvoir se chauffer. Les particuliers ont été fortement incités par des primes cumulables à adopter ce mode de chauffage, de manière à éviter de consommer du fioul, dans le cadre d'une transition énergétique demandée par le Gouvernement. Désormais, ils se retrouvent seuls face au problème. Il y a environ 1 million de foyers dans cette situation. Ces Français sont scandalisés de voir que non seulement le prix des granulés est en forte hausse, mais que l'achat de ce combustible est limité pour chaque foyer. Le phénomène s'observe notamment dans les Bouches-du-Rhône : un couple de retraités vivant dans ma circonscription m'a envoyé un appel à l'aide, mais comme vous n'avez rien déclaré à ce sujet, je ne sais pas trop quoi leur répondre. Ils ignorent comment ils pourront se chauffer cet hiver, après avoir investi dans cet équipement du fait des incitations financières octroyées par le Gouvernement.

Cette pénurie est la conséquence de la mauvaise météo qui a affecté notre production forestière, mais pas seulement : elle s'explique aussi par le fait que les pays qui nous fournissent habituellement ont arrêté de le faire. En effet, de nombreux pays européens ont stoppé leurs exportations, après avoir eux-mêmes observé que les stocks s'amenuisaient. Ils protègent ainsi leur population. Et vous, comment comptez-vous protéger les Français ? Envisagez-vous un blocage des prix ou des importations alternatives ? Ou bien conseillerez-vous aux utilisateurs de se chauffer modérément tout l'hiver – en d'autres termes, de se restreindre avant de basculer dans la précarité énergétique ?

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Les dark stores, ces entrepôts fantômes où sont stockés des produits destinés à la livraison à domicile, causent de nombreuses nuisances dans les centres-villes : leurs emprises occupent une partie de l'espace public, les livraisons provoquent des nuisances sonores, ce type de distribution fait concurrence aux commerces de proximité, et je ne parle même pas des fermetures de vitrines dans les quartiers animés des zones denses des centres-villes. Certains de ces entrepôts ne respectent ni les règles sanitaires, ni le droit du travail. Nous avons engagé cet été un travail de concertation, afin de permettre aux maires de réguler ces activités en considérant les établissements concernés comme des entrepôts dans le cadre des plans locaux d'urbanisme (PLU) – je remercie le Gouvernement pour sa disponibilité. La question connexe de la régulation des dark kitchens va également se poser : elle nécessitera la création d'une nouvelle sous-destination dans les documents d'urbanisme.

Pourriez-vous préciser le calendrier et la méthode qui seront mise en œuvre pour avancer sur ces sujets ? Quels types de contrôles pourraient être envisagés afin d'assurer un meilleur respect des règles en matière d'urbanisme, de santé et de droit du travail ?

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Les enjeux de l'usage raisonné et sobre de l'énergie sont majeurs. L'explosion des prix va encore étendre la précarité énergétique que connaissent déjà 12 millions de personnes, soit un foyer sur cinq, selon le rapport de la Fondation Abbé-Pierre. Cette situation est-elle acceptable dans un pays comme le nôtre, où l'on observe par ailleurs tant et tant de gâchis ? Je pense particulièrement aux passoires thermiques. Quel est votre plan d'action en la matière ?

Sur le nucléaire, que fait-on ? Trente-deux des cinquante-six réacteurs sont à l'arrêt, faute d'entretien. On mesure aujourd'hui la dangerosité des centrales, en raison de la nature même de leur activité et des déchets qu'elles produisent, dont on ne sait que faire, mais dont la durée de vie se compte en milliers d'années. Que prévoyez-vous pour développer les énergies renouvelables ? Quelle est votre stratégie et quels moyens allez-vous y consacrer, tant financiers qu'en matière de recherche ? Ne faudrait-il pas organiser tout cela au sein d'un grand service public – vous voyez à quoi je fais allusion –, ne serait-ce que pour apporter une garantie sociale et démocratique ?

Les relations avec les collectivités locales nous intéressent et nous préoccupent. Je vois au moins une contradiction dans vos propos à ce sujet. Vous n'avez pas tort d'affirmer que les territoires, comme on dit – alors que ce sont plutôt les citoyens qui comptent –, sont capables d'innovation : ainsi, la ville de Grenoble couvrira l'équivalent du niveau de consommation de ses habitants par de l'électricité verte d'ici à environ deux ans. Mais comment faire quand on nous annonce une baisse des dotations de 10 milliards d'euros ? Qu'est-ce que le fonds vert que vous avez évoqué ? À quoi sera-t-il utilisé ?

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Ma première question rejoint celle de Mme Poussier-Winsback. La commune de Châtillon-Coligny, qui compte 1 800 habitants, fait face à une augmentation de 50 000 euros de ses charges de fonctionnement eu égard à la hausse des prix de l'électricité. Celle de Montcresson, peuplée de 1 200 habitants, voit les tarifs qui lui sont proposés passer de 7 800 à 78 000 euros. Les maires vivent rarement dans l'abondance. Ils m'ont prouvé par a + b qu'ils avaient déjà tout mis en œuvre pour réduire leur consommation énergétique, par exemple en remplaçant les fenêtres et en profitant des aides qui leur étaient offertes. Nous n'avons pas de réponse concrète à leur apporter : vous vous êtes contenté d'évoquer des éléments macroéconomiques, et la seule chose que j'ai retenue est que la hausse de la taxe foncière, payée par le contribuable, permettrait de compenser partiellement les hausses de dépenses auxquelles les communes sont confrontées…

Ma seconde question concerne les éoliennes. En visite dans ma circonscription il y a un mois, Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales, a annoncé devant des élus un changement de doctrine : il n'y aurait plus, désormais, d'installation éolienne terrestre sans l'accord des maires concernés. Le corps préfectoral attend une consigne d'en haut pour faire appliquer cette nouvelle doctrine. Je comprends votre volonté de diversifier notre mix énergétique, mais je déplore une installation d'éoliennes totalement anarchique dans mon territoire du Gâtinais. Les élus attendent d'être écoutés.

Ma troisième question porte sur la hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) payée par des contribuables déjà affectés par la forte augmentation de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Les syndicats de traitement des ordures ménagères font déjà beaucoup en faveur de l'écologie, mais ils ne sont malheureusement pas toujours capables de valoriser nos déchets ; ce sont alors les contribuables qui paient la hausse de la TGAP. Pouvez-vous prendre des mesures pour donner un peu d'air à ces derniers ?

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Christophe Béchu, ministre

J'ai un léger désavantage par rapport à mes collègues qui seront auditionnés dans les prochaines semaines : les ultimes arbitrages concernant l'architecture initiale du projet de loi de finances pour 2023 n'ont pas encore été rendus. Sur certains sujets, toutes les décisions ne sont pas encore publiques, ce qui est logique puisqu'il reste encore quelques heures de négociations.

Je rencontrerai demain l'ensemble des associations d'élus pour leur présenter une partie de l'architecture globale du budget relatif à la cohésion des territoires. Je leur confirmerai la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), sur laquelle vous ne m'avez pas interrogé, et je leur annoncerai quelques autres dispositifs.

Madame Martin, les 10 milliards d'euros que vous avez évoqués ne correspondent pas à une réalité comptable, mais à une tendance. Le Gouvernement ne pense pas que les dépenses des collectivités vont baisser : il pense au contraire qu'elles vont augmenter de 24 milliards d'euros durant le quinquennat. En revanche, nous considérons que ces 24 milliards s'inscrivent dans une trajectoire, au sein de laquelle l'État et les collectivités territoriales doivent faire en sorte d'augmenter leurs dépenses de fonctionnement un peu moins que l'inflation. Nous devons investir pour diminuer nos dépenses de fonctionnement, en partant d'un principe relativement simple : quand on est déjà le champion du monde des prélèvements obligatoires et de la dépense publique, à moins de souhaiter un modèle totalement collectiviste – je peux comprendre que ce soit le cas de certains d'entre vous –, on sait que ce n'est pas en augmentant encore la dépense publique qu'on deviendra les meilleurs dans un certain nombre de domaines. C'est bien ce que montrent les comparaisons internationales citées par tous ceux qui mettent en avant tel ou tel pays où, justement, le niveau de dépenses publiques est plus faible que chez nous.

Madame Chandler, une part du fonds vert sera à la main des élus. Ce qui est concret, c'est le montant de ce fonds : 1,5 milliard d'euros. Est-ce uniquement du greenwashing de subventions existantes ? Les choses sont totalement transparentes : vous ne trouverez, dans le budget 2022, pas plus de 350 millions d'euros qui correspondent aux objets finançables par ce 1,5 milliard d'euros. Il s'agit donc bien d'un fonds doté de crédits nouveaux, « fléchés » vers les collectivités locales, financés par un effort budgétaire réalisé par des ministères qui voient leurs crédits progresser.

Nous aidons les collectivités à investir. Investir, ce n'est pas courir après des factures d'énergies fossiles, mais étudier comment des travaux permettront de diminuer ces dernières, ce qui a aura un impact positif tant pour le budget que pour le climat.

S'agissant des aides aux collectivités locales, chaque bloc se trouve dans une situation différente. Je ne vous parlerai que des communes, puisque vous ne m'avez interrogé que sur ces dernières. Si l'inflation affecte le niveau des dépenses, elle se répercute aussi sur celui des recettes. Ainsi, la TVA perçue par les régions, qui dépend directement du volume des biens et services vendus, augmente lorsque l'inflation s'accroît. Plus généralement, les collectivités qui touchent des parts de TVA connaîtront une progression d'une partie de leurs recettes du fait de l'inflation des impôts qu'elles perçoivent : il s'agit là d'un mécanisme d'ajustement. Certes, cela ne résout rien pour les contribuables. Je ferai d'ailleurs remarquer à tous les membres de votre commission, quelles que soient leurs orientations politiques, qu'à part dans les livres pour enfants, il y a toujours, à la fin, quelqu'un qui paie – cela peut être l'usager, le contribuable…

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Alors, ce sera le contribuable ? Nous voulons savoir !

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Christophe Béchu, ministre

Peut-être existe-t-il une tradition propre à votre commission, mais dès lors que la personne auditionnée s'efforce de ne pas interrompre les députés qui posent des questions, il me semble que ces derniers devraient écouter les réponses.

Madame Lelouis, la création de zones à faibles émissions répond à des préoccupations qui ne me semblent pas pouvoir être écartées d'un revers de main, au premier rang desquelles la qualité de l'air. Lorsqu'on est attaché à la qualité de vie de nos concitoyens, et je sais que c'est le cas de chacun d'entre vous, on ne peut que trouver légitime le fait que la représentation nationale et le Gouvernement se mobilisent sur un tel sujet. La France est d'ailleurs dans le viseur des institutions européennes pour avoir dépassé les seuils de pollution dans un certain nombre de villes : c'est ce qui nous a conduits à accélérer la mise en place des ZFE et à imposer leur création dans certaines collectivités. Il ne s'agit donc pas d'une lubie, ni d'une politique antisociale, mais d'une manière d'améliorer la qualité de l'air dans le centre des agglomérations. Le contenu du dispositif, le rythme de son déploiement et les moyens utilisés relèvent de la compétence des élus locaux : c'est territoire par territoire que sont déterminées l'ampleur des mesures adoptées, la vitesse maximale autorisée, les vignettes et les dates de construction des véhicules admis à circuler – toutes ces dispositions étant coordonnées avec des politiques menées en faveur de l'électrification d'une partie du parc automobile.

Monsieur Kerbrat, ce n'est pas en répétant des contrevérités que vous en ferez des vérités. Je vous invite à concentrer vos critiques sur ce que je fais ou ce que je ne fais pas depuis deux mois, plutôt que sur mon bilan local – sinon, permettez-nous de nous interroger sur votre attachement à la démocratie…

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Mais vous êtes encore président de communauté urbaine !

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Christophe Béchu, ministre

J'ai démissionné de mes fonctions à la ville d'Angers le 18 juillet et de celles à la communauté urbaine d'Angers-Loire-Métropole hier.

La ville d'Angers a été qualifiée de « ville la plus verte de France » par un magazine spécialisé. Elle compte 100 mètres carrés d'espaces verts par habitant. En 2014, à peine élu à la mairie, j'ai imposé un moratoire sur la construction de zones commerciales, en réaction à des décisions prises par la précédente majorité écologiste et socialiste que les Angevins ont souhaité remercier. Il y avait alors des pistes d'amélioration dans le domaine de la transition écologique – je pourrais vous parler, entre autres, du tri mécanobiologique des ordures ménagères. Si vous êtes un tant soit peu attaché à la bonne information de nos concitoyens, vous devriez vous demander pourquoi, lors des élections municipales de 2020, dans une ville que vous ne jugez pas à la pointe sur tous ces sujets, 60 % des électeurs ont décidé de nous faire confiance dès le premier tour et pourquoi les écologistes ont réalisé à Angers l'un de leurs pires scores de France. Mais sans doute avez-vous là encore des explications toutes faites.

J'en viens à la question de Mme Brocard, que Mme Desjonquères a eu l'amabilité de me poser. Ma collègue Rima Abdul Malak, ministre de la culture, est précisément en train d'étudier avec les architectes des bâtiments de France comment concilier, en particulier pour les bâtiments construits après 1946, l'impératif de préservation du patrimoine et la nécessité d'accélérer l'installation de panneaux photovoltaïques sur la totalité du territoire. Cette question sera au cœur du projet de loi relatif à l'accélération des énergies renouvelables, qui sera prochainement déposé sur le bureau de votre assemblée.

Je vous rassure, madame Regol, le décret relatif à l'interdiction des vols lorsque le même trajet peut être réalisé en avion en moins de deux heures et demie…

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Non, lorsque le trajet peut être réalisé en train !

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Christophe Béchu, ministre

Évidemment.

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Votre lapsus est intéressant ! Vous n'avez pas envie d'agir !

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Christophe Béchu, ministre

Non : si l'on interdisait les vols de moins de deux heures et demie lorsqu'il y a une possibilité de prendre l'avion, cela voudrait dire qu'on les interdirait tout court – ce lapsus ne correspond donc pas tout à fait à ma philosophie. En tout cas, le décret est sur le point d'être publié : il n'y a pas de renoncement.

S'agissant de Stocamine, la non-pollution de la nappe est évidemment l'obsession de mon ministère. La première décision ministérielle prévoyant un confinement des déchets toxiques pour empêcher toute contamination a été prise par Mme Royal, puis confirmée par Mme Pompili. Je souhaite que nous trouvions le moyen juridique de faire réaliser rapidement ces travaux : nous devons éviter que le temps qui passe ne provoque un effondrement des galeries de stockage et que le risque de contamination ne devienne réalité.

Monsieur Pradal, votre idée d'accroître la contractualisation dans les nouvelles générations de CRTE et d'y ajouter des indicateurs, en particulier de transition écologique – en lien avec le nom de ces contrats – est bonne : il s'agit certainement d'une piste à creuser. Cela nous renvoie à la discussion que nous avons eue avec M. Balanant concernant l'évaluation de la mise en œuvre des CRTE et la création d'outils permettant aux différentes parties du contrat de parler la même langue.

Vous avez raison, monsieur Baubry, les décisions prises dans le cadre du dernier projet de loi de finances rectificative présentent un angle mort. Je regrette qu'aucune aide n'ait été instaurée pour les granulés bois lorsque les aides au fioul ont été votées – ce sujet n'avait d'ailleurs pas suscité autant d'amendements que le soutien à d'autres modes de chauffage. Je souhaite que cet oubli soit réparé dans le cadre du chèque énergie et des futurs dispositifs qui seront mis en place.

Madame Chassaniol, j'ai bien entendu votre question concernant les dark stores. Le sujet est à la fois complexe et simple. Si nous ne faisons rien, les établissements de ce genre continueront de se développer. Mais ne créons pas de polémique inutile : si la question a été soulevée cet été par des élus de grandes villes, ce n'est pas parce que le Gouvernement réfléchissait à la façon d'autoriser ces établissements – ils se développent sans autorisation. Au contraire, le Gouvernement réfléchit à la manière de réguler l'implantation des dark stores et des dark kitchens et de donner aux maires des leviers pour agir. Quant au respect du droit du travail et à la nécessité de contrôler ces établissements, ces sujets s'éloignent grandement de mon domaine de compétence et de celui de mon ministère ; ils nécessitent donc un travail interministériel.

Madame Martin, concernant le mix énergétique global, la situation dans laquelle nous nous trouvons résulte d'un sous-investissement dans le secteur nucléaire ces dernières années. Nous ne devons pas répéter cette erreur : il faut donc investir dès maintenant dans des réacteurs qui nous permettront de compléter notre mix énergétique. Ne racontons pas d'histoires : nos besoins énergétiques ne vont pas aller en diminuant. Pour nous débarrasser des énergies fossiles, nous devrons notamment massifier l'électrification de notre flotte de véhicules, ce qui nécessitera une puissance électrique supérieure. Cela suppose évidemment des investissements massifs en faveur des énergies renouvelables – vous aurez l'occasion d'en débattre dans quelques semaines, lorsque vous examinerez le projet de loi présenté par Agnès Pannier-Runacher –, qu'il faudra allier aux énergies décarbonées, dont nous connaissons les qualités. Je n'oppose pas ces énergies les unes aux autres, je les considère comme complémentaires.

Monsieur Ménagé, notre pays est en retard dans le déploiement des énergies renouvelables ; or nous devons être capables d'associer, dans notre mix énergétique, la totalité de ces énergies. Des déploiements anarchiques d'éoliennes terrestres ? Quand on compare la capacité éolienne globale de la France à celle d'autres pays, notre avance ne saute pas aux yeux ! Certains gisements d'énergies renouvelables, pour lesquels nous avons des marges de manœuvre considérables à court terme, suscitent beaucoup moins de levées de boucliers. Au lieu de faire de la petite politique et d'utiliser l'écologie pour défendre un pré carré électoral ou toujours expliquer que les autres n'en font pas assez, je souhaite que, conscients de l'ampleur des enjeux, nous entrions dans une logique pragmatique de mobilisation et que nous cherchions à rassembler les Français plutôt qu'à les opposer. C'est pourquoi nous voulons accélérer le déploiement de l'éolien offshore et du photovoltaïque, les deux leviers principaux du projet de loi qui vous sera présenté dans quelques jours.

Il me semble avoir déjà répondu au sujet de l'inflation, mais je serai plus à l'aise pour le faire dans quelques jours, lorsque la totalité du dispositif aura été présentée.

Nous devons nous sortir de la tête l'idée que la sobriété serait le mot d'ordre du seul hiver 2022. C'est l'un des leviers de l'atténuation du changement climatique : nous devons nous habituer à consommer moins de ressources, compte tenu du contexte global dans lequel nous nous trouvons.

La question sur la TGAP est un peu plus technique. Nous devons faire en sorte que ce qui est néfaste pour l'environnement coûte plus cher que ce qui est bon pour lui. Il y a sans doute une réflexion globale à conduire sur la fiscalité. Par exemple, la création du fonds pour le recyclage des friches, qui finance la réhabilitation de terres déjà artificialisées, est incontestablement une bonne idée, mais peut-être devrions-nous aussi nous interroger sur le renchérissement de l'artificialisation que cela induit. Si le seul levier d'action consiste à injecter systématiquement de l'argent public, nous risquons de ne pas nous y retrouver ! De même, si nous pensons que l'économie circulaire a des vertus, nous pouvons l'encourager en réduisant la taxation des biens issus de ces filières. J'en appelle donc à une réflexion du Parlement, tant dans le cadre des prochains chantiers de la planification écologique, qui doivent inclure des discussions sur la fiscalité, qu'à l'occasion de ses travaux habituels. Cela augure de débats qui seront passionnants à vivre et que j'aurai plaisir à accompagner, en me soumettant à une nouvelle audition ou en siégeant au banc du Gouvernement dans les prochaines semaines et les prochains mois.

La séance est levée à 16 heures 40

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Caroline Abadie, M. Jean-Félix Acquaviva, Mme Sabrina Agresti-Roubache, M. Erwan Balanant, M. Romain Baubry, Mme Pascale Bordes, M. Florent Boudié, M. Xavier Breton, Mme Blandine Brocard, Mme Émilie Chandler, Mme Clara Chassaniol, M. Éric Ciotti, Mme Mathilde Desjonquères, Mme Edwige Diaz, Mme Elsa Faucillon, Mme Raquel Garrido, M. Yoann Gillet, Mme Marie Guévenoux, M. Sacha Houlié, M. Jérémie Iordanoff, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Marietta Karamanli, M. Andy Kerbrat, M. Gilles Le Gendre, Mme Gisèle Lelouis, M. Didier Lemaire, M. Benjamin Lucas, M. Emmanuel Mandon, Mme Élisa Martin, M. Thomas Ménagé, M. Ludovic Mendes, Mme Naïma Moutchou, Mme Danièle Obono, M. Jean-Pierre Pont, M. Thomas Portes, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, M. Philippe Pradal, M. Stéphane Rambaud, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Sandra Regol, Mme Béatrice Roullaud, M. Thomas Rudigoz, Mme Sarah Tanzilli, Mme Andrée Taurinya, M. Jean Terlier, M. Jean-Luc Warsmann

Excusés. - M. Pieyre-Alexandre Anglade, M. Jean-François Coulomme, M. Philippe Dunoyer, M. Philippe Gosselin, M. Jordan Guitton, M. Mansour Kamardine, Mme Emeline K/Bidi, M. Éric Pauget, M. Davy Rimane, Mme Cécile Untermaier