Commission des affaires sociales

Réunion du mercredi 14 décembre 2022 à 15h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à quinze heures.

La commission examine la proposition de loi, adoptée par le Sénat, créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales (n° 372 rectifié) (Mme Béatrice Descamps et M. Emmanuel Taché de la Pagerie, rapporteurs).

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Deux textes, transmis par le Sénat, sont inscrits cet après-midi à l'ordre du jour de notre commission. Le premier résulte d'une proposition de loi de notre collègue sénatrice Valérie Létard. Le second est issu d'une initiative de l'Assemblée nationale lors de la précédente législature.

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Le constat est sans appel : sur les 145 homicides recensés au sein du couple en 2021, 122 sont des féminicides ; 159 400 plaintes ont été déposées pour violences conjugales en 2020, et étaient en augmentation de 14 % en 2021. Cette situation infernale nous oblige en tant que législateurs aussi bien qu'en notre âme et conscience de femmes et d'hommes.

La proposition de loi créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales, dont l'entière maternité revient à notre collègue sénatrice Valérie Létard, elle-même travailleuse sociale, est une réelle occasion d'avancer. Adoptée à l'unanimité par le Sénat en octobre dernier, elle a pour ambition d'instaurer une avance que les caisses d'allocations familiales (CAF) accorderaient dans un délai exceptionnel de soixante-douze heures. À l'issue des auditions menées conjointement avec Béatrice Descamps, il nous est apparu judicieux de la voter conforme et en l'état. Dans l'esprit de sagesse qui a animé nos collègues sénateurs, il serait bon de l'aborder de façon transpartisane, consensuelle et coconstructive, dans le seul objectif de répondre rapidement à un problème crucial, devenu intenable en 2022.

Depuis 2017, le Président de la République a fait des droits des femmes et de l'égalité entre les femmes et les hommes une grande cause de ses quinquennats, et a lancé en 2019 le Grenelle contre les violences conjugales. Malgré la qualité du travail des ministères tutélaires – en particulier ceux d'Isabelle Rome et de Jean-Christophe Combe, avec lesquels nous avons eu de fructueux échanges –, nous sommes pourtant loin des objectifs fixés. Avec les crises sanitaire et sociale, les violences conjugales, notamment celles faites aux femmes, ont atteint un niveau insupportable. Lors des deux confinements liés à la covid-19, les violences sexistes et sexuelles concernaient 69 % des appels de victimes, ces situations de harcèlement, de contrôle mental et de violences se retrouvant dans l'ensemble de la société.

Les violences au sein du couple, du foyer ou par d'anciens partenaires ont des conséquences sociales et psychologiques qui nécessitent une réponse structurelle, matérielle et législative. Ce texte a pour objet d'extraire les victimes des griffes de leurs bourreaux, en lien avec les travailleurs sociaux. Pour 59 % d'entre elles, la nécessité de quitter le domicile est réelle ; seules 18 % le quittent avant d'y revenir. En dehors de l'oppression psychologique, le manque de ressources financières ou d'accès à ces ressources constitue le frein majeur au départ définitif. Le nombre des victimes de violences conjugales est ainsi supérieur à la moyenne chez les étudiants, les chômeurs, les inactifs non retraités, notamment les femmes au foyer, nombreuses à ne pas disposer de leur propre compte bancaire. Dans ce contexte, un départ est impossible.

La victime ayant souvent charge d'âme, les enfants entrent également en ligne de compte dans les violences économiques associées aux violences conjugales. Le contrôle financier peut aller jusqu'à la dépossession totale des moyens d'autonomie de la victime – cela a été montré lors d'un colloque consacré à la lutte contre les violences économiques au sein du couple, organisé en 2020 par la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, à laquelle Béatrice Descamps et moi-même appartenons. Ces violences se prolongent après la séparation, notamment par le non-versement des pensions alimentaires. Le Gouvernement a répondu à ce problème en créant un dispositif de recouvrement par la CAF d'une pension alimentaire non versée.

Avec la présente proposition de loi, il s'agit, non pas de travailler dans l'urgence, mais de répondre à l'urgence. Les amendements déposés témoignent de la volonté de chacun de s'associer activement et positivement à son adoption. De son côté, le Gouvernement pourrait reprendre, dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS) pour 2023, la proposition d'examiner l'intérêt à ce que les caisses de Mutualité sociale agricole (MSA) procèdent, aux côtés des CAF, au versement de l'avance d'urgence en faveur des victimes de violences conjugales.

Ce texte nous offre la possibilité d'avancer concrètement ensemble. Nos engagements politiques prennent racine dans notre intimité : si, il y a trente ans, ma mère avait bénéficié de cette aide, le chemin de sa résilience aurait certainement été plus court et plus serein.

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Une expérimentation en cours dans le Valenciennois est à l'origine de cette proposition de loi de la sénatrice Valérie Létard, dont la rapporteure au Sénat était Jocelyne Guidez. Nous saluons la qualité de leur travail et de leur engagement.

L'article 1er crée une avance d'urgence en faveur des victimes de violences conjugales, financée par la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). Cette avance, octroyée par les CAF serait versée en trois mensualités, la première intervenant dans les trois jours suivant le dépôt de la demande, de sorte à répondre au besoin des victimes de disposer rapidement de moyens pour faire face aux dépenses contraintes.

Quitter le domicile est une étape difficile. De nombreuses victimes repoussent le moment de leur rupture ou décident de revenir au domicile du couple en raison de la précarité économique – l'indépendance économique est si difficile à retrouver.

Le dispositif est largement ouvert. Il est accessible sans condition de ressources à toute personne victime de violences conjugales, dès lors qu'une plainte a été déposée, qu'une ordonnance de protection a été délivrée ou que le procureur de la République a été saisi par une tierce personne. Ce dernier critère a été mis en avant lors des auditions, de telle sorte que des personnes qui ne se seraient pas engagées dans des démarches judiciaires volontaires mais dont la situation de victime aurait été signalée, par exemple par un professionnel de santé, puissent bénéficier de l'avance d'urgence.

Plus qu'une simple aide financière, le dispositif s'accompagne du droit de bénéficier des droits accessoires à la prestation du revenu de solidarité active (RSA), notamment de l'accompagnement social et professionnel attaché. Cet accompagnement est global et coordonné par les services du département.

Pour que le soutien financier puisse être universel, il fallait qu'il prenne la forme d'une avance plutôt que d'une aide, car les aides sont souvent soumises à condition de ressources ou d'âge. Les CAF pourront néanmoins prendre en compte la situation financière de la personne pour échelonner, voire annuler, les remboursements.

La proposition de loi institue, par ailleurs, un mécanisme original de subrogation des CAF dans les droits des victimes à se constituer partie civile pour demander la réparation du préjudice subi. Sauf si le conjoint est insolvable, la CAF pourrait ainsi récupérer la somme avancée à la victime sur les dommages et intérêts. L'idée est de faire payer l'auteur des violences pour une situation dont il est responsable.

Pour faciliter les démarches des victimes, l'article 2 prévoit que l'officier ou l'agent de police judiciaire qui reçoit une plainte doit informer la victime de la possibilité de toucher cette avance, enregistrer la demande et la transmettre à la CAF compétente ainsi qu'au conseil départemental.

L'instauration d'une avance d'urgence est demandée par un grand nombre d'associations représentant les victimes de violences conjugales. Avoir une capacité financière est la pierre angulaire de leur reconstruction. Nous avons conscience du travail mené par le Gouvernement, notamment par les ministres Isabelle Rome et Jean-Christophe Combe, et les en remercions.

Nous avons l'occasion d'agir pour toutes les victimes de violences conjugales et leurs enfants, ces témoins qui souffrent tellement de ces situations. Nous vous proposons un texte équilibré, qui dépasse les clivages politiques – il a été adopté à l'unanimité en première lecture au Sénat et est attendu par tous. L'urgence de la situation nous commande de ne pas en retarder l'adoption. C'est pourquoi nous vous invitons à le voter conforme. Soyons à la hauteur des enjeux !

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Depuis plus de cinq ans, la majorité et le Gouvernement ont fait de la lutte contre les violences intrafamiliales l'une de leurs grandes priorités. Le Sénat a pu aborder ce sujet grave dans la sérénité et le calme requis ; nous saurons, je l'espère, en faire de même à l'Assemblée.

S'il y a une chose – la seule peut-être – sur laquelle nous sommes tous d'accord, c'est que nous devons agir plus vite et plus fort pour que les victimes de violences conjugales parviennent à quitter définitivement leur conjoint violent. Cet enjeu, nous ne pouvons pas le considérer à travers le seul prisme de la réponse judiciaire. De nombreuses raisons empêchent les victimes de violences de se mettre en sécurité, au premier rang desquelles la précarité financière.

Je salue la proposition de loi de la sénatrice Valérie Létard, qui nous permet d'aborder le sujet encore tabou, mais pourtant bien réel, des violences économiques. Reste à s'assurer que l'objectif que nous avons déterminé comme commun à tous est servi de manière optimale par ce texte et sans mettre en péril les nombreux dispositifs déjà déployés dans nos territoires – par exemple, l'aide d'urgence de 1 500 euros accordée par la Côte-d'Or aux femmes victimes de violences, ou l'aide au départ d'urgence financée par la CAF de la Somme, d'un montant de 500 euros, plus 200 euros par enfant.

Nous avons choisi une démarche simple : nous disons mille fois oui à toujours plus d'aides pour aider efficacement et rapidement les victimes de violences conjugales, et les mettre à l'abri ; avec un objectif identique à celui de la proposition de loi, nous voulons trouver la meilleure solution pour les victimes et ne pas pénaliser une aide qui pourrait peut-être s'avérer contre-productive. Le groupe Renaissance votera ce texte, en espérant qu'il puisse être enrichi par les députés, de façon transpartisane, et en veillant à sécuriser les dispositifs proposés.

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Le sujet des violences conjugales est de ceux qui ne suscitent pas de désaccords de fond, qu'il s'agisse d'offrir un meilleur accueil aux victimes ou de mettre davantage de moyens à leur disposition pour les aider à s'extraire rapidement d'une telle situation. Personne ne peut être contre le fait de permettre aux victimes de se reconstruire.

Selon les services de police et de gendarmerie, en métropole, 5 % des femmes ont subi des violences conjugales. Bien que le ministère n'ait recensé « que » 150 000 plaintes, ces violences font des centaines de milliers de victimes et ont tué 122 femmes en 2021.

Le groupe Rassemblement National a décidé de défendre ce texte, car il y a urgence à faire plus et mieux que ce qui a été fait jusqu'à présent. Nous nous montrerons largement à l'écoute, car, sur un tel sujet, il ne saurait y avoir d'opposition – les désaccords ne sauraient être que de l'ordre du détail.

L'article 1er de la proposition de loi présente l'avantage de s'appuyer sur une expérimentation réussie. L'article 2 est un levier intéressant d'accélération du processus.

Je remercie Mme Létard, grâce à qui nous bénéficions d'un texte solide pour faire avancer les droits des femmes.

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Nous partageons le constat : les femmes victimes de violences conjugales rencontrent souvent un obstacle financier lorsqu'elles cherchent à quitter leur compagnon et à reconstruire leur vie. Elles ont besoin d'une aide financière immédiate.

C'est pourquoi nous sommes dubitatifs sur la forme choisie pour cette aide : un prêt ne sera d'aucune efficacité pour extraire les victimes d'une situation dangereuse et précaire, sauf peut-être pour les femmes qui ont un emploi stable. Pour toutes les autres, celles qui n'ont pas d'emploi, celles dont les ressources ont été confisquées par leur partenaire ou qui sont obligées de partir loin pour le fuir et qui perdent leur emploi, l'aide proposée n'est pas suffisante. Un prêt sur trois mois ne peut remédier aux incertitudes financières, qui sont souvent à l'origine d'un retour en arrière auprès de leur compagnon violent. Sans compter qu'il risque de placer la victime en situation d'endettement.

L'aide apportée doit être sans contrepartie et s'inscrire dans une approche globale, qui prenne en compte l'ensemble des besoins des victimes – hébergement, accompagnement social, juridique, psychologique. Actuellement, quatre femmes victimes de violences sur dix ne se voient proposer aucune solution quand elles demandent un hébergement. Quant aux autres, ce n'est pas un prêt sur trois mois qui leur permettra de quitter définitivement leur partenaire.

La proposition de loi n'aura aucun effet sur l'accompagnement des victimes, qui est pourtant crucial dans la réponse au problème.

Pour ces raisons, notre groupe s'abstiendra, à moins que le dispositif puisse être amélioré par l'adoption de certains de ses amendements.

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La proposition de loi va dans le bon sens, car la dépendance financière est un frein majeur pour sortir des situations de violence et les dénoncer. La violence économique d'un conjoint est caractéristique de l'emprise exercée sur la victime.

Une avance d'urgence pour les victimes de violences conjugales n'est pas négligeable pour placer elles-mêmes et leurs enfants en sécurité économique. L'article 1er crée le dispositif : large, facile à demander, à proposer et à attribuer, il est à saluer. L'article 2 fait obligation aux agents ou officiers judiciaires recevant une plainte pour violences conjugales d'informer les victimes de la possibilité de bénéficier d'une avance d'urgence. Il est souhaitable qu'ils puissent bénéficier d'une formation sur ces sujets. Sans doute aussi sera-t-il nécessaire d'augmenter les effectifs de police et de gendarmerie.

Le groupe Les Républicains votera la proposition de loi.

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Personne ne met en doute la nécessité de lutter contre les violences intrafamiliales, qui touchent toutes les catégories sociales. Une fois engagé, le cycle des violences ne s'arrête pas et les enfants en sont les victimes collatérales. L'enjeu fondamental est alors le départ de la victime ou l'éviction de l'agresseur du domicile.

Cette étape est difficile. À la crainte de perdre la garde de ses enfants et la peur des représailles s'ajoutent les freins financiers liés à l'absence de ressources ou l'insuffisance de revenus. On parle alors de violence économique. Penser une aide permettant de se libérer du joug du conjoint est donc primordial.

Contrairement à ce que suggère son titre, avec ce prêt remboursable, la proposition de loi ne tend pas à instituer une « aide universelle ». Les critères d'entrée – ordonnance de protection, dépôt de plainte ou signalement – semblent trop restrictifs. La subrogation des CAF dans les droits des bénéficiaires des avances pour se constituer partie civile afin de demander la réparation du préjudice pourrait avoir un effet contraire à celui recherché, en introduisant des liens de dépendance financière entre l'auteur des violences et sa victime. Quant au déblocage des fonds en soixante-douze heures, il faut vérifier qu'il est réalisable dans toutes les situations.

À nos yeux, l'essentiel est de veiller à l'effectivité du dispositif. L'expérimentation sur laquelle il se fonde a débuté le 7 novembre et d'autres sont en cours. Il est encore trop tôt pour savoir ce qui fonctionne ou non. Avant de l'étendre à l'ensemble des départements, nous souhaiterions une expérimentation à plus grande échelle, sous la forme d'une aide et non d'une avance. Ces améliorations feront l'objet des amendements du groupe Démocrate.

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Depuis le début de l'année, 124 féminicides ont été commis, et près de 225 000 femmes sont victimes chaque année de violences conjugales. Parmi les raisons qui empêchent les victimes de se protéger, on trouve notamment la précarité, les difficultés financières après la rupture ou l'incertitude de trouver un logement. Cette situation place souvent les victimes dans une situation de dépendance insupportable.

Faisant suite à une expérimentation dans le département du Nord, la proposition d'avance d'urgence, pour insuffisante et temporaire qu'elle soit, constitue pourtant une respiration bienvenue dans un moment de survie.

Ces violences qui se déroulent dans les foyers touchent aussi 80 000 enfants. C'est pourquoi nous avions déposé des amendements tendant à étendre le dispositif aux violences intrafamiliales, pour les y inclure. À l'exception d'un amendement portant sur le titre, ils ont été jugés irrecevables.

Reste que la proposition de loi constitue une avancée ténue pour enrayer la violence. Nous espérons pouvoir aboutir, soit en commission soit en séance, à un dispositif pérenne plutôt qu'à une expérimentation. Il y a urgence à avancer, pour que les femmes disposent des moyens de leur émancipation et que les victimes puissent se libérer de leurs bourreaux.

Pour Jacqueline, Christine, Karima, Simone, Lucette et toutes les autres, le groupe Socialistes et apparentés votera le texte, dans un esprit de construction dont il est souhaitable qu'il permette d'atteindre l'unanimité.

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La proposition de loi crée une aide d'urgence financière aux victimes de violences conjugales, sous forme d'un prêt accordé en trois mensualités par les CAF. Son objectif est d'aider les personnes en situation précaire à quitter le domicile conjugal, afin d'endiguer le nombre de victimes de violences. Notre collègue sénatrice Valérie Létard s'est constamment engagée sur ces questions.

Le texte trouve son origine dans un dispositif expérimental mené à Valenciennes avec la CAF du Nord, et restreint aux bénéficiaires du RSA. Il établit un accompagnement global coordonné par les services sociaux du département, complété par un versement sous deux ou trois jours, d'une avance monétaire équivalente au RSA.

Siégeant au conseil départemental du Nord aux côtés de Béatrice Descamps et de Charlotte Parmentier-Lecocq, je me réjouis de voir inscrit à l'ordre du jour ce texte qui propose d'étendre l'expérimentation locale au niveau national avec la création d'une nouvelle prestation versée par les CAF. La mise à l'abri de la victime et l'affirmation de son indépendance financière sont des objectifs cruciaux que nous devons atteindre pour lutter efficacement contre le fléau des violences intrafamiliales et conjugales.

Le groupe Horizons et apparentés souscrit pleinement à cet objectif, qui pourrait permettre de prévenir des dommages plus graves sur des victimes de violences restées au domicile.

Cependant, une véritable aide universelle d'urgence ne serait-elle pas plus pertinente qu'un prêt, avec des versements plus adaptés aux besoins des victimes ? Comment inclure les victimes issues du monde agricole, donc la MSA ? Enfin, la proposition de loi introduit une charge de travail supplémentaire pour les agents de police et de gendarmerie, qui doivent réaliser eux-mêmes certaines démarches quand aucun travailleur social n'est présent.

Malgré ces interrogations, qui trouveront peut-être une réponse dans les débats, le groupe Horizons et apparentés soutiendra la proposition de loi.

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La proposition de loi répond au besoin d'une aide urgente socialement. Les femmes victimes de violences conjugales subissent celles-ci de manière récurrente et ont les pires difficultés à partir de chez elles en raison, non seulement de l'emprise du conjoint, mais aussi des incertitudes financières auxquelles ce départ les expose.

Si son déblocage en deux ou trois jours est intéressant, cette aide ponctuelle est un prêt, pour trois mois. Il s'agit non d'un investissement en matière d'hébergement ou d'accompagnement, mais d'une aide personnalisée avec laquelle les femmes devront trouver elles-mêmes un logement – c'est sans aucun doute une amélioration par rapport à la situation existante.

Bien que des aménagements soient prévus, le prêt devra être remboursé, et possiblement sur les dommages et intérêts attribués aux femmes dans le cadre de procès, c'est-à-dire sur des sommes qu'elles vont percevoir au titre des traumatismes qu'elles ont subis du fait des violences conjugales. Cela ne semble pas très indiqué. Le non-remboursement du prêt se verrait appliquer les mêmes règles que les fraudes aux allocations : majorations ou procédures de recouvrement.

Le groupe Écologiste - NUPES) persiste à demander 1 milliard d'euros pour la lutte contre les violences conjugales. Il n'est pas certain de voter en l'état la proposition de loi, qui ne propose pas une mise à l'abri, mais un prêt d'urgence dont les modalités de remboursement sont sujettes à interrogation.

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Nous voulons tous améliorer l'accompagnement des victimes de violences conjugales et il reste beaucoup à faire. Même s'il est modeste, ce texte a tout de même le mérite de nous fournir un outil supplémentaire. Certes, la priorité devrait être l'éviction de l'auteur des violences du domicile conjugal, mais l'urgence impose surtout de mettre les victimes à l'abri. Encore faudrait-il que le Gouvernement garantisse un nombre suffisant de places en centres d'hébergement et de réinsertion sociale. La dépendance économique dans laquelle les victimes se trouvent vis-à-vis de leur conjoint les empêche souvent de partir, quel que soit leur niveau de revenus.

L'avance d'urgence proposée par ce texte est intéressante, parce qu'elle s'adressera à plus de monde que les aides existantes, souvent soumises à des conditions de ressources, et qu'elle aura un caractère immédiat. Le prêt n'est certes pas une solution idéale, mais il permettra aux femmes de s'extirper rapidement d'un environnement dangereux. En fonction de la situation financière de la personne, un échelonnement, voire une annulation des remboursements sera envisageable. En outre, les victimes pourront bénéficier d'un accompagnement social et professionnel, au même titre que les bénéficiaires du RSA, qui garantira leur indépendance économique. Enfin, on sait combien les victimes sont mal informées de leurs droits : l'article 2 prévoit qu'elles recevront les informations relatives à l'avance d'urgence dès leur dépôt de plainte.

Nous voterons pour ce texte, adopté à l'unanimité au Sénat.

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Je tiens à saluer Valérie Létard pour son travail. Ce texte n'est sans doute pas parfait, mais il constitue une avancée majeure, et il est dommage qu'il ne suscite pas une adhésion unanime. Madame Rousseau, je m'étonne de votre intervention : je pensais que vous alliez demander que cette aide concerne aussi bien les hommes que les femmes victimes de violences.

L'article 2, relatif au dépôt de plainte, m'inquiète un peu : il va nécessiter davantage de moyens et de personnels, notamment de travailleurs sociaux. Alors que 124 femmes sont décédées depuis le début de cette année sous les coups de leur conjoint, alors que des enfants sont témoins de ces violences, nous devons tout faire pour soustraire femmes et enfants à la violence, en y mettant les moyens nécessaires. C'est ce qu'attendent nos concitoyens.

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Les manœuvres du Rassemblement National pour s'approprier le travail de Valérie Létard sont inadmissibles. Béatrice Descamps me semble avoir plus de légitimité pour défendre cette proposition de loi, et je suis heureuse qu'elle le fasse à titre principal.

Je partage totalement l'objectif de ce texte : il faut aider les femmes victimes de violences conjugales à sortir le plus rapidement possible de leur situation. C'est, en effet, par l'argent qu'elles auront les moyens de le faire, mais il faut encore travailler pour le leur procurer à titre d'aide plutôt que sous forme de prêt.

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Cette proposition de loi va dans le bon sens, tout le monde en convient, mais il faut aller plus loin et sortir de cette logique de prêt : ce n'est pas ce qu'il faut proposer à une personne qui cherche à fuir les violences de son conjoint. C'est moralement impossible et politiquement très en dessous de ce qu'exige la lutte contre les violences sexistes et sexuelles.

Il faut retravailler ce texte en vue de la séance, puis nous doter d'une véritable loi-cadre pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles.

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Ce texte est perfectible et je suis certaine que nous pourrons l'améliorer, si nous sommes d'accord sur son principe et sur ce qu'il va apporter à ces femmes et à ces familles.

Pourquoi un prêt ? Pour répondre à cette question, je dois dire un mot de la genèse de ce texte. L'expérimentation qui l'a inspiré, dans le Valenciennois – pour rappel, nous avons, dans le Nord, la plus grande CAF de France –, a été lancée il y a peu de temps, mais nous avons commencé à y travailler pendant que celle-ci se préparait. Nous voulions aller plus loin que l'expérimentation, qui cible les seules personnes bénéficiant du RSA. D'ailleurs, pour les collègues qui ont souligné que les victimes avaient besoin de davantage qu'une aide financière, j'ai bien dit qu'il s'agit d'un accompagnement global et qu'au prêt s'ajoute un accompagnement social et professionnel.

Comme vous, j'ai d'abord été étonnée que Mme Létard ait choisi la solution du prêt. Elle m'a expliqué qu'une aide n'est jamais universelle parce qu'un certain nombre de critères y sont toujours attachés. Si Mme Létard a fait le choix du prêt, c'est au nom de l'universalité. La présence d'enfants constituera néanmoins un critère susceptible d'augmenter le montant du prêt ; cela sera fixé par décret. Un autre élément de ce choix est la capacité financière des CAF. Nous sommes là pour réfléchir à toutes ces questions.

L'un de vous a utilisé le mot « respiration » : c'est vraiment l'objet de ce texte que d'offrir une respiration à ces femmes et de leur permettre de partir avec leurs enfants. Lorsque la femme n'arrive pas à partir et que les enfants sont témoins de violences, ils sont souvent retirés à leur famille par la suite – cela aussi a un coût. Il est donc essentiel d'aider la victime à partir avec ses enfants. Lorsqu'elle est prête à partir, il faut lui donner les moyens de ne pas revenir et l'accompagner, en tenant compte de ses besoins et de sa situation financière ou professionnelle.

Il est vrai que d'autres expérimentations ont lieu dans d'autres départements, mais il semble qu'elles n'aient pas le caractère d'universalité que nous recherchons.

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Nous avons discuté de cette question du prêt avec les cabinets des ministres. Les CAF octroient déjà toutes sortes de prêts : pour l'équipement mobilier et ménager, l'amélioration de l'habitat, l'achat d'une caravane pour les gens du voyage, les frais juridiques liés à la séparation, etc.

Tous les groupes ont envie d'avancer sur cette question et j'en suis heureux. Madame Parmentier-Lecocq, j'ai bien rappelé, dans mon propos liminaire, que l'entière maternité de ce texte revenait à Mme Létard. Nous avons voulu travailler ensemble, afin d'accélérer les choses, mais notre démarche n'interfère en rien avec le « pack nouveau départ » auquel le Gouvernement travaille.

J'ai auditionné la conseillère déléguée aux violences faites aux femmes d'Arles, la ville principale de ma circonscription. Elle a regretté que le dispositif n'inclue pas la MSA. Le Gouvernement devrait sans doute, au travers d'un PLFRSS, intégrer la MSA à ce dispositif. Voilà une disposition qui irait dans le sens de l'universalité.

Avant l'article 1er

Amendement AS1 de Mme Sandrine Rousseau.

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Cette proposition de loi constitue une avancée, mais elle ne va pas assez loin. Il faut davantage qu'une aide financière ponctuelle et c'est pourquoi nous demandons, avec cet amendement d'appel, la création d'une loi de programmation pluriannuelle des financements visant à lutter contre les violences faites aux femmes. Cette loi déterminera la trajectoire des finances publiques en matière de prévention et d'accompagnement des femmes victimes de violences pour trois périodes successives de cinq ans. Elle se fondera sur une évaluation des besoins des personnes victimes de violences au sein de leur couple, au sein de leur famille, menacées de mariage forcé ou contraintes de quitter leur logement après des menaces de violence ou des violences subies effectivement.

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Bien que nous partagions votre objectif de nous donner les moyens de lutter contre les violences conjugales, cet amendement ne nous semble pas opportun. Il serait inopérant, puisque c'est une injonction que le Parlement se fait à lui-même. Or le Parlement est toujours souverain. Par ailleurs, la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes sont déjà incluses dans le projet annuel de performances du programme Égalité entre les femmes et les hommes du projet de loi de finances.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

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Il faut effectivement augmenter de façon constante les crédits alloués à la lutte contre les violences faites aux femmes. C'est d'ailleurs ce que nous faisons depuis plus de six ans. Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023, nous avons acté ensemble une hausse inédite de 15 % de ces crédits. Nous voterons donc contre votre amendement. Concentrons-nous sur ce texte et essayons, ensemble, de transformer ce prêt en aide.

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Ce n'est pas cette augmentation de 15 % qui va changer les choses : il faudrait cinq à dix fois les budgets actuels. Il est regrettable que vous ayez réduit le nombre de places d'hébergement d'urgence, alors qu'on examine un texte qui doit permettre aux victimes de trouver rapidement un endroit où dormir après avoir quitté leur conjoint. Voter une augmentation des crédits à la petite semaine n'est pas satisfaisant. Il faut une loi pluriannuelle et nous voterons cet amendement.

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Un effort historique a été consenti depuis cinq ans pour lutter contre les violences faites aux femmes, malgré un budget contraint, mais je trouve intéressante l'idée d'une programmation pluriannuelle.

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Je dois dire que j'ai été agréablement surpris par cet amendement : il est loin d'être sot et me semble pertinent, mais Béatrice Descamps a expliqué en quoi il était inopérant. Rien ne nous empêche, toutefois, de procéder à des évaluations.

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Je suis choquée par la réponse du rapporteur : le mot « sot » n'a pas sa place dans nos débats.

Notre collègue du groupe Renaissance dit vouloir travailler à transformer le prêt en aide : c'est aussi ce que souhaite le groupe Écologiste - NUPES et nous avons déposé de nombreux amendements en ce sens. Il faut un vote massif en commission pour réécrire ce texte et arriver en séance avec une proposition satisfaisante. Nous proposerons aussi de supprimer la consignation et d'élargir la liste des professionnels qui pourront constater les violences pour aller vers le dépôt de plainte.

Notre proposition n'est pas parfaite, mais ce serait un pas en avant et je compte sur la mobilisation de tous les groupes.

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Il serait préférable de voter ce texte conforme, si l'on veut accélérer sa mise en œuvre, mais il est vrai que cet amendement est intéressant.

Il est essentiel, si l'on veut lutter contre les violences intrafamiliales, d'aider les femmes qui veulent quitter leur foyer à le faire. Même si nous pensons tous que c'est la personne violente qui devrait partir, dans les faits, l'urgence est souvent de mettre la femme et les enfants à l'abri.

La « loi Pradié » de 2019 a introduit un dispositif qui permet l'attribution en urgence d'un logement aux victimes de violences sur le contingent de logements réservés à l'État. Cette disposition fonctionne très bien dans certains territoires, comme le Valenciennois ou le territoire de Belfort, mais ce n'est pas le cas partout, notamment dans les grandes villes, où l'on manque de logements. Une programmation pluriannuelle permettrait de doter notre pays des logements nécessaires. Cet amendement n'est peut-être pas tout à fait à sa place et son adoption retarderait l'entrée en application du texte, mais il soulève une vraie question.

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Depuis la loi du 28 décembre 2019, une personne victime de violences peut saisir le juge aux affaires familiales et obtenir une ordonnance de protection dans un délai de six jours. Le juge peut attribuer le domicile conjugal à la personne victime des violences – et c'est ce qu'il fait. Les choses ont vraiment changé depuis 2019 : désormais, les victimes peuvent trouver refuge chez elles. D'autres mesures peuvent également être prises, comme l'interdiction faite à l'auteur des violences de se rendre au domicile de la victime.

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Cet amendement n'arrive peut-être pas au bon moment dans le débat, mais il est absolument nécessaire que nous ayons une loi de programmation pluriannuelle pour assurer la montée en puissance des moyens de la lutte contre les violences conjugales. Je vous invite donc à voter cet amendement, qui ne changera pas la substance du texte, mais qui constituera un acte fort et donnera plus de lisibilité à nos politiques.

La commission rejette l'amendement.

Article 1er : Avance d'urgence à destination des victimes de violence conjugales

Amendement AS20 de Mme Sandrine Rousseau.

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Il s'agit de mettre en cohérence l'objet de la proposition de la loi visant à « créer une aide universelle d'urgence » et le cœur de son dispositif, en le réécrivant.

Il est ainsi proposé que l'aide d'urgence prenne la forme d'une créance de la victime sur son bourreau débiteur, pour laquelle la CAF peut se subroger au droit du créancier afin de procéder à son recouvrement. Nous proposons que l'ensemble des modalités de calcul et de recouvrement soient prises par décret en Conseil d'État.

Dans cette perspective, cette aide ne crée aucune charge pour les organismes et services de prestations familiales concernés. Ce ne sont pas les dommages et intérêts qui seront mis à contribution, mais bien la puissance financière du conjoint violent.

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Vous proposez, avec cet amendement et ceux qui suivent, de transformer l'avance d'urgence en aide financière non soumise à remboursement. Nous avons préféré l'avance à l'aide, parce que nous souhaitons que ce dispositif soit universel. Une aide serait forcément soumise à des conditions de ressources. C'est pourquoi nous avons explicitement précisé que des remises et des réductions de créances pourront être consenties, si le débiteur est en difficulté. Dans tous les cas, l'auteur des violences doit payer pour une situation dont il est responsable.

Pour ces raisons, et parce que nous pensons qu'il faut voter ce texte conforme, compte tenu de l'urgence, je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.

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En substituant une aide à un prêt, cet amendement – que nous soutenons – illustre notre divergence initiale.

La commission rejette l'amendement.

La réunion est suspendue de seize heures à seize heures cinq.

Amendement AS21 de Mme Sandrine Rousseau.

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Il convient de substituer au terme « avance » celui d'« aide » afin d'éviter les écueils que nous avons tous signalés.

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Pour les raisons déjà exprimées, demande de retrait ou avis défavorable.

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Une telle substitution éviterait en effet de faire des femmes victimes de violences des débitrices, même si leur dette pourrait être épongée, annulée ou recouvrée sur des dédommagements civils.

M. le rapporteur estime que cette proposition de loi n'a fait l'objet d'aucun piratage. Or, lorsque l'on dépose une proposition de loi dans une niche parlementaire sans le consentement de son auteur initial, on n'est pas loin du détournement et de la piraterie, ce qui n'est pas acceptable. Cela explique aussi pourquoi nous avons voté contre la désignation de M. Taché de la Pagerie comme rapporteur.

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Nous sommes favorables à la transformation de ce prêt en aide mais, malgré l'urgence, nous ne pouvons agir dans la précipitation. Je suis convaincue que nous parviendrons à trouver une solution ensemble d'ici à la séance publique.

Oui, donc, à la transformation de l'avance en aide, mais la création d'une créance à la charge du conjoint violent n'est juridiquement pas applicable. Nous devrons donc réfléchir aux moyens de lever cet obstacle. De plus, cette créance placerait la victime en position de faiblesse en recréant une forme de dépendance financière.

Le travail auquel je nous invite collectivement ne vise pas à mettre au crédit de la majorité les avancées qui seront proposées, mais à en faire l'œuvre collective de l'ensemble des parlementaires.

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Un dispositif analogue à celui que nous proposons existe déjà pour les pensions alimentaires. Ce n'est pas la victime qui est dans une position de dépendance vis-à-vis de son agresseur puisque c'est la CAF qui se tourne vers ce dernier.

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C'est en effet la majorité présidentielle qui a institué cette belle avancée sociale lors du précédent quinquennat.

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Je suis d'accord avec Mme Thevenot. J'aurais voté pour cet amendement s'il s'était simplement agi de substituer une aide à un prêt, mais l'instauration d'une créance de la victime sur son bourreau me gêne en raison de la relation qu'elle institue entre les deux conjoints, même si la CAF est en effet en position médiane.

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Le dispositif relatif aux pensions alimentaires constitue une véritable avancée. Celui que nous proposons en est une également par rapport à un texte où l'avance repose sur des dommages et intérêts, lesquels ne visent qu'à compenser un trauma.

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Je vous invite plus simplement à un retrait afin que nous le retravaillions ensemble en vue de la séance publique. Nous sommes tous d'accord sur les objectifs et nous parviendrons à un accord dans l'hémicycle.

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Nous voulons en effet parvenir à un accord. Il n'est pas question qu'un tel texte n'aboutisse pas.

Nous sommes tous capables de faire abstraction des difficultés qui ont été soulignées sur la paternité de cette proposition de loi, et de considérer que seul compte l'intérêt des femmes victimes de violences et de leurs enfants. Ne nous précipitons pas ! Travaillons ensemble ! Ce texte ne sera pas le fait d'un groupe politique mais de l'ensemble des députés. Le Sénat est parvenu à des avancées et il est de notre responsabilité d'enrichir encore cette proposition.

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En droit, il est impossible de substituer un débiteur à un autre. La CAF s'inscrit dans un système d'intermédiation en faveur du créancier et elle se retourne ensuite vers le débiteur initial.

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Je retire l'amendement compte tenu de l'engagement solennel à travailler ensemble à un amendement commun pour la séance publique.

L'amendement est retiré.

Amendement AS12 de Mme Sandrine Rousseau.

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L'amendement vise à s'assurer que ce dispositif d'aide d'urgence bénéficiera d'une large communication auprès du plus grand public possible afin que les femmes soient encouragées à fuir leur domicile conjugal. Il importe donc que la CAF s'engage à une telle publicité, quelles qu'en soient les formes.

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Une telle communication va de soi. L'existence du dispositif sera signifiée à la personne qui dépose une plainte ou par un travailleur social. Je vous invite à retirer votre amendement.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS13 de Mme Sandrine Rousseau.

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L'amendement vise à élargir la liste des actes permettant d'attester les violences ouvrant droit à cette aide. Selon la Fondation des femmes, seules 18 % d'entre elles portent plainte et 7 % déposent une main courante ou un procès-verbal de renseignement judiciaire.

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Votre amendement vise à ouvrir ce dispositif aux personnes ayant simplement déposé une main courante. Or notre intention est d'obtenir un avis conforme afin que les dispositions du texte entrent en vigueur le plus rapidement possible.

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Pour sa bonne application, notre dispositif doit être encadré et nous pensons que la condition minimum d'une plainte, d'un signalement au procureur de la République ou d'une ordonnance de protection est suffisante.

Demande de retrait.

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Il faut certes tout faire pour accélérer la sécurisation des femmes victimes de violence et de leurs enfants. Or votre proposition serait irrecevable en l'état du droit, dont une réforme retarderait considérablement l'application du texte.

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Une main courante est en effet une simple déclaration. En revanche, une plainte, une saisine du procureur de la République entraînent le déclenchement de l'action publique, donc, une enquête. Une simple main courante serait en l'occurrence très légère.

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Une main courante peut être automatiquement transformée en plainte dès lors qu'il s'agit de violences conjugales. Pour les nombreuses femmes qui n'ont pas le courage de déposer plainte dans un premier temps, c'est à cette étape que l'action publique pourrait commencer.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS3 de Mme Sandrine Rousseau.

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L'amendement vise à élargir le nombre de professionnels habilités à constater des faits de violences psychologiques et physiques, puisque le dispositif n'intègre pas les femmes qui ne porteraient pas plainte ou dont les violences subies n'ont pas été constatées par un juge.

En 2019, on a estimé à 213 000 en moyenne le nombre de femmes âgées de 18 à 75 ans qui, chaque année, sont victimes de violences physiques et/ou sexuelles commises par leur conjoint ou ex-conjoint. Parmi elles, 18 % seulement déclarent avoir déposé une plainte en gendarmerie ou en commissariat de police.

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Votre amendement est déjà satisfait par le droit existant. L'article 226-14 du code pénal reconnaît la possibilité pour tout médecin ou professionnel de santé « de porter à la connaissance du procureur de la République une information relative à des violences exercées au sein du couple lorsqu'il estime en conscience que ces violences mettent la vie de la victime majeure en danger immédiat et que celle-ci n'est pas en mesure de se protéger en raison de la contrainte morale résultant de l'emprise exercée par l'auteur des violences ».

Le médecin ou le professionnel de santé doit s'efforcer d'obtenir l'accord de la victime majeure. En cas d'impossibilité, il doit l'informer du signalement fait au procureur de la République.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

La réunion est suspendue de seize heures vingt-cinq à seize heures quarante.

Amendement AS5 de Mme Sandrine Rousseau.

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Il s'agit de revenir à la proposition de loi initiale visant à ce que l'aide soit versée dans un délai de deux jours et non trois.

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Je comprends le sens de votre amendement mais, selon les CAF et la Cnaf, un tel délai serait impossible à tenir, notamment lors des week-ends ou des vacances.

Avis défavorable.

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Le délai de quarante-huit heures ne me semble en effet pas raisonnable, d'autant que toutes les personnes concernées ne seront pas allocataires de la CAF. Le délai de soixante-douze heures, qui est déjà très bref, me paraît préférable.

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Des expérimentations ont montré que le délai de quarante-huit heures est parfaitement tenable. De plus, avant une ouverture de compte, l'argent peut être versé sur le compte d'une association. Dans des cas de violences extrêmes, vingt-quatre heures de plus ou de moins peuvent faire la différence.

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Le délai de soixante-douze heures qui, selon les travailleurs sociaux, est déjà remarquable, s'impose notamment lorsque les personnes concernées ne sont pas déjà allocataires.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS14 de Mme Sandrine Rousseau.

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L'amendement dispose que « la prestation sera notamment calculée au regard du nombre d'enfants à charge pour la bénéficiaire ». Toutes les victimes de violences doivent avoir les moyens de fuir, y compris celles qui ont des enfants.

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Le texte renvoie la définition du montant et des modalités du prêt au décret lequel, de toute évidence, tiendra compte de la composition des familles.

Avis défavorable.

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Une telle mention dans la proposition de loi permettrait de s'en assurer.

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La prise en compte de la composition de la famille est en effet essentielle, mais dans le cadre d'une aide et non d'un prêt.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS4 de Mme Sandrine Rousseau.

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Le caractère répétitif de la demande ne doit pas être un motif de refus d'octroi de l'aide pour ne retenir que le caractère frauduleux. Les femmes victimes de violences peinent souvent à quitter leur bourreau. Nombre d'entre elles s'y prennent à plusieurs reprises avant de renoncer à subir l'emprise de leur conjoint et à quitter le domicile conjugal. Dans sa rédaction, cet article nie cette réalité. Afin de prendre en compte la multiplicité des cas de figure, il ne faut pas restreindre inutilement l'accès à cette aide.

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Ce dispositif vise à faire sortir définitivement les victimes de violences conjugales d'une spirale infernale. La suppression de la mention de « demande manifestement répétitive » ne ferait qu'empêcher l'adoption conforme du texte et retarder son entrée en vigueur. Je vous propose donc de retirer votre amendement ; à défaut, j'y serai défavorable.

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Ce texte doit être en effet rapidement adopté, mais à condition qu'il soit conforme aux réalités du terrain, comme l'est cet amendement, en faveur duquel nous voterons. Une personne peut être victime de violences plusieurs fois.

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Je me réjouis des propos de la porte-parole du groupe majoritaire et j'espère que cet amendement sera adopté.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AS2 de Mme Sandrine Rousseau.

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Un nouvel alinéa doit permettre au bénéficiaire de l'aide d'urgence de profiter d'un dispositif global de soin et d'accompagnement. Une victime seule, sans logement, sans compte bancaire et ignorant ses droits serait plus encline à revenir au foyer conjugal.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 1er modifié.

Après l'article 1er

Amendement AS15 de Mme Sandrine Rousseau.

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Par cet amendement de repli, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur l'opportunité de prendre une loi de programmation pluriannuelle de lutte contre les violences faites aux femmes, déterminant la trajectoire des finances publiques en matière de prévention et d'accompagnement des femmes victimes de violence pour trois périodes successives de cinq ans.

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En cohérence avec notre réponse relative à votre amendement AS1, je vous propose de retirer celui-ci ; à défaut, j'y serai défavorable.

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Loi après loi, les violences faites aux femmes continuent d'augmenter et il importe donc d'agir dans la durée. Un tel rapport permettrait également de nous assurer de la volonté politique d'agir contre les auteurs de ces violences.

La commission rejette l'amendement.

Article 2 : Possibilité de demander l'avance d'urgence lors d'un dépôt de plainte pour violences conjugales

Amendement AS18 de M. Arthur Delaporte.

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La victime doit pouvoir bénéficier d'une information sur son droit à l'avance dès le dépôt d'une plainte pour violences conjugales, et non dans les seuls cas où la plainte concerne une infraction punie d'au moins trois ans d'emprisonnement.

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Nous voulons obtenir un vote conforme pour que ces dispositions entrent en vigueur le plus rapidement possible. Je suis donc défavorable à tout amendement.

En outre, celui-ci est inopérant, les actes de violences physiques, sexuelles ou morales commis au sein d'un couple étant punis de trois ans minimum d'emprisonnement.

Avis défavorable.

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Je suis d'accord avec M. Delaporte : les femmes doivent pouvoir quitter définitivement leur conjoint dès le premier signe de violence. Quel message enverrait-on si l'aide était subordonnée aux seules violences punies par trois ans d'emprisonnement ? La majorité votera en faveur de cet amendement.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AS11 de Mme Sandrine Rousseau.

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Cet amendement vise à modifier l'article 88 du code de procédure pénale afin de dispenser les bénéficiaires de l'avance d'urgence du paiement de la consignation lorsqu'elles souhaitent se porter partie civile.

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L'article 88 du code de procédure pénale prévoit que le juge d'instruction fixe le montant de la consignation en fonction des ressources de la partie civile et uniquement lorsque celle-ci ne bénéficie pas de l'aide juridictionnelle.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

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J'avais cru comprendre qu'à l'exception des membres du groupe Écologiste, nous étions tous d'accord pour adopter ce texte conforme afin de le faire entrer en vigueur le plus tôt possible. Nous nous accordons tous sur le fait que lorsqu'une femme ou un enfant est victime de violences intrafamiliales, il est urgent de lui venir en aide. L'attitude du groupe majoritaire, qui adopte un amendement pour faire plaisir à untel ou untel, à moins que ce ne soit pour faire reculer le texte et en présenter un autre à son avantage, retardera la prise en charge des femmes et des enfants victimes de violences. Nous le regrettons, car cela ne correspond pas à ce qui avait été annoncé au début de la discussion.

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Nous étions en train de débattre du fond, sans verser dans des querelles politiciennes, sur un sujet essentiel sur lequel nous devons avancer dans l'urgence mais pas dans la précipitation. Si nous votions un texte inopérant, cela n'aiderait en rien les nombreuses femmes qui ont des besoins immédiats. Il ne s'agit pas ici de penser à soi mais aux femmes victimes de violences.

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N'oublions pas que les hommes sont, eux aussi, victimes de violences conjugales : ils les subissent dans 27 % des cas et ils représentent 17 % des décès consécutifs à ces violences. On sait que, tous les trois jours, une femme décède sous les coups de son conjoint, mais il faut aussi avoir conscience que, tous les quatorze jours, un homme meurt sous les coups de sa compagne. C'est pourquoi il est préférable d'employer le mot « victime ».

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Je partage le point de vue de Ian Boucard. Les sénateurs de sensibilité macroniste ou de gauche auraient pu compléter le texte s'ils avaient jugé qu'il n'allait pas assez loin ; or il a été adopté à l'unanimité par la chambre haute. Nous sommes globalement d'accord pour le faire entrer en vigueur rapidement, car la situation financière des femmes concernées est très préoccupante. Nous avons examiné deux sujets difficiles : la présence des travailleurs sociaux dans les commissariats lors du dépôt de la plainte et le bénéfice rapide de l'aide. Nous sommes à présent confrontés à la pyramide infernale des amendements qui demandent toujours plus. In fine, on devra reprendre la navette. J'espère que ces dispositions, qui vont allonger les délais – puisque c'est le résultat de ce que votre groupe a fait cet après-midi, madame Thevenot – ne mettront pas des femmes ou des hommes en difficulté, alors qu'ils doivent être soustraits, avec leurs enfants, aux mains de leur bourreau.

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Je vous dis simplement que vous faites de l'obstruction !

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Il est normal que nous débattions du texte, d'autant plus que certaines dispositions ne sont apparemment pas opérationnelles. Nous devrions aboutir en séance.

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Les débats ont montré notre volonté d'avancer sur ce texte « de manière constructive », pour reprendre les propos de Mme la rapporteure, qui n'a pas fermé la porte à des évolutions. La proposition de loi sera débattue en séance le 16 janvier et une niche est prévue au Sénat dès le 1er février : nous ne nous engageons donc pas dans une impasse. Si la proposition de loi était votée conforme au Sénat, elle serait automatiquement promulguée sous quinze jours.

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Il faut prendre le temps de réfléchir à ces dispositifs. La précipitation peut nuire aux femmes et aller à l'encontre des objectifs poursuivis. Madame la rapporteure, mon amendement vise à exonérer systématiquement le bénéficiaire de l'aide d'urgence du paiement de la consignation. Le code de procédure pénale ne prévoit pas ce caractère systématique.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 2 modifié.

Article 2 bis A (nouveau) : Suppression de l'obligation de consignation pour les victimes de violences conjugales

Amendement AS10 de Mme Sandrine Rousseau.

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Nous vous proposons de modifier l'article 88 du code de procédure pénale afin de dispenser les femmes victimes de violences de la procédure de consignation lorsqu'elles souhaitent se porter partie civile. Les associations ont particulièrement appelé notre attention sur cette question. Lorsque les victimes se constituent partie civile, elles doivent verser une consignation dont le montant est compris entre 1 500 et 3 000 euros. Les frais d'avocat peuvent varier entre 2 000 et 30 000 euros ; ils s'élèvent, en moyenne, à 6 000 euros pour une affaire de viol et à plus de 4 000 euros en cas d'agression sexuelle. Les victimes assument souvent le coût de la constitution de preuves devant huissier et des examens médicaux destinés à consolider leur dossier ou à préparer l'appel : dans les deux cas, cela se chiffre à plusieurs centaines d'euros. Cet amendement lèverait un premier frein financier à la constitution de partie civile.

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Par cohérence avec la position précédemment exprimée, je vous invite à retirer l'amendement. À défaut, mon avis serait défavorable.

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Nous avons aussi été sollicités par de nombreuses associations de victimes sur ce point. Je suis d'accord sur le fond, mais j'ai un doute quant à la viabilité juridique de l'amendement. Je vous propose qu'on le retravaille. Dans cette attente, nous nous abstiendrons.

La commission adopte l'amendement.

Article 2 bis : Demande de rapport sur l'opportunité de permettre aux caisses de mutualité sociale agricole de verser l'avance d'urgence

La commission adopte l'article 2 bis non modifié.

Après l'article 2 bis

Amendement AS16 de Mme Sandrine Rousseau.

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L'amendement vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement un « rapport sur l'opportunité de transformer le dispositif d'avance créé par la présente loi en dispositif d'aide pérenne à destination des femmes victimes de violences ». Dans le cas où nous n'aboutirions pas à un consensus en séance, il s'agit de rappeler un principe fondamental qui semble absent du dispositif : jamais une victime n'est responsable.

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Dans l'attente de l'examen en séance, je vous invite à retirer l'amendement.

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Je le retire sur la foi de l'engagement qui a été pris collectivement tout à l'heure.

L'amendement est retiré.

Article 3 : Gage financier de la proposition de loi

La commission adopte l'article 3 non modifié.

Titre

Amendement AS19 de M. Arthur Delaporte.

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L'intitulé que nous proposons constitue un reliquat de l'amendement qui a été déclaré irrecevable et qui visait à étendre le dispositif à l'ensemble des violences intrafamiliales. Chaque année, 80 000 enfants sont victimes de violences – qu'elles soient physiques, sexuelles ou psychologiques – au sein de leur famille. Notre objectif était d'étendre à tout parent la possibilité de recourir à ce prêt lorsque l'autre parent commet des violences sur leur enfant. En modifiant le titre, nous entendons manifester notre volonté d'élargir l'ambition de la loi.

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Nous nous étions fixé pour objectif de parvenir à une adoption conforme, ce qui aurait justifié un avis défavorable de ma part si le texte n'avait pas déjà été modifié. Cela étant, j'observe que votre amendement n'emporterait aucune conséquence sur le contenu de la loi. Si votre objectif est que les mères soient prises en considération dans le dispositif, c'est déjà le cas. Si votre amendement concerne les seules violences faites aux enfants, qui constituent évidemment un enjeu crucial, sa place n'est pas dans cette proposition de loi, car il s'agit d'un sujet distinct.

Demande de retrait ou avis défavorable.

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L'argument tiré de la nécessité d'une adoption conforme est inaudible, car cela reviendrait à nous empêcher d'exercer notre travail de parlementaire et à nous faire ratifier les textes votés par le Sénat.

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Je partage le point de vue de nos collègues d'Europe Écologie-Les Verts et d'Horizons : nous ne sommes pas, en effet, une chambre d'enregistrement. Notre rôle est d'améliorer, d'enrichir les textes pour qu'ils soient conformes aux réalités et aux attentes du terrain. Nous sommes favorables à l'amendement.

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Je remercie Mme Thevenot pour ses propos. Je veux dire aux rapporteurs que, le vote conforme n'étant désormais plus envisageable, il leur appartient d'imaginer quelle pourrait être la destinée de cette proposition de loi que l'Assemblée nationale souveraine a décidé de modifier pour l'améliorer, voire l'élargir.

Un parent qui souhaite quitter le domicile familial pour protéger un enfant victime de violences psychiques ou sexuelles pourrait bénéficier de la protection offerte par ce dispositif. Tel était notre objectif initial. En modifiant le titre, nous enverrions un signal et nous acterions la volonté de l'Assemblée nationale.

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J'espère que l'on réexaminera l'amendement AS1 de Mme Rousseau, qui est à mes yeux le plus intéressant des amendements présentés par le groupe Écologiste. Certes, j'aurais souhaité que l'on adopte la proposition de loi conforme mais, puisque la majorité veut enrichir le texte, je l'invite à se pencher en séance sur cet amendement, qui propose une programmation pluriannuelle de l'investissement pour créer des logements d'urgence en faveur des femmes et des enfants victimes de violences intrafamiliales. Ce serait une mesure vraiment déterminante si l'on voulait améliorer le texte – plus utile, en tout cas, que l'ajout de deux mots au titre de la proposition de loi.

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Pour faire écho aux propos de Mme Yadan, nous déposerons très probablement en séance un amendement visant à insérer les mots « les femmes et les hommes victimes ».

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Le rapport de violence est tout de même très genré. Certes, des hommes sont aussi victimes, mais 80 % des victimes de violences conjugales sont des femmes. Aussi, je propose que, dans cette loi, le féminin l'emporte sur le masculin.

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L'égalité hommes-femmes, madame Rousseau, cela passe aussi par là !

La commission adopte l'amendement.

Puis elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.

La réunion est suspendue de dix-sept heures dix à dix-sept heures vingt.

La commission examine ensuite la proposition de loi, modifiée par le Sénat, visant à faire évoluer la formation de sage-femme (n° 370) (M. Paul Christophe, rapporteur).

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Nous examinons, en deuxième lecture, une proposition de loi dont l'objet est de faire évoluer la formation des sages-femmes, dans le but de mieux reconnaître et valoriser le caractère véritablement médical de cette profession en France.

Je dis « en France », parce que cette profession est une singularité de notre pays. Chez nos voisins européens, il n'y a pas d'équivalent à nos sages-femmes, du point de vue de la durée de la formation, de l'étendue des compétences en matière d'accompagnement de la femme et du nouveau-né, ou encore du niveau de responsabilité dont elles sont investies. Nous avons pris l'habitude de dire « elles », parce qu'il y a 98 % de femmes parmi les sages-femmes, mais n'oublions pas les 2 % d'hommes. D'ailleurs, le terme « sage-femme » n'est pas féminin : il désigne celui ou celle qui « a la connaissance de la femme ».

La proposition de loi vise à reconnaître le statut véritablement médical de nos sages-femmes en mettant leur formation en adéquation avec leurs compétences et leurs responsabilités. Ce texte avait été défendu sous la précédente législature par le groupe Agir ensemble, et plus particulièrement par Annie Chapelier, à qui je souhaite rendre un hommage appuyé. Tout au long de la législature, notre collègue n'avait eu de cesse d'œuvrer pour une meilleure reconnaissance des sages-femmes et pour une évolution de cette profession, qui reste insuffisamment valorisée.

Annie Chapelier nourrissait une ambition beaucoup plus élevée pour ce texte, dont une première version, déposée en juin 2021, comportait vingt-six articles et embrassait l'ensemble des enjeux relatifs à l'évolution de la profession. Le principe de réalité nous avait toutefois forcés à en restreindre le champ : d'une part, la proposition de loi avait vocation à être examinée dans le cadre de la niche de notre groupe ; d'autre part, certains aspects de l'extension des compétences des sages-femmes ne sont pas tout à fait consensuels. Le choix avait donc été fait de poser une première pierre en intervenant sur la formation des sages-femmes, qui elle-même conditionne beaucoup d'autres évolutions.

L'examen du texte en première lecture à l'Assemblée nationale s'est déroulé en octobre 2021 de manière constructive et apaisée. Le Sénat, animé par le même état d'esprit, s'est penché dessus en octobre dernier. Tous les groupes politiques se sont accordés à dire qu'il s'agit d'une véritable avancée pour les sages-femmes, nécessaire et attendue de tous. La chambre haute n'a modifié qu'une disposition relative au calendrier d'application.

Le texte qui nous revient comporte cinq articles : trois ont été adoptés conformes, il n'en reste donc plus que deux en discussion. Aucun amendement n'ayant été déposé en commission, j'ai bon espoir que nous approuvions le texte issu du Sénat. Même si le groupe Les Républicains s'est opposé à la procédure de législation en commission qui avait été demandée, il me semble qu'il n'y a pas véritablement matière à désaccord.

L'article 1er constitue le cœur du dispositif : il programme la pleine intégration universitaire de la formation des sages-femmes, dont le processus semblait en panne. À la rentrée 2027, la formation des sages-femmes devra se dérouler prioritairement au sein d'unités de formation et de recherche (UFR) en santé, ce qui permettra de la rapprocher de la formation des médecins. Si cet article reste en discussion, c'est en raison d'une modification de la date d'application de la réforme, qui résulte des dispositions de l'article 2, également soumis à notre examen. Hormis ce point, le contenu de l'article 1er a fait l'objet d'un consensus, tant à l'Assemblée qu'au Sénat.

L'article 1er bis a été adopté conforme et n'est donc plus ouvert à la discussion. Il crée un statut de maître de stage agréé en maïeutique pour les sages-femmes, ce qui met fin à une anomalie qui a curieusement perduré jusqu'à aujourd'hui.

L'article 2, qui est l'autre article phare de cette proposition de loi, allonge les études de maïeutique par l'ajout d'un troisième cycle d'une durée d'un an. La formation passera ainsi de cinq à six ans, et les sages-femmes auront désormais le statut de docteur en maïeutique. Cette évolution sera bénéfique à tous points de vue : le caractère médical de la profession sera mieux reconnu ; la charge des études, très lourde pendant le second cycle, sera mieux répartie ; la formation en physiologie sera renforcée ; la pratique des stages sera favorisée ; la recherche en maïeutique, encore bien trop embryonnaire en France, pourra se développer.

Cet article 2 est encore en discussion parce que le Sénat a voulu modifier la date de la mise en place du troisième cycle, qui était initialement prévue pour la rentrée 2023 pour tous les étudiants en maïeutique entamant leur première année de deuxième cycle, donc leur quatrième année d'études. Le Sénat a estimé qu'on ne pouvait pas imposer un troisième cycle à des étudiants qui s'étaient engagés dans un cursus de cinq ans. Il a donc prévu que le troisième cycle ne s'appliquerait qu'aux étudiants commençant leur deuxième année de premier cycle, autrement dit leur première année de maïeutique à proprement parler – la première année étant celle du parcours d'accès spécifique santé, commune aux études de santé. Comme l'examen de la proposition de loi a pris un peu de retard, la date d'application, initialement prévue le 1er septembre 2023, a été reportée d'un an pour ménager le temps nécessaire à l'élaboration des mesures d'application.

Le Sénat me semble avoir adopté une mesure de bon sens, qui répond d'ailleurs à une demande convergente de l'ensemble des acteurs.

L'article 3 a été adopté conforme ; il crée un statut d'enseignant-chercheur en maïeutique, ce qui rejoint l'objectif d'encourager la recherche dans ce domaine.

Enfin, l'article 4, également adopté conforme, modifie la classification de la profession de sage-femme au sein de la nomenclature d'activités françaises et de la nomenclature des professions et catégories socioprofessionnelles, afin de tenir compte de sa nature médicale – et non paramédicale.

J'ai conscience que cette proposition de loi ne répond pas à tous les enjeux de la profession, étant entendu que nous travaillons encore à en étendre les compétences, notamment dans des dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023. Néanmoins, elle constitue une première pierre utile, incontournable et immédiatement applicable. Il me semble qu'il pourrait recueillir l'unanimité dans sa rédaction actuelle. Je vous invite donc, comme aurait dit Annie Chapelier, à lui réserver un bon accueil.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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L'adoption à l'unanimité de cette proposition de loi à chaque étape de la procédure législative, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, démontre sa pertinence et sa nécessité. Elle est le fruit d'un large travail de concertation, engagé lors de la précédente législature par notre collègue Annie Chapelier, à laquelle je rends hommage. La dynamique transpartisane qu'elle a naturellement suscitée s'érige en modèle d'un travail parlementaire utile et efficace, que nos concitoyens appellent unanimement de leurs vœux.

Sur le fond, cette proposition de loi vise un double objectif : prendre acte de la montée en compétences constante et continue de la profession de sage-femme au cours des dernières années ; adapter le contenu et la durée des formations universitaires qui y préparent.

La pleine intégration de la formation de sage-femme dans les structures universitaires existantes permettra de l'améliorer sensiblement tout en apportant une homogénéisation des parcours entre les professions médicales. L'excellence des parcours en maïeutique sera reconnue, avec la création d'un troisième cycle, sanctionné par la délivrance d'un doctorat et offrant la possibilité de l'exercice quotidien d'une activité de recherche en parallèle de l'activité professionnelle. Conformément au code de la santé publique, la profession de sage-femme entrera dans la nomenclature des professions médicales.

Cette reconnaissance de la réalité du métier de sage-femme est une mesure de justice contribuant à valoriser une profession qui, aussi surprenant que cela puisse paraître, n'est pas encore reconnue comme une profession médicale à part entière. Compte tenu de l'avancée majeure que constitue la proposition de loi pour la formation au métier de sage-femme et pour le quotidien des professionnels concernés, le groupe Renaissance votera le texte.

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Comme l'a rappelé l'Ordre des sages-femmes, qui parle de crise profonde de la profession, le métier de sage-femme attire moins qu'avant. Ce manque d'attractivité a été aggravé par une vague de radiations, qui a contribué à dégrader davantage la qualité et la sécurité des soins, en raison d'un manque de moyens humains. Une réforme s'imposait donc, pour rendre le métier attractif et assurer la bonne qualité de la vie au travail des sages-femmes et des soins prodigués à nos concitoyennes.

La profession et le syndicat étudiant réclamaient certaines mesures, telles que la pleine intégration universitaire de la formation, le développement de la recherche en maïeutique et la reconnaissance statutaire du caractère médical des sages-femmes. Tout cela permettrait de mieux prendre en compte l'évolution de la profession au cours des dernières années, tant du point de vue de la complexité des tâches à réaliser que de la polyvalence du rôle des sages-femmes.

La présente proposition de loi permet en partie de répondre aux demandes des organisations syndicales. Il y a de bons points, s'agissant notamment de l'accompagnement des étudiants en stage. Cette période est souvent très difficile pour les étudiantes et les étudiants, livrés à eux-mêmes dans un hôpital où tout va très vite. Avec un maître de stage au sein de l'hôpital, ils apprendront leur métier de manière mieux encadrée et pourront mieux réguler leurs horaires souvent très longs.

La date d'intégration des écoles de sages-femmes à l'université est sans doute trop tardive. La profession demandait 2024, tant la baisse d'attractivité du métier devient problématique. Toutefois, la date de 2027, inscrite dans le texte, demeure raisonnable.

Nous sommes favorables à la proposition de loi.

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Nous sommes nombreux à rencontrer des sages-femmes dans nos circonscriptions, donc à être régulièrement confrontés au mal-être résultant de la tension entre, d'un côté, une aspiration à un acte professionnel jugé noble, consistant à soulager une femme enceinte et mettre au monde son enfant, et, de l'autre, des conditions d'exercice susceptibles de le mettre en difficulté.

Dès lors qu'il s'agit d'accroître et d'améliorer les qualifications des sages-femmes sur plusieurs plans, nous y sommes favorables. Nous voterons donc le texte. Le décalage entre le statut des sages-femmes et leur formation initiale résulte d'une forme de tutelle exercée par les gynécologues sur leur activité professionnelle. Si nous avons l'occasion d'en discuter, c'est avant tout grâce aux mobilisations des premières concernées en 2021.

Le texte propose des pistes intéressantes. Sur le plan symbolique, il médicalise l'exercice du métier en créant un doctorat en maïeutique. Sur le plan professionnel, il améliore la formation et les rapproche des pharmaciens et des médecins. Sur le plan du progrès social, il favorise la recherche dans cette discipline.

Toutefois, il faut prêter attention, me semble-t-il, à l'aspect matériel de l'affaire. Sans revalorisation salariale, la reconnaissance demeure souvent un vœu pieux. Un quart des sages-femmes n'ont pas touché les primes et les revalorisations accordées en 2021, notamment les sages-femmes hospitalières, contractuelles et territoriales, ainsi que celles travaillant dans le privé. L'Inspection générale des affaires sociales, dont je puis témoigner qu'elle n'est pas un repère de marxistes-léninistes, a indiqué en septembre 2021 qu'il faut revaloriser à hauteur de 600 euros les entrantes dans le métier pour garantir l'attractivité et la dignité des conditions d'exercice professionnel.

Nous voterons le texte, en espérant qu'un geste salarial sera obtenu soit dans cette salle, soit par leur mobilisation à venir, que nous soutiendrons totalement.

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La présente proposition de loi vise à faire évoluer le statut et la formation des sages-femmes. Comme c'est le cas des autres professions de santé, leur rôle, leur domaine de compétence et leur champ d'action ont beaucoup évolué au cours des dernières années, et continueront à évoluer. Cet état de fait révèle le flou persistant qui entoure le véritable statut des sages-femmes et accentue leur impression d'être dans une zone grise, entre médical et paramédical.

L'enseignement a connu d'importantes évolutions, mais par à-coups, sans que la profession de sage-femme soit jamais pleinement reconnue comme devant faire l'objet d'un parcours universitaire. C'est à Grenoble, en 1992, et dans le reste de la France en 2002, que la première année du premier cycle des études de médecine est devenue commune à toutes les écoles de sages-femmes, ce qui a fait passer de quatre à cinq leur nombre d'années d'études.

Trente ans après, nous constatons que cette année commune a profondément modifié la sociologie des étudiants en maïeutique. Désormais, les promotions sont issues d'un classement commun avec la médecine, l'odontologie et, depuis la création de la première année commune aux études de santé, avec la pharmacie, et non exclusivement d'une orientation avec vocation.

Toutefois, l'hétérogénéité de l'enseignement perdure, car il est de la compétence des régions, ce qui induit des disparités sur le territoire national. La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales confie aux régions la régulation et le financement des écoles de sages-femmes, comme s'il s'agissait d'une formation paramédicale, en dépit du statut médical des sages-femmes.

Il est nécessaire de mieux définir les compétences des sages-femmes et de faire évoluer leur formation initiale. La profession de sage-femme ne se limite plus à l'accompagnement de la naissance. Ses missions ont été largement élargies au suivi gynécologique, à la contraception, à l'orthogénie, à la procréation médicalement assistée, à la rééducation périnéale, à la prévention et à l'éducation.

Récemment, de nouvelles missions leur ont été confiées en matière de premier recours, d'interruption volontaire de grossesse (IVG), de vaccination, de prescription d'arrêt de travail et de dépistage des infections sexuellement transmissibles. Cette extension de compétences, conciliée à un volume de formation très dense, nécessite un ajustement pédagogique pour mieux former les sages-femmes et leur donner les outils nécessaires à leur rôle majeur et renouvelé.

Le groupe Les Républicains, favorable à l'universitarisation de la formation des sages-femmes, votera le texte.

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Un an après son adoption à l'unanimité par notre assemblée lors de la précédente législature, un mois après son examen au Sénat, cette importante proposition de loi revient devant notre commission, ce qui est une excellente nouvelle. Il est urgent que le processus législatif entrepris par notre ancienne collègue Annie Chapelier arrive à son terme, pour entériner la réforme du processus de formation des sages-femmes et le renforcement de leur statut.

Les dispositions contenues dans ce texte sont attendues par toute une profession, dont la vocation est sans doute la plus belle qui soit : accompagner le début de la vie. Trop longtemps, ce métier a été négligé et trop peu considéré. Il a fallu une mobilisation forte et constante des professionnelles pour que les choses évoluent et que le législateur s'empare de cette question.

Une première étape est franchie avec ce texte, qui permet d'intégrer la formation de sage-femme au niveau du troisième cycle universitaire, de favoriser la conciliation des carrières hospitalo-universitaire et de reconnaître enfin cette profession comme activité de pratique médicale dans la nomenclature française.

La majorité des articles ont été votés conformes au Sénat, sauf ceux prévoyant la date des premières rentrées universitaires concernées. Le groupe Démocrate considère que le texte doit être voté conforme à celui du Sénat pour qu'il entre en vigueur le plus rapidement possible.

Certes, des questions restent en suspens, notamment la rémunération et la délégation de tâches, mais il importe de conclure cette première étape avant de poursuivre nos travaux et nos discussions avec les parties prenantes, pour progresser dans la reconnaissance de ce métier. Le groupe Démocrate votera le texte avec enthousiasme.

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La présente proposition de loi était très attendue. Elle est donc la bienvenue.

La profession de sage-femme traverse une crise sans précédent, tant les conditions de travail sont difficiles. Dans une maternité sur cinq, il manque au moins dix postes de sages-femmes. Par ailleurs, les sages-femmes accumulent de plus en plus de missions. Est-il normal de laisser certaines et certains affronter des permanences de douze heures, seuls parfois ? Est-il normal que des femmes sur le point d'accoucher doivent faire plus d'une heure de route ?

Pour avoir des sages-femmes formées en nombre suffisant, il fallait une proposition de loi telle que celle d'Annie Chapelier, adoptée à l'unanimité ici même il y a un an, puis au Sénat. Elle doit être votée conforme pour que nous nous attaquions enfin à l'évolution de leur formation, qui est la première pierre de la revalorisation de ce métier essentiel et de l'amélioration de la reconnaissance dont il fait l'objet.

L'universitarisation tant attendue arrivera avec six ans de retard sur la date cible fixée par la direction générale de l'offre de soins. Mieux vaut tard que jamais ! La création d'un troisième cycle universitaire consolidera la formation et permettra de cumuler pratique et recherche, ce qui comblera un retard certain par rapport aux autres professions médicales.

J'espère que nous serons tout aussi unanimes pour continuer le travail sur la revalorisation de la profession et dénoncer les dysfonctionnements des études de sage-femme relevant du pouvoir réglementaire. Léa est en troisième année à Brest. Elle effectue vingt-quatre semaines de stage dans l'année, à 112 kilomètres en moyenne du centre hospitalier universitaire de référence. Elle parcourt près de 10 000 kilomètres par an. Savez-vous à combien s'élèvent ses indemnités kilométriques ? Zéro, car elle est en premier cycle. Sa gratification ? Zéro aussi. À Caen, aucun des neuf terrains de stage ne propose un logement, alors qu'ils sont éloignés de 65 kilomètres les uns des autres.

Cette situation n'est pas digne du formidable engagement des étudiantes sages-femmes au quotidien. Selon leur association, sept étudiantes sur dix présentent des symptômes dépressifs. Faisons mieux, chers collègues ! Elles le méritent. La société a besoin d'elles.

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Dans un système de santé dont nous savons qu'il est en crise, les sages-femmes ont pris une place tout à fait singulière. Au fil des années, leur mission a fait l'objet d'extensions successives, pour inclure la contraception, la consultation gynécologique de prévention et, depuis la promulgation de la loi de modernisation de notre système de santé, la pratique de l'IVG médicamenteuse.

Les sages-femmes françaises exercent les compétences les plus étendues d'Europe au service de la santé des femmes, mais leur formation ne s'est pas suffisamment adaptée à cette évolution. La présente proposition de loi vise donc un double objectif : affirmer le statut médical des sages-femmes en faisant évoluer leur formation initiale ; mieux définir et reconnaître le rôle qu'elles jouent dans l'accompagnement des femmes et des jeunes enfants.

Elle découle de plusieurs constats. J'en retiendrai trois.

En dépit d'avancées récentes, l'intégration universitaire de la formation initiale des sages-femmes demeure faible et inégale sur le territoire, ce qui constitue une exception au sein des professions médicales. Le texte prévoit plusieurs avancées, telles que le développement d'une culture commune des formations aux professions médicales, susceptible de favoriser plus tard la collaboration entre elles, et l'amélioration, pour les étudiants en maïeutique, de l'accès à la recherche.

En outre, l'intégration universitaire constitue un symbole de reconnaissance pour la profession. Le statut régional et hospitalier de la formation de sage-femme tend à l'isoler au sein des formations médicales.

Enfin, le rapprochement des écoles de sage-femme et de l'université semble nécessaire pour favoriser le développement de la recherche en maïeutique et le recrutement d'enseignants-chercheurs dans cette discipline.

Favorable à ces évolutions tout à fait positives, le groupe Horizons et apparentés s'associe aux autres groupes pour voter la proposition de loi.

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Je suis ravie de m'exprimer sur cette proposition de loi, qui vise à améliorer la formation des sages-femmes. Les sages-femmes sont des professionnelles de santé essentielles. Leur travail est crucial pour la santé des femmes et des nouveau-nés.

Comme l'a rappelé Raymonde Poncet Monge, sénatrice du groupe Écologiste et autrice d'un rapport sur cette proposition de loi, les sages-femmes françaises, qui sont à 97 % des femmes, sont celles qui exercent le plus de responsabilités en Europe. Leur travail va bien au-delà de l'accouchement en salle de naissance. Elles réalisent des actes de prévention, de diagnostic et de prescription en obstétrique, en gynécologie et en pédiatrie.

La filière des sages-femmes demeure trop peu reconnue comme profession médicale à part entière. Les sages-femmes ont la conviction de ne pas être suffisamment légitimées ni valorisées, en dépit du caractère médical de leur activité et de l'étendue de plus en plus large de leurs compétences, donc de leur responsabilité. La profession vit un profond mal-être. La reconnaissance de leur statut passe nécessairement par une révolution de leur formation.

La présente proposition de loi prévoit de parachever l'intégration universitaire de la formation de sage-femme en vue d'homogénéiser leur niveau de formation et de décloisonner les formations en santé dans le cadre des UFR de médecine et de santé. La formation des sages-femmes sera complétée par un troisième cycle d'études, sous la forme d'une sixième année, contre cinq à l'heure actuelle.

Même si la proposition de loi ne résout pas toutes les difficultés de la profession, elle n'en est pas moins vivement attendue, car elle tient compte – enfin ! – de certaines revendications formulées de longue date par les sages-femmes, et vise à reconnaître la maïeutique comme profession médicale et non paramédicale. Les écologistes la soutiennent pleinement et n'ont déposé aucun amendement.

Par ailleurs, ces femmes souhaitent que leur profession s'appelle « sage-femme » et non « maïeuticien-maïeuticienne ».

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Notre groupe se réjouit d'examiner à nouveau cette proposition de loi, cosignée par nombre d'entre nous. Elle est le fruit du travail sérieux et engagé de Mme Annie Chapelier, dont nous espérons que cet aboutissement la réjouira.

La situation des sages-femmes est symptomatique de la crise d'attractivité vécue par de nombreuses professions médicales, et plus largement par le monde de la santé. Il importait de traiter au moins un des aspects du problème : la formation.

La proposition de loi apporte une réponse concrète à l'inachèvement et à l'hétérogénéité de l'intégration universitaire de cette profession. Tout le monde s'accordera sur la nécessité d'améliorer et d'homogénéiser la formation de sage-femme, compte tenu des compétences de plus en plus importantes que nous leur confions. Le texte apporte aussi des améliorations en matière de recherche en maïeutique. Nous appelons à les soutenir davantage par la mise en œuvre de bourses doctorales ciblées sur ce sujet largement sous-investi.

Cette proposition de loi est une première étape nécessaire, mais incomplète. Tôt ou tard, il faudra résorber l'entre-deux dans lequel les sages-femmes sont placées. Nous ne pouvons pas continuellement étendre leur champ d'intervention, de compétence et de responsabilité sans améliorer leur statut, s'agissant notamment de la distorsion entre exercice libéral et hôpital.

Il faut en finir avec le flou existant, qui donne aux sages-femmes le sentiment d'être dans une zone grise entre médical et paramédical. Cette question n'est pas secondaire. Elle est au cœur de la sensible dégradation de l'attractivité de l'exercice hospitalier.

Notre groupe soutient la proposition de loi.

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Chers collègues, je vous remercie toutes et tous du soutien unanime que vous apportez à la proposition de loi. Il fait honneur au travail de notre collègue Annie Chapelier et rend hommage à la profession de sage-femme.

J'ai bien conscience, comme chacun d'entre vous, qu'il ne s'agit que d'une première pierre, et qu'il faut faire évoluer plusieurs dispositions. Ce n'est pas pour rien qu'Annie Chapelier avait rédigé une proposition de loi de vingt-six articles, mais parce que ce sujet mérite d'être exploré de façon exhaustive.

Nous pouvons néanmoins être heureux de poser ce premier jalon, qui permettra d'avancer vers la reconnaissance qu'elles méritent.

Article 1er : Intégration universitaire de la formation initiale des sages-femmes

La commission adopte l'article 1er non modifié.

Article 2 : Création d'un troisième cycle d'études pour les étudiants en maïeutique

La commission adopte l'article 2 non modifié.

Puis elle adopte l'ensemble de la proposition de loi sans modification.

La séance est levée à dix-sept heures cinquante.

Information relative à la commission

La commission a désigné Mme Laurence Cristol rapporteure du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture.

Présences en réunion

Présents. – M. Éric Alauzet, Mme Bénédicte Auzanot, M. Christophe Bentz, Mme Anne Bergantz, Mme Chantal Bouloux, M. Victor Catteau, M. Paul Christophe, M. Hadrien Clouet, Mme Josiane Corneloup, Mme Laurence Cristol, M. Arthur Delaporte, Mme Béatrice Descamps, M. Pierre Dharréville, Mme Sandrine Dogor-Such, M. Marc Ferracci, M. François Gernigon, Mme Olga Givernet, M. Jérôme Guedj, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Sandrine Josso, Mme Rachel Keke, Mme Fadila Khattabi, M. Didier Le Gac, Mme Christine Le Nabour, M. Matthieu Marchio, M. Serge Muller, M. Yannick Neuder, Mme Astrid Panosyan-Bouvet, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, Mme Maud Petit, Mme Michèle Peyron, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, M. Emmanuel Taché de la Pagerie, Mme Prisca Thevenot, Mme Isabelle Valentin, M. Frédéric Valletoux, Mme Caroline Yadan

Excusés. – M. Thibault Bazin, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Caroline Fiat, Mme Caroline Janvier, M. Philippe Juvin, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Stéphanie Rist, M. Freddy Sertin, M. Olivier Serva

Assistaient également à la réunion. – Mme Nathalie Bassire, M. Ian Boucard, M. Fabien Di Filippo, Mme Pascale Martin, Mme Christelle Petex-Levet