Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 10 juillet 2019 à 16h30

Résumé de la réunion

La réunion

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La commission a auditionné M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique.

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Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite la bienvenue à nos collègues parlementaires du Mali : M. Abdine Koumaré, président de la commission des finances, M. Yacouba Michel Koné, rapporteur général de la commission des finances, M. Moussa Cissé, membre de la commission des finances, M. Ouali Diawara, conseiller économique et financier du président de l'Assemblée nationale, M. Abdoul Aziz Dembelé, qui n'est pas parmi nous, mais est directeur adjoint des services administratifs et financiers, et Mme Sidibé Faty Dao, économiste, membre de l'unité d'analyse du budget de l'État.

Nous sommes réunis pour entendre M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique, sur sa feuille de route. Il y a quelques semaines, il était déjà venu nous rendre visite, avec M. Julien Denormandie, ministre auprès la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, pour évoquer les enjeux de la couverture numérique.

Monsieur le secrétaire d'État, votre portefeuille est transverse et important. Il est au coeur de la révolution du XXIe siècle, perçue – à juste titre – comme une menace, mais qui constitue également une opportunité formidable pour le secteur privé, les citoyens, les entreprises, mais aussi – j'en suis convaincu – pour l'administration et l'État dans leurs relations quotidiennes avec nos concitoyens.

J'aimerais vous entendre sur les deux sujets qui me tiennent à coeur et que j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer : le premier, pas seulement parce que je représente des citoyens résidant loin de la France – mais aussi parce que je les représente –, est celui de l'identité numérique. Le second couvre les relations avec l'administration et l'efficacité de l'administration numérique. Je ne doute pas que mes collègues auront bien d'autres questions.

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Je ne serai pas long, afin de répondre ensuite à toutes vos questions. Le numérique est à la fois intéressant et problématique car il concerne tout et tout le temps !

C'est pourquoi, en accord avec le Président de la République, le Premier ministre, et MM. Bruno Le Maire et Gérald Darmanin, j'ai choisi de me concentrer et de faire avancer trois ou quatre chantiers majeurs, sur lesquels je vais revenir. Les secrétaires d'État au numérique ont parfois eu trop tendance à se noyer dans tous les sujets, car le numérique infuse tous les secteurs, à tout moment : numérisation du travail, du processus de facturation des entreprises, etc. Je me suis donc concentré sur le développement de l'écosystème technologique et numérique français, la régulation, la fracture numérique et les rapports numériques des citoyens et de leurs administrations, ce dernier thème comprenant également la question de l'inclusion numérique.

L'écosystème technologique tout d'abord : au cours des dernières années, l'importance du sujet a été sous-évaluée en France. En termes macroéconomiques, le numérique représente une création nette d'emplois sur trois, voire une sur deux aux États-Unis. Se battre pour un écosystème technologique et numérique de bon niveau, c'est se battre pour les emplois de demain, et ceux d'aujourd'hui, mais également pour notre souveraineté.

Nous utilisons tous des téléphones américains, chinois ou coréens, des messageries américaines, des réseaux sociaux américains. Avec l'économie numérique, le gagnant est hégémonique. Si l'Europe n'a pas de gagnants, elle sera soumise à l'hégémonie des Américains et des Chinois. C'est peut-être un peu simple et caricatural, mais c'est ma vision.

Comment faire en sorte que nos entreprises – les grandes entreprises actuelles, mais également de nouvelles entreprises – émergent et soient en mesure de concourir avec leurs concurrents américains et chinois. La dernière introduction en Bourse d'une valeur technologique supérieure à un milliard d'euros à Paris, c'est Dassault Systèmes en 1996. Cela résume parfaitement nos réussites et nos échecs. Si nous ne sommes pas capables de faire émerger d'autres entreprises et de nous battre à armes égales avec les Américains et les Chinois, nous leur laisserons nos emplois technologiques et notre souveraineté…

Cela ne signifie pas qu'il faut devenir protectionniste, mais plutôt réfléchir à la meilleure façon de faire émerger des champions technologiques. L'écosystème numérique français se développe déjà, extrêmement vite : si 2,5 milliards d'euros ont été investis dans les start-up françaises il y a deux ans, nous sommes passés à 3,5 milliards d'euros l'an dernier et nous devrions atteindre 5 milliards d'euros cette année. Peu de secteurs croissent de 50 % en deux ans ! C'est bien, mais ce n'est pas encore assez. Les Anglais sont à 7 milliards ; nous venons de dépasser les Allemands, mais nous devons nous mettre en position de faire émerger encore plus d'entreprises – et de grosses entreprises. Là encore, l'accélération est notable : six levées de fonds ont été supérieures à 50 millions d'euros en 2017, elles étaient douze en 2018 et nous sommes à quinze à mi-2019. La dynamique est enclenchée et le rattrapage en cours.

Je l'ai dit dans un quotidien économique il y a quelques mois : nous pouvons atteindre quinze à vingt « licornes » – des entreprises valorisées plus d'un milliard d'euros – dans les cinq à dix prochaines années. Nous allons y arriver, c'est mathématique, puisqu'une quinzaine vient de dépasser les 500 millions d'euros. Mais il ne faut pas relâcher la pression. Plus que de licornes, nous avons besoin d'entreprises valorisées demain à 10, voire 40 ou 50 milliards d'euros.

Quel est le rôle de l'État ? Il doit créer les conditions de leur développement. Deux leviers sont particulièrement importants : le financement – nos réussites sont clairement liées aux réformes de la fiscalité menées par le Gouvernement. Le recentrage de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) sur l'immobilier, avec l'impôt sur la fortune immobilière (IFI), et le prélèvement forfaitaire unique sont essentiels pour que l'écosystème français se développe. À titre personnel, j'estime que revenir sur la réforme de l'ISF nous ferait prendre le risque de sortir de l'histoire.

Nous devons aussi nous focaliser sur les introductions en Bourse et les levées importantes de fonds : comme leurs homologues américaines, nos entreprises doivent pouvoir lever 100 à 200 millions d'euros. Elles arrivent désormais souvent à lever 100 millions d'euros mais, à chaque fois, elles doivent faire appel à un financeur anglo-saxon. Ce n'est pas forcément un problème, mais nous aimerions plus de financeurs français.

En outre, le Gouvernement travaille d'arrache-pied pour développer un écosystème de recherche bénéfique pour ces entreprises afin que, demain, l'introduction en Bourse de valeurs technologiques françaises de plus d'un milliard d'euros soit à nouveau une réalité.

Deuxième levier indispensable : le recrutement, qui constitue actuellement le premier frein au développement des entreprises françaises du numérique, à tous les niveaux de formation. Le problème est tel que certaines d'entre elles – par exemple, Doctolib, une des dernières licornes françaises – ouvrent des bureaux à Berlin car elles n'arrivent pas à recruter des ingénieurs et techniciens français ! Dans un pays qui compte 2,5 millions de chômeurs, ce n'est pas satisfaisant. 80 000 emplois sont actuellement non pourvus dans le numérique ; il y en aura 200 000 en 2022. Il ne s'agit pas d'emplois pénibles, mais de postes à pourvoir du post-bac au niveau ingénieur. Nationalement et localement, nous devons faire le nécessaire pour répondre à la demande : 200 000 emplois, c'est le nombre total d'emplois créés en 2018 ! Le numérique nous permettrait donc de réduire le chômage de façon extrêmement efficace et, je le répète, il ne s'agit pas d'emplois pénibles.

La régulation des grandes plateformes est le deuxième grand dossier auquel je m'attelle. J'ai eu l'occasion de le dire durant les débats sur la proposition de loi visant à lutter contre la haine sur internet, dite « Avia ».

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Oui, Monsieur le député, peut-être même l'avez-vous votée ?

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Le défi de la régulation des grands réseaux sociaux et des plateformes internet est vital pour les grandes démocraties. Si seuls les pays autoritaires les régulent efficacement, c'est un problème...

Nous avons lancé énormément de chantiers – les contenus haineux n'en sont qu'un –, la majeure partie au niveau européen : pour imposer nos règles, il faut négocier au bon niveau et, dès lors qu'on touche à ces acteurs, la tension est extrêmement forte avec les États-Unis. Le cadre posé concernant la vie privée est extrêmement intéressant ; sur les contenus haineux, nous traçons également une voie prometteuse ; nous devons encore réfléchir concernant les relations entre Amazon et ses fournisseurs. J'imagine que vous aurez un certain nombre de questions sur le sujet. Le cadre global de régulation à l'ère du numérique reste à inventer.

Je finirai par la « fracture numérique » – même si je ne suis pas sûr que le terme soit le bon. Lors des échanges organisés à l'occasion du Grand débat, le numérique a souvent été évoqué comme syndrome ou facteur de l'abandon des territoires et, pour les treize millions de Français qui n'utilisent pas internet quotidiennement, le numérique est facteur de fracture sociale. Les Français comprennent parfaitement que moins de gens envoient des lettres, que les impôts se déclarent sur internet mais, si vous remplacez leur caisse d'allocations familiales (CAF), leur bureau de poste et leurs services publics par des services numériques dont ils ne savent pas se servir ou qui ne fonctionnent pas car ces services n'ont pas été pensés en fonction du parcours de tous les usagers, vous leur renvoyez le sentiment que vous ne vous occupez d'eux.

Pour que les compétences de chacun soient claires, je ne m'occupe pas des « tuyaux » : la fibre, c'est M. Julien Denormandie ; le réseau mobile, c'est Mme Agnès Pannier-Runacher ; je traite pour ma part les usages. Je n'aurai donc probablement pas de réponses à vos questions sur le réseau mobile et la fibre.

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Nous auditionnons régulièrement les acteurs en charge des « tuyaux » !

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

J'ai passé beaucoup de temps avec des sociologues, spécialistes du sujet. Il ne suffit pas que les gens aient accès à internet pour résoudre tous les problèmes ! Nous ne pouvons pas être déterministes dans notre approche et penser qu'en installant le réseau puis en numérisant les administrations, tout se passera bien. Ce n'est pas le cas !

Treize millions de Français ne sont pas à l'aise avec internet : la moitié doit être formée et l'autre moitié, accompagnée. Il faut donc des lieux pour les former, ainsi qu'un mécanisme financier adéquat. Dans le cadre d'un appel à projets, nous avons lancé une expérimentation intitulée « Pass numériques » avec dix territoires – sept départements, deux intercommunalités et une région. Si vous vous rendez à la CAF et que le personnel du guichet constate que vous n'êtes pas à l'aise avec internet, il vous donne l'équivalent d'un chèque-restaurant afin que vous puissiez suivre une formation à côté de chez vous, très souvent dans un tiers lieu porté par la collectivité territoriale. Cela coûte environ 70 euros par personne à la collectivité. Le dispositif a démontré son efficacité et nous réfléchissons au meilleur moyen d'accélérer son déploiement à partir de l'année prochaine.

La généralisation ne va pas sans un maillage de lieux de formation et d'accompagnement – tiers lieux ou maisons France services –, afin que nos concitoyens puissent se former et, pour ceux qui ne le seront jamais, être accompagnés à côté de chez eux.

C'est d'autant plus important que l'inclusion numérique ne concerne pas que les personnes âgées – les baby-boomers. Dans les Ardennes, dans la Creuse, à Lannion, lors de chacun de mes déplacements, les médiateurs numériques le disent tous : ce n'est pas une question d'âge et il n'y a pas de profil type. Certes, on croise des personnes âgées, mais aussi des femmes de 30 à 50 ans. Ce n'est pas parce que vous allez sur Facebook et savez utiliser Le Bon Coin que vous saurez naviguer sur les sites administratifs…

S'agissant de la numérisation des services publics, sur les 250 démarches les plus utilisés par les Français, 70 % sont déjà numérisées. Mais nous sommes souvent allés trop vite, en oubliant le « parcours usager » et la qualité des services publics en ligne. Nous avons commencé à publier – et publierons tous les trimestres – 7 indicateurs de qualité évaluant les 250 démarches les plus utilisées par les Français.

Ensuite, avec chacun des ministres, nous allons travailler à l'amélioration des services publics en ligne – utilisation avec un téléphone portable, contact par téléphone ou par tout autre moyen en cas de problème, accessibilité pour les personnes handicapées, etc. – afin que personne ne se sente exclu. Hier, les guichets géraient les exceptions. Désormais, le numérique doit apprendre à les traiter.

Je conclurai par l'identité numérique, brique de base de la dématérialisation des services publics et d'une partie de l'économie. Le chantier pose de grands défis : compatibilité avec la loi informatique et libertés ; capacité de l'État à mener ce chantier extrêmement lourd de transformation numérique de ses systèmes d'information – l'État n'a pas toujours montré son efficacité en la matière.

Le sujet est fondamentalement interministériel : le combat de la carte d'identité numérique est celui d'hier – c'est un avis personnel, mais il est partagé au sein du Gouvernement. L'avenir, et le bon niveau d'ambition, c'est l'identité numérique – un seul titre regroupant carte d'identité, permis de conduire, carte Vitale et, éventuellement, passeport.

Nous devons être en mesure de fournir toutes les garanties de protection de leur vie privée aux Français. C'est un chantier de grande ampleur car, à partir de 2021, en application d'une directive européenne, nous allons remplacer toutes les cartes d'identité des Français. L'opportunité ne se représentera pas deux fois. L'échéance est courte. Cela ne veut pas dire que, dès 2021, nous embarquerons tous les titres sur une même carte, mais ne fermons pas non plus l'option. Nous réfléchissons actuellement aux sujets techniques, de gouvernance et d'organisation. Si vous le souhaitez, nous aurons l'occasion d'y revenir.

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Les Indiens ont réussi à faire basculer plus de 800 millions de personnes il y a trois ou quatre ans, un peu dans la douleur, mais avec efficacité. Nous devrions également être capables de le faire.

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La révolution numérique s'accélère et devient chaque jour plus intense. Les positions acquises sont contestées ; des entreprises disparaissent ; d'autres innovent ; toutes sont sommées d'incorporer les technologies numériques pour se maintenir dans le jeu concurrentiel. Ces nouvelles technologies – intelligence artificielle, blockchain, 5G, internet des objets, Libra – sont porteuses de promesses fortes pour nos concitoyens en termes de qualité de service, et pour nos entreprises en termes de gains d'efficience.

Mais les bouleversements qu'elles occasionnent suscitent également une certaine appréhension – rapport à l'information, manières d'échanger et de faire société, organisation de l'économie. Cette appréhension est d'autant plus forte que ces technologies sont aujourd'hui concentrées entre les mains de grands acteurs, qui peuvent se jouer des logiques territoriales et des règles de droit pour consolider leur pouvoir de marché.

C'est donc bien la capacité des pouvoirs publics à garder la maîtrise sur le développement de ces technologies qui est en cause : nous ne devons être ni naïfs, ni paranoïaques, mais inventifs pour soutenir l'innovation tout en protégeant nos concitoyens.

Si le défi de la régulation est particulièrement prégnant, il est loin d'être le seul. Garantir notre souveraineté passe également par le développement d'un écosystème numérique plus robuste, et donc par un accompagnement plus important de nos entreprises. Monsieur le secrétaire d'État, alors que les États généraux des nouvelles régulations numériques – auxquels j'ai pris une part active – ont livré l'essentiel de leurs conclusions, et que vous vous apprêtez à porter une feuille de route ambitieuse – vous venez de la rappeler en quatre points – auprès de nos partenaires européens, quels outils comptez-vous mobiliser pour réguler les plateformes dites systémiques ? Certains estiment que les jeux de données constituent de nouvelles facilités essentielles qu'il conviendrait d'appréhender sous l'angle d'une régulation asymétrique. Qu'en pensez-vous ? Quelles sont vos orientations en matière de transparence et de loyauté des algorithmes ? En abordant le sujet des contenus haineux sur internet, nous avons constaté à quel point l'opacité des décisions algorithmiques peut crisper dès lors que les plateformes se voient confier des responsabilités importantes.

Enfin, qu'envisagez-vous pour renforcer notre arsenal réglementaire en matière d'interopérabilité des infrastructures et de portabilité des données ? Il y aurait un levier pour fluidifier les marchés et garantir un terrain de jeux équitable.

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Je souhaite vous poser deux questions. Au vu de votre intervention liminaire, vous ne pourrez peut-être pas y répondre, mais votre directeur de cabinet sans doute – nous avons déjà échangé sur le sujet !

Ma première question porte sur l'amélioration du réseau de téléphonie mobile. Début 2018, le Gouvernement a fait de grandes annonces, avec le New Deal mobile. Depuis, en observant ce qui se passe sur le terrain, on se rend compte que le nombre de sites imposés aux opérateurs est dérisoire – moins d'une dizaine en deux ans dans le Calvados. Surtout, ces sites sont répartis de façon anormale – pour ne pas dire injuste – entre les départements. Pouvez-vous nous préciser les critères de répartition nationale des sites du New Deal ?

Ma seconde question porte sur les réseaux d'initiative publique (RIP) de fibre optique. Des territoires se sont retroussé les manches pour construire ces réseaux, qui sont souvent un succès technologique car les infrastructures fonctionnent. Mais ils sont régulièrement un échec commercial, car l'opérateur historique – Orange – refuse de faire des offres sur des RIP comme celui du département du Calvados. Ma question sera très simple : l'État, actionnaire significatif d'Orange, est-il davantage sensible aux dividendes versés par l'entreprise qu'à l'amélioration de l'accès au très haut débit sur nos territoires ?

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Votre mission est cruciale pour coordonner la politique de transformation numérique de l'État. Parmi vos nombreux chantiers, celui de l'ouverture des données est indispensable pour développer et améliorer les usages et services numériques. La France porte d'ailleurs une tradition de transparence démocratique et de partage des informations détenues par la puissance publique. Quelles sont les intentions du Gouvernement en matière d'ouverture et de circulation des données publiques ?

J'attire votre attention sur la récente mise à disposition du jeu de données « Demandes de valeurs foncières » (DVF) diffusé par la direction générale des finances publiques. Ce passage en open data est une avancée importante pour toutes les structures dépendantes d'une vision transparente du marché du foncier et de l'immobilier. Toutefois, dans le cadre de la mission de maîtrise du coût du foncier dans les opérations de construction que m'a confiée le Premier ministre, de nombreux acteurs publics m'ont alerté : ils ont désormais accès à moins d'informations qu'avec les précédentes bases de données fermées.

Cet exemple démontre qu'il est important de ne pas pénaliser certains acteurs, notamment publics, lors de la publication de nouvelles données. J'espère que nous pourrons trouver ensemble une solution qui convienne au plus grand nombre.

Au-delà de DVF, quelles sont les intentions et les actions mises en oeuvre par le Gouvernement pour accélérer la transformation numérique et la numérisation dans les secteurs du logement, du bâtiment et de l'immobilier, dans lesquels il existe un fort potentiel d'amélioration en matière de transparence et d'accélération de l'acte de construire ?

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Ma question porte sur l'écosystème technologique. Je partage votre vision : cet enjeu est très sous-estimé en France et en Europe. Vous l'avez dit, nous serons – et sommes déjà – soumis à l'hégémonie américaine et chinoise. Nous avons mis l'accent sur l'intelligence artificielle, mais force est de constater que les investissements sont vingt fois moins importants en Europe qu'aux États-Unis ou en Chine. Je crains que nous ne rattrapions jamais notre retard, même avec de bons mathématiciens. Quel est votre point de vue ?

Une autre technologie va être profondément révolutionnaire : la blockchain. Le Gouvernement a inséré des dispositions dans la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE. C'est une excellente chose. Mais toute l'industrie financière va également être révolutionnée. Or, en France et en Europe, aucun acteur privé n'est actif et ne finance les technologies blockchain. Que faire pour ne pas reproduire deux fois les mêmes erreurs ? Des acteurs américains et chinois risquent de prendre la place et de s'inviter dans toutes les filières économiques. Les fonds et les acteurs privés, ainsi que la Banque publique d'investissement (BPI), doivent mettre en place des financements pour aider au développement de cette technologie en Europe. C'est essentiel pour l'avenir.

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L'essor du numérique est incontestable – on parle de révolution numérique. Comment à la fois tenir compte de la continuité nécessaire, mais aussi des enjeux de rupture ? Hier, j'ai voté avec plaisir la proposition de loi dite « Avia ». C'est un bon exemple de régulation des dérapages que nous connaissons en France en matière de propos haineux et de racisme.

Ma question porte sur l'impact du numérique sur le travail. Quelles sont ses conséquences ? Vous avez beaucoup parlé gains de productivité et création d'activités. Vous avez évoqué les investissements extrêmement importants pour compenser le retard de la France. Mais que coûte la transition vers le numérique en termes d'activité ?

Vous n'avez pas la responsabilité des tuyaux et des réseaux – c'est-à-dire des investissements –, mais seulement des usages. Ce découpage est surprenant : vous savez pertinemment que la fracture numérique est sociale, mais également territoriale – je suis bien placé pour le savoir en outre-mer. Cette fracture peut aboutir mécaniquement à l'exclusion sociale, mais aussi à l'incapacité d'user du numérique. Ainsi, la Martinique ou la Guadeloupe pourraient être des plateformes très puissantes d'échange entre les continents américain et européen en matière d'e-travail. Mais l'absence d'investissement dans les infrastructures numériques pose problème et pourrait aggraver leur retard.

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Selon vous, l'identité numérique est une « brique de base » de l'économie numérique et un sujet majeur pour la dématérialisation des administrations. Il est aussi déterminant pour notre souveraineté et le développement de notre économie. Mais vous avez également souligné qu'il s'agit d'un sujet interministériel. M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur, a récemment publié un document dans lequel il estime que l'identité numérique sera un outil essentiel de lutte contre les contenus illicites. Comment trouver un équilibre ?

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Monsieur Bothorel, le message que la France porte est clair : certains acteurs sont devenus « systémiques » – Facebook, Google et Amazon, par exemple, en France. Ils constituent des briques de base de l'économie et, parfois, de la société. En tant que tels, compte tenu de leur « empreinte », la régulation doit être systémique et européenne. Les règles doivent être spécifiques avec, éventuellement, un régulateur spécifique. Ces règles peuvent être de nature anticoncurrentielle – ainsi, il n'y a pas vraiment de raison d'appliquer les mêmes règles anticoncurrentielles à Google qu'à Alstom. Leurs acquisitions devraient probablement être régulées ex ante, et non ex post. C'est également valable pour les données personnelles, la portabilité des données, certaines pouvant être considérées d'intérêt général : nous devons imaginer et leur appliquer un ensemble régulatoire spécifique.

Parmi les obligations spécifiques qui sont évoquées se trouve la transparence des algorithmes, dont la loi « Avia » vient de montrer à quel point elle était désormais un enjeu pour les politiques publiques. En effet, de plus en plus de décisions ayant une incidence sur la vie des Français et des Européens découlent aujourd'hui d'algorithmes, et la puissance publique doit pouvoir garantir que ces décisions sont légales.

Monsieur Sebastien Leclerc, permettez-moi de laisser à mon directeur de cabinet le temps de me communiquer quelques éléments de réponses : je l'ai en effet choisi pour sa très bonne connaissance des territoires, afin de souligner que, pour moi, le numérique, ce n'est pas qu'une question parisienne mais qu'elle concerne l'ensemble des Français, où qu'ils vivent.

Monsieur Jean-Luc Lagleize, j'avoue découvrir le problème que vous soulevez au sujet de l'ouverture de la base de données « Demandes de valeurs foncières », dont je pensais qu'elle était une grande réussite. Je vous répondrai sur ce point particulier mais, plus globalement, l'ouverture des données dans de bonnes conditions, c'est-à-dire notamment en permettant qu'elles soient réutilisables par les acteurs publics ou privés, reste un objectif fort du Gouvernement. Nous poursuivons le travail entamé avec la loi pour une République numérique qu'avait adoptée la précédente majorité, en travaillant par exemple, actuellement, sur la question des données géographiques. Cela étant, je vous concède que cette ouverture n'est pas nécessairement dans la culture des administrations, pour qui, ouvrir leurs données est parfois vécu douloureusement dans la mesure où la maîtrise des données est souvent assimilée à une forme de pouvoir.

Madame de La Raudière, je vous trouve un peu pessimiste en ce qui concerne l'intelligence artificielle. Je ne pense pas que nos investissements soient vingt fois inférieurs à ceux des Américains mais plutôt de l'ordre de quatre ou trois fois inférieurs. Quoi qu'il en soit, il est sûr que nous sommes largement derrière les Américains et les Chinois, ce qui ne signifie pas qu'il faut cesser le combat.

Dans un domaine néanmoins, il est vrai que nous avons perdu le combat, sinon définitivement du moins pour plusieurs années, c'est celui de l'intelligence artificielle appliquée aux données personnelles et aux données de consommation. Nous ne disposons pas de bases de données personnelles de la taille de celles d'Alibaba, Google ou Facebook, ce qui provoque un effet d'inertie et rend compliqué l'émergence d'un acteur français dans ce domaine.

Cela étant, il existe des secteurs dans lesquels nous avons les moyens de croiser le très bon savoir-faire de certains acteurs et l'excellence de la recherche française en intelligence artificielle pour jouer une carte importante – je pense en particulier aux secteurs de la santé, de la cybersécurité, de la mobilité ou encore de l'énergie, à tout ce qui tourne en gros autour des logiciels critiques. Ce n'est pas exactement la même chose en effet d'avoir un algorithme d'intelligence artificielle permettant de déterminer quel est le prochain achat que vous allez faire et un algorithme d'intelligence artificielle qui pilote un avion, car ce dernier ne peut pas se tromper, ne serait-ce qu'une fois sur cent, et il doit pouvoir fonctionner en manière locale. Or, en la matière, nous possédons un savoir-faire particulier et nous avons donc un rôle à jouer, notamment dans le secteur de la santé où nous disposons de deux des cinq plus grandes bases de données mondiales. Cela doit d'ailleurs nous inciter à réfléchir aux moyens de donner à des acteurs privés l'accès à ces données, pour leur permettre de développer demain des systèmes de soins ou de santé qui soient les meilleurs du monde, et éviter que ce soient les Américains ou les Chinois qui nous les revendent.

Quoi qu'il en soit, nous disposons du potentiel, notamment en termes de recherche en sciences de l'informatique et en mathématiques, puisque je rappelle que la quasi-totalité des patrons d'intelligence artificielle dans les grandes entreprises américaines, que soit Google, Facebook ou Apple sont des Français.

Il faut donc garder nos chercheurs et, à cet égard, les 1,5 milliard d'euros dont est doté sur trois ans le plan Intelligence artificielle proposé par le Président de la République seront pour une large part consacrés à augmenter la rémunération des chercheurs pour faire en sorte que nous gardions – ou fassions revenir – les meilleurs. J'en veux pour preuve le cas de l'ANITI, l'institut de l'intelligence artificielle de Toulouse, construit autour d'Airbus, qui a été désigné comme l'un de nos quatre hubs nationaux, qui a réussi à faire venir d'une grande université américaine, un chercheur chilien parmi les meilleurs du monde, et je pourrais également citer des chercheurs travaillant chez Google ou Facebook, qui reviennent à Paris pour son écosystème.

Nos efforts portent donc, même si, je le dis devant vous, il faudra sans doute aller plus loin et mettre encore davantage d'argent sur la table. Cela vaut pour l'ensemble de la recherche, et je vous invite à ce propos à regarder d'un oeil extrêmement attentif le projet de loi de programmation pour la recherche que le Gouvernement est en train d'élaborer.

Je rappelle que la France dépense 2,25 % de son PIB dans la R&D, contre 3 % pour l'Allemagne, qui ambitionne de porter ce taux à 3,5 % en 2025. Cela signifie que, si nous ne faisons rien, ce sont 60 milliards d'euros de différentiel qui se cumuleront chaque année : en d'autres termes, en n'augmentant pas nos financements, nous préparons le chômage de demain. Il me semble qu'au-delà de l'intelligence artificielle, c'est là le véritable enjeu. Certes, les emplois que nous ne créons pas dans ce domaine font beaucoup moins de bruit que la restriction des dépenses sociales, mais ce serait une erreur de les opposer, car les premiers ne sont évidemment pas sans incidence sur les secondes.

Vous avez également évoqué les problèmes que nous rencontrons avec la blockchain, les banques et les agents du secteur privés ayant en effet du mal à enclencher la dynamique, malgré le cadre innovant et ambitieux que nous avons mis en place et auquel, Madame de La Raudière, vous avez largement contribué. En la matière, nous sommes moins menacés par les Américains, puisqu'ils ont, pour faire court, décider de rendre illégales les cryptomonnaies, que par les Chinois, qui sont de plus en plus hégémoniques dans le domaine de la blockchain.

L'État essaie de faire avancer les choses, par exemple dans le cadre des plans d'action de la BPI, pour lesquels nous avons demandé que la blockchain soit une technologie, prise en compte, notamment dans les investissements des futurs fonds nationaux d'amorçage.

Au-delà de ces efforts, le problème se résoudra lorsque nous aurons, en France, des fonds d'investissement qui investiront dans l'intelligence artificielle, la blockchain, et autres technologies de ce type, ce qui implique un marché boursier de bon niveau. C'est donc l'ensemble de l'écosystème qu'il faut envisager.

Monsieur Letchimy, en ce qui concerne l'impact du numérique sur le travail, l'ensemble des études disponibles montrent, d'une part, un grand bouleversement et, d'autre part, un bénéfice final. En d'autres termes, il y a plutôt un consensus académique sur le fait que le numérique créera plus d'emplois qu'il n'en détruira.

Encore faut-il être capable de réussir la transition entre les uns et les autres, puisque ce ne sont évidemment pas les mêmes emplois qui seront détruits et créés. Cela m'amène à la question de la formation et au scandale de nos 80000 emplois non pourvus. Ces emplois ne sont pas que des emplois d'ingénieur ; pour la majorité d'entre eux, ce sont des emplois de technicien ou d'opérateur. Aujourd'hui, une entreprise comme UPS n'a aucun problème à recruter les ingénieurs qui programment les algorithmes organisant le mouvement des machines dans ses entrepôts, mais elle en a pour recruter les techniciens qui gèrent ces machines.

Les Allemands, qui ont six fois plus de robots que nous, ont deux fois moins de chômeurs. Tout l'enjeu pour nous est donc que les travailleurs soient acteurs de la transformation au lieu de la subir : pour cela il faut des financements et de la formation. Sur l'ensemble de la chaîne, quoi qu'il en soit, il nous reste des marges de progrès.

En ce qui concerne le réseau outre-mer, je vous renverrai vers M. Julien Denormandie. Je n'ai en aucun cas la volonté hégémonique de m'occuper de tout, et je me borne à bien faire ce qui relève de mes compétences.

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Nous recevons régulièrement les ministres pour faire le point sur la couverture des territoires. Nous l'avons fait il y a deux mois, et nous pourrons de nouveau auditionner M. Julien Denormandie à l'automne.

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Madame Christine Hennion, le Gouvernement n'entend pas demander aux gens de s'identifier quand ils se connecteront à Facebook ou qu'ils voudront jouer à des jeux en ligne. En revanche, on peut imaginer des protocoles permettant de déterminer sans vous identifier si, par exemple, vous êtes ou non majeur : cela constituerait une arme essentielle pour lutter contre l'accès des enfants et des adolescents à la pornographie. L'identité numérique a donc ses usages, dès lors qu'elle n'est pas un moyen de vous identifier nommément.

Cela étant, l'accès à internet n'est jamais anonyme puisqu'il nécessite une adresse IP que la justice peut révéler quand nécessaire, mais nous concevons bien l'identité numérique comme un outil facilitateur et simplificateur, en aucun cas comme un instrument de surveillance. J'ajoute que je considère essentiel que la Représentation nationale se saisisse de cette question et engage le débat sur les usages de l'identité numérique.

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Ma question concerne la suite des États généraux du numérique lancés par votre prédécesseur, et en particulier la problématique de la concurrence, qui agite beaucoup les esprits et a fait l'objet de plusieurs rapports – le rapport Crémer commandé par la Commission européenne, le rapport Furman en Grande-Bretagne et le rapport Perrot en France.

Qu'allez-vous faire de toute cette matière, sur les deux points précis que sont, d'une part, l'application du droit de la concurrence au numérique et, d'autre part, la réforme éventuelle de ce droit : ne faut-il pas en effet revoir le contrôle des concentrations, pour éviter de laisser certaines opérations se réaliser, comme le rachat de WhatsApp par Facebook, qui a de quoi nous inquiéter ?

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

La concurrence suscite en effet de très vifs débats entre experts et politiques. La question du démantèlement se pose, pour des raisons économiques et démocratiques, mais elle se pose au niveau européen et au niveau américain ; il serait illusoire de penser que les Français peuvent prendre la main en la matière.

Cela étant, il faut revoir le droit de la concurrence, pour tout ce qui concerne les règles ex ante mais également les pratiques – c'est en particulier ce qu'entend faire la Commission européenne en interdisant à Facebook et à WhatsApp de fusionner leurs données, sachant par ailleurs que, pour des raisons juridiques, il n'est pas envisageable d'annuler le rachat.

De multiples questions méritent d'être revues quitte à inventer de nouvelles règles qui dépassent le droit de la concurrence. J'ai évoqué la mise en place d'une régulation asymétrique et systémique, mais il faudrait également renforcer la supervision, en matière notamment d'interopérabilité, lorsqu'on a affaire, par exemple, à des acteurs systémiques, dont les données peuvent être considérées d'intérêt général.

Il faut donc moderniser le droit de la concurrence – mais c'est au niveau européen que cela se fera – et baliser, au-delà de ce droit, les enjeux qui touchent au respect de la vie privée et des principes démocratiques.

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Les récents dysfonctionnements constatés à la SNCF ont mis au jour l'ampleur de la fracture numérique, qui en a surpris plus d'un et nous a conduits à autoriser la vente des billets de train par les bureaux de tabac.

Sachant que cette fracture numérique est particulièrement criante dans les territoires ruraux, ne pourrait-on pas envisager d'autres synergies avec les commerces de proximité, qui pourraient prendre en charge un certain nombre de services, pour lesquels, puisque vous annoncez une pénurie de 200 000 emplois, nous allons manquer de personnel ?

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Dans le même esprit, ma question porte sur l'accès aux administrations. Le Grand débat a mis en exergue ce qui a probablement été l'un des déclencheurs du mouvement des « gilets jaunes », à savoir le sentiment qu'ont certains de nos concitoyens de se heurter à une administration devenue inaccessible depuis que de nombreuses démarches ont été numérisées. Envisagez-vous de conventionner avec les mairies ou les collectivités territoriales, afin qu'elles mettent en place un accompagnement au numérique destiné aux populations qui en ont besoin ?

Concernant par ailleurs l'organisation même des administrations, leur fonctionnement en silos oblige les usagers à multiplier les démarches – un vigneron, par exemple, devra faire plusieurs déclarations, à la DIRECCTE, aux services fiscaux, aux douanes et j'en passe. Je suppose qu'en pratique cela soulèverait des obstacles juridiques qu'il faudrait lever, mais ne pourrait-on pas envisager que les données des différentes administrations soient regroupées dans une base commune où elles seraient directement accessibles pour chaque démarche à accomplir ?

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Merci pour cette excellente question à laquelle je souscris.

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L'homme n'a jamais marché sur la Lune, le déficit de la sécurité sociale n'existe pas, les migrants sont mieux traités que les retraités, la France a été vendue à l'Allemagne dans le cadre du traité d'Aix-la-Chapelle… bref, les fake news, ou fausses informations, et les théories du complot prospèrent. Elles ont toujours existé mais aujourd'hui, du fait des nouveaux supports sur lesquelles elles se diffusent, leur viralité est exponentielle : sur Twitter, par exemple, une fausse information a un taux de viralité supérieur de 70 % à celui d'une information classique. En outre, on voit se développer d'autres contenus dangereusement trompeurs, les deepfakes.

Cela m'a conduit à organiser une réunion de sensibilisation ouverte à tous, avec l'association Génération Numérique, des professeurs, des élèves de classes médias et des journalistes. Plus globalement que peut-on faire pour lutter contre ces fausses informations et mieux sensibiliser nos concitoyens, jeunes et moins jeunes, à ce risque numérique ?

Par ailleurs, la Cour des comptes a rendu avant-hier, un avis sur le service public du numérique éducatif. Elle pointe son bilan décevant et recommande de doter écoles, collèges et lycées d'un socle numérique de base. Qu'en pensez-vous et comment travaillez-vous avec le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse ?

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Le Premier ministre a lancé, le 13 octobre 2017, le programme Action publique 2022. Ce programme donne la priorité à la transformation numérique des administrations, pour atteindre l'objectif fixé par le Président de la République de 100 % de services publics dématérialisés à l'horizon 2022.

Dans cette perspective, je souhaite attirer votre attention, sur le téléservice de pré-demande de carte nationale d'identité. Actuellement, un citoyen lambda fait sa demande en ligne sur le site de l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), puis doit se rendre à la mairie, en apportant sous format papier les documents justificatifs demandés ; sur place, ces documents sont numérisés, puis jetés… Il me semble qu'il serait techniquement possible qu'ils soient directement téléversés en ligne lorsque l'utilisateur réalise sa pré-demande sur le site de l'ANTS : à l'heure où nous nous apprêtons à examiner une loi sur l'économie circulaire, cela permettrait de réaliser des économies.

De la même manière, je voulais vous alerter sur le statut d'hébergeur de données de santé. Une start-up de ma circonscription, engagée depuis trois ans dans la procédure d'obtention du statut, a dû fournir vingt-trois kilos de papiers à la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) et autant à l'Agence des systèmes d'information partagée de santé (ASIP). Je souhaiterais donc savoir comment le Gouvernement entend concilier l'accès universel aux procédures administratives avec l'objectif du 100 % numérique ? Ne serait-il pas pertinent de créer un forum des procédures archaïques ou absurdes pour essayer de les identifier et de les traiter au fil de l'eau ?

Permettez-moi enfin de vous faire part de deux initiatives en cours dans les Bouches-du-Rhône. En matière d'abord d'usage et d'apprentissage des outils numériques, la mutualité sociale agricole (MSA) a un projet de bus numérique destiné à circuler dans les villages pour développer l'apprentissage des outils numériques auprès de ses adhérents et d'autres habitants, mais elle a besoin de financements : comment finance-t-on un projet de ce type ?

Vous avez par ailleurs évoqué les métiers en tension et la pénurie de développeurs informatiques : le Club Top 20 des entrepreneurs des Bouches-du-Rhône vient ainsi de créer une école du numérique baptisée La Plateforme pour répondre aux besoins de la région. Comment accompagne-t-on ces entrepreneurs, qui ont de très bonnes idées ?

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Je voulais profiter de nos échanges pour saluer l'initiative French Tech, que j'ai la chance de voir prospérer sur mon territoire des Hautes-Pyrénées et qui permet aux startuppers de se rassembler, de se faire connaître et de bénéficier d'un soutien de taille, au travers notamment de consortiums « appels à projet », de groupes de réflexion par filière, de l'accompagnement des structures grâce au mentoring et à la formation. Le système fonctionne bien et encourage les initiatives locales et la mise en réseau d'acteurs motivés.

Quelles sont donc les prochaines étapes de la mission French Tech, et comment le Gouvernement peut-il continuer à accompagner ces start-up prometteuses, notamment dans leur ouverture à l'international ?

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La gestion des compteurs Linky a été gagnée par une entreprise messine, l'Usine d'électricité de Metz (UEM), société d'économie mixte historique, dont la mairie de Metz est actionnaire à 75 %. L'UEM avait, à l'origine, développé le logiciel pour son propre compte mais a remporté, grâce à lui, l'appel d'offres lancé il y a quelques années par EDF. Une filiale commune a d'ailleurs été créée avec EDF et la Caisse des dépôts et consignations, pour accompagner cette réussite exceptionnelle, qui a permis le recrutement de trois cents ingénieurs sur trois ans.

Le compteur Linky rencontre cependant des oppositions, nourries notamment de fantasmes sur les ondes qu'il dégagerait – ce qui est faux – mais aussi sur la façon dont EDF pillerait les informations personnelles des usagers. Le Gouvernement a-t-il été alerté de ce problème et que compte-t-il faire ?

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Madame Bessot Ballot et Monsieur Herth, vous m'avez, l'un et l'autre, interrogé sur le déploiement des services publics numériques sur le territoire.

Il me semble que, pour organiser la médiation numérique et l'accompagnement des usagers dans leurs démarches, nous devons partir de ce qui existe sans vouloir réinventer l'eau chaude.

Les solutions existantes sont nombreuses, depuis les points numériques installés dans les mairies jusqu'aux médiathèques, en passant par tout un ensemble de tiers-lieux qui s'impliquent, par exemple, les agences bancaires du Crédit agricole.

S'il faut naturellement créer des lieux ad hoc là où il n'y en a pas, je ne vois pas pourquoi les espaces qui reçoivent des gens et accueillent déjà un point numérique n'accueilleraient pas également un corner France services, plutôt que de créer une maison France services ex nihilo.

Je vous citerai, d'autant plus volontiers que le maire n'appartient pas à ma famille politique, l'exemple formidable de Guéret, dans la Creuse, où a été montée une sorte de petit Fab Lab, qui abrite des associations et une radio locale, et propose un accompagnement aux démarches numériques. C'est un endroit très fréquenté parce que plein de vie, et c'est dans des endroits comme ça qu'il faut installer les services publics.

Il faut donc, comme vous le suggérez, conventionner avec les mairies et les collectivités territoriales, avec cette idée que nous devons réinventer un service public de proximité, qui permette aux gens d'effectuer simplement leurs premières démarches auprès de la CAF, de la CNAV ou de Pôle emploi, sans qu'ils se retrouvent bloqués par l'organisation en silos de nos administrations : peu importe aux Français, quand ils ont recours aux services publics, de savoir quelle direction centrale ou quelle direction générale est concernée : ils s'adressent à l'État.

En ce qui concerne la simplification des démarches administratives, il faut admettre que le programme « Dites-le-nous une fois » ne fonctionne pas très bien, et chaque administration a tendance à redemander les mêmes dossiers. Pour des raisons assez compréhensibles, la CNIL nous interdit de créer un fichier central, qui regrouperait l'ensemble des données des usagers. La question passe donc par le développement de l'interopérabilité et des interfaces de programmation (API), de manière que l'on ne soit plus obligé de fournir à quatre reprises les fichiers de sa carte d'identité ou de son dernier bulletin salaires si on l'a déjà fait une première fois auprès d'une administration.

Lors du dernier comité interministériel de la transformation publique (CITP), dirigé par le Premier ministre il y a trois semaines, j'ai fait part de notre insatisfaction sur cette question que nous devons reconsidérer dans son ensemble.

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J'ai obtenu du Premier ministre une réponse sur ce point. Je pourrai vous la transmettre.

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Monsieur Cellier, sur les fake news, je vais tâcher de vous répondre avec prudence, puisque je me laisse parfois aller à faire des déclarations quelque peu polémiques… (Sourires.)

Le sociologue Gérald Bronner a écrit des choses extrêmement intéressantes sur l'information, les fake news, et la manière dont nous les percevons ; ce qu'il explique permet d'ailleurs de décoder pour une part les phénomènes de radicalisation. Il explique ainsi qu'il ne sert à rien de démontrer aux gens par A + B qu'ils ont tort, mais qu'il faut avant tout les éduquer et développer leur esprit critique.

Pour illustrer son propos, M. Gérald Bronner rapporte les résultats d'une étude sociologique réalisée aux États-Unis dans une secte dont les membres étaient persuadés que la fin du monde devait se produire, disons le 25 janvier 2008. Les auteurs de l'étude sont parvenus à s'infiltrer au sein de la secte, dont les membres se sont tous enfermés dans un bunker, dans les jours précédant cette fin du monde qu'ils attendaient. Or le 25 janvier 2008, la fin du monde ne se produisit évidemment pas, ce qui était la preuve la plus manifeste que leur croyance était fausse. Pourtant, les adeptes de la secte en déduisirent que c'est parce que leur foi était si grande que Dieu avait décidé de sauver l'humanité !

Cette histoire explique parfaitement le mécanisme d'adhésion aux fake news : vous aurez beau expliquer aux gens qui le contestent que les vaccins sont utiles, ils seront persuadés que vous êtes payé par l'industrie pharmaceutique pour les convaincre ; vous aurez beau leur expliquer que 800 études démontrent que l'homéopathie n'est rien de plus qu'un placebo, ils considéreront que ces études comportent des biais scientifiques.

Contre ce type de réactions, l'esprit de rationalité doit s'acquérir à l'école. Le ministre de l'éducation a élaboré un plan très ambitieux qui entend fournir aux élèves une culture générale numérique, qui englobe les problématiques liées aux contenus, notamment la préservation de la vie privée, abordées sous l'angle du sens critique.

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Transformons les cours de technologie en cours de numérique !

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Le problème est que cela prendra du temps, ce qui est d'autant plus regrettable que certains pays ou certains groupes d'intérêts étrangers n'hésitent pas à se servir pour leur profit de cette distorsion entre la capacité d'analyse globale des usagers d'internet et la masse d'informations disponibles.

Mme Petel, vous avez totalement raison, on devrait pouvoir téléverser directement certains documents en ligne. L'ANTS offre un excellent exemple de numérisation ratée corrigée par une très forte volonté de servir les usagers. Pour le dire autrement, il avait été décidé, dans le cadre de la transformation numérique des préfectures, que l'ensemble des démarches numériques seraient centralisées auprès de l'ANTS. Cela s'est probablement fait trop vite, ce qui a provoqué un engorgement terrible, notamment pour les cartes grises, puisqu'il y a eu jusqu'à 280 000 cartes grises en souffrance auprès de l'ANTS, dont le taux de réponse est descendu jusqu'à 30 %. Grâce cependant à la formidable mobilisation de ses personnels, ce taux est remonté aujourd'hui à 80 % et le stock de demandes en cours de traitement s'établit à 140 000, ce qui correspond à la normale. Non seulement le délai de délivrance des documents est aujourd'hui plus que correct, mais l'ANTS est également présente sur les réseaux sociaux via une page Facebook. Si je le souligne, c'est que toutes les études sociologiques montrent que les Français non métropolitains n'utilisent pas leur mail et qu'il n'y a donc pas de meilleur moyen pour les atteindre que de passer par Facebook. Il faut donc souligner les gros efforts qui ont été faits, mêmes si d'autres améliorations sont nécessaires, dont certaines accompagneront la refonte du site internet.

Vous avez émis l'idée d'un hit-parade des pires procédures numériques : ce n'est pas très différent de ce que nous avons fait en décidant d'évaluer chaque trimestre les 250 démarches en ligne les plus importantes, selon différents critères notés vert, orange ou rouge, ce qui permet de constater que certaines de ces démarches sont encore entièrement dans le rouge. Cette évaluation transversale est une première, qui va nous permettre, ministère par ministère, d'agir sur les points faibles de l'État, de manière que dans les années à venir, l'intégralité de ces démarches ait acquis une note de qualité satisfaisante.

En ce qui concerne les bus numériques, c'est une excellente initiative, qui sera, je pense, éligible, à partir de l'année prochaine, à l'appel à projets Pass numériques, imaginé pour soutenir ce type de projets, absolument essentiels.

Quant à La Plateforme du club Top 20, nous aurons l'occasion d'en reparler d'ici à quelques jours, lors de son inauguration. C'est une très belle initiative, qui va permettre, sous l'égide de M. Cyril Zimmermann, un entrepreneur du numérique, de financer chaque année la formation au numérique d'une centaine de personnes, souvent issues de milieux modestes, voire défavorisés, et peu qualifiées. Non seulement cette initiative doit être accompagnée mais il faut faire en sorte qu'elle essaime et que ce type de formations se multiplie sur le territoire.

Grâce à la Grande école du numérique, nous avons formé dix-neuf mille personnes sur ces trois dernières années, auxquelles il faut ajouter les douze mille personnes qui vont désormais être formées chaque année, chiffre que nous avons l'ambition, compte tenu de la réussite du dispositif, de multiplier par deux ou trois.

Monsieur Sempastous, la mission French Tech est un élément essentiel de notre action. Nous avons recruté une nouvelle directrice, qui approfondit sa dimension internationale et engage des développements ambitieux. Elle a tout notre soutien, sachant que nous lui avons demandé de se focaliser sur la croissance de l'écosystème, c'est-à-dire de travailler, territoire par territoire, sur la question de la formation pour faire en sorte que les entreprises puissent recruter les compétences dont elles ont besoin. J'ai pour cela demandé à Mme Muriel Pénicaud que son ministère mette à notre disposition des personnes spécifiquement affectées à cette mission.

La French Tech doit également poursuivre son rôle de soutien aux entreprises numériques, qui se développent et sont de plus en plus nombreuses à se situer dans une fourchette de valeurs comprises entre 500 millions et 1 milliard d'euros.

J'en profite ici pour souligner que, sous la pression de ces nouvelles entreprises, les administrations et les grandes entreprises installées sont souvent conduites à arbitrer entre décisions innovantes et défense de leurs positions ; cela se vérifie dans le secteur des auto-écoles mais aussi dans celui de la formation, de la santé ou encore de l'assurance. Il faut donc se faire à l'idée que faire ainsi émerger des entreprises disruptives entraîne nécessairement un bouleversement des équilibres en place.

Monsieur Lioger, le compteur Linky n'émet pas d'ondes, vous l'avez dit. Par ailleurs, on ne peut pas vouloir la transition énergétique et la production délocalisée d'énergies renouvelables par de mini-unités adaptées à la consommation locale, et ne pas avoir de suivi fin des consommations individuelles. Il faut évidemment protéger les données individuelles, mais je n'ai aucun doute sur le fait qu'Enedis et EDF en font une utilisation extrêmement précautionneuse – si ce n'était pas le cas, elles seraient immédiatement sanctionnées. Quoi qu'il en soit, je le répète, baisser notre consommation énergétique implique de pouvoir suivre instant par instant la consommation des uns et des autres et d'adapter la production d'électricité en fonction. C'est la raison pour laquelle la diffusion des compteurs Linky est essentielle en termes de transition énergétique.

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À quoi jugerez-vous que vous avez réussi dans vos trois missions ?

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Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Pour ce qui concerne l'écosystème numérique, je vais être ambitieux. J'aimerais que nous dépassions l'écosystème britannique avant la fin du mandat, sachant qu'ils sont à 7 milliards d'euros levés, que nous ne sommes qu'à 5 milliards et que nous étions encore à 2,5 milliards il y a deux ans.

Sur la question de l'identité numérique, nous le saurons en 2021 ; cela ne pourra être que 0 ou 1…

La régulation des grandes plateformes va pour une grande part se jouer au plan européen, mais je souhaite que nous posions les bases d'un système qui fonctionne. Cela prendra du temps, et je pense que cela incombera encore à mon successeur et au successeur de mon successeur. Nous tentons en tout cas d'avancer ; nous l'avons fait avec les contenus haineux et nous tenterons de le faire plus largement dans les mois qui viennent.

En matière d'inclusion numérique enfin, nous devons former plusieurs centaines de milliers, voire plusieurs millions de personnes avant la fin du quinquennat, sachant que nous aurions besoin de former six millions de personnes. Cela implique de multiplier les lieux de formation et d'enclencher une véritable dynamique collective.

J'en terminerai par un dernier point que je n'ai pas encore abordé : j'aimerais qu'il y ait plus de femmes dans la technologie, à mon départ. Elles sont 15 % aujourd'hui, ce qui est un problème en termes d'égalité mais également en termes de performances.

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Monsieur le secrétaire d'État, il me reste à vous remercier pour votre intervention et vos réponses, complètes, synthétiques, franches et transparentes.

Membres présents ou excusés

Réunion du mercredi 10 juillet 2019 à 16 h 30

Présents. - Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, Mme Barbara Bessot Ballot, M. Éric Bothorel, M. Anthony Cellier, M. Rémi Delatte, M. Daniel Fasquelle, Mme Christine Hennion, M. Antoine Herth, M. Jean-Luc Lagleize, Mme Laure de La Raudière, Mme Célia de Lavergne, M. Sébastien Leclerc, M. Roland Lescure, M. Serge Letchimy, M. Richard Lioger, M. Denis Masséglia, M. Mickaël Nogal, M. Éric Pauget, Mme Anne-Laurence Petel, M. Jean-Bernard Sempastous, M. Denis Sommer

Excusés. - M. Yves Blein, M. Philippe Bolo, M. Jean-Claude Bouchet, Mme Annaïg Le Meur, Mme Claire O'Petit, Mme Bénédicte Taurine

Assistaient également à la réunion. - M. Thibault Bazin, M. Pierre Cordier, Mme Virginie Duby-Muller