Commission des affaires économiques

Réunion du lundi 6 mars 2023 à 21h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La commission des affaires économiques a poursuivi l'examen du projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (n° 762) (Mme Maud Bregeon, rapporteure).

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Chers collègues, nous reprenons l'examen du projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

Lorsque nous avons interrompu nos travaux, jeudi soir, nous venions de commencer l'examen des amendements à l'article 9A. J'avais appelé l'amendement CE533 de Mme Louise Morel et plusieurs des sous-amendements s'y rattachant. Toutefois, comme cet amendement et ces sous-amendements portent sur la sûreté nucléaire et préemptent le débat sur l'élargissement des missions de l'Autorité de sûreté nucléaire, qui aura lieu à l'occasion de l'examen des amendements du Gouvernement déposés après l'article 11, une majorité des groupes m'a invité à mettre fin à notre réunion pour reprendre nos débats ce lundi soir.

Afin d'assurer la lisibilité de nos travaux, le Gouvernement me fait savoir qu'il demande, en application de l'article 95, alinéa 4, du règlement, la priorité d'examen de ses amendements CE602 et CE610 portant article additionnel après l'article 11. Figurent également dans cet examen prioritaire les sous-amendements CE692, CE689, CE672, CE690, CE693 et CE684 se rattachant à l'amendement CE602 ; les amendements CE417, CE223 et CE289 qui sont en discussion commune avec l'amendement CE602 ; et enfin le sous-amendement CE691 qui porte sur l'amendement CE610.

Cette demande étant de droit, nous allons donc commencer par ces cinq amendements et ces sept sous-amendements. Lorsque le vote aura eu lieu, nous reprendrons nos travaux là où nous nous étions arrêtés jeudi soir, à savoir l'article 9A.

Après l'article 11 (amendements examinés par priorité)

Amendement CE602 du Gouvernement et sous-amendements CE692 de M. Gérard Leseul, sous-amendements identiques CE689 de Mme Maud Bregeon, CE672 de M. Pierre Henriet et CE690 de M. Aurélien Lopez-Liguori, sous-amendements CE693 de M. Gérard Leseul et CE684 de M. Olivier Marleix ; amendements CE417 de Mme Anna Pic, CE223 de M. Benjamin Saint-Huile et CE289 de M. Christophe Bex (discussion commune).

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Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique

Le dispositif français de réglementation, de contrôle, d'expertise et de recherche en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection n'a cessé d'évoluer dans le sens d'un renforcement de son indépendance, de ses capacités et de ses moyens.

L'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a été créé en 2002, alors que l'autorité de sûreté n'était encore qu'une direction d'administration et que l'expertise et la recherche en sûreté nucléaire étaient assurées par un exploitant nucléaire, à savoir le CEA (Commissariat à l'énergie atomique, devenu Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives). En 2006, c'est au tour de la direction d'administration exerçant la fonction d'autorité de sûreté nucléaire d'être confortée en devenant une autorité administrative indépendance : l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

À la veille de devoir engager des travaux considérables en matière de sûreté nucléaire, que ce soit sur les installations existantes, la gestion des déchets ou la construction de nouveaux réacteurs, il nous a paru important de rechercher à nouveau l'organisation correspondant aux meilleurs standards internationaux, tout en faisant évoluer une particularité française qui est que l'ASN ne dispose que de peu de compétences d'expertise. Certes, elles concernent les équipements les plus stratégiques d'un réacteur nucléaire – la cuve et les équipements sous pression – mais il est important pour l'ASN de disposer d'une expertise plus large, comme c'est le cas de toutes les autres autorités de sûreté nucléaire dans le monde – à l'exception de la Belgique ou de l'Allemagne. Cela est un gage d'indépendance, d'efficacité et de fluidité dans la prise de décision en matière de sûreté nucléaire.

Pour éclairer les débats, je voudrais indiquer qu'à l'international, l'ASN est l'autorité de sûreté qui a, comparativement, le moins de forces d'expertise au regard de ses missions : 500 personnes travaillent à l'ASN pour 56 réacteurs, à comparer aux 2 600 agents de l'autorité de sûreté américaine pour près de 100 réacteurs, 950 personnes au Canada pour 19 réacteurs et 300 personnes en Finlande et en Suède (pour moins de 10 réacteurs, dans les deux cas). La différence tient au poids des missions d'expertise, qui ne sont pas regroupées de la même manière.

Le deuxième objectif est d'assurer une meilleure coordination entre les métiers de la sûreté. Les équipes de l'ASN et de l'IRSN travaillent déjà largement ensemble, l'IRSN apportant son expertise aux équipes chargées du contrôle de l'ASN au travers d'itérations dans les deux sens, ainsi qu'un appui au contrôle. Nous voulons rendre ce travail plus fluide et assurer l'alignement des priorités du point de vue tant des moyens que du traitement des commandes de l'ASN par l'IRSN.

Le troisième objectif est d'améliorer l'attractivité des métiers de la sûreté nucléaire. À cet égard, la réunion des compétences de l'IRSN au sein de l'ASN sera une opportunité de diversifier, pour les collaborateurs de deux entités, les possibilités de carrière entre contrôle, expertise et recherche, ainsi que les possibilités de mobilité géographique grâce au réseau régional de l'ASN.

Début février 2023, j'ai demandé à M. Bernard Doroszczuk, président de l'ASN, et à M. Jean-Christophe Niel, directeur général de l'IRSN, de me faire des propositions pour définir le cadre général de la réforme et rassurer les salariés sur les enjeux en question. C'est l'objet des deux amendements que je défends ce soir. Par ailleurs, je leur ai demandé de piloter le travail sur l'organisation-cible sur laquelle ils me feront des propositions durant l'été, avec la perspective d'aboutir à des dispositions inscrites dans le projet de loi de finances pour 2024 et qui seront mises en œuvre dans les semaines qui suivront son adoption.

Dans le cadre de ces chantiers, je crois important de poser des garde-fous pour tenir compte des interrogations formulées par les organisations syndicales, l'Association nationale des comités et commissions locales d'information (ANCCLI) et l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst).

Je propose d'abord qu'il soit clairement établi que les compétences en matière de recherche et expertise en sûreté nucléaire, radioprotection, et protection et surveillance de l'environnement sont maintenues ensemble au sein de la future autorité de sûreté, dans le respect des règles d'indépendance applicables à cette dernière.

Ensuite, dans l'organisation à venir, les responsabilités exécutives du contrôle et de l'expertise doivent rester distinctes du rôle de décision et de pilotage stratégique confié au collège de l'ASN. C'est l'objet des sous-amendements identiques qui seront défendus notamment par le président de l'Opecst Pierre Henriet et par la rapporteure Maud Bregeon.

Enfin, l'information, la transparence et le dialogue technique avec le public devront être garantis dans la droite ligne de ce qui est fait aujourd'hui à l'IRSN et l'Autorité de sûreté nucléaire : il y va de la confiance des Français dans notre système.

Les deux amendements déposés par le Gouvernement intègrent les propositions de MM. Doroszczuk et Niel. L'amendement CE602 propose d'élargir les missions de l'ASN en lui confiant des missions d'expertise et de recherche dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, ainsi que des actions de sécurité civile en cas d'accident radiologique. Sur le modèle de la solution retenue lors de la transformation de Voies navigables de France d'établissement public industriel et commercial (Epic) en établissement public administratif (EPA), l'ASN pourra, d'une manière pérenne, disposer de plusieurs catégories de personnels : fonctionnaires, agents contractuels de droit public, agents contractuels de droit privé. Cela amplifiera l'attractivité de la future organisation. L'amendement prévoit également la création d'un comité social d'administration pour permettre la représentation de l'ensemble de ces personnels, dans la diversité de leurs statuts.

Par ailleurs, je donnerai un avis favorable aux sous-amendements identiques du président de l'Opecst et de la rapporteure, qui visent à inscrire dans le règlement intérieur des dispositions organisationnelles pour séparer le processus d'expertise des avis et des décisions du collège. Je donnerai également un avis favorable au sous-amendement du groupe Les Républicains, porté par son président Olivier Marleix, qui demande un rapport sur les éventuels impacts que les nouvelles prérogatives accordées à l'ASN peuvent avoir sur le système de contrôle de radioprotection et de sûreté nucléaire.

L'amendement CE610 vise, quant à lui, à sécuriser les personnels de l'IRSN. Il prévoit le transfert de droit à l'ASN des contrats de travail des agents qui exercent les missions concernées. Il ouvre par ailleurs, pour les agents de l'IRSN affectés à l'ASN, un droit d'option entre le maintien de leur contrat de droit privé et la conclusion d'un contrat de droit public. Cette disposition donne de la visibilité aux salariés de l'IRSN, qui sont en quasi-intégralité des salariés en contrat de droit privé, en leur assurant la continuité de leur rémunération.

Je souhaiterais insister sur le calendrier de cette réforme. Ces deux amendements sont le point de départ d'un processus de réorganisation. Pour se donner les moyens de lancer la réforme, il faut fixer un cap clair, en donnant dès maintenant aux salariés de l'IRSN de la visibilité, tout en affinant les détails dans le cadre d'un processus coconstruit et concerté.

Pour conclure, nous réunissons sous la même bannière deux services publics qui participent de la même politique de sûreté nucléaire, en retenant le statut le plus protecteur des deux entités, à savoir celui d'autorité administrative indépendante. Tel est l'enjeu de ces amendements qui renforceront la sûreté nucléaire de notre pays. C'est essentiel à la veille des travaux que nous devons engager.

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Madame la ministre, vous nous présentez ces deux amendements après le profond désaccord que nous avons eu sur la méthode, jeudi dernier. Il ne m'apparaît pas souhaitable d'inscrire par amendement dans la loi un tel projet de fusion qui structure nos autorités de contrôle, de surveillance et de confiance dans l'industrie nucléaire sans la moindre discussion préalable sérieuse au Parlement. L'Opecst a auditionné la plupart des acteurs de la filière nucléaire ; cela ne nous a pas rassurés quant aux motivations de cette réforme.

Le sous-amendement CE692 a pour objet la remise d'un rapport sur la faisabilité d'un tel projet. La décision verticale que vous tentez de nous imposer est en contradiction avec les rapports de la Cour des comptes sur l'IRSN et inquiète fortement l'ensemble des salariés. S'il est toujours possible de discuter du fond, c'est-à-dire de la bonne organisation de notre autorité de contrôle – et les autres pays nous envient la nôtre – il n'est pas raisonnable de le faire ainsi, par voie d'amendement dans un texte technique. Nous nous opposons donc vigoureusement à vos amendements.

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Mon sous-amendement étant identique à celui déposé par le président de l'Opecst, je laisse M. Pierre Henriet le présenter.

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À la suite de l'audition publique qu'il a tenue, le 16 février 2023, sur le projet de réforme visant à élargir les missions de l'ASN en opérant son rapprochement avec l'IRSN, l'Opecst, qui traite de la sûreté nucléaire depuis presque quarante ans, a émis cinq recommandations, dont l'une fait l'objet du présent sous-amendement. Nos travaux reposent sur un raisonnement scientifique rigoureux et associent l'ensemble des sensibilités politiques des deux Chambres, et nos recommandations ont été votées à l'unanimité le 28 février, dans un esprit de consensus. J'espère que le présent sous-amendement sera complété en séance par un mécanisme de contrôle de cette réforme, assorti d'une saisine systématique de l'Office.

L'excellence nucléaire française ne peut se concevoir sans une autorité de sûreté attractive, dans laquelle les décisions et les travaux d'expertise et de recherche interagissent en toute transparence. Le schéma de prise de décision, qui repose naturellement sur une expertise préalable, doit pouvoir intervenir dans un cadre autonome et ne peut se faire qu'à la condition d'un renforcement de son indépendance. Nous proposons donc une distinction fonctionnelle entre les délibérations du collège de l'ASN et les travaux d'expertise et de recherche.

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Inscrire une telle réforme dans ce projet de loi n'était sans doute pas opportun. Le risque est d'agiter les peurs, selon moi irrationnelles, concernant l'indépendance de la sûreté nucléaire. Mais, une fois n'est pas coutume, je souscris aux arguments présentés par la ministre.

Nous soutiendrons sans doute, même si la position de mon groupe n'est pas encore arrêtée, le principe de la fusion. Je regrette toutefois que nous n'ayons pas présenté un texte unique, traduisant le consensus auquel nous sommes parvenus au sein de l'Office. Je remarque qu'à chaque fois que le Rassemblement national cherche à adopter une position constructive allant dans le sens de l'intérêt général, certains s'agitent en coulisses pour y faire obstacle. Je trouve cela dommage, car la politique nucléaire s'entend sur le long terme. Si les forces politiques n'arrivent pas à s'entendre au-delà des alternances futures, cela compromet la capacité à mettre en place une politique industrielle sur le long terme.

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Le sous-amendement CE693 vise à préciser que la date d'entrée en vigueur ne peut être antérieure au 1er janvier 2025. Vous dites vous-même que de nombreux points restent à discuter, et vous avez donné dix-huit mois aux deux autorités pour proposer un plan de fusion : le Parlement doit avoir le temps d'en prendre connaissance.

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Le Gouvernement a décidément un vrai problème de méthode, qui l'amène à improviser la fusion de l'ASN et de l'IRSN : ce n'est pas la meilleure façon de donner confiance aux Français sur un sujet aussi important. Cela dit, nous sommes résolument favorables à la relance du nucléaire. Le Gouvernement ayant besoin d'avis uniques et clairs dans ce domaine, la fusion est donc fondée. Le sous-amendement CE684 vise simplement à obtenir un rapport précis sur les enjeux de la fusion, dans un délai de six mois, afin de nous éclairer avant la fin du processus sur les moyens de la sûreté nucléaire, l'intégration des personnels de l'IRSN et l'organisation de l'expertise.

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Nous en venons aux amendements en discussion commune.

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Poser la question de la fusion de l'ASN et de l'IRSN dans un projet de loi d'accélération en matière urbanistique, réglementaire et environnementale, cela revient un peu à inclure un projet de société majeur sur le rapport au travail dans un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale ; c'est aussi aberrant sur le plan démocratique et parlementaire.

Si je ne suis pas un spécialiste dans le domaine nucléaire, je suis passionné par les questions de sécurité sanitaire et d'agronomie. Si l'on suivait votre logique, Madame la ministre, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) devraient être fusionnés et la sécurité sanitaire devrait dépendre de la recherche agronomique. Il n'en est pas ainsi, et c'est tant mieux. Il est important que la sécurité sanitaire soit assurée en toute liberté, dégagée de toute influence et de toute contingence de court terme, et il est bon qu'un institut de recherche n'ait pas le souci de la sécurité mais celui de l'aventure de la recherche scientifique. Savez-vous que l'Anses a une part d'expertise et que l'Inrae ne s'interdit pas de lui donner des avis sur la sécurité ? Les deux institutions coopèrent quasiment en permanence, tout en étant indépendants. Pour le nucléaire, c'est la même chose : la dualité est une vraie garantie de notre démocratie et de notre développement.

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L'amendement CE223 vise à écrire « noir sur blanc » que les missions d'expertise dans le domaine de la sécurité nucléaire sont exercées par un établissement indépendant de celui exerçant les missions de contrôle et de sûreté. Pourquoi vouloir cette réforme maintenant et pas dans la loi de programmation ? Pourquoi chercher à l'imposer à la hussarde, dans un projet de loi que vous présentiez comme technique et qui apparaît désormais comme un élément central du dispositif ? Vos arguments ne convaincront pas ceux qui s'inquiètent de l'accélération des procédures, alors qu'ils entendent divers acteurs de la sûreté nucléaire manifester leur incompréhension. Moi non plus je ne comprends pas, et je vous demande de m'éclairer.

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Un sous-amendement émanant de l'Opecst nous a été proposé, mais trois de ses anciens présidents font part aujourd'hui dans Le Monde de leur plus grande inquiétude quant au démantèlement de l'IRSN, que tous les syndicats rejettent également. Cette réforme ne s'appuie sur aucun diagnostic ni aucune étude d'impact. Elle n'offre aucune garantie sur le fait que les avis de l'IRSN, dissout dans l'ASN, resteraient indépendants et continueraient d'être publiés. De plus, sa capacité d'autosaisine semble vouée à disparaître.

Quelles garanties a-t-on, par ailleurs, sur son expertise en matière de défense ou sur ses capacités de recherche, reconnues dans le monde entier ? Quelles garanties sur celles de ses missions qui n'étaient pas rattachées à l'ASN et qui représentent les trois quarts de son activité ? Quelles garanties concernant le statut des personnels ? Et, plus globalement, il y a un déficit de garanties concernant la doctrine du risque qui sera mise en œuvre.

Nous venons d'apprendre qu'à Penly 1, on a découvert il y a un mois des fissures de 23 millimètres dans des tuyaux qui font 27 millimètres d'épaisseur. Ces fissures, les plus profondes jamais constatées, sont dues à la corrosion sous contrainte et pourraient concerner tous les réacteurs du palier 4. Or cette information, connue depuis un mois par EDF et l'ASN, n'a toujours pas été rendue publique : permettez-nous d'être particulièrement inquiets et de continuer de refuser cette fusion à marche forcée !

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L'organisation de la sûreté a évolué au fil des années. La réunion de l'ASN et de l'IRSN est, à mon sens, l'aboutissement d'un processus engagé il y a environ cinquante ans.

En 1973, l'État a décidé d'assurer lui-même le contrôle de la sûreté nucléaire, qui était jusque-là exercé par le CEA. Il a alors créé le service de contrôle de la sûreté des installations nucléaires. À l'époque, c'était le CEA qui exerçait la fonction d'expert technique auprès de ce nouveau service. Cette fonction d'expert technique, séparée de la responsabilité de l'exploitant, s'est ensuite structurée en interne au sein du CEA, avec l'IPSN (Institut de protection et de sûreté nucléaire), puis s'en est détachée en 2001 avec la création de l'IRSN.

En parallèle, au fil des années et au regard de la montée en puissance des enjeux techniques et de radioprotection mais aussi des événements qui ont marqué l'histoire nationale et internationale du parc nucléaire, l'État a renforcé et fait monter en compétence les moyens dédiés au contrôle et à l'expertise.

Ce n'est qu'en janvier 2006, lorsque le président Chirac a annoncé le lancement du programme EPR, qu'a aussi été annoncée la création de l'ASN, sous la forme d'une autorité administrative indépendante. Ce n'est donc que vingt-neuf ans après le démarrage de Fukushima… ou plutôt de Fessenheim que la France s'est dotée d'une autorité de sûreté indépendante.

Force est de constater, par ailleurs, que le système dual actuel ne fonctionne pas si bien que cela. Comme la Cour des comptes a beaucoup été évoquée ces derniers jours, je citerai le rapport qu'elle a publié en 2014 : « Bien que des efforts aient été accomplis par l'ASN et l'IRSN ces dernières années pour développer leur coopération, des tensions récurrentes subsistent. La dispersion des ressources budgétaires, les actions de communication non concertées, l'absence d'orientations communes dans le domaine de la recherche, réduisent les marges de progression de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. » Je crois qu'un tel constat devrait au moins conduire à ne pas s'offusquer qu'un débat ait lieu.

Des questions légitimes, qui ont toute leur place dans nos échanges, ont été posées à la ministre et à la majorité. Quand on parle de sûreté nucléaire, en effet, il n'est pas question d'usines de chocolat : on touche à des concepts qu'il faut aborder avec beaucoup de prudence. La ministre a su répondre à ces questions, notamment celle concernant le maintien d'une expertise et d'une recherche couplées – je suis convaincue que le fait d'avoir un haut niveau de recherche ne peut être que bénéfique pour l'expertise –, celle de la séparation des rôles de responsable du contrôle et de responsable de l'expertise, et celle des garanties en matière de statut offertes aux salariés de l'IRSN. Nous avons eu des réponses sur ces différents points. Ce qui nous est présenté ne remet pas en cause les fondamentaux de la sûreté, ni la façon dont elle est assurée en France, bien au contraire.

Puisque beaucoup de fausses informations circulent, je tiens à revenir sur deux autres points.

Il a été dit, tout d'abord, que l'organisation qui nous est proposée était une façon de revenir à un système « pré-Tchernobyl ». Je rappelle que l'ASN n'était pas indépendante à cette époque – elle l'est aujourd'hui, et le principe ne changera pas. L'expertise en matière de sûreté dépendait du CEA et n'était pas rattachée à l'ASN. Nous avons aujourd'hui la possibilité de fluidifier les interactions et de clarifier les rôles.

À ceux qui prétendent que l'ASN est laxiste avec l'exploitant, je répondrai ensuite qu'il suffit, pour comprendre que ce n'est pas le cas, de regarder les décisions qu'elle a prises et leur impact sur le parc nucléaire. Je citerai plusieurs exemples. À Tricastin, les quatre réacteurs de la centrale ont été mis à l'arrêt pour renforcer la digue, le niveau de séisme pris en compte ayant été relevé dans les démonstrations de sûreté. Lorsque la centrale de Fessenheim a été arrêtée, pendant deux ans, pour des questions de ségrégation du carbone, l'impact sur la production a aussi été extrêmement fort, d'autant que Fessenheim n'était pas la seule centrale concernée. On a également arrêté la centrale de Cruas pendant de longs mois, il y a trois ou quatre ans, là aussi pour des questions sismiques.

Enfin, et c'est très important, l'ASN a obligé l'exploitant à porter la sûreté des réacteurs du parc historique, ceux de la deuxième génération, au plus près de celle des réacteurs de la troisième génération, c'est-à-dire de l'EPR, l'objectif étant de ne pas avoir deux niveaux de sûreté différents au sein du parc. Une marche sans précédent a été franchie en matière de gains de sûreté avec le projet post-Fukushima, la notion de « noyau dur de sûreté » et toutes les nouvelles démonstrations de sûreté, qui ont été intégrées dans le cadre des visites décennales. L'indépendance de l'ASN et la façon dont elle exerce son pouvoir de contrôle n'ont donc absolument pas à être remises en cause.

Grâce aux réponses que nous avons obtenues de la part du Gouvernement, et grâce au sous-amendement de l'Opecst et à celui du président Marleix, qui permettra de faire un point d'étape, nous pourrons améliorer le système, même s'il restera des éléments à définir – nous n'en sommes pas encore au point d'arrivée. Les enjeux auxquels la filière est confrontée, en particulier la prolongation potentielle des réacteurs au-delà de soixante ans et le renouvellement du parc historique, justifient qu'on accepte le point de départ proposé et qu'on mène ensuite une réflexion collective. Je ne doute pas, en effet, que les parlementaires continueront à être associés aux évolutions.

J'émets un avis favorable à l'amendement CE602 du Gouvernement, ainsi qu'aux sous-amendements identiques au mien et au sous-amendement CE684 du président Marleix. Avis défavorable pour le reste.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Je suggère le retrait du sous-amendement CE692 au profit du CE684, qui permettra d'obtenir plus rapidement un rapport plus complet. Je suis favorable aux sous-amendements CE689 et identiques.

Avis défavorable, en revanche, au sous-amendement CE693. Je précise qu'il ne s'agit pas de mettre quinze mois pour définir un plan, mais aussi pour l'exécuter. Il faut prendre en compte la situation des personnels : l'incertitude relative aux contrats ne doit pas durer trop longtemps.

Je suis également défavorable à l'amendement CE417. En séparant obligatoirement l'expertise et le contrôle en matière de sûreté, cet amendement aurait pour conséquence immédiate de démantibuler l'ASN, ce qui n'est pas votre objectif et irait complètement à rebours de l'histoire. Je répète qu'une partie de l'expertise, s'agissant des équipements sous pression, notamment les cuves, qui sont des pièces stratégiques des réacteurs nucléaires, se trouve à l'ASN.

Même avis défavorable, s'ils ne sont pas retirés, aux amendements CE223 et CE289. Une deuxième lecture est possible au Sénat : nous ne sommes pas obligés d'organiser directement une commission mixte paritaire après l'examen du texte par votre assemblée. Je sais que les sénateurs sont en train de regarder s'ils ont besoin d'amender davantage le texte ou si celui-ci peut leur convenir en l'état. Je rappelle aussi que l'amendement CE610 du Gouvernement, qui viendra juste après, a pour objet de sécuriser le statut des salariés : ils pourront conserver leur statut actuel ou opter pour un contrat de droit public proposé par l'ASN.

Enfin, je le répète, les capacités de recherche sont bien entendu préservées par les dispositions que nous vous proposons.

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Étant donné la complexité du sujet et son intérêt, je vais ouvrir la discussion plus largement que d'habitude, en laissant chacun des dix groupes s'exprimer deux minutes chacun.

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Les choses sont claires : un deal a été passé avec le Rassemblement national et Les Républicains pour démanteler notre système dual de sûreté, qui a été construit en quarante ans et que vous détricotez en moins de quatre semaines. C'est extrêmement grave, car ce que vous proposez n'est gage ni d'indépendance ni de fluidité.

Comment comprendre, au moment où nous devons prolonger la durée de vie de centrales qui n'ont pas été prévues pour fonctionner aussi longtemps, où nous devons valider de nouveaux designs pour l'EPR et où nous sommes confrontés à un changement climatique de nature structurelle, que l'on démantèle un système dual de sûreté qui est reconnu au niveau international ?

Il est important, dans ce moment crucial, d'assurer l'indépendance de l'expertise par rapport à la prise de décision. Notre collègue Dominique Potier en a illustré l'utilité en matière sanitaire. Cela avait aussi été demandé dans l'affaire du sang contaminé ou dans celle de l'amiante. J'ajoute que personne, parmi nous, ne remet en cause le rôle de l'ASN.

L'IRSN travaille de manière transparente : il publie ses rapports, fait de la médiation et prend en compte l'expertise citoyenne. Cette ouverture sur la société est indispensable pour assurer la confiance dans notre système de sûreté. L'IRSN joue aussi un rôle absolument fondamental en matière de transversalité entre sûreté civile et militaire.

Sans apporter aucune réponse, vous voulez réformer dans la précipitation un système qui, aux dires de tous, fonctionne très bien. Tous les syndicats, pas seulement de l'IRSN mais aussi d'EDF et de Framatome, sont opposés à cette réforme menée en toute hâte. Comme pour les retraites, vous préférez passer en force quand vous faites face à un front syndical commun.

Je conclus en rappelant les faits qui viennent d'être révélés : EDF et l'ASN étaient au courant qu'il y avait une fissure de 23 millimètres sur 27 à Penly 1, mais nous n'en avons toujours pas été informés officiellement.

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Notre rapporteure Maud Bregeon, que j'écoute toujours avec intérêt, a cité tout à l'heure un rapport de la Cour des comptes de 2014. Mais il faut aller au bout des citations : la dernière phrase était en effet que « la fusion des deux organismes constituerait une réponse inappropriée par les multiples difficultés juridiques, sociales, budgétaires et matérielles qu'elle soulèverait. ».

Devant la commission du développement durable, la rapporteure nous avait aussi dit que ce n'était pas à vingt-trois heures qu'il convenait de graver dans le marbre l'avenir de la sûreté du nucléaire, les installations concernées n'étant pas des usines de chocolat. Il n'est que vingt-deux heures quinze, mais cet argument reste valable. Nous ne comprenons toujours pas le calendrier et la méthode proposés et je n'ai pas eu de réponses à mes questions.

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S'agissant de la transparence, l'organisation actuelle permet à l'IRSN de rendre publiques les informations transmises à l'ASN. Dans le système que vous proposez, l'expertise technique de l'IRSN sera-t-elle rendue publique ? C'est essentiel pour l'acceptabilité du nucléaire par nos concitoyens.

Par ailleurs, seulement un quart des activités de l'IRSN sont consacrées à l'ASN. Que va devenir et comment va être traité le reste ? Quelles garanties aurons-nous non seulement pour les réacteurs nucléaires civils, mais aussi pour l'armement nucléaire français et pour tout ce qui concerne la radioprotection, notamment dans les hôpitaux ?

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Votre lapsus concernant Fukushima était intéressant, Madame la rapporteure. Nous commémorerons samedi le douzième anniversaire de cette catastrophe. Il y a un lien : ce que vous êtes en train de faire montre que vous ne retenez rien des leçons des grands accidents nucléaires de l'histoire. C'est un ingénieur de l'IRSN qui le dit : « Cette réforme va casser tout ce que la France a construit à partir des leçons des trois grands accidents nucléaires intervenus dans le monde, Three Mile Island aux États-Unis, Tchernobyl en Ukraine et Fukushima au Japon. ». S'agissant de ce dernier accident, il est important que des résultats d'analyses soient publiés par des experts indépendants.

Personne ne comprend la précipitation et la brutalité de ce que vous êtes en train de faire. C'est à croire que le Président de la République s'est réveillé un matin en ayant cette lubie de fusionner l'IRSN et l'ASN. Vous avez évoqué le fait que le système de sûreté a évolué au cours du temps, mais jamais par amendements ! Si vous le faites, c'est parce que vous ne voulez pas vous embarrasser d'une étude d'impact, ce qui est extrêmement grave. Votre obstination suscite des inquiétudes jusque dans vos rangs.

Voici précisément ce qu'ont écrit les trois anciens présidents de l'Opecst : « Est-il sérieux de demander à [l'ASN] d'absorber, tambour battant, la majeure partie d'un institut trois fois plus gros que lui, au moment d'une relance annoncée du nucléaire ? » Pour eux, ce projet n'est « ni attendu, ni réclamé, ni souhaité ». Le comité social et économique de l'IRSN s'est également prononcé à l'unanimité contre ce démantèlement et les syndicats de l'Institut ont écrit, dans une lettre ouverte, que mener une réforme majeure du système de gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en quelques semaines est totalement déraisonnable et qu'on demande aux parlementaires d'approuver une réforme dont le fondement, les contours exacts et l'analyse d'impact n'ont pas été présentés. Par conséquent, il faut absolument voter contre l'amendement du Gouvernement.

Enfin, que vont devenir, Madame la ministre, les missions de l'IRSN en matière de radioprotection, qui concernent les effets sur l'environnement et la santé humaine ? Elles vont être détruites par la fusion.

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Ce qui est terrible, c'est que vous êtes incorrigibles ! Vous devez toujours faire les choses à la hussarde. Vous faites penser à ces enfants qui cassent leurs jouets. Cela vous a pris d'un seul coup : vous déposez un amendement, alors qu'une réflexion était engagée depuis plusieurs mois et que le texte était déjà passé au Sénat. Vous avez vraiment un problème de méthode ! N'avez-vous jamais entendu qu'il ne faut légiférer que d'une main tremblante ? Et non tout faire en vitesse, sans étude d'impact, dès qu'on a une lubie !

Nous ne sommes pas opposés à une éventuelle évolution, mais il faut y travailler, y réfléchir, essayer d'en voir les conséquences. Surtout, on ne le fait pas en pleine discussion d'une relance du nucléaire, qui demande de la confiance ! Encore une fois, votre attitude va créer des fractures et de l'inquiétude. Ce n'est vraiment pas le moment.

Sur le fond, vos arguments sont extrêmement légers. Ils n'ont pas été travaillés, tout cela sort de votre chapeau. Vous voulez nous faire acheter un âne dans un sac, sans nous permettre de savoir à quelles évolutions conduira ce que vous proposez. Vous parlez de liberté supplémentaire… mais laquelle ? Quelle est cette « fluidité » que vous évoquez ? Vous dites que la dualité est négative, que la distinction entre expertise et prise de décision, telle qu'elle a été construite durant des décennies, doit être remise en cause : pourquoi pas, mais encore faudrait-il y réfléchir !

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Madame la ministre, Madame la rapporteure, je conteste les arguments que vous avez présentés. Si la fusion proposée est l'aboutissement de cinquante ans d'organisation des autorités de sûreté, choisir de la mener par un amendement et des sous-amendements est totalement pathétique. C'est irrespectueux des instances concernées, des salariés, des Françaises et des Français qui font confiance à notre régime de sûreté nucléaire, mais aussi du Parlement. Contrairement à ce que vous avez dit, cela nuit au bon éclairage des parlementaires et remet en cause la sincérité de votre démarche.

Vous avez refusé une concertation et une discussion approfondies. Que vous vous dispensiez de l'avis du Conseil d'État est une chose, mais cela nous en prive nous aussi, ce qui porte atteinte à notre information sur les finalités, l'intérêt et les modalités de la fusion. Nous aurions pu disposer d'une analyse, une étude présentant ne serait-ce que les avantages et les inconvénients de votre proposition, qui nous aurait permis de la comprendre, d'avoir le temps de réfléchir et ainsi d'adopter une décision sage.

Nos collègues Chassaigne et Potier l'ont dit : si nous sommes attachés à la dualité, c'est parce qu'elle fonctionne, en matière de sûreté nucléaire comme en matière de contrôle financier par exemple. Nous y sommes habitués, c'est notre culture. Pourquoi l'abandonner pour créer une autorité indépendante unique ? Nous ne comprenons pas le fondement de cette évolution et nous voterons contre.

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En l'état actuel des débats, cette réforme fait plus l'objet de questions que de certitudes. Au-delà du fond et de la nécessité de réfléchir à l'évolution du modèle actuel, trois interrogations persistent. Qu'est-il réellement reproché à l'IRSN, alors que plusieurs rapports soulignent la qualité de son travail ? Que vont devenir plusieurs de ses missions essentielles, en particulier l'expertise, la recherche sur les risques du radon, la scénarisation et la mise en œuvre des exercices de gestion de crise, le suivi et le contrôle de la radioprotection en milieu médical, la conduite d'une enquête annuelle sur la perception des risques par les Français ? Enfin, quelles garanties nous apporte vraiment la réforme quant à la préservation de ces deux principes essentiels que sont l'adossement de l'expertise à une activité de recherche, ces deux aspects étant intimement liés, et la fameuse dualité, c'est-à-dire l'indépendance de l'expertise par rapport à la prise de décision ? Il nous manque vraiment une étude d'impact pour nous renseigner sur ces questions.

La modification du statut doit être précédée d'une réflexion préalable, non l'inverse. Il est aussi question de moyens, ce que nous comprenons : il en faut, dans la perspective de créer de nouveaux réacteurs et de maintenir à niveau les plus anciens. Mais est-on certain que la fusion des effectifs de l'ASN et de l'IRSN permettra de dégager plus de moyens que lorsqu'ils sont séparés ? J'en doute. En tout cas, s'il faut parler des moyens, c'est dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024.

Une autre voie doit être explorée pour optimiser l'efficacité, la coordination et la fluidité du système et surtout pour maintenir la confiance des Français. En l'état actuel, le groupe Modem est défavorable à la réorganisation prévue. Nous ne remettons certainement pas en cause le principe d'une évolution, mais celle-ci doit être envisagée autrement.

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Nous serons favorables à l'amendement du Gouvernement, pour peu que le sous-amendement d'Olivier Marleix soit retenu. Nous avons aujourd'hui une autorité indépendante dont les décisions sont rendues de manière collégiale. Le rapport que nous demandons me semble répondre à un certain nombre d'interrogations exprimées par nos collègues, exprimées par exemple par Mme Panot. Je les invite donc à voter eux aussi pour notre sous-amendement !

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La tribune publiée dans Le Monde par trois anciens présidents de l'Opecst, Jean-Yves Le Déaut, Cédric Villani et Claude Birraux, à qui j'ai succédé dans ma circonscription, met en exergue le fait que cette décision a été prise sans concertation avec les acteurs concernés et en ignorant le Parlement, ce qui illustre bien la dérive technocratique de la prise de décision dans notre pays. La tribune suggère une saisine de l'Opecst. Est-ce envisagé ? Je soutiens évidemment le sous-amendement d'Olivier Marleix, qui demande au moins la remise d'un rapport.

La sûreté progresse par la recherche et la confrontation des idées entre l'ASN, l'IRSN dans son rôle d'appui technique et l'exploitant. N'y aura-t-il plus que deux organismes, dans la nouvelle organisation que vous prévoyez ? Qui assurera les missions de contrôle des armes chimiques, de surveillance de la sismicité dans le monde et de collation de la dosimétrie des travailleurs ?

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Notre discussion le confirme, la façon dont cette évolution de la sûreté nucléaire est introduite permet aux oppositions de manipuler les peurs et de polluer le texte en faisant croire qu'il a une autre ambition, cachée, que celle de relancer notre filière nucléaire et d'assurer une souveraineté énergétique nous permettant de mener la transition écologique. Ce n'était donc pas une très bonne idée.

Sur le fond, notre groupe n'a pas encore arrêté sa position, pour deux raisons. Nous attendons les réponses aux remarques, parfois de bon sens, qui ont été faites par les différentes oppositions et même au sein de votre propre majorité. Par ailleurs, il est clair, comme nous le disons depuis le début, que ce texte doit s'intégrer dans une planification générale, et en particulier industrielle, de la relance du nucléaire. Si vous souhaitez que ce projet de loi se limite à une évolution juridique de quelques mécanismes techniques, vous ne pouvez pas toucher à la sûreté nucléaire, dont vous convenez comme tout le monde qu'elle fait partie du modèle nucléaire français, ce qui ouvre donc des horizons beaucoup plus larges. Minorer l'importance de ce texte, en le présentant comme une simple série d'amendements techniques alors qu'il concerne la façon dont nous allons reprogrammer, d'une manière globale, la relance du nucléaire vous plonge dans une forme de schizophrénie. Tant que vous n'aurez pas apporté des réponses claires aux questions posées et tranché le nœud gordien, mon groupe retiendra son vote.

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On peut toujours mettre l'accent sur les difficultés, en considérant que l'amendement du Gouvernement est peut-être un peu anachronique. Toutefois, de quoi parle-t-on ? D'une réflexion sur des structures juridiques qui ont vocation, à terme, à se rapprocher. Ce qui nous est proposé n'est pas une fusion-absorption se traduisant par une disparition mais, juridiquement parlant, une fusion avec consolidation des compétences de l'ensemble des acteurs.

On peut chercher à attiser les peurs, mais on peut aussi garantir la sectorisation des missions. Par ailleurs, l'accent a été mis lors de nos échanges sur la protection des salariés, qui devrait être assurée, sur la remise d'un rapport d'étape et enfin, ce qui nous paraît essentiel, sur l'indépendance de la future autorité administrative, que vous confortez. Tous ces éléments nous conduisent, tout en restant vigilants quant au rapprochement des deux structures, à voter en faveur de l'amendement présenté par le Gouvernement.

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Il reste bien des questions à régler. Vous souhaitez améliorer l'attractivité des métiers de la recherche : pensez-vous que vous y parviendrez en proposant aux chercheurs d'entrer dans la fonction publique, quand beaucoup voudraient plutôt décrocher des contrats de droit privé ?

Par ailleurs, l'IRSN travaille avec les autorités nucléaires des Pays-Bas et de la Norvège, auxquelles il apporte un soutien technique. Qu'adviendra-t-il de cette collaboration ?

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J'ai une pensée pour l'Autorité de sûreté nucléaire et l'ensemble de ses agents. La commission d'enquête dont je suis le rapporteur a auditionné des dizaines de personnes : toutes ont salué la rigueur, le professionnalisme et l'indépendance de ces agents. Mais, à l'occasion d'un pseudo- scoop nocturne, certains les ont insultés et rabaissés, alors que la doctrine française en matière de sûreté nucléaire est saluée dans le monde entier.

Recourant à un artifice d'une rare démagogie et comme s'il fallait stigmatiser les uns pour valoriser les autres, vous présentez l'extension des compétences d'une autorité administrative indépendante par rapport à celles d'un Epic comme un recul de l'indépendance. Par ailleurs, le parallèle avec l'Anses est inexact : cette agence est un Epic et non une autorité administrative indépendante.

Il s'agit ici d'une réforme de l'organisation administrative. Il est normal que celle-ci évolue, comme elle l'a fait, d'ailleurs, depuis vingt-cinq ans. L'organisation actuelle ne possédait aucun caractère universel : en matière de sûreté nucléaire, chaque pays dispose d'une structuration qui lui est propre. Le Gouvernement propose de faire évoluer la nôtre pour la rendre plus efficace et plus indépendante. Pour ce faire, un travail au long cours sera mené dans les prochains mois. Il sera évalué dans le cadre du rapport proposé par le président Marleix. L'objectif de la réorganisation est de faire face aux défis importants que constituent la prolongation des réacteurs et le lancement du nouveau nucléaire. Nous veillerons à ce que les moyens de l'Autorité de sûreté nucléaire soient renforcés.

Nous vous invitons donc, chers collègues, à revenir à la réalité du travail amorcé par le Gouvernement. Le groupe Renaissance votera en faveur de l'amendement du Gouvernement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Au niveau international, les autorités de sûreté nucléaire considérées comme des références sont celles qui incluent des compétences d'expertise, tout en pouvant faire appel de surcroît à des expertises externes. La construction française est très particulière : l'Autorité de sûreté nucléaire possède des compétences d'expertise, mais dans une proportion relativement limitée – elles sont cantonnées aux équipements sous pression ; pour le reste, elle recourt presque exclusivement à l'expertise de l'IRSN, même si elle peut, en tant que de besoin, faire appel à des expertises externes.

Notre objectif est de renforcer l'Autorité de sûreté nucléaire. En transférant les compétences de l'ASN, autorité administrative indépendante, à un Epic, nous serions allés dans le sens contraire de l'histoire. Le transfert ne peut se faire que dans l'autre sens, avec pour objectif de conforter l'ensemble de l'équipe chargée de la sûreté. Autant vous avez raison lorsque vous dites que l'expertise doit être distinguée du contrôle, autant rien n'empêche de concentrer les deux fonctions dans un même organisme – c'est d'ailleurs le cas dans la très grande majorité des autorités de sûreté nucléaire. Se priver de la partie expertise pourrait même constituer un point de fragilité.

Le rapport de la Cour des comptes résumait bien les enjeux, notamment en ce qui concerne l'amélioration des procédures, à la veille d'un programme de grande ampleur. La même raison explique que nous présentions cette réforme maintenant : la situation n'est plus tout à fait la même qu'il y a quelques années. Dans la perspective de l'instruction des dossiers concernant l'EPR 2 et la prolongation des centrales – je pense notamment à la question de la corrosion sous contrainte –, la préservation de l'excellence en matière de sûreté nucléaire revêt un caractère d'intérêt général. Nous devons agir le plus tôt possible, tout en donnant le maximum de sécurité aux salariés de l'IRSN.

Je partage vos préoccupations en matière de transparence vis-à-vis du public. C'est un des éléments motivant les sous-amendements, notamment celui qui traduit les propositions de l'Opecst. Nous avons saisi l'Office ; celui-ci a mené plusieurs auditions et produit un rapport en amont de cette réunion pour éclairer le débat. Il a formulé cinq recommandations, dont nous reprendrons volontiers la plupart. Un des sous-amendements qui avait cet objet a dû être déclaré irrecevable, mais il a vocation à être redéposé en séance. Le Gouvernement fera preuve de la plus grande écoute possible à l'égard des recommandations de l'Opecst.

Les avis émis dans le cadre de l'expertise technique ont vocation à être rendus publics, de manière à appuyer les décisions de l'Autorité de sûreté nucléaire.

En ce qui concerne l'organisation, nous élargissons les missions de l'ASN et donnons de la sécurité aux salariés. Il n'est pas encore question de définir le détail de l'organisation des missions ; ce sera l'objet d'étapes ultérieures, certaines réglementaires, d'autres législatives – je pense notamment au projet de loi de finances pour 2024.

La réforme n'est en rien précipitée. Elle en est à son démarrage et sera menée dans des délais suffisamment rapides pour que nous ne risquions pas de déséquilibrer notre sûreté nucléaire, mais en prenant le temps de mener la concertation. Le rapport proposé par M. le président Marleix nous permettra de consolider cette démarche.

La radioprotection fait bien partie des missions confiées à l'ASN.

Les contrats de droit privé sont maintenus, et l'ASN aura la possibilité de recruter sous cette forme – c'est l'enjeu de l'amendement CE610. Ses salariés pourront soit conserver leur statut, soit en changer.

Le soutien aux autres autorités européennes n'est pas remis en cause. Il n'y a aucune raison de le faire ; il s'agit de missions de service public.

Monsieur Bolo, les moyens ont vocation à être revus. Ce sera tout l'enjeu du projet de loi de finances pour 2024. Nous élaborons dans ce projet de loi le cadre de la réforme ; l'organisation et l'analyse des conséquences seront abordées dans le rapport.

Il est important que le Parlement soit étroitement associé à la réforme, en particulier à travers l'Opecst, qui pourra constituer un relais. L'Office aura à connaître de chaque étape, réglementaire et législative.

Nous n'en sommes donc qu'à l'orientation générale, mais il nous semblait important de donner d'emblée l'assurance aux 1 700 salariés de l'organisme que les contrats ne seraient pas remis en cause et que nous ne séparerions pas les missions de recherche et d'expertise. J'ai passé plus de quatre heures avec les organisations syndicales ; je connais leur position. Le point de départ de la réforme ne fait pas l'objet d'un accord, mais nous essayons de répondre aux points de vigilance sur lesquels ils appellent notre attention.

Enfin, la prétendue révélation de ce soir n'est que le fruit de la communication très régulière à laquelle procède EDF, qui a bien sûr pris le temps de vérifier la qualité des données avant de les publier. Je rappelle que le réacteur de Penly est à l'arrêt et qu'il n'y a donc aucun risque. Chacun fait son travail, dans le rôle qui est le sien. Il ne faudrait pas jeter le discrédit sur les 500 personnes qui œuvrent tous les jours pour assurer la sûreté nucléaire. (Exclamations.) Je comprends le bénéfice politique que l'on peut tirer de la zizanie, mais une telle démarche ne me semble pas appropriée. Respectons les agents publics de l'Autorité de sûreté nucléaire.

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Monsieur le président, on ne règle pas la question de l'organisation de la sûreté nucléaire pour plusieurs années avec seulement deux minutes d'intervention par groupe. Puis-je à tout le moins m'exprimer sur les sous-amendements, notamment ceux de Mme Bregeon et du président de l'Opecst ?

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La coutume, en commission, est de donner la parole à un orateur pour et un orateur contre, pour une minute chacun. Pour cette discussion commune, nous avons pris le temps : j'ai accordé deux minutes à chaque groupe, certains les ayant d'ailleurs scindées entre deux orateurs. Si je vous donnais la parole maintenant, Madame Batho, je devrais en faire de même de nouveau pour chaque groupe. Or leurs responsables considèrent en majorité que notre commission est suffisamment éclairée pour que nous passions au vote. Du reste, chacun aura la possibilité de déposer de nouveaux amendements en séance.

La commission rejette le sous-amendement CE692, adopte les sous-amendements identiques et rejette le sous-amendement CE693. Elle adopte le sous-amendement CE684 ainsi que l'amendement CE602 sous-amendé.

En conséquence, les amendements CE417, CE223 et CE289 tombent.

Amendement CE610 du Gouvernement et sous-amendement CE691 de M. Gérard Leseul.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Comme je l'ai déjà dit, il s'agit de transférer à l'Autorité de sûreté nucléaire les contrats de travail des personnels de l'IRSN exerçant des missions de sûreté nucléaire. Les salariés de l'IRSN pourront choisir entre la transformation de leur contrat en contrat de droit privé et la conclusion d'un contrat de droit public proposé par l'ASN. Enfin, celle-ci pourra recruter de nouveaux salariés dans le cadre de contrats de droit privé.

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Nous regrettons d'avoir si peu de temps pour discuter d'une question aussi importante. À travers notre sous-amendement, nous demandons la remise au Parlement d'un rapport consacré à la faisabilité du projet. Cela permettrait d'atténuer la brutalité de la décision. Les amendements du Gouvernement font suite à la réunion du Conseil de politique nucléaire du 3 février. La décision de fusionner l'ASN et l'IRSN a été prise dans la plus grande rapidité et nous n'avons pas le temps d'en mesurer tous les enjeux.

Comme cela a été précisé, dans son rapport de 2014, la Cour des comptes écrivait aussi que la « fusion des deux organismes constituerait une réponse inappropriée par les multiples difficultés juridiques, sociales, budgétaires et matérielles qu'elle soulèverait. ». Le 25 juin 2021, la Cour précisait par ailleurs que « la gouvernance et l'organisation de l'Institut, bien que complexes, avaient trouvé un équilibre ; que ce dernier remplit les missions qui lui sont confiées par le code de l'environnement ; qu'il a atteint les objectifs du contrat d'objectifs et de performance ».

Nous sommes attachés à la dualité de ces organismes, l'un se consacrant à la décision et au contrôle, l'autre à l'expertise. Personne ici n'a mis en cause les salariés de l'ASN. L'enjeu est de faire en sorte que chacun garde son rôle et remplisse ses missions, en toute indépendance.

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L'amendement du Gouvernement est une des réponses données aux questions qui avaient été posées. Je réitère donc mon avis favorable.

Madame Jourdan, vous vous dites attachée au système dual. Pour ma part, je suis attachée à la sûreté. Mon intervention devant l'Opecst était d'ailleurs consacrée à cet enjeu : on ne badine pas avec la sûreté. Or ce n'est pas du tout ce que nous sommes en train de faire. Si telle était mon impression, sachez que, tant du fait du parcours qui est le mien que de la responsabilité qui m'incombe, ainsi qu'à nous tous parlementaires, je ne voterais pas les amendements du Gouvernement.

La prolongation des réacteurs et le renouvellement du parc historique doivent nous amener à revoir l'organisation de la sûreté pour qu'elle soit plus rapide, fluide et coordonnée. À cet égard, il faut reconnaitre que les relations entre l'ASN et l'IRSN n'ont pas toujours été au beau fixe. Ces objectifs justifient à mes yeux la réforme qui est engagée. Celle-ci n'en est qu'au point de départ : des échanges nourris auront lieu durant les prochains mois pour penser une organisation aussi adaptée que possible à la relance de la filière. Je suis donc défavorable au sous-amendement.

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Que les relations entre l'ASN et l'IRSN ne soient pas toujours au beau fixe est précisément un des facteurs de la sûreté nucléaire en France. La seule question est de savoir si la réforme renforcera la sûreté nucléaire. Or la réponse est non.

L'expertise de l'IRSN ne se limite pas à celle qu'il procure à l'ASN : il travaille également pour le compte de l'État, s'agissant des actes de malveillance visant les installations nucléaires et de la défense. Qui aura désormais la charge de ces missions ? Une autorité indépendante ne saurait les exercer pour le compte de l'État. De même, qui s'occupera des questions de radioprotection en situation de crise ? Qui gérera les programmes de recherche financés par les opérateurs ? L'Autorité de sûreté nucléaire, qui est indépendante, ne pourra pas conduire des programmes de recherche financés par EDF.

La réforme a été improvisée, écrite sur un coin de table. Elle est dangereuse, notamment parce qu'elle ignore le fait que la sûreté nucléaire repose sur le facteur humain. Or le démantèlement de l'IRSN déstabilisera l'ensemble des agents chargés de la sûreté nucléaire et posera de gros problèmes, comme c'est le cas pour toutes les réorganisations qui ne tiennent pas compte de la réalité des structures et du travail du personnel – en l'occurrence, celui qui est effectué par les agents de l'IRSN et de l'ASN est remarquable.

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Sur un tel sujet, il faudrait écouter, Monsieur le président, ça vous ferait peut-être réfléchir un petit peu !

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Avez-vous besoin d'une suspension pour reprendre votre calme, Madame Laernoes ? Chacun des groupes a le temps de s'exprimer, et je respecte l'avis majoritaire sur l'organisation de la discussion. Je suis désolé que cela ne vous plaise pas.

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Nous sommes aux côtés de l'intersyndicale de l'IRSN, qui regroupe la CFDT, la CGC et la CGT. Les revendications de ces professionnels ne sont en rien corporatistes : ils s'inquiètent du devenir de leur expertise et de la recherche. Ayant moi-même été chercheuse, je sais ce qu'est une restructuration, je connais les conséquences d'une fusion de ce genre, faite à la va-vite et sans associer le personnel.

Ce qui est proposé ici est extrêmement grave : alors que le Gouvernement décide d'une relance à mort du nucléaire, une confusion sera introduite dans les domaines de la décision et de l'expertise. C'est soit complètement fou, soit parfaitement rationnel : cette opération n'a-t-elle pas pour objet de rendre moins compliquée la construction de centrales nucléaires, au plus vite, sans débat démocratique ? L'intersyndicale nous alerte ; nous devrions être raisonnables et l'écouter.

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Vous avez indiqué, Madame la ministre, que vous aviez reçu les organisations syndicales pendant quatre heures. Cela vous paraît-il beaucoup ? Dans un groupe, dans une entreprise, on ne gère pas un plan social en quatre heures. Alors pour une ministre, cela semble un peu court… Les ingénieurs et le personnel, qui ont appris début février qu'ils allaient changer totalement de structure, n'ont aucune réponse !

Nous avons rencontré leurs représentants la semaine dernière, alors qu'ils manifestaient à proximité de l'Assemblée nationale. La question que tous se posent, et nous aussi, c'est : « Pourquoi ? » En quoi le fait de se reposer sur les compétences de l'IRSN pose-t-il problème ? Ce mode de fonctionnement, m'a écrit un ingénieur, semble avoir fait les preuves de sa pertinence et de son efficacité. Il est plébiscité à l'international – après la catastrophe de Fukushima, par exemple, le Japon a fait appel à l'IRSN. Quel est donc l'objectif poursuivi, que ce soit en matière de radioprotection, de santé publique ou de gestion de crise ?

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La plupart des agents de l'IRSN ont des contrats de droit privé. Le transfert à l'ASN ne constitue-t-il pas un changement substantiel du contrat de travail, pouvant donner lieu à indemnisation ?

Y aura-t-il une partition de l'IRSN, comme vous l'avez envisagé initialement, semble-t-il, ou bien la totalité de l'Institut sera-t-elle transférée à l'ASN ?

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Ce n'est pas une restructuration, sauf si les mots n'ont pas de sens. Une restructuration ou un plan social induisent une diminution du nombre d'emplois. En l'occurrence, nous allons plutôt dans le sens d'une augmentation. On peut toujours agiter les peurs, mais tordre les faits et les transformer pour faire peur aux gens est assez malhonnête – pardon de le dire. Nous ne diminuons pas le nombre d'emplois, nous le confortons. C'est très clairement indiqué dans le projet.

Les chercheurs seront bien sûr associés. C'est pourquoi nous posons le cadre et prenons le temps de définir l'organisation des missions dans le détail.

S'agissant de l'indépendance, je rappelle en quoi consiste la réforme : nous plaçons deux services publics de statuts différents et œuvrant à une même mission, la sûreté nucléaire, sous la même ombrelle, en utilisant le statut légal conférant la plus forte indépendance, celui d'autorité administrative indépendante (AAI). Si placer l'expertise et le contrôle sous la même ombrelle posait un problème, alors l'organisation de la sûreté nucléaire des trois quarts des pays de la planète poserait un problème majeur, et l'expertise de l'ASN en matière de cuves des réacteurs nucléaires, qui en sont les pièces les plus stratégiques, en poserait un autre.

Que l'exercice de la mission d'expertise doive être distingué de l'exercice de la mission de contrôle, nul ne le conteste. Cette distinction peut prendre place sous une même ombrelle. Tel est le cas au sein de la plupart des autres autorités de sûreté nucléaire, certaines assurant 100 % de l'expertise, d'autres faisant appel à des expertises externes en complément. Fondamentalement, rien ne s'oppose à la réunion des deux.

S'agissant des contrats de travail, ils sont prévus par la loi. Le salarié conserve ses missions et son contrat de travail. Il n'y a pas de changement substantiel, puisqu'il rapporte à la fin au même employeur, l'État. Il a le choix entre un contrat de droit public, qui peut lui être proposé, et le maintien de son contrat à l'identique, dans une institution ayant la faculté de recruter par contrat de droit privé.

Tout cela n'a rien de très exotique en matière de conduite de projet. Voies navigables de France, par exemple, est passé du statut d'Epic à celui d'EPA. De telles évolutions n'ont rien d'exceptionnel. Il ne s'agit jamais que de deux services publics qui ont le même employeur, l'État. Une AAI n'étant pas dotée de la personnalité morale, c'est l'État qui porte les contrats.

S'agissant du détail des missions, l'ASN couvrira les champs que j'ai mentionnés précédemment, dont la radioprotection et la recherche. Les directeurs de l'IRSN et de l'ASN travaillent pour identifier des éléments industriels et commerciaux qu'il faudrait traiter à part. Précisément parce que nous sommes en train d'y travailler, je ne peux pas encore détailler l'organisation que nous visons. En tout état de cause, nous ouvrons nos travaux en assurant à chaque salarié la sécurité d'une reprise de l'intégralité de ses droits et des contrats équivalents à ceux conclus dans le cadre de l'IRSN.

La commission rejette le sous-amendement CE691.

Elle adopte l'amendement CE610.

Article 9A (suite) : Demande d'audit sur les moyens de l'Autorité de sûreté nucléaire

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Nous en revenons à l'ordre normal des articles. Je vous rappelle que l'amendement CE533 de Mme Louise Morel a été présenté jeudi soir, de même que les sous-amendements CE683 du Gouvernement, CE681 et CE680 de M. Gérard Leseul, CE682 de Mme Chantal Jourdan et CE679 de Mme Danielle Brulebois.

Amendement CE533 de Mme Louise Morel et sous-amendements CE683 du Gouvernement, CE681 et CE680 de M. Gérard Leseul, CE682 de Mme Chantal Jourdan, et CE688, CE687, CE686 et CE679 de Mme Danielle Brulebois.

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Les sous-amendements CE688, CE687 et CE686 visent à préciser les missions essentielles, notamment en mentionnant spécifiquement la sûreté des transports de matières radioactives et fissiles, la protection de l'homme et de l'environnement contre les rayonnements ionisants, la protection et le contrôle des matières nucléaires et la protection des installations nucléaires et du transport de matières radioactives et fissiles contre les actes de malveillance.

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J'émets un avis défavorable sur le sous-amendement CE688. Selon moi, le mot « radioprotection » suffit à définir l'objet du rapport et exempte d'une longue énumération, qui de surcroît n'est pas exhaustive. Avis également défavorable au sous-amendement CE686, qui est redondant avec l'amendement. Je suis en revanche favorable au sous-amendement CE687.

Pour ce qui a été présenté jeudi dernier, je suis favorable à l'amendement, ainsi qu'aux sous-amendements CE683, CE681, CE680 et CE679. Avis défavorable au sous-amendement CE682.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis. Je suggère le retrait des sous-amendements CE688 et CE686, dont la rédaction peut être travaillée.

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L'amendement CE533 et les sous-amendements, que nous adopterons sans doute, visant à la remise d'un rapport au Parlement, révèlent me semble-t-il une contradiction instructive.

Le sous-amendement CE683 du Gouvernement fait passer le délai de remise du rapport de trois à six mois, avec l'exposé sommaire suivant : « Afin que le Gouvernement puisse apporter des éléments un peu consolidés concernant la réforme du dispositif de contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, il est préférable que les travaux de l'ASN et de l'IRSN sur sa préparation aient pu avancer suffisamment ». C'est extraordinaire ! Nous venons pourtant de passer deux heures à demander au Gouvernement de faire preuve d'un peu de patience pour bien préparer la fusion de l'IRSN et de l'ASN, mais il a refusé, parce qu'il faut agir rapidement !

Je rappelle la conclusion de la tribune publiée ce jour par trois anciens présidents de l'Opecst, MM. Claude Birraux, Jean-Yves Le Déaut et Cédric Villani : « Dans les grandes démocraties, c'est le Parlement qui assure le travail prospectif d'évaluation préalable des grandes décisions de société ». Celle-ci, ajoutent-ils, « engage toute la nation et ne doit pas être réservée à une poignée de décideurs aux pleins pouvoirs ». C'est une question de démocratie.

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Monsieur le président, même si le vôtre est légendaire, quand on parle de sûreté nucléaire, je n'ai pas vraiment le sourire. La question lancinante, depuis plusieurs années, est celle des moyens, notamment humains, de l'ASN et l'IRSN, dans un contexte caractérisé par le vieillissement du parc nucléaire et l'accident de Fukushima. L'État ne s'est pas donné les moyens de faire face à cette situation. J'en sais quelque chose : j'ai été renvoyée du Gouvernement pour m'être opposée à la diminution des moyens de l'ASN.

On ne peut pas réduire la question des moyens à l'inscription d'un rapport dans un projet de loi. Je comprends l'esprit de l'amendement, mais il n'est pas à la hauteur de la situation.

Les sous-amendements CE688 et CE686 sont retirés.

La commission adopte successivement les sous-amendements CE683, CE681 et CE680. Elle rejette le sous-amendement CE682 puis adopte successivement les sous-amendements CE687 et CE679.

Elle adopte l'amendement CE533 sous-amendé et l'article 9A est ainsi rédigé.

En conséquence, les autres amendements tombent.

Article 9 : Modalités de réexamen périodique des réacteurs nucléaires au-delà de leur 35e année de fonctionnement

Amendement de suppression CE302 de M. Aymeric Caron.

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Nous demandons la suppression de l'article 9, qui joue avec la sûreté des Françaises et des Français, ainsi qu'avec la santé de l'environnement.

Il permet à l'exploitant, lors des réexamens postérieurs à la trente-cinquième année de vie des réacteurs et après enquête publique, de choisir, s'agissant des modifications à effectuer, entre une procédure d'autorisation et une simple procédure de déclaration. Nous préférons maintenir le régime d'autorisation en toutes circonstances, pour la très bonne raison qu'il nous semble inadmissible d'alléger la rigueur indispensable à l'examen des centrales nucléaires, surtout lorsqu'elles sont vieillissantes.

Madame la rapporteure, lorsque j'ai évoqué, la semaine dernière, la crainte que peuvent susciter des accidents comme ceux de Fukushima et de Tchernobyl, vous m'avez accusé d'agiter les peurs. Votre réponse me semble irresponsable.

Il n'y a pas que des dangereux écologistes qui alertent sur la menace induite par l'énergie nucléaire : il y a aussi de nombreux scientifiques, à commencer par M. Jacques Repussard, ancien directeur de l'IRSN, qui a déclaré à plusieurs reprises qu'il fallait se préparer au pire, « imaginer l'inimaginable », rappelant que les statistiques sur lesquelles reposent les calculs définissant la politique de sûreté sont démenties par les faits. Trois catastrophes majeures en trente ans : nul n'avait rien envisagé de tel !

Par ailleurs, je précise à l'attention de ceux qui placent l'économique au-dessus de toute autre préoccupation qu'un accident majeur tel ceux de Tchernobyl ou de Fukushima coûterait à la France la somme délirante de 430 milliards d'euros.

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Avis évidemment défavorable. Grâce à l'article 9, l'enquête publique s'applique au rapport de réexamen dans son ensemble et l'ASN doit tenir compte de ses conclusions. Plusieurs garde-fous garantissent donc la consultation, à laquelle je vous sais attaché à raison. Les dispositions de l'article 9 ne dérogent pas aux grands principes de sûreté.

L'ancien président de l'ASN a dit qu'un accident était toujours possible. Cela me semble être une très bonne façon de réfléchir. Imaginer l'inimaginable est, depuis Fukushima, la démarche qui fonde notre raisonnement en matière de sûreté nucléaire.

Le risque sismique, par exemple, est réévalué tous les dix ans, à l'occasion des visites décennales dont nous parlerons dans la suite des débats. Il est systématiquement majoré, et encore plus depuis l'accident de Fukushima. Depuis, on a également intégré une troisième voie électrique et pris des dispositions relatives aux risques d'inondation. À la demande de l'ASN, des moyens externes d'alimentation en eau, en air et en électricité d'un site inondé ou isolé en raison d'un accident météorologique majeur ont été installés.

Le retour d'expérience de Fukushima a été amplement réalisé, dès 2012. Il est intégré aux visites décennales. L'ASN et l'IRSN ont salué la démarche. Je ne prétends pas qu'il est possible de tendre à l'infini vers le risque zéro, mais vos déclarations sur le cancer des enfants, auxquelles l'un de nos collègues a répondu, ne me semblent pas à la hauteur de la situation, Monsieur Caron.

Nous pouvons l'un et l'autre considérer, à raison, que le nucléaire est dangereux et que nous maîtrisons le risque, et avoir des approches distinctes du niveau de risque que nous sommes capables d'accepter. Mais les discours alarmistes, très éloignés de la réalité des sites et des actions de prévention des accidents, ne me semblent pas au niveau du débat. Je crois savoir que de nombreux scientifiques vous l'ont fait observer.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Avis défavorable. Monsieur Caron, votre présentation de l'article 9 ne correspond pas à son contenu.

Il n'est pas question de revoir la liste des cas exigeant une enquête publique, que nous ne modifions pas d'une virgule. Nous prévoyons au contraire que l'exploitant adresse au ministre chargé de la sûreté nucléaire et à l'ASN un rapport comportant les conclusions du réexamen périodique. Au-delà de la trente-cinquième année de fonctionnement, celui-ci est obligatoirement assorti d'une enquête publique, sur le fondement de laquelle l'ASN peut imposer à l'exploitant de nouvelles prescriptions. Contrairement à la présentation que vous en faites, l'article 9 renforce la sûreté des installations nucléaires, notamment au-delà de leur trente-cinquième année.

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Nous sommes tout de même en présence d'une contradiction abyssale. Chers collègues de la NUPES, vous demandez plus de concertation, une prise en compte des enquêtes publiques et une confiance dans le dispositif de sûreté nucléaire ; mais lorsqu'un article veut prendre en compte les résultats de l'enquête publique dans le cadre du réexamen périodique après la trente-cinquième année, vous proposez de le supprimer ! Arrêtez de déposer des amendements de suppression à la pelle et faites preuve d'un minimum de cohérence : c'est de la relance du nucléaire que nous discutons, quand même !

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CE625 de Mme Maud Bregeon, rapporteure.

Amendements identiques CE627 de Mme Maud Bregeon, CE664 de la commission du développement durable et CE42 de M. Jorys Bovet.

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Il s'agit de supprimer, dans la définition des modalités de l'enquête publique, la mention des adaptations réglementaires nécessaires. Cette précision introduite par le Sénat est superflue.

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La rédaction adoptée par le Sénat peut effectivement prêter à confusion, il faut supprimer la fin de l'alinéa 3.

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Il s'agit de corriger un non-sens mis en avant par EDF lors des auditions : l'enquête publique effectuée dans le cadre des réexamens au-delà de la trente-cinquième année est différente de celle réalisée lors de la construction.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Avis favorable. La rédaction adoptée par le Sénat revient sans nécessité sur le droit en vigueur, qui distingue l'enquête publique en matière nucléaire de celle du régime général.

La commission adopte les amendements.

Amendement CE183 de M. Pierre Cordier.

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Il vise à renforcer la prise en compte de l'avis de la commission locale d'information (CLI).

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Demande de retrait ou avis défavorable. Le code de l'environnement prévoit déjà la consultation des CLI par le préfet.

La commission rejette l'amendement.

Amendements identiques CE628 de Mme Maud Bregeon et CE350 de M. Romain Daubié.

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Il s'agit de supprimer le rapport remis par l'exploitant cinq ans après les réexamens décennaux, qui n'offre aucune garantie supplémentaire en matière de sûreté. L'ASN a la possibilité de faire des prescriptions à tout moment. Par ailleurs, ce délai s'accorde mal avec le pas de temps décennal des réexamens périodiques des installations nucléaires de base. Enfin, l'exploitant d'un centre nucléaire de production d'électricité doit publier chaque année un rapport détaillant les mesures de sûreté qu'il a prises.

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Supprimer le rapport intermédiaire remis par l'exploitant cinq ans après le réexamen décennal va dans le sens de la simplification administrative que je défends souvent devant votre commission, et évite une redondance avec la décision du 23 février 2021 de l'ASN.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Il s'agit de revenir au droit en vigueur. Les dispositions introduites par le Sénat complexifient l'ensemble plus qu'elles n'apportent des garanties additionnelles.

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Madame la ministre a dit, quand il s'est agi de démanteler l'IRSN pour en fusionner une partie avec l'ASN, que nous avions changé d'ère et que nous pouvions changer de façon de fonctionner en matière de sûreté nucléaire. Certes, on change beaucoup d'ère : le texte vise à la fois à prolonger les centrales existantes au-delà de leur durée de vie initiale, à bâtir des réacteurs EPR 2 dont nous n'avons pas fini les plans et à construire des SMR dont nous n'avons pas commencé les plans !

Réduire la sûreté nucléaire est une mauvaise idée. Supprimer la dernière phrase de l'alinéa 4 prive l'ASN de l'une de ses missions. Vous avez démantelé l'IRSN en disant, pour tenter de nous rassurer, que l'exercice de ses missions se poursuivrait dans le cadre de l'ASN, en laquelle nous pouvions avoir toute confiance. Et à présent, vous lui retirez des missions… Nous nous opposons à ces amendements.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Nous ne faisons que revenir au droit en vigueur. Il ne s'agit ni d'une remise en cause des procédures, ni d'un recul.

La commission adopte les amendements.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CE592 de Mme Maud Bregeon, rapporteure.

À la demande de la rapporteure, l'amendement CE184 de M. Pierre Cordier est retiré.

Amendement CE456 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

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Madame la rapporteure, je forme le vœu que cet amendement se situe à la hauteur à laquelle vous avez placé nos débats.

Il n'est écrit nulle part que l'ASN doit rendre publiques son analyse du rapport et ses prescriptions. C'est un manque. Certes, l'Autorité le fait en pratique, et elle n'y a jamais dérogé, mais il nous semble préférable, en tant que législateurs, de l'inscrire dans la loi. Seraient bien sûr exclus de cette obligation les éléments dont la divulgation serait de nature à porter atteinte à la défense et à la sécurité nationales.

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L'amendement est en très grande partie satisfait. Le code de l'environnement prévoit que les décisions et les avis du collège de l'ASN sont publics. Les décisions de l'ASN homologuées par le ministre de tutelle le sont également, ainsi que toutes les décisions comportant des prescriptions. J'entends bien qu'il s'agit de renforcer la transparence, mais le droit en vigueur la garantit. Demande de retrait ou avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis. L'article L. 592-27 du code de l'environnement dispose : « L'Autorité de sûreté nucléaire rend publics les avis et décisions délibérés par son collège dans le respect des règles de confidentialité prévues par la loi. ».

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M. Leseul a déposé des amendements visant à rendre obligatoire la publication des décisions et des études en matière de sûreté nucléaire. Compte tenu du caractère hâtif de la décision de modifier notre système de sûreté et de la déstabilisation qui en résulte, la moindre des choses serait d'inscrire dans la loi leur publication systématique.

Nous avons évoqué la découverte à Penly de problèmes de corrosion sous contrainte d'une gravité inédite. L'ASN et EDF en étaient informés et ont attendu un mois avant de rendre publique cette information. Pour assurer la nécessaire confiance dans le système de sûreté nucléaire, dans le pays le plus nucléarisé au monde, la moindre des choses est d'exiger une transparence au moins inchangée.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE301 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

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Une vingtaine de nos réacteurs ont déjà plus de 40 ans. Comme le nécessaire n'a pas été fait pour développer les énergies renouvelables, nous allons nous retrouver au moment où tous les réacteurs vont arriver à la limite de leur durée d'exploitation en même temps. Vous proposez de prolonger la durée de vie des centrales existantes en permettant à l'exploitant de recourir à une simple déclaration pour procéder à une modification « notable » – je ne vois pas bien quelle est la différence avec une modification « substantielle ».

Nous avons évoqué le problème de la corrosion sous contrainte. Il faut que les Français sachent qu'à l'heure où nous parlons, à Penly 1, la sûreté nucléaire tient à quatre millimètres ; le vieillissement des cuves commence à poser problème.

Nous souhaitons que les modifications apportées par l'exploitant lors des réexamens au-delà de la trente-cinquième année, quelle que soit leur importance, soient soumises à autorisation et non à une simple déclaration.

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La sûreté nucléaire à Penly 1 ne tient pas à quatre millimètres ! Les problèmes de corrosion sous contrainte à Penly ont déjà fait l'objet de communications. Le réacteur n° 1 est à l'arrêt et des contrôles complémentaires sont réalisés. Ce n'est pas parce qu'un phénomène supplémentaire de corrosion a été observé sur un système de refroidissement à injection de sécurité, qui n'est pas mis en œuvre lorsque le réacteur produit normalement, qu'on peut dire que la sûreté se joue à quelques millimètres. Avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Avis défavorable. Non seulement le réacteur en question est à l'arrêt, mais le problème que vous évoquez a été annoncé par EDF : pour une cachotterie, c'est plutôt raté…

L'élément de tuyauterie concerné a vocation à être remplacé, comme cela a été fait sur les autres réacteurs qui ont fait l'objet de réparations à la suite de problèmes de corrosion sous contrainte.

Attention à ne pas jeter le discrédit sur le travail des opérateurs et de l'ASN. Peut-être s'agit-il d'une stratégie, mais je ne suis pas sûre que cela soit très responsable.

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J'en ai assez d'entendre dire que nous jetterions le discrédit sur les équipes de l'ASN ou de l'IRSN. C'est entièrement faux. Nous avons défendu leur travail et l'organisation actuelle du système de sûreté. Que l'on soit pour ou contre le nucléaire, nous avons besoin d'un système de sûreté robuste. La loi de 2006 avait d'ailleurs été votée à l'unanimité.

Aujourd'hui, vous passez à la hussarde et vous démantelez le système de sûreté. Vous déstabilisez les équipes de l'IRSN en leur annonçant la réforme du jour au lendemain. On ne connaît pas les perspectives en matière d'organisation de la sûreté. C'est extrêmement grave.

Oui : quand on apprend qu'à Penly, le phénomène de corrosion sous contrainte provoque une fissure de vingt-trois millimètres dans une tuyauterie qui est épaisse de vingt-sept, on peut s'émouvoir. Et encore heureux qu'EDF ait communiqué à ce sujet, un mois après avoir découvert le problème ! Mais nous ne mettons aucunement en doute la qualité des équipes.

Il me paraît donc essentiel de supprimer l'alinéa 6.

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Madame la ministre, la stratégie de la NUPES est de raconter absolument n'importe quoi, en utilisant des termes techniques qui n'ont pas la même signification pour l'ingénierie nucléaire et pour le grand public.

C'est la méthode systématique des adversaires du nucléaire depuis des années : faire peur à la population en profitant de l'honnêteté de la filière nucléaire et en la retournant contre elle. J'avais d'ailleurs proposé à l'Opecst de réfléchir aux termes employés par cette filière pour éviter que la bonne foi de la raison et de la science soit remise en cause par les apprentis sorciers qui sont leurs ennemis.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE629 de Mme Maud Bregeon, et amendements identiques CE37 de M. Jorys Bovet et CE134 de M. Pierre Meurin (discussion commune).

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Lorsqu'une modification doit être réalisée sur une installation nucléaire de base, elle est soumise soit à autorisation, soit à déclaration, selon son importance. Ces deux régimes doivent perdurer, mais il n'y a pas lieu que les modalités de ces régimes soient différentes selon qu'on est dans le cadre d'un réexamen périodique ou non. Mon amendement tend donc à homogénéiser les procédures applicables.

Demande de retrait pour les deux autres amendements.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Demande de retrait pour les amendements identiques, car ils sont satisfaits par l'amendement de la rapporteure dont la rédaction est meilleure.

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Je constate que vous aimez bien travailler avec le Rassemblement national lorsqu'il s'agit de sûreté nucléaire.

Je rappelle que le Rassemblement national ne croit ni à la science, ni aux avis techniques, puisque son plan « Marie Curie » prévoit la mise en service de dix nouveaux réacteurs en 2031 – ce qu'aucun expert n'estime possible – et de dix autres en 2036. Il souhaite également remettre en service la centrale de Fessenheim. Et nous avons appris dans un de ses amendements qu'il souhaite refroidir les centrales nucléaires avec de l'eau de pluie…

N'est-il pas magnifique, le monde rêvé du Rassemblement national ?

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Je reviens précisément d'une visite de la centrale de Fessenheim ce matin – où Mme Laernoes n'a sans doute jamais mis les pieds, elle qui débite les éléments de langage du lobby antinucléaire, devenu du reste un peu vintage au vu de l'évolution de l'opinion publique.

Les écologistes sont responsables de l'abaissement de notre souveraineté énergétique et du pouvoir d'achat des Français, puisque le nucléaire est l'énergie la plus pilotable et la moins chère d'Europe. Je vous demande donc un peu de modestie quand vous vous adressez au Rassemblement national, qui a fait un effort programmatique très sérieux en matière de déploiement du nucléaire. Votre solution à vous, c'est de développer les énergies intermittentes, qui ne produisent rien et coûtent très cher…

Les amendements CE37 et CE134 sont retirés.

La commission adopte l'amendement CE629.

En conséquence, les amendements CE349 de M. Romain Daubié et CE335 de Mme Lisa Belluco tombent.

La commission adopte l'article 9 modifié.

Après l'article 9

Amendement CE222 de M. Benjamin Saint-Huile.

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Cet amendement vise à créer un principe de non-régression en matière de sûreté nucléaire, à l'instar de celui qui existe en matière environnementale. Il s'agit de s'assurer de la progression constante des normes en matière de sûreté nucléaire, afin de limiter au maximum le risque d'incident.

Cet amendement a été rédigé pour envoyer des signaux en matière de sûreté en raison du contexte actuel.

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Demande de retrait.

Le principe de non-régression est déjà appliqué en matière nucléaire. Le code de l'environnement prévoit une obligation d'amélioration permanente des installations par les exploitants. En outre, au moins une fois tous les dix ans, les ministres compétents et l'ASN organisent conjointement une évaluation du cadre juridique de la sûreté nucléaire.

Par-delà les aspects juridiques, prendre en compte de manière continue le retour d'expérience a été un principe directeur au cours des quinze dernières années pour améliorer la sûreté.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Demande de retrait. Dans le champ réglementaire, le principe de non-régression en matière de protection de l'environnement s'applique aussi à la sûreté nucléaire. Du point de vue législatif, l'article L. 591-2 du code de l'environnement prévoit que l'État « veille à ce que la réglementation en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection, ainsi que son contrôle, soient évalués et améliorés (…) en tenant compte de l'expérience acquise dans le cadre de l'exploitation, des enseignements tirés des analyses de sûreté nucléaire effectuées pour des installations nucléaires en exploitation, de l'évolution de la technologie et des résultats de la recherche. » Tous les éléments sont bien là.

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J'entends vos arguments. Mais mieux englober les dispositions qui existent déjà dans le principe général de non-régression en matière de sûreté nucléaire permettrait d'envoyer un signal politique, au sens noble du terme.

Le signal envoyé sur cette question de la sûreté sera essentiel dans le présent projet de loi d'accélération et refuser cet amendement vous prive d'un argument solide.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE454 de Mme Chantal Jourdan.

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Cet amendement vise à organiser la participation du public dans le cadre des procédures de réexamen décennal des installations nucléaires de base. Cette participation ne doit pas être limitée aux projets de construction d'une centrale et doit être organisée tout au long de sa durée d'exploitation, dans un souci démocratique et de transparence vis-à-vis des citoyens.

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Avis défavorable. Une enquête publique est déjà prévue à l'occasion du réexamen d'une installation nucléaire de base au-delà de trente-cinq ans de fonctionnement, ce qui permet de consulter le public – et notamment le public local.

Faut-il pour autant confier cette mission à la Commission nationale du débat public (CNDP) ? On peut se le demander, au vu de la manière dont s'est passée la consultation sur le projet d'EPR 2 à Penly.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

L'amendement est largement satisfait. Avis défavorable.

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Il est difficile de ne pas réagir aux propos de la rapporteure. On nous dit que s'interroger sur l'intérêt de la fusion de l'IRSN avec l'ASN revient à mettre en doute l'indépendance de cette dernière. Mais la rapporteure ne se prive pas de mettre en doute celle de la CNDP !

Si la CNDP a écourté ses travaux et a fini par en changer l'objet, c'est parce qu'avant même la fin du débat, prévue le 27 février, le Président de la République a pris un certain nombre de décisions à l'occasion du Conseil de politique nucléaire, le 3 février – dont celle de démanteler l'IRSN et d'en intégrer une partie au sein de l'ASN.

On retrouve cette politique du fait accompli dans l'ensemble de ce projet de loi.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE130 de M. Pierre Meurin.

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Cet amendement vise à obliger l'exploitant d'une centrale à informer les communes proches en cas de grand carénage, chantier qui mobilise, même si c'est provisoire, un grand nombre de personnes.

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Les représentants des communes siègent au sein des commissions locales d'information (CLI) et sont donc informés des évolutions au cours de l'exploitation. Ils sont consultés aussi avant la déclaration, je le rappelle, au cours des enquêtes publiques et des différentes étapes juridiques et administratives. Demande de retrait.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

L'amendement est satisfait par le dispositif des CLI. Demande de retrait.

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Toutes les collectivités territoriales ne sont pas représentées dans les CLI. J'ai été le directeur de cabinet du président de la CLI de Creys-Malville et je vous assure que les conditions d'information sont largement perfectibles.

Cet amendement n'impose pas une modalité particulière d'information, qui pourrait être fixée par décret ou grâce à un sous-amendement. Cela constituerait un bon signal vis-à-vis des élus locaux qui, à l'occasion des travaux, vont faire face à des bouleversements démographiques certes temporaires mais majeurs.

La commission rejette l'amendement.

Article 9 bis : Prise en compte des conséquences du changement climatique et de la cybersécurité dans les dispositions législatives applicables aux installations nucléaires de base

Amendements de suppression CE135 de M. Pierre Meurin et CE385 de Mme Mathilde Paris.

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L'article 9 bis ajoute des précisions superfétatoires. Il impose aux exploitants des centrales nucléaires de prendre en compte « le dérèglement climatique et ses effets » dans leur démonstration de sûreté. Il précise aussi que la protection contre les actes de malveillance doit comprendre la cybersécurité. Tout cela est très bien, mais une loi bavarde est souvent inutile.

Les processus de mise en service et de contrôle des centrales nucléaires intègrent déjà ce type de menaces ou de problématiques. Ce texte comprend beaucoup d'éléments qui procèdent d'une bonne intention, mais qui sont à la limite de la condescendance envers une filière qui fonctionne avec un contrôle d'une réelle qualité. Je ne crois pas que l'ASN ait oublié de prendre en compte les conséquences du dérèglement climatique. Personne ne va construire une centrale nucléaire à un endroit où elle risquerait d'être submergée.

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Nous proposerons de largement réécrire cet article ajouté par le Sénat. Le dérèglement climatique est en effet d'ores et déjà pris en considération. Nous proposerons donc de conserver une mention, sans aller jusqu'au niveau de détail du texte actuel.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Demande de retrait au profit des amendements CE561 du Gouvernement et identiques, qui prévoient une rédaction plus synthétique que celle adoptée par le Sénat en ce qui concerne le dérèglement climatique.

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Comme le Gouvernement et la majorité admettent que les dispositions ajoutées par le Sénat sont superfétatoires et font un geste pour reconnaître le professionnalisme de la filière nucléaire, nous retirons nos amendements.

Les amendements sont retirés.

Suspension de la réunion de vingt-trois heures cinquante à vingt-trois heures cinquante-cinq.

Amendement CE387 de M. Antoine Villedieu.

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Je voudrais juste savoir si, du point de vue juridique, la mention du dérèglement climatique risque de susciter des contentieux qui ralentiraient la construction des nouveaux EPR.

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Les conséquences du dérèglement climatique sont déjà intégrées dans toutes les démonstrations de sûreté et il n'y a pas problème juridique spécifique.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

L'objectif est bien que les réacteurs fonctionnent. Il faut donc prendre en considération le changement climatique.

L'amendement est retiré.

Amendements CE642 du Gouvernement et CE113 de M. Antoine Villedieu (discussion commune).

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Cet amendement propose de remplacer l'expression « dérèglement climatique » par « changement climatique », qui est la référence la plus utilisée.

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Avis favorable à l'amendement CE642 et défavorable à l'amendement CE113.

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Une fois n'est pas coutume, je soutiens cet amendement du Gouvernement ainsi que ceux qui ont le même objet.

Je remarque que les amendements similaires que nous avions déposés lors de l'examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets avaient été rejetés – y compris ceux portant sur son titre, qui retient ce terme inapproprié du point de vue scientifique.

Je salue le fait que le Gouvernement reprenne enfin les termes scientifiques retenus par la communauté internationale, c'est-à-dire l'expression « changement climatique », que l'on pourrait du reste compléter par « lié aux activités humaines ».

La commission adopte l'amendement CE642.

En conséquence, l'amendement CE113 tombe.

Amendements identiques CE561 du Gouvernement et CE630 de Mme Maud Bregeon.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Comme je l'ai indiqué précédemment, cet amendement prévoit une rédaction plus concise en ce qui concerne la prise en compte du changement climatique dans la démonstration de sûreté.

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Il est clair que Rassemblement national nie l'importance du changement climatique et l'incompatibilité du nucléaire avec ce changement.

Un certain nombre de nos amendements vont malheureusement tomber du fait de l'adoption des amendements identiques du Gouvernement et de la rapporteure. Les ajouts que nous proposions n'avaient pas pour objet de rendre la loi « bavarde », mais de prendre en compte des éléments qui ne le sont pas encore, Madame la rapporteure. Vous ne pouvez pas recourir à cet argument quand le Président de la République dit : « Qui aurait pu prédire la crise climatique ? »

Même les scientifiques n'avaient pas prévu tous les effets de l'accélération du changement climatique. Il est donc nécessaire d'attendre les conclusions du groupe de travail de l'IRSN sur les conséquences du changement climatique sur le nucléaire. Mais peut-être est-ce en raison de ce travail que vous voulez le démanteler ?

Qu'on soit pour ou contre le nucléaire, le changement climatique est là. Il est nécessaire d'apporter des précisions à cet article, par exemple sur la ressource en eau, parce que le changement climatique aura progressé lorsque les nouvelles centrales entreront en service, dans quinze ou vingt ans au mieux. Je déplore que ces amendements doivent tomber.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, tous les amendements se rapportant aux alinéas 4 et 7 tombent.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CE41 de M. Jorys Bovet.

Amendement CE661 du Gouvernement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Il s'agit de nouveau de substituer « changement climatique » à « dérèglement climatique ».

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.

Amendement CE306 de Mme Aurélie Trouvé.

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Cet amendement précise que le changement climatique entraîne non seulement des « effets », mais aussi des « risques » spécifiques pour les installations nucléaires et connexes, que l'exploitant doit connaître et anticiper. Ces risques inhérents au changement climatique sont mis en évidence par la communauté scientifique. Nous savons désormais que des déséquilibres majeurs et des phénomènes d'emballement sont possibles. Lors de la COP de Glasgow, l'Organisation météorologique mondiale a ainsi présenté un rapport alarmiste soulignant que la planète entrait dans l'inconnu s'agissant des implications précises du changement climatique et des risques qu'il entraîne.

Étant donné ce contexte, cet amendement est absolument nécessaire.

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Demande de retrait. Les effets du changement climatique sont déjà pris en compte de manière générale et il n'apparaît pas nécessaire de lier leur évaluation au réexamen décennal.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Cet amendement est satisfait, puisque l'objet même de cet article consiste à intégrer le changement climatique dans l'analyse des risques.

La commission rejette l'amendement.

Amendements identiques CE667 de la commission du développement durable, CE374 M. Xavier Albertini et CE523 de M. Éric Bothorel.

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Il s'agit de supprimer l'alinéa 8. Le complément qu'il apporte n'est pas placé au bon article du code de la défense.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte les amendements.

En conséquence, les amendements CE480 de M. Aurélien Lopez-Liguori et CE201 de Mme Christelle Petex-Levet tombent.

La commission adopte l'article 9 bis modifié.

Article 9 ter : Dispense d'autorisation d'urbanisme pour les travaux portant sur les réacteurs existants et leurs équipements

Amendements de suppression CE631 de Mme Maud Bregeon, CE308 de M. Christophe Bex et CE336 de Mme Lisa Belluco.

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Cet article adopté par le Sénat permet d'appliquer aux réacteurs existants le régime de dispense d'autorisation d'urbanisme prévu par l'article 3 du texte pour les projets de réacteurs électronucléaires. La durée d'application de ce régime dérogatoire est de vingt ans.

Après des discussions avec les différents acteurs, il apparaît que les dispositions de cet article constitueraient davantage un facteur de ralentissement que d'accélération. C'est la raison pour laquelle il vous est proposé de supprimer l'article 9 ter.

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Il semble nécessaire de supprimer ces dérogations supplémentaires. Nous sommes d'accord avec le Gouvernement, ce qui est rare.

L'une des questions posées par l'article 3 est de savoir qui prendra en charge le coût de la construction anticipée d'annexes qui auront bénéficié d'une procédure dérogatoire au droit de l'urbanisme, si l'autorisation de réaliser le réacteur n'est finalement pas accordée. Les Français peuvent légitimement s'interroger, alors que la dette d'EDF atteint 65 milliards d'euros – ce qui représente un taux d'endettement semblable à celui de l'Argentine lorsque le Fonds monétaire international a menacé de l'exclure. Pour notre part, nous supposons que c'est le contribuable qui paiera.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Avis favorable.

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Nous voulons bien vous croire quand vous dites qu'un régime spécifique ralentirait les procédures liées aux travaux dans une installation nucléaire de base en fonctionnement, mais pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?

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Passer d'une autorisation de niveau préfectoral à une autorisation ministérielle allongerait les délais. Les constructions prévues en l'espèce, portant notamment sur des bâtiments annexes, ne le justifient pas.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

L'article prévoit aussi une intervention du ministre chargé de l'urbanisme, qui serait assez déplacée pour ce genre de procédures.

La commission adopte les amendements et l'article 9 ter est supprimé.

En conséquence, les amendements CE 35 de M. Sébastien Jumel et CE309 de Mme Aurélie Trouvé tombent.

Article 10 : Suppression de l'automaticité de la mise à l'arrêt définitif d'une installation nucléaire de base lorsqu'elle a cessé de fonctionner pendant une durée continue supérieure à deux ans

Amendements de suppression CE10 de Mme Julie Laernoes et CE310 de M. Aymeric Caron.

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Face au vieillissement du parc nucléaire, le Gouvernement entend supprimer le caractère automatique de la fermeture d'une centrale nucléaire à l'arrêt depuis plus de deux ans. Vous cherchez peut-être à répondre au fantasme du Rassemblement national en abandonnant cette règle que l'on retrouve dans tous les régimes de police environnementale.

Si EDF n'a pas la capacité d'assurer les travaux de maintenance, de réparation ou d'amélioration des centrales sans interrompre leur fonctionnement pendant une durée inférieure à deux ans, cela traduit un problème de grave altération ou de compétences qui fait craindre pour la sûreté de l'installation. Dans ce contexte, les conditions posées à la délivrance de l'autorisation initiale, qui n'est pas limitée dans le temps, comme le rappelle l'étude d'impact du projet de loi, ne sont plus satisfaites.

Enfin, cette modification est contraire au principe de prévention des risques d'atteinte à l'environnement, garanti par l'article 3 de la Charte de l'environnement. Pour toutes ces raisons, il est nécessaire de supprimer cet article.

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L'article 10 ouvre la voie à une réouverture beaucoup plus facile des centrales fermées, puisque la fermeture ne sera plus automatique après un arrêt de deux ans et devra être précédée d'un décret en Conseil d'État.

Un tel dispositif nous inquiète, car il comporte des risques en matière de sécurité et de sûreté nucléaire. Il pourrait remettre en cause la capacité de l'exploitant à assurer le redémarrage et le fonctionnement de la centrale dans des conditions normales. Enfin, point très important, il s'oppose à une politique tendant à construire un mix énergétique composé intégralement d'énergies renouvelables. Nous en demandons donc la suppression.

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Avis défavorable. Je n'ai pas la même interprétation que la vôtre sur la longueur des travaux, Madame Laernoes : ils doivent durer le temps nécessaire, et si cela excède deux ans, cela traduit une exigence de rigueur et d'exhaustivité, notamment pour les rehaussements de sûreté qui sont demandés lors des examens périodiques.

Il n'appartient pas à un gouvernement, quel qu'il soit, d'estimer la capacité technique d'une centrale à fonctionner en toute sûreté. Ce rôle est dévolu à l'Autorité de sûreté nucléaire et, dans une moindre mesure, à l'exploitant.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis. Des travaux qui durent deux ans, ou presque, ne sont pas si rares : cela a été le cas pour Fessenheim, Flamanville, Paluel 2. L'ASN valide leur redémarrage une fois les conditions de sécurité remplies : il n'y a donc pas de remise en cause de la sûreté, mais une prise en compte de la réalité des risques traités.

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Nous voterons contre cet amendement qui n'a aucun sens. Une fois de plus, la NUPES met en doute la capacité de l'opérateur à faire les travaux nécessaires. Elle souhaite maintenir la limite de deux ans, qui contraindra EDF à accélérer les travaux, ce qui permettra à la NUPES de critiquer une nouvelle fois l'exploitant pour sa précipitation. C'est l'éternel syndrome du pompier pyromane de ce camp politique.

Quand on a travaillé pour Mme Dominique Voynet, qui affirme qu'Iter contient du nobrium, à savoir un antidépresseur, on garde pour soi ses avis sur les fantasmes du Rassemblement national.

La commission rejette les amendements.

Amendement CE311 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

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Cet amendement va dans le sens que viennent de développer mes collègues Julie Laernoes et Aymeric Caron. Le Rassemblement national pense peut-être pouvoir construire tout seul dix réacteurs en moins de dix ans, alors que même le président-directeur général d'EDF affirme que l'entreprise pourrait en fabriquer au mieux six en quinze ans – estimation qui nous laisse d'ailleurs sceptiques.

L'article 10 rend plus complexe la fermeture définitive d'une centrale arrêtée depuis deux ans. Pourtant, on peut déjà attendre trois ans avant de prononcer tout arrêt définitif – la durée restant de deux ans pour les installations classées pour la protection de l'environnement. On crée encore une fois une dérogation pour le nucléaire, ce que nous refusons.

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Il n'y a aucune raison de prononcer la fermeture définitive d'une centrale au motif qu'elle serait arrêtée depuis plus de deux ans. Mme la ministre a cité l'exemple de Paluel 2 : dans cette centrale, un incendie dans le condenseur a entraîné une fuite du générateur de vapeur pendant l'arrêt de tranche ; cela ne signifiait pas que la centrale ne pouvait plus fonctionner. Des travaux importants et des examens périodiques ont été effectués. C'est aux experts et aux techniciens de dire si une centrale peut continuer son activité, non au Gouvernement ou à l'État.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis défavorable.

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C'est le terrain qui commande : de très nombreux pays travaillent sur la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires, mais nous avons bien compris que la France insoumise et les écologistes voulaient mettre fin au nucléaire : ils seront comptables devant les Français des conséquences sur leur pouvoir d'achat et notre souveraineté.

La gauche prétend défendre les travailleurs, mais elle montre la plus grande froideur, dans sa posture antinucléaire, pour demander l'arrêt de centrales nucléaires et donc priver des salariés de leur emploi. J'en ai rencontré ce matin à Fessenheim qui m'ont fait part des problèmes psychologiques que la perte de leur emploi leur a causés. Aucun d'entre vous n'est allé les voir, alors qu'ils avaient le sentiment de défendre un service public et un bien commun et qu'ils ont été victimes d'un plan social très violent. Votre idéologie vous détourne des aspects humains, qui ne vous intéressent pas.

La commission rejette l'amendement.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CE386 de M. Nicolas Dragon.

Amendement CE115 de Mme Mathilde Paris.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis.

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Je suis très heureuse que le Rassemblement national vienne de lire notre programme : cela fait effectivement cinquante ans que les écologistes proposent de sortir du nucléaire. À l'époque où Marine Le Pen affirmait que le changement climatique n'était pas lié aux activités humaines, les écologistes le décrivaient déjà comme une catastrophe environnementale dont l'unique cause est l'activité humaine.

Vous persistez dans le même entêtement idéologique en souhaitant prolonger la vie des réacteurs jusqu'à soixante ans, alors que l'ASN affirme que les éléments portés à sa connaissance ne permettent pas de conclure que la poursuite du fonctionnement de certaines centrales et de leurs réacteurs soit acquise au-delà de cinquante ans. Votre projet de loi est à la fois incohérent et inconséquent.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Ce n'est pas du tout le sujet de l'amendement précédent, que la commission a rejeté.

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Vous défendez le Rassemblement national !

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Je n'ai pas de leçon à recevoir dans ce domaine. Je coconstruis des majorités autour de projets qui visent à lutter contre le réchauffement climatique. Vous, vous n'avez pas voté le projet de loi sur les énergies renouvelables et vous ne comptez pas soutenir le présent texte : vous m'expliquerez comment vous pensez réduire nos émissions de gaz à effet de serre.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE562 du Gouvernement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Il vise à simplifier la rédaction de l'article 10.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.

Amendements CE323 de M. Jérémie Iordanoff et CE337 de Mme Lisa Belluco (discussion commune).

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Avec cet article, le Gouvernement supprime l'automaticité de la mise à l'arrêt des installations qui ont cessé de fonctionner depuis plus de deux ans.

Plus grave, c'est une option maximaliste qui est retenue, laissant à l'exécutif la liberté d'action en la matière, en dehors de la consultation obligatoire du Conseil d'État. Il est inacceptable qu'aucune condition ne soit prévue pour encadrer cette nouvelle prérogative.

En matière d'indépendance et de souveraineté énergétiques, le Rassemblement national pourra regarder le rapport de la commission d'enquête qui est en cours : la plupart des personnes auditionnées ont affirmé que la France n'avait jamais été indépendante ni souveraine dans ce domaine. L'électricité n'est pas la principale composante énergétique de notre pays, et nous n'atteindrons jamais l'indépendance énergétique grâce au seul nucléaire, dans la mesure où nous utilisons 60 % d'énergies fossiles.

Les nouveaux réacteurs nucléaires ne verront pas le jour avant quinze à vingt ans, et nous n'avons que sept ans pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, donc l'utilisation d'énergies fossiles : le nucléaire ne sauvera pas le climat. Les échéances de 2050 doivent juste réduire un peu sa part dans la production électrique. Il ne remplacera donc pas les énergies fossiles dans notre pays, ne vous en déplaise. Mesdames et messieurs les députés du Rassemblement national, le nucléaire ne sauvera pas le climat !

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis.

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Madame Laernoes, pourquoi considérez-vous que le Rassemblement national est une composante de la production d'électricité ? Nous sommes certes des électrons libres, mais vous parlez de nous à chacune de vos interventions, c'est obsessionnel. Auriez-vous fait un pari avec vos petits camarades ? J'aimerais comprendre cette idée fixe.

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Rassurez-vous, nous ne vous considérons absolument pas comme des électrons libres, mais comme des serviteurs zélés du projet du Gouvernement en faveur du nucléaire.

Madame la ministre, j'ai évoqué une durée d'exploitation des réacteurs de soixante ans, car c'est bien la durée qui figure dans l'amendement CE386 de M. Dragon – durée qu'il juge, dans son exposé des motifs, « nécessaire à la continuité du parc nucléaire français ». Plus loin, on pouvait lire que certaines centrales devraient pouvoir fonctionner quatre-vingts ans. Je reviens donc à l'objet de ma précédente intervention : selon l'ASN, rien n'indique que la durée d'activité des réacteurs pourrait dépasser soixante ans. Mais, alors que mon propos était tourné contre les responsabilités climatiques et les propos antiscientifiques de Marine Le Pen, je constate que vous avez pris soin de la défendre.

La commission rejette successivement les amendements.

L'amendement CE186 de Mme Annick Cousin est retiré.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CE38 de M. Jorys Bovet

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CE541 et CE646 de Mme Maud Bregeon, rapporteure.

Puis elle adopte l'article 10 modifié.

Après l'article 10

Amendement CE221 de M. Benjamin Saint-Huile.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Je demande le retrait de l'amendement car il est satisfait.

L'amendement est retiré.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CE136 de M. Pierre Meurin.

Amendement CE446 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

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Cet amendement vise à créer une commission nationale chargée d'évaluer les charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs, sur le modèle de la CNEF, une commission du même nom créée par la loi du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs, puis supprimée par la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, dite loi « Asap ».

La suppression de la CNEF était une erreur car notre pays doit organiser, planifier et financer, en provisionnant les fonds nécessaires de la manière la plus fine possible, le démantèlement des installations nucléaires de base ainsi que la gestion des déchets et matières radioactifs.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

L'amendement est satisfait, car la Commission nationale d'évaluation du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs (CNEF) n'a pas été supprimée. Afin de permettre la reprise de ses travaux, le Gouvernement a invité en 2021 les présidents des deux assemblées à procéder aux désignations attendues. Le processus suit son cours. La CNEF existe, merci de ne pas l'enterrer trop vite !

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Si je comprends bien, nous attendons les nominations depuis 2021 ?

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Les présidents des assemblées doivent me donner des noms pour que je puisse prendre les décrets nécessaires, mais le processus est en cours – il a été lancé en 2021, mais à la fin de l'année, je tiens à le préciser.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE346 de Mme Mathilde Paris et sous-amendement CE685 de M. Jean-Philippe Tanguy.

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Le sous-amendement vise à préciser le sens de l'amendement de Mathilde Paris, par lequel nous ouvrons, de manière constructive, une nouvelle piste pour le destin de Fessenheim. Nous le savons maintenant, la centrale de Fessenheim a été fermée pour des raisons politiciennes sur lesquelles je ne reviendrai pas. Tout le monde s'accorde sur ce constat, mis à part quelques personnes aux motivations obscurantistes. Que faire maintenant de cet outil industriel, qui, par chance, n'a pas encore été démantelé de façon définitive ? Nous pensons que la centrale peut rouvrir pour une exploitation normale, mais vous ne le voulez pas : dont acte, nous n'allons pas continuer à pleurer sur le lait renversé.

Puisque la prolongation de l'activité des réacteurs est envisagée, nous vous proposons d'utiliser Fessenheim comme démonstrateur de la faisabilité de l'allongement de la vie des réacteurs jusqu'à soixante, voire quatre-vingts ans. Comme le site n'a plus d'activité économique, nous pourrions l'utiliser pour conduire les expériences et les démonstrations techniques nécessaires. Voilà une ouverture de bon sens, vierge de toute idéologie et à même de rentabiliser économiquement le site. En effet, le seul argument réellement opposable à la réouverture de Fessenheim réside dans le fait que son exploitation ne suffirait pas à financer les travaux ; mais si l'on table sur une activité de quatre-vingts ans, la quantité phénoménale d'électricité produite pendant trente ans assurerait sa viabilité économique.

Nous essayons de sortir des postures politiciennes pour proposer une solution pragmatique. Le groupe Rassemblement national envisage évidemment de réécrire cet amendement si le Gouvernement et la majorité pensaient qu'une rédaction différente serait nécessaire pour atteindre l'objectif.

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Il faut en effet rédiger différemment l'amendement. Réfléchir à l'utilisation de Fessenheim est pertinent ; en revanche, dire que cet outil peut servir de démonstrateur à la prolongation de la durée de vie des réacteurs jusqu'à soixante ou quatre-vingts ans me semble illusoire, si j'en crois les échanges que j'ai eus depuis quelques jours sur le sujet – et ce, pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, le réacteur est à l'arrêt depuis deux ans et rien ne sera fait avant plusieurs mois, donc la période d'inactivité sera de toute façon longue et il n'aura pas subi l'usure qu'il aurait dû connaître. Ensuite, la quatrième visite décennale n'ayant pas été réalisée, de nombreux travaux post-Fukushima ne l'ont pas été non plus. Enfin, pour poursuivre l'activité du réacteur au-delà de soixante ans, il faut effectuer la cinquième visite décennale et réaliser des mises à niveau. On ne pourra pas faire tout cela à Fessenheim, donc le référentiel ne sera pas le bon. Voilà pourquoi je vous propose de retirer l'amendement pour éventuellement le réécrire en proposant un spectre de solutions plus large que la seule prolongation de la durée de vie.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Avis défavorable sur l'amendement et le sous-amendement.

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Le Rassemblement national souhaite multiplier par deux la durée de vie des centrales initialement prévue. Pourquoi pas par trois ou par quatre ? Que l'on soit pronucléaire ou antinucléaire – je ne sais même pas si ces mots ont un sens – certaines centrales fermeront. Cela vient d'être démontré, Fessenheim ne pourra pas être un bon démonstrateur de la prolongation de la durée de vie des centrales au-delà du raisonnable. Mais elle pourrait être un bon démonstrateur du démantèlement des centrales existantes, qu'il faudra nécessairement réaliser.

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Les sites de démantèlement existent déjà et fonctionnent très bien ; merci à ceux qui assurent cette mission pour notre pays !

Madame la rapporteure, nous pouvons reprendre la rédaction de l'amendement, mais vos arguments ne sont pas très convaincants. Selon vous, on ne peut pas utiliser le réacteur car il est moins usé que s'il n'avait pas été arrêté : j'avoue que le raisonnement m'échappe. Quant aux quatrième et cinquième visites décennales, vous vous montrez quelque peu prisonnière de l'administration. Notre but, c'est de satisfaire à l'ensemble des exigences techniques des deux visites, et d'en tirer les enseignements sur ce qui manque pour prolonger le fonctionnement du réacteur.

Je ne suis pas là pour polémiquer et j'entends votre proposition : nous maintenons l'amendement et le sous-amendement, puis nous réfléchirons au moyen de rédiger un dispositif encore plus consensuel.

La commission rejette successivement le sous-amendement et l'amendement.

Amendement CE142 de M. Hervé de Lépinau.

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Cet amendement fait écho aux auditions de la commission d'enquête sur la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France, au cours desquelles nous avons appris que Mme Dominique Voynet se gaussait d'avoir tué la filière, tout cela étant la conséquence d'un accord politique entre M. François Hollande et les écologistes, comme nous l'a affirmé sous serment Mme Élisabeth Borne, jeudi dernier. Nicolas Hulot, lui, n'a rien vu ni rien compris – on se demande ce qu'il faisait au gouvernement.

Il serait donc utile d'obtenir un rapport dressant le bilan de cette opération de « pieds nickelés » qui a conduit au démantèlement d'un fleuron industriel français. L'ancien président-directeur général d'EDF Jean-Bernard Lévy nous a dit qu'à partir de 2012, on lui avait demandé d'embaucher des ingénieurs non pour maintenir et améliorer les centrales nucléaires, mais pour les démanteler. Ce rapport sur l'objectif de réduction de la part de l'électronucléaire à 50 % du mix électrique dégagerait à coup sûr des responsabilités politiques : nous le devons aux Français.

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La commission d'enquête à laquelle vous avez fait allusion travaille sur le sujet ; en outre, de nombreuses études ont déjà été publiées ; enfin, RTE a lancé une consultation sur le mix énergétique d'ici à 2035, qui couvre cette question. Je demande le retrait de l'amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

La commission d'enquête a vocation à répondre à votre première question sur la recherche de responsabilités – et il semble que ces dernières soient largement partagées.

Une étude de la filière sera présentée le 15 avril, qui montre les besoins en compétences dans le nucléaire. En 2016 et en 2020, une cartographie de la filière nucléaire a été publiée : en réalité, le nombre d'emplois reste stable voire progresse. Ces documents répondent amplement à votre question. Avis défavorable.

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Rapporteur de la commission d'enquête, j'invite simplement notre collègue à lire mon rapport !

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE357 de Mme Florence Goulet.

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L'amendement vise à demander un rapport sur la formation des professionnels dans l'ensemble de la chaîne de la conversion des déchets d'origine nucléaire.

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La question des métiers a été intégrée dans le texte grâce à l'adoption de plusieurs amendements à l'article 1er D. Demande de retrait.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis.

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Nous allons retirer notre amendement.

Il y a un défaut en France – et pas seulement dans la majorité macronienne : quand une erreur a été faite, les grands corps, les responsables politiques, tout ce que le pays compte d'élites refusent, au nom d'un orgueil mal placé, de la reconnaître. Déterminer la responsabilité de cette erreur n'est pas le sujet – et, en l'occurrence, la commission d'enquête le fera. Mais qu'au moins on admette cette erreur, pour chercher une solution ! Que ce soit le méchant RN ou le gentil macroniste qui le dise n'y change rien. Nous le savons tous ici, surtout la nouvelle génération : l'orgueil mal placé de nos élites a entraîné beaucoup de lourdeurs et d'erreurs que les Français paient très cher ; rompons avec lui !

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Cela n'a rien à voir avec le RN. Il y a un petit côté Calimero dans votre intervention… J'ai déjà répondu sur le fond. Pour le reste, je ne me considère pas comme faisant partie des grands corps.

L'amendement est retiré.

Article 11 : Ratification de l'ordonnance n° 2016-128 du 10 février 2016 portant diverses dispositions en matière nucléaire

Amendement CE145 de Mme Lisa Belluco

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L'ordonnance n° 2016‑128 du 10 février 2016 autorise l'importation et l'exportation de combustibles usés et de déchets radioactifs. Elle prévoit que des combustibles usés produits en France puissent être traités à l'étranger avant que les déchets radioactifs ne soient renvoyés vers la France. De manière symétrique, des combustibles usés produits à l'étranger peuvent être traités en France, du moment que les déchets radioactifs sont renvoyés dans le pays d'utilisation du combustible.

Le transport de matériaux radioactifs représente un risque pour les populations. De plus, la France devrait être capable de traiter elle-même ses combustibles usés sans faire appel à des puissances étrangères. Sinon, où sont passées notre souveraineté et notre indépendance énergétique ?

La dépendance de la France vis-à-vis de la Russie, par l'intermédiaire de Rosatom et de Tenex pour le traitement de l'uranium déchargé de ses réacteurs nucléaires, est une menace directe pour son autonomie énergétique et sa sécurité.

Par cet amendement, il est donc demandé que les importations et exportations de combustibles usés à des fins de traitement soient interdites. Si la majorité refuse de le voter, la preuve sera faite que nous sommes pieds et poings liés face à Rosatom et à Poutine.

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L'enrichissement et la conversion de l'uranium de retraitement (URT) en uranium de retraitement enrichi (URE) n'ont lieu que dans un seul site de notre parc : celui de Cruas. Mais nous pourrions tout à fait nous passer du recours à Rosatom et à la Russie en construisant en France des usines de retraitement et d'enrichissement qui produiraient davantage de MOX : j'y suis tout à fait favorable et j'espère que, si nous le proposons, vous voterez pour… Avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Premièrement, ce qui a trait au combustible usé n'a pas d'impact sur notre indépendance, puisque nous maîtrisons toute la chaîne et pouvons nous passer de ce processus : l'URT converti est un complément possible, mais nous pouvons faire tourner les centrales sans lui.

Deuxièmement, après que le Conseil politique nucléaire a passé en revue tous les enjeux de la filière, de l'amont à l'aval, j'ai été chargée, avec EDF et Orano, d'examiner l'opportunité de développer en France des capacités de traitement de l'URT. En effet, il demeure préférable d'en disposer, même si ce n'est pas indispensable ; en outre, d'autres pays européens pourraient être intéressés, ce qui offrirait des perspectives d'export à la filière française. Notre objectif est de formuler des propositions d'ici à la fin de l'année.

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De deux choses l'une. Soit nous n'avons pas besoin de ces contrats, auquel cas, en cette période de triste anniversaire de la guerre en Ukraine, nous avons le devoir moral d'y mettre fin ; soit vous ne dites pas la vérité – ou vous l'arrangez – en prétendant que nous pouvons nous en passer. Dans ce cas, il faut le reconnaître, car cette question est importante à l'heure de définir la stratégie énergétique française et d'accélérer le développement du nucléaire.

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Nous partageons ces préoccupations, mais je rejoins le point de vue de la rapporteure.

Désolé de prononcer deux mots qui fâchent, mais il y a là une question de marché, d'une part, et d'industrie, d'autre part. Il existe un marché international de l'énergie dans lequel la France est intégrée – c'est encore plus sensible en ce qui concerne le nucléaire. Par ailleurs, on a affaire, en matière énergétique, à une industrie. Si on peut être disposé – et je le suis – à une réflexion concernant nos capacités d'installation sur le territoire, ce n'est certainement pas en interdisant à des entreprises de faire du commerce sur le marché international que l'on favorisera nos capacités de production.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE580 du Gouvernement

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Cet amendement permet d'abroger des dispositions du code de l'environnement relatives aux règles d'incompatibilité et de déontologie applicables aux membres de la commission des sanctions de l'ASN, car ces dispositions sont redondantes par rapport aux obligations de déontologie applicables à toutes les autorités administratives indépendantes.

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En ce qui concerne l'amendement précédent, le Gouvernement devrait présenter d'urgence au Parlement un plan pour résoudre le problème qui se pose avec la Russie. Comme l'a dit la rapporteure, il existe des moyens techniques très faciles à mettre en œuvre pour rassurer les Français quant à notre manque de souveraineté concernant ces déchets nucléaires.

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L'entreprise Rosatom est impliquée dans l'occupation de la centrale de Zaporijjia. Dès lors, comment justifier par quelque considération que ce soit l'envoi à Rosatom de matières nucléaires françaises pour qu'elles nous reviennent ensuite – a fortiori si, comme on nous le dit, nous n'avons pas besoin de cette étape ? Pourquoi le secteur du nucléaire échappe-t-il aux sanctions internationales qui frappent la Russie de Poutine ?

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

D'abord, en montants exportés ou importés, le premier secteur énergétique qui échappe à l'application des sanctions, loin devant le nucléaire, est le gaz. Nord Stream ne fonctionne plus, mais une partie du gaz naturel liquéfié importé en Europe vient bien de Russie.

Ensuite, EDF est liée par contrat avec une entreprise russe et la non-exécution de ce contrat apporterait plus d'argent à la Russie que son exécution minimale. Nous ne sommes pas idiots : nous donnons le minimum d'argent à la Russie. C'est aussi simple que cela.

Enfin, vous connaissez comme moi le cycle du combustible : l'URT n'est pas indispensable pour faire fonctionner les centrales, nous ne sommes donc pas dépendants à cet égard ; en revanche, c'est un élément de recyclage qui permet de réduire l'ampleur de nos déchets – mais, en contrepartie, les combustibles usés nous reviennent.

La commission adopte l'amendement.

Amendement CE597 du Gouvernement

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Il vise à harmoniser les délais applicables devant la commission des sanctions de l'ASN.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.

Amendement CE146 de Mme Lisa Belluco

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) . Cette succession d'amendements sur le même sujet finira-t-elle par vous faire rougir ? L'énergie nucléaire française est présentée comme la garantie de notre prétendue indépendance énergétique, mais si celle-ci était réelle, toutes les étapes de la production seraient assurées en France et toutes les matières extraites et produites sur le territoire national : il n'y aurait pas besoin d'importer des matières nucléaires et les exportations, à l'origine de transports qui représentent un danger intolérable pour les populations, ne seraient pas autorisées.

Le présent amendement tend donc à interdire l'importation et l'exportation de matières nucléaires. Un peu de cohérence, mesdames et messieurs les députés !

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Avis défavorable. Vous confondez autonomie et autarcie. Nous pouvons tout à fait avoir des échanges avec les pays voisins dans des domaines qui touchent à la politique énergétique.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Si on va par là, nous allons avoir de gros problèmes à propos des énergies renouvelables : nous sommes dépendants pour le lithium – 98 % de sa transformation est réalisée en Chine – ou les aimants permanents destinés aux éoliennes, et je pourrais multiplier les exemples. Le secteur dans lequel nous sommes le moins dépendants, c'est le nucléaire, au côté de l'hydraulique, ainsi – à la rigueur – que du biogaz et du gaz – mais ce dernier est fossile. Voilà pourquoi nous construisons, dans tous les secteurs, des filières aux approvisionnements diversifiés ou ayant une capacité de production en France.

Cessez d'opposer les énergies renouvelables au nucléaire ! Celui-ci va contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique. Le simple fait de franchir l'étape des visites décennales va lui permettre de fournir 100 térawattheures de plus en production d'ici à la fin de la décennie, ce qui correspond à peu près au potentiel des énergies renouvelables en poussant loin les curseurs de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Le ratio sera donc de cinquante-cinquante. N'oubliez pas que le potentiel de production de certains réacteurs et centrales a atteint un point bas et va repartir à la hausse, sans grande difficulté : 380 à 400 térawattheures, cela n'a rien de fou, c'est le niveau que l'on atteignait en 2017. Une grosse partie de la diminution de nos émissions de gaz à effet de serre et du développement de nos énergies vertes va venir du développement du nucléaire dans les quinze ans qui viennent.

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Mme la ministre conteste donc les chiffres de RTE, dont le scénario le plus nucléarisé – incluant le prolongement des centrales, à propos duquel nous n'avons pas la confirmation des autorités de sûreté, et les nouvelles installations – évalue à 50 % en 2050 la part du nucléaire dans notre production d'électricité.

Toutes nos compétences en matière d'énergies renouvelables ont été bradées à cause du dumping chinois ; l'Europe n'a pas daigné les protéger. Mais, dans le domaine du nucléaire, on ne peut pas dire que les accords que M. Proglio a passés avec la Chine et la technologie de Westinghouse nous assurent une technologie 100 % française non plus ! Nous n'avons pas d'uranium sur notre territoire. Quant au lithium, Madame la ministre, vous pouvez continuer d'écouter l'apôtre Jancovici, la réalité est que la majorité des matières premières ou rares est nécessaire pour les automobiles individuelles électriques, ce qui ne correspond pas au modèle des énergies renouvelables !

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Madame la ministre, cet amendement ne remettrait-il pas en cause l'approvisionnement en matières nucléaires nécessaire à la médecine nucléaire ? Je n'ai pas trouvé dans le texte d'origine les précisions correspondantes.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

C'est parfaitement exact : pour certains isotopes, nous sommes dépendants d'autres pays, notamment la Russie.

La commission rejette l'amendement.

La commission adopte l'article 11 modifié.

Après l'article 11

Amendement CE445 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

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Le projet de loi se focalise sur la construction des EPR 2 sans s'interroger plus largement sur la filière nucléaire, de l'approvisionnement en uranium à la gestion des déchets – dont les plus dangereux sont radioactifs pour des millions d'années.

Les enjeux du cycle de vie du combustible engageant le pays pour des centaines d'années, voire des milliers, comme dans le cas du projet Cigéo à Bure, il apparaît nécessaire de leur dédier une loi de programmation quinquennale, allant de l'approvisionnement à la valorisation potentielle des différents types de déchets radioactifs ou à leur enfouissement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis : il y a d'autres lois de programmation pour cela.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE177 de Mme Julie Laernoes

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Il s'agit à nouveau de la souveraineté et de l'indépendance énergétique de la France – j'insiste, parce que c'est un des éléments de l'exposé des motifs du projet de loi. C'est un argument souvent mis en avant à propos du nucléaire, mais dont on s'aperçoit en creusant qu'il ne correspond pas à la réalité. Si notre ambition est l'indépendance, il faut, par cohérence, cesser l'exportation d'uranium de retraitement.

Les conditions environnementales et de stockage à Tomsk, en Sibérie, n'ont jamais été rendues publiques et les autorités françaises n'ont aucun moyen de les vérifier. Le Gouvernement a d'ailleurs, à un moment donné, demandé aux industriels du secteur nucléaire de mettre un terme à leurs exportations d'uranium de retraitement vers la Russie. Cela a notamment été confirmé, le 18 novembre 2022, lors d'une réunion de l'Association nationale des comités et commissions locales d'information (ANCCLI) où l'entreprise EDF a fait état de cette demande.

Voilà pourquoi notre amendement tend à mettre fin à l'exportation et au stockage à l'étranger de l'uranium de retraitement.

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Défavorable. Nous avons déjà eu des échanges sur le cycle amont et aval.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE312 de M. Maxime Laisney.

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Nous demandons qu'un dixième des membres de l'Assemblée nationale ou du Sénat puissent saisir l'ASN pour lui demander de formuler un avis ou rendre une étude. Cette possibilité est aujourd'hui restreinte au Gouvernement, aux commissions compétentes des deux Chambres et à l'Opecst.

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Pourquoi un dixième ? L'Opecst peut saisir l'ASN, et cette agence a toujours montré une grande disponibilité à l'égard de la représentation nationale. Avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Avis défavorable. Les possibilités de saisine nous semblent déjà assez larges.

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Je soutiens cet amendement de bon sens. Vous auriez pu proposer un nombre différent par sous-amendement, Madame la rapporteure… Il me semble utile, en démocratie, que l'ASN puisse être saisie de différentes façons.

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Je comprends l'intention, mais je constate qu'aucun parlementaire n'a été empêché de saisir l'ASN, que ce soit par l'intermédiaire des commissions ou de l'Opecst, qui fournit un travail transpartisan remarquable – et dont les rapports auraient souvent mérité d'être mieux lus.

Le problème ne réside pas, à mon sens, dans la saisine de l'ASN ou la disponibilité de l'information.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Pour être tout à fait précise, la commission des affaires économiques, la commission du développement durable et toute commission d'enquête peuvent saisir l'ASN. C'est large !

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Je vous confirme par ailleurs que notre commission et celle du développement durable s'apprêtent à saisir l'Opecst sur le sujet de la décarbonation de l'industrie aéronautique.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CE187 de M. Charles Fournier et CE292 de Mme Mathilde Panot.

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Nous proposons d'interdire le recours à la sous-traitance et à l'intérim dans le secteur du nucléaire. Pour les assidus de la commission d'enquête, c'est l'une des raisons de la perte de compétences de la filière nucléaire française.

Dans les centrales nucléaires, 80 % des travailleurs sont des personnels sous-traitants – un record en comparaison du taux de 25 % généralement toléré dans les autres secteurs industriels. Plus mobiles, moins formés et moins chers que les agents EDF, ces travailleurs ont hérité des tâches les plus ingrates et les plus dangereuses. Ils effectuent l'essentiel des tâches de maintenance des centrales et sont les plus exposés à la radioactivité, à l'amiante, aux produits cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction (CMR). Chaque année, ce sont entre vingt et trente mille travailleurs intervenant en sous-traitance dans l'industrie nucléaire qui sont directement affectés aux travaux sous rayonnements.

En 2018, Mme Barbara Pompili, alors rapporteure de la commission d'enquête parlementaire sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires présidée par Paul Christophe, avait dénoncé ces risques. L'accident de la centrale de Paluel, survenu en mars 2016, constitue un exemple édifiant des conséquences de la sous-traitance sur la sécurité et la sûreté des centrales.

La construction de six nouveaux EPR 2 d'ici à 2040, le projet de huit EPR 2 supplémentaires d'ici à 2050 et la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires existantes souhaitée par le président Macron risquent d'accentuer encore plus le recours à la sous-traitance.

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Les sous-traitants du nucléaire reçoivent 80 % à 90 % des doses annuelles de rayonnement. Il n'est pas anodin que les tâches les plus dangereuses soient confiées aux sous-traitants plutôt qu'aux salariés sous statut de la branche des industries électriques et gazières. Et le grand carénage entraîne une hausse importante de l'activité, essentiellement confiée à des sous-traitants. La responsabilité sociale des exploitants est passée par-dessus bord, externalisée.

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Interdire la sous-traitance n'aurait absolument aucun sens : toute industrie a besoin de sous-traitants. Un encadrement existe déjà, notamment une limitation à deux rangs de sous-traitance. Dépassons les fantasmes que l'on entend ici ou là sur huit, neuf ou dix niveaux de sous-traitance : ce n'est tout simplement plus autorisé.

Quant au suivi des doses reçues par les salariés d'EDF et des sous-traitants, il est rigoureux : 20 millisieverts par an sont autorisés par la loi, 14 sont rapportés par l'exploitant pour l'ensemble des salariés, sous-traitants ou non. Vous connaissez l'existence des contrôles en entrée de zone, du suivi dosimétrique régulier et de l'anthropogammamétrie au minimum une fois par an pour les travailleurs de catégorie A. Les règles sont très rigoureuses.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis.

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C'est lunaire et nous voterons évidemment contre ces amendements ! C'est le bal des pompiers pyromanes : si la sous-traitance a explosé, c'est en raison de l'abaissement de notre filière nucléaire ; vous demandez l'interdiction d'un phénomène à l'origine duquel vous êtes, à cause de vos accords électoraux avec les socialistes puis avec la Macronie. Vous êtes les responsables de la perte de compétences dans la filière nucléaire ! C'est le serpent qui se mord la queue.

Vous faites tout ce que vous pouvez pour bloquer la relance du nucléaire. C'est ridicule et scandaleux.

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Je préfère le bal des pompiers à celui des vampires… Je soutiendrai ces amendements. Le risque zéro n'existe pas, mais nous devons tout faire pour nous en approcher le plus possible. Ce doit être l'objectif de l'ensemble des acteurs de la filière nucléaire. Or on sait bien que le développement de la sous-traitance fait porter de réelles menaces sur la sûreté des installations.

Madame la rapporteure, vous dites qu'il y a un encadrement. Pouvez-vous nous garantir qu'il n'y a aucune sous-traitance de second rang dans nos installations nucléaires ?

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CE298 de Mme Aurélie Trouvé.

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Il s'agit encore des conditions de travail des salariés du nucléaire et des risques inhérents à cette activité, non seulement pour eux mais pour la sûreté et la sécurité des centrales en général. La NUPES a mené un long dialogue avec des représentants des salariés de ces filières et les préoccupations que nous exprimons ici sont les leurs.

Cet amendement propose de limiter la sous-traitance à des entreprises enregistrées dans l'Union européenne et régies par son droit. Le recours à la sous-traitance extracommunautaire entraîne en effet des risques, en raison des différences importantes entre les règles européennes et celles qui ont cours outre-Atlantique.

Nous proposons aussi que les personnels employés soient sous contrat de droit français, grâce à une filiale en France ou à une structure de portage de droit français. En effet, le détachement de travailleurs qui continuent de dépendre du droit de leur pays d'origine, déjà à l'œuvre dans certains métiers du nucléaire, favorise la mise en concurrence des systèmes nationaux de protection sociale et environnementale et mène au moins-disant. Ce mécanisme conduit par exemple à des fraudes massives par lesquelles les salariés se voient ponctionner des sommes au titre d'assurances et de prestations tout simplement inexistantes. Les syndicats, les associations et l'ASN elle-même, qui fait office d'inspection du travail dans le secteur, ont amplement documenté ce phénomène, à Flamanville notamment.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.

Amendement CE291 de Mme Mathilde Panot.

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Cet amendement vise à abaisser le plafond de rayonnement reçu par les agents qui effectuent le travail de maintenance et à faire en sorte que toutes les tâches ayant trait à la sûreté et à la radioprotection soient exercées par des agents statutaires.

Certes, toutes les industries connaissent la sous-traitance, mais dans le domaine du nucléaire, en cas d'arrêt de tranche, 80 % des activités sont externalisées ! On ne peut pas nous dire que c'est normal tout en déplorant qu'EDF ait perdu des compétences…

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Vous proposez d'abaisser le plafond d'exposition aux rayonnements ionisants à 3 millisieverts pour les personnels de catégories B. Sachez que tout Français en reçoit en moyenne 4,5, du fait du rayonnement tellurique et du soleil notamment. Défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE339 de Mme Géraldine Grangier.

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Cet amendement vise à ce que les travailleurs sous-traitants qui participent au déploiement de la filière électronucléaire bénéficient des mêmes mesures d'information sur le rayonnement que les autres salariés.

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Les règles de suivi de l'exposition aux rayonnements ionisants s'appliquent de la même façon aux salariés d'EDF et aux sous-traitants. Votre amendement est satisfait. Demande de retrait.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE444 de Mme Anna Pic.

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Cet amendement vise à ce que le prochain plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR) soit remis par le Gouvernement au Parlement au plus tard le 30 juin 2025. Ne nous dites pas que la loi le prévoit déjà : le dernier, qui concernait la période 2016-2018, a été remis en 2017. Le rapport sur la préparation de la cinquième édition du PNGMDR que notre collègue Émilie Cariou a corédigé avec le sénateur Bruno Sido au nom de l'Opecst en 2022 est paru alors même que la version définitive de ce plan n'avait pas encore été transmise au Parlement : c'est stupéfiant, cela révèle une confusion totale. À l'image de celui des déchets, d'autres sujets essentiels, dont les conséquences peuvent être terribles, ne sont pas éclaircis. Le minimum, dans une démocratie moderne, est que ce plan soit établi en amont du rapport relatif à sa préparation et du plan suivant.

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Le dernier PNGMDR a été remis en 2022. Pour le reste, j'ai des doutes. Je vous propose de retirer votre amendement et que l'on en reparle d'ici à la séance.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Le dernier décret sur la gestion des déchets est paru le 15 décembre. J'ai envoyé le rapport auquel vous faites référence à la présidente de l'Assemblée nationale et au président du Sénat le 14 février dernier. Il n'y a pas de raison que l'on ne respecte pas le même processus pour le prochain plan. Je ne vois pas ce que votre amendement apporterait : c'est quelque chose que je suis déjà censée faire, et je l'ai fait.

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À deux reprises, en 2017 et en 2022, sur des questions particulièrement stratégiques, il y a eu une défaillance du Gouvernement dans la remise de ce plan au Parlement. Cela justifie l'ajout de cette précision dans la loi. La moindre des choses est que le rapport du Gouvernement vienne éclairer le plan suivant.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

C'est prévu par l'article L. 542-1-2 du code de l'environnement. Je n'ai fait que l'appliquer.

L'amendement est retiré.

Amendement CE88 de Mme Marie Pochon.

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Ce texte, qui veut relancer le nucléaire, n'apporte pas de réponse à la question essentielle de la capacité à gérer pendant des centaines d'années des déchets radioactifs. Cela soulève deux enjeux : la stabilité des gouvernements au cours de cette période, et la transmission de la mémoire relative au contenu du stock et à son emplacement. Ce n'est évidemment pas par un amendement ou un rapport que l'on résoudra cette question, mais je trouve regrettable que ce sujet fondamental ne soit pas traité de manière approfondie et cohérente.

La gestion et le stockage des déchets radioactifs atteint des prix exorbitants, régulièrement revus à la hausse. À lui seul, le projet Cigéo d'enfouissement des déchets radioactifs à haute activité et à durée de vie longue devrait coûter entre 25 et 30 milliards d'euros, sans compter le coût des installations de stockage des déchets radioactifs de faible ou de moyenne activité à vie longue. De plus, le stock ne va cesser de croître, compte tenu des nouveaux projets de réacteurs. Il est donc essentiel d'améliorer la transparence autour de la gestion des déchets. Les dizaines de milliards d'euros d'investissements nécessaires ne viendront a priori pas d'EDF, qui est dans une situation financière extrêmement précaire, ni du privé, bien trop prudent face aux risques d'emballement des coûts et des délais, au manque d'ingénieurs, aux exigences de formation. Le Gouvernement en est réduit à envisager de faire payer l'ensemble des Françaises et des Français en mobilisant l'épargne du livret A. On a besoin, à tout le moins, d'un rapport sur cette question !

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Le PNGMDR comporte déjà une estimation des coûts de gestion et précise les mécanismes de financement. Votre amendement me paraît donc satisfait. De façon générale, les déchets constituent évidemment un sujet majeur, dont il faut débattre plus longuement dans un cadre approprié. Mais je ne pense pas que ce rapport permette d'atteindre l'objectif visé.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

L'article L. 542-12 du code de l'environnement oblige l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs à proposer au ministre « une évaluation des coûts afférents à la mise en œuvre des solutions de gestion à long terme des déchets radioactifs de haute et de moyenne activité à vie longue » qui est transmise au Parlement. Par ailleurs, EDF est tenue de couvrir ses engagements et ses coûts liés aux déchets, qui font l'objet d'une gestion financière précisée dans le rapport d'activité.

Un premier chiffrage des coûts afférents à la mise en œuvre des solutions de gestion à long terme des déchets radioactifs a été arrêté par la ministre chargée de l'énergie en 2016, à hauteur de 25 milliards d'euros aux conditions économiques de 2011. Ce coût a vocation à être actualisé régulièrement, en tenant notamment compte de l'actualisation du projet Cigéo, qui aura lieu lorsque nous disposerons des conclusions de l'enquête publique.

L'information relative à la gestion des déchets nucléaires figure donc dans le débat public. Elle est transmise au Parlement au fur et à mesure de sa construction.

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Merci pour vos réponses : je sais à présent que l'information est disponible. Sauf que je ne sais toujours pas qui assumera ces coûts, ni comment ils seront financés. Il s'agit pourtant de sommes significatives.

Par ailleurs, je suis heureuse que Mme la rapporteure reconnaisse qu'il s'agit d'un sujet essentiel. Je regrette qu'il ne soit pas traité en amont d'une relance qui entraînera la création de nouvelles installations, et donc la production de nouveaux déchets en quantité importante. J'aimerais que nous dépassions les articles du code de l'environnement et autres textes de loi pour avoir un débat de fond sur ces éléments structurants d'une politique énergétique.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

EDF, Orano, le CEA et Framatome doivent couvrir les coûts afférents aux déchets. Il n'y a aucune ambiguïté sur ce point. Les entités qui ne sont pas reliées à l'État, comme le CEA, disposent pour cela d'actifs cantonnés.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE89 de Mme Marie Pochon.

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Cet amendement demande un rapport sur la gestion des déchets radioactifs par les exploitants et les risques encourus. Ce sujet préoccupe particulièrement Mme Pochon, qui a dans sa circonscription un village de 334 habitants, Solérieux, où plus de cent mille fûts rouillés provenant d'activités nucléaires, dont certains fuient, sont entassés illégalement dans une simple décharge, en pleine zone forestière.

D'après le rapport sur les conséquences des installations de stockage des déchets nucléaires sur la santé publique et l'environnement, publié en 2000, « la décharge de classe II de Solérieux donne l'exemple des dérapages dans les pratiques : une installation prévue initialement pour des déchets ménagers, des déblais, des gravats, des cendres et des déchets industriels et commerciaux, à condition qu'ils ne soient ni toxiques ni susceptibles de s'enflammer, finit par accueillir tous types de déchets y compris des fluorines contenant des traces d'uranium et susceptibles de libérer en cas d'incendie des quantités importantes d'acide fluorhydrique ».

Chacun comprendra la préoccupation de Mme Pochon concernant le stockage des déchets et sa volonté d'alerter sur le risque qui en résulte pour la santé des habitants. Nous devons être bien plus exigeants en la matière, s'agissant notamment des sanctions en cas d'action illégale, comme cela semble être le cas en l'espèce.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Avis défavorable. Le plan national de gestion des matières et déchets radioactifs répond à ces préoccupations.

La commission rejette l'amendement.

Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CE22 de Mme Hélène Laporte.

Article 12 : Clarification des règles de parité applicables à la composition du collège de l'Autorité de sûreté nucléaire

La commission adopte l'amendement rédactionnel CE539 de Mme Maud Bregeon, rapporteure.

Amendement CE313 de M. Maxime Laisney.

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Il s'agit, afin de faire vivre la parité, d'attribuer la présidence de l'ASN alternativement à une femme et à un homme.

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Je partage l'intention, mais je considère que ce qui fait un bon président de l'ASN n'est pas son genre, mais ses compétences et son expérience, qui seules doivent nous guider lors de sa nomination. Avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

La rédaction actuelle sert autant que possible un objectif de parité. Avis défavorable.

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Cet amendement est d'autant plus absurde que, pendant de longues décennies, les plus grands experts en matière nucléaire étaient des expertes. Il aurait été dommage de se passer du talent de ces femmes pour promouvoir un homme moins compétent.

La commission rejette l'amendement.

La commission adopte l'article 12 modifié.

Article 13 : Renforcement des peines applicables aux délits d'intrusion sur les sites nucléaires

Amendements de suppression CE314 de Mme Aurélie Trouvé et CE418 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

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L'article 13 n'a d'autre objet que de criminaliser les militants écologistes qui s'opposent pacifiquement au nucléaire, en multipliant par deux ou trois le montant des amendes et la durée des peines de prison prévues à l'encontre des personnes qui s'introduisent sans autorisation sur un site nucléaire ou encouragent d'autres personnes à s'y introduire.

Les peines de prison et les amendes prévues sont déjà très lourdes, bien plus, d'ailleurs, que les sanctions visant les exploitants qui violent les règles environnementales et de sûreté : la plupart de ces violations sont sanctionnées par des contraventions de cinquième classe. Par exemple, il faut compter 1 500 euros d'amende pour le rejet de substances radioactives dans les nappes phréatiques, alors que s'introduire en réunion sans autorisation sur le site d'une centrale nucléaire est d'ores et déjà passible de trois ans de prison et de 45 000 euros d'amende.

Cet article n'a aucun effet établi sur la sûreté nucléaire. Il nous conduit sur la voie d'une surenchère pénale aussi inutile que dangereuse, dont le seul effet est de stigmatiser davantage les oppositions et les alertes pacifiques en matière d'énergie nucléaire.

Si vous voulez vraiment protéger les Français, vous feriez mieux de renoncer au projet de démantèlement de l'IRSN, dont le conseil d'administration lui-même dit qu'il peut entraîner une paralysie du système de contrôle en matière de radioprotection et de sûreté nucléaire !

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Nous voulons supprimer cet article, qui prévoit des peines complètement disproportionnées au regard des infractions concernées.

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Mon amendement CE598 modère un peu l'alourdissement des peines prévu par le Sénat, qui pose effectivement problème en matière de proportionnalité des peines, certains délits devenant des crimes.

Mais si j'admets que le Sénat va trop loin, je partage son intention de protéger nos installations et de lutter contre une forme de désobéissance civile qui n'a clairement pas sa place dans les centres nucléaires de production d'électricité (CNPE). Demande de retrait ou avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Je suggère le retrait de l'amendement au profit de l'amendement CE598, qui rétablit des peines plus équilibrées.

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Mon amendement CE143 après l'article 13 offre une autre solution. Il suffit de classer les installations abritant des matières nucléaires en zones de défense hautement sensibles pour éviter ces intrusions intempestives dont le seul objectif est de dire que le nucléaire n'est pas sûr. Faites-en des zones de défense et je doute que Greenpeace et consorts retournent s'y balader !

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Je soutiens les amendements. Je ne vois pas l'intérêt d'alourdir les peines en vigueur, qui sont appliquées.

Les installations nucléaires sont déjà classées comme hautement sensibles. De plus, l'honnêteté et la vérité imposent de dire à l'Assemblée nationale que certaines actions de désobéissance civile ont été utiles à la nation, pour l'amélioration de leur sécurité. C'est peut-être difficile à entendre, chers collègues du Rassemblement national, mais c'est la vérité.

La commission rejette les amendements.

Amendement CE598 de Mme Maud Bregeon.

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Cet amendement vise à augmenter le quantum des peines prévu par le droit actuel – elles seraient quasi systématiquement doublées – mais dans le respect du principe de proportionnalité des peines.

La commission adopte l'amendement.

La commission adopte l'article 13 modifié.

Après l'article 13

Amendement CE225 de M. Maxime Laisney.

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Le présent texte ne doit entrer en vigueur qu'après la promulgation de la loi de programmation sur l'énergie et le climat (LPEC).

Madame la ministre, vous vous êtes défendue d'avoir des dispositions programmatiques dans ce projet de loi en arguant que, s'il n'y avait plus de plafond concernant la part du nucléaire dans le mix électrique, il n'y avait pas non plus de plancher. Mais ce texte a bel et bien touché à la programmation pluriannuelle de l'énergie. Il ne peut donc pas entrer en vigueur tant qu'on n'a pas adopté la LPEC.

Le discours de Belfort a annoncé la construction de six nouveaux EPR et le lancement d'études pour huit réacteurs additionnels. Depuis, on est passé à quatorze et des rapports doivent encore dire si l'on peut faire davantage. À nos yeux, c'est inadmissible.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis, car c'est une loi dont l'essentiel des dispositions sont administratives et d'application immédiate.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE208 de M. Julien Dive.

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Malgré sa volonté affichée de mieux associer le public aux grands projets d'aménagement, la Commission nationale du débat public ne parvient pas à faire vivre le débat ni à faire participer les citoyens au processus de décision. Elle avait été créée en 1995 pour que les citoyens se réapproprient la parole et participent à la structuration de leur territoire. C'est un fiasco. Ses conclusions restent sans suite. À Notre-Dame-des-Landes, le débat public n'a pas empêché la controverse durant quinze ans. À Bure, en 2013, le débat a été boycotté et perturbé par des opposants – mais des citoyens réunis au sein d'associations disposant de faibles moyens ont, eux, réussi à faire entendre leur voix. Ce subterfuge démocratique coûte des millions d'euros chaque année au budget de l'État. Nous demandons la suppression de cette instance, ce qui ne doit pas nous dispenser d'une réflexion pour doter la France d'un outil efficace dans les territoires.

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Je considère qu'il s'agit d'un amendement d'appel, qui vise à remettre en question le fonctionnement du débat public préalable aux projets de construction d'EPR 2.

Au-delà du nucléaire, la CNDP accomplit un travail nécessaire sur des projets locaux et nationaux, dont on entend peu parler mais qui se déroulent dans de bonnes conditions. En revanche, le débat relatif aux nouveaux réacteurs et aux deux EPR 2 de Penly soulève effectivement des interrogations.

On ne peut pas reprocher au Sénat d'avoir adopté des mesures de programmation en parallèle du débat. La légitimité de la CNDP à conduire le débat ne limite en rien celle du Parlement à débattre et à légiférer, quoi que l'on pense de ses positions – j'ai du reste déposé des amendements de suppression d'un grand nombre de mesures programmatiques issues du Sénat.

Nous sommes en droit d'attendre que les débats organisés par cette instance soient impartiaux et constructifs. Or force est de constater, depuis le 27 octobre, que pour un certain nombre d'entre eux, cela n'a pas été le cas. On peut s'interroger, en particulier, sur l'invitation qui a été faite à des représentants d'associations ouvertement antinucléaires à venir présenter leurs travaux, lesquels ont été mis sur un pied d'égalité avec ceux de RTE, par exemple. Il faut améliorer la hiérarchisation de l'information et fournir davantage d'explications et de données factuelles.

L'arrêt unilatéral des débats par la CNDP, deux semaines avant la fin du débat public, soulève également des interrogations. Un certain nombre de sujets qui figuraient au programme n'ont pas été débattus : les questions du coût, du financement et de la rentabilité de l'EPR 2, le changement climatique, les incertitudes géopolitiques et leur impact sur le nucléaire… On a créé les conditions parfaites pour que chacun, qu'il soit pro- ou antinucléaire, puisse se dire que le débat n'a servi à rien, ce qui tend à délégitimer l'action du maître d'ouvrage et les choix qui seront faits par les pouvoirs publics. L'ensemble de ces raisons justifie que l'on mène une réflexion sur le sujet. Mais, s'agissant d'un amendement d'appel, avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Même avis. Mieux vaut avoir un débat public mené dans un certain cadre que pas de débat du tout, car cela peut déboucher sur l'expression de la colère dans la rue.

Le débat public qui a eu lieu récemment sur le mix énergétique s'est bien passé ; il a permis, par exemple, d'interroger des jeunes au sein d'un forum des jeunesses ; ses travaux sont en train d'être synthétisés et vous serez destinataires de ses conclusions. Le débat sur Penly et les nouveaux réacteurs, lui, s'est effectivement arrêté deux semaines avant la fin, ce que l'on peut regretter. On m'a expliqué qu'il était difficile de mener les réunions, car les opposants empêchaient les participants de parler, ce qui ne me paraît pas un argument très recevable. On a pu entendre également que les décisions étaient déjà prises, ce qui n'est pas vrai puisque la loi est toujours en discussion, vous êtes bien placés pour le savoir. En outre, le fait que la CNDP ait décidé de modifier le contenu du débat public n'est pas tout à fait conforme à la loi.

La CNDP doit cadrer le débat public en s'en tenant à ses missions premières et en s'assurant que le maximum de citoyens soient associés. À défaut, la discussion risque d'être confisquée par les tenants d'intérêts particuliers.

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Je m'interroge sur la conception que l'on a de notre démocratie lorsqu'on propose la suppression de la CNDP, alors même que l'on débat d'un sujet aussi important que le nucléaire. Lorsqu'un temps de débat est fixé, les pouvoirs publics doivent le respecter. Or, avant même la fin des débats, le président Macron a annoncé en grande pompe, lors du Conseil de politique nucléaire, non seulement le démantèlement de l'IRSN mais aussi la construction de nouveaux EPR, tandis que le Sénat introduisait des objectifs programmatiques dans le projet de loi. Il ne faut pas s'étonner que les citoyens aient eu l'impression qu'on les prenait pour des jambons !

Nous n'avons jamais eu de véritable débat, dans notre pays, sur le nucléaire, alors qu'il engage les générations à venir ; ce n'est pas un choix anecdotique.

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Nous voterons en faveur de cet excellent amendement de M. Dive, pour une raison simple : contrairement à ce que vient de dire la NUPES, il vise à se réapproprier la démocratie, qui a été émiettée. Les Français ont l'impression que le pouvoir est dispersé et que chaque vote est renégocié indéfiniment par des gens qui ne représentent qu'eux-mêmes et qui confisquent les débats, ces derniers permettant à ceux qui ont perdu de faire croire qu'ils ont gagné. Il faut cesser de faire perdre du temps à tout le monde et rétablir un peu d'autorité.

Ce sujet pose une question de civilisation : alors que des dictatures et des régimes autoritaires sont en train de déborder l'Occident en déployant des projets scientifiques et technologiques, des groupuscules neutralisent les démocraties en empêchant la science de prospérer là où elle est née et où elle devrait rester, en Occident.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CE461 de Mme Marie-Noëlle Battistel et CE441 de M. Gérard Leseul (discussion commune).

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En matière de sûreté nucléaire et de transition énergétique, la démocratie est vraiment fondamentale à tous les étages.

En 2006, la loi a disposé que, pour les déchets à vie longue, il fallait envisager à la fois l'enfouissement profond et l'enfouissement subsurfacique. Nous sommes en 2023 et aucune expérimentation sur l'enfouissement subsurfacique et sa réversibilité n'a été conduite. Nous avons besoin d'une veille démocratique et scientifique permanente, qui fait l'objet de l'amendement qui suit.

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Cet amendement CE441 de l'ensemble du groupe Socialistes et apparentés vise à créer au sein de l'Opecst, qui a développé depuis sa création une forte expertise en matière nucléaire, une section spécifiquement dédiée à ce domaine. Cela s'intégrerait parfaitement dans le cadre des missions dévolues à l'Office.

Je précise que ce qui a pu être tout à l'heure compris comme un amendement de l'Opecst était en fait un sous-amendement présenté par notre collègue Pierre Henriet en son nom propre, même s'il faisait écho à certaines recommandations du rapport de l'Opecst. Dans d'autres extraits, celui-ci plaidait pour un examen et une information préalables à toute décision.

L'Opecst est une structure plurielle et bicamérale qui a su se positionner comme un véritable centre d'expertise du nucléaire. Nous proposons de le doter de moyens supplémentaires avec la création d'une section dédiée au suivi de cette question.

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L'amendement CE461 propose d'instaurer une délégation parlementaire sur le nucléaire civil, mais il y a déjà l'Opecst.

Quant à la création d'une section spécifique au sein de l'Office, celui-ci établit lui-même son règlement intérieur, vous le savez, puisque vous en être membre, Monsieur Leseul. C'est dans le cadre de l'Opecst qu'il faut discuter de cette question, et non ici.

Sur l'idée que l'ASN rende compte de son action aux commissions compétentes, il est déjà possible d'auditionner ses représentants ; le préciser dans la loi me semble inutile.

Sur la remise d'un rapport portant sur le financement de l'expertise indépendante dans le domaine du nucléaire civil en France, nous avons déjà adopté un amendement du groupe Démocrate qui allait dans ce sens.

L'avis est donc défavorable sur ces deux amendements.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Il n'appartient pas au pouvoir exécutif de se prononcer sur un sujet qui concerne l'organisation de l'Assemblée nationale. Je ne peux donc donner qu'un avis de sagesse.

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Merci pour cette sagesse, même si elle n'est que partielle. L'Opecst, dont j'ai l'honneur d'être vice-président, est un petit office. Il n'a pas les moyens de traiter tous les sujets que ses membres souhaiteraient aborder. Nous aimerions renforcer ses moyens afin qu'il puisse éclairer l'Assemblée nationale et le Sénat sur les questions ayant trait au nucléaire.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CE303 de M. Maxime Laisney.

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Cet amendement demande au Gouvernement de remettre un rapport relatif aux moyens de la CNDP. La Commission nationale du débat public n'est actuellement dotée que de 12 équivalents temps plein travaillé (ETPT), ce qui pourrait peut-être expliquer pourquoi Mme la rapporteure se plaint de la façon dont elle organise les débats. Les activités de la CNDP ont été multipliées par six en trois ans et ce projet de loi propose de créer quatorze nouveaux réacteurs, ce qui nécessitera de nombreuses enquêtes publiques.

Le calendrier global sur la question de l'énergie n'a strictement aucun sens. Le débat que la CNDP a mené sur les nouveaux réacteurs, dont deux à Penly, a commencé le 27 octobre pour se terminer le 27 février. Vous avez inventé en urgence une concertation sur le mix énergétique, qui s'est essentiellement déroulée en ligne, sur un très beau site internet d'ailleurs, du 10 octobre jusqu'à une grand-messe qui s'est tenue à la fin du mois de janvier et à laquelle vous nous pardonnerez de ne pas avoir assisté. Un projet de loi sur les énergies renouvelables a été adopté entre-temps et nous sommes en train d'examiner un texte sur le nucléaire, sur lequel le Sénat s'est déjà prononcé. Enfin, le Président de la République a réuni le Conseil de politique nucléaire le 3 février. Tout est vraiment fait dans le désordre. Il faut respecter le débat public, et cela passe par des moyens accrus pour la CNDP.

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Je pourrais être favorable à l'amendement si je pouvais le sous-amender pour affirmer la nécessité de réfléchir aux missions de la CNDP. En attendant, l'avis est défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Le rapport de l'amendement avec le projet de loi est quelque peu lointain : rien que pour cette raison, l'avis est défavorable.

Monsieur le député Laisney, nous préparons une programmation pluriannuelle de l'énergie. Le débat public a parfaitement respecté les formes de la CNDP. Il n'a pas été fait à la va-vite, nous avons mis trois mois à le préparer ; il a débuté le 10 octobre, a donné lieu à trente mille contributions – ce qui est assez important – et a fait l'objet de réunions physiques dans toutes les régions de France, y compris outre-mer. Je vous renvoie au site de la CNDP, qui donne tous les détails.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE194 de M. Charles Fournier.

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Son objet est très sérieux, puisqu'il vise à demander au Gouvernement un rapport sur les coûts totaux du programme de relance de la filière nucléaire et sur les modalités de son financement.

Si vous avez préparé pendant trois mois le débat, il me semble que vous avez consacré un peu moins de temps à l'élaboration du présent texte, notamment à sa partie consacrée au démantèlement de l'IRSN.

Je vous ai écoutée avec attention la semaine dernière, Madame la ministre, sur France Info : vous avez affirmé que le programme ne serait financé ni par une hausse des tarifs de l'électricité, ni par une augmentation des impôts. Une grande interrogation subsiste néanmoins sur les coûts exacts de cette relance et, surtout, sur son financement. Aucun investisseur privé n'y participera – ce que l'on peut comprendre compte tenu de l'échec de Flamanville. Le financement du programme reposera donc majoritairement sur des fonds publics, autrement dit sur les contribuables français.

On a évoqué la piste du livret A. Mais alors que les files d'attente pour accéder à un logement social ne cessent de s'allonger et le nombre de sans-abri d'augmenter, est-il bien raisonnable de détourner l'argent du livret A du secteur auquel il est destiné ?

Il importe, en tout cas, que nous sachions comment l'État compte réaliser l'investissement massif que nécessitera la relance du nucléaire.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Vous avez déjà voté un amendement similaire à l'article 1er. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE415 de M. Charles Fournier.

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Cet amendement concerne le fiasco le plus récent de la politique nucléaire française : l'EPR de Flamanville.

Alors qu'il devait entrer en service en 2012, l'EPR de Flamanville ne fonctionne toujours pas et aura sans doute plus de douze ans de retard. Son coût, estimé initialement à 3 milliards d'euros, dépassera finalement les 19 milliards d'euros d'après la Cour des comptes. Si nous ne cessons de vous demander des données précises sur le coût de la relance du nucléaire, c'est notamment du fait des dérapages incommensurables qu'a connus ce projet.

On sait déjà que l'EPR est un fiasco financier et qu'il ne garantira pas notre souveraineté énergétique. Reste la question de la sécurité : le recours massif à la sous-traitance suscitant des interrogations, nous demandons la réalisation d'une contre-expertise indépendante sur la sûreté de ce réacteur. L'impression est que la mise en route est précipitée pour ne pas perdre la face, alors que d'importants problèmes techniques subsistent. Pour répondre à l'inquiétude grandissante de nos concitoyens, notamment de ceux qui vivent à proximité de cette installation, il nous semble important de disposer, si ce n'est d'une expertise indépendante, au moins d'un rapport du Gouvernement.

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C'est le rôle de l'Autorité de sûreté nucléaire de fournir une expertise indépendante sur la sûreté de ces installations et elle le fait très bien. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE62 de M. Olivier Marleix.

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Nous demandons, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, la remise par le Gouvernement d'un rapport sur la faisabilité et les modalités d'une relance de la centrale nucléaire de Fessenheim. Chacun a pu constater que la stratégie de régression, sur le nucléaire, n'était pas la bonne. Le Président de la République, lui-même, en est revenu.

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Je vous invite à écouter votre collègue Raphaël Schellenberger qui, il y a deux jours, a dit dans une émission qu'il n'était pas possible de rouvrir Fessenheim, à moins de tordre le bras aux règles de sûreté. Avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Défavorable.

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Nos collègues des groupes Rassemblement national et Les Républicains semblent avoir une passion commune pour la réouverture de la centrale de Fessenheim, malgré tous les avis techniques qui disent que c'est impossible. Pensez-vous vraiment que les centrales nucléaires aient une durée de vie illimitée ?

Il est nécessaire de prévoir le démantèlement de certaines centrales, si l'on veut éviter l'effet falaise. L'ASN ne pourra pas se prononcer sur l'éventuelle prolongation des centrales existantes avant la fin de l'année 2026. C'est donc avec stupeur que nous accueillons vos propos abracadabrants. Le sujet est pourtant trop important pour être pris à la légère.

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Je suis satisfait de voir que Mme la rapporteure prend pour référence M. Schellenberger sur la question du nucléaire…

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE59 de M. Olivier Marleix.

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Cet amendement demande au Gouvernement un rapport relatif à l'opportunité de développer la recherche sur la technologie des réacteurs nucléaires à sels fondus utilisant le thorium.

Contrairement à l'uranium, le thorium peut être utilisé dans son entièreté et il n'est pas nécessaire de l'enrichir. Des réacteurs expérimentaux avaient été construits en France dès les années 1950, mais ces recherches ont été mises entre parenthèses au profit de l'uranium. Ressource abondante au fort potentiel énergétique – il est trois à quatre fois plus abondant dans la croûte terrestre que l'uranium – et produisant peu de déchets, le thorium pourrait soutenir le développement d'une nouvelle filière nucléaire.

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Cette question relève peut-être davantage de l'Opecst, mais comme le sujet est intéressant, j'émettrai un avis favorable sur cet amendement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Pour ma part, je vous invite à le retirer et à le retravailler en vue de la séance. Plutôt qu'un rapport sur le thorium, pourquoi ne pas demander un rapport plus global sur les avancées technologiques susceptibles de donner naissance à de nouveaux réacteurs ? Il me semblait par ailleurs qu'un amendement de M. Olivier Marleix adopté à l'article 1er allait déjà dans ce sens.

L'amendement est retiré.

Amendement CE188 de M. Charles Fournier.

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Nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport présentant les modalités et les coûts anticipés du démantèlement des réacteurs nucléaires dont la durée de vie pourrait être prolongée jusqu'à soixante ans, voire plus.

L'ASN ne se prononcera pas avant la fin de l'année 2026 sur l'éventuelle prolongation du parc vieillissant. Parce qu'on a construit énormément de centrales en un temps record, on court le risque de voir se produire l'effet falaise. Il en a souvent été question au cours des auditions réalisées dans le cadre de la commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France. Nous avons besoin de visibilité sur ce démantèlement. J'espère que le groupe Renaissance fera preuve de plus de réalisme que le Rassemblement national, qui pense que les centrales ont une durée de vie indéfinie.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

C'est parce que nous sommes réalistes que nous lançons un nouveau programme nucléaire pour remplacer les réacteurs qui seraient amenés à fermer. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE143 de M. Hervé de Lépinau.

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Il s'agit de l'amendement anti-intrusion que j'ai évoqué tout à l'heure. En la matière, il me semble nécessaire de changer de braquet, de sortir des dispositions du code pénal et d'appliquer celles du code de la défense. Je suggère de créer, autour des centrales, des zones de défense hautement sensibles (ZDHS), lesquelles ne relèvent pas du droit commun. À l'île Longue, ce lieu particulièrement stratégique et sensible qui abrite notre dissuasion nucléaire, les fauteurs de troubles et les agitateurs de Greenpeace ne franchissent jamais la barrière. Parce que les centrales sont des lieux très sensibles, il paraît nécessaire de les protéger davantage.

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Avis défavorable. Outre qu'elle me paraît excessive, une telle disposition rallongerait encore le temps d'accès à ces sites, qui est déjà très long pour les salariés.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre

Avis défavorable. Les ZDHS n'ont vocation à protéger que des biens militaires. Or nous traitons ici d'objets civils.

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Je profite de l'occasion pour demander pourquoi notre amendement sur la technologie de la cogénération a été déclaré irrecevable, alors qu'il n'est pas très différent de ceux que l'on vient d'examiner, sur le thorium par exemple. Madame la ministre, vous paraîtrait-il opportun d'étudier la cogénération dans le cadre du développement de notre parc nucléaire et de la récupération de la chaleur fatale pour d'autres usages ?

La commission rejette l'amendement.

Titre

Amendement CE419 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

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Dans un calendrier étrange, le Gouvernement a fait le choix de nous présenter d'abord un texte sur les énergies renouvelables, puis ce texte relatif aux procédures concernant les installations nucléaires, le tout avant la loi de programmation sur l'énergie et le climat. Pour ne pas préempter les choix qui devront être faits dans le cadre de la LPEC, nous proposons de rédiger ainsi le titre du présent projet de loi : « Projet de loi portant diverses dispositions de simplification des procédures relatives aux installations nucléaires existantes et éventuellement futures ».

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.

La commission adopte l'ensemble du projet de loi modifié.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du lundi 6 mars 2023 à 21 h 30

Présents. – M. Xavier Albertini, Mme Ségolène Amiot, M. Antoine Armand, Mme Anne-Laure Babault, Mme Delphine Batho, M. Thierry Benoit, Mme Anne-Laure Blin, M. Philippe Bolo, M. Éric Bothorel, M. Bertrand Bouyx, Mme Maud Bregeon, Mme Françoise Buffet, M. Aymeric Caron, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, M. Romain Daubié, M. Arthur Delaporte, M. Frédéric Descrozaille, M. Julien Dive, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Christine Engrand, M. Grégoire de Fournas, Mme Raquel Garrido, M. Éric Girardin, Mme Florence Goulet, Mme Géraldine Grangier, M. Alexis Izard, Mme Chantal Jourdan, M. Guillaume Kasbarian, M. Bastien Lachaud, Mme Julie Laernoes, M. Maxime Laisney, M. Luc Lamirault, M. Pascal Lavergne, Mme Annaïg Le Meur, Mme Nicole Le Peih, M. Hervé de Lépinau, M. Gérard Leseul, M. Aurélien Lopez-Liguori, M. Bastien Marchive, M. Olivier Marleix, Mme Sandra Marsaud, M. Éric Martineau, M. Nicolas Meizonnet, Mme Yaël Menache, Mme Louise Morel, Mme Mathilde Panot, Mme Anne-Laurence Petel, M. Dominique Potier, M. Charles Rodwell, M. Vincent Rolland, Mme Anaïs Sabatini, M. Benjamin Saint-Huile, Mme Danielle Simonnet, M. Lionel Tivoli, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé, M. Stéphane Vojetta

Excusés. – M. Perceval Gaillard, M. Paul Midy

Assistaient également à la réunion. – Mme Christine Arrighi, M. Emmanuel Blairy, Mme Danielle Brulebois, Mme Cyrielle Chatelain, M. Charles de Courson, Mme Christine Decodts, M. Pierre Henriet, M. Pierre Meurin, Mme Natalia Pouzyreff, M. Jean-Pierre Taite, M. Jean-Philippe Tanguy