Commission des affaires européennes

Réunion du mercredi 13 décembre 2023 à 15h02

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • ESA
  • PPRE
  • ariane
  • coopération
  • lanceur
  • spatial
  • spatiale
  • spatiale européenne
  • spatiaux

La réunion

Source

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 13 décembre 2023

Présidence de M. Pieyre-Alexandre Anglade, Président de la Commission,

La séance est ouverte à 15 heures 02.

I. Adoption d'une loi européenne sur l'espace : examen d'une proposition de résolution européenne (Mme Cécile RILHAC, rapporteure) (n° 1944)

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le premier point de notre ordre du jour est l'examen d'une proposition de résolution européenne relative à l'adoption d'une loi européenne sur l'espace. L'enjeu de l'espace est crucial pour notre souveraineté : la France assume une responsabilité particulière en la matière, avec le Centre spatial guyanais, base de lancement située à Kourou.

Aujourd'hui, l'Europe ne dispose pas de la capacité souveraine de développer des vols habités contrairement aux États-Unis, à la Chine et bientôt à l'Inde. Je salue donc les annonces du Président de la République du 11 décembre, en soutien au développement d'un vaisseau spatial cargo européen capable d'acheminer du fret vers les futures stations spatiales. Le plan France 2030 permettra à la France d'être à l'avant-garde européenne en matière de micro lanceurs. La bataille pour l'espace est une bataille mondiale, dans laquelle l'Europe doit prendre toute sa place.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nos sociétés et nos économies sont devenues dépendantes des solutions spatiales. Pour autant, aucun cadre réglementaire international ou européen contraignant ne régule aujourd'hui le trafic en orbite. Aux quelque 8 900 satellites déjà opérationnels en 2023, s'ajouteront d'ici à 2030 pas moins de 24 000 nouveaux satellites qui devront cohabiter dans le même espace.

Figurez-vous un périphérique tridimensionnel autour de la planète : voici l'espace dans lequel circulent les satellites des différentes constellations. Imagine-t-on une seule seconde sur Terre se passer de règles et de codes en matière de trafic routier ou aérien ? Cela nous semblerait fou, voire irresponsable. Pourtant, c'est aujourd'hui ce qui se passe, à quelques centaines de kilomètres au-dessus de nos têtes, avec des conséquences catastrophiques sur certaines orbites, et tout particulièrement les orbites basses.

Le sujet de la proposition de résolution européenne que je soumets à votre examen est au cœur de l'actualité européenne. Lors de la dernière réunion du Conseil, vendredi 8 décembre 2023, les États membres ont effectivement adopté des conclusions dressant « un état des lieux de la gestion du trafic spatial ».

Cette prise de conscience est une étape nécessaire, mais insuffisante. En l'absence de norme contraignante à l'échelle internationale, une législation européenne ambitieuse, centrée sur les activités civiles, est devenue nécessaire pour assurer une gestion efficace du trafic spatial.

À l'ère du New Space, les acteurs privés et les projets de mégaconstellations – tels que celui de Starlink – se multiplient, et risquent de transformer l'orbite basse, déjà particulièrement congestionnée, en « corridor de la mort ». L'espace ne peut rester une zone de non-droit.

Les débris spatiaux s'accumulent en orbite basse. En cas de collisions avec des satellites, les conséquences peuvent être catastrophiques pour les applications civiles, notamment les services de télécommunications ou de géolocalisation, civils comme militaires. Nos sociétés sont largement dépendantes des services satellitaires, et les risques sont loin d'être théoriques. En 1996 – alors même que le trafic spatial était beaucoup moins dense – la France a perdu le satellite militaire Cerise, percuté par le lanceur d'une Ariane 1 qui avait décollé dix ans plus tôt.

L'Agence spatiale européenne (ESA) estime que le nombre de débris spatiaux d'une taille comprise entre 1 et 10 centimètres dépasse désormais le million. À titre d'illustration, en orbite, un débris en acier d'un diamètre de 2 centimètres, bien que trop petit pour être suivi, possède une énergie cinétique comparable à celle d'une voiture lancée à 130 kilomètres/heure.

Pour toutes ces raisons, une coordination plus efficace du trafic spatial est une nécessité, qui a d'ailleurs été qualifiée en 2023 par l'Organisation des Nations unies comme l'un des défis majeurs « pour l'humanité tout entière ».

Ainsi que l'ont souligné les représentants auditionnés du Centre national d'études spatiales (CNES), la gestion du trafic spatial repose sur deux grands piliers. Elle dépend, d'une part, de l'adoption d'un socle de règles communes, recouvrant un aspect réglementaire et, d'autre part, d'une plus grande coordination entre les acteurs en matière opérationnelle.

Sur le plan réglementaire, la future loi européenne sur l'espace – dont la présentation est espérée sous la présidence belge du Conseil au premier semestre 2024 – devrait promouvoir un socle normatif répondant aux enjeux de sécurité et de durabilité.

L'industrie spatiale européenne est demandeuse d'une telle régulation, pour des questions de compétitivité. En effet, les fournisseurs de services spatiaux menant leurs opérations depuis le port spatial européen de Kourou doivent se conformer au régime d'autorisation administrative prévu par la loi française de 2008 relative aux opérations spatiales, dite « LOS ». C'est pourquoi les opérateurs européens doivent bien souvent tenir compte de l'impact de leurs lancements sur la production de débris spatiaux et la densité du trafic spatial, contrairement à leurs concurrents issus de pays tiers, qui choisissent plus volontiers d'autres sites de lancement. Il importe, comme le relève la proposition de résolution européenne, que ces mesures soient réciproques, tant dans une logique de durabilité que de compétitivité pour l'industrie européenne.

Le représentant de la Direction générale des entreprises (DGE) que j'ai auditionné suggère ainsi la généralisation à l'échelle européenne d'un mécanisme de certification imposant le respect d'exigences techniques et de standards, sur le modèle des procédures d'autorisation prévues par la LOS.

La future législation européenne sur l'espace s'imposera donc à tous les fournisseurs de services spatiaux opérant dans l'Union européenne, y compris ceux issus de pays tiers.

Par ailleurs, des incitations devraient également être prévues pour inciter au développement des technologies innovantes d'évitement des collisions et de retrait actif des débris. Un label « espace sûr » pourrait être attribué aux entreprises et opérateurs respectant les critères de sûreté et de viabilité des opérations spatiales.

Cet alliage de mesures contraignantes et incitatives a suscité une large adhésion des interlocuteurs auditionnés pour ce rapport.

Sur le plan opérationnel, afin de renforcer la coordination entre les acteurs, le renforcement des capacités européennes de surveillance et de suivi de l'espace, dites « SST », est un prérequis.

Le programme EU SST, renforcé par le règlement du 28 avril 2021 établissant le programme spatial de l'Union et l'Agence de l'Union européenne, réunit désormais 15 États membres, additionnant leurs moyens. Néanmoins, la capacité européenne de surveillance est estimée à seulement 5 % de celle des États-Unis. La quasi-totalité des pays européens a signé des accords bilatéraux pour avoir accès au catalogue américain répertoriant les objets spatiaux ; cette situation de dépendance n'est pas satisfaisante pour l'Union.

La future loi européenne sur l'espace doit contribuer à la réduction des dépendances technologiques. EU SST pourrait ainsi jouer un rôle en tant qu'investisseur public sur des capteurs commerciaux innovants, et mobiliser le levier de la commande publique afin de renforcer les capacités européennes pour contribuer in fine à l'autonomie stratégique européenne.

Le cadre fixé à l'échelle européenne pourra servir de base pour des négociations à l'échelle internationale. L'adoption d'un modèle européen pour la gestion du trafic spatial, selon une démarche proactive, servirait de base de négociation pour parvenir, à terme, à un accord de niveau international.

Pour fonder sa crédibilité, cette proposition de résolution demande également que l'Union européenne accepte les droits et obligations découlant des principaux traités et conventions des Nations unies sur l'espace extra-atmosphérique.

Cette proposition s'inscrit dans la logique d'une résolution adoptée il y a déjà plus d'un an par les eurodéputés, qui appelaient à l'époque à la présentation d'une proposition de législation européenne avant 2024.

La discussion sur cette proposition de résolution a une autre vertu, celle que le Parlement se saisisse d'un sujet trop peu souvent débattu, alors qu'il revêt pourtant des enjeux très concrets pour nos concitoyens, et stratégiques pour la France et l'Europe. Aussi, je vous remercie de l'intérêt que vous avez porté à ce texte, par le biais de vos amendements que j'ai lus avec attention, et auxquels je m'attacherai à répondre sur le fond.

L'exposé de la rapporteure a été suivi d'un débat.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce sujet est effectivement trop peu débattu dans nos assemblées parlementaires, et trop peu présent dans le débat public. Il est urgent de se ressaisir : un véritable réveil de l'Europe est nécessaire sur la question spatiale. Alors que nous disposons d'atouts industriels remarquables, nous avons manqué à l'échelle européenne trop de virages stratégiques depuis dix ans. Ceci explique aujourd'hui les défaillances manifestes sur les lanceurs, et les inquiétudes concernant les vaisseaux cargos et le déploiement des constellations.

L'Union européenne doit agir dans l'espace pour assurer sa souveraineté sur Terre. Ceci tant en matière économique, alors que 10 % de l'économie européenne repose sur des infrastructures spatiales, qu'en matière militaire, avec les réseaux d'information et de télécommunication.

L'Union européenne doit également agir pour l'espace, afin de préserver notre bien commun. L'encombrement de l'orbite basse met en péril l'accès à l'espace, ce qui appelle une réglementation beaucoup plus forte. L'Europe doit porter cette voix du multilatéralisme et de la préservation des biens communs.

La France s'est mise en ordre de bataille lors du sommet de Séville en novembre 2023 et a obtenu des résultats importants pour la pérennité d'Ariane 6. Le Président de la République est récemment revenu sur l'accompagnement apporté par France 2030 en matière spatiale, ainsi que sur les quatre projets de constellations de satellites et sur les huit projets pour six micro-lanceurs.

Mais pour obtenir des résultats concrets, il faudra aller plus loin que ces initiatives françaises et que ces récentes avancées européennes. La compétition entre les pays européens ne doit pas fragiliser l'Union par rapport à d'autres puissances engagées dans la course spatiale. Certaines des puissances extra-européennes ont un marché domestique profond, avec des capacités d'investissement très importantes. Il nous faut donc impérativement nous doter de règles et d'une stratégie commune au niveau européen, tant en matière de réglementation que d'investissement. C'est le sens de cette proposition de résolution européenne que nous voterons.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette proposition de résolution européenne souligne qu'au cours de la dernière décennie, l'accès aux technologies de pointe a entraîné une croissance exponentielle des activités spatiales. Ces activités, vitales pour les services civils et militaires, sont devenues une partie intégrante de l'économie européenne, où la France tient une place toute particulière.

Le texte souligne la nécessité d'une réglementation unifiée en matière européenne. L'Union a récemment adopté le règlement 2021/696 fixant les objectifs pour soutenir les priorités politiques de l'Union européenne et renforcer son rôle dans l'industrie spatiale mondiale. Si ces orientations doivent encourager l'innovation, l'Union s'éloigne toutefois de plus en plus du chemin de la coopération – qui avait permis le succès de nombreux clusters aéronautiques d'excellence, tels qu'Airbus et Ariane – pour privilégier la voie de la concurrence internationale. Le groupe Rassemblement national considère que cette situation est inquiétante : une loi spatiale européenne qui renforcerait cette dynamique ne serait pas sécurisante pour nos industriels.

Enfin, face à l'augmentation du nombre de débris spatiaux et à l'enjeu du partage de l'espace et de ses ressources, face à la concurrence de nouvelles puissances spatiales, nous insistons sur la nécessité d'une diplomatie pragmatique et collective, menée par les États membres et non par la Commission européenne. Nous répétons ici notre préférence pour la coopération, plutôt qu'à des dispositifs uniques pilotés par la Commission.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La France est une grande nation spatiale, avec des outils performants, une base technologique et industrielle solide ainsi que des ingénieurs, techniciens et ouvriers remarquables. Le lanceur européen Ariane a permis le lancement avec une grande précision du télescope James Webb. Malgré cela, les débats sur la politique spatiale sont rares. Cette proposition de résolution européenne a pour grand mérite d'initier un débat parlementaire sur la politique spatiale en Europe, en appelant à agir pour la régulation du trafic spatial. Cette dernière est indispensable et peut être pertinente à l'échelle européenne.

Dans ce cadre, il faut souligner les difficultés auxquelles la politique spatiale européenne fait face. Nous passons d'un système de coopération à un système de concurrence entre les pays européens. Alors que notre Nation doit avoir une politique spatiale cohérente et ambitieuse, le Président de la République a tardé à prendre au sérieux les signaux pourtant clairs en provenance de l'Allemagne et de l'Italie, qui cherchent à s'imposer dans ce domaine. Les réponses apportées ne sont pas à la hauteur et ne prennent pas en compte les spécificités du secteur spatial : la stratégie française ne saurait relever d'une pure logique de marché concurrentiel pour des start-up. Le spatial implique des investissements importants pour une rentabilité qui n'est pas garantie. La logique de marché conduit à un saupoudrage incohérent de l'argent public, qui ne permettra pas à l'industrie française de s'imposer face à ses compétiteurs. Le plan France 2030 n'est pas la réponse appropriée pour l'industrie spatiale : s'en contenter est un leurre qui nous conduit au désastre. Il nous faut une véritable stratégie spatiale française, soustraite de la logique du marché, fondée sur une planification sur le long terme.

C'est cette méthode qui a permis à la France et à l'Union de devenir des acteurs spatiaux de premier rang, en dépensant vingt fois moins d'argent que les États-Unis. L'espace emporte certes des usages commerciaux, dont découlent des services dont nous nous servons quotidiennement. L'espace est aussi un outil au service de notre défense, qui implique que nous restions souverains. Elle est un terrain de recherche scientifique indispensable pour la compréhension du climat et de ses bouleversements. Nous avons plus que jamais besoin de ces données pour servir le bien commun. Ces enjeux sont prioritaires et aucun marché commercial ne pourrait y répondre. Aussi nous faut-il aborder la question d'une réglementation spatiale européenne sans naïveté, et en défendant les intérêts de notre Nation.

Le groupe La France Insoumise refuse l'appropriation marchande de l'espace comme de la Lune, que certains États envisagent aujourd'hui. Nous voulons au contraire promouvoir la coopération dont l'ESA est un modèle depuis 50 ans. Nous appelons la diplomatie française à prendre des initiatives pour préserver l'espace des logiques guerrières et commerciales. L'espace, bien commun de l'humanité, doit être un terrain de coopération pacifique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous ne pouvons que nous réjouir de cette proposition de résolution, que nous approuverons. Au cours de la XVe législature, nous avions abordé le sujet de l'espace à plusieurs reprises au sein de la commission des Affaires étrangères. Ainsi en janvier 2020, à l'occasion d'une table ronde consacrée à l'espace et ses enjeux scientifiques, stratégiques, industriels et environnementaux. À cette occasion, le général Michel Friedling et le spationaute Thomas Pesquet militaient déjà pour une future loi européenne sur l'espace.

Le temps où l'accès à l'espace était réservé aux grandes nations spatiales est révolu et le New space est une réalité concrète. De nombreux entrepreneurs se lancent désormais à l'assaut de l'espace. Il est indispensable, comme vous le rappelez dans votre rapport, que cette loi s'applique aux fournisseurs issus de pays tiers opérant en Europe. Ces derniers échappent trop souvent aux règles nationales visant à prévenir la formation des débris spatiaux. Pensez-vous que la Commission européenne puisse aller dans ce sens, et à quelle échéance pourrait-elle présenter une proposition législative ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite profiter de cette discussion sur la politique spatiale européenne pour mettre en avant l'accord tripartite conclu entre la France, l'Allemagne et l'Italie sur le futur des lanceurs européens et le futur de la politique spatiale européenne.

La France a été à l'initiative et à la manœuvre de la conclusion de cet accord, par l'entremise notamment du ministre de l'Économie et des Finances Bruno Le Maire, qui a permis de réaffirmer la volonté française de faire de l'Europe une puissance spatiale au XXIe siècle.

La signature de cet accord est une victoire pour la diplomatie française. Elle intervient dans un contexte difficile, du fait des retards d'Ariane 6, des difficultés du lanceur Vega, de la guerre en Ukraine qui a bloqué de nombreux Soyouz tirés depuis Kourou, ou encore de la concurrence américaine.

Cet accord est historique : la France, l'Allemagne et l'Italie ont confirmé leur détermination à garantir l'accès autonome de l'Europe à l'espace, tandis que le financement d'Ariane 6 au-delà de 2026 est assuré et que quatre lancements institutionnels additionnels d'Ariane 6 sont prévus chaque année. En outre, une compétition sera lancée pour développer de nouveaux lanceurs innovants et compétitifs. À l'initiative de la France, les États européens se sont donc mis d'accord pour garantir le futur de l'Europe de l'espace, ce dont nous pouvons être fiers.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce qui s'est passé à Séville est fondamental, comme le souligne Charles Sitzenstuhl. Mais l'accord n'est pas seulement tripartite, puisque des négociations ont été conclues entre les 22 États membres de l'ESA. Il est important de souligner la pérennité de notre accès à l'espace par Ariane 6, bien que nous pourrions également déplorer les conséquences de l'ouverture à la compétition d'un domaine qui n'y était pas soumis auparavant. Il va désormais falloir travailler différemment au sein de l'ESA et de l'Agence pour le Programme Spatial européen (EUSPA). Nous passons en effet d'une coopération à un système de compétition.

Il faut saluer l'avancée mentionnée par David Amiel en matière de vaisseaux cargos spatiaux, permise par les financements de l'ESA. La France et l'Allemagne sont à la pointe de cette technologie, et il s'agit pour l'Europe d'un pas en avant vers le vol habité.

Je m'adresserai ensuite à Joëlle Mélin. Vous insistez pour encourager l'innovation et la coopération. Je voudrais vous rappeler que la France et la Commission européenne insistent pour renforcer la rigueur du filtrage des investissements directs à l'étranger (IDE) dans l'Union. À ce titre, le règlement 2019/452 du 19 mars 2019 établit un cadre et crée un système complétant les efforts nationaux de filtrage des IDE pour examiner les risques découlant des projets d'investissement ciblant des secteurs stratégiques ou impliquant des investisseurs contrôlés par le gouvernement d'un pays tiers. La décision de filtrage revient in fine à l'État membre. En France, à partir de 2018, plusieurs décrets ont allongé la liste des secteurs d'activité soumis à un contrôle des investissements. La loi dite « Pacte » a renforcé les pouvoirs d'injonction et de sanction du Gouvernement en la matière. Enfin, depuis 2020, le seuil de déclenchement de contrôle des investissements étrangers en France provenant de pays hors de l'Union a abaissé de 25 % à 10 % les droits de vote.

Pour répondre à Bastien Lachaud, France 2030 n'est pas l'alpha et l'oméga du développement spatial, mais une politique publique mise en œuvre pour que l'industrie et la recherche française puissent bénéficier d'un financement propre. À ce titre, nous avons fait un pas de côté par rapport à l'ESA en prenant la décision d'investir pour le tissu industriel et la recherche français. Il faut cependant rappeler que la France fait toujours partie des premiers contributeurs des programmes de l'ESA. Enfin, la commande publique est effectivement incontournable dans le domaine du spatial. Les usages commerciaux dépendent d'une économie de marché qui doit être pilotée à une échelle supranationale.

La proposition de résolution européenne se concentre sur les aspects économiques, sous l'angle du marché intérieur, étant entendu que les enjeux de défense relèvent de la souveraineté des États membres.

Le débat sur l'espace ne se limite certes pas aux affaires économiques, et inclut les domaines militaire et de la recherche. J'utilise souvent l'image du tripode pour qualifier la politique spatiale, qui devient un quadrupède puisque la dimension de la diplomatie spatiale est désormais un pilier incontournable.

Pour répondre à Nicole Le Peih, la Commission européenne souhaite effectivement présenter un texte au cours de l'année 2024. Je vous soumets cette PPRE, qui vise à porter la parole de la France et à souligner que nous ne pouvons pas continuer à attendre une législation. La présidence belge du Conseil de l'Union, au premier semestre 2024, devrait être l'occasion d'avancer de manière substantielle sur ce dossier. La Belgique est un pays moteur dans le domaine spatial, ce qui peut nous laisser espérer une réponse législative européenne.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous propose que nous en venions à l'examen des amendements.

Amendements n° 2 et 3 de Bastien Lachaud (discussion commune)

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'amendement n°2 vise à intégrer la référence au Traité de 1967 sur l'espace à la liste des textes visés par la PPRE. L'amendement n°3 a pour but d'ajouter aux visas la référence à l'accord régissant les activités des États sur la Lune et les autres corps célestes, dit Traité sur la Lune. Nous estimons que la France devrait aujourd'hui ratifier ce traité.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le Traité de l'espace, bien qu'il ne mentionne pas d'obligation relative à la fin de vie des objets spatiaux, constitue le principal instrument du droit spatial international, signé et utilisé par la quasi-totalité des membres de l'ONU. Il peut être pertinent de le mentionner dans les visas, puisque nous demandons ensuite à l'Union de reconnaître les droits et obligations découlant de trois des traités d'application découlant du Traité de l'espace (à savoir l'Accord sur le sauvetage des spationautes de 1968, la Convention sur la responsabilité internationale pour les dommages causés par des objets spatiaux de 1972, la Convention sur l'immatriculation des objets lancés dans l'espace de 1975).

Concernant l'amendement n° 3, l'accord régissant les activités des États sur la Lune et les autres corps célestes est un prolongement du Traité de 1967. En ce sens, il ne m'apparaît pas nécessaire de venir ajouter cet accord à la liste des visas. Je propose donc de rester uniquement sur l'ajout du Traité de 1967 qui a une portée symbolique importante, et qui couvre l'accord de 1979.

Avis favorable sur l'amendement n° 2 et demande de retrait ou avis défavorable sur l'amendement n° 3.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci pour votre réponse, Madame la rapporteure. Je pense, concernant l'amendement n° 3, que notre désaccord est plus profond que celui que vous avez abordé, qui a trait à la question de l'exploitation des ressources extra-atmosphériques. Si l'on considère, en référence au Traité de 1967, que l'espace est un bien commun, il est difficile de refuser de ratifier le Traité sur la Lune, qui rappelle l'interdiction pour tout État de s'approprier les ressources extra-atmosphériques. Or, on voit bien dans la proposition de résolution dont nous débattons aujourd'hui que la question de l'appropriation des ressources extra-atmosphériques est un vrai sujet. La législation luxembourgeoise l'autorise. Les États-Unis ont avancé sur ce point avec les accords Artemis. La Chine également. C'est donc un choix philosophique qui se présente à nous. Considérons-nous que l'espace extra-atmosphérique est, comme les pôles, res nullius ou bien qu'il est exploitable ? Il me semble que nous avons ici une véritable divergence de vues.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Permettez-moi de répondre sur le fond à la question des Accords Artemis sur laquelle nous aurons, je pense, l'occasion de revenir plus en détail. Ces accords viennent justement compléter et préciser le Traité de 1967. C'est parce que l'Union européenne et les pays européens ne se sont pas saisis de cette question que nous avons laissé les États-Unis proposer une première version qui, toutefois, est en réalité très éloignée de l'image que vous lui donnez dans cet amendement. Ces accords affirment que les activités de coopération doivent être réalisées exclusivement à des fins pacifiques et conformes au droit international applicable. Ils confirment un engagement à la transparence et au partage des informations scientifiques. Ces accords appellent également à un engagement à déployer tous les efforts raisonnables pour apporter l'assistance nécessaire au personnel en détresse dans l'espace extra-atmosphérique. Enfin, les signataires s'engagent à respecter le principe du libre accès à toutes les zones des corps célestes par des tiers et toutes les autres dispositions du Traité sur l'espace extra-atmosphérique. Il n'est donc pas question d'autoriser l'exploitation dérégulée des ressources extra-atmosphériques.

L'amendement n° 2 est adopté.

L'amendement n° 3 est rejeté.

Amendement n° 4 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il s'agit par cet amendement de rappeler le rôle historique et essentiel joué par la France dans la mise en place d'une politique spatiale européenne. En effet, sans notre maîtrise de certaines technologies de production des lanceurs et d'exploitation de satellite, l'Europe spatiale n'existerait pas aujourd'hui.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'un des objectifs de cette proposition de résolution, mais aussi l'un de mes engagements personnels, est de promouvoir une plus grande coopération entre les pays européens. Si la France joue historiquement un rôle majeur et moteur dans la construction spatiale européenne, nous sommes aujourd'hui collectivement engagés pour des objectifs et des valeurs communes. Aussi, il ne m'apparaît pas nécessaire d'ajouter cet alinéa qui, je crois, ne ferait que renforcer les tensions qui ont pu émerger entre nos pays.

Par ailleurs, si la France joue un rôle moteur dans la politique spatiale européenne, nous ne pouvons négliger le rôle important, particulièrement de l'Allemagne, de l'Espagne et de l'Italie, dont la maîtrise des technologies de production des lanceurs et d'exploitation de satellite n'est plus à démontrer. Ajouter cette mention aurait pour effet d'attiser les tensions entre les États membres de l'Union européenne. Les projets spatiaux déployés à l'échelle de l'Europe sont le fruit de la coopération entre plusieurs pays, soyons en fier et ne cédons pas aux replis nationaux.

Avis défavorable.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je partage l'avis de Madame la rapporteure. Cet ajout n'est pas nécessaire. De plus, ce rappel historique nous amènerait à évoquer l'apport majeur des scientifiques allemands. Or, je ne suis pas certain qu'il soit opportun d'aborder cette période de l'histoire.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cher collègue, sachez que le premier modèle de fusée exposé dans les locaux de l'Agence spatiale allemande est une fusée V2. Il me semble donc que nos partenaires allemands ont un regard lucide sur cette part de leur histoire. Nous pensons que rappeler le poids historique important de la France permet de remettre la mairie au milieu du village. Il s'agit de rappeler que nous sommes une nation qui compte, et que nos partenaires européens feraient mieux de coopérer plutôt que de se livrer à une vaine compétition.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

. Nous soutiendrons cet amendement. Faire référence à l'épopée spatiale ne revient pas à chanter cocorico, mais à promouvoir une saine émulation au niveau européen. Gardons de l'histoire française ce qu'elle a de valorisant.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite rappeler le contexte de notre discussion. Les évènements historiques auxquels vous faites référence pourraient être abordés lors de notre débat en séance publique ou de la campagne des élections européennes. Néanmoins il me semble important en commission de rester concentrés sur l'objet de cette proposition de résolution. Je rejoins l'avis de la rapporteure.

L'amendement n° 4 est rejeté.

Amendement n° 5 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à intégrer à la liste des considérants le rôle de l'Agence spatiale européenne en tant que modèle de la coopération internationale dans le domaine spatial depuis sa création en 1975. L'ESA n'est quasiment pas mentionnée dans cette résolution, ce qui nous paraît regrettable au regard de son rôle.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ESA est une organisation intergouvernementale entièrement indépendante, qui entretient des relations étroites avec l'Union européenne, en vertu d'un accord-cadre conclu entre les deux organisations. Or, cette proposition de résolution européenne, adressée à la Commission européenne, porte sur une législation qui relève uniquement de l'Union européenne. L'ESA n'ayant aucune compétence politique, il n'apparaît pas nécessaire d'ajouter un tel alinéa, même si je partage sur le fond votre avis, ce que j'ai eu l'occasion de rappeler au directeur de l'ESA, M. Josef Aschbacher.

Avis défavorable ou demande de retrait.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci pour votre accord sur le fond. Toutefois, je ne partage pas votre avis sur la forme, car la Commission a tendance à construire ses programmes davantage en compétition qu'en coopération avec l'ESA. Rappeler l'attachement de l'Assemblée nationale à l'ESA est également un message à destination des institutions européennes. L'objectif est de dire que nous pouvons avancer dans un programme spatial européen, tout en réitérant notre attachement à l'ESA.

Il s'agit d'un acte politique : nous rédigeons ensemble une PPRE à destination des institutions européennes. Quel message la France veut-elle adresser ? Quelle importance accordons-nous à l'ESA ? Ne pas mentionner une seule fois l'ESA serait une erreur stratégique, précisément parce que nous nous adressons à l'Union européenne !

L'amendement n° 5 est adopté.

Amendement n° 17 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'espace ne peut pas être considéré comme un énième secteur marchand. La rentabilité du secteur spatial, qui n'est de toute façon pas souhaitable, n'existe pas en l'état. Pour éviter que des logiques mercantiles ne prospèrent, seuls des acteurs étatiques disposant de capacités d'investissement solides sont à même de répondre aux enjeux spatiaux, de recherche fondamentale et sont capables de gagner le combat du siècle : la lutte contre le réchauffement climatique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par définition, l'espace n'est pas un secteur comme les autres pour les deux raisons que vous rappelez. Effectivement, l'espace est régi par des Traités, notamment celui de 1967 que nous avons ajouté au visa et qui affirme des spécificités uniques au même titre que l'Antarctique ou la Haute mer. Dans ce secteur, la puissance publique joue un rôle fondamental, en finançant en grande partie les grands programmes et en fixant les caps. Sans les acteurs publics, nombre de projets n'auraient pu voir le jour.

Toutefois, il ne faut pas négliger le secteur privé ni l'opposer au public. Particulièrement en France, nous nous appuyons historiquement sur des acteurs industriels privés pour développer et financer une partie de nos programmes.

Le spatial est aujourd'hui en grande partie non profitable. Cependant, certains champs tels que les télécommunications et bientôt le secteur de la donnée sont rentables et sont assurés par des acteurs privés que ce soit pour la construction des satellites ou leur exploitation. C'est en partie en dégageant des profits que nos acteurs privés peuvent prendre des risques technologiques et financiers pour répondre à des programmes souverains. Prenons l'exemple d'Iris², la future constellation souveraine européenne. Elle est le fruit d'un partenariat puissant entre nos industriels qui en financent la moitié, la Commission européenne et l'ESA. Ainsi, si nous partageons sans doute cette volonté de préserver la spécificité de l'espace, cette rédaction me semble assez éloignée de l'enjeu de cette proposition de résolution. Avis défavorable.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'entends votre réponse. Toutefois, si nous nous confrontons à la réalité, les taux d'exécution des programmes du plan France 2030 se situent généralement entre 25 et 30 %. Concernant la question spatiale, les taux d'exécution oscillent entre 9 et 12 %. Comment expliquer cet écart ? Le ministère de l'Économie et des Finances exige des co-engagements publics et privés, impossibles à réaliser dans le domaine spatial. En effet, le domaine spatial exige un investissement élevé avec des taux de rendement très faibles, s'il y a rentabilité. Le modèle économique appliqué au spatial ne fonctionne pas ! Cette analyse n'est pas mienne, elle se trouve dans le rapport relatif à l'exécution du programme France 2030. Le risque encouru étant de perdre ces crédits non engagés ! Les domaines de la défense et de la recherche sont des moteurs du développement du spatial, alors que les services économiques ne sont qu'un aspect subsidiaire. C'est pourquoi le modèle concurrentiel classique ne fonctionnera pas. Ne pas en tenir compte, c'est courir au désastre !

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette proposition d'amendement mêle des sujets différents. L'espace ne doit naturellement pas être abandonné à la prédation d'acteurs privés. Que le modèle de développement spatial implique une coopération forte entre les acteurs des sphères publique et privée, nous en sommes également d'accord. Toutefois, adopter cet amendement reviendrait à négliger la part industrielle de l'aventure spatiale. Or, en réponse au défi du New Space américain, nous avons besoin d'une politique industrielle à la hauteur, et de mobiliser la capacité d'innovation des acteurs privés au service de l'intérêt général. Là se trouve la démarche de France 2030. À cet égard, il serait un peu naïf de fermer les yeux sur cette dimension !

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En réponse à Bastien Lachaud, sur cette question très économique, dont la place ne se trouve pas dans cette PPRE, je vous invite à écouter, la semaine prochaine en commission des Affaires économiques, les conclusions de mon rapport sur l'avenir de l'industrie spatiale européenne.

L'amendement n° 17 est rejeté.

Amendement n° 22 de Joëlle Mélin.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'angélisme libéral n'a pas sa place dans la bataille pour l'espace. Dans les secteurs stratégiques et critiques, le principe de la concurrence est bien souvent le cheval de Troie d'entreprises concurrentes qui mènent des opérations de guerre économique. Si je voudrais bien être rassurée par vos propos, Madame la rapporteure, je rappelle que le projet Gaia-X, présenté comme une merveille européenne, a été critiqué lorsqu'il a attiré l'intérêt d'investisseurs chinois ou d'entreprises liées à la Central Intelligence Agency (CIA). En outre, SpaceX aurait été approchée pour lancer de nouveaux véhicules spatiaux. La concurrence et les rapports entre l'Union européenne et les États-Unis ne doivent pas conduire à une perte de notre savoir-faire, notamment technologique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Votre amendement est tellement de bon sens qu'il se trouve satisfait, ainsi que je vous l'ai rappelé dans mes propos liminaires. Aujourd'hui, nous subissons une crise des lanceurs. Pour que certains de nos satellites, à l'instar de ceux de Galileo, puissent être mis en orbite dans les délais, nous devrons recourir à un lanceur Falcon. Il y a donc là également un enjeu de souveraineté. Le nouveau programme de vaisseau-cargo prévu en 2024, pour respecter les délais induits par cette course contre la montre, dépendra aussi probablement de lanceurs américains. Aucun risque de pillage technologique n'est toutefois à craindre du fait d'accords bilatéraux et commerciaux protecteurs pour nos technologies. Réciproquement, les Américains nous ont fait confiance pour le lancement du télescope James Webb avec une fusée Ariane.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si je comprends bien, Joëlle Mélin, votre inquiétude relative aux lanceurs américains, votre question devrait être complétée puisque nous avons également eu recours par le passé à des lanceurs russes Soyouz. Ensuite, je partage l'avis de la rapporteure concernant l'absence de risques de pillage technologique, les lanceurs n'étant pas liés à la technologie embarquée.

L'amendement n° 22 est rejeté.

Amendement n° 6 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à préciser que l'Union européenne devra imposer à la fois le même niveau d'exigence, mais aussi les mêmes contraintes, aux acteurs issus des pays tiers qu'aux acteurs européens en matière de fourniture de services pour l'Union. Il faudra notamment vérifier que le cycle de vie des objets spatiaux ainsi que l'objectif de désorbitation seront vraiment contraignants.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La mention « même niveau d'exigence » fait écho au paragraphe précédent appelant à adopter des règles communes exigeantes impliquant de facto les « mêmes contraintes » pour tous les acteurs. Aussi, les travaux menés par les organes de l'Union n'étant pas encore tranché, il me semble préférable de laisser le texte final décider des règles à adopter bien qu'il ressorte des dernières consultations un double paquet de mesures contraignantes et incitatives.

Avis de sagesse

L'amendement n° 6 est rejeté.

Amendement n° 19 de Constance le Grip

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement, présenté au nom du groupe Renaissance, appelle à développer et à étoffer la base de données de surveillance de l'espace et de suivi des objets en orbite de l'Union (EU SST). La surveillance de l'espace est un outil majeur de la souveraineté française et européenne. La capacité d'identifier, de répertorier et de suivre les objets spatiaux est indispensable pour assurer la sécurité de nos infrastructures spatiales. Or, force est de constater que les capacités SST de l'Union européenne restent largement inférieures à celles des États-Unis et largement insuffisantes pour garantir une véritable autonomie stratégique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Étoffer la base de données d'EU SST constitue un objectif prioritaire, comme l'a relevé le représentant de la direction générale de l'industrie de la défense et de l'espace (DEFIS) de la Commission européenne auditionné dans le cadre du rapport associé à la PPRE.

La résolution adoptée par le Parlement européen le 6 octobre 2022 soulignait également le caractère prioritaire de cet objectif, afin de renforcer l'autonomie stratégique de l'Union et réduire la dépendance au catalogue américain. Avis favorable.

L'amendement n° 19 est adopté.

Amendement n° 7 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à lister un certain nombre de mesures concrètes de régulation permettant d'avancer vers la protection des orbites et la préservation d'un accès souverain à l'espace.

Nous proposons ainsi que soient précisées l'obligation de désorbitation et de destruction des satellites, la gestion des fenêtres de lancement et du trafic extra-atmosphérique ainsi que la rationalisation du lancement de vecteurs spatiaux.

Cette proposition de résolution ne peut simplement faire l'objet de propos déclaratoires sans objectif politique. Elle doit placer le curseur d'une position française dans le cadre de négociations pour la régulation du trafic dans l'espace extra-atmosphérique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement apporte certes des précisions intéressantes, Mais il a, à mon sens, deux défauts principaux.

Tout d'abord, il est trop prescriptif, ce qui peut donner l'impression qu'il dresse une liste limitative. La recherche sur la limitation et la réduction des débris recèle de technologies innovantes, qui ne s'accommodent guère d'une approche prescriptive. C'est pourquoi, dans le cadre des auditions pour ce rapport, l'ESA recommandait d'identifier de grands objectifs plutôt que des solutions précises dans le cadre de notre résolution. Au demeurant, le Parlement européen a lui-même dressé une liste bien plus complète de technologies, à laquelle nous faisons indirectement référence au travers des visas de cette PPRE.

Ensuite, cette insertion risque de porter à confusion à deux titres. Premièrement, la formule « appelle » est moins forte que la proposition initiale « plaide ». Deuxièmement, la notion de « destruction » des satellites que vous préconisez semble inappropriée puisqu'elle générerait elle-même de nombreux débris. Peut-être aurait-il fallu lui préférer la notion de désintégration ?

Avis défavorable ou demande de retrait.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour revenir sur le rejet de l'amendement n°6, qui visait à ajouter la mention des « mêmes contraintes » pour tous les acteurs, il est dommage que la commission n'ait pas souhaité insister sur la nécessaire contrainte associée à la future législation européenne. L'amendement n°7 visait ensuite à présenter de manière plus détaillée les attentes en la matière, afin de renforcer l'efficacité de l'approche. J'entends toutefois les remarques de Madame la rapporteure. Nous pourrions envisager de retirer l'amendement n°7 afin de le retravailler, et le présenter à nouveau en séance en tenant compte des retours de la rapporteure.

L'amendement n° 7 est retiré.

Amendements n° 8 et 1 de Bastien Lachaud (discussion commune)

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce sont des amendements rédactionnels. Le traité sur l'Union européenne ne prévoit en aucun cas le mot « loi ». C'est bien le terme de « règlement » qui devrait être privilégié, afin d'apporter davantage de précision dans l'utilisation des termes. La notion de « loi européenne » n'existe pas dans les traités, contrairement au « règlement européen ».

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Même si la future législation européenne pourrait effectivement prendre la forme d'un règlement, ce qui est pressenti, la Commission n'a pas encore définitivement tranché sur le choix de l'instrument juridique. Notre interlocuteur de la Direction DEFIS de la Commission européenne l'a confirmé lors des auditions dans le cadre de ce rapport. Toutes les options doivent donc être étudiées pourvu qu'elles répondent à l'objectif d'une meilleure gestion du trafic spatial et d'une réduction du nombre de débris.

Par ailleurs, cette formulation plus large de « loi » est utilisée par les organes de l'Union européenne dans différents travaux et me semble à ce jour la plus adaptée. L'avis est donc défavorable pour ces deux amendements.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans les traités, l'expression de « loi européenne » n'apparaît effectivement pas. Je pense néanmoins qu'il est prématuré de s'avancer sur la nature du futur instrument législatif. Nous ne savons pas encore si l'acte législatif à venir prendra la forme d'un règlement ou d'une directive, ni même si l'exécutif européen choisira un autre type d'instrument. Nous n'avons pas à ce stade à nous prononcer sur ce sujet, qui n'est pas de notre ressort. Vous auriez pu proposer une appellation comme « acte législatif européen », mais la qualification de « règlement » me semble prématurée. Nous ne sommes donc pas favorables à cet amendement.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'entends les remarques qui viennent d'être formulées. Pour revenir sur l'article 288 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), ce dernier ne comprend en effet pas le mot « loi ». Mais la résolution que nous étudions aujourd'hui demande un acte de portée générale, obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tous les États membres. Or, le seul acte législatif européen répondant à tous ces critères est le règlement. Je pense que le règlement est donc l'outil législatif que nous voulons demander. Si la Commission décide in fine d'utiliser un autre instrument législatif, cela sera de sa responsabilité. Mais il nous revient de plaider pour l'adoption d'un règlement.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je propose d'utiliser plutôt le terme plus générique de « réglementation ». Certes, la « loi spatiale européenne » peut exister, mais comme nous n'avons pas encore défini l'instrument juridique, je pense que le terme de « réglementation » conviendrait mieux.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Au regard de nos débats, je vous propose un retrait de cet amendement. Cela nous permettrait, d'ici à l'examen de la PPRE en séance plénière, de disposer de davantage d'éléments pour que nous nous retrouvions sur une terminologie qui conviendrait à tous.

Les amendements n° 1 et 8 sont retirés.

Amendement n° 9 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous en venons aux accords Artémis, mais plus largement aussi aux législations d'États qui autorisent l'exploitation des ressources. J'ajouterais à ce qui a été dit par la rapporteure que les accords Artémis sont arrivés a posteriori de l'adoption du Space Act par les États-Unis, qui permet justement l'appropriation des ressources. En quelque sorte, un pied a donc été mis dans la porte. Le fait pour la France d'avoir ratifié, sans aucun débat au Parlement, les accords Artémis, laisse entendre que nous entrons dans cette logique d'exploitation des ressources.

Cet alinéa vise les accords Artémis, mais aussi la législation luxembourgeoise qui posent un problème si l'on considère en effet que l'espace est un bien commun.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'avis est défavorable pour deux raisons.

Sur la forme, la PPRE est adressée aux institutions européennes, et il n'apparaît pas approprié d'interpeller ici directement le Gouvernement français, et encore moins d'« exiger » du gouvernement luxembourgeois qu'il prenne une orientation politique plutôt qu'une autre. Tout comme moi, vous êtes attaché à la souveraineté des pays et aux bonnes relations diplomatiques que la France peut entretenir. Pourtant, cet amendement y contreviendrait.

Sur le fond, il est important de rappeler la différence entre propriété et exploitation des ressources spatiales. L'article 11 du Traité sur la Lune rappelle que les ressources spatiales ne peuvent devenir la propriété d'États, mais prévoit aussi que « les États parties s'engagent à établir un régime international régissant l'exploitation des ressources naturelles de la Lune lorsque cette exploitation sera sur le point de devenir possible », en vue d'assurer leur gestion rationnelle et de ménager une répartition équitable entre tous les États parties des avantages en résultant.

C'est à ce titre que 24 pays, dont la France, ont signé les accords Artémis, dont l'objectif est de ramener les humains sur la Lune et de préparer les futures missions d'exploration spatiale, y compris vers Mars. En conséquence, les accords prévoient la mise en œuvre opérationnelle d'importantes obligations contenues dans le Traité sur l'espace extra-atmosphérique et d'autres instruments. De plus, ils constituent un engagement politique plutôt qu'une obligation juridique et établissent des bonnes pratiques et des principes en vue du retour sur la Lune et du développement de nouvelles activités spatiales.

Les accords Artémis évitent toute référence aux notions d'« appropriation » ou de « possession » des ressources spatiales et se veulent compatibles avec le Traité de l'Espace de 1967, contrairement au Space Act. Par ailleurs, les signataires s'engagent expressément à respecter le principe du libre accès à toutes les zones des corps célestes par des tiers et toutes les autres dispositions du Traité sur l'espace extra-atmosphérique.

Pour résumer, il faut bien distinguer l'appropriation d'un corps céleste, qui est interdite par les Traité à l'exploitation de ressources sur un corps céleste sans appropriation du sol. Les Accords Artémis respectent en ce sens les traités internationaux.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes d'accord Madame la rapporteure. Il n'y a pas que la question de l'appropriation, mais également celle de l'exploitation. C'était bien notre volonté que d'interdire l'exploitation des ressources en l'état. Vous ne nous avez pas répondu sur la législation du Luxembourg, qui est similaire à celle du Space Act, et qui pose problème puisque le Luxembourg est membre de l'Union européenne. À ce titre, le Luxembourg est en train de se constituer une législation au sein de l'Union européenne qui pourrait permettre des détournements y compris d'une législation qui viserait à interdire l'appropriation des corps célestes. Il y a donc là une volonté de créer un droit spécifique extracommunautaire qui pose problème. Nous maintiendrons donc notre amendement. S'il n'est pas adopté, nous en ferons deux séparés pour la séance, ce qui vous permettra de donner un avis favorable pour demander l'abrogation des lois luxembourgeoise sur l'appropriation et l'exploitation des corps célestes.

L'amendement n° 9 est rejeté.

Amendement n° 20 de Constance Le Grip

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement, dans la continuité du précédent amendement appelant à étoffer la base de données de l'Union européenne en matière de SST, rappelle la nécessité de développer des systèmes capacitaires permettant à l'Union de compléter son catalogue, sans remettre en cause les prérogatives de défense nationale.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La préservation de la nature civile de la politique spatiale européenne est en effet primordiale pour la France ainsi que pour d'autres États, tels que la Belgique et l'Allemagne. Mon avis est favorable.

L'amendement n°20 est adopté.

Amendement n° 26 de Constance Le Grip

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite rappeler les deux priorités affirmées par le Conseil de l'Union dans ses conclusions du 14 novembre 2023, visant à continuer à œuvrer à l'établissement de normes, de règles et de principes de comportements responsables et à intensifier l'utilisation de l'espace à des fins de sécurité et de défense.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je pense que cet amendement est satisfait puisque le texte fait déjà référence à la stratégie spatiale de l'Union européenne pour la sécurité et la défense, qui appelle à préserver les prérogatives nationales en matière de défense. Le risque est néanmoins, en consacrant plusieurs alinéas à ce thème que la résolution s'éloigne du cœur de notre démarche, qui est la régulation des aspects civils et commerciaux. Je demande donc le retrait.

L'amendement n° 26 est retiré.

Amendement n° 25 de Constance Le Grip

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite ici insister, dans la lignée des conclusions du Conseil de l'Union du 14 novembre 2023, sur ce qui nous inspire tous, à savoir la nécessité d'une coopération et d'une collaboration en matière spatiale, y compris grâce à l'instauration d'éventuels nouveaux dialogues sur la sécurité spatiale.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je pense que cet amendement est satisfait et je suggère donc son retrait pour les mêmes raisons que l'amendement précédent.

L'amendement n° 25 est retiré.

Amendement n° 24 de Joëlle Mélin

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par cet amendement, nous souhaitons insister sur le leadership de la France en matière de formation des professionnels du secteur que nous devons conserver.

Notre industrie peut se targuer d'avoir à disposition une filière éducative qui forme un vivier d'ingénieurs de niveau mondial spécialisés dans l'industrie lourde et l'aéronautique avec notamment l'ISAE-Supaéro, qui attire aujourd'hui des talents du monde entier, qui nous viennent aussi des États-Unis et d'Asie, à l'heure où la filière aérospatiale ouvre entre 10 000 et 15 000 postes.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'objet de la PPRE est bien de prôner une coopération étroite entre Européens plutôt que de rappeler l'avance de la France en matière spatiale.

Vous faites bien de rappeler l'importance de la formation, mais je m'étonne de ce que vous souhaitiez inscrire ce sujet dans un texte européen. Si nous avons noté un changement de paradigme de la part de votre parti en matière européenne, je rappelle que la question de la formation relève des États membres, et je doute que votre objectif soit d'élargir les compétences de l'Union.

Permettez-moi enfin de vous faire un retour du terrain, après avoir rencontré une bonne partie des entreprises spatiales françaises. Malgré l'excellence de notre formation, nous manquons aujourd'hui de main-d'œuvre, y compris en ce qui concerne les métiers hautement qualifiés. Les entreprises du secteur ont besoin des talents du monde entier et, contrairement aux préjugés véhiculés par certains, ces compétences se trouvent aussi dans les pays dits du Sud, mais les difficultés administratives pénalisent fortement nos entreprises. Mon avis est défavorable.

L'amendement n° 24 est rejeté.

Amendement n° 23 de Joëlle Mélin

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est nécessaire de rappeler que la multipolarité du monde et les nouveaux rapports de force à l'œuvre sur l'échiquier mondial doivent être pris en compte et servir de préalable si l'Union européenne -avec pragmatisme- veut tendre vers la réussite de son « programme spatial ».

Il est clair que le dialogue respectueux et la coopération internationale sont primordiaux.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le spatial est certainement un outil de diplomatie internationale et a été utilisé en vue de démonstrations de force. Il est devenu depuis le symbole d'un autre monde dans lequel Américains, Japonais, Russes et Européens ont cohabité malgré les tensions sur terre.

La Russie, dont vous semblez être devenus les porte-paroles, a cependant fait un choix différent et unilatéral, que ce soit sur terre ou dans l'espace. En novembre 2021, le tir du missile anti-satellite russe a détruit le satellite Cosmos, créant 1 562 débris, soit le troisième événement ayant généré le plus de débris spatiaux à ce jour. Le 26 juillet 2022, cinq mois après avoir envahi le territoire ukrainien et déclaré une guerre unilatérale qui n'en porte pas le nom, l'agence Tass russe a annoncé le retrait de la Russie de la Station spatiale internationale (ISS), mettant un terme à toute coopération.

La France, particulièrement par le biais de son agence spatiale, le CNES, a toujours cherché à maintenir des relations diplomatiques, technologiques et scientifiques avec l'ensemble des puissances spatiales. Jusqu'à l'invasion de l'Ukraine, la France et la Russie entretenaient un partenariat profond, avec notamment le décollage du lanceur Soyouz depuis la Guyane, et le CNES continuer de nouer des partenariats forts avec les pays que vous avez cités.

Je pense donc que votre amendement est satisfait. J'en demande le retrait, à défaut, j'émets un avis défavorable.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est difficile de ne pas réagir. Lorsque nous discutons des amendements, nous pouvons faire preuve de courtoisie et ne pas prêter à d'autres des positions qui ne sont pas les leurs.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous ne pouvons pas soutenir cet amendement, car nous considérons que les accords spatiaux doivent être prioritairement des accords de coopération nationale et que ce n'est pas à l'Union européenne de mener une diplomatie en matière spatiale. Nous parlons d'accords bilatéraux entre le CNES et d'autres Nations, et le CNES est de ce point de vue l'une des agences ayant conclu le plus d'accords de ce type, tandis que les Français sont les premiers à avoir accédé aux sites de lancement chinois, ce qui est une fierté pour notre pays. Les partenariats doivent aussi être négociés par le biais de l'ESA, avec les agences partenaires. Ce n'est pas à l'Union européenne de mener cette diplomatie spatiale.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes très réservés, pour ne pas dire franchement hostiles, sur la notion d'équidistance, qui nous semble tout à la fois vague, contraire à nos intérêts et incompatible avec nos alliances.

L'amendement n° 23 est rejeté.

Amendement n° 10 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par cet amendement, les députés du groupe LFI-NUPES proposent que soit fait mention de l'agence spatiale européenne comme principal espace de coopération entre partenaires européens dans la consolidation de l'avance technologique de l'UE dans le domaine spatial.

Le modèle intergouvernemental et planificateur développé par l'ESA et les puissances européennes a toujours fait ses preuves. Il a permis à l'Europe de développer une politique spatiale à moindre coût et s'imposer comme un acteur à part entière. Depuis plusieurs années, le manque de volonté politique a affaibli ce modèle, notamment sur la question du programme Ariane.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement est satisfait, du fait de l'adoption de l'amendement précédent. J'émets un avis défavorable.

L'amendement n° 10 est rejeté.

Amendement n° 21 de Joëlle Mélin

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement est identique à l'amendement n° 5, précédemment adopté.

Nous soulignons aussi que la concurrence institutionnelle entre l'historique Agence Spatiale Européenne (ESA) et la plus récente Agence pour le Programme Spatial Européen (EUSPA), à qui la Commission européenne confie une part croissante des tâches de commercialisation du spatial, dévitalise en partie l'ESA.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne pense pas que cet amendement relève du même champ que l'amendement n° 5. Après avoir discuté avec le directeur de l'ESA et celui de l'EUSPA, je souhaite vous rassurer sur l'absence de conflit entre les deux agences, pour la simple raison qu'elles n'ont ni les mêmes tâches, ni les mêmes fonctions, ni les mêmes objectifs.

L'Union définit sa politique spatiale et ses objectifs, l'ESA développe et met en œuvre le programme spatial européen, et l'EUSPA gère son exploitation commerciale et la liaison avec les États membres. L'avis est défavorable.

L'amendement n° 21 est rejeté.

Amendement n° 13 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par cet amendement, les députés du groupe LFI-NUPES proposent que la représentation nationale réaffirme l'attachement de la France au programme Ariane et à son rôle moteur dans le développement de la coopération européenne et internationale en matière spatiale.

La France est aujourd'hui la seule puissance de l'ESA et de l'Union à posséder une filière industrielle de fabrication mais aussi de mise en orbite de lanceurs lourds. Elle a su démontrer son excellence depuis plus de 60 ans de manière souveraine et autonome, de même qu'elle est aujourd'hui la seule puissance à garantir un accès indépendant à l'espace aux États de l'ESA et de l'Union. Aujourd'hui encore, la France met à profit son savoir-faire et son expertise au service de la coopération à travers sa participation à différentes missions de recherche spatiale ou encore sa mise à disposition du pas de tir de Kourou en Guyane

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'attachement de la France au programme Ariane est intact, comme l'ont démontré les négociations dans le cadre du sommet de Séville de novembre 2023. Toutes les institutions françaises, notamment le Gouvernement et le CNES, sont de fervents défenseurs d'Ariane 6. Cette PPRE n'est toutefois pas le lieu adéquat pour le rappeler. Avis défavorable.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je pense que c'est un signal à envoyer. Le Parlement ne s'est pas prononcé sur le programme Ariane depuis longtemps. Nous avons là un vecteur pour le faire.

Pour revenir sur le sommet de Séville, il y a en effet eu un accord pour financer Ariane 6, tout le monde y contribuant, mais la France plus que les autres, pendant que nos partenaires investissent dans les micro-lanceurs qui lui font concurrence.

Mais la contrepartie du financement d'Ariane 6 est qu'Ariane 7 sera soumise à concurrence. En d'autres termes, nous avons donc acté à Séville que le futur lanceur européen ne serait peut-être pas une Ariane. Il ne serait donc pas neutre que nous réaffirmions l'attachement à Ariane du Parlement français et que nous envoyions ainsi un signal à nos partenaires, ou peut-être devrais-je hélas dire à nos concurrents.

L'amendement n° 13 est rejeté.

Amendement n° 12 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je constate par le vote précédent que la commission ne souhaite pas réaffirmer explicitement son attachement au programme Ariane, et je m'en étonne.

Par cet amendement de repli, il s'agit donc d'appeler les États membres de l'ESA à préparer la succession du programme Ariane 6 dans le domaine des lanceurs lourds et de rappeler que la série des lanceurs Ariane a permis à l'Europe d'être là où elle en est aujourd'hui dans le domaine spatial, et qu'il n'y a aucune raison de se lancer dans un programme concurrent d'Ariane 7, à moins de vouloir détruire la filière aérospatiale française. C'est peut-être le but des Allemands, cela ne peut pas être celui de notre Parlement.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je maintiens que cette PPRE n'est pas le vecteur approprié pour inscrire cette mention. Je réaffirme ici, au nom de mes collègues, le soutien du Parlement au programme Ariane. L'avis est défavorable sur cet amendement.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne peux pas laisser dire que le Parlement rejetterait le soutien à Ariane pour la simple raison que notre commission n'a pas adopté un amendement ne rentrant pas dans le périmètre de cette PPRE. Nous avons eu et nous aurons l'occasion de réaffirmer notre attachement à ce programme.

L'amendement n° 12 est rejeté.

Amendement n° 18 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par cet amendement, les députés du groupe LFI-NUPES souhaitent exprimer leur regret de la privatisation d'Arianespace et le recul du CNES dans le domaine des lanceurs.

Alors que l'État aurait tout intérêt à sécuriser et à contrôler directement le domaine des lanceurs, la direction prise par la France est celle du New Space, une vision libérale mettant l'accent sur la privatisation, l'entrepreneuriat capitaliste et le profit à tout prix qui dessert à terme les intérêts souverains de la France.

Une nationalisation permettrait à la France de planifier sereinement une stratégie spatiale cohérente en se donnant des moyens à la hauteur de ses ambitions.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes dans le même débat et mon avis est toujours défavorable. Je souhaite toutefois rappeler que la construction des lanceurs relève d'Ariane Groupe et non pas d'Arianespace, chargée de la commercialisation et de l'exploitation des lanceurs développés par Ariane Groupe.

Je souhaite aussi vous rassurer quant à la forte contribution du CNES au programme Ariane 6. Les équipes du CNES sont très impliquées avec celles d'Ariane Groupe et de l'ESA dans les essais des moteurs Vulcain 2.1 sur le pas de tir d'Ariane 6. Soyez rassuré, il n'y aura pas de privatisation totale et nous soutenons Ariane Groupe à travers plusieurs programmes budgétaires. J'émets un avis défavorable.

L'amendement n° 18 est rejeté.

Amendement n° 14 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par cet amendement, les députés du groupe LFI-NUPES appellent la France à ratifier l'accord de 1979 régissant les activités des États sur la Lune et les autres corps célestes, dit Traité sur la Lune, et à œuvrer pour sa ratification auprès des autres Nations européennes.

Ce traité, signé par la France, garantit notamment à la Lune le caractère de bien commun universel. Or, la France, signataire de ce traité depuis 1980, ne l'a jamais ratifié. Alors que la compétition entre puissances spatiales autour de l'appropriation des ressources spatiales s'intensifie depuis plusieurs années, la France doit marquer son opposition à cette politique de prédation à travers la ratification de ce traité, et œuvrer à en ce sens aux niveaux européen et international.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable. Je propose de le retirer, la date mentionnée dans la rédaction initiale étant erronée. Par ailleurs, l'objet d'une PPRE n'est pas d'interpeller le Gouvernement français.

L'amendement n° 14 est rejeté.

Amendement n° 11 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par cet amendement, les députés du groupe LFI-NUPES proposent d'appeler la France, l'Union européenne et l'Agence spatiale européenne à œuvrer à des négociations pour un traité de démilitarisation de l'espace.

Les années 2000 ont vu la compétition pour l'accaparement et l'exploitation des ressources spatiales croître. En témoignent par exemple le Space Act de 2015, la loi sur les activités spatiales au Luxembourg qui permet l'exploitation des ressources spatiales par des sociétés établies au Luxembourg de 2017 ou encore les accords d'Artémis de 2020. Tous actent d'une ère de prédation des ressources spatiales, de compétition dans l'espace extra-atmosphérique ainsi que d'arsenalisation croissante, en toute logique.

La France doit refuser cela, en accord avec le traité de 1967 sur l'Espace, qui qualifie l'espace extra-atmosphérique et les ressources qu'il contient de bien commun accessible à tous.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci pour cet amendement qui permet de rappeler l'attachement de la France à la non-militarisation de l'espace. Notre pays plaide déjà pour une norme universelle, juridiquement contraignante, interdisant les pratiques telles que les tirs antimissiles. C'était d'ailleurs une des recommandations du rapport de nos collègues Jean-Paul Lecoq et Pierre Cabaré, de la commission des Affaires étrangères, en 2022.

Toutefois, votre amendement ne concerne pas les enjeux civils et commerciaux visés par cette PPRE. J'émets un avis défavorable.

L'amendement n° 11 est rejeté.

Amendement n° 15 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par cet amendement, les députés du groupe LFI-NUPES souhaitent interpeller le gouvernement sur la sous-utilisation des crédits affectés au secteur spatial dans le cadre de son plan France 2030.

Si la France souhaite maintenir et développer ses capacités spatiales, il semble opportun de réviser les critères d'investissement du plan France 2030 afin d'améliorer l'engagement et le paiement des crédits dédiés dans le secteur spatial et de ne pas handicaper notre compétition face à l'Allemagne et à l'Italie.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne doute pas que nous aurons un débat très constructif sur ce sujet la semaine prochaine en commission des Affaires économiques, mais ce n'est pas l'objet de la présente PPRE. Ce texte a été rédigé avec la Direction générale des entreprises (DGE), la Direction générale de l'armement (DGA) ou encore le CNES. Le périmètre a été très cadré et ces amendements en sortent. J'émets un avis défavorable.

L'amendement n° 15 est rejeté.

Amendement n° 16 de Bastien Lachaud

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par cet amendement, les députés du groupe LFI-NUPES appellent le Gouvernement à redonner la primauté du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche via le CNES dans l'élaboration de la stratégie spatiale française.

Le CNES est un organisme public chargé d'élaborer et de proposer au gouvernement français le programme spatial français et de le mettre en œuvre. Le CNES a été créé sur l'initiative du Président Charles de Gaulle en 1961 afin de fournir une structure chargée de coordonner et animer les activités spatiales françaises.

Depuis 2020, la tutelle de l'espace n'est plus du ressort du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche mais celui du ministère de l'Économie et des Finances. La vision de Bercy est désormais dominante dans la stratégie spatiale française au détriment de la vision scientifique portée par le CNES.

L'espace n'est envisagé que sous le prisme économique alors que celui-ci ne devrait être que pensé et analysé sous le prisme scientifique afin de correspondre à l'intérêt général humain.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis d'accord, mais les trois piliers de notre politique spatiale que sont la recherche, l'économie et la défense, doivent rester en équilibre. Une fois de plus, cette PPRE n'est pas le bon emplacement pour inscrire cette mention dans le marbre.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je comprends, mais il faut aussi une « tête » pour notre politique spatiale, et c'est ce qui nous manque aujourd'hui. Cela nous empêche de mettre en cohérence nos budgets et nos programmes. La politique relève en la matière de trois ministères et de trois budgets insuffisants pour développer des programmes, alors qu'une planification permettrait de développer des briques utiles à chacun des ministères.

Nous retirons cet amendement, mais il faut un pilote pour cette fusée afin de s'assurer que le budget soit utilisé au mieux et sans concurrence entre les ministères.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le ministère de la Recherche n'est pas exclu de la politique spatiale, mais je veux dire que c'est une bonne chose que le ministère de l'Economie et des Finances soit revenu en force dans la politique spatiale française. Précédemment, le pilotage de la politique spatiale française n'était pas optimal. L'accord de Séville a été conclu par les ministres de l'Economie. Le ministère de l'Economie et des Finances est en charge de l'industrie, et c'est le dialogue entre la recherche et l'industrie qui permet d'avoir des programmes spatiaux opérationnels, comme l'illustre la magnifique histoire de la NASA.

L'amendement n° 16 est retiré.

L'article unique de la proposition de résolution européenne est adopté.

La proposition de résolution européenne est par conséquent adoptée.

II. Nomination d'un rapporteur

La Commission a nommé sur proposition du M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade :

– M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole .

(sous réserve de son dépôt)

La séance est levée à 16 heures 45.

Membres présents ou excusés

Présents. – M. David Amiel, M. Pieyre-Alexandre Anglade, M. Pierrick Berteloot, Mme Pascale Boyer, M. Stéphane Buchou, Mme Annick Cousin, M. Grégoire de Fournas, M. Bastien Lachaud, Mme Constance Le Grip, Mme Nicole Le Peih, Mme Joëlle Mélin, Mme Lysiane Métayer, M. François Piquemal, M. Christophe Plassard, Mme Cécile Rilhac, M. Charles Sitzenstuhl