Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Réunion du jeudi 26 juillet 2018 à 16h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • arme
  • benalla
  • hiérarchique
  • observateur
  • préfet
  • Élysée

La réunion

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La réunion débute à 16 heures.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, Présidente.

La Commission auditionne M. Michel Delpuech, préfet de police, dans le cadre des travaux menés pour « faire la lumière sur les événements survenus à l'occasion de la manifestation parisienne du 1er mai 2018 » (article 5 ter de l'ordonnance 58-1100 du 17 novembre 1958).

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Mes chers collègues, nous sommes réunis pour faire la lumière sur les événements survenus à l'occasion de la manifestation parisienne du 1er mai 2018. Je vous rappelle que, pour ce faire, la commission des Lois est dotée des prérogatives d'une commission d'enquête, conformément à l'article 5 ter de l'ordonnance du 17 novembre 1958.

Pour la deuxième fois, nous allons procéder à l'audition de M. le préfet de police. Je vous engage, chers collègues, à être concis dans vos questions de façon que cette audition puisse se tenir dans l'heure qui vient, ce qui permettrait une reprise de la séance publique à dix-sept heures.

Monsieur le préfet, conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relatif aux commissions d'enquête, je vous demande de prêter le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité.

M. Michel Delpuech prête serment.

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Monsieur le préfet, souhaitez-vous faire une déclaration liminaire ?

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Michel Delpuech, préfet de police

Je pense que nous pouvons passer directement aux questions puisque j'avais fait une déclaration liminaire lors de ma précédente audition.

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Vous nous aviez indiqué lors de cette audition qu'à l'origine des événements qui nous occupent, il y avait une forme de « copinage malsain ». Pourriez-vous nous indiquer quelles personnes vous visiez par cette expression qui n'a rien de neutre ? Sur quoi reposait votre affirmation ?

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Michel Delpuech, préfet de police

Cette expression n'est pas neutre, en effet – j'observe d'ailleurs qu'elle a été reprise – et elle est au coeur des événements qui nous occupent, comme vous le dites. Si j'ai employé cette formule, c'est pour désigner un manquement individuel très grave, un défaut d'information de l'autorité hiérarchique, en l'occurrence du préfet de police que je suis, et une organisation de la présence d'un observateur dans des conditions non conformes à ce qu'elles devaient être.

Il y a eu trois fonctionnaires de police pour lesquels j'ai tenu à saisir dès le 19 juillet le procureur de la République – ils seront peut-être davantage à être mis en cause, je m'en remettrai bien sûr aux conclusions des enquêtes. J'ai demandé leur suspension immédiate, que le ministre de l'intérieur a acceptée sur-le-champ : elle leur a été notifiée le soir du 19 juillet. Ce qui l'a motivée, c'est le fait d'avoir transféré des images sur un support numérique pour les donner à M. Benalla dans la soirée du 18 juillet. Sur ces faits, une enquête judiciaire a été ouverte par le parquet de Paris. Sur les faits de violence place de la Contrescarpe, une autre enquête judiciaire a été ouverte.

Évidemment, je ne manquerai pas de tirer tous les enseignements de ces enquêtes sur le plan administratif quand cela sera possible. Qu'il s'agisse du manquement individuel grave ou des agissements inacceptables de certains fonctionnaires, la justice jugera s'il y a lieu ou non d'appliquer des sanctions.

Pour ce qui est des noms, je les ai déjà indiqués. Le manquement grave à l'origine de tout ce dont on parle est le comportement de M. Benalla place de la Contrescarpe – il faut toujours revenir l'essentiel. Dans le rapport que j'ai adressé à M. le procureur de la République, j'ai indiqué les noms des fonctionnaires de police qui ont communiqué les images à M. Benalla : il s'agit du contrôleur général Laurent Simonin, du commissaire Maxence Creusat et du commandant Jean-Yves Hunault.

À mesure que les investigations progresseront, verra-t-on apparaître d'autres connexions ? Je l'ignore. C'est l'enquête, encore une fois, qui permettra de le savoir.

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Ce copinage malsain entre M. Benalla et M. Simonin et peut-être les deux autres fonctionnaires de police que vous venez de citer, l'aviez-vous observé avant les faits ? M. Benalla avait-il noué ces relations avant même son embauche à l'Élysée durant la campagne électorale ?

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Michel Delpuech, préfet de police

Comme toujours, la réalité est plus complexe. Je l'ai déjà évoquée devant vous lundi.

La proximité professionnelle entre les équipes de la direction de l'ordre public et de la circulation et les équipes de l'Élysée qui organisent les déplacements et les activités du Président de la République sur la place parisienne et la petite couronne est évidemment nécessaire. Proximité et confiance doivent être au rendez-vous, je le répète. Les faits m'ont révélé qu'au-delà de cette proximité et de cette confiance, s'étaient développées des habitudes qui conduisaient à s'affranchir du respect des règles hiérarchiques et à créer un système de relations directes alors que les choses auraient dû être traitées à un niveau plus approprié. Il faut toujours veiller au respect des logiques institutionnelles, aux rôles des uns et des autres. Pour parler familièrement, être trop à tu et à toi n'a jamais été ma tasse de thé. J'ai lu récemment que l'on me qualifiait de « préfet aristocratique » bien que mon ascendance soit du côté de la vente de bestiaux, de la salaison et de l'épicerie, mais c'est ainsi.

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Aviez-vous déjà relevé des faits qui montraient que l'habitude avait été prise de s'affranchir de certaines règles ou la première illustration notable a-t-elle été ce qui s'est passé le 1er mai ?

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Michel Delpuech, préfet de police

Ce sont les événements du 1er mai qui ont permis de prendre des mesures fermes mais la sociologie, l'observation des relations humaines, on sait ce que c'est. Quand on est sur le terrain, on voit bien si on a affaire à une relation distanciée, respectueuse, d'institution à institution, qui prend en compte le niveau hiérarchique, ou bien à une relation faite de facilités, de tapes sur les épaules, de tutoiements. Je n'aime pas cela. Je l'ai observé au fil des jours et je fais un lien avec ce qui en a résulté : tomber dans la faute.

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Je tiens d'abord à préciser, monsieur le préfet de police, que je n'ai pas sollicité cette deuxième audition. La très grande clarté et la très grande précision des propos que vous avez tenus lundi ne rendaient pas nécessaire, de mon point de vue, de vous demander de consacrer deux ou trois heures de votre temps précieux aux travaux de notre commission.

Puisque vous êtes ici, monsieur le préfet, je ferai trois séries de remarques.

Premièrement, le fait que vous évoquiez à nouveau le rôle joué par MM. Simonin, Creusat et Hunault, doit nous conduire à entendre ces trois personnes ainsi que nous en étions convenus dès samedi dernier.

Deuxièmement, dans les mêmes termes que lundi dernier, vous êtes revenu sur la transmission indue d'images à M. Benalla. Nous avons appris cette nuit, ainsi que l'a confirmé l'Élysée, que M. Ismaël Emelien, conseiller spécial du Président de la République, a eu l'occasion de voir ces bandes de vidéo-surveillance que M. Benalla a obtenues indûment par l'intermédiaire de policiers. C'est la raison pour laquelle je demande très officiellement que notre commission procède à l'audition de M. Ismaël Emelien afin qu'il nous explique dans quel cadre juridique il a pu visionner ces images.

Troisièmement, j'aimerais revenir à la question du port d'arme. Lundi, vous nous avez expliqué que vous aviez eu une note du directeur du cabinet du Président de la République où il indiquait être favorable à la demande de port d'arme de M. Benalla et que vous assumiez entièrement la responsabilité qui est la vôtre de lui avoir accordé une autorisation. Je vous en donne acte. Je serais très heureux, si Mme la co-rapporteure en était d'accord, que notre commission obtienne officiellement une copie de cette note.

Il existe en effet un débat à ce propos, qui a été présenté de manière très claire par Philippe Bas, qui, je dois le dire, conduit les débats de la commission d'enquête du Sénat avec une rigueur et une qualité de raisonnement qui permettent de poser des questions. (Exclamations.)

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Je pense que M. Bas n'a pas affaire au même public !

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Madame la présidente, l'arrêté du préfet de police mentionne dans ses considérants que M. Benalla était « chargé d'une mission de police dans le cadre de son action de coordination de la sécurité de la présidence de la République ». Et comme l'une des grandes questions posées par les commissions d'enquête parlementaires porte sur le périmètre des missions qu'exerçait M. Benalla et leur articulation avec des fonctions qui doivent être exclusivement assumées par des agents de l'État, fonctionnaires de la police nationale, je pense que la note du directeur de cabinet nous sera utile pour déterminer si c'est l'Élysée qui a désigné les fonctions de M. Benalla en ces termes.

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La personne auditionnée aujourd'hui, ce n'est pas moi mais le préfet de police dont vous avez vous-même souligné que le temps était précieux. Nous n'allons pas le gâcher avec des petites bisbilles sur les documents que la commission souhaiterait se voir communiquer.

Je vais donc donner la parole à Mme Naïma Moutchou pour le groupe La République en marche.

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Les auditions que nous conduisons ne sont pas un jeu, madame la présidente. Ce matin, le secrétaire général de la présidence de la République a été convoqué par le Sénat. Respectueux du Parlement, il a déféré à cette convocation ainsi qu'il en avait le devoir, je veux le souligner. Nous avons nous aussi le devoir de le convoquer puisqu'à l'évidence, les faits dont nous sommes saisis requièrent son audition devant notre commission.

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Nous sommes là pour poser des questions aux personnes que nous auditionnons.

Madame Moutchou, vous avez la parole.

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M. le co-rapporteur a raison, tout cela est très sérieux et il faut éviter de s'ériger en procureur pour que nous puissions mener nos débats en toute sérénité.

Vous avez pointé, monsieur le préfet, des défaillances dans la chaîne hiérarchique de remontée des informations. Quelle sanction en interne avez-vous prise quand vous avez découvert que la présence de M. Benalla ne vous avait pas été rapportée ?

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Michel Delpuech, préfet de police

J'apporterai deux types de réponses, madame la députée.

D'abord, je tiens à dire que le fait d'accueillir le 1er mai M. Alexandre Benalla à la préfecture de police pour une mission d'observateur est, à mes yeux, tout à fait normal. L'a priori de la préfecture de police est toujours de dire oui aux demandes concernant les observateurs : nous sommes une maison ouverte et transparente, comme il se doit. Sa présence ne constituait donc pas une faute. Le défaut que j'ai pointé porte sur la remontée des informations. J'ai parlé, me semble-t-il, de « loyauté hiérarchique » : la venue de M. Benalla a été organisée par un contrôleur général qui avait deux niveaux au-dessus de lui au sein de la direction de l'ordre public et de la circulation, elle-même placée sous l'autorité du préfet de police. Ce n'était pas le niveau pertinent pour la circonstance, comme je l'ai indiqué. Les suites qui ont été données à cela vous ont été présentées lundi soir par le directeur de l'ordre public et de la circulation, M. Gibelin : il vous a dit avoir fait de sévères admonestations et il vous a expliqué que des admonestations à un contrôleur général chevronné, professionnel de qualité, n'étaient pas rien. Chacun se rappelle les conditions dans lesquelles j'ai pris connaissance des événements qui ont eu lieu. Je ne reprendrai pas le fil de ma déclaration liminaire de lundi.

En ce qui concerne le second volet de votre question, c'est-à-dire l'identification, au lendemain de la manifestation, de M. Benalla sur une vidéo circulant sur les réseaux sociaux, je redis que j'ai pris des initiatives en interne et en externe, puisque, je vous le rappelle, j'ai alerté le cabinet du ministre de l'intérieur, lequel était déjà informé.

Au terme de ces échanges, il m'est très vite apparu que c'était l'autorité d'emploi, l'autorité hiérarchique, qui prendrait les mesures nécessaires, ce qui a d'ailleurs été fait, libre ensuite à chacun d'apprécier si la sanction était proportionnée aux manquements, ce sur quoi je me garderai bien de me prononcer.

En ce qui concerne l'article 40 il a été également considéré que c'était l'autorité d'emploi, l'autorité hiérarchique, qui devait apprécier la pertinence d'y avoir recours en même temps qu'elle appréciait la gravité des faits et la sanction qu'ils appelaient.

Voilà comment les choses se sont passées, je crois l'avoir développé assez précisément lundi.

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Vous venez de nous dire que le fait que M. Benalla soit présent sur les lieux de la manifestation ne constituait pas une faute de la part de M. Simonin. Avant vous, M. Gibelin nous a affirmé qu'il n'y avait pas eu dysfonctionnement des services de police. J'en déduis que M. Benalla pouvait donc se croire légitimement autorisé à participer à cette manifestation du 1er mai en tant qu'observateur.

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

Je vais une nouvelle fois rappeler les faits, car l'association des phrases et des mots peut aboutir à dévoyer les propos initiaux. J'ai indiqué que le fait d'accueillir à la préfecture de police des observateurs n'est pas du tout anormal ni même critiquable à mes yeux, bien au contraire. J'ai, par exemple, reçu, mardi, une sollicitation de la part d'un chef d'entreprise qui dirige un petit cabinet de conseil sur les questions de sécurité, notamment de sécurité civile. Il s'agit d'une personne qui a un parcours universitaire intéressant et qui est déjà venu dans nos services. Il souhaite assister en tant qu'observateur au service d'ordre de l'arrivée du Tour de France, dimanche prochain. J'ai étudié sa demande et lui ai apporté une réponse positive : il sera donc là dimanche, accompagné d'un commissaire de police. Tout cela pour vous dire que, lorsque les choses passent par le bon canal, je n'ai rien à y redire.

Dans l'affaire qui nous intéresse, ce n'est pas la présence d'un observateur qui est en cause mais le comportement de cet observateur et le fait que son déplacement ait été organisé – je l'ai dit lundi et ne prétendrai pas le contraire aujourd'hui – dans des conditions et à un niveau hiérarchique non pertinents. Je ne peux que le répéter, c'est le comportement de l'observateur qui est à l'origine des difficultés et des faits que l'autorité judiciaire aura à qualifier.

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Monsieur le préfet, lorsque vous êtes venu il y a deux jours, vous nous avez indiqué qu'il serait bon de réformer les modalités d'accueil des observateurs sur des opérations de police. Vous nous avez par ailleurs indiqué que vous aviez adopté, le 4 juin dernier, une circulaire reprécisant ces modalités. Pourriez-vous nous communiquer les éléments nouveaux qu'apporte cette circulaire ainsi que les rappels auxquels elle procède ?

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

La circulaire dont j'ai parlé ne porte pas sur les modalités d'accueil mais sur la vidéoprotection – je la tiens à votre disposition. Je rappelle également qu'en matière de vidéoprotection, j'ai limité l'accès aux images aux territoires concernés. À mon arrivée à la préfecture de police, on pouvait en effet accéder à toutes les images à partir de n'importe quel point de la plaque parisienne relevant des compétences du préfet de police, ce qui nous a valu quelques petits soucis, pour lesquels j'ai d'ailleurs dû saisir l'IGPN, comme en juin 2017, lorsqu'un de nos fonctionnaires de police a reçu un coup de marteau sur le parvis de Notre-Dame, agressé par un individu radicalisé : les images de l'agression qui ont circulé sur tous les écrans de télévision avaient été récupérées depuis un commissariat assez éloigné des lieux de l'attaque.

En ce qui concerne l'accueil d'observateurs, la préfecture de police est très régulièrement sollicitée, et notre position de principe est d'accepter, dans une logique d'ouverture. Les publics concernés sont essentiellement au nombre de trois. Un premier groupe se compose d'observateurs dont les demandes s'inscrivent dans le cadre de la formation, ce qui inclut des publics scolaires et étudiants : depuis le début de l'année 2018, nous avons ainsi accueilli sept cents personnes. Dans cette catégorie en formation entrent également les auditeurs de justice, les stagiaires de l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice, des policiers et auditeurs étrangers, des cadres de santé, des policiers municipaux, beaucoup d'élèves de grandes écoles – Polytechniques, les IRA, l'ENA, ou Sciences-Po Paris, dans le cadre notamment de la cellule Synapse.

La seconde catégorie d'observateurs est composée de spécialistes de l'information, en particulier de journalistes qui souhaitent pouvoir observer en immersion le fonctionnement des services de police. Ces demandes sont traitées par mon cabinet et le service de communication : depuis le début de l'année, plus de soixante délégations de presse ont ainsi été admises au contact de ces services.

La troisième catégorie enfin se compose, dans le cadre des liens entre police et population, de nos interlocuteurs institutionnels, souvent des élus, parlementaires, maires d'arrondissement ou de communes de la petite couronne qui, par exemple, veulent observer le fonctionnement de la BAC. Ne sont pas incluses dans ces catégories les visites institutionnelles comme celle du Défenseur des droits ou celles que vous êtes à tout moment autorisés à effectuer dans les centres de rétention administrative.

En ce qui concerne les activités auxquelles participent les observateurs, on peut distinguer de manière assez simple d'abord l'observation classique au sein des locaux, qui permet d'étudier l'organisation des services. Cela peut se faire y compris dans notre salle d'information et de commandement, où il est très enrichissant d'assister à la gestion d'une importante manifestation et d'un gros service d'ordre, comme celui du 14 juillet ou celui mis en place à l'occasion du retour de l'équipe de France de football.

Évidemment nous n'accueillons de public que dans les locaux accessibles, et non dans les locaux protégés par l'instruction générale 1 300 sur la protection du secret de la défense, où personne n'est jamais accueilli.

Les observateurs peuvent ensuite accompagner des patrouilles, des brigades –notamment les BAC – ou des services d'ordre sur la voie publique.

J'en terminerai par le cadre juridique. Actuellement, toutes les observations qui s'inscrivent dans une logique de formation sont encadrées par des conventions. Cela concerne les publics scolaires, pour lesquels il existe même une assurance couvrant les collégiens et les lycéens, mais également les structures de formation qui nous envoient des observateurs. Ces conventions sont gérées par la direction des ressources humaines de la préfecture de police, y compris pour les stagiaires individuels. À titre d'ordre de grandeur, en 2017, 1 123 stagiaires ont ainsi été accueillis dans le cadre d'une convention, ce qui est assez important.

Pour ce qui concerne la presse et les journalistes, nous avons récemment mis en place, sur proposition de mon service de communication, la signature de conventions avec les journalistes, afin de bien définir ce qu'ils sont ou non autorisés à faire. Cela répond notamment à une décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation ayant annulé une procédure au motif que l'interpellation et l'intervention s'étaient faites en présence de journalistes, et qui avait été suivie d'une jurisprudence du Conseil constitutionnel.

Quant à la troisième catégorie d'observateurs, c'est pour elle que le cadre juridique mériterait d'être défini avec plus de rigueur, je suis le premier à le dire. En premier lieu, les autorisations doivent être délivrées à un niveau pertinent, ce qui ne signifie pas que le préfet soit systématiquement saisi. Si le maire de Clamart, par exemple, souhaite accompagner les services de la Direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP), la logique voudra qu'il s'adresse au commissaire de l'endroit, qui va apprécier l'opportunité de la demande et en référer à sa hiérarchie, laquelle en réfèrera à son tour au préfet s'il existe une sensibilité particulière liée à la situation ou à la personne qui fait la demande.

Je souhaite que l'épisode que nous traversons nous incite à engager des réflexions sur les enjeux juridiques qui peuvent surgir et, de ce point de vue, la mission que le ministre d'État a confiée à l'IGPN sera extrêmement intéressante.

Je ne pense pas qu'on puisse donner à ces personnes le statut de collaborateur bénévole du service public, parce que, par construction, ils sont observateurs et non associés à l'exécution du service public. Nous devons donc nous interroger sur leur couverture, le cadre dans lequel l'État assure les risques qu'ils prennent et couvre les dommages qu'ils peuvent créer.

Prenons l'exemple d'un haut fonctionnaire en observation, victime d'un accident dans un véhicule d'intervention : il est indispensable que son statut juridique soit précisé, a fortiori si l'accident a emporté des conséquences graves.

J'ai été un peu long, mais il m'a semblé important de vous préciser quelles étaient les évolutions que j'entendais amorcer vers davantage de rigueur juridique.

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Dois-je déduire de vos propos que vous considérez que la qualification juridique des personnes et des faits est beaucoup moins claire pour la troisième catégorie d'observateurs que pour les deux premières ?

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

Sur cette question, je souhaite que la mission que le ministre d'État a confiée à l'Inspection générale de la police nationale nous aide à progresser.

L'objectif est de mieux cadrer les autorisations données et leur formalisation – j'ai dit ce que je pensais du niveau auquel avait été organisée l'observation du 1er mai. Il s'agit ensuite de mettre fin au flou juridique qui entoure à l'heure actuelle ces procédures. Je ne suis pas un expert en droit public mais, je le répète, le statut de collaborateur bénévole du service public ne me paraît pas ici la bonne voie. Il n'empêche que nous devons préciser les choses, et je ne doute pas que les travaux des parlementaires nous y aideront.

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J'invite mes collègues à relire l'arrêt « Commune de Batz-sur-mer » du Conseil d'État.

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

Un arrêt de 1959, si mes souvenirs sont bons.

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Monsieur le préfet, au nom du groupe Les Républicains, je tiens à vous réaffirmer la totale confiance que nous avons dans la préfecture de police de Paris, en vous-même, en vos services et en l'ensemble des fonctionnaires de police qui assurent la sécurité de nos concitoyens dans toutes les circonstances – et nous savons qu'elles ont été particulièrement difficiles ces derniers temps, du fait des attentats qui ont ensanglanté notre pays.

Nous ne comprenons pas que vous soyez de nouveau ici, puisque, lors de votre première audition, vous avez été extrêmement précis dans les réponses à toutes les questions qui vous ont été posées. Vous avez été clair et n'avez jamais était pris en flagrant délit de contradiction avec les faits où d'autres déclarations qui auraient été tenues. Nous nous étonnons donc que l'on vous fasse ainsi perdre un temps précieux, qui serait mieux utilisé aux tâches importantes qui vous incombent.

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Posez votre question au lieu de faire de la politique !

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La parole est libre à l'Assemblée nationale !

À moins que cette nouvelle convocation n'ait pour objet, comme nous le comprenons, de détourner l'attention vers la préfecture de police de Paris et vos services, à qui on veut imputer des responsabilités dont pourraient être comptables des services de l'Élysée qu'on nous empêche d'auditionner : je ne vois pas pourquoi, en effet, nous ne pourrions pas, à l'instar du Sénat, auditionner au minimum le secrétaire général de l'Élysée et le porte-parole du président de la République.

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Nous avons bien compris. Mais la répétition ne fait pas forcément l'intérêt des propositions !

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Monsieur le préfet, nous avons apprécié les réponses que vous avez apportées aujourd'hui et lors de votre première audition.

Cela étant vous avez évoqué un dysfonctionnement dans la prise de décision, une erreur d'échelon en particulier : avez-vous eu l'occasion, dans d'autres circonstances et pour d'autres événements, de constater un tel manque de coordination, qui vous aurait conduit à condamner ce type de comportement et à prendre des sanctions ? Nous ne parvenons pas, pour notre part à comprendre comment nous en sommes arrivés là et pourquoi il a fallu attendre que la presse se saisisse de cette affaire, alors que les faits remontent au 1er mai.

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

De mon point de vue, il ne s'agit pas d'un problème de coordination mais de ligne hiérarchique. Toute institution d'une certaine taille, surtout dans des domaines aussi sensibles que ceux de la police, doit, pour que tout fonctionne bien, s'organiser clairement selon une ligne hiérarchique déterminée, comme sont d'ailleurs organisés les trois corps de police.

Lorsqu'un manquement se constate dans la ligne hiérarchique, on en voit les conséquences : si la demande de M. Benalla avait été adressée par le directeur du cabinet du chef de l'État, qui est mon interlocuteur à l'Élysée, directement au préfet de police, elle aurait naturellement été traitée autrement, et le chaînage hiérarchique aurait fonctionné dans de bonnes conditions. Ce respect rigoureux de la procédure hiérarchique est pour moi essentiel.

La coordination n'est pas ici en cause, d'autant que la préfecture de police a, de ce point de vue, l'avantage de présenter un système intégré, avec différentes directions qui ont chacune un métier – le renseignement, l'ordre public, la sécurité du quotidien l'investigation judiciaire et le soutien logistique – réunies sous une autorité unique, ce qui facilite précisément la coordination, même si tout n'est pas parfait.

Quant à savoir si j'ai déjà eu, en ma qualité de préfet, à constater une telle séquence de faits, je n'en n'ai pas le souvenir.

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Au nombre de toutes les prérogatives qui conféraient à M. Benalla un incontestable pouvoir figurait l'autorisation de port d'arme. Nous nous interrogeons non seulement sur la nécessité de ce port d'arme mais également sur le fait qu'il a été délivré sans l'arrêté ministériel nécessaire : y a-t-il eu des pressions en ce sens ?

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

Il me semble que je suis déjà intervenu sur ce sujet, mais je vais refaire un peu de pédagogie.

En matière de port d'arme, le principe est évidemment l'interdiction. Il y a ensuite deux catégories de ports d'arme.

Celle d'abord qui concerne « toute personne exposée à des risques exceptionnels d'atteinte à sa vie » et qui est de la compétence du ministre de l'intérieur et de lui seul, après instruction par les services centraux, qui évaluent notamment la menace et le risque. De ce point de vue – je l'avais indiqué –, je ne suis pas surpris du fait que la demande déposée par M. Benalla au printemps 2017 ait été rejetée, les services ministériels ayant considéré qu'il n'était pas une personne exposée à des risques exceptionnels d'atteinte à sa vie.

Le second régime juridique concerne les agents publics exposés par leurs fonctions à des risques d'agression. Il relève de la compétence du préfet de police et des préfets de département. Ce qui est pris en compte dans ces cas-là, ce n'est pas la personne intuitu personæ mais sa fonction. C'est à cette catégorie qu'appartient le port d'arme que j'ai délivré pour M. Benalla.

Comme je vous l'ai expliqué, s'il y a eu un petit hiatus dans la procédure c'est que la demande m'a été transmise par le directeur de cabinet du Président de la République, avec avis favorable, « dans le strict respect des textes ». Or cette dernière mention recouvre entre autres le fait qu'un décret en Conseil d'État renvoie à un arrêté ministériel pour définir les catégories de services justifiant le port d'arme. Or – c'est une sorte d'impossibilité juridique – un arrêté ministériel ne pourra jamais intégrer un service de l'Élysée dans une catégorie de services.

Je me suis donc fondé sur la matérialité des faits, la réalité de la mission telle qu'elle m'a été présentée et certains documents afférents, comme cette note signée par un fonctionnaire du Groupe de sécurité de la Présidence de la République indiquant que M. Benalla, chargé de mission au cabinet de M. le président de la République, participait de façon régulière, dans le cadre de la coordination des services de sécurité, aux séances de tirs. Par ailleurs, ont également été vérifiés le B2 du casier judiciaire, le fichier de traitement d'antécédents judiciaires et les autorisations de détention d'armes.

Je vous invite à vous replacer dans le contexte du mois d'octobre : j'ai beau chercher, ne figurait dans mon dossier aucune note annonçant ce que pourrait être le comportement de M. Benalla le 1er mai 2018, et ce n'est pas avec notre niveau de connaissance d'aujourd'hui que le dossier a été instruit et la décision prise.

J'observe d'ailleurs que, ces derniers jours, les autorités d'emploi de M. Benalla ont souligné son engagement, sa disponibilité et la qualité de sa collaboration – je l'ai entendu de trois sources au moins, et non des moindres.

Je redis encore une fois enfin que je n'ai subi aucune pression. J'ai pris cette décision pour combler un hiatus juridique. Au regard de ce que dit la loi, il m'a semblé que je pouvais le faire, je l'assume. Je rappelle par ailleurs que cette autorisation ne valait que dans l'exercice des fonctions remplies par M. Benalla. Cela signifie, d'une part, que, si l'enquête judiciaire fait apparaître que ce dernier portait une arme le 1er mai, il n'en n'avait pas le droit et, d'autre part, que cette autorisation a été abrogée dès lors qu'il a été mis fin auxdites fonctions.

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Monsieur le préfet, merci pour la clarté de vos explications, comme lors de la première audition. Nous avons bien compris que M. Benalla pouvait être présent en tant qu'observateur, mais pas en tant qu'acteur. Mais, il est passé du rôle d'observateur à celui d'acteur, car celui dont beaucoup disent qu'il était efficace dans ses fonctions voulait faire de la sécurité. Voilà la réalité. Je dis cela s'agissant des sanctions que vous avez prononcées à l'encontre des fonctionnaires. Ces hommes étaient face à quelqu'un qui venait du « Château » et qui traitait de questions de sécurité. C'est pour cela qu'ils avaient tendance à répondre positivement à ses demandes. Après coup, tout est beaucoup plus clair, mais avant coup, cela pouvait paraître normal.

Il avait un brassard, une arme, une voiture avec un gyrophare de la police, l'insigne du GSPR – on le voit à plusieurs reprises avec cet insigne qu'il ne devrait pas avoir. Est-ce que tous ces indices ne pouvaient pas appeler l'attention ? Confusion entre la fonction réelle de M. Benalla – encadrement, équipement, bagages – et les fonctions d'officier de sécurité réservées à la police, au GSPR.

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

Le fait qu'un collaborateur du chef de l'État engagé sur les déplacements, qui est dans la bulle rapprochée, ait le désir d'observer le déroulement d'une journée au cours de laquelle un service d'ordre important se met en place n'est pas condamnable en soi. Toute la difficulté tient au fait de basculer d'un rôle d'observateur à un rôle d'acteur.

S'agissant des équipements, la règle est de fournir les équipements de protection, en l'occurrence, un casque. Peut-être ferons-nous la recommandation de fournir un casque bien distinct de ceux de la police : un casque blanc, ou le port de chasubles et des moyens de protection. Mais en aucun cas il ne faut fournir d'autres éléments. Si l'enquête révèle que d'autres éléments ont été mis à disposition de l'intéressé, il faudra savoir où et comment il se les est procurés, ou qui lui a procuré. Et je vous dis les choses avec la plus grande honnêteté : si ce sont des collaborateurs alors placés sous l'autorité du préfet de police, je prendrai mes responsabilités dans le cadre disciplinaire. Si c'est ailleurs – le GSPR n'est pas du ressort de la police – nous verrons. Mais laissons l'enquête judiciaire établir ces éléments. Ce que je peux garantir, ce sont les conclusions que j'en tirerai si nous sommes sur le terrain du droit disciplinaire.

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Nous avons reçu M. Gibelin tout à l'heure, et il a confirmé que les seules autorités à même d'autoriser M. Benalla à être sur place le 1er mai étaient vous-même, et lui. Nous avons noté que ni l'un ni l'autre d'entre vous ne l'avait fait. C'est M. Simonin qui lui a donné ces autorisations, et qui a ensuite organisé sa journée et certainement sa présence le soir à la DOCP, qui vous avait étonnée. Nous retrouvons M. Simonin ensuite, à propos des images données à M. Benalla.

Pensez-vous que ce que vous appelez un « copinage malsain » peut à lui seul expliquer qu'un fonctionnaire à un tel niveau de responsabilité décide de faire fi de règles, et même de la loi s'agissant des vidéos ? Vous semble-t-il plausible que cela suffise ?

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

Seul M. Simonin peut répondre à cette question. J'ai fait le constat et je l'ai décrit dans les termes que j'ai confirmés. Le circuit de décision n'était pas le bon, il fallait une double validation : la validation interne que M. Benalla a obtenue, et la validation de la préfecture de police, mais pas au niveau qui a été sollicité, au moins au niveau du directeur. Et connaissant le directeur, il m'en aurait évidemment rendu compte.

Je l'ai indiqué, je le souligne de nouveau. Après, quelles sont les motivations profondes ? Sonder les coeurs, sonder les reins, je ne sais pas faire. La nature humaine est toujours compliquée et je n'ai pas d'éléments précis à part cette formule générique que j'ai employée. Il est normal de se voir régulièrement, de travailler ensemble, mais il faut que chacun reste dans son rôle et à sa place.

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Je remarque que malheureusement, pour l'instant, nous ne pouvons pas parler à M. Simonin pour savoir s'il n'y avait pas d'autres raisons, par exemple une autorité encore plus haute qui l'aurait décidé à s'affranchir de la loi et des règles. En vous écoutant et après avoir entendu M. Gibelin, j'ai l'impression que l'on nous oriente depuis quelques jours sur des boucs émissaires, qui sont à chaque fois dans les services de l'État. Hier, M. Larrivé a donné un ultimatum de vingt-quatre heures à Mme la présidente pour savoir si nous pouvions interroger d'autres personnes, notamment MM. Simonin et Benalla. Nous aurions également souhaité interroger M. Macron.

Pour l'instant, sauf erreur de ma part, nous n'avons pas eu de réponse. Je considère que nous faire tourner ainsi en rond est une action de sabotage, je le dis très clairement, et d'obstruction. Madame la présidente, j'estime qu'au regard de ce qui se fait au Sénat…

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…vous devriez en tirer les conclusions en termes de démission. Pour notre part, nous suspendons notre présence ici. J'ai entendu M. le préfet et M. Gibelin. Nous reviendrons quand vous accepterez la liste des auditions qui vous a été soumise…

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Monsieur Peu, vous avez la parole pour poser une question au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. (M. Éric Coquerel continue de s'exprimer).

Monsieur Coquerel, vous n'êtes pas membre de la commission des Lois, et vous n'avez plus la parole.

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J'ai eu l'occasion de dire à M. Gibelin à quel point l'interview de M. Benalla dans Le Monde d'aujourd'hui et les déclarations de la majorité parlementaire qui jettent l'opprobre sur l'institution policière ne me paraissent pas dignes ni responsables, je ne le répèterai donc pas.

Considérant que dans cette affaire, votre première audition était, pour moi comme pour beaucoup de collègues, tout à fait satisfaisante, je pense que cette seconde audition répond au souci, non pas de faire éclater la vérité, mais plutôt de pointer les responsables avant même que nous n'ayons conclu nos travaux. Donc je n'ai pas de question particulière à vous poser.

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Merci, monsieur le préfet, de revenir devant notre commission. M. Gibelin, qui vous précédait, rappelait qu'à la fin de sa sanction, M. Benalla avait participé à nouveau à des réunions préparatrices de déplacements présidentiels. De ce fait, des consignes de prudence ont-elles été transmises, par votre cabinet ou d'autres services de la préfecture de police, sur les rapports à avoir avec un individu qui avait gravement fauté dans les semaines qui ont précédé ?

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

Comme je l'ai déjà dit, je ne choisis pas mes interlocuteurs. J'ajoute, car j'ai entendu des choses variées sur ce point, et j'aurais pu le mentionner lorsque j'évoquais la situation au mois d'octobre 2017, que je n'ai eu aucune remontée, à mon niveau, d'incidents ou de difficultés qui se seraient produites sur le territoire placé sous mon autorité. M. Gibelin a souligné différentes manifestations : l'accueil des cendres de Mme Simone Veil au Panthéon, la cérémonie du 14 juillet et le retour de l'équipe de France championne du monde. À ma connaissance, il n'y a eu aucun incident lors de ces événements. Le préfet délégué m'a reporté des mots que je condamne, compte tenu de mon caractère aristocratique, mais ils ne mettent pas en péril l'efficacité du service public ni la logique de commandement. Comme je l'ai indiqué, la manoeuvre a été totalement commandée depuis la salle d'information et de commandement pour le retour de l'équipe, et fait exceptionnel, je m'y trouvais personnellement compte tenu de la sensibilité de la présence de 300 000 personnes derrière ce barriérage, dans une configuration qui n'avait jamais été faite.

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Je vous remercie, monsieur le préfet, de nous avoir à nouveau consacré du temps et d'avoir répondu à nos questions. Je précise que lors de la réunion du bureau de la commission hier, tous les groupes s'étaient accordés pour dire qu'ils ne voyaient pas d'inconvénients, et qu'ils voyaient même une certaine utilité, à procéder aux deux auditions de cet après-midi. Je tenais à le rappeler, loin des postures de certains.

Je raccompagne M. le préfet. Puis monsieur le co-rapporteur souhaite faire une déclaration pour clôturer cette séance.

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Michel Delpuech, préfet de police de Paris

Merci pour les témoignages adressés aux forces de l'ordre.

Mme la présidente raccompagne M. Michel Delpuech, préfet de police, hors de la salle de la commission.

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Les travaux de notre commission ont commencé il y a cinq jours. Un certain nombre d'auditions se sont tenues et elles ont été utiles, mais je constate que ces travaux se déroulent dans des conditions qui ne paraissent pas conformes à l'exigence de manifestation de la vérité.

Après avoir beaucoup échangé ces dernières heures avec les députés des différents groupes d'opposition et avec les députés non inscrits, je persiste à exprimer trois exigences à votre endroit, madame la présidente.

D'abord, il est essentiel d'obtenir l'audition des personnes dont la liste a été communiquée à la commission par mes soins, ainsi que par les différents députés membres de notre commission. Les déclarations contradictoires de plusieurs personnes auditionnées à l'Assemblée et les nouvelles informations rendues publiques imposent impérativement que se tiennent toutes les auditions que les uns et les autres ont demandées avec pour seule préoccupation de faire émerger la vérité.

La deuxième exigence consiste à souhaiter qu'un calendrier précis de nos auditions permette d'organiser nos travaux de manière sérieuse et rationnelle.

La troisième consiste à souhaiter qu'au titre de nos pouvoirs d'investigation, nous obtenions la communication par l'Élysée et le ministère de l'intérieur des pièces indispensables à la compréhension de la chaîne de responsabilité. Je pense en particulier à tout document venant de l'Élysée relatif à la rémunération, au contrat, à l'appartement, aux mesures de suspension etou de sanctions dont a fait l'objet M. Benalla. Aux mêmes documents de l'Élysée relatifs à la situation de M. Crase. Je pense évidemment à l'arrêté du préfet de police relatif au port d'arme de M. Benalla ainsi qu'à la note du directeur de cabinet de l'Élysée demandant au préfet de police d'attribuer ce port d'arme au motif d'une définition des fonctions de M. Benalla. Ces documents sont évidemment indispensables pour avoir la possibilité de rédiger un rapport rationnel, fondé sur des éléments de fait.

Il est également indispensable, comme nous l'avons bien vu cet après-midi, que les procès-verbaux des réunions auxquelles M. Benalla a participé, le cas échéant, entre le 2 mai et le 19 juillet, à l'Élysée, soient communiqués à notre commission. Nous nous en sommes expliqués hier en bureau, dans une réunion spécialement consacrée à notre ordre du jour et à nos méthodes de travail.

Je constate, pour le déplorer, que la co-rapporteure, que je respecte par ailleurs - il ne s'agit pas de mise en cause personnelle - avec le soutien des seuls députés du groupe La République en Marche, que je distingue des députés du MODEM, dont j'ai constaté hier qu'ils se ralliaient à ma proposition d'entendre le secrétaire général de la présidence de la République, Alexis Kohler…

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Ce n'est pas vraiment ce que nous avons dit !

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Je constate donc que la co-rapporteure, avec le seul soutien des députés LaREM, rejette ces demandes. Je pose la question : « Est-ce que l'Élysée souhaite torpiller les travaux de notre commission ? » Je le crois, je le crains. Je pense qu'instruction a été donnée aux députés du groupe La République en Marche de bâcler la préparation d'un vrai-faux rapport. (Protestations).

Je le regrette vivement. J'appelle une nouvelle fois la co-rapporteure et les députés du groupe La République en Marche à cesser de bloquer les travaux de la commission d'enquête dont les pouvoirs expirent – vous l'avez décidé – le 20 août. Il en va de la dignité de l'Assemblée nationale, qui ne saurait être aux ordres de l'Élysée.

Aussi, tant que la commission d'enquête n'aura pas retrouvé un mode de fonctionnement permettant la manifestation de la vérité, je suis contraint de suspendre ma participation à ce qui n'est devenu, hélas, qu'une parodie. (Applaudissements des députés du groupe Les Républicains, ainsi que de Mme Marine Le Pen, Mme Marie-France Lorho, Mme Emmanuelle Ménard, M. Ludovic Pajot et M. Stéphane Peu.)

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Je vais faire une courte réponse à mon co-rapporteur et nous lèverons la séance. Nous n'allons pas refaire le débat qui a eu lieu hier en réunion de bureau ou en commission.

Le fait que la commission des Lois se soit saisie des pouvoirs de commission d'enquête est unique dans la méthode, dans la rapidité et dans l'efficacité.

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Je répète que si la majorité ne l'avait pas souhaitée, cette commission n'aurait pas eu lieu : c'est indéniable.

En une semaine, nous avons procédé à un nombre d'auditions impressionnant. Nous n'avons pas relâché nos efforts pour permettre la manifestation de la vérité.

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Il ne faut pas que ce soit cosmétique !

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J'ai toujours indiqué que la méthode qui serait la nôtre consisterait à procéder pas à pas, et de ne pas considérer qu'il y avait des responsabilités préétablies qui justifieraient la longue liste d'auditions qu'a demandée mon co-rapporteur. Je l'ai même entendu hier faire une déclaration stupéfiante en indiquant qu'il souscrivait aux demandes d'auditions de tous les groupes, quelles qu'elles soient,…

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… sans en apprécier l'opportunité par rapport aux travaux que nous menons, par rapport à leur champ.

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Et les sénateurs, que font-ils ? (Exclamations.)

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Je constate que la sérénité nécessaire pour avoir des débats constructifs ne règne pas dans cette commission.

Exclamations de M. Meyer Habib.

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Je trouve que vous êtes extrêmement incorrect de me couper la parole. Je préside cette commission, dont vous n'en êtes pas membre, depuis plus d'un an. La moindre des choses est de me laisser terminer mon propos. Juste par respect pour notre institution.

Concernant les auditions dont M. Larrivé persiste à demander la tenue, je rappelle que nous en avons débattu hier, et que nous avons voté. Je demande à chacun d'entre vous de respecter nos institutions et la démocratie, c'est-à-dire le vote qui a eu lieu hier dans cette même salle.

Le calendrier correspond à ce vote : nous nous étions mis d'accord sur trois auditions, nous en avons effectué deux cet après-midi, la prochaine se tiendra demain tel que cela vous a été indiqué dans une convocation que les membres de la commission des Lois ont reçue.

Enfin, s'agissant des pièces dont M. Larrivé demande la communication, je n'ai reçu à cette heure aucune liste exhaustive de sa part. Donc, pour le moment, j'estime ne pas avoir été saisie de cette demande.

Je m'insurge et j'ai été extrêmement choquée par les propos qui indiqueraient que nous serions aux ordres de la présidence de la République.

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Plusieurs député LaREM

C'est scandaleux !

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Nous sommes une assemblée parlementaire qui remplit ses missions de contrôle, et je crois que cela a été salué par tous.

La réunion s'achève à 17 heures 10.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Caroline Abadie, Mme Laetitia Avia, M. Erwan Balanant, M. Ugo Bernalicis, M. Florent Boudié, Mme Yaël Braun-Pivet, Mme Émilie Chalas, M. Éric Ciotti, Mme Coralie Dubost, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Jean-François Eliaou, Mme Élise Fajgeles, M. Jean-Michel Fauvergue, Mme Isabelle Florennes, M. Raphaël Gauvain, Mme Marie Guévenoux, M. Sacha Houlié, M. Sébastien Huyghe, Mme Élodie Jacquier-Laforge, M. Mansour Kamardine, Mme Catherine Kamowski, Mme Marietta Karamanli, M. Guillaume Larrivé, M. Philippe Latombe, Mme Marie-France Lorho, Mme Alexandra Louis, M. Stéphane Mazars, M. Jean-Michel Mis, Mme Naïma Moutchou, M. Didier Paris, M. Stéphane Peu, M. Bruno Questel, M. Rémy Rebeyrotte, M. Thomas Rudigoz, M. Pacôme Rupin, M. Jean Terlier, Mme Alice Thourot, M. Alain Tourret, Mme Laurence Vichnievsky, Mme Hélène Zannier, M. Michel Zumkeller

Excusés. - Mme Huguette Bello, M. Richard Ferrand, M. Marc Fesneau, Mme Paula Forteza, M. Jean-Christophe Lagarde, Mme Maina Sage, M. Arnaud Viala, M. Guillaume Vuilletet

Assistaient également à la réunion. - M. Gabriel Attal, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Valérie Beauvais, M. Lionel Causse, M. Jean-Michel Clément, M. Éric Coquerel, M. Fabien Di Filippo, M. Pierre-Henri Dumont, Mme Catherine Fabre, M. Meyer Habib, M. Gilles Le Gendre, Mme Marine Le Pen, M. Jean François Mbaye, Mme Emmanuelle Ménard, M. Ludovic Pajot, M. Adrien Quatennens, M. Boris Vallaud