Commission des affaires sociales

Réunion du mercredi 16 novembre 2022 à 15h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à quinze heures.

La commission poursuit l'examen de la proposition de loi portant réintégration du personnel des établissements de santé et de secours non-vacciné grâce à un protocole sanitaire renforcé (n° 322) (Mme Caroline Fiat, rapporteure).

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Notre débat gagnerait à tenir compte du fait que la médecine, les thérapeutiques, les remèdes sont des questions à caractère social. Il y a eu plusieurs façons de traiter la prévention, en l'espèce les injections vaccinales : le Portugal, par exemple, a un taux de vaccination record sans avoir opté pour la contrainte.

L'argumentaire de la rapporteure soulève la question de la conception de la santé. Il n'y a pas deux camps, pour ou contre les vaccins, s'agissant de l'efficacité du produit, de son usage ou de son sens. La médecine est sociale. Nous devons faire avec les croyances et les convictions des patients. En l'occurrence, la confiance, vous n'avez pas su la gagner. Dont acte. Peut-être faut-il en chercher la raison dans l'absence de plan sanitaire pour le traitement du « covid long » ou dans les fortes difficultés financières des départements pour financer des vaccins qui ne sont pas remboursés, comme le Bexsero contre la méningite !

Au fond, notre débat porte sur l'efficacité de nos politiques de santé publique.

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Il convient de dépassionner le débat. Il n'oppose pas, comme nous l'avons entendu ce matin, ceux qui croient en la science et ceux qui n'y croient pas. Le texte que nous examinons ne conteste pas l'utilité du vaccin ; il ne supprime pas l'obligation vaccinale pour les personnels de santé. Il est pragmatique et raisonnable. Il permet de faire le lien entre deux états de fait.

D'un côté, les hôpitaux, pour ne parler que d'eux, sont confrontés à une criante pénurie de personnel. Certes, la réintégration des soignants non vaccinés ne réglera pas cette situation critique, ce pour quoi nous proposons d'autres mesures ambitieuses. Toutefois, il demeure préférable d'être soigné par quelqu'un qui est protégé par un protocole renforcé que ne pas être pris en charge du tout comme cela arrive de façon de plus en plus fréquente, récemment encore au Nouvel hôpital civil de Strasbourg. Nous avons entendu ce matin que le protocole renforcé prévu par le texte pourrait déstabiliser les services. Mais parfois, c'est l'absence d'une seule infirmière qui déstabilise un service et qui dégrade la prise en charge.

De l'autre côté, environ 12 000 personnels de santé sont empêchés d'exercer, ostracisés, mis au placard, non rémunérés, placés hors du droit du travail.

Ce texte raisonnable et pragmatique permet de sortir par le haut de cette situation. À défaut, allons-nous licencier les personnels non vaccinés ? J'en doute. Le Président de la République lui-même déclarait fin avril qu'ils seraient réintégrés une fois passée la phase aiguë de la crise. Les travaux de Frédéric Pierru, chercheur au CNRS, ont démontré que plusieurs centaines de soignants d'un hôpital de l'est du pays n'ont pas de schéma vaccinal complet. Le pragmatisme caractérise d'ores et déjà la prise en charge des patients.

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Comme l'a rappelé la Haute Autorité de santé (HAS) dans son avis, l'obligation vaccinale s'impose aux soignants et conditionne leur recrutement. Par ailleurs, l'Académie nationale de médecine est fermement opposée à la réintégration des professionnels non vaccinés pour ne pas exposer davantage les personnes fragilisées et pour maintenir le lien de confiance entre soignants et soignés. Il importe de conserver cette approche raisonnable sans dévier vers le débat, distinct, sur la pénurie d'effectifs.

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Dans mon propos liminaire, j'ai précisé à quatre reprises que la présente proposition de loi ne vise pas la levée de l'obligation vaccinale des soignants. Voilà la cinquième.

Monsieur Alauzet, je suis très embêtée. Vous dites que mon protocole ne protège pas. Mais je dois vous avouer que je ne l'ai pas inventé : je l'ai emprunté au gouvernement Castex, qui l'avait associé au passe vaccinal. Ou bien vous considérez que le gouvernement Castex a mis en danger la population, ou bien ce protocole protège correctement.

La HAS, qui a rendu officiellement son avis en juillet, était alors défavorable à la levée de l'obligation vaccinale. Elle a été saisie à nouveau et ne semble pas figée dans sa position. Le taux d'incidence demeure élevé. Mais l'obligation vaccinale finira par être levée et les personnels non vaccinés réintégrés. Lors de leur audition, les membres de la HAS ont dit ceci : « Le protocole proposé par la rapporteure est de nature à protéger du risque épidémique ». Et ils ont bien précisé que cet avis sur la réintégration était d'ordre sanitaire et non politique.

Monsieur Vigier, vous avez rappelé que les soignants doivent être vaccinés contre d'autres maladies que le covid-19. J'ai été l'une des premières à être vaccinée contre le covid-19, mais je tiens à rappeler que tous les vaccins ne se ressemblent pas. Le vaccin contre l'hépatite exige trois injections puis un rappel cinq ans plus tard ; en l'espèce, il s'agit plutôt d'une injection tous les quatre à six mois, qui se rapproche d'un vaccin contre un virus saisonnier. À ma connaissance, la vaccination des soignants contre la grippe n'est pas obligatoire.

Monsieur Mesnier, vous m'avez accusée de mettre en danger les patients par électoralisme. Non. Mon protocole est renforcé, voire strict. La Fédération hospitalière de France et la HAS recommandent le maintien de l'obligation vaccinale, dites-vous ? Je le répète : ma proposition de loi ne supprime pas l'obligation vaccinale. Elle offre une porte de sortie, qu'il faudra bien trouver, en protégeant autant le patient que le soignant. Quant à la chasse aux voix et aux arguments complotistes, mes positions passées suffisent à prouver que j'y suis étrangère.

Madame Dubré-Chirat, vous indiquez qu'un soignant qui contamine un patient peut voir sa responsabilité juridique engagée. Mais alors, quid des soignants auxquels on demande de travailler alors qu'ils sont positifs au covid ?

Mon texte n'a rien à voir avec une levée de l'obligation vaccinale. Il offre une porte de sortie à 12 000 personnes qui veulent travailler et qui ne mettront en danger ni leurs collègues ni les patients.

Article 1er : Réintégration du personnel suspendu dans le cadre d'un protocole sanitaire spécifique

Amendements de suppression AS12 de M. Philippe Juvin et AS20 de M. Éric Alauzet.

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. Pour que les choses soient claires, disons d'emblée que chacun ici cherche une solution raisonnable, avec bonne volonté, et que personne ne veut mettre quiconque en danger. Mon amendement vise à supprimer l'article 1er qui me semble dangereux, pour plusieurs raisons.

Premièrement, l'argument selon lequel la réintégration des personnels non vaccinés permettra aux hôpitaux de mieux fonctionner ne résiste pas à l'examen des chiffres. Au demeurant, nous ignorons le nombre exact de personnes concernées. D'après le Conseil de l'ordre national des infirmiers, il est de l'ordre du millier, soit une dizaine de personnes par département.

Deuxièmement, comment persuaderons-nous les gens de se faire vacciner en cas de nouvelle vague, si nous les autorisons aujourd'hui à ne pas l'être ?

Troisièmement, des médecins, infirmiers, aides-soignants sont morts du covid-19. Nous sommes dans l'obligation de protéger les soignants, quand bien même l'efficacité du vaccin contre la transmission du virus est relative, voire nulle. Nous devons envoyer le signal, exiger des soignants vaccinés dans leur intérêt, comme nous le faisons pour d'autres maladies.

Quatrièmement, il y va du poids de la science. Accepterait-on qu'un Français engagé dans l'armée affirme haut et fort ne croire ni à la patrie ni à certaines valeurs ? Qu'un soignant ne croie pas en la science et considère les vaccins non fiables n'est pas acceptable.

Telle est ma position personnelle, qui n'engage pas mon groupe.

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J'aimerais mettre en regard les périls que fait courir la proposition de loi et ses bénéfices très incertains. Elle induit un risque sanitaire face auquel la HAS, parmi d'autres, préconise le maintien de l'obligation vaccinale. Certes, mieux valent des masques et des tests que rien du tout, mais le vaccin est supérieur, et l'association des trois encore davantage. Le protocole proposé protège insuffisamment par rapport au vaccin.

Par ailleurs, la proposition de loi risque de désorganiser les services hospitaliers en introduisant deux régimes de gestion des personnels, ce qui peut provoquer des tensions. Du point de vue éthique, elle est injuste envers ceux qui ont fait l'effort de la vaccination.

Quant aux bénéfices, ils méritent examen. Parmi les 10 000 à 12 000 personnes concernées, certaines ont saisi l'occasion pour avancer un peu leur retraite. Ceux-là, on ne les reverra pas, obligation vaccinale ou non. Ceux qui envisageaient de changer de métier ne reviendront pas davantage. Votre protocole ne permettra donc de récupérer que peu de gens. Parmi les autres, une bonne partie, très opposés à la vaccination comme à beaucoup d'autres choses d'ailleurs, auront sans doute du mal à se plier aux contraintes que vous entendez imposer – le port du masque et le test quotidien. En revanche, vous ferez partir des soignants vaccinés, qui considéreront cette réintégration comme une injustice et un risque pour eux-mêmes. Quant aux patients, ils seront nombreux à refuser d'être soignés par des gens qui ne sont pas vaccinés.

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Avis défavorable.

Mon texte ne menace pas l'obligation vaccinale. Il permet une réintégration des soignants non vaccinés sans risque. L'argument selon lequel il risque de désorganiser les services m'amuse, dès lors que vous arguez aussi que très peu de personnes sont concernées. En réalité, mon texte permet simplement aux établissements de soins de récupérer une aide-soignante, une infirmière, un cuisinier, un agent technique ou administratif qui manque cruellement.

Par ailleurs, les soignants suspendus qui envisageaient de changer de métier ont déjà démissionné. Il y a bien 12 000 soignants suspendus qui attendent leur réintégration. Il faut sortir par le haut de cette situation.

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. Nous voterons les amendements de suppression. Dans l'organisation des soins, l'une des exigences absolues est de soigner les malades, mais protéger les soignants en est une autre. Or, la vaccination permet d'éviter les formes graves du covid-19.

Par ailleurs, dire que la réintégration des soignants non vaccinés ne modifie en rien l'obligation vaccinale est contradictoire. Cela introduit une dichotomie avec les nouveaux entrants, nuisible à l'organisation des services.

Enfin, vous imaginez-vous devoir faire un test chaque jour ? N'importe qui en aurait assez au bout de quinze jours. J'en ai fait des milliers pour protéger mes patients, ce n'était pas une partie de plaisir.

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Madame la rapporteure, vos propos sur la HAS sont faux, comme l'a écrit Libération le 9 novembre. Vous venez de dire qu'elle avait validé votre protocole, après avoir dit en séance publique qu'elle avait changé d'avis sur la réintégration des soignants non vaccinés. C'est faux ! Je voudrais que vous cessiez d'induire en erreur ceux qui suivent nos débats. La HAS n'a jamais rien dit de tel. Elle a rappelé que l'obligation vaccinale fait partie de la stratégie de lutte contre la contamination. S'agissant de votre protocole, ses représentants ont déclaré, à la fin de leur audition, qu'il est cohérent mais ne satisfait pas à l'obligation de protection des personnels et des patients.

Vous dites que votre texte ne menace pas l'obligation vaccinale. Permettez-moi de vous rappeler que, lors de nos débats sur l'affaire Orpea, vous étiez la première à dire qu'une obligation dépourvue de sanction n'avait aucune valeur. Vous étiez même prête à nationaliser les Ehpad privés à la moindre erreur. Et voilà que vous prétendez maintenir l'obligation vaccinale en réintégrant ceux qui ne s'y soumettent pas et sans prévoir la moindre sanction ! Cessez de tenir des propos faux, de dire tout et son contraire. Votre proposition de loi remet en cause la vaccination comme l'obligation vaccinale. Assumez votre position démagogique, anti-vaccin et qui fait fi de la science.

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. Ce débat a traversé notre société il y a quelques mois. Il ne faut pas se tromper de sujet. La question n'est pas de savoir si l'on croit en la science ou si la vaccination protège des formes graves de la maladie, ce qui semble acquis. C'est de savoir si, compte tenu de l'évolution du virus, dont les variants se propagent de plus en plus vite mais perdent en agressivité, la réintégration des soignants non vaccinés est envisageable. Cette question légitime ne se pose pas uniquement pour les établissements de soins : les services à domicile et les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis), qui font appel à des volontaires, ont été les plus affectés par les refus de l'obligation vaccinale.

Par ailleurs, les soignants non vaccinés qui ont été contaminés à chaque vague ou presque ont développé des anticorps. Leur situation, et celle des candidats au recrutement, pourrait être réexaminée à la lumière de sérologies. Il faut élargir le débat et ne pas caricaturer les positions des uns et des autres.

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La question est en effet complexe ; évitons de la compliquer davantage ! Madame la rapporteure, ce que vous pensez et proposez n'est pas en cause. Le problème est que rien ne démontre que les soignants qui ont refusé d'être vaccinés accepteront de se plier aux contrôles que vous prévoyez. Moi-même, j'aurais du mal à accepter un test chaque jour. Cela pourrait donc provoquer des problèmes d'organisation.

Par ailleurs, nous ne pouvons pas faire abstraction du fait que les parlementaires ayant soutenu l'obligation vaccinale ont été ciblés, voire insultés par des groupes de pression. Je ne dis pas que vous en êtes, mais un tel texte ne peut que les encourager. L'Assemblée nationale ne peut pas communiquer ce signal.

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Le signal serait aussi d'instiller le doute sur l'utilité du vaccin – qu'il n'a pas servi à grand-chose, qu'il ne sert plus à rien, qu'au surplus les personnels de santé sont immunisés... Tout cela alimente le sentiment de défiance à l'égard de la vaccination, au demeurant antérieur à la crise, qui incite des parents à soustraire leurs enfants aux campagnes et qui a obligé à introduire l'obligation vaccinale. Insidieusement, on accrédite l'idée que les vaccins sont un danger. Souvenons-nous de la situation quand ils n'existaient pas !

Nous rejetterons donc ce texte, qui remet bel et bien en cause l'obligation vaccinale ainsi que l'intérêt même de la vaccination.

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Lors de leur audition, les représentants de la HAS ont déclaré ne pas entendre remettre en cause l'obligation vaccinale. La proposition de loi tend à la contourner. Elle en signe la fin, en la doublant d'un passe sanitaire assez surprenant compte tenu des positions de La France insoumise depuis deux ans sur ce point.

Le groupe Horizons et apparentés votera les amendements de suppression. Madame la rapporteure, contrairement à ce que vous semblez croire sincèrement, votre texte implique la fin de l'obligation vaccinale, à rebours des données scientifiques dont nous disposons.

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J'aimerais que l'on cesse de faire dire à la HAS ce qu'elle n'a pas dit et qu'on la laisse jouer son rôle de conseil scientifique. Elle maintient l'obligation vaccinale. En 2020, lorsque personne n'avait développé une immunité, une stratégie vaccinale était nécessaire. Elle a permis de sauver des millions de vies.

Du point de vue de l'offre de soins, mieux vaut, pour les patients, avoir une infirmière qui n'a pas le covid-19, vaccinée ou non, que pas d'infirmière du tout. Or, la pénurie d'infirmières est telle que les personnels touchés par le covid-19 mais exempts de symptômes sont au travail. L'argument du risque sanitaire ne tient pas.

J'ai l'impression que nous jouons le match retour du passe sanitaire. On se trompe. Les autres pays européens – Suisse, Allemagne ou Italie – y ont renoncé. Une infirmière non vaccinée a acquis une immunité. Une sérologie suffirait à démontrer qu'elle a sans doute plus d'anticorps qu'un individu vacciné n'ayant pas fait ses rappels. Ne rentrons pas dans tout cela. Je ne suis pas favorable à l'obligation de porter des masques FFP2 et de faire des tests ou des sérologies. Il faut laisser les services s'organiser. Le vrai problème, c'est le manque de soignants pour les patients.

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Ce texte n'a pas pour objet la levée de l'obligation vaccinale – et je le regrette car je l'aurais votée ! Il ne faut pas se tromper de débat : il s'agit, en l'occurrence, de répondre à un problème d'offre de soins. Certains affirment que le nombre de soignants concernés est infinitésimal. C'est peut-être vrai en Europe mais, outre-mer, les carences en matière d'accès aux soins appellent à plus de gravité. L'absence de soignants dans les hôpitaux, dans le secteur de l'hospitalisation à domicile et chez les sapeurs-pompiers fait peser un péril sur les habitants de nos territoires, qui sont aussi la France. Vous devez le prendre en considération.

Madame Janvier, je vous rappelle que vous étiez aussi favorable au principe d'obligation sans sanction lors de nos débats sur l'affaire Orpea.

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Supposons que l'on vote la proposition de loi et que l'on réintègre les soignants non vaccinés. Un hôpital serait alors tenu, sous peine de commettre une discrimination, de recruter un professionnel non vacciné si son profil correspond exactement à la fiche de poste. Mais, ce faisant, il violerait l'obligation vaccinale. Votre texte entraîne donc bien une remise en cause de cette obligation.

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Le texte s'applique-t-il aux professions médicales et paramédicales libérales ? Son titre laisse penser que non.

Par ailleurs, le problème fondamental est que l'on interdit aux soignants non vaccinés de travailler. Si on ne peut pas les réintégrer dans leur poste, on pourrait leur permettre d'exercer un autre métier ou de travailler dans un secteur où il n'y a pas d'obligation vaccinale.

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Ce n'est pas une question d'offre de soins car le nombre de personnes concernées est trop faible pour changer la donne dans les établissements.

D'une part, il nous faut protéger les soignants. Or, s'ils ne sont pas vaccinés, ils sont exposés. D'autre part, il faut prévenir les contaminations. La question de savoir si on transmet moins la maladie lorsqu'on est vacciné reste en débat. Le fait qu'une personne vaccinée ait dans la gorge une charge virale moins importante peut laisser penser qu'elle transmet moins le virus, mais il n'y a pas de preuve scientifique dans un sens ni dans l'autre, et cela ne peut donc servir d'argument. Enfin, pour répondre à Mme Gruet, j'ai déposé un amendement permettant la réintégration des personnes non vaccinées sous réserve qu'elles ne soient pas en contact avec les patients ou les usagers.

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Madame la rapporteure, vous ne cessez de répéter que votre proposition de loi ne remet pas en cause l'obligation vaccinale. Mais vous savez que c'est un point faible. C'est comme si vous disiez maintenir les limitations de vitesse sur les routes sans obligation de les respecter ! La vaccination devient, par le fait, facultative, sans parler du signal envoyé sur son utilité. Cela étant, nous sommes bien sûr tous préoccupés par le manque de personnel dans les établissements.

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Monsieur Vigier, madame Iborra, on travaille généralement douze heures d'affilée, trois jours par semaine : il ne s'agira pas d'effectuer un test quotidien.

Madame Janvier, vous étiez absente lors de l'audition des représentants de la HAS. Mais onze personnes étaient présentes, dont un collaborateur de votre groupe. Je répète ce qui a été dit clairement : « Le protocole proposé par la rapporteure est de nature à protéger du risque épidémique ». J'ai répondu : « Donc, pour vous, il n'y a pas de danger ? » Ils m'ont répondu par la négative, je les ai remerciés pour leur avis favorable et ils ont acquiescé. Si vous voulez vraiment mettre en doute ma parole, venez aux auditions !

La Haute Autorité a bien précisé qu'elle ne donnerait jamais d'avis sur la réintégration des soignants car c'est une question politique, mais qu'elle se prononçait sur les aspects sanitaires. Et ne me dites pas que je suis anti-vaccin alors que j'ai été parmi les premiers à me faire vacciner, parce que j'exerçais en réanimation, et ce malgré la restriction d'âge que vous aviez fixée.

Monsieur Bazin, madame Gruet, tout le monde est concerné par cette proposition de loi, y compris le personnel des services de soins infirmiers à domicile et des Sdis, les libéraux et les aides à domicile.

Madame Vidal, ce texte vise à « réintégrer » les personnels suspendus : il s'agit bien de ceux qui ont déjà un poste.

Enfin, madame Janvier, une suspension d'un an est déjà une sanction considérable et en plus de cela, nous proposons un protocole sanitaire renforcé.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 1er est supprimé et les amendements AS10 de M. Philippe Juvin, AS28 de Mme Caroline Fiat et AS8 de M. Frédéric Falcon tombent.

Article 2 : Accès du personnel réintégré à des tests de dépistage et des équipements de protection individuelle gratuits

Amendements de suppression AS11 de M. Philippe Juvin, AS19 de M. Victor Catteau et AS21 de M. Éric Alauzet.

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L'article 2 est relatif aux tests de dépistage. Puisque nous avons supprimé l'article 1er, il est cohérent de faire connaître le même sort à l'article 2, qui en constitue la conséquence logique. De la même façon que les professionnels doivent être vaccinés contre le tétanos, il faut les vacciner contre le covid-19. On vaccine les soignants avant tout pour eux-mêmes.

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L'article 2 définit les modalités d'application des dispositions de l'article 1er. Étant opposés à la conditionnalité de la réintégration du personnel soignant non vacciné, nous demandons sa suppression.

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Avis défavorable. C'est ce protocole qui permet une sortie par le haut.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 2 est supprimé et l'amendement AS5 de M. Frédéric Falcon tombe.

Article 3 : Gage financier

Amendement de suppression AS22 de M. Éric Alauzet.

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Dès lors que les deux premiers articles ont été supprimés, la question du gage ne se pose plus.

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Une proposition de loi doit, en tout état de cause, être gagée.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'article 3 est supprimé et les amendements AS18 de M. Victor Catteau, AS14 de Mme Laure Lavalette, AS4 de Mme Bénédicte Auzanot et AS15 de Mme Laure Lavalette tombent.

La commission ayant supprimé tous les articles de la proposition de loi, l'ensemble de celle-ci est rejeté.

La commission examine ensuite la proposition de loi visant à instaurer une allocation d'autonomie pour les jeunes en formation (n° 323) (M. Louis Boyard, rapporteur).

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« Vivre avec 500 euros par mois, ce n'est pas une vie : c'est de la survie. On est obligé de faire attention à tout ce qu'on fait, tout ce qu'on achète ; on se restreint encore et encore ; ça ronge littéralement le quotidien ; on fait des crises d'angoisse parce qu'on a peur de ne pas réussir ou de ne pas bien gérer, avec le peu que nous avons. » Voilà le témoignage d'Eliot, étudiant en sociologie à l'université de Toulouse. « Passer ses partiels le ventre à moitié vide alors qu'on a travaillé en parallèle de ses études toute l'année, c'est rageant », confie Inès, étudiante en droit à l'université de Nanterre. Des appels de secours de ce genre, j'en reçois des dizaines tous les jours.

Lors des auditions que j'ai menées, j'ai voulu entendre les témoignages d'étudiants, d'associations de solidarité, de syndicats, mais aussi de vice-présidents de centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous), de chercheurs, ainsi que de la présidente de l'université de Rennes. Tous constatent la situation alarmante dans laquelle se trouvent les étudiants, encore aggravée par la crise du covid-19. Les dispositifs de soutien pendant la crise ont produit, dans l'ensemble, des résultats décevants et ne sont pas à la mesure des enjeux. « La crise invite pour l'avenir à mieux cerner et quantifier les besoins de la vie étudiante » : ce n'est pas moi qui le dis, mais la Cour des comptes.

L'État n'est pas à la hauteur de la détresse des jeunes. Au-delà de l'insuffisance des aides d'urgence, c'est tout le système d'accompagnement qui est structurellement défaillant. Seuls 38 % des étudiants bénéficient de bourses sur critères sociaux. La Suède accorde des bourses à 88 % des étudiants, et le Danemark à 92 % d'entre eux. Ces bourses ne sont pas corrélées aux revenus des parents, contrairement au système français.

Dans notre pays, trois quarts des étudiants qui ont recours à la distribution alimentaire ne sont pas boursiers. Comment en sommes-nous arrivés à tolérer des étudiants obligés de recourir à l'aide alimentaire ? Comment est-il possible qu'ils ne soient pas jugés suffisamment pauvres pour percevoir une bourse ? Seulement 2 % d'étudiants bénéficient d'une bourse à l'échelon maximal : ils perçoivent 596 euros par mois, deux fois moins que le seuil de pauvreté. Notre système de bourses ne permet pas aux jeunes en formation de vivre dignement et de s'émanciper. Les travaux de Philippe Cordazzo permettent d'en mesurer les conséquences : de nombreux étudiants se réorientent vers des filières professionnalisantes courtes ; ils cherchent à percevoir un salaire au plus vite au détriment de la poursuite d'études censées garantir des contrats moins précaires. Voilà une belle photographie de la prétendue égalité des chances à la française !

Face à cela, nous proposons de redéfinir totalement notre vision de la jeunesse. Il est urgent de reconnaître la jeunesse comme un âge de la vie particulièrement vulnérable. Personne n'envisagerait plus de confier la prise en charge du grand âge et de la perte d'autonomie aux seules familles : la société a pris conscience, en la matière, du rôle fondamental de l'État. Pourquoi ne pas porter le même regard sur la jeunesse ? Elle doit être un temps d'expérimentation de la vie et non de la pauvreté.

Notre proposition de loi repose sur le principe de l'autonomie. Elle comporte deux dispositions. La première introduit un nouvel article dans le code de l'éducation, qui ouvre le droit à une garantie d'autonomie jeunes, autrement dit à une allocation pour les jeunes gens âgés de 18 à 25 ans détachés du foyer fiscal de leurs parents et inscrits dans une formation, dont les revenus sont inférieurs au seuil de pauvreté. Grâce à cette mesure, plus aucun étudiant ne vivra avec moins de 1 102 euros par mois. Dans le cas où il percevrait des revenus propres, par exemple dans le cadre d'une formation en alternance, la garantie d'autonomie serait réduite d'autant.

En rupture avec la logique actuelle, ce ne sont plus les ressources des parents qui détermineront l'attribution des aides sociales mais les ressources propres du jeune adulte. Et, oui, cette aide sera également versée aux jeunes issus de familles aisées, parce que chacun doit pouvoir s'émanciper de sa famille. Des jeunes appartenant à des familles aisées peuvent être des étudiants pauvres, du fait de pressions ou d'une exclusion liées à l'orientation sexuelle ou au choix de formation.

La garantie d'autonomie jeunes sera également ouverte aux lycéens professionnels dès 16 ans. Le Gouvernement, à travers la réforme à venir des lycées professionnels, ne veut plus des lycéens, mais des travailleurs avant l'heure. Nous voulons, à l'inverse, qu'ils puissent rester en formation aussi longtemps que nécessaire. Trois quarts des lycéens de la voie professionnelle sont issus de milieux modestes. Trop souvent, ils choisissent l'apprentissage plutôt que la voie professionnelle pour gagner au plus vite un peu d'argent. Étendre le bénéfice de cette allocation aux lycéens des filières professionnelles, c'est favoriser l'enseignement professionnel, faire le choix d'une filière qui facilite l'insertion professionnelle et la poursuite d'études.

L'article 2 prévoit de financer ce dispositif par la création d'une contribution exceptionnelle sur les superprofits. Pour nous, ce débat sur leur taxation n'est pas clos. Il faudra aussi imaginer une contribution financière pour les entreprises qui s'installent en France pour engager des jeunes très qualifiés, grâce à la formation dispensée par l'université publique. La discussion à ce sujet doit être ouverte.

Cette proposition recueille le soutien de 76 % des Français. Le système des bourses est à bout de souffle. Vous avez le pouvoir de changer les choses. Faites le choix de l'émancipation des jeunes !

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L'article 1er crée une garantie d'autonomie à destination des jeunes de 18 à 25 ans en formation, à condition qu'ils soient détachés du foyer fiscal des parents et que leurs revenus soient inférieurs au seuil de pauvreté, soit 1 102 euros, ainsi que des lycéens à partir de 16 ans, inscrits en formation dans un lycée professionnel.

Nous manquons de données actualisées, mais nous avons pleinement conscience de la précarité des jeunes en formation, qui s'est accrue pendant la crise sanitaire. Le Gouvernement n'a pas attendu pour la combattre. Dès juillet dernier, 300 millions d'euros ont été mobilisés à la rentrée pour des mesures d'urgence contre la précarité étudiante. Les bourses ont augmenté de 4 % et les aides personnelles au logement (APL) de 3,5 % pour faire face à l'inflation. Les étudiants précaires, même non boursiers, bénéficient de repas à 1 euro au Crous. Une aide exceptionnelle de 100 euros a été accordée à plus de la moitié des étudiants.

Selon l'Observatoire national de la vie étudiante (OVE), 51,2 % des 40 % d'étudiants qui déclarent travailler pendant leurs études disent le faire pour vivre ou survivre. Vous ne distinguez pas ceux qui travaillent seulement l'été pour améliorer leur niveau de vie et ceux qui travaillent toute l'année pour leur subsistance. Vous ne prenez pas en compte ceux qui travaillent en lien avec leurs études. Travailler pendant les études n'est pas forcément négatif : pour 73,3 % des étudiants dans ce cas, cela constitue une expérience professionnelle à valoriser. L'OVE relève toutefois que 8,2 % des étudiants qui exercent une activité rémunérée considèrent que celle-ci a des effets négatifs sur la réussite de leurs études. C'est surtout à ces étudiants qu'il faut apporter des réponses.

La ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a lancé, le 7 octobre, une concertation nationale sur la vie étudiante qui doit se pencher sur le système de bourses sur critères sociaux. La lutte contre la précarité étudiante ne se résume toutefois pas à l'attribution d'une aide financière. Nous devons aider les jeunes gens en formation à trouver un logement, rester en bonne santé, s'alimenter correctement, réussir leurs études ; nous devons les informer sur leurs droits et accompagner ceux qui en ont besoin. Faire plus pour ceux qui ont moins, c'est notre philosophie depuis 2017.

Nous ne sommes pas favorables à la contribution exceptionnelle sur les profits des entreprises de certains secteurs pour financer cette garantie d'autonomie.

Pour toutes ces raisons, le groupe Renaissance ne votera pas en faveur de ce texte.

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Cette proposition de loi ne fera que du mal à la France. Elle est mauvaise sur le fond comme dans ses modalités d'application.

Sur le fond, elle constitue un véritable revenu de solidarité active ( RSA) – lequel, on le sait, est le summum de l'assistanat ; peu nombreux sont ceux dont la vie professionnelle rebondit après sa perception. Aujourd'hui, 40 % de nos 2,6 millions d'étudiants occupent un emploi parallèlement à leurs études. C'est courageux de leur part, mais surtout bénéfique : cela leur apprend la valeur du travail et leur permettra de montrer à leurs futurs employeurs qu'ils sont déterminés à réussir et entreprenants. Mais vous préférez leur faire perdre la notion du travail !

L'État fait déjà beaucoup. Les étudiants sont logés dans les résidences du Crous et bénéficient, lorsqu'ils sont boursiers, de repas à 1 euro. Les droits d'inscription à l'université ont été gelés alors qu'ils sont déjà plus faibles que ceux de nos voisins européens. Les bourses et les APL ont été revalorisées et une aide exceptionnelle de 100 euros a été versée aux étudiants boursiers en fonction de critères sociaux. Évidemment, il reste beaucoup à faire, à commencer par construire 250 000 logements qui manquent, et le Gouvernement n'agit pas. Votre exposé des motifs n'en est pas moins bien ingrat.

Quant à ses modalités d'application, votre proposition ne contient aucun garde-fou, aucune condition de nationalité, de lieu de résidence ou de formation. Ainsi un étudiant étranger n'ayant jamais mis un pied en France pourrait-il suivre une formation à distance et améliorer son niveau de vie sans que cela ne pose le moindre problème. C'est scandaleux et accablant, mais cela ne nous étonne plus.

Oui, la misère étudiante existe. Pour y répondre, il faut des mesures concrètes et saines : par exemple réserver les logements du Crous en priorité aux Français, faire bénéficier les 18-25 ans de la gratuité des transports ferroviaires ou encore verser un complément de revenu aux étudiants français qui travaillent.

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Aujourd'hui nous est donnée l'occasion historique d'envisager la fin de l'appauvrissement de millions de jeunes gens en décidant un progrès social considérable pour notre État-providence. La précarisation croissante de la jeunesse n'est plus à démontrer : petits boulots, prêts bancaires, mauvais régime alimentaire, renoncement aux soins médicaux et isolement social constituent le quotidien de beaucoup. Dans des cas extrêmes, la précarité peut conduire à la délinquance, à la prostitution, voire au suicide. Lorsqu'un étudiant fait la queue pour manger, nous ne pouvons qu'avoir honte. Notre pays a besoin d'une jeunesse instruite, émancipée et heureuse, pas affamée.

Grâce à cette proposition de loi, La France insoumise et l'ensemble de la Nouvelle union populaire, écologique et sociale (NUPES), cette honte pourrait disparaître pour laisser place à un sentiment de fierté. En offrant à chaque jeune de 18 à 25 ans, et dès 16 ans pour ceux scolarisés en lycée professionnel, une allocation leur permettant de vivre décemment et au-dessus du seuil de pauvreté, nous pouvons mettre fin à la saga des générations sacrifiées. Quand ceux qui n'ont pas confiance en la jeunesse voient ce progrès social comme une mesure d'assistanat, nous le considérons un outil au service de l'autonomie. L'indépendance financière des jeunes bénéficiera aussi aux familles, qui n'auront plus à dépenser des sommes parfois excessives au regard de leurs moyens.

C'est en donnant à nos jeunes la possibilité de demeurer le plus longtemps possible dans un système éducatif formateur et qualifiant que nous leur procurerons, ainsi qu'au pays tout entier, le meilleur avenir qui soit. Il y va également de notre indépendance et de la souveraineté de notre pays. Aujourd'hui, chers collègues, donnons à notre jeunesse les moyens de forger son avenir pour construire notre avenir commun.

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Nous réfléchissons aujourd'hui aux perspectives qui s'offrent aux jeunes gens de notre pays. Plutôt que d'instituer de nouveaux droits, nous devons créer de nouvelles chances. Il faut réunir les conditions d'une meilleure insertion sociale et professionnelle des étudiants en leur portant une plus grande considération et en les accompagnant au long des études, dans leur formation et vers l'emploi.

Vous proposez de verser aux jeunes de 18 à 25 ans inscrits dans une formation une allocation d'autonomie complétant leurs revenus mensuels pour atteindre le seuil de pauvreté – soit environ 1 100 euros – et ajustée en fonction de la situation familiale. Cette allocation serait ouverte aux lycéens inscrits dans l'enseignement professionnel à partir de 16 ans. Nous n'y sommes pas favorables sans condition stricte et sans véritable encadrement. La jeunesse ne doit pas commencer sa vie dans une forme d'assistanat.

D'autres dispositifs existent pour aider les jeunes en situation de précarité, comme les bourses et les APL, et les frais de scolarité sont particulièrement faibles au regard de nos voisins européens. Nous sommes conscients que ces mécanismes ne sont pas suffisants et qu'ils doivent être améliorés, notamment pour éviter les effets de seuil. Nous ne nions pas l'existence de la précarité étudiante, mais nous divergeons quant aux moyens de la résorber. Votre proposition de loi est inapplicable. Vous proposez de verser une allocation à tout étudiant en formation sans aucune obligation de présence, contrairement à ce qui est exigé des étudiants boursiers : ce qui s'imposerait aux uns ne serait pas demandé aux autres. De plus, vous prévoyez que l'allocation atteigne le seuil de pauvreté, soit 1 102 euros. Or, un étudiant au RSA jeune actif, qui aura travaillé deux ans à temps plein au cours des trois années précédentes, percevra un peu plus de 500 euros. Comment expliquer cette inégalité ? Pour ces raisons, nous voterons contre la proposition de loi.

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Cette proposition de loi part d'un constat que nul ne peut nier : la précarité des jeunes, notamment des étudiants, est une réalité qui s'accroît depuis la crise sanitaire. Nombre d'entre eux sont dépendants de l'aide de leur famille pour mener leurs études, mais toutes les familles ne disposent pas des ressources suffisantes pour financer le logement ou l'alimentation dans les agglomérations, où le coût de la vie est élevé. Dès lors, beaucoup exercent une activité parallèlement à leurs cours. Cela a toujours existé mais la conjoncture actuelle, marquée par une inflation élevée, complique sérieusement la donne.

Il serait malhonnête de dire que des dispositions n'ont pas été prises face à la crise. J'en rappelle quelques-unes : la loi sur le pouvoir d'achat a revalorisé les bourses sur critères sociaux et les aides au logement ; une aide exceptionnelle de 100 euros est versée depuis la rentrée à tous les bénéficiaires de la prime d'activité et des minima sociaux, ce qui inclut les étudiants boursiers et les allocataires des APL ; les loyers des logements universitaires gérés par le Crous ont été gelés ; le repas à 1 euro a été maintenu pour tous les étudiants boursiers et élargi aux étudiants en difficulté qui en font la demande ; enfin, le plan « 1 jeune, 1 solution », qui a mobilisé plus de 9 milliards d'euros, montre déjà des effets positifs.

Nous ne croyons pas qu'offrir une allocation à chaque jeune en formation, sans aucune contrepartie, soit une solution aux difficultés évoquées. Il n'y a pas d'argent magique. Le laisser croire ne serait pas rendre service. En conséquence, les membres du groupe Démocrate ne soutiendront pas cette proposition de loi, préférant renforcer et prolonger les dispositifs d'aide en vigueur, qui doivent trouver un deuxième souffle.

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Plus que jamais, la condition étudiante est mauvaise. Un trop grand nombre de nos jeunes se trouvent dans des situations d'extrême précarité alimentaire, psychologique ou menstruelle, qui témoignent d'une faille considérable dans notre système éducatif et dans nos politiques de jeunesse. Pour le groupe Socialistes et apparentés, il faut trouver des pistes durables contre la précarité, avec des propositions structurelles. Si une allocation d'autonomie est une piste, elle ne doit laisser personne sur le côté – ni les étudiants internationaux, ni les jeunes en reprise d'études, ni ceux qui ne sont pas inscrits dans une formation.

Pour les socialistes, cette situation n'a que trop duré. L'année dernière, Boris Vallaud et Hervé Saulignac soumettaient à l'Assemblée nationale une proposition de loi avec des leviers d'action pour y mettre fin. Pour améliorer la condition de nos jeunes, il faut un texte large et inclusif. Notre groupe travaille activement en ce sens. Les nombreuses auditions de la communauté universitaire et de la jeunesse démontrent qu'il faut agir sur les politiques publiques qui affectent quotidiennement nos jeunes : une allocation ne suffira pas. Il est temps d'investir massivement pour la santé mentale, l'accompagnement des jeunes en décrochage, leur insertion et la rénovation des infrastructures universitaires.

Malgré ces réserves, le groupe Socialistes et apparentés, fidèle soutien des plus précaires, votera en faveur de cette proposition de loi.

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La précarité étudiante est une question fondamentale face à laquelle la majorité présidentielle agit concrètement : outre le système boursier, qui consacrera 2,3 milliards d'euros en 2023 à près de 750 000 bénéficiaires, les étudiants peuvent également percevoir, sous conditions, d'autres aides : l'aide au logement, les prêts étudiants garantis par l'État et les allocations proposées par les collectivités locales. On peut également citer les dispositifs transitoires tels que les repas à 1 euro pour les boursiers et l'aide exceptionnelle de 100 euros versée depuis le 15 septembre dernier.

La proposition de loi soulève un problème de forme et un problème de fond. Sur la forme, la mesure proposée n'est évaluée ni quant au nombre d'étudiants concernés, ni quant à son impact financier. On ne sait pas si elle est soutenable. Sur le fond, la Cour des comptes précise, dans son rapport de l'année 2022, que les systèmes les plus efficaces sont ceux qui existent et que l'on peut améliorer. La proposition semble ainsi redondante avec les aides en vigueur. Enfin, l'automatisation de cette allocation pose la question de son efficacité. Il n'est pas tenu compte du revenu des parents alors que certains d'entre eux peuvent, dans une certaine limite, contribuer aux besoins de leurs enfants.

Convaincu, avec la majorité présidentielle, qu'il faut maintenir l'effort entamé en faveur des jeunes depuis 2017, avec des mesures efficaces et non démagogiques, pour qu'ils puissent étudier dans de bonnes conditions et accéder aux mêmes formations quels que soient leurs moyens, le groupe Horizons et apparentés ne soutiendra pas cette proposition de loi.

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En France, un étudiant sur cinq vit en dessous du seuil de la pauvreté et un sur deux affirme qu'il ne mange pas à sa faim. Près de la moitié des jeunes doivent désormais, quand c'est possible, trouver un travail parallèlement à leurs études face à l'augmentation du coût du logement et de la vie. Il n'est pas normal que les étudiants aient du mal à se loger et se nourrir, et que certains d'entre eux doivent cumuler les emplois pour réussir à survivre, parfois au détriment de leurs études. On perpétue ainsi les inégalités : les chances de réussite ne sont évidemment pas les mêmes pour l'un qui occupe deux emplois pour payer son loyer et l'autre qui se consacre pleinement à ses études sans s'inquiéter du menu du lendemain. Nous avons tous en mémoire les images des files d'attente devant les distributions alimentaires durant la crise du covid. Ce sont les collectivités, les associations, les citoyens qui ont fait preuve d'une solidarité incroyable face à cette précarité exacerbée.

Mais la précarité étudiante ne s'est pas arrêtée avec le confinement. Cet épisode est un appel à un sursaut de responsabilité de la part de l'État pour protéger notre jeunesse. La France reste l'un des seuls pays européens à ne pas avoir instauré de revenu de solidarité pour les jeunes. Je m'interroge sur ce que cela exprime de notre vision de la jeunesse et de la place que nous voulons lui accorder dans notre société.

Pour ces jeunes qui conjuguent études, formation et précarité, la santé mentale aussi est en danger. Depuis la crise du covid-19, un tiers des étudiants présentent des symptômes anxieux et dépressifs. Le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les 15-24 ans, ce que je trouve particulièrement choquant.

Cette proposition de loi parle de perspectives d'avenir et de dignité dans un monde où la précarité écologique, contre laquelle vous ne faites que trop peu, s'ajoute à la précarité économique. Le groupe Écologiste - NUPES salue donc la proposition de loi de La France insoumise, qu'elle votera.

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Cette proposition de loi répond à une urgence sociale et à une urgence pour l'avenir de notre pays.

Urgence sociale, car la précarité étudiante touche de plus en plus de jeunes gens. La crise du covid-19 a été le révélateur d'une situation qui dure depuis des années. Les chiffres sont éloquents : 20 % des étudiants vivent sous le seuil de pauvreté, avec un revenu moyen de 837 euros – 737 euros pour les jeunes issus d'un milieu ouvrier – et 30 % d'entre eux renoncent à des soins et à des examens médicaux. Pour subvenir à leurs besoins, 46 % d'entre eux travaillent à côté de leurs études. La proportion d'étudiants qui travaillent par contrainte est inquiétante. Selon l'Insee, 19 % occupent plus d'un mi-temps ; s'ils ne travaillaient pas, ils auraient une probabilité plus élevée de 43 points de réussir leur année.

Non seulement le fait de ne pas assurer l'autonomie financière des étudiants est, d'un point de vue social, un désastre, mais nous hypothéquons ainsi leurs chances de réussir et nous nous privons chaque année de femmes et d'hommes formés. C'est un immense gâchis. Nous dénonçons d'une même voix l'incurie des années précédentes et les lacunes graves d'un système de bourses incapable d'assurer l'autonomie des jeunes gens en formation.

Le dispositif proposé n'oublie pas les inscrits en lycée professionnel, trop souvent laissés de côté – à ce propos la réforme qui se trame nous inquiète. Le texte n'élude pas non plus la question de la demi-part fiscale pour un enfant, qui doit être supprimée dès lors que l'État prend en charge le jeune en formation.

Le débat doit donc s'ouvrir sur un revenu étudiant sans condition d'âge et indépendant de la situation familiale, car les étudiants sont des travailleurs en devenir. Il faut prendre soin de nos jeunesses. Le groupe GDR - NUPES soutiendra cette proposition de loi.

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La crise sanitaire a été un triste révélateur et un catalyseur des difficultés financières que connaissent les jeunes. Les images des files d'attente de l'aide alimentaire ont hanté nos confinements. Si nous en parlons peu aujourd'hui, les difficultés sont toujours là, face à une inflation record. Or, la précarité est une double peine pour les étudiants : non seulement elle les empêche d'accéder aux biens et services les plus élémentaires, mais elle les conduit à exercer une activité rémunérée au détriment de leur réussite académique.

Les mesures prises par le Gouvernement au plus fort de la crise ont été bienvenues, mais ne répondent pas à l'ampleur du phénomène, qui est loin d'être conjoncturel. Le groupe LIOT appelle ainsi à maintenir le ticket de restaurant universitaire à 1 euro pour tous les étudiants, et surtout à parachever enfin la réforme des bourses, abandonnée durant le précédent quinquennat. Pour l'heure, 74 % des étudiants n'y ont pas accès. Les étudiants ultramarins notamment en sont parfois injustement privés. Le cas de Maëlle, qui a créé un immense émoi sur les réseaux sociaux, n'est pas isolé, mais ce n'est que cet émoi qui a conduit les pouvoirs publics à prêter l'oreille. La cherté de la vie outre-mer, le prix exorbitant des billets et l'isolement sont le lot quotidien des étudiants ultramarins.

Cela dit, nous prenons acte de la concertation qui vient de s'ouvrir. Il s'agit d'aller vite. Notre groupe partage évidemment l'objectif de cette proposition de loi, malgré quelques interrogations. Par exemple, pourquoi ne pas lier la réflexion sur la réforme des bourses à des solutions de logement ? Nous souscrivons toutefois à la nécessité de remettre à plat le système d'aides, illisible et insuffisamment accessible. Surtout, le soutien financier apporté aux jeunes, à un moment déterminant pour la construction de leur avenir, a une dimension émancipatrice. Leur garantir des conditions de vie dignes au moment de leur formation, c'est leur donner toutes les chances de s'insérer, de s'épanouir et de casser les cycles de reproduction sociale des inégalités.

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Plus qu'une question, ce sera un commentaire. Au vu des chiffres publiés ce matin, nous pouvons nous féliciter qu'une nouvelle fois le taux de chômage diminue, même si c'est légèrement, au troisième trimestre. Compte tenu de la conjoncture difficile, cela signifie que les mesures prises par le Gouvernement permettent d'amortir la crise.

Deux chiffres, en particulier, ont retenu mon attention. Tout d'abord, le taux d'emploi des jeunes de 15 à 24 ans augmente encore pour atteindre 34,9 %, son plus haut niveau depuis 1990. C'est une bonne nouvelle pour les jeunes gens, dont on décrie tellement la situation. Ensuite, la part des jeunes de 15 à 29 ans qui ne sont ni en emploi ni en formation continue poursuit sa diminution pour atteindre 11,6 %. Ce sont là deux bons résultats.

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Nos collègues du Rassemblement National minimisent les faits mais quand des jeunes peuvent faire la queue pendant des heures pour se nourrir et qu'on qualifie cette proposition de loi de mauvaise, c'est qu'on est hostile à cette jeunesse qui est notre avenir. C'est désolant. Quoi que vous en pensiez, nous portons le drapeau de ces gens qui souffrent. Quant à vous, on voit votre hypocrisie envers la jeunesse.

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Je tiens d'abord à vous féliciter tous pour ce grand moment d'autosatisfaction. Le groupe Renaissance s'est vanté de son bilan d'une augmentation de 4 % du montant des bourses – quand 38 % seulement des étudiants touchent une bourse et que l'inflation atteint presque 6 % ! Drôle de satisfecit ! En spécialistes de l'arnaque, vous citez aussi l'augmentation de 3,5 % des aides au logement. Très bien, mais c'est inférieur à la progression des loyers ! Vous n'avez rien revalorisé du tout puisque les étudiants ont perdu de l'argent.

Alors qu'une partie de la population, qui vivait déjà dans une grave situation de pauvreté, a été touchée par deux crises sanitaire puis inflationniste, vous vous félicitez d'une revalorisation qui lui fait perdre de l'argent. Elle était déjà en souffrance ; sa situation était déjà invivable. Comment pouvez-vous vous congratuler ?

Autre arnaque : l'argument sur l'aide d'urgence. D'abord, elle est en grande partie financée par la contribution de vie étudiante et de campus, un nouveau truc que vous avez inventé pour augmenter les frais d'inscription. Surtout, pour obtenir cette aide d'urgence, il faut rencontrer une assistante sociale. Or, on en compte une pour 12 000 étudiants ! Neuf pour toute l'académie de Paris !

Si votre aide d'urgence et vos revalorisations sont si efficaces, pourquoi voit-on encore des étudiants aux distributions alimentaires ? Vous êtes fiers de votre bilan mais vous trouvez que les queues pour l'aide alimentaire sont une mauvaise chose. Comment cette incohérence ne vous saute-t-elle pas aux yeux ?

Vous dites que la précarité étudiante est une réalité et que vous avez lancé une réforme des bourses. Mais cette réalité, c'est une urgence. J'ai l'impression que vous ne le comprenez pas ! (Exclamations.) Durant la préparation de mon rapport, je les ai vues, ces centaines d'étudiants qui crèvent la dalle (Mouvements divers) et vous les renvoyez à une réforme des bourses qui viendra dans un an et demi ou deux ans, avec en attendant des revalorisations qui ne revalorisent absolument rien ! Vous prenez des grands airs en disant que ma proposition de loi ne répond à aucun problème de fond...

(« Qui est-ce qui prend des grands airs ? » chez les membres du groupe RE ; mouvements vifs et prolongés.)

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Chers collègues, un peu de calme je vous prie. On ne s'entend plus. Monsieur le rapporteur, veuillez répondre calmement et sans provocation aux remarques et aux questions des députés, qui ont aussi le droit de les exprimer et de ne pas être d'accord avec vous. C'est ce qu'on appelle la démocratie. (Exclamations.) Ne répondez pas avec provocation ou condescendance, et tout le monde sera calme.

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Je réponds avec calme même si ce sujet attise nécessairement la passion. À quand remonte le dernier débat sur la précarité étudiante ? S'il s'en tenait tant que ça, nous aurions déjà trouvé des solutions. On nous oppose depuis des mois l'argument des revalorisations, sans jamais répondre à nos questions. On trouve tous les défauts à ma proposition de loi, sans jamais aborder la question de fond : la nécessité de sortir de la logique familialiste. Comment peut-on dire, dès lors qu'un étudiant a 18 ans... (Exclamations.) Collègues, vous ne pouvez pas à la fois me reprocher de prendre des grands airs et ne pas m'écouter quand j'expose vos contradictions !

Traiter le fond, c'est donc sortir de la logique familialiste, ce qui n'apparaît dans aucune de vos interventions. Peut-on accepter un système qui demande aux étudiants de dépendre de leurs parents alors que certaines familles peuvent aider leurs enfants tandis que d'autres ne le peuvent pas ? C'est une injustice totale, qui crée deux catégories d'étudiants, ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent pas. Le jour du partiel, les premiers se rendent compte qu'ils ont eu moitié moins de temps pour travailler que les autres, et pourquoi ? Parce que leurs parents sont moins riches ! C'est un débat de fond que personne ne veut aborder.

Quand on nous dit que travailler n'est pas négatif, je rappelle que c'est pourtant la première cause d'échec en licence. N'essayez pas de présenter une inégalité comme quelque chose de positif. Quand on fait ses études, on ne travaille pas pour le plaisir. On a envie d'étudier. C'est presque un travail à plein temps ! Alors quand il faut en plus aller travailler, sans parler de gérer la vie courante, c'est une situation de stress et d'angoisse qui crée l'échec.

Vous êtes nombreux à dire que vous l'avez vécu. Bravo, sincèrement ! Vous qui êtes ici êtes parvenus à aller jusqu'au bout. Mais quand entend-on la parole de ceux qui n'ont pas réussi à tenir ? C'est la voix de ceux qui ont échoué que j'essaie de porter.

La position du Rassemblement National est aussi incroyable que ses amendements. Vous décrivez l'allocation proposée comme un RSA pour les jeunes. Mais ce n'est pas du tout le cas. Quand on est étudiant, on fait ses études et cela occupe bien assez les journées. Vous dites aussi que l'État fait déjà beaucoup : je suis heureux de voir qu'une fois de plus, le Rassemblement National appuie la politique sociale du Président de la République. Il y a eu 4 % d'augmentation des bourses, 3,5 % des APL. C'est l'arnaque à tous les niveaux et cela vous convient très bien ! Ne nous faites pas le coup des étrangers qui vont se déclarer étudiants à distance : vous savez bien qu'il faut assister aux travaux dirigés. Les étrangers ne peuvent pas profiter d'une bourse à distance, cela n'existe pas.

Quant au complément de revenus pour les étudiants qui travaillent, c'est une réponse complètement à côté de la question de la précarité étudiante. Cela ne répond pas au problème de fond, l'existence de deux catégories d'étudiants, ceux qui doivent travailler et ceux qui ne travaillent pas. Par ailleurs, cette solution ne permet même pas à un étudiant qui travaille de vivre au-dessus du seuil de pauvreté.

Le groupe Les Républicains parle d'assistanat. Mais ceux qui toucheraient ce revenu ne sont pas sans rien faire : ils font des études. Du reste, si l'on demande à des gens de faire cinq ans d'études, heureusement que l'État y contribue ! Celui-ci considère d'ailleurs qu'il le doit puisqu'il a instauré un système de bourses. Sauf que ce système est défaillant parce qu'une majorité des étudiants ne touche pas de bourse et que les autres ne parviennent pas à en vivre.

Une allocation d'autonomie est la seule solution. Dès qu'on entre dans la logique familialiste, on doit faire des catégories : les étudiants qui vivent loin de chez leurs parents, ceux qui vivent chez leurs parents... Une statistique de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) montre que, sous l'angle monétaire, les étudiants les plus pauvres se trouvent en classe préparatoire aux grandes écoles ; pourtant, ce sont les plus aidés ! Les critères à prendre en compte dans la logique familialiste sont si nombreux que le système ne peut pas fonctionner. En voulant s'adapter aux réalités, on organise un chaos généralisé. Le groupe Les Républicains veut peut-être la réussite des étudiants, mais je n'ai pas entendu de propositions.

Le groupe Démocrate se félicite des repas à 1 euro mais 75 % des étudiants qui fréquentent l'aide alimentaire ne sont pas boursiers. Si le repas à 1 euro était aussi efficace, ils ne seraient pas si nombreux à s'y rendre ! Encore faudrait-il, du reste, qu'il y ait des restaurants universitaires le soir. Dans l'académie de Paris, il n'y en a que deux, sachant que de nombreux étudiants vivent en banlieue. Ne me dites pas qu'on peut nourrir tous les étudiants de l'académie de Paris dans les deux restaurants du Crous ouverts la nuit ! Vous vous étonnez de propositions qui fonctionneraient parfaitement alors que, factuellement, le dispositif actuel est grippé. Ne vous vantez pas d'un bilan contredit par la réalité !

Le groupe Horizons et apparentés cite le chiffre de 2,3 milliards d'euros, mais la question est surtout de savoir combien d'étudiants vivent sous le seuil de pauvreté, soit 1 102 euros. En vérité, il n'y en a quasiment pas qui vivent au-dessus ! Même les étudiants issus de familles aisées vivent avec moins de cette somme ! (« Heureusement ! » et exclamations diverses.) Heureusement ? Vous savez ce que c'est que de vivre avec 800 euros ? Vous comparez l'allocation proposée avec le RSA alors que cela n'a rien à voir. Surtout, si vous vous indignez que le montant du RSA soit de 600 euros, augmentez-le ! En tout cas, ce n'est pas à moi qu'il faut demander des comptes.

Enfin vous déplorez que l'allocation ne prenne pas en compte le revenu des parents. C'est précisément ce que nous souhaitons. On dit que se lancer dans des études, à 18 ans, marque le début de l'autonomie. En fait, c'est précisément le moment où l'on commence à dépendre des parents. D'où l'inégalité entre l'étudiant qui a une famille aisée et celui dont la famille est pauvre. Il faut mettre fin à ce différentiel et c'est l'objet de notre allocation. Lorsqu'il faut prendre en compte le revenu des parents, les critères à intégrer sont si nombreux, comme le montre le rapport, qu'on ne trouve jamais une solution satisfaisante. Si nous avions d'autres options que l'allocation d'autonomie, croyez bien que nous vous les formulerions. Mais il n'est pas possible de mettre fin à la précarité étudiante dans une logique familialiste.

Article 1er : Mettre en œuvre une garantie d'autonomie jeunes

Amendements de suppression AS1 de M. Fabien Di Filippo et AS29 de M. Serge Muller.

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Avec cette proposition de loi, nous sommes au cœur de la philosophie de l'extrême gauche : toujours plus d'aide sociale, si possible à crédit, pour maintenir les bénéficiaires captifs d'un système. C'est l'exact contraire de l'émancipation de l'individu. Nous parlons ici d'allouer 1 100 euros par mois dès 16 ans dans la filière professionnelle et dès 18 ans dans la filière générale. C'est le double du RSA, sans contrepartie en faveur de la collectivité ni contrainte d'assiduité.

Cette mesure est, d'abord, insoutenable financièrement : elle représenterait environ 7 milliards d'euros par an en rythme de croisière. Il s'agit exactement, il faut le dire, d'un RSA jeunes.

Vous avez tenu des propos inexacts. Il y a statistiquement, dans une classe d'âge, de plus en plus de bacheliers, de cursus longs, d'études longues. Vous souhaitez que les jeunes gens puissent rester en formation aussi longtemps que nécessaire, fidèle en cela aux principes du droit à la paresse conceptualisé et exalté par vos collègues de la NUPES. Surtout, j'ai entendu dans les prises de parole de votre groupe beaucoup d'instrumentalisation de la souffrance ainsi qu'une volonté de sacrifier les générations futures en leur faisant payer le coût de votre générosité.

Ce que je vois dans ce texte, c'est la destruction du sens de la famille, de l'idée de travail, de la valeur des diplômes et de la réussite scolaire. Il y a beaucoup d'échec dans le supérieur : on ferait mieux de réorienter les dispositifs de bourses selon des critères liés au mérite pour les concentrer sur les étudiants qui peuvent réussir, de revaloriser les filières professionnelles de proximité dans nos territoires pour en faire des voies d'excellence, et de se demander pourquoi concentrer toujours les facultés du supérieur dans les métropoles où la vie est la plus chère. Voilà de vrais débats qui méritent d'être ouverts !

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Cette proposition de loi ne fera que détruire la valeur travail. Véritable RSA jeunes, l'allocation proposée, avoisinant le niveau du salaire minimum, encouragerait les étudiants à ne plus travailler. Il s'agit d'un très mauvais signal qui risque de favoriser l'assistanat alors que 40 % des étudiants exercent une activité rémunérée en parallèle de leurs études. La jeunesse doit être une période pendant laquelle on apprend à être récompensé de son labeur et à se projeter dans la vie active, pas à être assisté.

Il faut favoriser les étudiants qui travaillent en leur versant un complément de revenus. Vous pensez qu'il faut favoriser l'inaction. Il n'est pas pensable de plonger les Français dans ce cercle vicieux dès le plus jeune âge.

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Quand on fait des études, on fait des études : quel rapport avec le RSA ? Quant à l'augmentation du nombre d'études longues, elle est normale puisque de plus en plus de jeunes entrent dans l'enseignement supérieur – ils sont près de 3 millions aujourd'hui contre à peine 200 000 dans les années 1950. En effet, on promet aux élèves que s'ils travaillent dur et font des études supérieures, ils pourront prendre l'ascenseur social. Sans diplôme, d'ailleurs, il est très difficile de trouver un travail. C'est ainsi que s'organise la société : on demande à un nombre croissant d'élèves d'entrer dans l'enseignement supérieur sans augmenter le nombre de places ; on demande à des familles qui n'en ont pas les moyens d'assumer les études supérieures de leurs enfants – se nourrir, s'habiller, vivre dans une ville lointaine... – mais sans les leur donner.

Monsieur Di Filippo, je ne vous permets pas de parler d'instrumentalisation de la souffrance quand vous parlez des études comme d'un droit à la paresse. Je vous entends beaucoup parler d'assistanat mais il y a des millions d'étudiants dans une situation de pauvreté... (« On a des enfants ! » parmi les députés du groupe RE.) Vos enfants sont des enfants de députés ! Je vous parle des enfants des Français qui sont pauvres ! (Protestations.) Il y a des milliers d'étudiants qui font la queue pour l'aide alimentaire et tout ce que vous trouvez à leur répondre, c'est que vous avez voté la loi pouvoir d'achat !

Le Rassemblement National nous reproche d'encourager les gens à ne pas travailler, parce qu'il ne faut pas apprendre aux enfants à être assistés. Très bien. Que faites-vous pour les enfants de riches ? Les enfants de familles aisées, qui n'ont pas à travailler, sont-ils des assistés ? Pourquoi ne les montrez-vous jamais du doigt ? Vous dites qu'il faut favoriser les étudiants qui travaillent. Mais ce sont les enfants des classes populaires ! Pourquoi voulez-vous faire peser une charge sur eux, et non sur les enfants de familles aisées ? Il y a là un problème d'égalité que vous ne parvenez pas à résoudre ; la proposition de loi, si.

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Monsieur Muller, l'exposé sommaire de votre amendement semble rédigé par le Medef. Il faut travailler, travailler, travailler, y compris quand on est jeune et qu'on doit se qualifier. Mais il faut obtenir des qualifications pour être performant dans son travail. Dans ma circonscription de Toulouse, les ouvriers qualifiés de l'aéronautique doivent étudier pour être bien formés.

Dans les lycées professionnels, où j'ai enseigné pendant douze ans, chacun regrette que l'on soit passé du bac pro en quatre ans à un examen en trois ans. Pour avoir une jeunesse qualifiée, qui fera la force de notre pays, il faut lui donner les moyens d'étudier correctement. Quant aux discours sur l'importance de la valeur travail... Les enfants des classes populaires n'ont pas besoin de leçons pour connaître la valeur du travail, à force de voir leurs parents se lever tôt le matin et charbonner pour leur salaire. En revanche, ils ont besoin de conditions décentes pour étudier et devenir des travailleurs qualifiés, notamment pour entrer dans l'horizon de la planification écologique.

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Ce n'est pas parce que les parents ont des moyens financiers que leurs enfants ne travaillent pas. La notion de travail et le goût de l'effort sont des questions d'éducation et de culture, non de moyens financiers. Cela a aussi pour vertu de rapprocher le monde étudiant de celui du travail.

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Nous sommes tous des députés responsables : nous allons sur le terrain, nous avons fait de nombreuses visioconférences avec de jeunes gens durant la crise sanitaire. Mais nous ne pouvons pas conserver ce seul prisme car ce ne serait pas scientifique. Monsieur Boyard, toutes les enquêtes que vous citez le montrent : nous n'avons pas de chiffres récents sur la pauvreté et la précarité étudiantes. Les derniers datent de l'année 2018. L'enquête de l'OVE a été réalisée durant la crise sanitaire, sur une saison incomplète. Il faut remettre la science au cœur de nos réflexions : nous en avons besoin pour prendre des décisions. Les chercheurs auditionnés, notamment M. Lenglart, le directeur de la Drees, ont dit qu'une garantie d'autonomie pour tout le monde ne servait à rien. On dirait que cela ne compte pas pour vous.

C'est parfaitement vrai : certains étudiants sont dans la précarité et il faut les aider. C'est pour cela que la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Sylvie Retailleau, a engagé une concertation. Laissons-la se dérouler, y compris sur le système des bourses. Mais rappelons que celui-ci est familialisé : la bourse est un complément donné aux familles, pas une allocation pour que l'étudiant puisse vivre.

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Monsieur le rapporteur, vous vous scandalisez d'une réponse qui elle-même se scandalisait de vos propos initiaux. On peut s'auto-insurger longtemps mais ce qui compte, c'est l'avenir de notre jeunesse. Or, celle-ci est pour partie éloignée des études, pour partie éloignée du travail, et la question de son insertion professionnelle est un véritable enjeu.

Vous voulez créer un droit à une allocation d'autonomie pour les jeunes en formation. Incitera-t-il les jeunes à s'insérer dans le travail ? Ont-ils besoin de s'émanciper en recevant une allocation ou en s'insérant professionnellement ? Être jeune est un état passager que l'on ne vit généralement pas seul. Ce n'est pas un accident de la vie qui justifierait une allocation. Les jeunes ont des besoins spécifiques et des dispositifs existent pour y répondre comme les bourses, les aides au logement, à la restauration, à la mobilité, etc. Il faut sans doute les améliorer, en lien avec les territoires. En créant une telle allocation, sur une période aussi longue, on envoie un message peu valorisant à notre jeunesse : vous la percevrez de toute façon, pas la peine de vous insérer professionnellement.

Quant aux questions de classe, populaire ou non, elles ne jouent pas. L'ascenseur social fonctionne par le travail, non par les allocations. Nous croyons au premier ; vous, aux secondes. C'est une différence fondamentale entre nous.

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Je tiens à apporter un total soutien à Louis Boyard. Peut-être en raison de sa jeunesse, certains se permettent de n'être pas toujours corrects avec lui. Par certains moments, l'ambiance dans cette enceinte ressemble à celle de l'émission Touche pas à mon poste.

( Les députés du groupe Renaissance protestent vivement)

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. Un problème de fond est posé et il ne faut pas donner de réponses de façade. Oui, il y a une inégalité de condition entre deux jeunes étudiants dont l'un vient d'une famille aisée et l'autre d'une famille défavorisée.

Vous dites que certains jeunes de familles aisées travaillent. Certes, mais il faut distinguer le travail choisi et subi. Pour ceux qui n'ont pas le choix, travailler compromet les chances de réussite. Parmi ceux-là, il y a tous ceux qui viennent des territoires d'outre-mer et dont les parents ne peuvent pas suivre.

Et d'où sortez-vous que celui qui fait des études longues bénéficie d'un droit à la paresse ? Depuis ce matin, vous n'arrêtez pas de vous référer à des scientifiques, des spécialistes, des experts : vous donnez autorité à des personnes qui ont fait des études longues, mais en sélectionnant le profil de ceux qui peuvent y accéder. Vous reproduisez les inégalités sociales en permanence. Avec vous, on n'est pas sorti de l'auberge !

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Tous vos propos ne sont qu'un retour sans fin à la lutte des classes. Vous n'en sortez jamais. Dans votre prisme, il n'y a rien d'autre que les pauvres et les riches, les jeunes qui triment et les enfants de familles riches qui ne fichent rien. Mais c'est un prisme, ce n'est pas la réalité de la société. Bien sûr, il y a des gens, pas seulement des jeunes, dans la précarité, qui ont besoin d'aide. Il y en a aussi qui ont connu la précarité et s'en sont sortis. Mais vous ne parlez que de ceux qui subissent – pour vous, il faut juste leur donner, parce qu'ils sont pauvres. Vous ne voulez pas voir ceux qui pourraient ne rien faire et qui travaillent pour gagner l'autonomie. Pourtant, ils existent. Je comprends que cela puisse fonctionner chez Cyril Hanouna. Mais ici, vraiment, c'est fatigant.

(Vives exclamations et mouvements divers.)

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Mes chers collègues, les Français nous regardent. Nous sommes à l'Assemblée nationale, pas au théâtre. Je vous prie d'être corrects, y compris à l'égard de vos collègues.

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Le débat est intéressant et il est bon de l'avoir. Nous avons tous conscience de la précarité estudiantine, tous vu ces images d'étudiants faisant la queue devant les banques alimentaires. Il faut aussi évoquer la prostitution étudiante qui concerne près de 50 000 jeunes – certains en parlent comme d'une bouée de sauvetage vitale, c'est effrayant. D'autres confessent avoir dû vendre de la drogue lorsqu'ils étaient étudiants.

Dans ce contexte tendu, le groupe Rassemblement National estime qu'il serait bon de réserver cette allocation aux jeunes de nationalité française, pour éviter d'encourager une filière d'immigration supplémentaire et pouvoir s'occuper de ses propres étudiants.

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Nous avons vu les images que vous avez rappelées, monsieur le rapporteur. Dans nos circonscriptions, nous rencontrons ces jeunes et nous visitons les épiceries solidaires. Aussi, j'aimerais vous entendre mais je n'y parviens pas. Nous serions les riches, les autres des pauvres, et vous dans une autre catégorie que j'ai du mal à identifier. Certains des éléments que vous avancez sont positifs mais ne répondent pas à l'objectif, surtout compte tenu des travaux qui ont été annoncés et auxquels nous tenons.

Nous ne sommes pas tous députés depuis trois générations. Beaucoup d'entre nous ont des enfants à élever, et trouvent peut-être leurs études coûteuses. Vous vous souciez des enfants qui refusent le lien avec leurs parents aisés et vous voudriez qu'ils touchent votre allocation ? Franchement, cela me pose un problème.

Par ailleurs, je dirai au Rassemblement National que si quelqu'un a présenté tous les documents qu'il faut pour être admis dans nos écoles professionnelles et nos universités, on n'a plus à se soucier de son origine.

Il faut penser à cette génération, proposer une véritable solution et attendre le résultat des travaux engagés pour voir comment avancer ensemble, en sortant des postures.

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Monsieur le rapporteur, vous semblez être contre la solidarité familiale. Cela me surprend peu puisque, depuis plusieurs mois, le groupe La France insoumise se prononce contre la solidarité conjugale. Après avoir soutenu la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés, peut-être défendra-t-il celle du RSA et du minimum vieillesse. Ce serait cohérent. Mais le modèle français, c'est la solidarité nationale, familiale, conjugale. C'est pourquoi je suis fondamentalement opposé à votre allocation profondément injuste, car elle bénéficiera aux enfants des familles les plus aisées. Le système de bourses sert précisément à corriger les inégalités sociales. Il ne fonctionne pas bien, certes, et nous ne vous avons pas attendu pour avoir ce débat. Malheureusement, comme pour la santé, le problème n'est pas simple.

Par ailleurs, vous avez évoqué l'idée que les enfants de députés seraient différents des autres. (Exclamations.) Ce n'est sans doute pas ce que vous avez voulu dire. Les enfants de députés sont comme tous les autres et les députés comme tous les citoyens. Vous avez devant vous leur représentation dans toute sa diversité, d'idées, de territoires ou de parcours. Je sais ce que c'est que d'être un étudiant boursier et de compter ses revenus. Vous n'avez pas ce monopole. Ne versez pas vous-même dans l'antiparlementarisme que vous combattez !

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On a l'impression que le rapporteur a jeté une bombe au sein de la commission. Mais il n'a fait que constater des faits ! J'ai quatre enfants et je vous garantis que les deux aînés n'ont pas bénéficié de la même éducation que les deux derniers, parce que je n'avais pas les mêmes moyens financiers. C'est plus facile quand on a de l'argent. Ce n'est pas un gros mot !

Nous avons tous rencontré des étudiants dans des situations difficiles. Certains sont issus de familles très aisées, ils n'ont pas voulu suivre la voie qu'on leur avait tracée et on leur a coupé les vivres. Cela arrive ! L'autonomie, c'est avoir le choix, ne pas dépendre de ses parents pour choisir sa profession et son lieu d'études. Ce n'est pas aux parents de choisir où l'enfant ira sous prétexte qu'ils paient le loyer. C'est ce que Louis Boyard est en train d'expliquer. Mais vous hurlez tellement que vous n'entendez pas raison.

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J'ai parlé d'instrumentalisation de la souffrance eu égard à la fibre émotionnelle sur laquelle vous essayez de jouer et à la déconnexion de votre proposition par rapport au réel. Mon amendement vise à supprimer une disposition irréaliste dont les conséquences en termes de dette et d'inflation créent un cycle sans fin qui affaiblit toujours les plus modestes.

Cette proposition n'est par ailleurs pas souhaitable. Nous devons travailler sur l'orientation, la carte des formations, la revalorisation du système professionnel. Il ne faut pas entrer dans un système où l'individu est roi et où l'État doit pourvoir à ses besoins, entièrement et quoi qu'il arrive. La question qui se pose est celle de l'avenir de la jeunesse. Mais il y a aussi l'avenir du pays et de la manière dont chacun doit y contribuer.

Enfin, gommez cette habitude d'émettre des jugements péremptoires sur des personnes que vous ne connaissez pas. Énormément de choses nous distinguent, à commencer par le fait que ceux qui ont été boursiers, avec des revenus modestes, et ils sont sans doute nombreux dans cette salle, n'ont pas forcément cédé à la facilité du trafic de drogue que vous revendiquez. .

(Vives exclamations)

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Je ne nie pas qu'il existe des étudiants qui travaillent par goût du travail et de l'effort, ou par éducation. Mais c'est une micro-catégorie par rapport à la masse des étudiants précaires qui travaillent parce que leurs familles n'ont pas la capacité de les aider. C'est un point intéressant, mais pas majeur.

Je vous laisse le droit de penser que vous êtes des députés responsables. Laissez-moi celui de dire le contraire ! Il n'est pas responsable de revendiquer un bon bilan en matière de précarité étudiante quand on a augmenté le montant des bourses de 4 % alors que l'inflation atteint près de 6 % et quand on a revalorisé de 3,5 % les APL alors que les loyers ont augmenté de bien plus, tout cela pour des personnes qui étaient déjà en grande souffrance. Et c'est précisément parce que nous n'avons pas de chiffres sur la précarité étudiante que je critique le système des bourses : on ne peut pas considérer toutes les situations particulières ; comme l'exige la logique familialiste, tout dépend de l'angle d'approche. Mais si nous manquons de chiffres, il faut tout de même demander combien d'étudiants vivent avec plus de 1 102 euros par mois en France – et, pour les autres, à quoi ressemble leur vie. C'est dur, vivre avec moins de 1 102 euros par mois. C'est même impossible.

En proposant un complément donné aux familles, vous ne vous intéressez qu'au montant, en restant dans la logique familialiste. Mais de nombreuses familles n'ont pas les moyens d'aider leurs enfants. Quand un étudiant touche une bourse de 596 euros, soit l'échelon maximal, il faut sortir 400 euros par mois pour qu'il atteigne le seuil de pauvreté – et ce pour chaque enfant. Ce n'est pas possible pour de nombreuses familles. (Exclamations.) Je me demande combien de temps vous tiendriez en dessous du seuil de pauvreté... Et puisque le complément est donné aux familles, que se passe-t-il lorsque le jeune ne reçoit rien ? Il appelle le Crous qui lui demande de saisir le juge aux affaires familiales : ils sont nombreux à ne pas vouloir engager cette procédure. Je travaille avec des étudiants tous les jours ; j'ai rencontré cette situation des dizaines de fois.

Le but de cette proposition de loi n'est pas de donner 1 102 euros à tout le monde. C'est de sortir de la logique familialiste : vous pourrez prendre les chiffres dans tous les sens, vous n'aurez jamais une solution personnalisée. D'ailleurs, j'attends toujours que quelqu'un en défende le principe : on entend que le montant des bourses n'est pas suffisant ou qu'il ne faut pas donner trop d'argent, ou qu'il ne faut pas d'assistanat, mais personne ne se demande s'il faut rester dans une logique familialiste.

La réforme des bourses que vous annoncez arrivera dans un an et demi. Croyez-vous que les étudiants qui font la queue pour l'aide alimentaire peuvent attendre un an et demi ?

S'agissant de l'ascenseur social, j'ai un désaccord de fond avec M. Bazin. Lorsqu'un étudiant de Vendée veut étudier à Lille, un ensemble de coûts – le logement, l'ordinateur – l'en empêchent. Considérer que l'ascenseur social fonctionne par le travail et non par les allocations est exactement dans la logique actuelle, où une bourse est un complément pour les familles et pour les étudiants qui travaillent. Or, j'acte le fait que ce système ne fonctionne pas. L'allocation que je propose permet au contraire à tous les étudiants, à égalité, d'accéder à l'enseignement supérieur pour ensuite s'élever socialement.

Pour ce qui concerne la lutte des classes dont a parlé Mme Iborra, mettez-vous à la place de cet étudiant qui, lors d'un partiel, se retrouve à côté d'un autre qui n'a pas eu à travailler la moitié de son temps, parce qu'il venait d'une famille aisée. (« Vous l'avez déjà dit ! » chez les députés du groupe RE.) Oui, je vous l'ai déjà dit mais vous n'avez pas l'air d'avoir compris. Il en va d'ailleurs de même pour Parcoursup : il y a des étudiants qui peuvent accéder aux meilleures universités, souvent des étudiants de famille aisée. Là encore, il y a une question de lutte des classes.

Le Rassemblement National a évoqué la situation des étudiants qui tombent dans la prostitution ou dans la vente de drogues. L'allocation d'autonomie éviterait ces situations. Alors pourquoi la réserver aux Français ? Si vous voulez éviter ces situations pour les Français, pourquoi ne pas les empêcher pour les personnes de nationalité étrangère ?

(Exclamations parmi les députés du groupe RN.)

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Enfin, le vote de ces amendements de suppression fera tomber tous les suivants, en particulier ceux du Rassemblement National, ceux sur la précarité étudiante et ceux sur le bilan du Gouvernement en la matière. Or, il y a un débat à avoir. Les niches parlementaires permettent à des groupes d'opposition de mettre en avant des sujets dont ils pensent qu'ils n'ont pas été assez abordés. Même si vous êtes en désaccord avec le texte, entendez au moins qu'un débat de fond sur la logique familialiste est nécessaire, et que de nombreux étudiants l'attendent. Il ne tient qu'à vous : je vous laisse choisir.

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Monsieur le rapporteur, je ne peux pas vous laisser dire qu'il n'y a pas de débat au sein de cette commission, ou d'ailleurs en séance publique.

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Ce n'est pas ce que j'ai dit, madame la présidente...

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Ne m'interrompez pas, je vous prie ! Il y a des débats, et des débats de fond. On peut ne pas être d'accord, c'est l'essence de toute démocratie. Mais je vous demande d'accepter la contradiction !

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 1er est supprimé et amendements AS17 de M. Victor Catteau, AS25 et AS26 de M. Serge Muller, AS2, AS3, AS4, AS5, AS6, AS7 de Mme Laure Lavalette ainsi qu'AS27 et AS28 de M. Serge Muller tombent.

Article 2 : Gage sur les superprofits

Amendement AS9 de Mme Laure Lavalette .

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Tout à l'heure, j'ai appelé de mes vœux un débat sur la précarité étudiante pour révéler les contradictions du Gouvernement. Je n'ai jamais dit que la commission des affaires sociales ne débattait pas – aujourd'hui, outre cette proposition de loi, nous avons travaillé sur l'augmentation du Smic et sur la réintégration des personnels de santé non vaccinés.

Je regrette la suppression de l'article 1er. À titre personnel, dans d'autres niches parlementaires, je ne voterai pas d'amendement de suppression car c'est irrespectueux des groupes d'opposition.

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Monsieur le rapporteur, votre groupe dépose systématiquement des motions de censure et nous ne disons pas que c'est irrespectueux. Ne parlez pas des amendements de suppression de la sorte s'il vous plaît !

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La mesure que nous proposons n'est en rien individuelle, mais collective et profondément patriotique : c'est le pays, l'État, la puissance publique qui considèrent que la jeunesse doit pouvoir faire des études et que le salariat doit être éduqué. Ce qui est coûteux, c'est lorsqu'un tiers des jeunes, voire plus, quitte sa formation sans qualification. Que vous le vouliez ou non, l'échec – notamment pour la jeunesse qui suit un enseignement professionnel – s'explique d'évidence par des raisons sociales. Ceux qui défendent le patronat et le capitalisme devraient comprendre que ceux-ci ont besoin d'un salariat qualifié. Il n'est pas question d'un hédonisme individualiste.

Nous conditionnons l'aide à la possibilité de mener le plus loin possible des études. Un grand pays, un pays qui innove, c'est un pays dont la classe ouvrière est qualifiée et imaginative. Le diplôme, sauf à ne rien savoir de la sociologie, est corrélé aux conditions d'étude. Tout le démontre implacablement. Aujourd'hui, les gens issus des milieux populaires sont moins nombreux dans les grandes écoles qu'ils ne l'étaient dans les années soixante-dix ! Le discours de Bourdieu est encore plus vrai et l'ascenseur social n'a jamais aussi mal fonctionné. C'est terrible. Soit l'on considère que les gens issus de milieux aisés sont plus intelligents, soit l'on considère que les gens issus des milieux moins favorisés doivent être aidés.

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Il n'est pas question de remettre en cause la réussite personnelle, ici ou ailleurs, de ceux qui ont eu la chance et les capacités d'accomplir le parcours qu'ils souhaitaient. Il ne s'agit pas de vous ni de nous, mais de poser objectivement la question des chances que l'on a d'accéder à tel ou tel niveau de formation. Une école de commerce compte onze fois plus d'enfants de cadres que d'ouvriers, une école d'ingénieurs dix fois plus, une classe préparatoire aux grandes écoles sept fois plus. Objectivement, il est faux de prétendre que les chances soient égales. Quelles conclusions tirer de ce diagnostic ? Que de telles inégalités s'expliquent en partie par la nécessité de trouver un emploi, y compris le soir ou la nuit, par l'impossibilité d'acheter des manuels et de se loger dans des logements silencieux où l'on peut dormir dans de bonnes conditions.

En outre, une allocation permettrait à l'État des économies. Les redoublements, cela coûte cher – les 73 % de jeunes qui ne réussissent pas leur licence en trois ans, ce ne sont pas 73 % de fainéants ! L'entassement des étudiants dans des amphithéâtres bondés où ils ne peuvent pas étudier dans de bonnes conditions, cela coûte cher.

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Je n'ai jamais vu un rapporteur aussi malmené et maltraité. Pourquoi ? Il vous montre la lune et vous regardez son doigt. Il soulève un problème de fond, la reproduction des inégalités sociales, que le système des bourses ne permet pas d'enrayer. Vous parlez d'ascenseur social ? Même les escaliers sont inaccessibles !

Le Rassemblement National veut réserver les aides aux étudiants français. Mais s'il est impossible de faire des études longues, vous serez contraints de faire appel à l'immigration que certains diront « choisie » – et les têtes de file viendront de partout sauf de la France. Continuez comme cela et vous verrez !

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L'amendement dont nous discutons vise à modifier le gage initial en taxant les superprofits. Ce n'est pas inintéressant. Mais peut-on garantir que les profits seront toujours suffisants pour financer cette allocation ? Pas forcément. Cela ne me semble pas un mode de financement pertinent.

La question de la précarité étudiante est bien réelle mais elle ne se limite pas au seul aspect financier. Le mal-être est palpable. Sans doute faut-il augmenter le nombre de bourses au mérite et celui des internats d'excellence, et mieux valoriser les filières professionnelles, mais il faut également s'attaquer aux causes de la précarité. Or, la réponse que vous apportez ne semble pas bonne : elle est universelle alors que tous les jeunes n'ont pas besoin d'une allocation. De plus, je crois beaucoup au mérite et au travail et je ne pense pas que l'allocation soit une garantie de réussite.

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Fils d'ouvrier et issu d'une famille nombreuse, j'ai bénéficié du montant maximal des bourses lors de mes études. J'ai même eu la chance de profiter d'un dispositif institué par le gouvernement Jospin qui en doublait le montant. Bon an mal an, je suis parvenu à atteindre le seuil de pauvreté, ce qui m'a permis de payer une chambre, de me nourrir, de me déplacer, d'étudier sans devoir travailler. Si tel n'avait pas été le cas, je n'aurais pas pu avoir le parcours qui me permet aujourd'hui l'honneur de siéger parmi vous. Étudier, c'est un travail à temps plein. Un revenu qui permette de répondre aux besoins fondamentaux est le minimum que l'on puisse attendre de la part de la sixième puissance mondiale.

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Nous pouvons nous féliciter d'avoir ce débat que les députés socialistes avaient lancé l'année dernière à travers la proposition de loi relative à la création d'une aide individuelle à l'émancipation solidaire (« Ailes »).

Force est de constater que le bilan de la majorité n'est pas bon. Les files devant les banques alimentaires et les épiceries sociales s'allongent. Vous avez refusé de bloquer les loyers des étudiants. Le présent texte permettrait de répondre à de réels besoins.

L'an dernier, parmi mes étudiants, qui sont dans une filière très exigeante, tous ceux dont les parents ne pouvaient pas payer le loyer devaient travailler. À Paris, il est impossible de vivre avec les seules bourses. Et la Seine-Saint-Denis compte 5 600 logements du Crous pour plus de 120 000 étudiants ! Une allocation autonomie permettrait de pallier les défaillances de l'État et, à chacun, de choisir son avenir.

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Il ne faut pas confondre fracture éducative et déterminismes sociaux qui limitent l'accès à l'enseignement supérieur. Le programme international pour le suivi des acquis des élèves (Pisa) montre que l'école française n'est pas très performante pour réduire les inégalités sociales. Pour ce qui est de la fracture éducative, nous avons travaillé à la réduire, par exemple à travers le dédoublement des classes en cours préparatoire. La question de la précarité étudiante est différente car arriver au bac et accéder à l'enseignement supérieur suppose déjà de s'être affranchi d'un certain nombre de déterminismes sociaux. Nous devons continuer à travailler dans ce domaine.

Je suis frustrée de cette discussion et je regrette le ton péremptoire et donneur de leçons du rapporteur, qui heurte et qui ne fait pas honneur au débat qu'il souhaite engager. Sur le fond, ce n'est pas par une allocation que nous parviendrons à régler ces problèmes, mais en améliorant la condition étudiante dans les domaines du logement ou de la santé. Néanmoins, il n'est pas possible d'attendre un an et demi avant d'avoir des explications, c'est vrai.

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Je pensais que la commission des affaires sociales travaillait à tout ce qui permet de valoriser l'un des triptyques de la République, l'égalité. Or, je suis choqué de la tension qui se fait jour et, parfois, de la haine dans les regards, chaque fois que nous parlons de problèmes humains. En évoquant les difficultés des étudiants, notre premier réflexe consiste à refuser le débat. Il n'est pas possible de se satisfaire que des étudiantes soient contraintes de se prostituer, encore moins d'ergoter sur leur nombre : n'y en aurait-il qu'une, ce serait trop. Le maire que je suis sait à quoi s'en tenir. Nous en oublions même de discuter des amendements au fond !

Nous n'avons pas encore trouvé les bonnes réponses et la France s'est éloignée de son propre modèle d'égalité et d'espérance républicaine. Les pauvres restent pauvres, ceux qui échouent continuent d'échouer. Nous devons pouvoir en débattre librement, avec la volonté d'agir pour tous ceux-là.

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Je déplore l'ambiance qui règne dans cette commission. Lorsque quelqu'un prend la parole, la moindre des choses est de l'écouter. La tonalité générale est prescriptive et agressive. Il faut que la pression redescende. Voyez, rien qu'en ce moment, on rit, on se moque pendant que je parle !

Je suis déçue que ce débat n'aboutisse à aucune solution pour nos étudiants. Hier, j'ai déjeuné au Crous avec des étudiants de l'université de Bobigny à qui j'ai demandé qui peut payer 1 euro pour le repas et qui ne le peut pas. On m'a signalé que nombre de jeunes non boursiers en grande précarité se présentent au Crous mais ne parviennent pas à faire les démarches nécessaires faute de personnel. À Bobigny, de nombreux jeunes ne déjeunent pas à midi et sautent un repas. Des étudiants en médecine m'ont confié être au bout du rouleau et qu'ils n'achèveraient peut-être pas leurs études.

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Dans le XVe arrondissement de Paris, nous recevons un grand nombre d'étudiants de province. Je leur rappelle que le personnel du Crous peut être contacté par mail pour des problèmes urgents.

Pour ma part, je suis également déçue par nos échanges et je n'avais jamais été témoin d'une telle violence. Ma fille a 19 ans et elle me fait part des difficultés rencontrées par certains élèves : nous ne vivons pas dans des mondes étanches ! M. Boyard a peut-être un contact plus facile avec la jeunesse compte tenu de son âge. Mais je l'invite à réviser sa façon de faire, qui est tellement blessante qu'on n'a pas envie de poursuivre le débat. C'est vraiment dommage parce que nous sortirons de cette réunion sans solution. J'ai envie de croire que le travail engagé aboutira à quelque chose, mais surtout qu'il débouchera avant un an et demi.

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Je rappelle que 56 % des étudiants affirment ne pas manger à leur faim, et 40 % renoncer à des soins. J'entends vos propos sur mon ton péremptoire mais vous n'êtes pas exempts d'un tel reproche. J'ai entendu que cette proposition de loi favoriserait l'assistanat ! Que le Gouvernement prend à bras-le-corps le problème puisqu'il augmente de 4 % le montant des bourses et de 3,5 % celui de l'aide personnalisée au logement ! Vous êtes déçus par le ton que j'emploie ? Mais il est badin par rapport à celui dont useraient les 56 % et 40 % d'étudiants dont je parle s'ils vous entendaient vanter le bilan du Gouvernement et les renvoyer aux conclusions d'une concertation dans un an et demi !

De nombreux chercheurs l'ont démontré : la logique de solidarité familiale est impuissante car les paramètres sont tellement divers qu'on n'arrive jamais à une bonne solution – d'où la situation actuelle. J'ai entendu deux types de propositions : certains se félicitent du statu quo du Gouvernement avec des revalorisations qui n'en sont pas et des conclusions à venir ; d'autres estiment que les étudiants doivent trouver un emploi. Mais le chômage des jeunes est élevé : vous ne parviendrez pas à faire travailler 3 millions d'étudiants !

Enfin, il n'est pas question de promouvoir l'individu roi mais l'individu citoyen. La mesure que je propose n'est pas individuelle mais collective. Des jeunes ne parviennent pas à se loger, des personnels du Crous de Grenoble font dormir les étudiants sur leur canapé, j'en connais qui dorment dans leur voiture ! Moi-même, je me suis retrouvé sans abri ! S'ils arrivent à se loger, des centaines de milliers d'étudiants, peut-être des millions, se nourrissent de pâtes et travaillent sur des feuilles de papier faute de pouvoir payer un ordinateur ! Mais qu'on se le dise, les bourses augmentent de 4 % et les APL de 3,5 % ! Et d'abord ils n'ont qu'à travailler ! Non, ce ton ne sera décidément pas agréable à vos oreilles. Cela fait des années que j'essaie de faire entendre la détresse étudiante. À vouloir revaloriser les bourses sans changer le système, on ne changera rien. La solidarité familiale écrase les classes populaires ; il faut en venir à la solidarité nationale.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS18 de M. Victor Catteau.

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L'amendement étend la taxation proposée par l'article 2 à toutes les sociétés dont le chiffre d'affaires est supérieur à 1 milliard d'euros. Pourquoi se restreindre à un seul secteur d'activité alors que de nombreuses entreprises telles que BNP Paribas, LVMH ou Hermès réalisent d'immenses superprofits ? Il est contraire à toute logique de ne pas soumettre toutes les sociétés aux mêmes réglementations. L'intérêt financier, pour l'État, serait évident car il pourrait accompagner plus avantageusement les étudiants.

Le 17 octobre, François Ruffin a voté cette mesure en séance publique. Je vous invite à en faire de même en commission des affaires sociales.

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Le gage que nous proposons permet de financer la mesure. Je débattrai avec plaisir des autres sources de financement possible, en cohérence avec nos choix politiques. Mais avis défavorable à cet instant.

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Le dispositif ayant été supprimé avec l'article 1er, il n'est peut-être pas indispensable de s'étendre sur son financement.

Monsieur le rapporteur, vous défendez une mesure collective. Je pense que lorsque des personnes sont dans le besoin, il faut les aider. Mais ce n'est pas le cas de tous les étudiants. Certains sont hébergés à titre gratuit et certains peuvent se nourrir chez leurs proches. Pourquoi leur verser une allocation ? Vous voulez créer un droit mais nous avons besoin d'un accompagnement au mérite, de manière à remettre l'ascenseur social en marche !

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Vous avez dit, monsieur le rapporteur, qu'aucun député n'avait fait la promotion de la solidarité familiale. Mais je l'ai faite en rappelant que le modèle français repose sur la solidarité conjugale, familiale et nationale. Si le système des bourses a été créé, c'est précisément pour que la solidarité nationale, lorsque les inégalités à la racine sont trop fortes, supplée la solidarité familiale. On peut admettre que le système est défaillant mais il est faux de dire qu'il n'y a pas de solidarité nationale.

Enfin, vous expliquez qu'on ne peut pas attendre la réforme des bourses, qui n'interviendra pas avant l'été prochain, et qu'il faut agir maintenant. Je comprends votre sentiment d'urgence. Mais chacun sait aussi que si votre texte était voté aujourd'hui, la navette parlementaire nous emmènerait beaucoup plus loin que l'été prochain.

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Monsieur Bazin, je n'ai pas obtenu l'allocation d'autonomie mais j'obtiendrai la taxe sur les superprofits – au moins dans cette commission ! Vous dites qu'il faut prendre en compte le fait que certains étudiants bénéficient d'un logement gratuit ou d'autres formes d'aides. Certes mais il est extrêmement difficile d'une part d'obtenir ces informations, et d'autre part de prendre des décisions sur leur base : les cas sont trop divers, certaines personnes peuvent mentir, les situations peuvent changer très vite. Par ailleurs, le principe de l'allocation d'autonomie, c'est que les parents n'ont pas à aider l'étudiant. Elle s'inscrit dans le programme de notre groupe qui prévoit aussi une réforme fiscale, de sorte que l'impôt des ménages aisés financera cette mesure pour les classes populaires. C'est en cela que l'allocation doit être collective.

La solidarité nationale existe, c'est vrai, mais toujours en fonction du niveau de solidarité familiale. Un boursier à l'échelon 0 bis touchera un peu plus de 100 euros par mois. Pour qu'il atteigne le seuil de pauvreté, ce qu'on souhaite à tout le monde, on attend donc de ses parents qu'ils lui donnent 1 000 euros : ce n'est pas possible ! S'il faut payer un loyer, l'étudiant devra travailler. Or, il est quasi impossible de faire par exemple une classe préparatoire ou des études de droit en travaillant. Certains ont réussi, c'est vrai. Mais on n'entend jamais la voix de ceux qui ont échoué.

S'agissant du délai et de la navette parlementaire, j'ai dû vous induire en erreur : la réforme des bourses n'interviendra pas l'été prochain, mais dans un an et demi. C'est ce que m'ont dit les syndicats auditionnés.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle rejette l'article 2.

La commission ayant rejeté tous les articles de la proposition de loi, l'ensemble de celle-ci est rejeté et l'amendement AS24 de M. Serge Muller, portant sur le titre, tombe.

La séance est levée à dix-sept heures quarante.

Présences en réunion

Présents. – M. Éric Alauzet, Mme Bénédicte Auzanot, M. Thibault Bazin, M. Christophe Bentz, Mme Fanta Berete, Mme Anne Bergantz, M. Louis Boyard, M. Elie Califer, M. Victor Catteau, M. Paul Christophe, M. Hadrien Clouet, M. Alexis Corbière, Mme Josiane Corneloup, Mme Laurence Cristol, M. Arthur Delaporte, M. Sébastien Delogu, M. Pierre Dharréville, M. Julien Dive, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Olivier Falorni, M. Marc Ferracci, Mme Caroline Fiat, Mme Marie-Charlotte Garin, M. François Gernigon, M. Jérôme Guedj, Mme Claire Guichard, Mme Servane Hugues, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, M. Philippe Juvin, Mme Fadila Khattabi, Mme Laure Lavalette, M. Didier Le Gac, Mme Christine Le Nabour, Mme Katiana Levavasseur, M. Matthieu Marchio, M. Didier Martin, Mme Joëlle Mélin, M. Thomas Mesnier, M. Yannick Monnet, M. Serge Muller, M. Yannick Neuder, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Astrid Panosyan-Bouvet, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, Mme Michèle Peyron, Mme Stéphanie Rist, M. Jean-François Rousset, M. Olivier Serva, M. Frédéric Valletoux, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier

Excusés. – M. Adrien Quatennens, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Sandrine Rousseau, Mme Prisca Thevenot

Assistaient également à la réunion. – Mme Émilie Bonnivard, M. Pierre Cordier, M. Fabien Di Filippo, M. Frédéric Falcon, M. Emmanuel Fernandes, Mme Justine Gruet, Mme Fatiha Keloua Hachi, Mme Mathilde Panot, M. François Piquemal