La réunion

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La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a auditionné Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, sur le bilan des négociations lors de la 28ème Conférence des Parties à la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 28).

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Mes chers collègues, nous avons le plaisir d'accueillir Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, pour qu'elle nous présente un bilan des négociations de la vingt-huitième Conférence des Parties à la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, la COP 28. Madame la ministre, vous avez joué un rôle important dans ces négociations et je vous remercie d'avoir accepté notre invitation.

Au vu des principaux résultats diffusés au fil des négociations, il semble qu'elles aient connu des hauts et des bas avant d'aboutir, le 13 décembre, à un accord accepté par l'ensemble des parties. Nous avons pu apprécier l'avancée réalisée dès le premier jour sur le fonds des pertes et préjudices, puis suivre le « feuilleton » sur la mention des énergies fossiles qui a duré jusqu'au dernier jour.

Si ces négociations ont heureusement été conclusives, elles ont aussi été un puissant révélateur des lignes de fracture entre les États. L'Union européenne est allée, à juste titre, jusqu'à juger inacceptable la version proposée le 11 décembre par la présidence émiratie, après que les pays de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) ont refusé toute mise en cause des énergies fossiles. Vous vous étiez vous-même déclarée stupéfaite par cette initiative. La vigueur des termes employés tranche avec le ton généralement policé employé dans les instances internationales : sans doute pourrez-vous nous livrer votre sentiment sur ce point.

Je vous laisserai présenter en détail les résultats obtenus. Je retiens qu'au final, l'objectif de l'accord de Paris consistant à contenir à 1,5 degré le réchauffement global est repris, de même que la trajectoire recommandée dans le dernier rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec). Certains objectifs précis, comme le triplement de la capacité d'énergies renouvelables d'ici 2030 et un doublement de l'efficacité énergétique, sont assignés.

Reconnaissons que certaines formulations laissent parfois un sentiment d'inachevé ou d'insatisfaction, comme l'objectif de « s'éloigner » des énergies fossiles. Dans le même temps, l'accord ambitionne toutefois de « sortir » des subventions aux énergies fossiles qui ne répondent pas à la précarité énergétique ou aux transitions justes, aussi vite que possible.

Faut-il en conclure, comme la présidente de la Commission européenne Mme von der Leyen, que cet accord marque le début de l'ère post-fossiles ? Il s'agit en tout cas d'un signal auquel il faudra donner une traduction concrète et d'une étape importante, que vous avez d'ailleurs qualifiée, madame la ministre, de victoire de la diplomatie climatique.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique

Nous avons effectivement négocié assez tard dans les différentes nuits qui se sont succédé et la COP 28 de Dubaï marque bien le début de l'ère post-fossiles. Huit ans après l'accord de Paris, nous avons enfin franchi cette étape importante pour agir contre le dérèglement climatique. Comme vous le savez, selon le scénario intermédiaire du Giec, les politiques actuelles des pays conduisent à un réchauffement global de 2,2 à 2,8 degrés d'ici la fin du siècle, bien loin des 1,5 degré de l'accord de Paris. Néanmoins, sans l'accord de Paris, nous serions sur une trajectoire de 4 degrés. Oui, cet accord nous a permis de gagner plus d'un degré : c'est une réponse aux « pisse-vinaigre » qui expliquent que les COP ne servent à rien.

Il faut cependant aller plus loin. Je me bats chaque jour avec en tête l'objectif d'aller plus vite et plus fort pour réduire nos émissions. À cet égard, je suis fière de vous annoncer qu'au terme des trois premiers trimestres de l'année, la baisse des émissions de la France est de 4,6 %, contre 0,9 % en moyenne chaque année sous le Président François Hollande et 2 % lors du premier quinquennat d'Emmanuel Macron. Nous sommes sur une trajectoire d'accélération, même si le dernier trimestre sera sans doute difficile, avec une comparaison moins favorable en raison du plan de sobriété adopté l'année dernière. Quoi qu'il en soit, nous agissons et obtenons des résultats. Notre objectif est désormais de rehausser les ambitions mondiales.

C'est ce que nous avons obtenu dans ce nouvel accord, qui est important à plusieurs titres. Premier succès, le texte contient des engagements forts pour une transition énergétique hors des énergies fossiles, en cohérence avec l'objectif de 1,5 degré de l'accord de Paris. Cette sortie doit s'organiser rapidement, avec des objectifs de baisse des émissions de 43 % dès 2030 et une neutralité carbone en 2050. Il est donc faux de dire qu'il n'y a pas d'échéance.

C'est la première fois depuis que les COP se tiennent que tous les pays convergent sur ce point. Il s'agit d'une avancée majeure et d'un signal très fort pour engager le monde dans une transition sans énergies fossiles. J'insiste sur ce point, puisque certains prétendent que cet accord n'a servi à rien – mais ce sont les mêmes qui n'ont pas voté la loi sur les énergies renouvelables et qui n'ont pas laissé un bilan particulièrement positif de leur passage aux manettes.

(Exclamations.)

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Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique

Deuxième succès, nous avons obtenu un accord sur le triplement des renouvelables et le doublement de l'efficacité énergétique, une priorité portée par la France et par l'Union européenne, en cohérence avec la stratégie énergétique que j'ai coconstruite avec les parties prenantes et la majorité des groupes politiques et soumise à la consultation le 23 novembre dernier.

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Mes chers collègues, un peu de calme s'il vous plaît. Vous aurez l'occasion de répondre à la ministre.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

En 2035, nous devrons produire au moins 177 térawattheures supplémentaires d'électricité à partir d'énergies renouvelables par rapport à 2022 pour répondre aux besoins d'électrification et assurer notre sécurité d'approvisionnement. Nous devrons également baisser notre consommation de 30 %.

Troisième succès, le texte mentionne, pour la première fois, la contribution de l'énergie nucléaire. C'est une victoire diplomatique de la France, puisque nous avons porté cette avancée avec les membres de l'Alliance du nucléaire que j'ai créée en début d'année. Les 196 pays de la COP ont montré qu'ils n'avaient pas le nucléaire honteux. Le nucléaire est une énergie d'avenir, stable, compétitive et décarbonée, sur laquelle la France continuera de miser, grâce à la prolongation des centrales existantes et au programme Nouveau nucléaire lancé par le Président de la République lors du discours de Belfort.

Je présenterai l'année prochaine un projet de loi relatif à la souveraineté énergétique de la France qui permettra de remettre notre pays sur la bonne trajectoire énergétique, en s'appuyant sur un mix énergétique décarboné avec deux piliers : les énergies renouvelables et les énergies nucléaires.

Quatrième succès, l'accord final s'appuie sur la science. Il reprend les messages les plus importants des scientifiques du Giec pour tenir la trajectoire de 1,5 degré. L'accord de Paris fait mention d'un objectif « well below 2°C » et d'efforts à poursuivre pour se limiter à 1,5°C . Le nouvel accord fait plus de dix références à la cible de 1,5 degré. Les États, y compris ceux qui sont perçus comme peu ambitieux, à l'instar des États du Golfe, ont donc affirmé leur souhait de tenir cette trajectoire. Au-delà de son aspect symbolique, il s'agit d'un engagement assez fort des États, et ceux dont les émissions sont significatives y joueront un rôle important.

Le pic de nos émissions devra être atteint d'ici 2025, une formulation qui ne figurait pas dans les accords précédents. Ensuite il faudra baisser nos émissions de 43 % d'ici 2030 et de 60 % d'ici 2035, ce qui n'avait pas été précisé non plus. La France et l'Union européenne ont fait le choix de relever encore cet engagement en inscrivant une baisse de 55 % de nos émissions d'ici à 2030 dans le paquet Fit for 55.

Cinquième succès, cet accord reprend le travail du pacte de Paris pour les peuples et la planète initié par le Président de la République, notamment sur les financements innovants. Le sommet de Paris pour un nouveau pacte financier mondial qui s'est tenu en juin a joué un rôle essentiel pour recréer la confiance avec les pays du Sud et sortir d'un face à face assez peu constructif.

Il ne s'agit pas de dire que les pays du Nord doivent financer ceux du Sud mais de revoir en profondeur le logiciel du développement et de la finance climatique. Il faut aller chercher d'autres sources de financement, en réformant la Banque mondiale, le Fonds monétaire international et les banques multilatérales de développement, en instaurant des taxations internationales, en trouvant de nouvelles modalités de régulation des dettes internationales lorsque des pays font des investissements dans la nature – cette proposition du Président de la République a été reprise dans un certain nombre d'agendas, notamment celui de Nairobi, et dans l'initiative de Bridgetown.

La France continuera à travailler pour faire de cet agenda une réalité sur le terrain et pour augmenter les moyens de la lutte contre le dérèglement climatique dans les pays vulnérables. Sur tous ces points, l'accord signé par les représentants de 196 pays reprend la stratégie française et européenne. Il y a, certes, des marges de progrès : nous aurions souhaité des engagements plus forts sur le charbon, plutôt que de s'en tenir à reprendre le pacte de Glasgow, en particulier sur la construction de nouvelles centrales à charbon. Le texte aurait également pu fixer une cible pour les émissions de méthane, dès 2030. Nous continuerons à défendre ces positions dans de prochaines négociations internationales. Nous avons d'ailleurs obtenu des résultats au niveau européen, puisque la France est à l'origine de la modification du règlement européen sur le méthane. La partie sur l'adaptation peut aussi apparaître comme insuffisante, eu égard aux besoins des pays en développement.

Ces résultats ambitieux sont le fruit d'un travail de conviction et de construction de la confiance avec les pays du Sud.

D'abord, un très gros effort diplomatique a été fait pour trouver un accord sur le fonds des pertes et préjudices, qui vise à mieux accompagner les pays les plus vulnérables, qui sont victimes de catastrophes naturelles alors qu'ils ne sont pas les responsables du réchauffement climatique. Chacun l'a reconnu, la France a joué un rôle clé dans le compromis historique qui a permis d'adopter ce fonds – un point essentiel de l'accord – dès le premier jour de la COP 28, ce qui est sans précédent. Le fonds sera doté de près de 700 millions de dollars de promesses de dons : la France y participera jusqu'à 100 millions d'euros, conformément au souhait du Président. Nous garderons la main sur la manière dont ce fonds fonctionnera. Cette adoption rapide nous a permis de concentrer ensuite tous nos efforts sur la question de la sortie des énergies fossiles.

Deuxième brique de la confiance avec les pays du Sud : la réitération de l'engagement d'un montant de 100 milliards de dollars pour faire face au dérèglement climatique. Ce seuil a été atteint en 2022 et en 2023, la France y contribuant à hauteur de 7,6 milliards d'euros en 2022.

La troisième brique est constituée des contacts étroits que j'ai noués avec le groupe des pays les moins avancés, présidé par le Bangladesh et comprenant le Kenya, les pays latino-américains progressistes que sont la Colombie ou le Chili, ou encore le Brésil – un pays émergent qui a manifesté un fort leadership diplomatique, ce qui est relativement nouveau. J'ai aussi dialogué avec mes homologues chinois, indiens ou saoudiens pour les convaincre de se rallier à un accord qui n'était pas évident pour eux, mais qui fixe un cadre collectif de responsabilités permettant de sortir de manière organisée des énergies fossiles en tenant compte du point de départ de chacun.

Nous avons ainsi construit une coalition de plus de 130 pays, permettant de sortir des habituels face-à-face habituels entre Sud et Nord : elle a largement pesé dans les résultats obtenus sur la sortie des énergies fossiles. Nous avons travaillé très dur pour obtenir ce résultat et je félicite toutes les équipes de négociation pour leur excellent travail, notamment l'ambassadeur chargé des négociations sur le changement climatique M. Stéphane Crouzat et les négociateurs de l'accord sur le fonds des pertes et préjudices.

Même avec cet accord, la crise climatique ne va pas s'effacer du jour au lendemain. Il faudra travailler très dur à Bakou l'année prochaine, pour la COP 29, et surtout à Belém, au Brésil, pour la COP 30. Il est nécessaire d'aller plus loin, notamment sur la solidarité avec les pays du Sud, sur l'adaptation et sur la justice climatique. La France et l'Union européenne ont réussi à construire des fondations de partenariat solides. Notre diplomatie climatique, qui prendra des formes très claires à partir du début d'année, nous permettra d'entretenir et de renforcer ce que nous avons commencé à construire avec le Président de la République.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Madame la ministre, je tiens à vous féliciter. Les deux semaines de négociations et de travaux qui se sont tenues à la COP 28 ont déjoué les pronostics les plus pessimistes. Pour la première fois depuis trois décennies, les combustibles fossiles, à l'origine de 80 % des émissions de gaz à effet de serre, figurent dans un accord issu de négociations climatiques. Vous avez remarquablement résisté aux pressions et ce texte constitue indéniablement une victoire.

Tout d'abord, c'est la première fois qu'un accord appelle à la sortie progressive des énergies fossiles, en cohérence avec l'objectif de 1,5 degré, point cardinal de l'accord de Paris pour le climat. De plus, en écho au choix de la France, ce texte donne une place inédite à la contribution de l'énergie nucléaire dans la lutte contre le changement climatique ; il ouvre la voie à une multiplication par trois des énergies renouvelables. Enfin, il enclenche concrètement la dynamique de la justice climatique pour les pays les plus vulnérables, avec l'adoption du fonds des pertes et préjudices. Il devra vraisemblablement être renforcé, mais sa concrétisation est une victoire.

Madame la ministre, il faut fêter les victoires obtenues pour le climat et se remettre au travail dès le lendemain, comme vous le faites. Quelles seront les prochaines actions de la France, qu'il s'agisse de suivre les engagements pris à Dubaï ou d'enclencher les futures négociations ? Quels sont nos leviers pour accélérer la sortie des énergies fossiles chez nos partenaires ? Pouvez-vous évoquer les partenariats bilatéraux sur le climat, tel celui signé avec l'Afrique du Sud en mars 2021 ? De quels leviers de diplomatie environnementale disposons-nous, en dehors des COP ?

La COP 28 a aussi été l'occasion pour les gouvernements français et marocain de lancer le Buildings Breakthrough, en collaboration avec le Programme des Nations unies pour l'environnement : ce projet, qui rassemble d'ores et déjà vingt-sept pays signataires, engage à faire du bâtiment résilient et bas-carbone la nouvelle norme mondiale pour 2030. Pour amplifier cette démarche, le Gouvernement a décidé de lancer le premier forum mondial sur les bâtiments et le climat, le secteur du bâtiment et de la construction pesant pour près de 40 % des émissions mondiales. Ce prochain grand rendez-vous du climat mondial se tiendra les 7 et 8 mars 2024 à Paris et une soixantaine de pays sont attendus. Madame la ministre, qu'escomptez-vous de ce sommet, qui positionne la France comme l'un des leaders dans la décarbonation des bâtiments ?

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Madame la ministre, vous avez martelé hier dans l'hémicycle à quel point vous considériez cet accord comme historique. Ce n'est pas faux : les générations futures s'en souviendront ! Ils diront : « Comment ont-ils pu ? » Comment ont-ils pu, dans un monde se dirigeant vers un réchauffement de 4 degrés, organiser la COP 28 à Dubaï, empire pétrolier, symbole de ce que le capitalisme a engendré de pire, avec 2 500 lobbyistes des énergies fossiles veillant au grain ? Comment ont-ils pu avaler que le gaz est une énergie de transition alors qu'il s'agit d'une énergie fossile ? Comment ont-ils pu se réjouir d'un accord si peu contraignant que même TotalEnergies le salue ?

Emmanuel Macron peut toujours déclarer que la priorité est de faire sortir les pays les plus avancés des énergies fossiles, nous n'avons vraiment pas de leçons à donner au monde. Il nous a annoncé la sortie du charbon pour 2027 : quelle ambition, alors qu'elle était déjà prévue pour 2022 et qu'une centrale à charbon a finalement été rouverte l'an dernier ! Et qu'avez-vous à dire des huit nouveaux puits de pétrole annoncés dans la forêt de La Teste-de-Buch, en Gironde ?

Sujet de fierté, l'accord mentionne le nucléaire et une vingtaine de pays se sont engagés à tripler leur production nucléaire d'ici à 2050. Sauf que nous sommes en situation d'urgence, et que promettre une baisse rapide des gaz à effet de serre grâce au nucléaire revient à mentir aux gens. Un rapport indépendant sur l'état de l'industrie nucléaire mondiale estime que le triplement des capacités est très irréaliste, compte tenu des longs délais de construction des centrales nucléaires. Même le PDG d'EDF considère qu'un premier EPR2 pour 2037 est un scénario optimiste. Et durant ces quinze années, nos émissions de gaz à effet de serre ne baisseront pas, le CO2 continuera de s'accumuler et la température de monter. Nous n'avons pas le temps d'attendre quinze ans ! Au lieu d'investir massivement dans les énergies renouvelables et dans une politique de sobriété, vous bloquez des milliards dans des réacteurs dont la technique n'est pas encore maîtrisée, le traitement des déchets encore moins, et qu'il ne sera peut-être même plus possible de refroidir compte tenu de la raréfaction de l'eau.

Oui, la COP 28 est une occasion manquée historique, alors que nous fonçons à toute vitesse dans le mur climatique.

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Madame la ministre, vous avez l'esprit partisan et quelque peu provocateur. Vous nous avez accusés d'inaction, chiffres à l'appui. Au risque de vous déplaire, je rappellerai votre propre bilan. Car l'arrêt de la centrale de Fessenheim, le 30 juin 2020, ce n'est pas nous ; la fin du projet Astrid – réacteur rapide refroidi au sodium à visée industrielle – de quatrième génération nucléaire, en 2019, l'objectif de réduire à 50 % la part du nucléaire dans la production électrique du pays en 2035, la réouverture des centrales à charbon, le 6 février 2022, ce n'est pas nous non plus. Nous n'avons pas de leçon à recevoir.

La COP 28 qui vient de se clore à Dubaï fait pour la première fois référence à une transition « hors » des énergies fossiles. La France y voit un synonyme de sortie, mais est-ce la même chose ? Notre mix énergétique reste encore dominé à 37 % par le pétrole, d'abord pour les transports, et à 21 % par le gaz, surtout pour le logement. Quel volume d'électricité et de chaleur renouvelable nous faudra-t-il pour réussir à se passer de leur usage ? Pouvez-vous préciser l'allusion faite par Emmanuel Macron, la semaine dernière, au lancement de huit réacteurs supplémentaires, en plus des six actuellement prévus au titre du nouveau nucléaire ? Seriez-vous prête à inscrire ces cibles dans la loi de programmation sur l'énergie et le climat ? Surtout, quand celle-ci nous sera-t-elle présentée ?

L'Union européenne n'a pas soutenu l'appel de la France à tripler la production mondiale de nucléaire : comment poursuivre une coopération européenne efficace tant que les intérêts allemands et français continueront de diverger en la matière ? Le gaz a également été au cœur des discussions à Dubaï : comment concilier le statut d'énergie de transition qui lui est accordé et la sortie des énergies fossiles ? Sur quelles alternatives misez-vous pour le remplacer, alors que la France a largement fait appel au gaz naturel liquéfié et au gaz algérien pour parer aux conséquences de la guerre en Ukraine ?

Ayant récemment déposé une proposition de loi, cosignée par Olivier Marleix, Éric Ciotti et les députés du groupe Les Républicains, visant à proscrire le recours au charbon comme source de production d'énergie électrique, je me réjouis que le Gouvernement ait défendu la sortie du charbon à Dubaï. Alors que le Président de la République vient de reporter cet objectif à 2027, comment la France compte-t-elle incarner cette position ? Enfin, les États ont acté, lors de la COP 28, que le nucléaire, l'hydrogène et le captage de carbone étaient des solutions en matière de transition : quelles mesures la France compte-t-elle prendre pour soutenir le progrès technique en matière de transition environnementale ?

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Je me réjouis tout d'abord des avancées de cette COP 28, malgré les nombreux signaux contraires initiaux – un rendez-vous dans un pays producteur de pétrole et des membres de l'Opep faisant pression pour entraver un accord ambitieux. Cet accord est la suite logique de la COP 21 qui s'était tenue à Paris : il fait enfin mention de la nécessaire réduction puis de la sortie des énergies fossiles comme le pétrole ou le gaz. Me voulant optimiste, je souhaite tout de même vous interroger, madame la ministre, sur la terminologie employée : si le texte retient actuellement la mention de transition « hors » des énergies fossiles dans les systèmes énergétiques, pensez-vous qu'il sera possible de faire figurer la notion d'« abandon » dans les prochaines COP ?

La réduction des émissions de méthane a été l'un des facteurs importants de cette COP : quels sont les engagements des sociétés pétrolières et gazières pour les ramener à un niveau proche de zéro d'ici à 2030, et arrêter le torchage du gaz naturel ? Quels sont les engagements de la France sur ces points ? Par ailleurs, comment la France se positionne-t-elle envers les trente pays qui ont signé une reconnaissance mutuelle des certificats d'hydrogène propre ? Serons-nous amenés, comme les Allemands, à importer de l'hydrogène vert produit sur d'autres continents ?

J'évoquerai également l'objectif de tripler les capacités d'énergies renouvelables. Au-delà de la COP, nous avons des différends avec l'Union européenne quant à nos objectifs de production issue des renouvelables. Pouvez-vous faire un point sur cette situation ? Nous avons été en difficulté du point de vue de notre souveraineté énergétique : s'agissant de l'hydrogène vert, quelles sont les ambitions pour la France ? Enfin, concernant la bio-méthanisation, comment permettre aux exploitations et à la filière agricole d'assurer leur souveraineté énergétique en milieu rural, mais également diminuer leur impact environnemental ?

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J'irai droit au but : si nous pouvons nous réjouir que l'accord résultant de la COP reconnaisse, pour la première fois, la nécessité de s'éloigner des combustibles fossiles, nous ne pouvons le considérer comme historique. Je le dis d'autant plus facilement, madame la ministre, que nous avons travaillé et voté avec vous le texte relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables. Force est de constater que les décrets soumis à discussion ne sont pas à la hauteur des promesses que vous nous aviez alors faites.

La COP a permis de montrer le décalage entre les engagements des États et ce qui serait nécessaire pour limiter le réchauffement climatique à un niveau proche de 1,5 degré. Le texte ne fixe ni objectif, ni calendrier de sortie des énergies fossiles. Or, le dernier rapport du Giec précise que pour respecter les accords de Paris, l'utilisation du charbon doit être réduite de 95 % dans le monde entier, celle du pétrole de 60 % et celle du gaz de 45 %, d'ici à 2050.

En résumé, cet accord ne semble pas programmer la fin des énergies fossiles, mais au contraire justifier de les conserver un peu plus. C'est ce que fait votre Gouvernement : la sortie du charbon promise pour 2022 est désormais reportée en 2027, alors que notre pays fait face à des besoins d'électrification massifs, que notre parc nucléaire est vieillissant et que l'accélération des énergies renouvelables peine à compenser nos besoins accrus en électricité.

C'est pourquoi mon groupe réitère ici la volonté de débattre d'une loi de programmation énergétique d'une autre portée que les textes qui nous sont imposés, tels que celui voté hier. Il s'agit de l'unique moyen de nous assurer collectivement que nous sortirons bien des énergies fossiles, tout en construisant un cadre propice au développement des énergies décarbonées. Madame la ministre, à quand une grande loi de programmation énergétique ?

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Huit ans après la COP 21 et l'adoption historique de l'accord de Paris, la COP 28 marque une étape déterminante dans la lutte contre le changement climatique, notamment grâce à la position exigeante et volontariste de la France et de l'Union européenne lors des négociations. L'accord sur la sortie progressive des énergies fossiles permettra en effet d'atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050 et de respecter l'objectif de limitation du réchauffement à 1,5° degré. En tant que parlementaires, nous serons attentifs à la mise en œuvre de l'accord.

Je salue votre travail et celui de l'ensemble de vos collaborateurs lors de ces trois jours de négociations. Il est facile d'oublier, lorsqu'on est assis au fond d'une salle de réunion à Paris, que la COP a réuni 130 pays, chacun avec ses exigences, et que la France et ses 66 millions d'habitants ne peuvent imposer leurs vues à 7 milliards de personnes. Nous nous réjouissons de l'objectif de tripler l'utilisation des énergies renouvelables dans le monde d'ici à 2030 ainsi que de la reconnaissance de l'importance de l'énergie nucléaire.

(Exclamations.)

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Le 13 décembre, la presse titrait sur le « message très fort » envoyé par l'accord de la COP 28 aux marchés et soulignait que « TotalEnergies applaudit et se réjouit de la mention du gaz comme énergie de transition ». Si vous n'aviez pas décerné la Légion d'honneur au PDG de TotalEnergies avant de l'accréditer dans votre délégation, on aurait pu se demander si vous aviez bien participé à la même COP 28 que les autres. C'est vrai, cela ne faisait qu'un lobbyiste des énergies fossiles de plus sur les 2 500 qui étaient présents. Ils nous ont pourtant déclaré la guerre, ignorant l'impératif de cesser tout nouveau projet d'énergie fossile, pourtant martelé par les scientifiques, et soutenant les énergies de transition et le recours au captage qui font la joie des industries et pays pétroliers.

Les plateformes internationales de coconstruction de solutions que sont les COP sont nécessaires, car chaque pays, du plus puissant au plus faible, peut y faire entendre sa voix face au plus grand défi auquel l'humanité a jamais été confrontée. Quelle voix y avez-vous portée pour la France, madame la ministre ? Celle de la sortie de toutes les énergies fossiles – charbon, pétrole et gaz ? Non ! Vous avez préféré faire de ces négociations un outil de communication pour vos lubies nucléaires et vos nouveaux forages pétroliers en Gironde, alors que le phase down, la réduction, est en train de remplacer le phase out, l'élimination si nécessaire. Était-ce la voix de l'abandon des bombes climatiques ? Non ! Vous préférez soutenir le projet Eacop (oléoduc de pétrole brut d'Afrique de l'Est) et empêcher les députés de soutenir les solutions de transition, comme la sobriété et la réduction de la consommation de viande ou du transport par avion. Votre majorité va jusqu'à s'opposer à l'option végétarienne dans les cantines !

La voix de la France dans ces négociations est cruciale. Défendra-t-elle demain le traité de non-prolifération des énergies fossiles ? Cessera-t-elle de soutenir les projets de bombes climatiques des majors du pétrole ? Ou trouvez-vous cela trop « pisse-vinaigre » ?

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La COP 28 a permis de tracer une ligne directrice vers l'abandon progressif des énergies fossiles et de mettre ainsi en ordre de marche l'ensemble des acteurs malgré leurs intérêts divergents. Ce n'est pas un symbole : on n'imagine pas que certains puissent faire machine arrière.

Comment le climat international particulièrement tendu, entre guerres et catastrophes économiques et climatiques, s'est-il reflété dans les négociations ? Les experts nous alertent de façon toujours plus pressante sur la nécessité de ne pas dépasser un réchauffement global de 1,5 degré. Comment accélérer le mouvement alors que, selon l'ancienne coprésidente du groupe 1 du Giec Valérie Masson-Delmotte, le respect de tous les engagements ne permettrait une baisse que de 5 % des émissions de gaz à effet de serre contre les 43 % nécessaires pour maintenir le réchauffement sous le seuil des 2 degrés ? Comment composer au niveau national avec cet échec annoncé ?

Quelle a été votre perception du rôle de la Chine, vu comme constructif et facilitateur par les commentateurs, et de celui des entreprises, qui sont des acteurs clés de la transition énergétique ? Trouvez-vous normal que les pays ne respectant pas les engagements, comme c'est le cas de l'accord visant à tripler les capacités de production des énergies renouvelables d'ici à 2030, ne soient pas sanctionnés ?

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Avant de donner la parole à M. Jean-Victor Castor au nom du groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES, je voudrais rendre hommage à Hubert Wulfranc, en espérant que son pot de départ d'hier ne soit pas un pot d'adieu, mais d'au revoir.

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Je m'exprime en tant que porte-parole des peuples du Sud. La Guyane est en effet un pays du Sud, sous-développé, oublié, alors qu'il fait partie intégrante de la France. Avant de prendre part à des négociations telles que celles de la COP, la France devrait balayer devant sa porte. Je vous invite, madame la ministre, à lire le rapport de la mission d'information sur l'aménagement et le développement durables du territoire en Guyane, car ce qui s'y passe est un véritable scandale. Le plateau de la Guyane connaît un développement hors norme de l'exploitation des énergies fossiles – au Venezuela, au Guyana, au Suriname, où M. Pouyanné vient de signer un contrat d'investissement de 9 milliards, au Brésil avec l'entreprise Petrobras. Et la solidarité que la Guyane devrait recevoir de la France reste un vain mot.

Les peuples du Sud ont besoin de se développer, mais ce ne sont pas eux qui ont pollué la planète. Or ils subissent de plein fouet les conséquences de cette pollution. Des Guyanais feront-ils partie de la délégation de la France lors de la prochaine COP à Belém ? Notre voix sera-t-elle entendue ?

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Les Guyanais, comme n'importe quel Français en rapport avec les enjeux de la COP – étudiant, dirigeant d'entreprise, chercheur ou encore parlementaire – pourront obtenir une accréditation pour la COP de Belém. Je rappelle que la délégation française à la COP 28 comptait 800 personnes, mais que seules 250 d'entre elles ont participé aux négociations. Certains d'entre vous ont parlé de l'action des lobbyistes. C'est un élément de langage qui ne me paraît pas à la hauteur des enjeux de la COP, car je rappelle que les lobbyistes y sont présents pour organiser des événements de communication mais qu'ils ne participent pas aux négociations.

Madame Meynier-Millefert, la France travaille sur des plans de résilience avec les pays qui se trouvent aux premières loges du changement climatique, comme le Bangladesh. Elle travaille également à des partenariats bilatéraux, par exemple sur le nucléaire, afin de tripler son utilisation d'ici à 2050, ou sur le transport maritime vert. S'agissant de la sortie du charbon, question sur laquelle le Président de la République s'est fortement engagé, ces partenariats permettent d'accompagner socialement et économiquement des pays souhaitant fermer leurs centrales à charbon, comme l'Afrique du Sud, avec un engagement de 1 milliard d'euros sur cinq ans, ou encore le Vietnam, l'Indonésie ou le Sénégal, pour un total de 8,5 milliards de dollars de financement. Autre initiative bilatérale, celle du Buildings Breakthrough avec le Maroc, qui s'inscrit dans les efforts de plusieurs pays pour se mettre d'accord sur des objectifs communs de décarbonation de l'industrie du bâtiment. Quant au financement, nous continuons de dérouler l'agenda de Paris à l'occasion des réunions du G7, du G20 ou de l'Assemblée générale des Nations Unies et cherchons à créer des coalitions spécifiques à chaque continent.

Madame Stambach-Terrenoir, votre présentation des négociations de la COP est caricaturale ; j'ai déjà répondu s'agissant du rôle des lobbyistes. Vous contribuez par ailleurs à diffuser des fake news : il n'a jamais été question de fermer la centrale de Cordemais en 2022. Quant au nucléaire, oui, nous sommes capables de tripler nos capacités d'ici à 2050, et ce sera déjà bien engagé en 2030. Mais vous avez sans doute raison contre les 196 pays qui se sont engagés, qui considèrent tous que l'énergie nucléaire est bas-carbone et contribue à la lutte contre le dérèglement climatique !

Je distingue bien au sein de la NUPES les groupes qui ont voté en faveur de la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables et ceux qui ont voté contre. Certains ont pris leurs responsabilités. D'autres font de l'écologie de pacotille.

(Exclamations.)

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Ministre ou pas ministre, il faut être respectueuse !

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Je le suis, je me contente de rappeler les faits.

Enfin, madame Stambach-Terrenoir, contrairement à ce que vous dites, les émissions de gaz à effet de serre ont baissé en France, à hauteur de 4,6 % au cours des trois derniers trimestres. Trouvez-moi un seul autre pays dans le monde qui y parvienne.

Monsieur Vermorel - Marques, j'ignore quelle sera la traduction officielle des expressions transition away et phase out, mais les termes transition et phase expriment la même idée d'un processus ordonné par étapes et ceux de out et away expriment celle de sortie. Ce qui est clair, c'est que cela n'a rien à voir avec du phase down. Si l'expression transition away a été retenue, c'est parce que celle de phase out était devenue taboue, comme il nous arrive à tous de déposer un amendement pour modifier certains mots devenus indésirables en conservant le même objectif.

S'agissant du volume d'électricité et de chaleur, je rappelle que la stratégie française pour l'énergie et le climat est en cours de concertation publique. Vous pouvez y contribuer. L'engagement est pris de construire six nouveaux réacteurs nucléaires et huit autres sont à l'étude, avec une décision prévue pour fin 2026. L'Union européenne ne s'est pas ralliée à la déclaration commune sur le nucléaire, mais les pays de l'alliance européenne du nucléaire, si. J'ai réuni hier l'Alliance du nucléaire en présence de représentants de l'Union, afin de construire une stratégie nucléaire. La directrice générale de l'énergie de la Commission européenne nous a invités à reporter les objectifs ainsi définis dans les plans nationaux pour l'énergie et le climat, ce qui semble légitime. Le nucléaire a également été pris en compte dans le Net-Zero Industry Act. Le logiciel est donc en train de changer.

Quant au gaz, c'est une énergie de transition. Il répond notamment aux besoins des pays en développement, qui, entre le charbon et les énergies renouvelables, auront probablement besoin d'une phase de gaz naturel, moins émetteur que le charbon. Ce sont d'ailleurs les pays africains les plus pauvres qui se sont opposés le plus fermement à la sortie des énergies fossiles, car ils ont besoin de moyens de développement, comme c'est aussi le cas de la Guyane. Nous devons entendre leur voix : s'ils sont privés d'un moyen de développement naturel, les énergies fossiles, il leur en faut d'autres.

Concernant le charbon, je rappelle que la fermeture de la centrale de Cordemais est prévue pour 2027. Nous avons publié, avec Roland Lescure, une stratégie CCUS (capture, stockage et utilisation du carbone). La capture de carbone n'étant pas adaptée à tous les usages et afin d'éviter que cette technologie ne soit utilisée pour retarder la sortie des énergies fossiles, cette stratégie n'a pas vocation à s'appliquer à tous les secteurs, mais seulement à ceux dans lesquels la baisse des émissions est la plus difficile

Monsieur Cosson, les prochaines COP poursuivront les efforts déjà engagés pour abandonner les énergies fossiles. Les entreprises pétrolières européennes, mais également les entreprises nationales d'Arabie saoudite et des Émirats arabes unis ont formé des coalitions pour aller dans ce sens. L'ensemble des groupes pétroliers de la planète doivent se joindre à ces efforts et nous devons viser une interdiction du torchage à l'horizon 2030.

Sur la reconnaissance mutuelle des certificats d'hydrogène propre, ainsi d'ailleurs que sur la bio-méthanisation, je vous renvoie encore à la stratégie pour l'énergie et le climat. Aujourd'hui, les deux tiers de notre mix énergétique sont importés : ils ne seront pas remplacés par la production locale du jour au lendemain. Nous devrons donc importer une partie de notre hydrogène, mais nous voulons développer nos capacités de production afin d'éviter une situation de dépendance comme celle que nous connaissons pour le pétrole, qui est importé à 99 %.

Monsieur Delautrette, vous avez voté, en responsabilité, la loi sur les énergies renouvelables et vous y avez introduit certains éléments. Ses dispositions concernant l'agrivoltaïsme sont équilibrées. Certaines contrevérités circulent à ce sujet et nous pourrons discuter des décrets d'application.

Les objectifs chiffrés de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont écrits noir sur blanc dans l'accord de la COP 28 : une réduction de 43 % en 2030, un pic en 2025 et une sortie en 2050. Pour y parvenir, nous avons élaboré avec vous la stratégie pour l'énergie et le climat, qui est sur la table depuis le 22 novembre et que vous avez contribué à nourrir, même si vous n'êtes pas d'accord avec tout.

Madame Pochon, quand on ne vote pas la loi pour l'accélération des énergies renouvelables, à quel titre parle-t-on d'écologie ? (Exclamations.) Il faut être un tout petit peu cohérent.

L'accord de la COP 28 n'entérine pas de phase down. Il produit des effets concrets en France : le Crédit Agricole a par exemple annoncé qu'il ne financerait plus les énergies fossiles. Il contient également des dispositions sur la sobriété. À ce propos, je vous rappelle que le Gouvernement a lancé un plan de sobriété, et que la réduction de 12 % de la consommation de gaz et d'électricité qui s'est ensuivie n'est sans doute pas étrangère à la baisse de 4,6 % de nos émissions de gaz à effet de serre. Je constate donc que plusieurs de vos propos sont infondés.

Monsieur Bricout, afin de parvenir à ne pas dépasser l'objectif de 1,5 degré, chaque pays doit augmenter ses engagements nationaux. Nous le faisons au sein de l'Union européenne. Plusieurs autres pays ont annoncé des avancées, mais l'enjeu des deux prochaines COP est d'accélérer le mouvement pour être crédible.

La COP 28 est une grande victoire du multilatéralisme qui est d'autant plus importante dans le contexte de confrontations militaires, géopolitiques et économiques que nous connaissons. La Chine n'a pas été à la manœuvre dans la négociation de l'accord, mais à aucun moment elle n'a bloqué les négociations et le texte sur lequel elle s'était mise d'accord avec les États-Unis deux semaines avant le début de la COP a clairement contribué à lancer la discussion sur la sortie des énergies fossiles. Certes, l'accord obtenu est un engagement volontaire, qui n'est assorti d'aucune sanction, mais il est un outil utile, tant pour les législateurs nationaux que pour l'opinion publique : alors qu'avant les accords de Paris, nous étions sur une trajectoire de 4° degrés, elle s'établit aujourd'hui entre 2 et 2,8° degrés.

Concernant le triplement des énergies renouvelables, la France, l'Europe et les États-Unis sont déjà sur la bonne trajectoire, ainsi que la Chine, qui va mettre en ligne 1 200 gigawatts – soit un tiers des capacités mondiales – avant 2030, avec quatre à cinq ans d'avance sur le programme. En revanche, les pays en développement, notamment en Afrique, ont du mal à financer des projets pourtant très compétitifs, permettant de produire de l'électricité à 15 euros du mégawattheure. Il faut donc trouver des solutions pour dérisquer ces investissements.

Monsieur Castor, vous avez insisté sur le développement de l'exploitation des énergies fossiles sur le plateau guyanais. La déclaration des pays africains en développement disant qu'ils ne voulaient pas sortir des énergies fossiles a fait beaucoup de bruit à la COP. Ils ont fait valoir qu'ils n'allaient pas compromettre leur développement faute d'alternatives, alors qu'ils n'avaient pas de responsabilité historique dans le réchauffement climatique et qu'ils ne représentaient que 4 % des émissions mondiales. Il faut toutefois garder à l'esprit que même si les pays développés n'émettaient plus aucun gaz à effet de serre, il en resterait 60 % dans l'atmosphère. La responsabilité pour le passé est une chose, l'action dans le présent en est une autre.

Aujourd'hui, les émissions se répartissent également entre trois groupes de pays : les pays développés, la Chine, et l'ensemble des autres pays. Cela dit, les peuples du Sud n'ont pas pollué la planète et nous devons leur donner les moyens d'une part d'assurer leur développement grâce à des énergies décarbonées, d'autre part de s'adapter face aux catastrophes provoquées par le réchauffement. En Guyane, l'enjeu de la biodiversité, qui est la deuxième face de la lutte contre le réchauffement climatique, est majeur. Les investissements dans ce domaine présentent un très fort retour sur investissement, mais ils sont insuffisamment mis en valeur.

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Outre le triplement des énergies renouvelables d'ici à 2030 et le développement du nucléaire, il faudrait s'intéresser aux technologies de captage et de stockage du carbone (CCS), encore balbutiantes mais indispensables à l'avenir. La COP 28 a-t-elle permis des avancées dans ce domaine ?

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Lors de la COP 28, le Président de la République et son homologue kazakh ont annoncé la tenue du One Water Summit en 2024. En tant que corapporteur de la mission d'information sur l'adaptation de la politique de l'eau au défi climatique, je salue cette initiative. L'eau est essentielle pour la vie et la biodiversité, ainsi que pour toutes les activités humaines, industrielles et agricoles. Il est indispensable de protéger la ressource en eau alors qu'elle connaît une crise majeure et qu'elle vient à manquer. Ce sommet diplomatique inédit sera consacré à l'accès à l'eau. Pouvez-vous nous en dire plus ? Quels sont les enjeux, les attentes et le calendrier prévu pour le One Water Summit ? Qu'en est-il du lien entre l'eau et les sujets énergétiques ?

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Le charbon ne représente que 0,6 % du mix énergétique français en 2022 et notre pays en sortira définitivement en 2027. Mais force est de constater qu'à l'échelle internationale, c'est une autre affaire. En effet, 27 % du mix énergétique mondial est lié au charbon. La demande mondiale de charbon bat des records, atteignant 8,53 milliards de tonnes cette année, selon l'Agence internationale de l'énergie.

Le Président de la République a rappelé lors de son discours d'ouverture de la COP 28 que 500 gigawatts de nouvelles capacités en charbon sont en cours de planification. Les centrales existantes, qui se concentrent largement en Asie, émettront à elles seules suffisamment de CO2 pour que nous excédions la cible de réchauffement de 1,5 degré de l'accord de Paris.

Il est temps pour l'humanité de fixer une date de fin du charbon pour chaque pays et de renoncer à tout nouveau projet de centrale. Durant cette COP 28, la France a lancé une initiative pour accélérer la transition en la matière, le Coal transition accelerator, afin de mettre notre diplomatie au service de ce qui est appelé le Coal phase-out. Pourriez-vous nous parler plus précisément de cette initiative, du nombre de pays qui ont déjà annoncé une date de sortie du charbon et la manière dont nous pourrons les aider à le faire ?

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Heureux des avancées obtenues à la COP 28, que j'associe à votre action concrète pour notre pays, j'ai quatre questions précises à vous poser.

À l'occasion de votre récente visite dans le Rhône pour inaugurer l'usine Symbio de piles à combustible, vous avez présenté les contours de la future stratégie nationale dans l'hydrogène. Pouvez-vous nous indiquer la place qu'elle fera à l'exploration de l'hydrogène naturel ?

Hier, au Conseil supérieur de l'énergie, nous avons examiné et amendé le décret relatif au développement de l'agrivoltaïsme. Pouvez-vous nous préciser votre approche du développement de ce système ?

En novembre 2022, le Gouvernement a mis en place une délégation de programme interministérielle au nouveau nucléaire. Un an plus tard, pouvez-vous nous préciser son périmètre d'action et nous dire quel est son apport ?

Enfin, que ce soit pour accélérer le développement des énergies renouvelables ou la relance du nucléaire, envisagez-vous de faire un travail spécifique avec votre collègue de l'enseignement supérieur afin d'orienter l'offre de formation vers les métiers que proposent ces secteurs ?

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L'accord de la COP 28 prévoit l'abandon progressif des énergies fossiles, avancée dont je me réjouis. Cet accord porte aussi sur le domaine maritime, sachant que l'océan représente 70 % de la surface du globe et absorbe environ un tiers des émissions de carbone. Dans le prolongement de la question de Yannick Haury, j'aimerais avoir votre appréciation de la place de l'océan dans cet accord. Selon vous, quels seront les objectifs de la prochaine COP en matière maritime ?

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Ce matin, la route menant à Risoul est rouverte. Elle était fermée depuis le 1er décembre, jour où des pluies diluviennes ont provoqué de lourds dommages dans le département des Hautes-Alpes. Dans nos montagnes, les températures ont atteint des niveaux records durant l'été 2023. Elles se réchauffent deux fois plus vite que les autres écosystèmes : la température y a augmenté de plus de 2 degrés au cours du XXe siècle, contre 1,4 degré dans le reste de la France. Ces records de chaleur se traduisent très concrètement dans nos territoires : les catastrophes naturelles deviennent de plus en plus gravissimes pour l'environnement et les activités humaines. N'est-il pas temps de se préoccuper sérieusement des conséquences du changement climatique dans les territoires de montagne, au cours des prochaines COP et dans toutes les autres rencontres qui traitent de ce sujet ?

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À l'occasion de la COP 28, une vingtaine de pays, dont la France, viennent d'appeler à tripler la production d'énergie nucléaire d'ici à 2030. Depuis le lancement du parc nucléaire français, notre pays a échappé à vingt-cinq années d'émissions de CO2 comme celle de 2022 et a évité le recours à des énergies fossiles comme le gaz ou le charbon. Cependant, le maintien de notre production va requérir un financement important en faveur du nouveau nucléaire. Soutiendrez-vous la demande d'EDF de recourir davantage à des contrats de long terme pour améliorer la visibilité de ses recettes ?

Où en est-on en ce qui concerne l'énergie marémotrice, qui présente l'avantage d'être parfaitement prédictible ? Ne représente-t-elle pas une perspective intéressante à l'heure où l'on cherche à profiter davantage de l'énergie marine ? La géothermie, et plus particulièrement la géothermie marine, qui exploite les calories thermiques d'une ressource inépuisable, à savoir la mer, est-elle suffisamment accompagnée dans son développement ?

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Les résultats de la COP 28 constituent une avancée importante dans la lutte contre le dérèglement climatique, mentionnant pour la première fois une transition sans les énergies fossiles. Or, pour atteindre nos objectifs climatiques, l'instauration plus rapidement d'un modèle circulaire au sein de l'économie française est absolument nécessaire : le réemploi, l'écoconception et le recyclage sont des procédés permettant de réduire à la fois notre consommation de matières premières et notre empreinte carbone.

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a permis de fixer des objectifs nationaux ambitieux en la matière ; l'Union européenne s'est saisie du sujet, notamment par le biais du règlement sur les batteries de juillet 2023 ; le Parlement européen a adopté un texte sur les emballages le mois dernier. Cela étant, une action coordonnée de promotion de l'économie circulaire au niveau international est indispensable. Pouvez-vous nous préciser quelles sont les avancées de la COP 28 en matière d'économie circulaire ? Estimez-vous qu'elles sont suffisantes au regard de l'urgence des enjeux climatiques ?

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Madame la ministre, chacun d'entre nous a droit au respect dans cette commission, quelles que soient ses convictions politiques, et je suis surpris par votre arrogance – une attitude qui n'a pas rendu service à votre collègue ministre de l'intérieur et des outre-mer. Nous sommes peut-être des élus de pacotille, mais nous avons la légitimité de l'élection, ce qui n'est pas votre cas, si je ne m'abuse.

Le texte final de la COP mentionne le triplement des capacités de l'énergie nucléaire dans le monde d'ici à 2050. De nombreux élus ont exprimé leur scepticisme, notamment lorsque vous avez décidé la fermeture de Fessenheim. Ils constatent votre volonté de relance de la filière nucléaire, après tant de décisions irresponsables pour notre indépendance énergétique et le portefeuille des Français. Le 14 décembre dernier, les États membres et les eurodéputés ont conclu un accord visant à réformer le marché européen de l'électricité, afin de favoriser l'investissement dans les énergies décarbonées, y compris le nucléaire, et de modérer les factures des consommateurs. Quels sont le calendrier et les modalités de mise en place de cet accord en France ? Pourriez-vous aussi répondre à la question de notre collègue Vermorel-Marques sur le calendrier de la programmation pluriannuelle de l'énergie ?

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L'objectif de transition hors des énergies fossiles qui est affiché à l'issue de la COP 28 suppose une évolution en profondeur de notre mix énergétique et la montée en puissance de l'électricité. Plusieurs collègues viennent d'évoquer l'indispensable relance de la production d'énergie nucléaire. Pour ma part, je voudrais vous interroger sur la production d'énergie hydroélectrique, actuellement contrariée par la question restée en suspens de l'ouverture à la concurrence des concessions. Notre commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France avait préconisé une évolution du cadre juridique qui permettrait la reprise des investissements trop longtemps différés, en particulier sur les ouvrages exploités par EDF. Pouvez-vous nous indiquer si ce dossier a progressé ?

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Pour compléter ma précédente intervention, madame la ministre, je voudrais vous interroger sur la géothermie, profonde et de surface, thème d'une mission flash que je conduis actuellement avec Gérard Leseul. On parle assez peu de cette énergie qui représente actuellement une production de 7 térawattheures (TWh) en France. Nous pourrions porter la production à 100 ou 150 TWh, ce qui représenterait une part importante de la production de chaleur, sachant que l'Allemagne, dont la géologie est certes plus favorable, envisage de produire 600 TWh. Pourriez-vous nous dire quelques mots du plan national que vous avez lancé pour développer la géothermie, qui sera un géant de l'énergie renouvelable dont nous avons besoin ?

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Député de la Gironde, j'ai besoin de comprendre la cohérence qu'il y a entre les déclarations du Gouvernement sur la sortie des énergies fossiles et le choix d'accorder à la société Vermilion Energy l'autorisation de forer de nouveaux puits de pétrole à La Teste-de-Buch dans le bassin d'Arcachon. Concevez-vous que cette décision provoque une profonde incompréhension, que le décalage entre le discours et les actes jette un trouble sur la crédibilité de vos engagements ? Merci de nous éclairer sur cette décision concernant la Gironde car nous n'y comprenons plus rien.

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Parmi les pays du Sud qu'a évoqués Jean-Victor Castor, j'aimerais insister sur la situation des micro-États insulaires, dont les revendications étaient brillamment portées à la COP 28 par Mia Mottley, Première ministre de la Barbade. Avez-vous vraiment conscience de la situation des îles, en particulier de celles qui sont régies par la France, eu égard au changement climatique ? Les accords semblent marquer un changement culturel, mais sans prévoir de moyens contraignants. Or le changement se lit déjà dans le recul des traits de côte.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique

Madame Brulebois, en ce qui concerne les CCS, notre stratégie nationale a été annoncée en Conseil national de l'industrie par Roland Lescure et moi-même à la fin du premier semestre. Complétée et précisée dans la stratégie française pour l'énergie et le climat, elle fera l'objet de soutiens financiers en fonction d'une double logique : les CCS sont réservés aux secteurs où les émissions sont les plus difficiles à réduire et où il n'existe pas d'autre solution ; ils peuvent aussi représenter une solution de transition, le temps de mettre en place les filières hydrogène. Pour créer les infrastructures nécessaires, notamment dans la région de Dunkerque, je vais signer un accord avec la Norvège, le pays européen le plus avancé dans ce domaine.

En tenant un One Water Summit avec le Kazakhstan, nous voulons rééditer ce qui a été fait lors des sommets internationaux consacrés aux forêts ou aux mondes polaires et glaciaires : former des coalitions de pays afin de répondre de manière complète à une préoccupation majeure d'un point de vue climatique, en sortant de la seule problématique de baisse des émissions de gaz à effet de serre – car cela nous ferait passer à côté d'une partie des sujets. En matière de transition énergétique et écologique, l'eau représente un enjeu géopolitique et existentiel majeur, d'où l'intérêt d'associer un pays comme le Kazakhstan à la démarche. Pour être attractives et efficaces, nos initiatives réunissent toujours des pays du Nord et des pays du Sud. Constatant que le sommet sur les forêts a été suivi d'effet, nous ne pouvons qu'espérer le même sort au sommet sur l'eau.

En ce qui concerne le charbon, monsieur Adam, la coalition bâtie par le Président de la République a été élargie à la faveur de cette COP 28. Les membres du G7 se sont engagés, fortement encouragés par la France, à assécher les financements publics du charbon. Nous voulons désormais tarir les financements privés. Nous voulons aussi élargir la coalition des pays qui s'engagent à ne plus ouvrir de nouvelles centrales à charbon. Enfin, nous voulons trouver les modalités d'accompagnement des pays qui ferment ces centrales car, comme nous avons pu le constater dans les cas français de Cordemais ou de Saint-Avold, il est alors nécessaire de prendre de coûteuses mesures sociales et économiques. Si elles ne sont pas simples à réaliser en France, de telles reconversions sont encore plus difficiles dans des pays en développement et très endettés. Nous devons apporter des solutions et ne pas nous contenter de « y'a qu'à, faut qu'on » moralisateur.

S'agissant de l'hydrogène naturel, j'ai signé les premières autorisations d'exploration, afin d'évaluer les volumes et la qualité de la matière première présente sur le territoire. Si nous trouvons de l'hydrogène blanc en quantité importante, nous pourrons espérer que l'extraction se fera à un coût compétitif et permettra d'alimenter nos filières industrielles. Ce serait une très bonne nouvelle, même si ce n'est pas une énergie renouvelable. L'option défavorable serait que l'exploration contribue à dégager du méthane, l'un des gaz les plus nocifs en matière de réchauffement climatique. À ce stade, nous nous en tenons donc à des explorations très contrôlées. D'aucuns sont très optimistes. Mon expérience de ministre m'incite à penser qu'il n'y a jamais de martingale, de solution miracle qui réponde à tout. Si l'hydrogène pouvait devenir une source d'énergie complémentaire, ce serait déjà bien. Quoi qu'il en soit, le Président de la République soutient les recherches d'hydrogène blanc.

Le décret sur l'agrivoltaïsme suscite beaucoup d'interrogations, notamment s'agissant de la souveraineté agricole. Rappelons qu'il est écrit dans la loi que le développement de l'agrivoltaïsme ne doit pas nuire aux rendements agricoles – au contraire. Non seulement nous avons pris un engagement à ce sujet, mais, le cas échéant, le juge serait amené à se prononcer en ce sens. Ce décret vise à faire en sorte que ce développement soit fait de manière ordonnée et équilibrée, mais il ne peut pas aller plus loin dans le partage de la valeur car le législateur ne l'a pas permis. La question des baux ruraux – qui entre dans la formation de ce partage de la valeur – n'est pas traitée par la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables. C'est un angle mort de la loi, où se rencontrent les questions énergétiques et agricoles.

La loi est bien rédigée car elle précise que l'agrivoltaïsme doit améliorer les rendements agricoles, mais elle peut être interprétée, voire contournée, ce qui provoque l'inquiétude légitime de certains acteurs. Vous avez prévu un avis conforme de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, et nous avons travaillé avec les chambres d'agriculture pour bien encadrer le système. Il reste que le bail rural est rémunéré quelques centaines d'euros pour une exploitation agricole, alors que certains opérateurs escomptent tirer quelques milliers d'euros par hectare en faisant paître des moutons sous une installation de panneaux photovoltaïques. Cela pose un problème d'équilibre auquel nous devons remédier.

La délégation de programme interministérielle au nouveau nucléaire permet au Gouvernement de suivre pas à pas l'état de préparation de la filière nucléaire, la montée en compétences de notre pays en lien avec l'Université des métiers du nucléaire, et l'évolution des procédures nucléaires et de tous les chantiers. Cette délégation nourrit les travaux du Conseil de politique nucléaire et suit le projet de réacteur de recherche Jules Horowitz (RJH), qui contribue à renforcer notre connaissance et notre excellence dans ce domaine.

En matière d'offre de formation, je travaille en effet avec Sylvie Retailleau : 40 millions d'euros vont être consacrés à des formations de niveau bac professionnel à bac+5, notamment en Normandie. Nous avons créé un passeport nucléaire, qui consiste ajouter des heures de formation spécifiques dans certains BTS ou bacs professionnels afin de leur donner cette coloration : vous aurez ainsi des chaudronniers ou soudeurs nucléaires par exemple.

Madame Boyer, je comprends et partage votre inquiétude concernant la montagne. Ceux qui sont proches des côtes s'inquiètent légitimement du retrait du trait de côte, tandis que les montagnards constatent que le réchauffement climatique affecte plus fortement leur territoire que d'autres. C'est pour cela qu'il faut agir, en développant aussi bien les énergies renouvelables que le nucléaire. On peut parfois s'inquiéter de la transformation des paysages sous l'effet d'équipements contestables, mais leur transformation fondamentale est due au dérèglement climatique. Il faut donc aider les territoires à affronter la situation, en essayant d'anticiper les investissements le plus possible pour avoir à subir le moins possible l'impact du dérèglement climatique.

Monsieur Maquet, je vous confirme que nous soutenons la demande d'EDF de recourir davantage à des contrats de long terme, non seulement pour améliorer la prévisibilité de ses recettes mais aussi pour permettre au consommateur d'anticiper le montant de ses factures. À un moment où le prix moyen de l'électricité se rapproche de 80 euros le mégawattheure, on mesure l'importance de mettre des volumes d'électricité sur le marché en 2026, 2027, 2028 et si possible en 2029, de façon à donner cette visibilité et à permettre à chacun d'avoir accès à de l'électricité peu chère.

En matière d'énergie marémotrice, nous soutenons le projet FloWatt. Avec un prix de 250 à 270 euros, cette énergie est loin d'être compétitive, ce qui est normal en phase de développement. Il faut prendre un risque industriel en considérant la valeur propre de cette énergie. Quant à la géothermie marine, elle permet déjà de refroidir et réchauffer l'hôpital de La Réunion. D'autres projets sont en cours d'examen. Nous en sommes à un stade d'accompagnement en recherche et développement, avant industrialisation et massification de la solution, en attendant qu'elle soit vraiment compétitive.

L'économie circulaire fait bien partie des objectifs de la COP 28, madame Tiegna. Outre l'accord chapeau, il y a en effet des centaines de pages qui reflètent l'énorme travail accompli par la présidence pour concilier tous les objectifs dans un texte unique.

Monsieur le député Taite, si j'ai fait preuve d'arrogance, veuillez m'en excuser. Il me semble cependant qu'il est intéressant de relever les incohérences de certains discours politiques. C'est la raison pour laquelle je n'ai évoqué que des faits et des chiffres. Lorsqu'on me dit que les émissions de gaz à effet de serre augmentent en France, j'indique qu'elles baissent de 4,6 %. Quand on prétend soutenir les énergies renouvelables, je relève qu'il faudrait voter pour le texte visant à accélérer leur développement. J'espère que mon propos n'a pas dépassé cette pensée.

La réforme du marché européen de l'électricité est d'application directe puisqu'il s'agit d'un règlement. Quant au calendrier de la programmation pluriannuelle de l'énergie, il est lié à la loi de souveraineté énergétique qui sera présentée dans les prochaines semaines. La stratégie française pour l'énergie et le climat ayant été soumise à la concertation, chacun peut s'exprimer. Ce sera un débat de l'année 2024.

Monsieur Descoeur, vous m'interrogez sur la production d'énergie hydroélectrique. La commission des affaires économiques a entendu M. Luc Rémont, le PDG d'EDF, qui est en discussion avec la Commission européenne. Malgré des avancées, le scénario final n'est pas ficelé.

Cette semaine, monsieur Thiébaut, je vais annoncer un deuxième volet du plan géothermie – je ne suis pas sûre qu'il fasse la une des journaux, compte tenu de l'actualité… Les deux facteurs de blocage sont clairement identifiés : la structuration de la filière industrielle et les compétences, notamment en forage. Il faut néanmoins accélérer le mouvement.

C'est durant le précédent quinquennat d'Emmanuel Macron, monsieur Thierry, que la sortie des énergies fossiles a été décidée. Nous ne donnons plus de permis d'exploration et de production dans les énergies fossiles. C'est une sacrée prise de responsabilité puisque, comme le mentionnait votre collègue guyanais, cela veut dire que la Guyane se prive d'argent facilement gagné – car il n'y a peut-être pas beaucoup de pétrole en métropole, mais il y en a dans les territoires ultramarins ! Mais nous respectons la loi. Quant à la Gironde, je ne vois pas à quelle décision vous faites référence. À ce stade, il n'y en a pas. La loi prévoit une sortie des gisements existants d'ici à 2040. Il faut permettre aux gestionnaires – qui ont signé leur contrat en 1965 pour les premiers et qui l'ont renouvelé en 2010 – de le faire en bon ordre, et notamment de remettre en état, ce qui suppose les financements afférents.

Vous avez raison de mentionner les petites îles, monsieur Nadeau. Les Tuvalu, par exemple, comptent 10 000 habitants, ce qui fait peu au regard des 8 milliards d'êtres humains qui peuplent la planète. Or elles ont été décisives dans la conclusion de l'accord : elles ont été à la manœuvre avec les Européens pour former une coalition de 130 pays, en embarquant les pays ambitieux d'Amérique latine, une partie des pays d'Afrique, dont ce choix peut entrer en conflit avec la nécessité du développement économique, le Bangladesh et les pays les moins développés. Pour ces pays, le changement climatique revêt une importance existentielle : ils sont confrontés à la disparition potentielle de leur pays, ce qui est très violent. Nous soutenons ces pays. Le Président de la République, en lien avec l'île de la Barbade, a soutenu l'initiative de Bridgetown et le pacte de Paris pour les peuples et la planète.

La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire s'est ensuite prononcée, en application de l'article 148, alinéa 3 du Règlement, sur la pétition (n° 1999) « Abandon du projet d'autoroute Toulouse Castres A69/A680 » .

(Mme Huguette Tiegna, rapporteure)

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Nous en venons à l'examen d'une pétition.

Je rappelle que le bureau de notre commission avait décidé, lors de sa réunion du 12 juillet 2022, que les pétitions ayant recueilli moins de 10 000 signatures à l'expiration d'un délai de neuf mois à compter de leur dépôt feraient l'objet d'un classement d'office. C'est le cas pour quinze pétitions, dont la liste vous est diffusée. Elles sont donc classées d'office.

J'en viens à la pétition intitulée « Abandon du projet d'autoroute Toulouse Castres A69/A680 », déposée le 7 novembre 2023, et qui a pour sa part dépassé le seuil de 10 000 signatures.

Conformément à l'article 148 de notre Règlement, nous avons à décider aujourd'hui si nous classons ou débattons de cette pétition – la seconde option ayant ma préférence. Nous n'irons pas plus loin : la pétition en tant que telle sera débattue, le cas échéant, dans un second temps.

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L'Assemblée nationale a reçu une pétition signée par 49 749 citoyens au décompte d'hier après-midi. En application de l'article 148, alinéa 3, du Règlement, notre commission doit décider de la classer ou d'en débattre.

Le bureau de notre commission a délibéré à trois reprises sur les pétitions : les 5 et 12 juillet 2022, il a décidé que seraient classées d'office les pétitions ayant recueilli moins de 10 000 signatures à l'expiration d'un délai de neuf mois à compter de leur dépôt ; celles dépassant ce seuil font l'objet d'un examen selon la procédure prévue par l'article 148 précité. Le 22 novembre dernier, le bureau a décidé que la question de la pétition relative à l'autoroute Toulouse Castres serait traitée en deux phases : la première, aujourd'hui, consiste à décider soit de la classer, non pas d'office mais par un vote, soit de poursuivre la discussion. Si la commission donne une suite favorable à l'examen de la pétition, elle tiendra un second débat, qui sera programmé après la suspension des travaux de la fin de l'année.

En tant que rapporteure, mon rôle consiste à recommander une position. Je propose que notre commission débatte de cette pétition dans les prochaines semaines.

En effet, celle-ci pose un problème qui affecte fréquemment les projets d'aménagement du territoire et d'infrastructures : bien que conçus conformément à la loi et respectant l'ensemble des procédures avant le début de travaux, ces projets sont contestés sur le terrain, par des manifestations ou par la constitution d'une ZAD (zone à défendre), y compris dans certains cas après épuisement des recours judiciaires.

Cette situation doit nous amener à nous interroger sur l'échelon des prises de décision comme sur le rôle et la légitimité des élus, tant nationaux que locaux ; elle pose également la question de la faisabilité de projets d'aménagement, de leur acceptation sociale par nos concitoyens et in fine, de la définition de l'intérêt général. Il s'agit pour moi de questions de principe dont notre commission doit se saisir, au-delà du problème soulevé par la pétition.

C'est la principale raison pour laquelle je vous invite à laisser le débat se tenir.

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Ce projet d'autoroute, vieux de vingt ans, est soutenu par l'ensemble du monde économique et des entreprises du pays de Castres-Mazamet, par le département et la région, qui sont pourtant dirigés par les socialistes, et par plus de 900 élus du territoire.

L'enquête publique a été longue ; elle a donné lieu à plus de 6 000 observations. La concertation avec les élus et les associations a été très nourrie ; plus de 500 réunions publiques ont été organisées. Cette autoroute sera la plus propre de France puisque 87 millions d'euros seront investis pour réduire l'impact environnemental. Il y aura ainsi cinq fois plus d'arbres plantés que coupés.

L'A69 doit être construite car il y va du respect de la décision publique dans un département qui a connu, par le passé, l'échec d'un autre projet de grands travaux, le barrage de Sivens. C'est aussi un impératif de sécurité : l'année dernière, lors du réveillon, trois jeunes filles sont mortes sur la RN 126 dans un accident dramatique. Enfin, c'est une garantie de développement économique pour Castres-Mazamet mais aussi pour les communes tout au long du tracé. Une commune a ainsi récemment changé d'avis pour se déclarer favorable au projet car elle en profitera pour construire des infrastructures.

Nous sommes donc opposés à la pétition, d'autant que les travaux ont déjà commencé. Mais le projet a deux écueils : le tarif, qui est très élevé, et la privatisation de deux déviations qui ont été financées par l'argent public.

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Je rappelle qu'il s'agit de connaître la position des groupes sur l'examen de la pétition, et non sur le projet en tant que tel.

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La pétition pour l'abandon du projet d'autoroute A69 a déjà recueilli 50 000 signatures. Dans le Tarn et en Haute-Garonne, 61 % des habitants sont opposés au projet et 67 % estiment qu'il aura un impact négatif sur la biodiversité. C'est un projet du siècle dernier, à rebours de l'urgence climatique, des alertes du Giec et des objectifs de l'agenda 2030. L'autre option qui existe n'a même pas été étudiée. On ne peut pas continuer à encourager la route, à abattre des centaines d'arbres centenaires, à détruire 400 hectares de terre agricole, à faire disparaître des zones humides et à éroder la biodiversité.

On ne peut pas non plus passer outre la mobilisation de dizaines de milliers de citoyens, de plus de 750 personnalités de tous horizons, de 200 scientifiques du technopôle de Toulouse et de plus de 1 500 scientifiques, dont certains membres du Giec.

On ne peut pas enfin mépriser les avis défavorables de l'Autorité environnementale, du Conseil national de la protection de la nature, de l'enquête publique pour une très large part et de l'ancien Commissariat général à l'investissement. Seulement 20 % des élus se sont prononcés en faveur du projet et 3 % des entreprises, sur les plus de 21 000 que compte le Tarn.

L'A69 est un projet du passé, soutenu par une minorité d'élus qui ont substitué les intérêts d'un lobby à l'intérêt général et sont restés sourds à la bifurcation que nous impose le changement climatique.

Il nous faut entendre la voix des citoyens et leur mobilisation inédite. Ils réclament un débat pour être entendus par la représentation nationale. Ils souhaitent que le temps de la justice soit respecté et que leurs recours soient jugés avec impartialité.

Chers collègues, je vous demande de respecter les citoyens mobilisés, soucieux de l'intérêt général, et vous exhorte à accepter qu'un débat ait lieu au sein de cette commission au nom de la démocratie, de la vie d'un territoire et de ses générations futures

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On le sait, un territoire qui n'est pas connecté aux grands carrefours d'activités est un territoire économiquement mort.

Le projet d'autoroute que cette pétition nous suggère d'abandonner vise précisément à réparer une injustice comme il en existe peu en France. En Occitanie, toutes les agglomérations disposent d'une liaison autoroutière ou d'une deux fois deux voies permettant de les rapprocher de Toulouse, à l'exception de Castres.

Très attendu localement et classé priorité nationale, ce projet mettrait le sud du Tarn à moins d'une heure de la ville rose et améliorerait la sécurité routière sur l'axe reliant ces territoires. Les arguments pour le discréditer émanent souvent de personnes extérieures au territoire, qui ont accès à une autoroute et refusent cette chance aux autres.

Les débats ont eu lieu pendant des mois, voire des années. Sur Castres-Toulouse, ne refaisons pas le match !

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Pour le groupe Démocrate, il est sain que nos concitoyens puissent nous interpeller sur certaines questions d'importance par le biais des pétitions, bien que le sujet soit ici assez local.

Les contrats de plan État-région récemment signés sont destinés à financer principalement des infrastructures ferroviaires, pour concourir à un aménagement durable et équilibré de nos territoires. Mais les investissements concernent également parfois des routes afin d'accompagner le développement économique de la région.

Notre groupe soutient la tenue d'un débat à la rentrée qui permettra d'évaluer l'impact environnemental du projet autoroutier, mais aussi de mettre en lumière les besoins des acteurs concernés afin que chacun comprenne les enjeux de l'aménagement de cette région. Il est souhaitable que notre commission s'intéresse aussi aux zones les plus éloignées des métropoles.

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Ce projet a fait l'objet de nombreuses décisions politiques et judiciaires qui valident sa poursuite. Le groupe Horizons considère toutefois, sans entrer dans le détail du projet ni le remettre en question, qu'il est sain d'organiser un débat éclairé, objectif et pragmatique.

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Ce projet est une aberration écologique. Alors qu'on parle de souveraineté alimentaire, 400 hectares de terres arables vont être vitrifiés et des arbres centenaires seront abattus – ce n'est pas en remplaçant un arbre centenaire par cinq autres qu'il faudra arroser que l'on crée une forêt.

C'est aussi une aberration sociale : 20 euros l'aller-retour entre Toulouse et Castres, soit 100 euros par semaine, 400 euros par mois ! Vous prétendez soutenir le territoire de Castres, mais comment ses habitants pourront-ils payer de telles sommes ? En outre, une partie de la RN 126, qui est déjà en deux fois deux voies, sera intégrée dans l'autoroute et donc privatisée.

Enfin, c'est une aberration financière. La concession est confiée à la société Atosca, filiale du groupe NGE, qui, loin d'être une entreprise locale comme on a voulu nous le faire croire, est détenue à 60 % par des sociétés financières au Luxembourg.

Pour ces trois raisons, il est important de réexaminer le dossier, particulièrement au sein de la commission du développement durable. Il est impératif, en 2023, de revisiter les grands projets inutiles qui ont été décidés il y a trente ans. Les élus étaient sans doute convaincus à l'époque de leur intérêt pour leur territoire, mais je signale que les taux de pauvreté à Albi et Pamiers sont supérieurs à celui de Castres alors que ces villes sont reliées par l'autoroute. Votre argument selon lequel une autoroute dynamise un territoire est contredit par les chiffres et par les géographes. Le groupe Écologiste soutient évidemment l'idée d'un débat.

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Nous sommes évidemment favorables à la tenue d'un débat. Néanmoins, les interventions que j'ai entendues posent question. Certains collègues en sont déjà à remettre en cause le projet de l'autoroute A69. Or ce n'est plus un projet, c'est un chantier – 40 % des travaux ont été engagés.

Je ne voudrais pas que l'organisation d'un débat laisse à penser que le chantier pourrait être remis en cause. À l'issue des échanges, il n'y aura ni arrêt du chantier de l'autoroute A69, ni abandon des travaux.

Le législateur n'a vocation à se substituer ni au processus démocratique qui a abouti au lancement du chantier, ni aux juridictions administratives qui sont saisies de contentieux sur l'opportunité et la légalité du chantier.

Sur le premier point, je rappelle que ce chantier a fait l'objet d'une déclaration publique en 2018, d'un contrat de concession en avril 2022 et d'un arrêté préfectoral d'autorisation environnementale en mars 2023, après avoir obtenu le financement de l'État nécessaire en 2019. L'ensemble des collectivités territoriales et l'État se sont exprimés de façon démocratique en faveur de la poursuite du chantier.

Quant aux juridictions administratives, nous n'avons pas à nous y substituer. Ce n'est pas nous qui allons déterminer la légalité de ce chantier. Des contestations sont pendantes devant le Conseil d'État ; des associations opposées au chantier autoroutier qui avaient déposé des recours ont déjà été déboutées par quatre fois.

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La pétition dont nous sommes saisis a rassemblé en peu de temps un nombre significatif de signatures.

Ce projet autoroutier est porté par les collectivités locales depuis plus de vingt ans pour répondre à un problème d'attractivité. Il suscite aujourd'hui diverses réactions eu égard aux enjeux écologiques et à la nécessité de réfléchir à de nouveaux modèles de développement. On observe une forte mobilisation de la société civile et des élus, qui témoigne de l'importance que revêt ce sujet pour nos concitoyens et des préoccupations qu'il soulève.

Pour le groupe Socialistes, il est légitime que la représentation nationale porte une attention particulière à une initiative citoyenne d'une telle ampleur. Elle soulève des questions socio-économiques, environnementales, liées à la mobilité, au développement des infrastructures de transport, à la protection de la biodiversité et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre qui relèvent des compétences de notre commission. Il est donc souhaitable qu'ait lieu un débat démocratique s'appuyant sur l'ensemble des données scientifiques disponibles et en prenant en compte les besoins locaux.

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En tant que partisan de la défense du vivant, rien de ce qui concerne le vivant ne m'est étranger, pour paraphraser Camus. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine est favorable au débat mais opposé au projet, pour des raisons écologiques mais aussi à cause du choix de l'investisseur et de la privatisation d'infrastructures publiques.

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Je me réjouis qu'un consensus semble se dessiner en faveur d'un débat, même si les motivations des uns et des autres sont bien différentes.

En application des dispositions de l'article 148, alinéa 3, du règlement, la commission décide de ne pas classer la pétition.

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La pétition fera donc l'objet d'un débat, qui ne sera pas suivi d'un vote, au début de l'année prochaine, sans doute en février.

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 20 décembre 2023 à 8 h 30

Présents. - M. Damien Abad, M. Damien Adam, M. Gabriel Amard, M. Christophe Barthès, M. Emmanuel Blairy, M. Jean-Yves Bony, M. Jorys Bovet, Mme Pascale Boyer, M. Guy Bricout, M. Jean-Louis Bricout, M. Anthony Brosse, Mme Danielle Brulebois, M. Stéphane Buchou, M. Jean-Victor Castor, Mme Claire Colomb-Pitollat, M. Mickaël Cosson, Mme Annick Cousin, M. Stéphane Delautrette, M. Vincent Descoeur, Mme Karen Erodi, Mme Sylvie Ferrer, M. Jean-Luc Fugit, Mme Charlotte Goetschy-Bolognese, M. Daniel Grenon, Mme Clémence Guetté, M. Yannick Haury, Mme Chantal Jourdan, Mme Florence Lasserre, Mme Sandrine Le Feur, M. Gérard Leseul, M. Jean-François Lovisolo, Mme Aude Luquet, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, M. Emmanuel Maquet, Mme Alexandra Masson, Mme Manon Meunier, M. Pierre Meurin, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Bruno Millienne, M. Marcellin Nadeau, M. Jimmy Pahun, Mme Christelle Petex-Levet, M. Bertrand Petit, Mme Marie Pochon, M. Loïc Prud'homme, M. Nicolas Ray, Mme Véronique Riotton, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Jean-Pierre Taite, M. Matthias Tavel, M. Vincent Thiébaut, M. Nicolas Thierry, Mme Huguette Tiegna, M. David Valence, M. Pierre Vatin, M. Antoine Vermorel-Marques, Mme Anne-Cécile Violland, M. Jean-Marc Zulesi

Excusés. - Mme Nathalie Bassire, M. Aymeric Caron, M. Matthieu Marchio, M. Hubert Ott, M. Antoine Villedieu

Assistaient également à la réunion. - Mme Christine Arrighi, M. Frédéric Cabrolier, M. Jean Terlier