Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 14 février 2024 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La commission des affaires économiques s'est réunie, à huis clos, sous la présidence de la doyenne des vice-présidents, Mme Marie-Noëlle Battistel, afin de procéder à l'élection d'un nouveau Président de la commission à la suite de la démission de M. Guillaume Kasbarian, nommé ministre délégué au logement.

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Conformément à l'usage, j'invite les deux plus jeunes commissaires présents à venir à la tribune pour y remplir les fonctions de secrétaires d'âge. Selon les renseignements qui m'ont été donnés, ce sont Mme Anaïs Sabatini et M. Bastien Marchive. Le Bureau d'âge de la commission étant ainsi constitué, l'ordre du jour appelle maintenant la nomination du Président de la commission. Je rappelle les dispositions des alinéas 4 et 5 de l'article 39 du Règlement : « Les bureaux des commissions sont élus au scrutin secret par catégorie de fonction. Lorsque, pour chaque catégorie de fonction, le nombre des candidats n'est pas supérieur au nombre de sièges à pourvoir, il n'est pas procédé au scrutin. Si la majorité absolue n'a pas été acquise aux deux premiers tours de scrutin, la majorité relative suffit au troisième tour, et en cas d'égalité de suffrages, le plus âgé est nommé ». En outre, l'article 13, 1°, alinéa 4, de l'Instruction générale du Bureau précise que « les délégations du droit de vote ne peuvent avoir effet pour un scrutin secret ». Lors de chaque scrutin, Mmes et MM. les commissaires voudront bien, à l'appel de leur nom, déposer leurs bulletins dans l'urne.

Nous allons donc procéder à l'élection du Président. Je suis saisi d'une seule candidature, celle de M. Stéphane Travert (RE). Il n'y a donc pas lieu de procéder à un scrutin. En conséquence, M. Stéphane Travert est élu Président de la commission. J'invite M. Stéphane Travert, Président de la commission, à prendre place au fauteuil.

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Mes chers collègues, je vous remercie de la confiance que vous venez de me témoigner en m'élisant à la présidence de la commission des affaires économiques. En prenant cette fonction qui m'honore et qui m'oblige, je tiens à saluer le travail et l'action de Guillaume Kasbarian, qui a incarné cette commission pendant dix-huit mois. Je salue également Roland Lescure, aujourd'hui ministre de l'économie, qui le précéda dans ces fonctions. J'ai également une pensée pour mon ami François Brottes, qui les assuma entre 2012 et 2015 et dont l'exemple m'inspire chaque jour. Nous avons beaucoup travaillé ensemble au sein de cette commission et lui avons donné de riches heures.

Je ferai vivre ici le débat – un débat de fond, respectueux des identités et des sensibilités de chacun. Tous pourront s'exprimer, porter un point de vue ou considérer et reconsidérer une proposition, tant qu'elle fera avancer le débat public et servira l'intérêt général.

Les Français nous regardent et attendent de nous des solutions : la réindustrialisation de nos territoires, l'innovation, l'accompagnement de l'économie verte et le déploiement du numérique, qui sont des atouts supplémentaires pour l'attractivité et le développement de ces derniers. Notre responsabilité est d'aller plus loin encore pour accompagner nos filières d'excellence industrielles, agricoles, maritimes et énergétiques : c'est servir nos entreprises, mais c'est servir aussi leurs salariés, pour répondre aux enjeux et aux défis qui sont devant nous.

C'est avec humilité et pleinement conscient de ma responsabilité que je mettrai ma force, mon engagement, mon expérience et mes convictions au service de notre collectif et de notre feuille de route, qui est aussi celle de la majorité.

J'attends aussi de votre part du travail, des relations fondées sur la confiance et le respect de la parole donnée et des opinions de chacun, dans leur diversité. Chacun ici est légitime et porte une part de souveraineté de notre pays. C'est une fierté que d'être les acteurs et les porteurs de l'ambition économique de la France.

Comptez sur ma capacité à dialoguer, mais aussi à trancher et à faire respecter les règles qui régissent cette commission. Au moment de démarrer nos travaux, je salue l'équipe des administrateurs et des collaborateurs des groupes qui nous assistent, avec un hommage spécial à la majorité pour l'état d'esprit et les valeurs qui fondent notre collectif : la liberté, le progrès, l'action et la transformation, qui sont au cœur de nos priorités.

La commission des affaires économiques a procédé à l'examen de la proposition de loi pour louer en toute confiance (n° 2057) (M. Stéphane Delautrette, rapporteur).

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Cette proposition de loi porte sur la question importante d'une meilleure garantie des loyers, destinée à sécuriser les relations entre bailleurs et locataires. Cette question a fait dans le passé l'objet de débats devant notre assemblée mais, comme le souligne notre rapporteur dans son rapport, elle a prospéré depuis au prix de certaines évolutions.

Un amendement a été déclaré irrecevable par le président de la commission des finances au titre de l'article 40 de la Constitution et, à la demande du président Kasbarian et pour les deux propositions de loi à notre ordre du jour, la recevabilité au titre de l'article 45 a été examinée par notre vice-présidente Anne-Laurence Petel. Un amendement a ainsi été déclaré irrecevable sur ce fondement pour ce qui concerne la proposition de loi pour louer en toute confiance.

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Monsieur le président, je vous félicite pour votre élection et me réjouis de vous avoir entendu souhaiter que le débat puisse vivre dans cette commission : nous allons nous y employer dès ce matin !

Interrogé lundi matin sur RTL quant aux réponses à apporter face à l'augmentation continue du nombre de logements vacants – qui représentent près de 3,1 millions de logements selon le dernier décompte de l'Insee –, le nouveau ministre chargé du logement, Guillaume Kasbarian, notait que la crainte des impayés locatifs pouvait souvent être l'une des causes de cette vacance. De fait, selon une étude dont les résultats nous ont été communiqués par la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP), près de 10 % de logements sont laissés vacants par les propriétaires par crainte de ces impayés. Redonner confiance aux propriétaires dans ce domaine permettrait donc de remettre potentiellement près de 300 000 logements sur le marché, ce qui est loin d'être négligeable.

Le manque de logements disponibles est une bombe sociale à retardement. Quand plus de 10 % des Français renoncent à un emploi faute de logement disponible et que 12 % des étudiants renoncent à poursuivre leurs études pour cette même raison, c'est toute la promesse républicaine qui en est fragilisée – nous pouvons tous nous accorder sur ce constat.

Deux options s'ouvrent ainsi à nous. La première est de continuer sur la voie de la criminalisation permanente des locataires en situation d'impayés de loyer, alors que, selon tous les représentants des propriétaires, ils sont très peu nombreux – moins de 2 % – et moins nombreux encore sont, parmi eux, ceux de mauvaise foi. À ce titre, la loi « Kasbarian » visant à protéger les logements contre l'occupation illicite, dite loi « anti-squat », n'aura pour effet que d'accroître la précarité des ménages en grande difficulté, d'augmenter le nombre d'expulsions sèches et de peser, in fine, sur le budget de l'hébergement d'urgence.

L'autre option, offerte par la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui, concilie le droit du propriétaire à percevoir un loyer et celui du locataire à être, en cas de besoin, accompagné pour sortir d'une situation difficile.

Cette proposition de loi permettra également d'éviter que des milliers de personnes ne puissent accéder à un logement faute de pouvoir justifier de revenus suffisants, d'un garant, ou même de la possibilité de souscrire à une garantie des loyers impayés privée, réservée aujourd'hui aux ménages les plus aisés. Elle évitera aussi à des milliers de personnes de falsifier leur fiche de paie ou leur déclaration de revenus, ce qui est bien souvent pour elles la dernière solution pour obtenir un logement. Je vous invite tous à lire l'article publié à ce propos par Le Monde en date du 28 décembre 2023.

Si j'étais taquin, chers collègues de la majorité, je dirais que c'est une proposition de loi de l'authentique « en même temps » que je vous présente aujourd'hui, car elle est en même temps gagnante pour les propriétaires et gagnante pour les locataires. Elle a d'ailleurs su naguère réunir des personnalités aussi différentes que Jean-Louis Borloo et Cécile Duflot.

Venons-en au dispositif. L'article 1er reprend, dans leurs grandes lignes, les dispositions inscrites à l'article 23 de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi « Alur », adoptée en 2014.

Premièrement, il crée une garantie universelle des loyers (GUL) publique et gratuite, ouverte à l'ensemble des locataires et des propriétaires, dans des conditions à préciser par décret.

Deuxièmement, il crée une agence nouvelle épaulée, le cas échéant, par des centres agréés, et qui serait dotée de larges prérogatives de puissance publique, non seulement pour indemniser les propriétaires en cas de sinistre et pour se retourner contre les locataires de mauvaise foi, mais aussi et surtout pour proposer des aides et un accompagnement sur mesure aux locataires en difficulté. Les amendements présentés par certains collègues précisent utilement ce point. La GUL n'est pas un droit à l'impayé de loyer ni une simple indemnisation du propriétaire, c'est une véritable « sécurité sociale du logement », qui protège et accompagne propriétaire et locataire lorsque la situation sociale de ce dernier ne lui permet plus de payer son loyer.

Pourquoi cette GUL, adoptée en 2014 et dont la mise en œuvre était prévue à partir du 1er janvier 2016, n'a-t-elle jamais vu le jour ? Sans qu'aucune difficulté juridique ou technique y ait, à ma connaissance, fait obstacle, la seule raison à la disparition de ce dispositif tient à son coût, estimé dans l'étude d'impact du projet de loi Alur à 700 millions d'euros et dont il était prévu d'assurer le financement par une nouvelle taxe locative. Le déploiement du visa pour le logement et l'emploi (Visale), dont le coût avoisine les 100 millions d'euros par an, destiné à des publics vulnérables et accusant un taux de recouvrement d'environ 50 % – très supérieur, donc, à celui pris en compte pour les estimations de la loi Alur, qui se situe autour de 10 % –, montre que l'estimation de 700 millions d'euros en 2014 était très vraisemblablement surévaluée.

Pourquoi revenir à la GUL si le dispositif Visale existe ? Aussi remarquable que soit le travail d'Action logement en la matière, la GUL permettra d'aller beaucoup plus loin que le dispositif Visale, dont l'insuffisance n'est pas à imputer à Action logement, mais à sa conception même.

Premièrement, le public cible de Visale est trop restreint, la garantie n'étant pas ouverte aux retraités et aux personnes en recherche d'emploi, qui doivent être les plus aidées, ni même aux fonctionnaires. Quant à l'ouverture aux indépendants et aux saisonniers, promise en 2023, elle n'est toujours pas actée.

Un tel élargissement n'est pas naturel pour Action logement. Les salariés étant normalement le public prioritaire qui doit bénéficier du produit de la participation des employeurs à l'effort de construction (Peec), je ne peux que comprendre la réticence des partenaires sociaux à utiliser celle-ci pour une autre finalité.

Deuxièmement, le niveau des engagements hors bilan devient problématique, malgré la maîtrise du coût du dispositif. Au bout du compte, c'est bien l'État qui sera garant de la garantie Visale accordée.

Troisièmement, l'accompagnement social visant au relogement du locataire en situation d'impayés ne figure pas parmi les missions d'Action logement, alors qu'il doit être une priorité politique pour des raisons d'efficacité et d'humanité.

Enfin, et c'est peut-être le point le plus important, le caractère non universel de la garantie Visale était justifié, en théorie, en ce qu'elle représentait un atout pour les locataires les moins favorisés sur le modèle de la discrimination positive. La réalité est bien différente : Visale fonctionne plutôt comme un stigmate que comme un avantage comparatif. Soyons clairs, pour la majorité des bailleurs, la garantie Visale est et restera synonyme de locataire en difficulté. Ces bailleurs préféreront toujours louer à une personne ayant des revenus confortables et bénéficiant d'un ou de plusieurs garants. Ainsi, depuis janvier 2016 et le lancement de la garantie Visale, 2,7 millions de visas ont été certifiés – le visa est, pour le futur locataire, la preuve vis-à-vis du futur propriétaire qu'il bénéficie de la couverture Visale. Or, moins de la moitié de ces visas a donné lieu à l'émission d'un contrat Visale. Dans plus d'un cas sur deux, le propriétaire n'a donc pas souhaité louer son bien à une personne ayant fait de la garantie Visale un atout de son dossier de candidature à la location.

Quant aux professionnels de l'immobilier, ils auront, en cas de location intermédiée, toujours intérêt à privilégier la garantie des loyers impayés (GLI) des assurances privées, dont ils dégagent un intérêt négocié. J'en veux pour preuve que, si nous ne faisons pas la GUL, ce sont eux qui la feront à notre place. Comme elle l'a clairement dit lorsque nous l'avons auditionnée, la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) milite pour le déploiement d'un système d'assurance privée universelle en cas de location intermédiée. Un tel système sera évidemment payant et seuls les dossiers les plus solides pourront y être éligibles.

Pour toutes ces raisons, je pense que la GUL s'imposera comme la sécurité sociale s'est un jour imposée face aux différents systèmes privés d'assurance maladie. Il faut même aller plus loin et les amendements qui proposent de la rendre obligatoire me semblent aller dans le bon sens, même si nous ne pourrons pas les examiner. Rendre obligatoire la GUL et supprimer toute possibilité de cautionnement ou toute garantie de loyers impayés privée, c'est s'assurer que tous les locataires seront traités sur un pied d'égalité. Je proposerai également des amendements dans cette perspective.

Chers collègues, vous avez l'occasion de prendre au mot notre nouveau ministre en restaurant la confiance entre les locataires et les propriétaires : saisissez cette chance !

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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D'abord, monsieur le président, je vous présente mes félicitations pour votre élection.

Comme l'a rappelé le rapporteur, la garantie universelle des loyers avait été envisagée dans la loi Alur de 2014 et devait s'appliquer aux contrats de location conclus à partir du 1er janvier 2016, mais le décret d'application n'a jamais été publié. Son abandon tenait à son financement, qui reposait sur une taxe sur les loyers, à son coût, estimé à l'époque à 700 millions d'euros, à son caractère obligatoire et à la déresponsabilisation des bailleurs et des locataires qu'elle entraînait. Pourquoi, alors, adopter aujourd'hui cette proposition de loi qui présente les mêmes défauts qu'il y a dix ans ?

En pleine crise du logement, vous inventez une taxe sur les loyers, que devront payer les propriétaires et qui sera évidemment répercutée sur le montant des loyers, dont elle alimentera l'inflation. Ce risque a été souligné, durant les auditions auxquelles vous avez procédé, par un représentant de l'association Droit au logement (DAL), pour qui cette mesure reviendrait à « ouvrir la boîte de Pandore ».

En pleine crise du logement, vous voulez gaspiller 1,4 milliard d'euros pour financer une garantie de loyer qui existe déjà, qui est gratuite pour les propriétaires, qui ne coûte pas un euro de dépense publique et qui est efficace : la garantie Visale, gérée par Action logement.

En pleine crise du logement, vous voulez déresponsabiliser les bailleurs et les locataires : les propriétaires se déchargeront sur l'État pour encaisser les loyers et les locataires seront incités à ne pas les payer. Un propriétaire qui ne veut pas mettre dehors un locataire sympathique n'ayant plus les moyens de payer pourra faire appel à la GUL : vous inventez le loyer gratuit.

Ces loyers devront toutefois être payés par la communauté nationale – par ceux qui travaillent et paient des impôts, et à qui on va demander, une fois de plus, de mettre la main au portefeuille. Cette étatisation de la garantie des loyers, avec obligation de la souscrire, reviendra à évincer des organismes privés ou parapublics, comme Action logement, et donc à instaurer un monopole de fait, pouvant être considéré comme contraire à la liberté d'entreprendre garantie par la Constitution et le droit communautaire.

Le groupe Renaissance ne votera pas ce texte. Si nous sommes favorables à l'amélioration des dispositifs existants, dont nous pourrons parler lors de l'examen des amendements, nous sommes opposés à l'adoption d'un dispositif vieux de dix ans, que vos amis eux-mêmes n'ont pas mis en œuvre lorsqu'ils étaient aux responsabilités, compte tenu de son coût, de son financement et de son inefficacité.

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Ma proposition ne prévoit aucunement la création d'une taxe pour assurer le financement de ce dispositif. Quant au coût annuel de 1,4 milliard d'euros, quels sont les éléments qui vous permettent d'annoncer un tel montant ?

La GUL qui vous est proposée dispose de prérogatives de puissance publique permettant de recouvrer les loyers impayés. Ce n'est pas un droit à l'impayé de loyer : en cas d'impayé, si le locataire est solvable, l'agence créée pour en assurer la gestion recouvrera les loyers.

Quant à la question constitutionnelle, un avis favorable à ce dispositif avait été émis.

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Cette proposition de loi a le mérite de soulever une véritable difficulté, à laquelle sont confrontés des millions de Français locataires : les exigences toujours plus fortes des bailleurs lorsqu'ils donnent un logement à bail. La crise du logement que nous traversons et dont Emmanuel Macron porte la lourde responsabilité après sept années d'inaction et de politique de rabot budgétaire, a considérablement raréfié l'offre de logements disponibles dans les marchés locatifs les plus tendus. Désormais, trouver une location devient un véritable défi pour des millions de Français, voire une mission impossible pour ceux qui n'ont pas la chance de présenter un CDI, une situation confortable ou un garant solvable – cette dernière exigence étant même imposée aux fonctionnaires, ce qui est une aberration complète.

La rareté de l'offre permet aux bailleurs de choisir leurs locataires parmi les meilleurs dossiers, excluant les plus précaires, les petits indépendants toujours plus nombreux avec l'ubérisation de l'économie, les étudiants et les publics les plus fragiles. Il est temps de réagir. Cette compétition pour se loger devient inacceptable.

Rappelons tout de même que la longueur des procédures d'expulsion engagées contre un locataire mauvais payeur après avoir actionné la clause résolutoire du bail – il n'est pas rare qu'elle atteigne vingt-quatre mois – pousse les bailleurs à réduire le risque de défaillance locative à son minimum. Dans ce contexte, nous pouvons comprendre les craintes des petits bailleurs qui cherchent à sécuriser leurs revenus fonciers. Or si la garantie Visale ou les garanties privées des loyers impayés existent, de nombreux Français restent non éligibles à ces dispositifs assurantiels.

Chers collègues socialistes, nous accueillons favorablement le principe d'une garantie universelle des loyers, mais permettez-nous d'émettre quelques réserves quant à ses conditions d'application. Avec la création d'une agence dédiée, par l'intermédiaire d'un nouvel établissement public, nous craignons les dérives d'une forme d'étatisation de la garantie des loyers, alors que la France souffre d'une suradministration.

Vous refusez le principe d'un système assurantiel, mais pourquoi ne pas associer les réseaux bancaires, les assurances ou La Poste pour la souscription à ce nouveau dispositif ?

La question de la responsabilisation du locataire se pose également. La garantie universelle des loyers a-t-elle vocation à couvrir indéfiniment les défaillances d'un locataire mauvais payeur ? Quels garde-fous avez-vous imaginés pour prévenir les abus potentiels de ce nouveau droit social ?

En outre, la question du financement est pour nous une difficulté. Estimé à 1,4 milliard d'euros, le coût de ce dispositif est financé par de nouveaux prélèvements ou impôts, alors que la pression fiscale a atteint son paroxysme sous Emmanuel Macron. Nous aurions préféré que vous imaginiez des ressources alternatives.

Enfin, un tel dispositif de protection doit s'accompagner de contreparties du côté du locataire : si celui-ci est mieux protégé, il est absolument nécessaire d'envisager parallèlement une réduction drastique des délais des procédures d'expulsion.

Pour toutes ces raisons et malgré une intention que nous estimons louable, le groupe Rassemblement national s'abstiendra sur cette proposition de loi, que nous jugeons incomplète, malheureusement financée par de nouveaux impôts et ruineuse pour les finances publiques.

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Je le redis, il ne s'agit pas d'ouvrir un droit à l'impayé sans condition. La rédaction proposée vous permettait à tous de formuler par amendement des propositions de garde-fous. Il est regrettable que vous ne l'ayez pas fait.

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Cette proposition de loi tombe à pic, car elle permet de débattre du logement au moment où nous traversons une grave crise. Nous étions nombreux à mettre en garde contre la bombe sociale que représente la difficulté d'accès à un logement décent. Aujourd'hui, comme l'a dit la Fondation Abbé Pierre en remettant son rapport annuel sur le mal-logement, cette bombe sociale a explosé : 12 millions de familles sont en situation de fragilité par rapport au logement, 3,5 millions de ménages souffrent du froid dans leur logement parce qu'il est mal isolé ou que le prix du chauffage est trop élevé et le nombre de demandeurs de logement social atteint le chiffre record de 2,6 millions, certaines familles attendant des années une proposition. On compte aussi, ne l'oublions pas, 300 000 personnes sans domicile fixe, chiffre qui a doublé en dix ans.

Dans ce moment d'une singulière gravité, le choix du Gouvernement a été celui de la provocation, en nommant ministre du logement un député, Guillaume Kasbarian, qui s'est fait connaître en réclamant une peine de prison pour les locataires pauvres qui ne parviennent pas à payer leur loyer. Provocation encore en annonçant la remise en cause de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), qui impose à chaque commune dans les zones urbaines un minimum de 25 % de logements sociaux. Depuis des années, une poignée de communes qu'on peut qualifier de « ghettos de riches » refusent d'appliquer cette loi ? Qu'à cela ne tienne ! La Macronie va changer la loi pour leur permettre de revenir dans les clous. On voit bien là que votre vision de l'ordre républicain est en réalité celle d'un ordre au service des riches.

Nous combattrons donc cette politique et nous proposerons, nous aussi, nos solutions, parmi lesquelles la proposition de loi que nous discutons aujourd'hui, visant à instaurer une garantie universelle des loyers. Nous savons que l'alliance de la Macronie et du Rassemblement national en empêchera l'adoption, mais elle aura au moins le mérite de montrer que nous pourrions changer la vie des gens si une politique au service du droit au logement était menée.

La garantie universelle des loyers est une mutualisation des risques, une forme de sécurité sociale présentant un triple avantage : pour les petits propriétaires, qui ont l'assurance que leur loyer sera payé quelles que soient les difficultés que connaissent les locataires ; pour les locataires en difficulté, qui ne sont pas exonérés de leur responsabilité de payer le loyer, mais qui bénéficient d'un accompagnement social pour sortir par le haut de leurs difficultés ; pour les futurs locataires, enfin, face à l'inégalité que représente, dans un marché très tendu, l'exigence de caution de la part des bailleurs. Disons-le clairement, quand plusieurs locataires sont en concurrence, en particulier parmi les jeunes, c'est celui qui a les parents les plus riches qui décroche le logement. Une garantie universelle des loyers permettra de supprimer ce système de caution privée et de faire disparaître cette inégalité insupportable.

Du côté de la Macronie, où plus de la moitié des membres du Gouvernement sont millionnaires, les problèmes de caution ne sont certes pas la priorité, mais pour nous, les Insoumis, c'est un combat important. Notre devise républicaine comporte le mot « égalité ». Cela doit s'appliquer tout le temps, y compris dans la recherche d'un logement.

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Monsieur Martinet, nous partageons la lutte contre les inégalités. Cette injustice dans l'accès au logement est intolérable et la proposition de loi permettra de lever tous ces freins. Je vous remercie donc pour votre soutien et je salue vos propositions d'amendements.

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Toutes mes félicitations pour votre belle élection, monsieur le président !

Cette proposition de loi tend à réinstaurer un dispositif voté par la majorité socialiste en 2014, mais qui n'a jamais été appliqué – preuve, s'il en fallait, que la majorité des acteurs du secteur ne croyaient pas à cette solution. De plus, les défauts de cette mesure, que la droite dénonçait déjà en 2014, sont toujours d'actualité.

Son premier défaut est son coût pour les finances publiques, estimé à 1,4 milliard d'euros par les auteurs de la proposition de loi. Alors que la dette atteint un niveau record, le moment n'est pas aux dépenses inutiles qui seront, à terme, remboursées par l'augmentation des impôts des Français, mais à la mise en œuvre de solutions efficaces et pragmatiques, loin de ce qui figure dans cette proposition de loi.

Le deuxième est la déresponsabilisation des locataires. La mise en œuvre de cette mesure pourrait en effet conduire à l'apparition d'un permis de ne pas payer, accroissant nécessairement les risques d'impayés et pesant à nouveau sur les finances publiques.

Le troisième est la concurrence déloyale créée avec le secteur des assurances car, en instaurant une garantie universelle des loyers, l'État pourrait entrer en compétition directe avec le secteur privé, compromettant ainsi la libre concurrence, avec potentiellement des conséquences néfastes sur les entreprises privées déjà présentes sur le marché.

Le quatrième est la surcharge administrative qui s'ensuivrait. Alors que la garantie Visale pour les locataires fonctionne, la GUL pourrait entraîner des complexités administratives supplémentaires tant pour les propriétaires que pour les locataires et pour l'État, ce qui pourrait décourager l'investissement privé dans le secteur immobilier.

Finalement, cette proposition de loi est loin d'être suffisante pour répondre à la crise du logement. La disposition proposée n'est qu'un écran de fumée, qui pèserait lourdement sur nos finances publiques. Les députés Les Républicains voteront donc contre.

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Depuis l'adoption de la loi Alur de mars 2014, de l'eau a coulé sous les ponts et nous disposons de retours d'expérience. Le dispositif Visale coûte 100 millions d'euros par an, alors qu'il concerne des publics très fragiles, plus susceptibles de connaître des difficultés de paiement, avec un taux de recouvrement de 50 %. Le chiffrage du projet de loi Alur en 2014 – 700 millions d'euros pour un taux de recouvrement de seulement 10 % – est donc surévalué. En outre et en conséquence de la loi « anti-squat » qui va accélérer les processus d'expulsion, l'État aura à assumer des dépenses supplémentaires de relogement dans des logements d'urgence. La question est donc de savoir s'il souhaite consacrer des financements au traitement de situations sociales dramatiques plutôt qu'à la prévention.

Quant à la déresponsabilisation, je rappelle que l'agence sera dotée de prérogatives de puissance publique. Il ne s'agit donc pas d'un droit à l'impayé de loyer : toute personne solvable sera poursuivie pour recouvrer les loyers impayés.

Le dispositif dont nous parlons est balisé, mais rien n'empêche de réfléchir sur le recours au privé pour apporter des compléments aux propriétaires qui le souhaitent.

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L'objectif affiché de cette proposition de loi – j'insiste sur le mot « affiché » – est d'apporter une solution à la crise du logement locatif, caractérisée notamment par la tension entre offre et demande. Pour simplifier, c'est la résurrection de la garantie universelle des loyers prévue par la loi Alur. Louer en toute confiance est un objectif louable, mais cette proposition de loi donne une prime au locataire qui n'est pas responsable et représente un coût pour le contribuable. L'inspection des finances estime celui-ci à près de 1 milliard d'euros. Même si les inspecteurs des finances ne connaissent pas forcément bien la vie des Français dans les territoires, ils savent compter. Comment allez-vous financer une telle mesure ? En coupant dans les budgets des politiques du logement ? Si oui, lesquels ? En instaurant une nouvelle taxe sur les loyers ? Dans ce cas, une inflation des loyers est à craindre – crainte partagée par l'association Droit au logement.

Il nous semble préférable de travailler sur la garantie Visale, qui fonctionne très bien, et de réfléchir à son élargissement, notamment vers les retraités qui ont travaillé toute leur vie. Cela pourrait être fait par voie d'amendement.

Je voudrais enfin soulever le risque de fraudes massives, à l'instar de celles concernant l'allocation chômage, en raison d'une possible collusion entre propriétaires et locataires.

La philosophie du groupe Démocrate est celle de la liberté de vote, mais la majorité des députés de notre groupe voteront contre ce texte.

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Je ne reviens pas sur le détail de l'estimation du coût du dispositif, qui mériterait d'être revue, mais je rappelle que l'inspection des finances avait évalué le coût de la loi Alur entre 250 millions et 1 milliard d'euros en fonction du dispositif retenu. Tout dépend donc du dispositif qui sera retenu ; j'ignore d'où sort le chiffre de 1,4 milliard d'euros, qui est systématiquement avancé, mais c'est un montant maximal.

J'insiste sur le fait que l'agence en charge de la gestion du dispositif disposera de prérogatives de puissance publique pour recouvrer les loyers auprès des locataires solvables. Il ne s'agit donc pas d'un droit à l'impayé.

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Je vous remercie pour cette proposition de loi, qui permet de parler d'un sujet de préoccupation majeur pour les Français, mais encore trop peu abordé au sein de notre assemblée. La crise du logement exceptionnelle que nous traversons a un coût social et économique très lourd. Cette crise empêche l'accès à la location comme à la propriété : le nombre de biens loués a été divisé par deux en quatre ans, les ménages ne peuvent plus accéder à la propriété à cause de la hausse des taux et des coûts de construction, et les réservations de logements neufs ont chuté de 22 %. Elle entrave l'insertion professionnelle et sociale puisqu'elle empêche les Français d'accéder à un emploi et 12 % des étudiants de poursuivre leurs études. Elle favorise les pratiques abusives et les exigences irréalistes des bailleurs.

Face à l'inaction du Gouvernement pour apporter des réponses concrètes au manque de logements, la garantie universelle des loyers est une solution pertinente et rapidement mobilisable. Elle aurait pour effets de rétablir la confiance entre bailleurs et locataires, de mettre sur le marché davantage de logements en location longue durée et de constituer un filet de sécurité pour les personnes en difficulté. Le texte permettrait notamment d'augmenter le nombre de logements loués dans l'ancien et d'inciter à l'investissement locatif dans le neuf. En raison d'une mauvaise expérience locative, 9 % des propriétaires refuseraient de mettre leurs biens en location. Il est donc indispensable de redonner confiance, sachant toutefois que les situations d'impayés de loyers sont souvent sujettes à des idées reçues : bien loin de certains fantasmes, elles ne concernent que 2 % des loyers dus.

Ce dispositif sécuriserait bailleurs comme locataires face aux imprévus. Il permettrait davantage d'éviter les expulsions, qui ont un coût social et économique pour les ménages, pour notre système de solidarité et pour les finances de l'État. Nous parlons ici d'un système préventif plutôt que curatif.

Enfin, la garantie universelle des loyers répond à un principe d'égalité des chances, car elle donne à tous la possibilité d'avoir un logement, même à ceux qui n'ont pas de garant et qui ne peuvent satisfaire aux exigences exorbitantes de certains loueurs. Certes, la garantie Visale existe, mais elle est insuffisante.

Pour toutes ces raisons, et dans la droite ligne des travaux que nous avons menés sur la régulation des meublés de tourisme, le groupe Socialistes et apparentés soutient cette proposition, qui apporte une réponse concrète aux difficultés rencontrées par les Français pour accéder au logement. Je suis persuadé que nous nous demanderons bientôt pourquoi ne pas l'avoir fait avant.

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Vous soulignez l'impérieuse nécessité de garantir l'accès au logement, qui est la première des conditions pour trouver un travail ou pour poursuivre ses études. Cette condition n'est pas remplie aujourd'hui et c'est bien l'objet de la proposition de loi d'y remédier.

Je voudrais rappeler, notamment à l'attention de ceux qui jugent le coût de 1,4 milliard d'euros trop élevé, que les aides personnelles au logement (APL) ont été diminuées de 1,3 milliard d'euros.

Je souhaite également répondre à ceux qui prônent l'élargissement de la garantie Visale, auquel nous pouvons effectivement réfléchir : je rappelle que la vocation première de ce dispositif est de soutenir les salariés du secteur privé et que certains publics en sont, de fait, écartés.

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Cette proposition de loi tend à rétablir la garantie universelle des loyers, créée par la loi Alur. Gratuite et destinée à tous les bailleurs potentiels, elle devrait protéger à hauteur du montant du loyer médian local pour une durée de dix-huit mois.

En raison de la complexité du dispositif, de son coût annuel et de la concurrence déloyale qu'elle implique pour les assureurs privés, cette garantie universelle des loyers a été abandonnée par le gouvernement de Manuel Valls. Elle a été remplacée par la garantie Visale, qui remplit une fonction similaire, mais qui est ciblée sur les locataires précaires, les salariés dont les revenus sont inférieurs à 1 500 euros, les moins de 31 ans et les personnes en possession d'une promesse d'embauche, à l'exception des CDI confirmés et des personnes en mobilité professionnelle. La garantie Visale est un dispositif efficace et efficient : depuis son lancement en 2016, plus d'un million de contrats de bail en ont bénéficié. Le droit existant permet donc de traiter assez efficacement les retards et impayés locatifs sans qu'il soit nécessaire d'instaurer une garantie universelle des loyers, dont le coût estimé reste conséquent. Vous vous demandiez où nous avions trouvé le chiffre de 1,4 milliard d'euros : il se trouve dans l'exposé des motifs. Il s'agit certes d'un coût théorique maximal, qui ne serait sans doute pas atteint compte tenu du nombre indéterminé de sinistres effectifs, mais il reste conséquent et pose la question du financement du dispositif.

Face à la crise du logement, le Gouvernement et la majorité sont pleinement mobilisés pour trouver des solutions efficaces, notamment en simplifiant certains dispositifs de rénovation jugés trop complexes. Vos mesures, très coûteuses, vont à l'encontre de cette stratégie. Le groupe Horizons et apparentés ne soutiendra donc pas votre proposition de loi.

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Vous avez parlé de concurrence déloyale vis-à-vis des assurances privées ; mais si elles apportaient déjà ce service, nous ne serions pas réunis ce matin pour en parler. Les assureurs proposent des services relativement balisés et le taux d'effort exigé est plafonné à 33 %, alors qu'il est de 50 % dans le dispositif que nous proposons. Ce plafonnement à 33 % écarte une partie importante des locataires qui méritent d'être soutenus. Je rappelle également que la plupart des propriétaires n'ont pas recours aux assurances privées, mais à la caution solidaire. Or ce dispositif ne sécurise pas, puisque n'importe qui peut se porter caution d'un nombre illimité de personnes et rien ne garantit que la personne garante pourra réellement payer le loyer en cas de défaillance du locataire. Nous cherchons, par le dispositif, à nous prémunir de tous ces inconvénients.

Vous vous référez à l'exposé des motifs pour citer le chiffre de 1,4 milliard d'euros, mais c'est le rapport qui fait foi et il précise les chiffres, qui ne correspondent pas forcément au montant que vous avez cité.

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Cette proposition de loi permet enfin de réinscrire dans la loi le dispositif de garantie universelle des loyers, défendu par Cécile Duflot dans le cadre de la loi Alur lorsqu'elle était ministre du logement. C'est un combat de longue date des écologistes et c'est donc avec enthousiasme que nous soutenons ce texte, d'autant plus que la situation s'est fortement dégradée depuis 2014. Elle est aujourd'hui intenable : baisse de l'offre de logement et difficulté pour de nombreux ménages à se maintenir dans leur logement.

Une agence immobilière sur dix n'a pas de bien immobilier à louer et, d'après la Fnaim, le nombre de logements mis en location est en baisse de 34 % par rapport à la même période en 2023. La palme revient à Paris, avec une baisse allant jusqu'à 50 % des biens mis en location et de 74 % sur trois ans.

Dans le même temps, les expulsions locatives atteignent des records, avec trente mille personnes expulsées de leur logement pour impayés l'année dernière, alors que, dans la majorité des cas, les impayés ont pour cause des ressources insuffisantes après un problème de la vie – perte d'emploi, problème de santé, séparation.

Le système actuel dysfonctionne donc profondément et brise des vies. Il n'est pas protecteur pour les locataires ni pour les propriétaires, et il est fortement discriminant, parce que les conditions d'accès au logement, notamment la caution de personnes physiques, sont toujours plus exigeantes. La garantie Visale ne couvrait que 2,5 % des logements loués dans toute la France en 2020. L'obligation de présenter un garant est à l'origine de fraudes – triche sur les fiches de paie ou vente de cautions – qui mettent les locataires en difficulté et ne protègent pas les propriétaires. La garantie universelle des loyers permet de rétablir la confiance entre locataires et propriétaires. Elle est une véritable sécurité sociale du logement, puisqu'elle constitue une protection collective face aux aléas de la vie : le logement, comme la santé, est un bien vital. Elle permet également à chacun d'être traité sur un pied d'égalité dans sa recherche de logement.

Cette proposition contrevient effectivement, en tout point, à la politique du logement du Gouvernement, qui veut fragiliser les Français durant cette période. Cette volonté est illustrée par la loi « Kasbarian », qui fragilise les locataires en situation d'impayés alors que la bombe sociale du logement explose, ou encore par le reniement de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (loi SRU).

Vous voulez continuer à augmenter les difficultés d'accès au logement et fragiliser les gens ; nous, les écologistes, la gauche, choisissons de les protéger et de leur donner les moyens d'exercer leur droit à un logement décent.

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Je salue votre enthousiasme et, surtout, votre réalisme quant à l'urgence absolue de réagir face à la situation que nous connaissons. Je partage votre constat.

Le dispositif proposé vise : à lutter contre la discrimination dans l'accès au logement ; à protéger en cas de coup dur – car personne n'est épargné – en garantissant la sécurité du maintien dans le logement ; à accompagner et à prévenir. J'insiste sur cette dimension de prévention, car je n'entends parler ce matin que de coût pour l'État. C'est le sens de la politique du logement que nous souhaitons.

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La société française a besoin de sécurité, d'ordre et de confiance. La sécurité, ce n'est pas seulement la sécurité publique, c'est aussi la sécurité sociale, surtout dans un pays où la précarisation de l'emploi, l'ubérisation de la société et les difficultés sociales en tous genres créent beaucoup d'incertitude et de précarité, donc de désordre et d'insécurité. Cette proposition contribue à apporter un peu plus de sécurité, d'ordre et de confiance dans la société. Le texte est équilibré entre les droits et devoirs du locataire et ceux du propriétaire : en aucune manière, la garantie universelle des loyers n'est un dispositif de déresponsabilisation.

La crise du logement que nous vivons est sans précédent : depuis 1992, le nombre de demandeurs de logement social n'a jamais été aussi élevé quand la production de logements, tous logements confondus, n'a jamais été aussi basse. Ces chiffres viennent de sortir. Pour y répondre, il faut fois agir sur le levier de la production de logements – mais ce n'est pas l'objet de ce texte – et « déstocker » les logements vacants pour les mettre à la location. Pour cela, il faut rassurer les propriétaires en créant un cadre de confiance.

Je ne reviens pas sur ce qui a déjà été dit sur les effets pervers de la course aux garanties, qui est très compliquée pour une grande partie de nos concitoyens. Depuis longtemps, les gouvernements successifs essayent de trouver l'équilibre des droits et des devoirs. On a parlé de la garantie universelle des loyers de la loi Alur, défendue par Cécile Duflot. Je voudrais aussi parler des « protocoles Borloo », créés par ce ministre en 2005. J'exerçais à l'époque des responsabilités dans une collectivité locale et je me souviens que nous nous rendions tous les mois en sous-préfecture avec des locataires en difficulté afin de signer des protocoles avec le propriétaire et l'État, qui donnaient un peu de sécurité aux parties. C'est donc un long combat. Nous soutenons cette loi de sécurisation de la société.

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Vous avez bien résumé les choses : cette proposition de loi est un texte d'équilibre de droits et de devoirs, qui protège nos concitoyens.

Vous avez insisté sur la nécessité de travailler à la remise sur le marché locatif de logements captifs. Je rappelle qu'une enquête de la DHUP chiffre à 9 % la proportion de propriétaires qui ne mettent pas leur logement en location par crainte d'impayés de loyer. Cela représente 300 000 logements, qu'il est indispensable de remettre sur le marché dans le contexte actuel.

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Pardonnez-moi, je risque d'être un peu désagréable.

« Face à la crise du logement, le Gouvernement et la majorité sont pleinement mobilisés. », a déclaré notre collègue Luc Lamirault. Avec beaucoup de respect, je le dis, ces formules creuses sont fatigantes. Il faut arrêter de se payer de mots ! Plusieurs collègues ont répété que la garantie universelle des loyers était trop compliquée et coûtait trop cher, mais la crise du logement s'est dramatiquement aggravée en dix ans et vous ne pouvez pas nier que vous y avez une certaine forme de responsabilité. Il y a certes une question conjoncturelle, mais la réduction du loyer de solidarité (RLS) a freiné de manière drastique la construction de logements sociaux. Les acteurs du logement social le disent et les bailleurs de proximité regrettent qu'il n'y ait plus d'argent pour construire. De l'autre côté, de plus en plus de gens, surtout les plus fragiles, peinent à trouver un logement.

Ce texte ne déresponsabilise pas. Arrêtez de nous assommer avec cet argument ! Je le dis avec respect, mais je le dis clairement : les impayés concernent 2 % des locataires et vous voulez nous empêcher de légiférer pour l'intérêt général ? Le dispositif ne revient pas à dire aux locataires de ne plus payer leur loyer ni à enjoindre aux propriétaires de louer à de braves gens qui n'ont pas les moyens puisque l'État couvrira le loyer. Soyons sérieux ! Notre collègue Peu vient de rappeler qu'il procède d'une construction lente, des protocoles Borloo à la loi Alur. Un responsable politique doit être mesuré dans son approche – surtout pour les responsables locaux, qui sont au plus proche de la population – et ne donner de prime ni aux locataires ni aux propriétaires.

La situation du logement en France est dramatique, mais nous sommes restés un mois sans ministre du logement. La nomination d'un ministre envoie toujours un signal. J'ai du respect pour le président de la commission qu'il fut, mais quel signal envoie la nomination de M. Guillaume Kasbarian, qui a défendu une loi facilitant l'expulsion des plus fragiles ? Si vous voulez régler le problème, ce sont les plus fragiles qui doivent être accompagnés. Cela me rend fou de voir, sur cette question, le retour au vieux monde. La droite se drape dans la protection des propriétaires et la gauche dit qu'il faut accompagner les locataires. Quand on se réclame du bon sens et du « en même temps », on protège les propriétaires et on encourage les locataires.

Cette proposition de loi n'est sans doute pas parfaite, mais elle pourra être amendée. Je tiens à saluer le travail du rapporteur, car il y a des choses à faire et nous ne pouvons rester les deux pieds dans le même sabot. Les dernières décisions du Gouvernement sont catastrophiques.

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Il fallait bien que quelqu'un remette les points sur les « i » et les barres sur les « t » ! Je vous remercie de remettre les choses en perspective. Cette proposition de loi, comme vous le rappelez, est un texte du « en même temps », du gagnant-gagnant pour les propriétaires et pour les locataires. Je ne comprends pas l'obstination de certains de nos collègues à s'opposer, dans le contexte actuel, à toute avancée en la matière.

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Monsieur le président, à mon tour, je vous félicite pour votre élection à la tête de la commission des affaires économiques.

Monsieur le rapporteur, vous êtes-vous concerté avec les acteurs du secteur ? Que pensent-ils de votre proposition ? Je les ai écoutés et ils me disent qu'un des écueils principaux du texte est l'absence de conditions. En vous écoutant, il semble que le dispositif en comporte. Pouvez-vous préciser ce point ?

La profession réfléchit actuellement à la mise en place d'une solution mutualisée sur l'ensemble des professionnels. Que savez-vous de cette réflexion ? Ne faudrait-il pas retirer votre texte dans l'attente de cette solution ? Remédier à la crise du logement demande en effet de construire avec les acteurs du secteur.

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Ce qui fonde une civilisation, c'est l'alimentation et le logement. L'homme, en inventant le feu, s'est organisé pour garder le logement quand il allait chasser. Vous pourriez verser des droits d'auteur à François Bayrou, car ce que vous proposez est une mesure de ses trois programmes présidentiels. C'est une mesure libérale puisque, en rassurant les propriétaires, elle favoriserait l'achat par les classes moyennes d'un petit logement pour la location en vue de la retraite. Il faut sécuriser le paiement des loyers pour flécher un important montant d'épargne vers le logement. Je vous adresse donc mes félicitations et je me réjouis d'être sur le même axe que vous, notamment avec les écologistes.

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Nous avons auditionné l'ensemble des acteurs du secteur et tous ne partagent pas le même point de vue. La Fnaim n'est pas favorable à une garantie universelle des loyers obligatoire. Elle réfléchit à son propre dispositif, mais celui-ci ne concernerait que la location intermédiée. Elle prêche donc pour sa propre paroisse. Leur dispositif concerne une cible donnée alors que nous cherchons à mettre en place une garantie universelle, notamment pour soutenir les plus précaires. Je ne suis pas convaincu que leur dispositif permettrait de couvrir ces situations.

À ce stade, les conditions n'ont pas été clairement définies et sont renvoyées à des décrets. La proposition de loi pourrait fixer un taux d'effort maximum de 50 % tel qu'il était envisagé à l'origine du dispositif. Et, j'insiste, elle prévoit la nécessité, en cas d'impayé, d'un plan d'apurement. L'idée n'est vraiment pas d'ouvrir un droit à l'impayé sans condition aucune.

La réunion est suspendue pendant quelques minutes.

Article 1er : Rétablissement de la garantie universelle des loyers

Amendement CE17 de M. Stéphane Delautrette

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Cet amendement tend à supprimer la possibilité pour les propriétaires privés de recourir à une assurance privée pour loyers impayés. Complété par l'amendement CE10 de Mme Chatelain, qui porte sur l'interdiction du cautionnement et sur lequel je me prononcerai favorablement, il permettra d'instaurer un dispositif universel.

De fait, nous proposons d'interdire les garanties de loyers impayés, qui sont des assurances privées coûteuses et qui exigent souvent un taux d'effort plafonné à 33 % des revenus, ce qui en exclut les ménages les plus modestes, là où nous pourrions proposer un taux de 50 %. En outre, pour bénéficier d'une GLI, les propriétaires se voient parfois obligés de choisir des locataires présentant une situation stable et des revenus élevés.

En l'absence de GUL, l'intérêt d'une GLI pour les propriétaires se conçoit mais, dès lors que serait instauré notre dispositif protecteur, toute autre assurance privée deviendrait inutile.

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Votre texte ne traite que des loyers impayés. Quid des dégradations locatives ? La GUL serait-elle assortie des mêmes protections juridiques que les GLI ? Les garanties dont jouiraient les propriétaires dans le système universel que vous entendez leur imposer seraient moindres que celles qu'offrent les organismes privés ou parapublics auxquels vous voudriez leur interdire de recourir.

La proposition s'intitule « pour louer en toute confiance ». Mais comment votre dispositif pourrait-il mettre en confiance les propriétaires ?

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Le dépôt de garantie pour se prémunir des dégradations locatives n'est nullement interdit. Le texte n'a pour objet que de couvrir les loyers impayés. Si vous souhaitez que des dispositions ayant trait à ces dégradations y soient intégrées, je vous invite à déposer des amendements en ce sens en vue de la séance publique.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE10 de Mme Cyrielle Chatelain

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La garantie Visale assure peu de logements en raison, entre autres, de son caractère ciblé. Dans la concurrence qui les oppose aux candidats assurés par Visale, ceux qui jouissent d'une caution physique l'emportent en général, puisque cette caution sécurise les propriétaires. Ainsi, 2,5 % des logements loués en France sont garantis par Visale, 15 % à 20 % par des GLI et 41 % par le cautionnement d'un proche.

L'amendement vise à mettre tous les locataires potentiels, quels que soient les revenus de leurs proches, sur un pied d'égalité en interdisant le cautionnement individuel.

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Nous soutenons cet amendement. Ce qui fait la force de la GUL est précisément son caractère universel et obligatoire, ainsi que sa capacité à se substituer aux systèmes d'assurance privés. L'universalité évite la stigmatisation que suscite Visale, puisque le public bénéficiant de ce dispositif rencontre par définition les plus grandes difficultés financières. En outre, la GUL est d'autant plus efficace qu'elle est obligatoire et remplace les assurances privées. Elle coûte en effet moins cher aux bailleurs que ces dernières, qui proposent généralement des couvertures médiocres.

C'est le principe même de la sécurité sociale : un système universel et obligatoire protège mieux et à moindre coût qu'un dispositif dépendant du marché des assurances privées, inégalitaire et très coûteux.

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D'après l'exposé des motifs, « le succès du dispositif Visale d'Action logement a montré l'intérêt d'un tel dispositif. ». Vous nous dites à présent que Visale ne donne pas satisfaction. Peut-être faut-il l'améliorer et augmenter le nombre de ses bénéficiaires, mais il existe, a démontré son efficacité et ne coûte pas un sou d'argent public – une donnée importante à l'heure où notre dette publique dépasse les 3 000 milliards d'euros et où il nous est difficile de réduire notre déficit public.

Je rappelle que la GUL n'offre pas aux propriétaires toutes les protections juridiques garanties par Visale et par les GLI. Si vous entendez les introduire dans le dispositif, ce n'est pas 1,4 milliard d'euros que vous devrez mettre sur la table, mais bien 2 ou 2,5 milliards d'euros.

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Je n'ai entendu aucune proposition de la majorité consistant à élargir le champ d'application du dispositif Visale. Vous auriez pu aussi déposer des amendements pour ouvrir le débat. En tout état de cause, cet élargissement aurait un coût pour l'État, puisqu'il est le garant en dernier ressort des garanties délivrées par Action Logement.

Pour en revenir à l'amendement, avis favorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CE7 de Mme Cyrielle Chatelain et CE1 de M. Stéphane Peu (discussion commune)

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L'alinéa 2 de l'article 1er de la proposition définit la garantie universelle des loyers comme prémunissant les bailleurs contre les impayés de loyer. Cette protection est un élément constitutif de la relation de confiance entre propriétaires et locataires.

Mais la GUL protège aussi les locataires, en leur permettant de se maintenir dans leur logement et en garantissant aux candidats à la location des chances égales d'y accéder. Il est donc important de compléter cet alinéa en précisant que la GUL « contribue à l'égalité d'accès aux logements pour les locataires ».

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L'amendement souligne l'équilibre des garanties que le texte prévoit d'accorder aux propriétaires et aux locataires. Il contribue également à la prévention des expulsions, dont l'accroissement ne saurait nous satisfaire.

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Cette proposition de loi et ces amendements procèdent d'une volonté de culpabiliser les propriétaires. Selon l'exposé des motifs, il faudrait rééquilibrer en faveur des locataires le dispositif de la loi du 6 juillet 1989, car les propriétaires exigeraient des « garanties financières irréalistes et le plus souvent illégales » ou « abusives ». Il serait donc nécessaire de les sanctionner. Cette approche me paraît très éloignée de la réalité et j'appelle à voter contre ces amendements.

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Pour ma part, je suis favorable aux deux amendements.

Selon M. Labaronne, il suffirait d'augmenter le nombre des bénéficiaires du dispositif Visale, supposé ne rien coûter à l'État. Mais chacun sait qu'il n'y a pas d'argent magique dans notre pays. Visale est financé par le groupe Action logement, dont les ressources sont issues de la participation des employeurs à l'effort de construction, à hauteur de 0,45 % de la masse salariale. C'est l'argent des salariés et des employeurs qui alimente Visale et son élargissement impliquerait de transférer cet argent des programmes de construction de logements sociaux d'Action logement, par exemple, vers le développement du cautionnement.

Il n'est donc pas acceptable de balayer d'un revers de main la question des ressources financières nécessaires à la garantie contre les impayés en prétendant que Visale s'en chargera : il faudra bien trouver l'argent quelque part.

Du reste, au vu du niveau des impayés, le coût des mesures prévues par la proposition ne sera pas aussi élevé que vous le suggérez.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CE18 de M. Stéphane Delautrette

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Cet amendement tend à exclure le logement social du champ d'application de la GUL, considérant que les bailleurs sociaux ne demandent aucune garantie à leurs locataires et qu'ils s'appuient sur des mécanismes internes efficaces de prévention et de lutte contre les impayés, auxquels il convient de ne pas toucher.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE16 de M. Stéphane Delautrette

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Par cet amendement de réécriture, nous rappelons, à la demande même des professionnels de l'immobilier, que les propriétaires doivent respecter les règles de décence et d'encadrement des loyers pour pouvoir bénéficier de la GUL. Cela va sans dire, mais cela va toujours mieux en le disant.

Nous supprimons également toute référence aux assurances privées et au cautionnement, étant entendu que la GUL doit être l'unique outil de sécurisation des propriétaires.

Nous précisons enfin qu'un locataire endetté auprès de l'agence de la GUL doit signer un plan d'apurement avec elle pour en bénéficier une nouvelle fois : la GUL n'est pas un droit à l'impayé de loyer.

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Nous pourrions nous abstenir, car cet amendement, comme l'amendement CE18, est de bon sens.

Je saisis l'occasion de rappeler que la proposition comporte quarante-cinq paragraphes et renvoie à une multitude de décrets, et les amendements que nous examinons tendent à raffiner encore son dispositif. Une des critiques émises à l'encontre de la loi Alur était son aspect d' « usine à gaz » et c'est cette même usine que nous retrouvons aujourd'hui. Le texte, qui prétend susciter la confiance des propriétaires, instaure en fait une administration compliquée qui ne favorisera pas cette confiance.

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À entendre votre exposé, je crains que vous ne votiez guère de textes dans les semaines à venir.

Je crois que vous n'avez pas saisi le sens de la proposition, dont la rédaction permettait à chacun de déposer des amendements de sorte que s'engage une discussion de laquelle sortirait un dispositif convenant à tout le monde et apaisant les inquiétudes dont vous nous faites part. Je regrette que vous n'ayez pas saisi cette occasion.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE9 de Mme Cyrielle Chatelain

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Dans la suite des précédents amendements déposés par mon groupe, celui-ci tend à rendre la GUL obligatoire, condition indispensable à son bon fonctionnement. Toute dérogation amoindrirait la protection que nous entendons garantir. C'est en effet dans la mesure où la GUL permet la mutualisation des risques qu'elle est au fondement d'une sécurité sociale du logement. L'État doit être l'unique garant du risque d'impayé de loyer, à l'exclusion de tout dispositif alternatif ou cumulatif.

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Je regrette que nos amendements précédents aient été rejetés. Dans la mesure où les GLI privées, du fait de ces rejets, n'ont pas été interdites, l'adoption de l'amendement reviendrait à autoriser les propriétaires à combiner la GUL avec le recours à une assurance privée, ce qui ne me paraît pas nécessairement souhaitable. Puisque je partage votre objectif, je suis néanmoins favorable.

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Une telle obligation n'est pas inscrite dans la loi Alur. Elle est inconstitutionnelle et contraire au droit européen. Elle rencontrerait des obstacles juridiques, du fait même de l'existence de garanties privées et de la garantie d'Action logement.

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La sécurité sociale est obligatoire sans pour autant s'opposer à la Constitution.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE5 de M. William Martinet

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Cet amendement tend à affirmer l'universalité de la GUL en supprimant l'alinéa 14, qui crée une situation d'exception pour les étudiants et les apprentis. Il autorise en effet les bailleurs à leur demander un cautionnement qui s'ajoute à la GUL, alors qu'ils subissent de la manière la plus dure les inégalités et la reproduction sociale, puisqu'ils sont discriminés en fonction du revenu de leurs parents et de leur capacité à bénéficier d'un cautionnement élevé, généralement familial.

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J'y suis favorable, puisque je l'étais à l'amendement CE10 visant à interdire toute forme de cautionnement.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE2 de M. Stéphane Peu

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La loi Alur prévoyait la possibilité de majorer le montant maximal de l'aide versée au titre de la GUL pour les étudiants, les apprentis, les salariés en CDD, les demandeurs d'emploi, en somme tous ceux qui se trouvent dans une situation sociale difficile. L'amendement tend à introduire cette possibilité.

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Cette majoration peut se justifier, dans la mesure où elle rassurerait les propriétaires et les inciterait à louer leurs biens aux publics réputés fragiles. Je m'interroge cependant sur les discriminations que ces publics pourraient subir, dans la mesure où le simple fait de se voir appliquer cette majoration les désignerait comme tels. C'est le cas des bénéficiaires du dispositif Visale. Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

L'amendement est retiré.

La commission rejette l'amendement rédactionnel CE13 de M. Stéphane Delautrette, rapporteur.

Amendement CE6 de Mme Cyrielle Chatelain

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L'agence de la GUL que le texte prévoit de créer aurait la capacité de financer des actions d'accompagnement social des locataires en situation d'impayé, mais elle constituerait aussi un outil de prévention des impayés et du surendettement engendrés par l'augmentation du prix de l'énergie et des loyers qu'entraîne l'inflation. À cette fin, il conviendrait que cette agence identifie les locataires qui courent un risque de défaut de paiement et d'accumulation de dettes, donc, à terme, d'expulsion.

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Votre amendement permet de revenir sur l'un des volets importants de la proposition de loi, l'accompagnement des publics, au lieu de focaliser notre discussion sur les impayés. Mieux vaut prévenir qu'agir, en effet. Avis favorable.

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Action logement mène déjà cette action de prévention et d'accompagnement social. Vous souhaitez créer une agence étatique pour appliquer un dispositif existant, qui n'a d'ailleurs cessé de s'élargir, avec l'avance Loca-Pass – un prêt sans intérêt dont le montant peut atteindre 1 200 euros pour financer le dépôt de garantie – et la garantie Visale, qui offre un garant à 100 % gratuit.

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Votre intervention conforte le bien-fondé de mon amendement, qui vise à étendre à tous les locataires ce qui existe et fonctionne pour quelques-uns. Les problèmes de santé graves, les séparations peuvent arriver à chacun d'entre nous. L'objectif n'est pas de complexifier le système mais de proposer une garantie à tous. Si vous êtes convaincu qu'Action logement aide des ménages et protège des propriétaires, adoptez mon amendement !

La commission rejette l'amendement.

Elle rejette l'amendement rédactionnel CE14 de M. Stéphane Delautrette, rapporteur.

Amendements CE15 de M. Stéphane Delautrette et CE4 de M. William Martinet (discussion commune)

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À la suite des auditions avec les organisations représentatives des bailleurs privés et des locataires, nous avons souhaité compléter la composition du conseil d'administration de l'agence en charge de la GUL, en y intégrant des représentants des bailleurs privés et des locataires.

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Mon amendement va également dans le sens d'une gestion paritaire par les premiers concernés. Je le retire au profit de celui du rapporteur.

L'amendement CE4 est retiré.

La commission rejette l'amendement CE15.

Elle rejette successivement les amendements rédactionnels CE12 et CE11 de M. Stéphane Delautrette, rapporteur.

La commission rejette l'article 1er.

Article 2 : Gage

La commission rejette l'article 2.

En conséquence, l'ensemble de la proposition de loi est rejeté.

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Nous avons tout intérêt à prolonger nos discussions sur la garantie des loyers. Les échanges de ce matin ont démontré que la question n'était pas réglée. Ce sont 300 000 logements qui pourraient être remis sur le marché. Notre nouveau ministre n'est pas insensible au sujet et nous pourrons faire évoluer les choses, en travaillant ensemble.

La commission des affaires économiques a procédé à l'examen de la proposition de loi créant, face à la précarité alimentaire, des territoires zéro faim (n° 2064) (M. Guillaume Garot, rapporteur)

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Sur ce texte, deux amendements ont été déclarés irrecevables au titre de l'article 40 ; un constituait un cavalier législatif.

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Monsieur le président, à mon tour, je vous félicite de votre élection.

Au moment où nous parlons, un Français sur six n'arrive pas à se nourrir correctement. Nous sommes la septième puissance économique mondiale et la première puissance agricole de l'Union européenne, mais 10 millions de Français n'arrivent pas ou peinent à faire trois repas par jour. Qui sont-ils ? Vous les connaissez comme moi : des retraités avec de petites pensions, des mamans ou des papas seuls avec leurs enfants, des jeunes, des étudiants, qui sont parfois juste au-dessus du niveau requis pour toucher les bourses. Plus alarmant encore, ce sont les travailleurs pauvres, même en CDI, dont les banques alimentaires nous disent qu'ils représentent 10 % de leurs bénéficiaires. Telle est la réalité de la précarité alimentaire, qui n'a cessé de croître ces dernières années, dans un contexte marqué par une forte inflation sur les produits alimentaires, de base en particulier.

Comment agir ? Il faudrait tout d'abord une politique des salaires à l'échelle de notre pays, afin de mieux rémunérer le travail. Au-delà, il nous faut aussi mener une action volontariste ciblée contre la précarité alimentaire. Nous vous proposons ce matin de faire le choix de mesures simples, concrètes et applicables immédiatement, avec un objectif simple à énoncer mais très ambitieux : éradiquer la précarité alimentaire dans ce que nous appelons les « territoires zéro faim ». Je veux dire d'emblée que cette mesure a été adoptée en commission des finances, au mois de novembre dernier, mais n'a pas été retenue dans le cadre du 49.3.

« Territoires zéro faim » répond à deux constats : le besoin d'une mobilisation générale des acteurs et la multiplicité des manifestations de la précarité alimentaire. Il n'y a pas que la faim, il y a aussi les soucis de santé causés par une mauvaise alimentation – l'obésité, qui progresse en particulier chez les enfants et les jeunes, les maladies cardiovasculaires. Il s'agit de mobiliser tous les moyens, les acteurs et les leviers possibles dans nos politiques publiques pour l'éradiquer. Telle est l'ambition que nous nourrissons pour dix territoires, avec l'aide de l'État, aide financière et en ingénierie, afin de mettre en œuvre des actions concrètes, convergentes et puissantes.

Quelles sont-elles ? Première action : la généralisation de la tarification sociale dans les cantines des écoles, des collèges et des lycées, selon le quotient familial, qui constitue un référent très juste. Deuxième action : le repas à 1 euro pour les étudiants. Actuellement, il est réservé aux élèves boursiers, mais la précarité – l'idée de se nourrir de pâtes et de riz à longueur de semaine – ne touche pas que ceux-là. Troisième action : l'expérimentation du chèque alimentation durable, une proposition longuement débattue avant d'être remisée au mois de janvier par le Président de la République. Ce chèque donne la possibilité d'acheter notamment des fruits et des légumes aux producteurs locaux. S'il pose des questions techniques, des réponses existent. Quatrième action : l'éducation à l'alimentation. Cuisiner des produits bruts, cela s'apprend, tout comme la lutte contre le gaspillage alimentaire. Cinquième action : le renfort du soutien aux acteurs de l'aide alimentaire. Sixième action : la création d'une offre alimentaire dans certains territoires, en particulier dans ceux qui offrent des produits locaux, frais et sains.

Ma liste n'est pas limitative. Ce sera aussi aux « territoires zéro faim » de définir les actions qu'ils souhaiteront mettre en œuvre. Une synergie locale doit s'enclencher. Ces pistes ne font qu'orienter le travail et doivent permettre aux territoires de faire converger et de rendre plus efficaces les différentes actions.

La gouvernance est importante. Il est essentiel de mettre autour d'une table une diversité d'acteurs qui n'ont pas toujours l'habitude de travailler ensemble : les collectivités locales, pour la volonté politique, les associations d'aide alimentaire, sans lesquelles rien n'est possible, mais aussi les producteurs, les acteurs économiques. Les auditions nous ont montré que les associations d'éducation populaire avaient un vrai rôle à jouer. Les projets alimentaires territoriaux (PAT), que les territoires qui en disposent pourront enrichir, sont un vrai point d'appui – ce n'est pas Stéphane Travert qui me contredira.

Enfin, si c'est bien d'associer les acteurs, c'est encore mieux d'associer les citoyens. J'ai été président du Conseil national de l'alimentation (CNA), où nous avons mené un très beau travail sur la précarité alimentaire, en nous appuyant sur la parole des personnes concernées. On va plus vite ainsi. Plus de démocratie, c'est plus d'efficacité face à la précarité alimentaire.

Ce qui compte, c'est de mettre les gens autour de la même table, de prendre le problème à la racine et de considérer qu'il n'y aura pas de résultat sans accompagnement social. La précarité alimentaire s'accompagne d'autres précarités, qu'il s'agisse de la santé ou du logement. Il faut prévoir un accompagnement dans la durée des personnes concernées, parce que c'est ainsi que l'on est efficace.

Une deuxième disposition concerne une aide nationale aux associations de solidarité, aux centres communaux d'action sociale (CCAS), aux centres intercommunaux d'action sociale (CIAS), à ceux qui ont un rôle dans l'accompagnement des personnes. Je vous propose une TVA à 0 %, compatible avec la réglementation européenne, pour leurs achats de denrées alimentaires. Ce serait un vrai geste de solidarité de la nation. Des efforts ont déjà été faits, notamment avec « Mieux manger pour tous », mais les associations nous disent qu'elles rencontrent de vraies difficultés tous les jours – un grand réseau national l'a d'ailleurs dit avant sa collecte de décembre. Les associations reçoivent des dons – et j'ai été l'un des acteurs de cette politique grâce à une loi contre le gaspillage alimentaire, adoptée à l'unanimité en 2016, qui avait permis de leur donner davantage d'invendus des grandes surfaces – mais la précarité est si forte qu'il faut pouvoir les aider de façon directe et puissante.

Pour conclure, les « territoires zéro faim » constituent une expérimentation qui concernera dix territoires. Qui dit expérimentation dit évaluation, en vue d'une généralisation, en fonction de ce qui aura marché ou non. C'est une belle façon de fabriquer la loi que de travailler dans l'ordre.

J'ai une conviction toute simple : la nourriture n'est pas une marchandise comme les autres ; elle est un bien commun, qui nécessite de définir des politiques adaptées et volontaristes. Si l'on considère que la précarité alimentaire est un risque social, il faut la combattre comme tel. J'espère que ces dispositions ambitieuses emporteront l'adhésion la plus large dans notre commission ce matin.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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La proposition de loi entend faciliter le déploiement de l'aide alimentaire grâce à deux grandes mesures : l'instauration d'une TVA à 0 % sur les achats effectués par les banques alimentaires et la création d'une expérimentation territoriale au sein de laquelle se cumuleraient différents dispositifs d'aide alimentaire, dont la progressivité des tarifs de la restauration scolaire, le repas à 1 euro pour tous les étudiants et la création d'un chèque alimentation durable destiné en priorité aux publics les plus fragiles.

À titre personnel, je trouve pertinente la proposition de la TVA à 0 % sur les achats des banques alimentaires, d'autant qu'ils sont parfois directement subventionnés par l'État – une disposition de ce type existe déjà, d'ailleurs, sur les dons pratiqués par la grande distribution. Je regrette cependant que nous n'ayons que peu d'informations sur l'impact financier d'une telle mesure, aussi bien pour l'État que pour les banques alimentaires, même si je sais que cela n'est pas de votre fait, monsieur le rapporteur.

L'article 2 prévoit de mobiliser l'ensemble des leviers à la disposition de l'État sur un même territoire. C'est intéressant, car nombre d'approches de l'aide alimentaire sont complémentaires, mais c'est déjà possible : tel est le sens, d'ailleurs, du plan « Mieux manger pour tous », doté de 60 millions d'euros, qui soutient les alliances locales entre associations, producteurs et collectivités.

Vous proposez d'expérimenter le chèque alimentaire durable. Or une expérimentation de ce type est en cours en Seine-Saint-Denis. De même, l'État soutient la tarification sociale dans les cantines des communes les plus pauvres et subventionne, à hauteur de 3 euros, les repas facturés au tarif social de 1 euro maximum.

Enfin, vous proposez de supprimer le critère du revenu pour le bénéfice de la tarification très sociale du repas étudiant à 1 euro. Nous en avons débattu lors d'une précédente niche : notre position n'a pas évolué. Les étudiants qui n'ont pas accès à la tarification très sociale à 1 euro bénéficient d'une tarification sociale à 3,30 euros pour un coût réel du repas de 8 à 9 euros.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre l'article 2.

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La TVA à 0 % est une attente très forte de toutes les associations. Je ne nie pas qu'un travail a déjà été accompli, que des moyens ont été mis sur la table, en particulier dans le cadre du plan « Mieux manger pour tous ». Mais on est encore loin du compte. Il faut être capable d'ériger la lutte contre la précarité alimentaire au rang de priorité de politique publique ; cela réclame des moyens importants qui, dans la proposition de loi, sont ciblés. Certes, l'évaluation en est difficile, car je n'ai pas eu accès aux informations que j'aurais souhaitées. En tout état de cause, l'instauration de la TVA à 0 % serait considérée comme un geste politique de solidarité nationale vis-à-vis des bénévoles qui s'investissent très activement.

Je plaide de la même façon en faveur du dispositif des « territoires zéro faim », qui partage avec le plan Mieux manger pour tous l'idée d'une approche locale. Toutefois, si ce dernier consacre 20 millions d'euros à des expérimentations locales et 40 millions à des actions nationales, il comporte des insuffisances sur lesquelles je reviendrai.

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En France, en 2024, un habitant sur six ne mange pas à sa faim. Le taux de pauvreté s'élève, selon l'Insee, à 14,5 %. Cette situation indigne de notre pays est le résultat de longues années de désindustrialisation, qui ont conduit à l'appauvrissement des Français, au chômage toujours élevé, à la stagnation des salaires, à la crise du logement, à un mondialisme naïf qui ouvre notre marché à toutes les concurrences déloyales et finance les emplois et les productions de nos concurrents. Dans mon département de la Meuse, lors de mes visites à la banque alimentaire, j'ai constaté une augmentation de 50 % du nombre de demandeurs, passés de 2 000 à 3 000.

Vous proposez un dispositif de territoires zéro faim, un chèque alimentation durable et l'instauration de la TVA à 0 % pour les produits vendus à des associations d'aide alimentaire. Encore un territoire zéro quelque chose… En fait, vous réinventez la charité publique. Vous réservez un taux nul de TVA aux seules associations d'aide alimentaire, ce qui est une source potentielle de dérives, sans compter que ceux qui en ont le plus besoin n'osent pas toujours s'adresser à celles-ci. C'est une stigmatisation et une atteinte à la dignité des personnes. De notre côté, nous proposons une TVA à 0 % pour tous les Français sur un panier de 100 produits de première nécessité.

Concernant le chèque que vous proposez, notons que la promesse électorale d'un chèque alimentation n'a pas été tenue par Emmanuel Macron.

Les expérimentations du dispositif « territoires zéro faim » relèvent d'une mise en œuvre technocratique à l'efficacité douteuse. Si vos intentions sont louables, les conditions d'une bonne application de ces mesures ne nous paraissent pas réunies. Les solutions reposent, comme toujours, sur la dépense publique, donc sur toujours plus d'impôts, d'emprunts et, in fine, d'appauvrissement de la France et des Français.

Pour le Rassemblement national, un territoire zéro faim, c'est une France qui aura retrouvé sa puissance économique, sa souveraineté et son ambition en faveur des Français, notamment les plus modestes et les plus précaires. Par nos amendements, nous proposerons d'en redresser un peu le tracé. À moins qu'ils ne soient adoptés, nous nous abstiendrons sur la proposition de loi.

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Notre proposition n'entraîne aucune stigmatisation, car les actions à mener sont diverses. La TVA à 0 % est nécessaire pour les associations de solidarité. Je proposerai d'y ajouter les centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS), qui achètent également des denrées, en particulier des produits frais.

Pour revenir au plan « Mieux manger pour tous », il soutient telle ou telle action à l'échelon local, mais il n'est pas porteur d'une dynamique puissante sur le territoire car il ne fait pas converger différentes actions, contrairement à ce que prévoit le dispositif « territoires zéro faim ». Ce dernier vise à articuler, au même moment, sur un même territoire, tous les dispositifs possibles, et laisse la faculté au territoire de choisir ses actions ou d'en inventer de nouvelles.

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Nous voterons la proposition de loi avec enthousiasme, car il est évident que, partout dans le monde, la politique publique devrait se fixer pour objectif premier l'éradication de la faim. C'est la base de la communauté nationale. Or, depuis 2016, soit peu ou prou depuis l'accession au pouvoir d'Emmanuel Macron, le nombre de personnes disant ne pas manger à leur faim a doublé dans notre pays, ce qui est pour le moins choquant. Cela marque l'échec d'une politique publique mais aussi la culpabilité d'une vision du monde qui, d'un côté, laisse croître le nombre de personnes qui ont faim, et, de l'autre côté, permet à d'autres de se gaver monstrueusement sur le dos des consommateurs et des producteurs, comme l'illustre la crise agricole. Face à cela, il faut agir, et je me réjouis que des propositions de loi soient régulièrement déposées pour en rappeler l'urgence. Vous pourrez bien les rejeter à coup de 49.3 ou les bloquer de toute autre façon, elles reviendront sans cesse. Je remercie M. le rapporteur de proposer ce dispositif qui vaut la peine d'être testé. Partout où on peut le faire, il faut s'attaquer à la faim. On ne l'éradiquera pas en saupoudrant des aides.

L'article 2 prévoit l'expérimentation des « territoires zéro faim », sur le modèle des « territoires zéro chômeur de longue durée », un dispositif dont tous les acteurs du monde de l'insertion professionnelle reconnaissent qu'il fonctionne très bien. Notre pays ne s'attaque pas à ce sujet, malgré toutes les alertes. Comme l'a dénoncé le député européen Younous Omarjee, la France a sous-consommé les crédits accordés par le Fonds européen d'aide aux plus démunis, laissant 202 millions inutilisés. Les autorités françaises ont ensuite négocié une prolongation pour essayer de rattraper leur retard.

La proposition de loi nous offre l'occasion d'essayer ce dispositif avant de le généraliser – aussi vite, je l'espère, que l'obligation pour les bénéficiaires du RSA de travailler 15 à 20 heures par semaine !

Nous proposons deux amendements, dont l'un vise à permettre l'expérimentation du bouclier qualité prix (BQP), dispositif actuellement circonscrit aux outre-mer, dans le reste du pays, au sein des territoires zéro faim.

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Je partage vos constats. Il faut remettre le sujet de la lutte contre la précarité à l'agenda de l'action publique. Le texte s'inspire en effet de l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée », qui produit des résultats très positifs à l'échelle des territoires et redonne de la dignité à chacun. Il faut tester, généraliser et, surtout, ne jamais baisser les bras.

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L'urgence à agir devient chaque jour plus prégnante, alors que les difficultés sociales de notre pays exacerbent les tensions sur le plan agricole et alimentaire tout en accentuant les pressions sur le pouvoir d'achat des Français. Cette situation compromet sérieusement leur capacité à accéder à une alimentation de qualité et durable, ce qui oblige les pouvoirs publics à apporter une réponse à la précarité alimentaire, définie par l'Unesco comme la « conjonction entre une situation de pauvreté économique et une série d'empêchements sociaux, culturels et politiques dans l'accès à une alimentation durable ». Les chiffres, alarmants, témoignent d'une augmentation de 30 % de la précarité alimentaire en moins d'un an ; 16 % des Français déclarent ne pas avoir assez à manger, selon le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Credoc).

Au fil des ans, pourtant, l'engagement de l'État dans la lutte contre la précarité alimentaire a diminué. Les politiques publiques peinent à coordonner les dispositifs, souvent dispersés et placés sous la tutelle de différents ministères, et souffrent d'un manque de réflexion globale sur les moyens à appliquer. L'aide alimentaire en pâtit. Des organisations telles que les Restos du cœur font face à des difficultés financières et opérationnelles. Je ne parle pas du chèque alimentaire, arlésienne du précédent quinquennat, qui a été remisé.

Bien qu'elle vise à répondre à cette urgence, votre proposition de loi présente quelques défauts. Imposer des solutions uniformes à des territoires ayant des contraintes totalement différentes n'est pas une solution viable. Nous croyons fermement que la volonté de l'État doit être soutenue, mais nous insistons sur le rôle essentiel des collectivités territoriales dans la conception et l'application de mesures adaptées aux besoins spécifiques de leur territoire. Pour qu'elle soit un succès, l'expérimentation doit s'appuyer sur des territoires bien structurés. C'est pourquoi j'ai proposé de rendre éligibles à l'expérimentation ceux qui sont dotés d'un projet alimentaire territorial. Cette approche permettrait une meilleure adaptation des mesures aux réalités locales et une coordination plus efficace entre les acteurs.

Par ailleurs, la proposition de loi omet l'éducation à l'agriculture parmi les actions éducatives proposées à l'article 2. Celle-ci serait l'occasion de rappeler, par exemple, ce qu'est la saisonnalité des produits. L'augmentation de la précarité alimentaire se traduit aussi par une baisse de la qualité des produits achetés par les consommateurs français. Le barème Ipsos-Secours populaire montre que 37 % des Français interrogés peinent à consommer des fruits et légumes frais tous les jours. La baisse de la qualité de la consommation de produits alimentaires fragilise la stratégie de montée en gamme de l'agriculture française et pose de graves problèmes en matière de santé publique. Une meilleure compréhension des processus agricoles peut contribuer à la réduction du gaspillage alimentaire et encourager la valorisation des produits locaux.

À titre personnel, je suis sensible à votre proposition de loi, mais, collectivement, notre groupe ne votera pas en faveur du texte. Il nous paraît en effet plus pertinent de relancer le pouvoir d'achat et de réduire les dépenses publiques pour lutter efficacement contre la précarité alimentaire.

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Nous n'imposons rien à personne : les territoires sont candidats sur la base de leur projet et ce sont eux qui définissent les actions à mener dans le cadre de l'expérimentation. Je donnerai un avis favorable à votre amendement qui vise à faire figurer l'éducation à l'agriculture parmi les actions éducatives envisagées ; cela constituerait une véritable avancée.

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La lutte contre la précarité alimentaire doit rester une priorité pour notre majorité, dans un contexte marqué par la hausse persistante, depuis plusieurs années, du prix des denrées alimentaires. Monsieur le rapporteur, je salue votre engagement de longue date en faveur de la lutte contre le gaspillage et la précarité alimentaires. On a enfin constaté, au cours des derniers mois, une baisse de l'inflation, voire la diminution de certains prix. Le Gouvernement reste toutefois vigilant ; il entend s'assurer que cette trajectoire se confirme. Ces baisses de prix, en tout état de cause, ne sauraient se réaliser sur le dos de nos agriculteurs.

À l'article 1er, la proposition d'exonération de TVA sur les achats de denrées par les associations nous paraît une mesure intéressante. Il pourrait être utile de l'étudier dans le cadre d'un projet de loi de finances (PLF) afin de déterminer son coût. Nous ne saurions nous opposer à une mesure de nature à limiter les coûts d'approvisionnement des associations, mais ne devrions-nous pas nous interroger aussi sur la qualité des denrées et la récupération de la TVA, sachant qu'un taux nul peut constituer un problème au regard du droit européen ?

Des mesures existent d'ores et déjà. La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (Agec) dispense les entreprises réalisant des dons d'invendus alimentaires et non alimentaires neufs auprès de certaines associations et fondations reconnues d'utilité publique de procéder à la régularisation de la TVA. Cette dispense s'applique également aux dons effectués aux organismes non reconnus d'intérêt général, comme certaines banques alimentaires. Dans le cadre des démarches d'amélioration de la qualité des dons, le Gouvernement a, jusqu'à présent, conduit une politique essentiellement centrée sur l'aide directe aux banques alimentaires, comme en témoigne le plan Mieux manger pour tous.

Concernant l'article 2, je tiens à rappeler que les crédits de l'État affectés à la lutte contre la précarité alimentaire ont triplé depuis 2018, pour atteindre 182 millions d'euros en 2024. L'État a pris plusieurs initiatives. Dans le cadre de la tarification sociale à la cantine, instituée en 2019 dans les communes de moins de 10 000 habitants, l'État verse une aide égale à 3 euros par repas. Depuis le début de l'année, cette aide est portée à 4 euros dans les communes qui respectent les dispositions de la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (Egalim 1). Il est toutefois regrettable que très peu de communes sollicitent l'application de ce dispositif.

Dans les universités, l'État a institué en 2020 le repas à 1 euro pour les étudiants boursiers. Depuis l'an dernier, cette aide peut être attribuée aux étudiants non boursiers en situation de précarité qui en font la demande. En 2023, le programme Mieux manger pour tous, doté de 60 millions d'euros, permettra d'aider, au niveau national comme à l'échelon local, des structures d'aide alimentaire. Enfin, nous continuons à appuyer les PAT, qui offrent une réponse locale, avec des produits de qualité, dans les départements. Le groupe Démocrate travaille au renforcement de ce dispositif.

Nous saluons l'expérimentation soutenue par l'État, dès 2024, du chèque alimentaire auprès d'un panel de 1 350 personnes dans quatre communes de Seine-Saint-Denis. Elle représente un coût de 2,3 millions d'euros, et nous nous interrogeons sur ce que serait celui-ci si la mesure était généralisée à l'échelon national.

Nous sommes évidemment favorables à l'éducation à l'alimentation et à la lutte contre le gaspillage alimentaire.

Notre groupe réservera son vote final en fonction de l'évolution que connaîtra le texte.

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À mes yeux, la TVA à taux zéro est compatible avec le droit européen.

Vous avez évoqué la fiscalité sur les dons. Je propose, pour ma part, que l'on privilégie la fiscalité sur les achats des associations, afin que la nation exprime sa solidarité envers celles-ci.

On peut considérer que le dispositif « territoires zéro faim » est un prolongement de l'action engagée avec les PAT et « Mieux manger pour tous ». Il ne les efface pas, bien au contraire. Les PAT prennent tout leur sens dans les « territoires zéros faim ». Il faut faire converger tout cela.

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Il arrive à 36 % des Français de se priver pour que leurs enfants ne se retrouvent pas devant une assiette vide. À plusieurs reprises, le Gouvernement a annoncé l'institution d'un chèque alimentaire mais a finalement abandonné l'idée. Aussi les socialistes sont-ils fiers de défendre aux côtés de notre rapporteur cette proposition de loi, qui apporte des solutions concrètes au problème de la précarité alimentaire.

La crise sanitaire et la crise inflationniste ont successivement aggravé la situation. Selon le dernier baromètre de la pauvreté et de la précarité du Secours populaire, un Français sur trois n'est pas en mesure de se procurer une alimentation saine en quantité suffisante pour les trois repas de la journée. La conjugaison de la hausse de la demande d'aide alimentaire et de l'augmentation des coûts de fonctionnement des associations provoque un effet de ciseaux qui met en difficulté les acteurs incontournables de la lutte contre la précarité alimentaire. Les Restos du cœur, la Croix-Rouge et d'autres associations nous ont alertés sur leur incapacité à répondre aux besoins alimentaires.

Le texte propose d'instaurer un cadre pour l'expérimentation d'un dispositif participant à renforcer la réponse à l'urgence par l'aide alimentaire, mais aussi à coordonner, dans des « territoires zéro faim », des actions destinées à faire évoluer les systèmes alimentaires dans leur ensemble. Les territoires qui bénéficieront de l'expérimentation assureront la coordination des acteurs de l'alimentation et de la lutte contre la précarité alimentaire. Ils pourront instituer des dispositifs d'accès à l'alimentation et de démocratie alimentaire. L'objectif est de permettre au citoyen de s'emparer des questions relatives à l'alimentation, qui sont liées aux problématiques de santé et de protection de nos ressources naturelles. Il s'agit donc aussi d'interroger notre modèle agricole et notre modèle social.

Dans ce cadre, les territoires concernés bénéficieront d'un accompagnement renforcé de l'État, qui se traduira par un appui méthodologique et un soutien financier accru. L'animation est un point clé pour la mise en place des acteurs et des dynamiques territoriales. La proposition de loi offre une large palette de solutions, qui permet une adaptation des stratégies en fonction des spécificités des territoires. Plus largement, les mesures expérimentales et fiscales proposées ont vocation à contribuer au débat politique sur la lutte contre la précarité alimentaire, qui est à appréhender comme un véritable risque social. Nous voterons pour cette proposition de loi.

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On le voit avec l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée », l'ingénierie du projet à l'échelon local est essentielle. C'est pourquoi j'insiste, dans la proposition de loi, sur l'accompagnement méthodologique, qui doit aider le territoire à articuler les diverses actions : c'est une clé de la réussite.

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Que 10 millions de nos compatriotes ne mangent pas à leur faim, c'est là le grave problème, et votre texte devrait s'intituler « pour une alimentation saine accessible à tous ».

L'article 1er, qui propose une TVA à 0 % sur les achats de denrées par les associations d'aide alimentaire, mérite d'être soutenu. Vous êtes partisan de l'instauration d'une tarification sociale pour les cantines et les restaurants scolaires. De mon point de vue, cette mesure doit être étendue aux restaurants universitaires : dans les revenus des étudiants pris en compte doit être intégrée la nécessité dans laquelle ils se trouvent de solliciter l'aide de leur famille.

Nous savons les obstacles qu'a rencontrés le Gouvernement concernant le chèque alimentaire. Christiane Lambert, lorsqu'elle présidait la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) en soulignait aussi les difficultés de mise en œuvre.

Votre proposition mérite de poursuivre son parcours législatif. Je la soutiendrai au nom du groupe Horizons, sous réserve d'ajustements. L'éducation à l'alimentation doit être élargie à la bonne santé, car agriculture, alimentation et santé sont liées. Notre vote final dépendra des modifications apportées au texte, qui va dans le bon sens.

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Je suis évidemment prêt à travailler, d'ici à la séance, sur des ajustements, dès lors qu'ils s'inscrivent dans le cadre proposé. Je suis tout à fait d'accord sur le fait qu'une bonne alimentation, c'est une bonne santé et que cela commence par une bonne agriculture.

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« Dis-moi ce que tu manges, je te dirai ce que tu es », disait, il y a quelque 200 ans, un célèbre gastronome français. S'il savait qu'aujourd'hui, pour un Français sur six, cette assiette se vide, que pour 45 % d'entre eux, elle ne comprend pas de produits frais ou à haute valeur nutritionnelle, que 8 millions de nos concitoyens font appel à l'aide alimentaire, que 16 % des Français déclarent ne pas manger à leur faim et que près de 20 % des étudiants disent sauter des repas, il en conclurait que la France ne peut plus prétendre au titre de pays de la gastronomie.

Dans le même temps, 20 % des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté. C'est là un « en même temps » insupportable. Il nous faut répondre à la fois à la précarisation de nos concitoyens dans leur ensemble et à celle, spécifique, des agriculteurs. Je vous remercie, monsieur Garot, de proposer ce texte et d'essayer de répondre à l'urgence par une approche universelle, recouvrant un ensemble d'actions, au moyen de l'expérimentation. Cela nous semble pleinement pertinent, même si nous avons quelques remarques à faire sur le fond.

Le chèque alimentaire ne peut être une fin en soi. La logique de l'aide alimentaire d'urgence, qui a toujours été la réponse, ne règle pas les problèmes de la qualité et du choix démocratique de l'alimentation, ni celui du non-recours – un Français sur deux qui aurait besoin de l'aide alimentaire ne la sollicite pas. C'est pourquoi il faut commencer à travailler sur la question de la sécurité sociale alimentaire. Ambroise Croizat, père de la sécurité sociale, déclarait, devant l'Assemblée nationale : « L'ambition est d'assurer le bien-être de tous, de la naissance à la mort. De faire enfin de la vie autre chose qu'une charge ou un calvaire ». Il faut sortir l'alimentation des seules logiques du marché. L'alimentation ne doit pas être une charge et un calvaire. On expérimente déjà la sécurité sociale alimentaire dans trente territoires, parmi lesquels Montpellier. Elle repose sur trois principes : l'universalité ; la cotisation sociale, qui permettrait de financer cette sécurité sociale de manière structurelle et le choix démocratique des citoyens et des producteurs. Je proposerai un amendement visant à ouvrir la réflexion sur ce sujet.

Nous présenterons d'autres amendements d'ordre démocratique. Vous aviez proposé que l'Agence de services et de paiement (ASP) mette en œuvre le dispositif ; cela ne nous paraissait pas souhaitable, mais j'ai entendu que vous y renonceriez. Nous proposons, pour notre part, qu'un comité démocratique composé de citoyens fasse les choix alimentaires.

Nous soutiendrons le texte, en espérant qu'il constitue une ouverture vers une sécurité sociale de l'alimentation.

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Nous cherchons, avec ce texte, à répondre efficacement à l'urgence. Si certains le considèrent comme un jalon vers une sécurité sociale de l'alimentation, libre à eux de participer à l'expérimentation. C'est un sujet auxquels s'intéressent de nombreux territoires, et que nous avions aussi examiné dans le cadre du Conseil national de l'alimentation. Je ne suis pas certain qu'il soit tout à fait mûr mais il mérite d'être étudié, car c'est une piste très intéressante.

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Nous remercions Guillaume Garot et le groupe Socialistes pour cette proposition de loi, que nous voterons. En matière alimentaire comme en matière de logement, la précarité a de lourdes conséquences. Nous avons tous vu les files d'attente devant les associations et savons, grâce aux analyses du Credoc et du Secours populaire, que de plus en plus de gens dans notre pays mangent mal, ou pas assez.

Mon groupe souscrit pleinement à l'instauration d'une TVA à 0 % sur les produits destinés à l'aide alimentaire. Cette mesure ne sera cependant pas suffisante pour compenser l'effet de ciseaux que les associations subissent avec la baisse des dons et la hausse des prix : il faut aussi sanctuariser les aides publiques qui leur sont destinées. Nous avons tous été saisis par l'appel des Restaurants du cœur qui, à l'automne dernier, envisageaient de fermer des centres ou d'opérer un tri parmi les ayants droit.

Nous souscrivons aussi à l'expérimentation « territoires zéro faim », même si la proposition de loi de notre collègue Fatiha Keloua Hachi, visant à assurer un repas à 1 euro pour tous les étudiants, nous paraissait plus ambitieuse. En tant que député de Seine-Saint-Denis, je reconnais que certaines expérimentations sont intéressantes, comme celles relatives à la distribution d'un chèque alimentaire et à la gratuité de la cantine, qui permet aux enfants d'avoir au moins un repas convenable par jour.

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L'expérimentation vise à convaincre ceux qui ne sont pas convaincus. Certains craignent en effet que le repas de restaurant universitaire à 1 euro pour tous les étudiants ou la tarification sociale dans les cantines ne contribuent à dévaloriser l'alimentation, ; j'entends leurs craintes. Expérimenter ces mesures permettra de montrer qu'elles peuvent être mises en place, qu'elles sont efficaces et qu'elles répondent aussi bien à un enjeu social qu'à la préoccupation économique des producteurs. C'est aussi cela le sens de « territoires zéro faim ».

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Notre chaîne alimentaire est en souffrance. Ceux qui produisent ne parviennent plus à vivre de leur travail et ceux qui consomment sont de moins en moins nombreux à accéder à une alimentation suffisante et de qualité. La précarité s'installe aux deux bouts de la chaîne. L'alimentation devient la variable d'ajustement de budgets trop restreints. Les conséquences sont connues : la faim tiraille de plus en plus d'estomacs, des carences s'installent et les maladies liées à l'alimentation se multiplient. La situation est loin de s'améliorer. Le covid-19, puis l'inflation ont fait grossir les rangs des bénéficiaires de l'aide alimentaire : aux mères célibataires et aux retraités sont venus s'ajouter les étudiants et les personnes occupant un emploi précaire.

Face au constat d'une insécurité alimentaire croissante, le Gouvernement semble se résigner. Plutôt que de repenser le système alimentaire dans son ensemble, il cherche à panser les plaies. Des dons sont sollicités à droite et à gauche ; les budgets des associations d'aide alimentaire sont abondés in extremis : on se contente d'amortir la crise sociale. Je suis de ceux qui croient qu'une approche différente est possible et qui voient dans la sécurité sociale de l'alimentation une solution dans la lutte contre la faim. La présente proposition de loi pose ces premiers jalons ; notre groupe y est donc favorable.

Force est de constater que les actions de lutte contre la précarité alimentaire ne sont pas toujours intégrées à une stratégie globale et ne sont pas coordonnées à l'échelon local. Pourtant, quand les acteurs locaux se réunissent autour d'objectifs communs, les résultats sont là. Dans mon département, le groupement d'intérêt public Gers Solidaire mutualise les actions et offre ainsi une réponse aux problématiques d'inclusion avec, pour point d'entrée, l'aide alimentaire.

La généralisation de ce type d'initiatives à plus grande échelle à travers l'expérimentation « territoires zéro faim » est pleine de promesses : notre groupe soutiendra cette dernière, tout comme il soutient le chèque alimentaire – une promesse maintes fois renouvelée par le Gouvernement mais jamais tenue. Quant à l'application d'une TVA à 0 % pour l'achat de denrées alimentaires par les associations habilitées, elle relève du bon sens : en conséquence de la baisse des dons en nature et des collectes, celles-ci dépendent de plus en plus de leurs propres achats pour nourrir les bénéficiaires. Il est temps de recréer du commun autour de l'alimentation pour que plus personne ne soit exclu de la table.

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Avec David Taupiac, nous avons réalisé de nombreuses auditions et nos avis ont convergé sans difficulté sur des propositions de solutions qui nous étaient faites. L'exemple du Gers montre qu'il existe déjà une mobilisation formidable sur le terrain. Il faut donner un cadre à tous ces acteurs qui ont envie d'aller plus loin.

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De nombreuses études et expérimentations menées dans les pays voisins, notamment en Espagne en 2023, ont démontré qu'une baisse de la TVA n'était pas forcément répercutée sur le prix des produits et qu'elle risquait d'être inefficace. C'est en outre une réponse de court terme, alors que le problème nécessite une réponse plus globale et structurelle.

Par ailleurs, sur quels critères les territoires volontaires seront-ils choisis pour faire partie des dix territoires retenus ? Les territoires ruraux ne seront-ils pas oubliés au profit des territoires urbains, alors que les associations y sont moins structurées et moins présentes, et que les habitants y sont confrontés à des problèmes de mobilité ?

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Vous m'avez indiqué, monsieur le rapporteur, qu'il revenait aux territoires qui le souhaitent de tester l'idée d'une sécurité sociale alimentaire dans le cadre du dispositif territoires zéro faim. Pourtant, dans sa version actuelle, le texte ne laisse pas de place à ces expérimentations. Sans doute mériteraient-elles d'y être intégrées au cours du cheminement législatif du texte ?

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La France insoumise trouve cette proposition de loi très pertinente. Je m'interroge, quant à moi, sur son articulation avec les lois Egalim, qui ne sont pas respectées : 5 % seulement des établissements de restauration collective annoncent respecter l'objectif de 50 % de produits durables et de qualité, dont 20 % de produits biologiques. En outre, 50 % de la viande utilisée en restauration collective est importée, et cette proportion s'accroît. La marge de progrès est donc considérable. Dans ces conditions, pourquoi le Gouvernement ne soutient-il pas les dispositifs qui nous sont proposés aujourd'hui et ne fait-il pas respecter les lois Egalim ?

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D'après l'évaluation réalisée par le ministère de l'agriculture sur la base de 800 réponses, 23 % seulement des produits utilisés en restauration collective sont durables et de qualité. Sachant que les répondants sont souvent les plus motivés, ce taux ne dépasse sans doute pas 10 % à 15 % en réalité. Je rejoins donc Aurélie Trouvé : la première chose à faire, c'est de veiller à la bonne application des textes que nous avons votés.

Je voudrais vous féliciter, monsieur le rapporteur, pour l'action que vous avez menée en faveur de la lutte contre le gaspillage alimentaire : même si le combat n'est pas terminé, elle a placé la France au rang de pionnier à l'échelle européenne et mondiale. Vous ouvrez un nouveau chantier, celui de l'éducation à la santé. Je voudrais, à ce sujet, partager avec vous un chiffre issu de la commission d'enquête concernant les pesticides : pour 1 euro d'argent public dépensé dans ce domaine, 1 000 euros sont consacrés à la publicité par les acteurs privés. Un rééquilibrage est nécessaire.

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Pour répondre à notre collègue Dubois, le choix des territoires devra respecter un équilibre entre les territoires ruraux et urbains, d'une part, et métropolitains et ultramarins, d'autre part. C'est aussi la diversité qui devra caractériser les projets présentés, afin que divers dispositifs puissent être testés.

Ensuite, cher collègue Fournier, les projets visant à expérimenter une sécurité sociale de l'alimentation sont les bienvenus ! La formulation du texte est volontairement englobante, afin que soit respectée la liberté des acteurs en la matière.

S'agissant du respect des lois Egalim, madame Trouvé, je ne peux pas répondre à la place du Gouvernement – je préfère laisser Stéphane Travert le faire ! Un accompagnement des collectivités, sur le plan financier notamment, est sans doute nécessaire pour les aider à tenir les objectifs que nous leur avons assignés. Je crois possible de bâtir un consensus large à ce sujet pour tenter de convaincre ceux qui tiennent les cordons de la bourse.

Je suis, par ailleurs, très favorable à l'éducation à la santé et trouve très intéressante la proposition de Thierry Benoît d'allier éducation à l'alimentation, à l'agriculture et à la santé. Je propose de sous-amender l'amendement de M. Dive en ce sens.

Enfin, je ne connaissais pas le dernier chiffre que vient de citer Dominique Potier. Il est ahurissant et souligne la nécessité de rééquilibrer les moyens et d'affirmer ensemble une volonté politique.

Article 1er : Exonérer de TVA les livraisons de denrées alimentaires effectuées au profit des personnes habilitées à recevoir des contributions publiques destinées à la mise en œuvre de l'aide alimentaire

Amendement CE28 du rapporteur

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Cet amendement, qui répond à une demande exprimée par l'Union nationale des CCAS (UNCCAS), vise à élargir aux CCAS et aux CIAS le bénéfice de la TVA à 0 % sur les achats de denrées alimentaires destinés à des actions de solidarité.

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Je voudrais faire quelques observations à caractère général sur le principe d'une réduction à 0 % du taux de TVA. D'abord, c'est dans le cadre d'un projet de loi de finances qu'une telle mesure devrait être examinée, et non dans celui d'une proposition de loi. Par ailleurs, plus de la moitié des recettes de TVA se retrouvent ailleurs que dans les caisses de l'État, une partie étant notamment versée aux collectivités locales. Enfin, toutes les études ont démontré qu'une baisse du taux de TVA profite aux distributeurs ou aux producteurs qui l'empochent, mais jamais au consommateur final.

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Le dispositif proposé est intéressant pour les banques alimentaires, mais vous proposez de l'élargir considérablement. Avez-vous évalué son coût ?

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La fixation du taux de TVA relève d'un domaine partagé. La commission des finances a certes son mot à dire, mais celle des affaires économiques doit aussi pouvoir s'exprimer. Quant à l'estimation du coût du dispositif, je ne dispose pas de données à ce sujet pour le moment. Je rappelle néanmoins qu'il est ciblé, puisqu'il concerne les achats de denrées alimentaires par les associations, les CCAS et les CIAS, visant à compléter les dons reçus.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 1er ainsi modifié.

Article 2 : Expérimenter la mise en place de territoires dits « zéro faim »

Amendement CE29 du rapporteur

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Cet amendement vise à préciser que l'expérimentation a pour objet de coordonner les dispositifs et les actions mis en œuvre.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CE30 du rapporteur.

Amendement CE31 du rapporteur

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Cet amendement vise à préciser que les partenaires pouvant participer à l'expérimentation sont les collectivités, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), les CCAS, les CIAS, les associations d'aide alimentaire et les acteurs du monde économique, en particulier les agriculteurs. Il me semble important que ces derniers soient associés à la lutte contre la précarité alimentaire.

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Plus vous élargissez la liste des bénéficiaires du dispositif, plus celui-ci sera coûteux pour les finances publiques. C'est la raison pour laquelle je voterai contre cet amendement.

La commission adopte l'amendement.

Amendement CE16 de Mme Sophia Chikirou

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Cet amendement vise à étendre à l'ensemble des territoires concernés par l'expérimentation le bouclier qualité prix (BQP). Mis en place dans les territoires d'outre-mer depuis la loi dite « Lurel » de 2012 relative à la régulation économique outre-mer, le BQP permet de fixer les prix de certains produits sélectionnés à la suite d'une négociation entre les différents acteurs de la production, de la distribution et de la consommation. À La Réunion, cette négociation associe également des citoyens tirés au sort : c'est un processus collectif et démocratique.

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Le BQP fait partie de notre arsenal législatif, et l'intégrer à l'expérimentation permettrait d'en évaluer les effets dans les territoires concernés. Je suis donc favorable à l'amendement.

La commission rejette l'amendement.

Les amendements CE8 et CE7 de M. Tivoli sont retirés.

Amendement CE27 du rapporteur

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Il s'agit de préciser le dispositif du titre de paiement alimentation durable ; la formulation reste néanmoins suffisamment générale pour que l'expérimentation puisse porter sur divers types de produits éligibles.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'amendement CE4 de Mme Christine Engrand tombe.

Amendement CE14 de M. Julien Dive et sous-amendement CE45 du rapporteur

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L'amendement prévoit d'élargir à l'agriculture le champ des actions d'éducation prévues à l'article 2 : il semble en effet pertinent de présenter les différents systèmes agricoles et la saisonnalité de cette activité, par exemple. Je suis favorable à ce que l'on intègre aussi les questions de santé, comme l'a proposé notre collègue Thierry Benoit.

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Le sous-amendement CE45 reprend justement cette proposition. Je suis favorable à l'amendement de M. Dive ainsi sous-amendé, afin que les questions d'alimentation, d'agriculture et de santé soient traitées ensemble.

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L'article L. 1 du code rural et de la pêche maritime définit la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation dans ses dimensions internationales, européenne, nationale et territoriale. Un amendement adopté à mon initiative sous la précédente législature a enrichi la liste des finalités de cette politique, qui doit désormais favoriser « l'acquisition pendant l'enfance et l'adolescence d'une culture générale de l'alimentation soulignant les enjeux culturels, environnementaux, économiques et de santé publique liés aux choix alimentaires ». L'amendement et le sous-amendement me semblent donc déjà satisfaits.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l'amendement sous-amendé.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE32 et CE33 du rapporteur.

Amendement CE23 de M. Charles Fournier

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Je propose d'ajouter dans le texte que la lutte contre la précarité alimentaire intègre l'ambition d'une juste rémunération des agriculteurs au sens large et favorise la transformation agricole en soutenant ceux qui s'engagent dans la transition agroécologique – laquelle n'est pas forcément garantie par les circuits courts.

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Je n'ai rien contre cet amendement dont la rédaction est suffisamment vague pour que chacun puisse y lire ce qu'il veut. Pour ma part, je pense, d'un côté, aux arboriculteurs qui, les bonnes saisons, laissent pourrir les fruits sur les arbres faute d'avoir la capacité de les récolter et de les traiter, et, de l'autre côté, aux personnes qui ont des difficultés à vivre des minima sociaux. « Si tu donnes un poisson à un homme, il se nourrit une fois. Si tu lui apprends à pêcher, il se nourrira toute sa vie », dit le proverbe. Or ne serait-ce que pour ouvrir les vergers à des bénéficiaires du RSA et organiser des opérations de collecte, voire de transformation, c'est la croix et la bannière.

La part de l'alimentation dans le budget des Français a été quasiment divisée par deux depuis 1960. Chacun doit s'interroger sur la structure de son budget et sur la façon dont il s'alimente. Il y a beaucoup de choses à faire dans le domaine agricole ; encore faut-il cependant que nous soyons au rendez-vous de la revalorisation du travail.

La commission adopte l'amendement.

Amendement CE20 de Mme Sophia Chikirou

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De nombreuses associations témoignent du fait qu'en l'absence de contrôles, la loi de 2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire n'est appliquée que de façon parcellaire : certains distributeurs ne signent pas de conventions ou, lorsqu'ils le font, ne sélectionnent pas correctement les invendus à remettre aux associations. Celles-ci expliquent qu'elles ne récoltent plus suffisamment de dons pour satisfaire la demande, laquelle a explosé au cours des dernières années. Cet amendement propose donc de renforcer les contrôles.

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Je ne peux que souscrire à cette proposition. Il y a un véritable problème d'application de la loi de 2016, dont je rappelle que nous l'avions votée à l'unanimité, à mon initiative. Les acteurs de terrain attendent ce renforcement des contrôles : faisons-le !

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Cet amendement est tout à fait hors sol. Quel intérêt les distributeurs auraient-ils à ne pas donner leurs invendus, sachant qu'ils en tirent une bonification fiscale non négligeable ? S'ils ne le font pas, c'est à cause des contraintes qui pèsent sur eux – qu'elles soient liées au respect de la chaîne du froid ou qu'elles soient imposées par les associations elles-mêmes. La solution ne passera certainement pas par un renforcement des contrôles.

La commission adopte l'amendement.

Amendement CE34 rectifié du rapporteur

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Cet amendement précise que les partenaires de projets alimentaires territoriaux participent à la coordination et au suivi de l'expérimentation, comme le suggère M. Dive. Il vise également à inclure les associations d'éducation populaire, dont l'expertise pourra bénéficier aux actions d'éducation.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'amendement CE15 de M. Julien Dive tombe.

Amendement CE35 du rapporteur

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Il s'agit de rendre explicite que le chèque alimentation durable s'inscrit dans le cadre de l'expérimentation « territoires zéro faim ».

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CE36 du rapporteur.

Amendement CE37 du rapporteur

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Cet amendement vise à supprimer l'alinéa 15, qui prévoyait la distribution du chèque alimentation durable par l'intermédiaire de l'Agence de services et de paiement, afin de laisser aux acteurs locaux la plus grande liberté possible en la matière.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'amendement CE24 de M. Charles Fournier tombe.

Amendement CE38 du rapporteur

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Il s'agit de prévoir la possibilité d'une bonification du chèque alimentation durable lorsque celui est utilisé pour l'achat de produits frais, locaux ou de qualité. Ce dispositif, qui existe en Seine-Saint-Denis, permet de lier de façon très pragmatique agriculture, alimentation et santé.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'amendement CE25 de M. Charles Fournier tombe.

La commission adopte l'amendement de coordination CE39 du rapporteur.

Amendement CE40 du rapporteur

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Les associations nous mettent en garde en nous engageant à ne pas nous priver d'un accompagnement social car il existe, au-delà de la précarité alimentaire, d'autres précarités, touchant notamment à la santé et au logement, et il faut pouvoir les lier.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE41, CE42, CE43 et CE44 du rapporteur.

La commission adopte l'article 2 modifié.

Après l'article 2

Amendement CE26 de M. Charles Fournier

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Une proposition de loi d'expérimentation d'un dispositif de sécurité sociale de l'alimentation (SSA), comparable à celui qui s'applique aux « territoires zéro chômeur », serait nécessaire pour progresser en ce sens. La SSA opère une transformation profonde et structurelle en dégageant la question alimentaire de l'emprise du marché et en garantissant aux producteurs comme à nos concitoyens, de manière démocratique, un droit universel à l'alimentation.

L'amendement tend ainsi à la création d'un comité de préfiguration d'une commission de suivi de cette expérimentation. Il est temps d'engager ce travail.

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Avis favorable, dès lors que ce comité est créé sur la base de la volonté des acteurs. Il ne s'agit que de poser un jalon.

La commission adopte l'amendement.

Article 3 : Gage

La commission adopte l'article 3 non modifié.

Elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 14 février 2024 à 9 h 30

Présents. – M. Xavier Albertini, M. Antoine Armand, Mme Anne-Laure Babault, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, Mme Anne-Laure Blin, M. Philippe Bolo, M. Éric Bothorel, M. Jean-Luc Bourgeaux, M. Bertrand Bouyx, Mme Maud Bregeon, M. Anthony Brosse, Mme Danielle Brulebois, Mme Françoise Buffet, M. Sylvain Carrière, M. André Chassaigne, Mme Cyrielle Chatelain, Mme Sophia Chikirou, M. Romain Daubié, M. Stéphane Delautrette, M. Julien Dive, M. Francis Dubois, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Christine Engrand, M. Frédéric Falcon, M. Grégoire de Fournas, M. Charles Fournier, M. Guillaume Garot, Mme Florence Goulet, Mme Mathilde Hignet, M. Alexis Izard, M. Andy Kerbrat, M. Daniel Labaronne, Mme Julie Laernoes, M. Luc Lamirault, Mme Hélène Laporte, M. Pascal Lavergne, Mme Nicole Le Peih, M. Alexandre Loubet, M. Bastien Marchive, Mme Sandra Marsaud, M. Éric Martineau, M. William Martinet, M. Nicolas Meizonnet, M. Paul Midy, Mme Louise Morel, M. Jérôme Nury, M. Nicolas Pacquot, M. Patrice Perrot, M. Stéphane Peu, M. René Pilato, M. Dominique Potier, M. Richard Ramos, M. Jean-Hugues Ratenon, M. Charles Rodwell, M. Vincent Rolland, Mme Anaïs Sabatini, M. Benjamin Saint-Huile, Mme Laetitia Saint-Paul, M. David Taupiac, M. Matthias Tavel, Mme Huguette Tiegna, M. Lionel Tivoli, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé, M. Jean-Pierre Vigier, M. André Villiers

Excusés. – M. Tematai Le Gayic, M. Aurélien Lopez-Liguori, M. Max Mathiasin