La réunion

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La séance est ouverte à 9 heures 05.

Présidence de M. Sacha Houlié, président.

La Commission examine la proposition de loi visant à promouvoir l'emploi et le retour des fonctionnaires d'État ultramarins dans les territoires d'Outre-mer (n° 980) (Mme Emeline K/Bidi, rapporteure).

Lien vidéo : https://assnat.fr/fElHWc

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Nous examinons ce matin deux propositions de loi inscrites à l'ordre du jour de la journée réservée au groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES ; la première d'entre elles, relative à l'emploi des fonctionnaires ultramarins, a été inscrite en cinquième position de cette journée.

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Cette proposition de loi vise à résoudre un problème ancien, mais auquel aucune solution satisfaisante n'a été apportée : le retour des fonctionnaires d'État ultramarins dans leur territoire d'origine. C'est une question, j'en suis bien consciente, qui se pose dans différentes régions françaises ; mais j'appelle votre attention sur la particularité des territoires ultramarins, dont les problèmes sont si spécifiques et si urgents que notre droit doit s'adapter. Un récent rapport sénatorial évoque des « discontinuités territoriales entre les outre-mer et l'Hexagone ». On ne peut pas envisager l'éloignement entre un territoire ultramarin et le territoire hexagonal comme on le ferait de deux régions de la France continentale.

Les spécificités des territoires d'outre-mer ne se limitent pas à la géographie. Lorsque l'on regarde la composition de la fonction publique ultramarine, les données sociologiques actualisées nous montrent, en 2022, une nette sous-représentation des fonctionnaires ultramarins aux postes d'encadrement. À La Réunion, seuls 11 % des fonctionnaires réunionnais occupent des postes d'encadrement ; en comparaison, les fonctionnaires nés dans l'Hexagone en poste à La Réunion sont 45 % à occuper un poste d'encadrement. Les fonctionnaires ultramarins ont le sentiment d'être cantonnés à des postes subalternes sur leur propre territoire, et d'être forcés à l'exil s'ils veulent réussir.

Pour apporter des réponses à ce problème sociologique, il est urgent de promouvoir l'emploi et le retour des fonctionnaires ultramarins dans leurs territoires. En 2012, dans son rapport consacré à la place des ultramarins dans la fonction publique d'État, le préfet Jean-Marc Bédier dressait le constat suivant : « Dans un contexte de chômage élevé et de jeunes chômeurs diplômés en grand nombre, la frustration est souvent grande de voir arriver de l'extérieur des fonctionnaires pour occuper des postes pouvant être pourvus localement. Dans le même temps, ces mêmes jeunes doivent partir loin de leur famille pour une migration de travail vécue pendant longtemps comme un déracinement et donnant lieu encore aujourd'hui à une demande de retour abondante. » Ce rapport a plus de dix ans ; les questions qu'il pose demeurent d'actualité.

Depuis, le cadre légal a évolué. Pour bien l'appréhender, il faut d'abord comprendre la notion de centre des intérêts matériels et moraux (CIMM) – je préfère parler d'intérêts « moraux et matériels » – qui est au cœur de l'appréciation par l'administration du lien entre un fonctionnaire et un territoire ultramarin. Elle ne fait pas l'objet d'une définition légale mais repose sur des critères constituant un faisceau d'indices, dégagés par la pratique administrative ou la jurisprudence et synthétisés dans une circulaire en 2007. À titre d'exemple, parmi ces critères, figurent le lieu de naissance de l'agent, le domicile de ses parents et de ses proches, le lieu où il a effectué ses études, la fréquence de ses demandes de mutation, les congés bonifiés dont il a bénéficié…

Depuis la loi de programmation du 28 février 2017 relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique (Erom), les fonctionnaires justifiant de leur CIMM dans un territoire ultramarin bénéficient d'une priorité légale en matière de mutation.

Plusieurs problèmes continuent de se poser et justifient à mes yeux l'intervention du législateur.

En premier lieu, aucun texte de portée obligatoire ne fixe les critères permettant d'établir le CIMM. D'un fonctionnaire à un autre, d'une administration à une autre, les critères se combinent de façon différente, au détriment de l'égalité et de la transparence. Cela peut susciter des sentiments légitimes d'incompréhension, voire d'injustice chez les fonctionnaires à qui est refusée la reconnaissance de leur CIMM.

Lors de nos auditions, nous avons pu échanger avec la direction générale des outre-mer (DGOM), qui a étudié les pratiques de sept ministères différents. Les fonctionnaires dépendant du ministère de l'économie et des finances doivent remplir au moins deux critères sur cinq définis par le ministère comme prioritaires ; au ministère de la transition écologique, il faut trois critères sur l'ensemble de ceux dégagés par la jurisprudence ; les ministères sociaux demandent que soient réunis cinq critères sur huit, prédéfinis. Les pratiques varient donc du tout au tout, ce qui place les fonctionnaires dans une situation d'inégalité : selon le ministère dont ils dépendent, deux fonctionnaires dont la situation est identique se verront traiter différemment. La proposition de loi que je vous présente vise à mettre un terme à ces inégalités et à cette insécurité juridique.

La loi Erom n'a eu qu'un impact limité. En 2019, seules 28 % des demandes de mutation formulées au titre du CIMM ont été satisfaites. Autrement dit, 72 % des demandes formulées dans le cadre du CIMM n'ont pas pu aboutir.

J'ai pu entendre, au cours des auditions, que la faiblesse du contentieux administratif en matière de CIMM montrait que le dispositif actuel était satisfaisant. J'estime au contraire qu'il ne reflète pas l'ampleur des difficultés. La moitié des demandes que je reçois en tant que députée d'un territoire d'outre-mer émanent de fonctionnaires qui voudraient revenir exercer leur métier sur leur territoire, mais qui n'y arrivent pas : malgré le manque de transparence, et bien que les refus qui leur sont opposés soient parfois contestables, le coût financier d'une action en justice et la crainte de représailles de la part de l'administration les dissuadent d'engager une action en justice.

Il ne s'agit pas là seulement de situations individuelles, même si elles confinent parfois au drame familial ou professionnel. Les enjeux sont bien plus larges, à la fois sociaux, économiques et politiques.

Il y va en effet de l'égalité d'accès au service public et de la qualité du service public. Dans ces territoires ultramarins où le taux d'illettrisme est encore trop important, où le créole est parfois la seule langue comprise et parlée par les habitants, surtout parmi la population âgée en rupture numérique, avoir accès à un fonctionnaire qui connaît bien la culture, la langue, l'histoire et la sociologie du territoire est essentiel. Le lien entre l'accès aux services publics et la maîtrise de la langue régionale par le fonctionnaire est connu : en Bretagne, le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) propose des cours de breton aux fonctionnaires en relation directe avec les administrés.

Il s'agit aussi d'un enjeu économique. Pour les jeunes ultramarins, l'insertion économique passe encore trop souvent par un départ vers la France hexagonale. La perspective crédible d'une insertion locale dans un emploi qualifié pourrait encourager davantage de jeunes à poursuivre des études supérieures, quand, au contraire, l'incertitude sur la localisation de la future affectation peut les dissuader de passer un concours national, et donc les empêcher d'accéder à un emploi de titulaire stable.

Enfin, et cela n'a rien d'anecdotique, la répartition des postes entre Hexagonaux et ultramarins tend à encourager la persistance de schémas de pensée et de hiérarchies sociales issues de la colonisation : les postes subalternes pour les ultramarins, les postes d'encadrement pour les hexagonaux. Nous devons aider les pensées à évoluer.

Le problème, vous le voyez, dépasse largement les situations individuelles de fonctionnaires concernés. Aussi le présent texte propose-t-il des solutions pour promouvoir l'emploi et le retour des fonctionnaires d'État ultramarins dans leur territoire d'outre-mer.

Son article 2 pose le principe d'un droit au retour pour les fonctionnaires justifiant de liens particuliers avec un territoire ultramarin.

Son article 3 donne une assise légale aux critères utilisés pour la détermination du CIMM, en consacrant les critères issus de la jurisprudence mais en privilégiant les critères moraux par rapport aux critères matériels. Il prévoit aussi une pondération. Les administrations apprécieraient ainsi ces critères selon une même grille de lecture. La souplesse ne doit plus confiner à l'arbitraire. Certains verront là un carcan ; je considère pour ma part que ces dispositions permettront de gagner en objectivité, en transparence et en efficience.

L'article 4 garantit le droit des personnes recrutées dans l'une des collectivités relevant des articles 73 ou 74 de la Constitution ou en Nouvelle-Calédonie à effectuer leur stage préalable à la titularisation dans le territoire où elles ont été reçues au concours. C'est un problème spécifique : lorsqu'un ultramarin réussit un concours, ce que l'on ne peut pas complètement prévoir, il doit en quelques semaines trouver de l'argent pour financer un billet d'avion – aux périodes d'affluence, cela coûte souvent un Smic –, éventuellement déscolariser et rescolariser ses enfants, loger sa famille, trouver une solution pour la carrière du conjoint… Beaucoup renoncent au concours, ou alors demandent un report de l'année de stage parce qu'ils ne peuvent pas faire face.

L'article 1er, enfin, crée un observatoire des emplois locaux en outre-mer, doté d'un pouvoir de sanction et chargé de veiller à la bonne application de ces dispositions. Les dispositifs mis en place jusqu'à présent n'ont pas porté leurs fruits ; nous voulons une loi efficace.

Nous proposons d'adopter ces dispositions à titre expérimental, pour une durée de quinze ans que je vous proposerai de ramener à dix ans par amendement. Cela me semble raisonnable pour que les acteurs s'approprient le dispositif et que les personnes concernées en bénéficient.

Je souhaite enfin remercier l'ensemble des personnes auditionnées dans le cadre de mes travaux, juristes, sociologues, personnels ministériels, ainsi que mon collègue M. Frédéric Maillot et les députés qui ont participé aux auditions.

Je vous invite, chers collègues, à adopter cette proposition qui profitera à nos compatriotes ultramarins qui œuvrent au service de l'État, mais aussi aux territoires d'outre-mer et à leurs habitants.

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Le groupe Renaissance ne soutiendra pas la proposition de loi, et s'opposera donc à ses articles ainsi qu'aux amendements.

Le texte aborde des sujets de fond, sur lesquels nos désaccords sont réels. Je ne doute pas un instant que le groupe GDR soit attaché aux services publics de la République, et je vous avoue avoir été un peu surpris par la lecture de ce texte, dont je ne suis pas certain qu'il aille dans ce sens.

Nous ne soutenons pas la notion de localisation des emplois publics d'État, alors que votre texte peut laisser penser que c'est de cela qu'il s'agit. Je note d'ailleurs que notre collègue Paul Molac ne s'y est pas trompé en déposant un amendement qui, en quelque sorte, généralise le mécanisme proposé. Ce n'est pas notre définition de la fonction publique : même dans les États fédéralistes, l'égalité d'accès à la fonction publique est en général garantie pour les nationaux de la fédération.

Vous avez déposé des amendements pour revenir sur cet aspect mais, dans sa rédaction actuelle, votre texte inverse les principes. L'affectation d'un agent public à un poste doit être conduite dans l'intérêt général et de la qualité du service au public, et non dans l'intérêt de l'agent lui-même – même si les considérations relatives à sa situation matérielle et morale ne doivent pas être oubliées.

Comme la plupart de nos collègues ultramarins et même beaucoup de nos collègues hexagonaux – j'en fais partie –, vous avez rencontré ces situations de frustration et de souffrance où l'éloignement est souvent synonyme d'isolement affectif et matériel, voire sanitaire.

Le système actuel est organisé autour de la notion de CIMM, qui donne une priorité légale d'affectation. Un rapport du ministère de la fonction publique en a dressé un bilan en juillet 2021. Il serait injuste d'y lire que ce système est totalement défaillant. Les demandes de mutation vers les outre-mer sont justifiées, pour 13 % d'entre elles, par le CIMM ; 23 % des affectations sont fondées sur lui. Il faut néanmoins remarquer que ces statistiques sont déformées par la situation de trois administrations : l'éducation nationale, les forces de sécurité intérieure et la pénitentiaire.

En revanche, et c'est un débat que nous avions déjà ouvert lors de l'examen de la proposition de loi de Mme Nicole Sanquer au cours de la législature précédente, la question de l'harmonisation de l'appréciation du CIMM entre les différentes administrations est toujours d'actualité. La ministre de la fonction publique de l'époque, Mme Amélie de Montchalin, avait alors souligné l'intérêt d'une actualisation de la circulaire ad hoc. Votre proposition aura, je l'espère, la vertu de provoquer enfin cette mise à jour, et si possible d'ici à la séance du 4 mai.

Je crois aussi que l'idée d'une commission du CIMM telle que la propose un amendement de notre collègue Philippe Naillet mérite toute notre attention, même si je ne suis pas certain qu'une loi soit nécessaire.

Vous faites référence, à raison, à ces sondages qui semblent indiquer une volonté de départ chez de nombreux jeunes ultramarins. Vous y voyez la marque d'une trop faible attractivité des territoires ultramarins : là encore, vous avez raison. Nous ne savons pas comment maintenir les compétences sur ces territoires. Mais répondre par la seule gestion des affectations des fonctionnaires d'État me paraît bien limité ; je crois davantage à la dynamique des acteurs entrepreneuriaux, associatifs et locaux. Le nouveau directeur de l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (Ladom), M. Saïd Ahamada, que nous avons interrogé dans le cadre de la commission d'enquête sur le coût de la vie outre-mer que j'ai l'honneur de présider, me semble vouloir inscrire son action dans cette philosophie du soutien au retour et aux projets des ultramarins venus se former sur le territoire hexagonal. C'est dans ce sens que nous devons aller, je crois. Nous aurons l'occasion d'en débattre lors de la réforme de Ladom et lors de l'examen du prochain budget.

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La proposition de loi qui nous est présentée part, il faut bien le dire, d'un bon sentiment, même si, à y regarder de près, elle est critiquable. Ce texte vise à soutenir le retour des fonctionnaires dans leur territoire de naissance pour y exercer leurs fonctions au service des habitants. Il part d'un constat que la réalité et les statistiques ne permettent pas de nier : les ultramarins sont minoritaires dans les postes d'encadrement de la fonction publique d'État dans les territoires d'outre-mer. On peut faire dire ce que l'on veut aux statistiques ; encore faudrait-il s'assurer que cette tendance ne se maintient pas sur le long terme.

Si vos intentions sont louables, cette proposition de loi vient plutôt compliquer la situation. En effet, des dispositifs existent déjà. L'article L. 512-19 du code général de la fonction publique, issu de la codification de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, prévoit déjà une priorité d'affectation au profit des fonctionnaires qui justifient que le centre de leurs intérêts matériels et moraux se trouve dans les départements d'outre-mer (Drom), les collectivités d'outre-mer (COM) et en Nouvelle-Calédonie. Une telle priorité doit toutefois s'apprécier conformément à l'article L. 512-18 du même code, qui dispose que les mutations se font « en tenant compte des besoins du service ».

En l'état de sa rédaction, la proposition de loi s'appliquerait en outre à des fonctions inséparables de la souveraineté nationale, comme le corps préfectoral ou la magistrature, ce qui la rendrait à coup sûr inconstitutionnelle.

La création d'un observatoire des emplois locaux outre-mer nous paraît une solution coûteuse, qui ne se justifie pas. Les fonctionnaires qui estiment que les dispositions offrant une priorité d'affectation dans les Drom et les COM n'auraient pas été respectées peuvent saisir le juge administratif. Le pouvoir de sanction que vous proposez d'attribuer à cet observatoire serait donc inutile. De plus, les centres de gestion des départements sont à même d'exercer une veille sur l'application des dispositions offrant une priorité d'affectation aux fonctionnaires ultramarins. La diffusion prioritaire des informations concernant des emplois dans la fonction publique aux agents justifiant de liens suffisants avec les territoires ultramarins et ayant candidaté à un poste équivalent dans les cinq années précédentes paraît enfin peu opportune, car cela engendrerait une différence de traitement avec les autres fonctionnaires. Le principe d'égalité, garanti par la Constitution, serait rompu. Cela est difficilement envisageable et sans doute inconstitutionnel.

La garantie d'un emploi et d'un retour dans les Drom et COM des fonctionnaires justifiant de liens suffisants avec les territoires ultramarins paraît excessive, à tout le moins pour les agents de catégorie A, dès lors qu'elle ne tient pas compte des besoins et des contraintes du service. Seuls un objectif ou une priorité peuvent être fixés en la matière.

Pour toutes ces raisons, le groupe Rassemblement national votera en fonction du soutien apporté à nos amendements.

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Je tiens d'abord à vous présenter les excuses de notre collègue Jean-Hugues Ratenon, normalement notre chef de file sur ce texte, qui est retenu en Martinique pour une mission sur les énergies renouvelables.

Merci à nos collègues ultramarins pour cette proposition de loi. J'invite nos collègues à regarder la liste des signataires de ce texte : elle regroupe des députés de l'ensemble des territoires ultramarins et de plusieurs groupes de notre assemblée.

Cette proposition de loi part d'un constat : 42 % des jeunes diplômés ultramarins migrent vers l'Hexagone, comme 27 % des jeunes ultramarins de 18 à 24 ans ; et souvent, ceux qui migrent restent. Elle relève aussi l'existence d'un « paradoxe domien » : les jeunes diplômes locaux peinent à accéder aux emplois qualifiés offerts localement. Elle fait enfin le constat d'une discrimination dans la fonction publique d'État. Ainsi, à La Réunion, seuls 11 % des Réunionnais qui sont dans la fonction publique occupent un poste d'encadrement, contre 45 % pour les personnes nées dans l'Hexagone. À la Martinique, c'est 10 % contre 40 % ; en Guadeloupe, 10 % contre 34 % ; en Guyane, 6 % contre 25 %.

Vous faites, pour y remédier, plusieurs propositions. La première est la mise en place d'un observatoire des emplois locaux en outre-mer, nouvelle autorité administrative indépendante. Nous avons déposé un amendement visant à élargir son périmètre. Vous proposez surtout une modification du code général de la fonction publique afin de privilégier l'emploi des personnes ayant un lien fort avec les outre-mer par l'inscription dans la loi d'une définition du CIMM. Cela paraît en effet nécessaire pour rétablir un peu d'égalité. Nous avions déposé un amendement visant à créer des instituts régionaux d'administration (IRA) dans les outre-mer, afin de former davantage d'ultramarins mais aussi de nourrir dans l'administration une culture des outre-mer.

Je vous invite, chers collègues, à regarder cette proposition de loi avec attention. À chaque fois que l'on traite différemment les outre-mer et l'Hexagone, on abîme la République ; quand nos compatriotes, sur l'île de Mayotte, en Guadeloupe ou à La Réunion ont un accès très limité à l'eau potable, quand le taux de pauvreté est très élevé, quand l'éducation n'atteint pas le niveau qu'ils sont en droit d'attendre, on abîme la République. La République, c'est une promesse, celle de l'égalité et de la fraternité qui figurent dans notre devise : si ce sont là des paroles creuses, on abîme la République et ce qui, dans le fond, fait la France.

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Je ne vous cache pas un certain embarras du groupe Les Républicains.

Oui, les difficultés sont réelles dans les territoires ultramarins pour des familles, des jeunes ou des moins jeunes. Ce n'est pas seulement lié à la fonction publique, mais aussi à certains aspects du quotidien. La République doit, dare-dare et de façon continue, travailler à établir l'égalité entre les territoires et entre les citoyens.

Je le reconnais bien volontiers, il est difficile de travailler et de vivre dans les territoires d'outre-mer, mais je fais remarquer, gentiment et sincèrement, que ce phénomène existe dans l'Hexagone rural. Je vois dans la Manche des jeunes qui s'interdisent d'aller faire des études parce que c'est compliqué, parce que cela coûte cher. Et pourtant, il y a bien la continuité territoriale !

Oui, des chiffres montrent notamment des taux de présence aux postes d'encadrement qui ne sont pas ceux que l'on pourrait attendre.

Toutes ces considérations devraient nous amener à vous suivre. Mais vos propositions me semblent faire naître d'autres difficultés juridiques, légales et même constitutionnelles. Ce que vous envisagez, c'est de ne plus prendre en compte l'intérêt du service public mais celui de l'agent. C'est louable, évidemment, et l'intérêt de l'agent doit compter – c'est pourquoi le CIMM est reconnu depuis de longues années. Les critères doivent sans doute être améliorés. Les chiffres sont tronqués, cela a été dit, par le poids de trois administrations – éducation nationale, forces de l'ordre, pénitentiaire : sans elles, on verrait peut-être que la situation est moins mauvaise qu'il n'y paraît.

Le principe d'égalité est aussi essentiel. Or favoriser certains fonctionnaires se fait nécessairement au détriment d'autres : s'il faut une égalité d'accès à la fonction publique, il faut également une égalité dans le déroulement des carrières, à part certains motifs impérieux. Je ne suis pas sûr que tout ce que vous évoquez relève de ces derniers.

Nous verrons comment se dérouleront les débats. Je voulais jusqu'ici vous exposer mon embarras. Oui, il faut apporter des réponses, mais celles que vous proposez ne sont sans doute pas les bonnes.

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Chacun a bien compris que ce sujet ne doit pas être abordé sous l'angle technique ou juridique ; c'est un sujet éminemment politique, et éminemment humain.

Vous connaissez la réalité de nos territoires ultramarins. À La Réunion, 37 % de la population vit sous le seuil de pauvreté ; les services publics sont affaiblis, et ne peuvent pas toujours assurer leurs missions malgré la bonne volonté et l'engagement des agents. Ce que nous demandons, c'est le renforcement des services publics. Nous ne voulons pas faire primer l'intérêt de l'agent, mais l'intérêt des services publics.

Nous ne demandons pas toutes les places. Si je puis comparer un service public à un avion, nous demandons à être un peu moins nombreux en classe économique et un peu plus nombreux dans la cabine de pilotage.

Nous sommes républicains et Français mais nous sommes ultramarins. Aujourd'hui, il y a un mal-développement dans nos territoires ; j'ai cité le taux de pauvreté, j'aurais pu parler de l'illettrisme ou de l'échec scolaire qui est 2,5 fois supérieur à ce qu'il est dans l'Hexagone. Il ne faut pas se mettre la tête dans le sable : nous ne réglerons pas ces défis d'aujourd'hui par les raisonnements d'hier.

Il faut donc soutenir le retour des fonctionnaires ultramarins, et singulièrement leur arrivée dans l'encadrement des différentes fonctions publiques.

Il y a eu des avancées, notamment avec la loi Erom. Mais, la rapporteure l'a dit, en matière de reconnaissance du CIMM et d'affectation, les pratiques sont très hétérogènes, ce que les propositions de loi de Manuéla Kéclard-Mondésir et Nicole Sanquer cherchaient à corriger. Les seules justifications possibles sont le nombre de postes disponibles et l'adéquation des profils et des grades. Le ministère de l'intérieur a d'ailleurs été condamné par le Conseil d'État parce qu'il n'avait pas respecté les règles pour l'affectation d'un policier réunionnais. Non, les dispositifs actuels ne fonctionnent pas bien. La transparence est presque inexistante. Je veux néanmoins citer les échanges récents avec M. le ministre de l'éducation, Pap Ndiaye, qui vont dans le bon sens.

Il faut travailler cette proposition de loi, bien sûr. Nous sommes réunis ce matin pour cela. Mais c'est une nouvelle alerte. Les règles doivent être appliquées de façon plus homogène et l'État employeur doit se montrer plus humain.

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Nous partageons l'objectif de promotion du retour des fonctionnaires ultramarins et du maintien des compétences sur les territoires. Nous saluons les efforts qui facilitent ce retour des personnes qui justifient d'un CIMM dans une de ces collectivités aux réalités parfois différentes de la métropole.

C'est l'objet de l'article 85 de la loi Erom du 28 février 2017. D'autres dispositifs existent, notamment les congés bonifiés qui visent à maintenir la continuité territoriale, et qui permettent aux fonctionnaires originaires d'outre-mer affectés en métropole de bénéficier, tous les deux ans, de la prise en charge de leurs frais de transport vers leur territoire d'origine.

La fonction publique doit être représentative de l'ensemble des territoires afin de répondre aux besoins des habitants, de créer les conditions de la confiance avec les usagers des services publics. Je l'observe dans la mission qui m'a été confiée sur les maisons France Services, avec le sénateur Bernard Delcros.

Si nous partageons ces constats, nous sommes réservés vis-à-vis des dispositifs présentés ici. Inscrire une forme de préférence locale comme vous le proposez ne nous semble pas compatible avec le principe constitutionnel d'égalité de traitement ; une telle règle entraînerait en effet une rupture de l'égalité entre les candidats et pourrait imposer à l'affectation sur la base de l'origine et non des compétences professionnelles. On ne peut que s'interroger.

De la même manière, la création d'un droit à effectuer son stage sur le territoire où l'on a réussi un concours semble peu applicable en l'état. Tous les territoires ne permettent pas de réaliser un stage pour chaque concours.

La richesse de notre administration réside dans l'égalité de traitement et dans le fait que ses agents sont représentatifs de l'ensemble des territoires métropolitains et ultramarins. Cela n'empêche pas d'être lucides et de favoriser le retour sur leur territoire pour ceux qui le souhaitent et qui y justifient d'intérêts matériels et moraux.

Sur l'inscription dans la loi des critères relatifs au CIMM, cela nous semble ajouter de la complexité à la complexité et serait contraire à la volonté de conserver de la souplesse dans l'appréciation des situations individuelles par les administrations. Le ministre de la fonction publique pilote un projet d'harmonisation de l'appréciation de ces critères afin de s'assurer de leur application uniforme, mais toujours individualisée, par les différentes administrations.

À l'instar de Philippe Gosselin et du groupe LR, nous sommes ennuyés, mais nous voterons contre cette proposition de loi.

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Mes collègues ultramarins et moi-même sommes chaque jour confrontés à de nombreuses demandes de retour ou de maintien de fonctionnaires ultramarins dans leur territoire pourtant demandeur d'agents sensibilisés à leur réalité. Avec Mme K/Bidi, nous avons cherché à comprendre cette incohérence, ce qui nous a conduits à déposer la présente proposition de loi.

La réalité du terrain, ce sont des personnes vieillissantes, à la santé fragile, dont les enfants ne peuvent être présents pour les soutenir, parfois avant qu'elles rendent leur dernier souffle. Ce sont des ultramarins qui quittent leurs proches sans savoir quand ils pourront les revoir. Ce sont des hommes et des femmes qui doivent se résoudre à vivre loin de leur conjoint et de leurs enfants, dont ils sont séparés par des dizaines de milliers de kilomètres à cause de leur travail. Cette réalité lourde de conséquences conduit parfois au burn-out, voire à des drames plus graves.

En 2019, selon les chiffres communiqués par le Gouvernement, 28 % des agents ultramarins de la fonction publique d'État ont accédé à un poste dans les outre-mer. Cela rejoint le constat déjà établi en 2012 par M. le préfet Jean-Marc Bédier, alors chargé de la promotion des originaires d'outre-mer dans les postes à responsabilité de la fonction publique, ainsi que celui dressé plus récemment par notre collègue Olivier Serva. Force est de constater que rien ne change ! Toujours en 2019, une étude du Défenseur de droits a montré que les citoyens vivant dans les territoires ultramarins étaient confrontés à de nombreux problèmes au sein des services publics d'État, poussant jusqu'à 60 % d'entre eux à renoncer à entreprendre des démarches faute de prise en charge adaptée. Par ailleurs, certains corps de la fonction publique ont recours à des contractuels alors même que les lauréats des concours sont obligés de se rendre dans l'Hexagone pour effectuer leur stage et accéder à leur premier poste, en espérant – souvent en vain – un retour dans leur territoire où des postes sont pourtant à pourvoir. En outre-mer, les administrés ont de plus en plus besoin d'être au contact de fonctionnaires comprenant leurs réalités socio-économiques et culturelles ; or les fonctionnaires qui souhaitent y être mutés nous font part des difficultés liées à l'actuel système d'attribution des postes, partiellement inopérant.

Notre proposition de loi a vocation à garantir une plus grande efficacité du service public en outre-mer, par la promotion de l'emploi des ultramarins compétents dans leur territoire. Cela permettra au service public d'être durablement plus proche des administrés. Nous créerons un service public exemplaire en matière d'égalité, à l'image de nos sociétés, conformément à la circulaire d'application de la loi Erom qui prévoit notamment la prise en compte des CIMM. N'y voyez ni régionalisme ni chauvinisme. Nous voulons servir l'intérêt public, le service public, en permettant à des fonctionnaires d'État d'exercer leur métier au plus proche de leur territoire. Ceux qui demandent leur mutation depuis dix, quinze ou vingt ans estiment que la loi doit leur permettre de travailler chez eux. Il faut envoyer un message aux ultramarins, leur dire qu'ils ne sont pas une sous-France, afin d'éviter tout drame susceptible d'être causé par la souffrance.

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Nous partons d'un constat, celui d'une gestion injuste et irresponsable des emplois publics d'encadrement dans les outre-mer.

Injuste, d'abord, parce que l'État mène de fait une politique d'inégal accès aux emplois publics les plus qualifiés en recrutant prioritairement des métropolitains et en rejetant largement les demandes de retour des fonctionnaires ultramarins dans leur territoire d'origine. Les études montrent qu'à niveau de diplôme équivalent, à savoir la licence, les métropolitains occupent deux fois plus que les ultramarins des postes à responsabilité. À l'inverse, les ultramarins sont surreprésentés dans les emplois publics subalternes. C'est, au bout du compte, la jeunesse diplômée des outre-mer que l'on met de côté et que l'on incite à lever les voiles vers l'Hexagone, faute de débouchés. Cette migration est souvent vécue comme un déracinement.

Irresponsable, ensuite, parce que cette gestion des ressources humaines aggrave la situation économique des territoires d'outre-mer à deux égards. D'une part, elle amplifie la fuite des cerveaux et accentue par là même la crise sociale dans les outre-mer. D'autre part, la perspective de l'exil dissuade souvent la jeunesse diplômée de passer un concours national et donc d'accéder à un emploi public stable, ce qui paraît d'autant plus problématique que le recrutement public constitue l'un des remèdes les plus robustes aux tensions que connaît le marché du travail ultramarin.

Des choses ont été faites depuis la loi Erom du 28 février 2017. Une priorité légale d'affectation ultramarine est accordée aux fonctionnaires d'État justifiant de centres des intérêts matériels et moraux dans les territoires d'outre-mer – il me semble que cette disposition légale permet de lever les objections constitutionnelles exprimées par M. Gosselin. Toujours est-il que cette évolution n'a pas eu l'effet escompté : comme l'a expliqué Mme la rapporteure, la plupart des administrations continuent de privilégier l'affectation des fonctionnaires expatriés au détriment des ultramarins, en raison d'une application pour le moins aléatoire du dispositif dans les administrations centrales. Dans son rapport de juillet 2021 sur le bilan de l'application du dispositif, la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) faisait état de pratiques très différentes d'un ministère à l'autre : certains utilisent cinq critères, d'autres trois sans pondération, d'autres encore exigent le cumul de critères comme le lieu de naissance et la détention de biens fonciers.

Des correctifs doivent donc être apportés à cette législation afin d'en garantir la pleine effectivité. Le texte que nous examinons répond parfaitement au problème soulevé, en introduisant notamment deux innovations juridiques : d'une part, le contrôle de l'administration par une autorité indépendante, l'Observatoire des emplois locaux en outre-mer ; d'autre part, la clarification de la notion de CIMM en outre-mer par la détermination d'une liste de critères légaux. Le groupe Écologiste-NUPES est convaincu que ces ajustements permettront d'améliorer le sort des fonctionnaires d'État ultramarins. Nous voterons donc en faveur de ce texte.

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Lorsqu'on évoque le difficile sujet des mutations et des affectations auprès des fonctionnaires ultramarins, ce sont toujours les mêmes constats qui reviennent : des difficultés procédurales, une certaine incompréhension, et surtout un sentiment d'injustice. Les travaux engagés lors de la précédente législature ont suscité beaucoup de discours et de déclarations d'intention, mais peu de résultats pour les agents publics concernés.

Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires soutiendra naturellement cette proposition de loi qui entend avancer concrètement et rapidement en matière de retour des fonctionnaires ultramarins dans leur territoire.

L'une des principales avancées sera la redéfinition dans la loi des centres des intérêts matériels et moraux – cette notion, qui ouvre droit à plusieurs avantages, est actuellement source d'incompréhension pour les fonctionnaires des outre-mer. Plusieurs députés de notre groupe avaient d'ailleurs soutenu, en 2021, une proposition de loi de Nicole Sanquer visant à rénover cette notion, mais le texte avait été rejeté. En dépit de ses discours rassurants, le Gouvernement n'a toujours pas œuvré pour améliorer ce cadre légal. Dans un discours prononcé à Papeete en juillet 2021, le Président de la République s'était pourtant engagé à réviser les critères des CIMM.

Notre groupe déplore surtout les conditions opaques dans lesquelles sont examinés les dossiers des fonctionnaires. Il se rallie au constat de la délégation aux outre-mer qui avait, par le passé, dénoncé des « examens d'ultramarinité » et mis en évidence des incohérences parfois choquantes dans le traitement des dossiers. Actuellement, la notion de CIMM reste imprécise, ce qui laisse à l'administration une trop grande marge d'interprétation. Faute de calibrage strict, l'application homogène de la loi dans nos territoires n'est plus garantie, ce qui conduit à des différences de traitement injustifiées. Notre groupe soutient donc la liste des critères objectifs proposés. Nous appelons cependant votre attention sur leur classement : l'ordre des critères a une importance en raison des barèmes de points associés. Notre collègue Max Mathiasin a, du reste, déposé des amendements afin d'engager un débat sur le sujet.

Au-delà de ces dispositions, notre groupe déplore l'absence d'un véritable projet d'ampleur pour les outre-mer. Le Gouvernement n'entend pas les alertes lancées par les élus locaux et les parlementaires, qui connaissent leur territoire et demandent la définition d'une vision politique globale à destination des territoires et des citoyens ultramarins. À ce jour, aucun texte dédié aux outre-mer n'a été inscrit à l'ordre du jour, notamment en matière d'emploi. En ce sens, notre groupe soutiendra la création d'un observatoire des emplois locaux en outre-mer afin de concrétiser les politiques liées à l'emploi public dans les territoires ultramarins. Les agents ultramarins du secteur public ne disposent pas d'un interlocuteur identifié dans le paysage administratif. Il serait pourtant pertinent, dans une logique de guichet unique, de prévoir un service à destination de ces fonctionnaires afin de les alerter en priorité sur les emplois vacants et les dispositifs d'aide susceptibles d'être mobilisés pour faciliter leur retour dans leur territoire d'origine.

Je voudrais enfin insister sur un dernier point qui me tient à cœur : une politique d'insertion des jeunes s'avère nécessaire, tant pour leur offrir des perspectives d'avenir que pour dynamiser nos territoires. Nous avons déposé un amendement visant à étendre dans ce domaine les compétences de l'Observatoire ; j'espère qu'il recevra un avis favorable. Il faut montrer aux jeunes ultramarins qui partent étudier dans l'Hexagone qu'il existe des possibilités de carrière et des opportunités professionnelles dans leurs territoires respectifs.

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Je comprends parfaitement le sens et l'objectif de cette proposition de loi, à laquelle je souscris. La création, à l'article 1er, d'un Observatoire des emplois locaux en outre-mer sous la forme d'une autorité administrative indépendante se justifie bien sûr par la prise en compte limitée des CIMM par les administrations, qui ne sont soumises à aucun autre contrôle que celui du juge administratif. Or il existe diverses autorités administratives indépendantes, dont la nature légale est variable ; par ailleurs, certaines agences dont la place et le rôle sont pourtant fondamentaux n'ont pas cette qualité. Ne vaudrait-il pas mieux créer, à côté d'un observatoire chargé de la collecte des données, un médiateur indépendant susceptible de proposer des solutions conformes à la loi ?

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Je remercie les groupes qui ont exprimé leur soutien à cette proposition de loi.

Le groupe Renaissance s'inquiète de la prise en compte de l'intérêt du service public. Nous avons effectivement compris, lors des auditions, qu'il s'agissait là d'une réelle préoccupation pour les ministères ; c'est la raison pour laquelle j'ai déposé des amendements visant à préciser que le droit à l'emploi et au retour dans leur territoire d'origine était toujours garanti aux fonctionnaires sous réserve de l'intérêt du service. Cela me semblait aller de soi, puisque nous entendons compléter l'article L. 512-18 du code général de la fonction publique, qui dispose déjà que « l'autorité compétente procède aux mutations des fonctionnaires de l'État en tenant compte des besoins du service », en ajoutant simplement l'alinéa suivant : « Dans les collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution, l'emploi et le retour des fonctionnaires justifiant de liens suffisants avec les territoires ultramarins sont garantis. » Devant les inquiétudes persistantes, il m'a cependant semblé utile d'apporter une nouvelle fois cette précision, quitte à ce que la loi soit redondante.

Il ne s'agit absolument pas de faire en sorte que des fonctionnaires n'ayant pas les compétences ni le grade nécessaires puissent, uniquement parce qu'ils sont ultramarins, occuper des postes en contradiction avec l'intérêt du service et leur propre carrière. Nous souhaitons simplement préciser les CIMM existants et renforcer la priorité prévue par la loi Erom, qui n'est pas opérante. Soyez rassurés, l'intérêt du service est préservé. Je suis bien consciente que la somme des intérêts individuels ne correspond pas à l'intérêt général mais, au-delà des enjeux humains sur lesquels certains collègues ont insisté, nous devons légiférer pour répondre à la nécessité juridique d'harmonisation de la définition des CIMM.

Nos collègues du groupe Rassemblement national craignent que ce dispositif vienne complexifier la situation. Vous verrez dans le rapport le tableau que nous a fourni la DGOM, qui présente les différents critères et leurs modalités de prise en compte en fonction des ministères : on ne peut pas faire plus compliqué que l'existant ! Notre proposition de loi vient au contraire clarifier la situation en prévoyant un dispositif unique, applicable à l'ensemble des fonctionnaires d'État dans tous les ministères, avec des critères bien définis, hiérarchisés et pondérés. Nos objectifs sont la transparence et la simplification.

Vous vous inquiétez également d'une possible rupture d'égalité. Nous rétablissons au contraire l'égalité des fonctionnaires face à un dispositif qui, aujourd'hui, les place dans une situation d'inégalité. S'agissant de l'inégalité entre les territoires, je peux vous dire que nous la vivons au quotidien. Ma collègue Karine Lebon a décrit, lors du débat sur le budget des outre-mer, la rupture d'égalité que subissent nos territoires dans le contexte économique et social actuel et qui les gangrène même depuis des décennies. Le rétablissement de l'égalité passe parfois par l'instauration de quelques dispositifs légaux un peu différents de ceux qui sont en vigueur dans le territoire hexagonal. Si vous avez le souci de l'égalité, vous pouvez donc voter cette proposition de loi.

Nos collègues du groupe Les Républicains s'inquiètent des problèmes juridiques et constitutionnels que pourrait poser ce droit. Mon amendement visant à préciser qu'il est garanti « sous réserve de l'intérêt du service » vient évidemment lever ces doutes juridiques. Du reste, nous avons auditionné des juristes, spécialistes du droit constitutionnel, qui nous ont confirmé la constitutionnalité de ce dispositif.

Je renvoie nos collègues du groupe Horizons à un amendement similaire de nature à lever leurs doutes quant à la constitutionnalité de la mesure relative au stage : je propose que la possibilité d'effectuer ce dernier dans son territoire d'origine soit également soumise à l'intérêt du service.

Encore une fois, je réponds à vos réserves tenant à la complexité de la proposition de loi en vous invitant à la comparer au dispositif actuel, que nous souhaitons justement simplifier, améliorer et objectiver.

J'ai entendu que le ministère chargé de la fonction publique travaillait sur cette question. Je l'ai indiqué lors des auditions et je le redis ici : nous sommes tout à fait disposés à mener ce travail en concertation avec les ministères – on ne peut que regretter qu'il soit réalisé sans que nous y soyons associés. Il a d'ailleurs fallu que je dépose cette proposition de loi pour découvrir qu'un travail d'harmonisation était en cours dans les ministères. Quelle que soit l'issue du texte, j'espère que notre message aura été entendu et que nous serons désormais associés à ces travaux.

Article liminaire : Objet et caractère expérimental de la proposition de loi

Amendement CL27 de Mme Emeline K/Bidi.

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Nous avions initialement prévu une expérimentation de quinze ans. Au terme des auditions, il nous a semblé plus judicieux de ramener cette durée à dix ans. Cela nous paraît suffisant pour déployer le dispositif dans les différents territoires d'outre-mer tout en disposant d'un peu de recul sur cette expérimentation.

La commission rejette l'amendement.

Elle rejette l'article liminaire.

Article 1er : Création d'une autorité administrative indépendante dénommée « Observatoire des emplois locaux en outre-mer »

Amendement de suppression CL21 de M. Stéphane Rambaud.

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La DGAFP a la capacité de mener des études spécifiques sur l'emploi des fonctionnaires d'État en outre-mer. Il en est de même pour les centres de gestion s'agissant des fonctionnaires territoriaux. Si la réalisation de telles études semble justifiée et peut donc être soutenue, il paraît inopportun et coûteux de complexifier encore le paysage administratif en créant un nouvel organisme, qu'il s'agisse d'une agence, d'une commission ou d'un observatoire.

S'agissant des mesures de coercition prévues à l'article 1er, il convient de rappeler l'existence d'une justice administrative susceptible d'être saisie par des fonctionnaires estimant que des dispositions leur offrant une priorité d'affectation n'auraient pas été respectées.

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Votre amendement vise à supprimer l'article 1er : je ne peux donc pas y être favorable. Si nous avons choisi de créer une autorité administrative indépendante, c'est en raison des pouvoirs dont dispose ce type d'instance. Il est nécessaire qu'elle puisse prendre des sanctions au regard des difficultés rencontrées et de l'inefficacité des dispositions actuelles.

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Nous faisons face à une certaine opacité des procédures et nous avons toutes les peines du monde à obtenir des chiffres concernant les mutations des fonctionnaires ultramarins. Nous devons donc créer cette autorité administrative, dont l'indépendance permettra d'accroître la transparence. Notre groupe est défavorable à cet amendement de suppression.

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Nous sommes également très défavorables à cet amendement, qui consiste à dire qu'il existe déjà des moyens de contestation : « circulez, il n'y a rien à voir ! » Or la rapporteure a justement rappelé que l'accès à la justice, y compris à la justice administrative, n'était pas une évidence. Tous ceux qui ont travaillé de près ou de loin avec les administrations publiques savent que de nombreux agents refusent d'engager une démarche contentieuse pour faire valoir leurs droits car ils craignent des représailles. Leur autorité hiérarchique sera évidemment prévenue, et l'administration – en fait, les collègues du service contentieux ou des ressources humaines – va devoir produire un mémoire en défense. Les agents publics n'ont pas envie d'en arriver là, ils veulent juste faire tranquillement valoir leurs droits ! Avant de saisir la juridiction, il existe d'ailleurs un recours hiérarchique préalable : si l'on arrive au tribunal administratif, c'est donc qu'il y a eu une défaillance dans l'application même du droit. On ne peut tirer du faible nombre de recours la conclusion que le système fonctionne. Si l'on suivait ce raisonnement, on pourrait déduire du grand nombre de classements sans suite après les interpellations dans le cadre des manifestations que l'action policière est inefficace – ce qui est pourtant vrai. Le même raisonnement dans le domaine du contentieux des étrangers nous a amenés à déplacer les curseurs sans changer la situation de fond, et en restreignant l'accès au droit pour les citoyens. La défaillance du système actuel plaide donc pour la création d'un organisme indépendant doté d'un pouvoir de sanction.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CL23 de M. Stéphane Rambaud et CL8 de M. Jean-Hugues Ratenon (discussion commune).

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La création d'une garantie d'emploi et de retour des fonctionnaires d'État dans les conditions prévues à l'article 2 constitue une violation du principe constitutionnel d'égalité d'accès aux emplois publics protégé par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

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Nous proposons de supprimer le mot « pécuniaire », à l'alinéa 2, car les sanctions pouvant être prononcées par les autorités administratives indépendantes vont au-delà des amendes. D'autres possibilités existent, comme celle de donner des conseils. Il s'agit donc d'élargir les compétences de l'autorité administrative que vous proposez de créer – tant qu'à faire, autant qu'elles soient maximales !

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Si j'ai bien compris, l'amendement CL23 est un amendement de repli par lequel les membres du groupe Rassemblement national proposent de supprimer le pouvoir de sanction de l'autorité administrative indépendante. Pour les mêmes raisons que précédemment, je lui donne un avis défavorable.

Je donne en revanche un avis favorable à l'amendement CL8, après avoir relu son dispositif et entendu les arguments de M. Léaument.

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Nous voyons bien que le Rassemblement national veut vider le texte de sa substance. Je rappelle que la loi Erom n'est pas inconstitutionnelle et que les mesures de discrimination positive ne le sont pas davantage. Or nous sommes ici confrontés à un problème d'égalité réelle : les fonctionnaires ultramarins ont plus de mal que les autres à retourner dans leur région d'origine à y exercer un emploi compatible avec leur niveau d'études. Il s'agit donc pour nous de réparer une inégalité. C'est tout l'inverse de ce que vous dénoncez !

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CL9 de M. Jean-Hugues Ratenon.

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Nous proposons de supprimer la condition d'avoir « candidaté à un poste équivalent dans les cinq années précédant l'édition de l'offre d'emploi » pour bénéficier de la priorité de diffusion. Cette disposition nous semble trop restrictive, alors que la présente proposition de loi vise à améliorer l'emploi des personnes ayant un lien fort avec l'outre-mer.

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Nous avons souhaité garantir que les fonctionnaires qui présentent des demandes de mutation depuis un certain temps ne se voient pas damer le pion par ceux qui n'effectuent cette démarche que depuis un an ou deux. L'information relative aux postes à pourvoir serait accessible par l'ensemble des fonctionnaires ultramarins, mais l'information particulière fournie par l'Observatoire ne concernerait que ceux qui auraient déposé une demande de mutation au cours des cinq années précédentes : elle serait ainsi diffusée en priorité aux agents travaillant loin de leur territoire depuis plus longtemps. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

L'amendement est retiré.

Amendement CL2 de M. Stéphane Lenormand.

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Cet amendement vise à élargir les compétences de l'Observatoire des emplois locaux en outre-mer en lui confiant une nouvelle mission : la diffusion d'informations sur les opportunités de carrière et les emplois vacants dans les territoires d'outre-mer auprès des étudiants ultramarins réalisant leur cursus universitaire dans l'Hexagone.

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Nous avons effectivement bien du mal à donner aux jeunes ultramarins des perspectives d'emploi et de réussite. Il me semble en revanche difficile de diffuser ces informations auprès des étudiants ultramarins, du fait notamment de la diversité de leurs statuts et profils. Tous les étudiants présents sur le territoire hexagonal ne souhaitent pas rentrer ; plus généralement, ils n'ont pas tous les mêmes perspectives à court ou à long terme. Si je partage entièrement votre objectif, je suis donc plutôt réservée quant à la facilité de mise en œuvre de la solution proposée. Nous avons souhaité, dans cette proposition de loi, cibler d'abord les fonctionnaires en activité. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, je lui donnerai un avis défavorable.

L'amendement est retiré.

Amendement CL11 de M. Jean-Hugues Ratenon et sous-amendement rédactionnel CL35 de Mme Emeline K/Bidi.

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Nous proposons d'allonger le délai avant l'organisation d'un débat sur l'Observatoire en séance publique. Vous souhaitez qu'il y ait un débat tous les ans ; nous préférerions qu'il y en ait un tous les trois ans, ce qui nous donnerait davantage de temps pour évaluer les effets de la mise en place de cette institution. L'organisation d'un débat annuel affaiblirait l'Observatoire ; un allongement du délai le renforcerait dans la mise en œuvre de ses missions.

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Je souscris à vos arguments et donne donc un avis favorable à votre amendement CL11, sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement CL35.

La commission rejette successivement le sous-amendement et l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CL33 de Mme Emeline K/Bidi, rapporteure.

En conséquence, l'amendement CL10 de M. Jean-Hugues Ratenon tombe.

La commission rejette l'article 1er.

Article 2 (article L. 512-18 du code général de la fonction publique) : Garantie de l'emploi et du retour

Amendement de suppression CL22 de M. Stéphane Rambaud.

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La création d'une garantie d'emploi et de retour des fonctionnaires d'État dans les conditions prévues à l'article 2 constitue une violation du principe constitutionnel d'égalité d'accès aux emplois publics, protégé par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

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Nous sommes évidemment opposés à la suppression de l'article 2 car elle serait une négation des visées mêmes du texte.

Cela étant, nous sommes un peu surpris de constater que celui-ci ne suscite pas une adhésion plus franche. Certains arguments contre sont même assez étonnants. M. Gosselin disait tout à l'heure que si la proposition de loi était adoptée, elle devrait s'appliquer aussi à la Manche. Il y a quand même une différence de distance : la Manche est à moins d'une heure de TGV de Paris alors que les territoires d'outre-mer sont à plusieurs heures d'avion de la métropole – et je ne parle pas de la différence de coût des transports concernés ! De même, le fait que 37 % de la population ultramarine vive en dessous du seuil de pauvreté devrait quand même vous interpeller ! Il est donc nécessaire que le législateur mette son nez là-dedans et fasse en sorte que les lois applicables dans les outre-mer soient adaptées aux particularités de ces territoires. S'il avait été question de la Corse, je ne doute pas que le groupe Rassemblement national aurait trouvé tout à fait opportun d'aider ce territoire, où les conditions de vie sont pourtant un petit peu moins difficiles que dans les outre-mer. Il est bien dommage que vous souhaitiez supprimer cette proposition de loi plutôt que d'en faire un texte transpartisan.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL15 de M. Philippe Naillet.

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Cet amendement vise à créer, au sein du ministère de la transformation et de la fonction publiques, une commission chargée d'apprécier de manière uniforme la justification des CIMM des agents publics et des militaires. Les principaux reproches adressés à la procédure actuelle tiennent en effet au caractère aléatoire de la décision, dès lors que chaque administration est laissée libre de pondérer les différents critères selon ses vœux, et au manque d'humanité inhérent à une pratique exclusivement écrite. Or, avec la solution que nous proposons, les demandes seraient centralisées et feraient ainsi l'objet d'une analyse harmonisée.

Pour des raisons de recevabilité financière, l'amendement précise que les membres de la commission ne seraient pas rémunérés.

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Les missions de la commission que vous voulez créer rejoignent celles de l'observatoire prévu à l'article 1er. Cet article ayant malheureusement été rejeté, je suis favorable à la création d'une telle commission.

J'émets toutefois une réserve portant sur le 2° de votre amendement. Vous prévoyez un avis conforme de la commission CIMM sur toutes les mutations mentionnées à l'article L. 512-18 du code général de la fonction publique. Or cet article traite des mutations dans leur globalité, y compris vers d'autres territoires que les collectivités d'outre-mer. En raison de cette petite difficulté rédactionnelle, je vous propose de retravailler ensemble votre amendement en vue de le redéposer en séance.

L'amendement est retiré.

Amendement CL12 de M. Jean-Hugues Ratenon.

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Nous proposons de remplacer les mots « le retour » par les mots « les mutations ». Le terme « retour » nous semble en effet trop restrictif, dans le sens où il implique que l'agent demandeur a nécessairement déjà vécu dans le territoire en question. Or les mutations doivent pouvoir être priorisées pour d'autres raisons qu'un strict retour, par exemple lorsque l'agent veut se rapprocher du lieu de résidence de ses parents ou de ses enfants.

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Je partage votre préoccupation. C'est la raison pour laquelle l'article 2 mentionnait « l'emploi et le retour », expression qui permet de couvrir l'ensemble des situations. Le terme de « retour » est plus fort que celui de « mutations » pour les fonctionnaires concernés aux yeux desquels il signifie « rentrer à la maison ». Avis défavorable.

L'amendement est retiré.

Amendement CL24 de M. Stéphane Rambaud.

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Il s'agit d'un amendement de repli. La création d'une garantie d'emploi et de retour pour les fonctionnaires ultramarins constitue une violation de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. En revanche, il est possible de leur conférer une priorité dans les conditions prévues par l'article 3.

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La loi Erom a reconnu la priorité que vous évoquez mais le dispositif n'est pas satisfaisant.

Pour vous rassurer sur la constitutionnalité, l'amendement CL28 vise à préciser que le droit garanti ne s'applique que sous réserve de l'intérêt du service. Je vous invite donc à retirer votre amendement ; à défaut mon avis sera défavorable.

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Vous excipez la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen mais on pourrait aussi invoquer l'article 1er de notre Constitution selon lequel « la France est une République indivisible ». La rupture d'égalité territoriale dont souffre l'outre-mer, qui confine au séparatisme, devrait davantage vous indigner.

Autre anomalie, les fonctionnaires originaires de l'Hexagone venant accomplir des missions dans les territoires d'outre-mer coûtent plus cher à l'État, notamment à cause des billets d'avion, primes, que ceux issus du territoire concerné.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL28 de Mme Emeline K/Bidi.

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Afin de ne pas créer un droit au retour absolu pour les fonctionnaires ultramarins, l'amendement vise à indiquer que celui-ci s'exerce « sous réserve de l'intérêt du service ». Cela me semblait aller de soi mais j'ai préféré le préciser pour écarter tout risque d'inconstitutionnalité. L'amendement devrait donc recueillir l'approbation de ceux qui mettaient en avant cet argument.

La commission adopte l'amendement.

Elle rejette l'article 2.

Après l'article 2

Amendement CL16 de M. Philippe Naillet.

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L'amendement vise à évaluer chaque année l'application de la priorité légale d'affectation dont bénéficient, depuis la loi Erom, les agents justifiant d'un CIMM.

Dans une circulaire conjointe datée du 9 mars 2017, la ministre de la fonction publique et la ministre des outre-mer demandent aux administrations une application rapide et transparente des nouvelles dispositions.

Les parlementaires sont régulièrement interpellés par des agents dans des situations sociales difficiles, qui attendent parfois depuis plusieurs années des mutations vers leur territoire d'origine.

Le rapport vise donc à faire le point sur l'application de la mesure et à proposer, le cas échéant, des aménagements législatifs ou réglementaires afin de rendre la gestion des ressources humaines plus soucieuse des personnes. Le rapport devrait notamment mentionner le nombre de demandes de mutations par fonction publique et le nombre de lauréats.

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L'observatoire que nous voulions créer à l'article 1er avait pour mission d'établir un rapport dont l'objet était néanmoins moins large que le vôtre. Avis favorable.

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Nous ne voterons pas plus cet amendement que les articles. En revanche, il me semble nécessaire d'interpeller le Gouvernement sur le sujet en séance.

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Nous voterons l'amendement, et je profite de cette intervention pour mettre en garde nos collègues.

Regardez la liste des signataires de la proposition de loi : à l'exception de la Nouvelle-Calédonie, soumise à des dispositions spécifiques, huit des neuf départements et territoires d'outre-mer sont représentés ; 88 % des élus sont signataires. Avez-vous bien conscience de balayer un texte qui est demandé par la quasi-totalité des députés ultramarins ? Êtes-vous capables de faire preuve de sensibilité à l'égard des outre-mer et d'écouter les élus ultramarins ? Vous pourriez au moins vous abstenir si vraiment l'approbation du texte vous est insupportable.

Je vous alerte, la situation dans les outre-mer ne doit pas être prise à la légère. Pensez à l'image que nous donnons de l'Assemblée nationale.

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La Nouvelle-Calédonie connaît bien la problématique de l'emploi local qui fait l'objet de dispositions particulières. Mais avons-nous besoin de la loi pour favoriser le recrutement des fonctionnaires ultramarins dans leur propre territoire ? Ne serait-il pas préférable de s'intéresser à la formation ou à l'ambition ? La délégation aux outre-mer, présidée par le groupe GDR, aurait pu se saisir du sujet.

Il est quelque peu humiliant pour les ultramarins de devoir passer par la loi pour obtenir des emplois. Nous n'en avons pas besoin.

En Nouvelle-Calédonie, le dispositif en faveur de l'emploi local a eu pour effet pervers de développer l'emploi « localisé » : dans certaines communes, on recrute d'abord les gens qui y vivent ; puis dans certaines provinces, idem. L'identité devient ainsi une compétence. Ce n'est pas acceptable.

Autre inconvénient, cela nous coupe encore plus de la métropole. Nous qui revendiquons d'être considérés comme des Français à part entière, nous nous démarquons des hexagonaux. Est-ce leur faute si nous ne parvenons pas à accéder aux postes à responsabilité ? Nous devons remettre en question notre politique de formation et notre ambition à développer des compétences.

La commission adopte l'amendement.

Article 3 (articles L. 512-19 et L. 512-19-1 [nouveau] du code général de la fonction publique) : Critères déterminant le centre des intérêts matériels et moraux

Amendement CL3 de M. Paul Molac.

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L'amendement vise à instaurer un nouveau motif de priorité au bénéfice des personnels capables d'enseigner une langue régionale dans les territoires où celle-ci est pratiquée.

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Nous partageons votre souci de voir la maîtrise et la compréhension d'une langue régionale mieux prise en compte. Mais, pour des raisons juridiques, nous sommes contraints de la retirer des critères permettant de déterminer un CIMM.

Toutefois les arguments constitutionnels qui nous ont été opposés ne me semblent pas s'appliquer à votre amendement dont la portée est bien plus limitée. J'émets donc un avis favorable.

Les administrés qui ne maîtrisent pas parfaitement le français doivent pouvoir accéder aux services publics, ce qui suppose que les fonctionnaires en face d'eux soient capables de les comprendre. À cet égard, la langue régionale n'est en aucun cas un obstacle, elle est une richesse.

J'ai trouvé les propos de M. Metzdorf particulièrement blessants. Ce que je trouve humiliant, c'est le recours systématique aux ordonnances pour légiférer sur l'outre-mer. La loi est réservée à l'Hexagone.

J'ai pu m'entretenir avec plusieurs syndicats néocalédoniens qui soutiennent la proposition de loi. J'avais d'ailleurs déposé un amendement pour étendre son application à la Nouvelle-Calédonie qui a malheureusement été déclaré irrecevable. Les fonctionnaires auraient sans doute aimé que le dispositif puisse leur être appliqué.

Enfin, est-ce la faute des collègues hexagonaux si les ultramarins ne peuvent pas occuper des postes à responsabilité ? Je ne sais pas à qui la faute, mais sûrement pas aux ultramarins qui souffrent d'un manque chronique d'investissements dans leurs territoires. C'est peut-être la faute du système qui depuis des années ne consent pas les efforts financiers nécessaires.

Ce n'est pas non plus la faute des ultramarins s'ils sont moins diplômés ou accèdent moins aux postes d'encadrement. Songez que l'université de La Réunion a été créée en 1982 ; en métropole, il existe des universités depuis le XIIIe siècle.

Des mesures de rééquilibrage et de justice sociale s'imposent. La proposition de loi en est une. L'inaction face à l'inégalité criante entre l'outre-mer et l'Hexagone que chacun reconnaît n'est pas une solution.

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En tant que coprésidente du groupe d'études relatif aux langues et aux cultures régionales j'adhère évidemment à l'objectif recherché, mais la rapporteure a bien souligné les obstacles juridiques.

Monsieur Metzdorf, on ne vous a pas souvent vu aux réunions de la délégation aux outre-mer dont vous êtes pourtant membre. Vous nous reprochez de faire une loi, mais excusez-nous de faire ce pour quoi nous avons été élus. Nous faisons aussi avec les outils à notre disposition.

Oui, les réalités des outre-mer sont différentes de celles de l'Hexagone, qu'il s'agisse du climat, de la langue, etc. Ce n'est pas refuser d'être Français à part entière que de le reconnaître. Au contraire, c'est en prenant en considération ces réalités que nous le serons encore plus.

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Les propos sont généreux et il ne faut jamais s'abstenir de l'être. Pour autant, nous avons le droit d'être opposés au texte pour des raisons pratiques.

Monsieur Léaument, je vous rappelle que la France compte onze territoires ultramarins et pas neuf. Peut-être que, à vos yeux, les îles Wallis et Futuna ne font pas partie de la République ?

Les ordonnances ne sont pas le seul moyen de légiférer sur l'outre-mer. En revanche, il est vrai que l'outre-mer ne fait plus l'objet de textes spécifiques. Le choix a été fait de l'évoquer dans chacun des projets de lois et il se défend.

Ce n'est pas parce qu'ils ont été désignés par les citoyens que des députés ont raison lorsqu'ils proposent un texte qui concerne leur région d'élection. Le principe démocratique doit prévaloir. Si jamais une région entière était aux mains de députés du Rassemblement national, je doute que La France insoumise leur reconnaîtrait une légitimité intrinsèque à décider de l'avenir de cette région.

Je peux comprendre que l'on regrette l'insuffisante présence de M. Metzdorf, mais encore faudrait-il que la délégation aux outre-mer se réunisse régulièrement, ce qui est loin d'être le cas.

L'amendement est dans le droit fil du texte en faisant de l'identité régionale un critère de légitimité pour occuper un emploi de fonctionnaire d'État. Nous récusons cette philosophie.

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Monsieur Vuilletet, je faisais référence aux élus.

Alors que je venais de vous mettre en garde, M. Metzdorf a fait l'inverse de ce que je préconisais en tenant des propos insultants.

Vous parlez d'un manque d'ambition. C'est hors sujet. Nous mettons en exergue une inégalité de fait dans l'accès aux postes d'encadrement dans les départements et territoires d'outre-mer – 45 % des fonctionnaires hexagonaux en poste à La Réunion détiennent un de ces postes, contre 11 % seulement des fonctionnaires réunionnais. Voilà le problème que la loi peut résoudre. On le fait même assez fréquemment ! Si on vous avait tous laissé faire, là, les garçons, aurait-on progressé dans la représentation genrée au sein de notre assemblée ? Admettez-le, il n'est pas inhabituel que le législateur intervienne pour corriger des inégalités structurelles. Que faisons-nous d'autre, ici, que d'essayer de faire vivre la devise républicaine, en particulier le principe d'égalité ? Sans la loi, l'Assemblée nationale ne serait-elle pas encore composée de 70 à 80 % d'hommes ?

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C'est une assemblée très masculine qui a instauré la parité politique à la fin des années 1990.

(Exclamations.)

La commission rejette l'amendement.

Amendements CL19 de M. Stéphane Rambaud et CL13 de M. Jean-Hugues Ratenon (discussion commune).

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Parmi les critères permettant d'apprécier l'existence d'un CIMM, l'article 3 mentionne « l'état de santé et l'âge des ascendants et descendants directs de l'agent et de son conjoint ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité ».

Toutefois, ces considérations ne sont pas susceptibles de renseigner, en elles-mêmes, sur l'existence d'un lien particulier du fonctionnaire avec les territoires ultramarins. Elles doivent donc être conjuguées au critère du lieu de résidence du demandeur. C'est la raison pour laquelle l'amendement CL19 vise à réunir les deux types de critère.

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L'amendement CL13 est rédactionnel. Il s'agit d'ajouter la conjointe et l'épouse.

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Le texte ne précise pas que les critères de l'état de santé et de l'âge des ascendants et descendants directs de l'agent et de son conjoint valent seulement pour les proches vivant sur le territoire sur le territoire duquel la mutation est demandée. Mon amendement CL34 tend à y remédier.

Je ne suis en revanche pas favorable à ce que les critères soient fusionnés. Le texte hiérarchise les critères car tous ne peuvent pas être mis sur le même plan.

Alors que la santé ou l'âge des ascendants, descendants et conjoints sont souvent à l'origine de situations humaines difficiles auxquelles nous sommes confrontées, ils ne font pas partie des critères actuels.

Mon avis est défavorable sur l'amendement CL19. Quant au CL13, la proposition de loi reprend la formulation du code général de la fonction publique. Il me semble préférable de s'y tenir même si elle n'est pas très inclusive. Malgré mes convictions féministes, votre rédaction me semble un peu lourde. J'émets donc un avis de sagesse.

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Nous sommes opposés à la hiérarchisation des critères. En revanche, nous serions très favorables à ce que la circulaire soit réactualisée d'ici à l'examen en séance.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CL18 de M. Stéphane Rambaud.

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L'amendement vise à ajouter aux critères pris en considération le lieu de naissance du conjoint. S'il se situe dans les territoires ultramarins, le foyer envisagera naturellement de s'y installer et d'y élever, le cas échéant, ses enfants.

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Certains dispositifs tels que le rapprochement de conjoint prennent en considération ce critère – ce n'est pas le cas pour déterminer le CIMM. Je suis réservée à l'idée de mettre sur un pied d'égalité le lieu de naissance de l'agent et celui de son conjoint mais je suis favorable à votre suggestion de prendre en compte ce dernier.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL5 de M. Max Mathiasin.

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L'amendement a pour objet d'encourager une réflexion sur l'ordre des critères proposés par la proposition de loi afin de déterminer le CIMM.

Cet ordre traduit l'importance des critères, laquelle est matérialisée par un système de points.

Nous souhaitons déplacer le critère du lieu de naissance des enfants de l'agent de la quatrième à la sixième place. Les fonctionnaires ultramarins qui commencent leur carrière en métropole ont souvent leurs premiers enfants sur le territoire hexagonal sans que cela ne soit le signe de leur volonté de s'y installer durablement.

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L'ordre des critères est un sujet très délicat. Il a fallu faire un choix : ainsi, il a été décidé de placer en haut de la liste les critères les plus faciles à remplir et plus bas, ceux qui sont plus spécifiques. Je comprends votre argument mais je ne souhaite pas modifier l'ordre retenu, lequel a au moins l'avantage, par rapport aux règles actuelles, de faire prévaloir les critères moraux sur les critères matériels.

S'agissant de l'isolement, cette notion me semble difficile à apprécier de manière objective. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

L'amendement est retiré.

Amendement CL4 de M. Max Mathiasin.

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Je le retire puisqu'il s'inscrit dans la continuité du précédent en modifiant l'ordre des critères.

L'amendement est retiré.

Amendement CL34 de Mme Emeline K/Bidi.

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Il s'agit de préciser que les critères de l'âge et de l'état de santé ne s'appliquent qu'aux ascendants, descendants ou conjoints vivant dans le territoire susceptible d'être le CIMM. Ces critères permettent à des fonctionnaires de revenir auprès de leurs parents en fin de vie ou dépendants.

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Il m'était difficile de ne pas vous répondre, monsieur Metzdorf. Pour bien comprendre l'avenir, il faut parfois regarder loin dans le passé.

Dois-je rappeler ici que pendant longtemps, dans les outre-mer, nous avons été considérés comme des biens meubles ? On a tenté de nous priver de notre religion, de notre langue et même de notre patronyme.

Ne voyez pas un manque d'ambition. Plus fort que l'ambition, nous avons des rêves, nous, les enfants d'outre-mer, nous, les enfants de la « sous-France ».

J'ai vu clairement dans vos propos un manque d'égalité et de fraternité. Nous refusons de résoudre les problèmes au cas par cas ; nous voulons le faire par la loi car c'est bien la loi qui fait les hommes et non les hommes qui font la loi.

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Le débat précédent montre bien que la hiérarchisation des critères aboutit à des situations dignes des Shadoks et des discussions sans fin. Le dispositif ne peut pas fonctionner s'il est trop rigide.

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Nous faisons le même constat mais nous ne proposons pas les mêmes solutions.

On peut toujours comparer les souffrances. Les Calédoniens d'origine européenne sont des descendants de bagnards. Pour nous, la victimisation n'est pas la solution. Nous devons surmonter nos difficultés, qui sont certes plus exacerbées que dans l'Hexagone, grâce à notre travail, notre ambition et notre envie – c'est le discours que nous devons tenir à nos compatriotes. Nous n'avons pas besoin de la loi pour obtenir des postes à responsabilité – c'est humiliant. Si un député de l'Hexagone avait fait une telle proposition, on l'aurait taxé de paternaliste.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CL26 de Mme Emeline K/Bidi et CL6 de M. Max Mathiasin (discussion commune).

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L'amendement CL26 vise à supprimer les critères mentionnés aux 7° et 8° – « la maîtrise ou la compréhension suffisante de la langue régionale nécessaire à l'interaction avec les administrés locaux » ; « la connaissance historique, économique et sociologique du territoire » – non pas parce que nous doutons de leur utilité mais pour des raisons purement juridiques.

Les auditions d'éminents constitutionnalistes ont mis en lumière les difficultés que ces critères posaient. Nous avons donc décidé à contrecœur de les retirer.

Je n'ai toutefois pas renoncé à traduire l'idée selon laquelle il est préférable pour un administré qui ne maîtrise pas la langue française d'avoir en face de lui un fonctionnaire qui puisse le comprendre et se faire comprendre.

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L'amendement CL6 vise à déplacer de la huitième à la quinzième place le critère lié à la connaissance historique, économique et sociologique du territoire.

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J'ai vraiment du mal avec les propos de M. Metzdorf. Parler de victimisation, de manque d'ambition et de manque de travail, c'est odieux.

Pour les habitants des outre-mer, l'État ne tient pas les promesses de la République. J'ai peut-être une sensibilité particulière à ce sujet du fait de plusieurs déplacements avec Jean-Luc Mélenchon en outre-mer.

(Exclamations.)

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Monsieur Léaument, puisque votre intervention ne concerne pas l'amendement, je vous retire la parole.

(Mêmes mouvements.)

La commission rejette successivement les amendements.

Elle rejette l'article 3.

Article 4 (article L. 327-1 du code général de la fonction publique) : Lieu du stage

Amendement CL31 de Mme Emeline K/Bidi.

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Cet amendement vise à étendre le champ d'application de l'article 4 à la Nouvelle-Calédonie.

La commission adopte l'amendement.

Amendement CL25 de M. Stéphane Rambaud.

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La création d'un droit pour les fonctionnaires d'Etat recrutés par concours à effectuer des stages dans le territoire où ils ont été reçus apparaît d'une rigidité excessive. Par ailleurs il est souhaitable, pour la qualité de leur formation, que les élèves découvrent des territoires qu'ils ne connaissent pas nécessairement.

L'amendement tend donc à prévoir, en la matière, une priorité plutôt qu'un droit.

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Je ne suis pas favorable à ce qu'on substitue à un droit garanti une priorité qui a démontré son inefficacité. Avis défavorable.

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L'intervention de M. Rambaud illustre sa méconnaissance des réalités de l'outre-mer. Jusqu'à présent, les élèves effectuaient leur année de stage dans le territoire ultramarin d'où ils étaient issus. Depuis l'année dernière, ils peuvent être contraints de partir à 10 000 kilomètres et de changer de vie en deux mois.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL29 de Mme Emeline K/Bidi.

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Il s'agit de préciser que le droit garanti s'exerce « sous réserve de l'intérêt du service ». Cela semble aller de soi mais la précision est nécessaire compte tenu des remarques qui ont été formulées.

Vous avez beaucoup insisté sur le risque d'inconstitutionnalité pour justifier votre vote contre la proposition de loi. Cet amendement réfute l'argument. Je vous invite donc à voter l'amendement et le texte.

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Nous voterons cet amendement, qui parle de la République. Selon l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, les citoyens sont égaux devant l'accès aux postes, en fonction de leurs compétences. C'est bien là le sujet : à compétences équivalentes entre un Réunionnais et un Hexagonal, pourquoi ce dernier obtient-il presque toujours le poste ? À la fin, c'est agaçant !

Comment faire évoluer la République par la loi, par ce qui définit l'égalité entre les citoyens ? Les citoyens sont égaux dans leur capacité à faire la loi, en élisant des représentants, mais ils sont aussi égaux devant elle. C'est la loi qui définit notre égalité de citoyens ; c'est elle qui fait tout le sens de la République.

Dire que ce n'est pas en passant par la loi que l'on va corriger des inégalités, qu'il ne s'agit que d'ambitions différentes, c'est odieux. Cela me met hors de moi, particulièrement lorsque le président de la commission décide de couper le micro.

En ce moment, dans les outre-mer, il y a le sentiment que l'État n'est pas à la hauteur des promesses de la République. À Mayotte, des gens vont peut-être mourir de soif cet été ! C'est cela qui est en train de se passer dans les outre-mer !

Quand on parle de la République et de l'égalité, il faudrait avoir la dignité de regarder avec attention ce que nos collègues ultramarins proposent, plutôt que de le balayer d'un revers de main.

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L'amendement de la rapporteure dénature le contenu même de sa proposition. Si l'on sert l'intérêt du service avant tout, on en revient à la priorité légale et aux centres d'intérêt matériels et moraux. C'est pour cela qu'il faut sans doute améliorer le dispositif. Il faut demander au Gouvernement de publier la circulaire qui viendra actualiser et harmoniser les comportements de l'administration en la matière. Si l'amendement était adopté, le reste de la proposition n'aurait plus aucun sens.

Nous voterons donc contre l'amendement et, bien entendu, contre la proposition de loi.

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Je suis surpris des propos que tiennent certains militants d'un parti si attaché au caractère un et indivisible de la République. En tant qu'Alsacien, je sais que nous ne serons pas d'accord sur quelques subtilités de ce sujet. Cela montre combien vous êtes cynique, détaché de votre corpus idéologique – tout le monde peut se contredire – et dans une logique électoraliste.

La proposition de loi pointe pourtant de vrais sujets, tels que l'accès à la fonction publique de nos concitoyens ultramarins ou la façon dont ils peuvent exercer leurs responsabilités de fonctionnaires d'État dans les territoires dont ils sont issus. Plus largement, elle pose la question de la fonction publique d'État, à laquelle nous devrons réfléchir dans les années à venir. Vos revendications pour les fonctionnaires ultramarins peuvent être étendues à tout fonctionnaire désireux d'exercer près de chez lui, dans son territoire d'origine, et d'éviter les territoires de la République dans lesquels personne ne souhaite être muté et où, pourtant, nous avons besoin de l'engagement de nos concitoyens, pour que tous aient accès au droit.

La commission rejette l'amendement.

Elle rejette l'article 4 modifié.

Article 5 : Gage

La commission rejette l'article 5.

Elle rejette l'ensemble de la proposition de loi.

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Peu importe, en fin de compte, l'issue du vote en commission. J'aurais évidemment préféré qu'il soit favorable, mais il a eu l'avantage de mettre les outre-mer au centre des discussions. La proposition de loi a suscité beaucoup de passion chez vous : je préfère cela à l'indifférence avec laquelle on regarde l'outre-mer depuis trop d'années.

Nous avons tous fait les mêmes constats et pointé du doigt les mêmes problèmes sans nous accorder sur les solutions. Certains n'en proposent aucune ; j'ai au moins le mérite d'en avoir proposé une. Je ne suis pas seule : sur tous les bancs où siègent des ultramarins, la proposition de loi a reçu un soutien, et je remercie ceux qui ont exprimé leur intérêt pour le texte.

Je regrette l'ambiance dans laquelle nos débats se sont déroulés. Rappelons qu'il s'agit d'un texte de niche. J'appelle de mes vœux des débats non moins intéressants et vifs, mais plus sereins en séance, afin que le texte puisse avancer et, je l'espère, recueillir un vote favorable. Je travaillerai avec tous ceux qui le souhaitent pour l'améliorer d'ici à l'examen en séance.

Présidence de Mme Caroline Abadie, vice-présidente.

La Commission poursuit avec l'examen de la proposition de loi organique visant à indexer la dotation globale de fonctionnement sur l'inflation (n° 957) (M. Jean-Marc Tellier, rapporteur).

Lien vidéo : https://assnat.fr/fElHWc

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Mes chers collègues, nous en venons à l'examen de la proposition de loi organique visant à indexer la dotation globale de fonctionnement sur l'inflation, dont M. Jean-Marc Tellier a été désigné rapporteur. La proposition de loi organique est inscrite en septième et dernier point de l'ordre du jour de la journée du 4 mai.

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Madame la présidente, chers collègues, je vous remercie de m'accueillir au sein de votre commission pour présenter ce texte inscrit à l'ordre du jour de la niche du groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES.

Son sujet peut sembler technique et plus proche des thématiques dont s'empare la commission des finances, notamment dans le cadre du projet de loi de finances (PLF). Il est en effet question de l'indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l'inflation.

Il faut rappeler que la DGF a été indexée sur l'inflation jusqu'en 2011 avant d'être gelée jusqu'en 2013. Elle a ensuite été mise à contribution de façon drastique pour le redressement des finances publiques, à hauteur d'environ 11 milliards d'euros : de 41,5 milliards en 2013, son montant est ainsi passé à environ 31 milliards en 2017, avant que la part de la DGF versée aux régions ne soit supprimée. La Cour des comptes a mis en évidence l'impact de cette diminution sur les dépenses d'investissement des collectivités territoriales, ces dépenses ayant reculé de 11 % pendant la période.

Une telle mesure touche au principe même de l'autonomie financière des collectivités territoriales, pendant financier du principe constitutionnel de leur libre administration. Le sujet est au cœur des compétences de la commission des lois et nous passionne tous parce qu'étant élus d'un territoire composé de collectivités, nous sommes en lien quasi quotidien avec elles. Plusieurs d'entre vous, dont je fais partie, ont aussi eu la chance d'exercer des fonctions exécutives locales et de faire l'expérience de la réalité vécue par les collectivités territoriales.

La DGF est le principal concours financier que l'État verse aux collectivités territoriales – plus précisément aux communes, aux intercommunalités et aux départements. Elle a vocation à donner un niveau de ressources suffisant à ces collectivités pour qu'elles puissent fonctionner : elle vise à garantir leur autonomie financière.

La DGF comprend deux parties : une dotation forfaitaire ou de compensation, fondée sur des composantes historiques et sur le poids de la population ; des dotations de péréquation, qui visent à soutenir les collectivités ayant des charges particulières. La part de la péréquation au sein de la DGF, particulièrement dynamique, est financée depuis 2017 par un écrêtement de la dotation forfaitaire puisque l'enveloppe globale de la DGF a été gelée.

Entre 2018 et 2022, le montant de la DGF a été stabilisé à périmètre constant, aux alentours de 26,6 milliards. On peut penser que cette stabilisation a eu peu d'impact dans un contexte de faible inflation. C'est oublier l'essence même de la DGF, qui est un dû par l'État, non une subvention. André Laignel, président du Comité des finances locales, dit bien que s'il n'y a pas de remboursement en euros constants, c'est-à-dire en tenant de compte de l'inflation, il y a « spoliation ».

Le fonctionnement à enveloppe fermée de la DGF a des conséquences importantes sur sa répartition entre les différentes collectivités. En effet, la dotation forfaitaire a fait l'objet d'écrêtements, chaque année pendant cette période, au profit des composantes péréquatrices. Ce mécanisme explique qu'environ la moitié des communes et des EPCI – établissements publics de coopération intercommunale – voient chaque année leur DGF diminuer malgré la stabilisation de l'enveloppe globale depuis 2018.

Nos collectivités territoriales sont confrontées à d'énormes difficultés liées à la forte hausse des prix de l'énergie et de l'alimentation. En 2022 l'inflation s'est établie à 5,2 % environ quand le montant de la DGF restait stable, et elle est estimée à 4,2 % en 2023. Les communes sont particulièrement vulnérables : l'indice des prix des dépenses communales connaît une augmentation bien plus rapide que celle des prix au niveau national. Selon les dernières enquêtes, la hausse des prix du « panier du maire » a atteint 7,2 % en 2022.

Les collectivités territoriales doivent aussi prendre à leur charge la revalorisation du point d'indice, une mesure indispensable mais qui pèse sur les budgets locaux.

L'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) alerte déjà sur la contraction de l'investissement dans les collectivités territoriales en 2023, en raison de l'inflation et de la hausse des taux d'intérêt. Soutenir les collectivités territoriales, c'est également soutenir la croissance et l'activité économique puisque l'investissement local représente 70 % de l'investissement public.

Le Gouvernement a pris quelques mesures, tel le filet de sécurité, pour compenser les surcoûts des collectivités territoriales, mais elles sont mal calibrées et bénéficient finalement à un petit nombre de collectivités.

Ces difficultés s'ajoutent à celles qui résultent de la réforme de la fiscalité locale, avec la suppression progressive de la taxe d'habitation et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui a des conséquences importantes sur le niveau de ressources et l'autonomie fiscale des collectivités territoriales. Ces suppressions se sont d'abord traduites par une baisse directe des ressources des collectivités territoriales puisqu'elles n'ont pas été compensées à l'euro près par l'État. Ensuite, le remplacement d'impôt locaux par des fractions d'impôt national comme la TVA ou par des dotations sans lien avec les politiques menées par les collectivités territoriales conduit à une perte d'autonomie fiscale. Ce mouvement de recentralisation de la fiscalité locale menace la capacité des collectivités à maîtriser leurs coûts et contribue à affaiblir le lien entre le contribuable et l'élu.

Il est aujourd'hui urgent d'agir pour garantir aux collectivités territoriales les moyens de leur subsistance. Cette année, face aux pressions inflationnistes, le Gouvernement a été contraint d'augmenter de 320 millions la DGF pour financer la progression de la péréquation dans le bloc communal : elle atteint désormais 26,9 milliards. Cette enveloppe supplémentaire est bien insuffisante puisqu'elle représente une hausse de 1,7 % de la dotation allouée aux communes, soit un niveau très inférieur aux 4,2 % d'inflation estimés sur l'année.

À titre de comparaison, le montant de la DGF se serait élevé à 27,7 milliards s'il avait été indexé sur l'inflation estimée dans le PLF pour 2023, ce qui représenterait une hausse de 1,12 milliard, dont 770 millions pour le bloc communal.

Le groupe GDR-NUPES propose d'en finir avec des augmentations ponctuelles, liées à la conjoncture. Il souhaite une réforme plus juste, qui passe par une mesure d'indexation de la DGF sur la prévision d'évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation hors tabac, fixée chaque année dans les documents annexés au projet de loi de finances. Nous avons souhaité inscrire cette mesure dans la loi organique pour garantir sa pérennité et lui conférer un statut particulier.

L'indexation est d'autant plus nécessaire qu'une réflexion structurelle sur l'avenir de la DGF doit être engagée, maintenant que la ville de Paris ne contribue plus à l'effort de financement des besoins puisqu'elle ne perçoit plus de dotation forfaitaire. L'abondement de 320 millions décidé en 2023 ne peut être qu'une solution temporaire, et la soutenabilité de l'ensemble du dispositif pose question. Il est temps que la DGF progresse chaque année du niveau de l'inflation pour compenser les coûts de fonctionnement auxquels font face les collectivités territoriales et pour répondre ainsi à son objectif premier de garantir leur autonomie financière.

Dans les prochaines années, une fois cette indexation sur l'inflation acquise, une réflexion plus globale sur une réforme de la DGF pourrait utilement avoir lieu.

Je remercie tous les acteurs que j'ai pu auditionner.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Nous sommes défavorables à cette proposition de loi organique : le Gouvernement comme la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l'Assemblée nationale, créée lors de la précédente législature, et celle du Sénat, en lien avec les associations d'élus, ont changé de méthode, pour être au rendez-vous des secousses rencontrées par nos collectivités territoriales ces dernières années.

Avec près de 27 milliards, la DGF compte pour 15 % des recettes réelles de fonctionnement pour les communes, 20 % pour les EPCI à fiscalité propre et 12 % pour les départements. Constituée à 55 % par une part forfaitaire et, pour le reste, par une dotation de péréquation elle représente en moyenne, par habitant, 169 euros pour les communes, 87 euros pour les intercommunalités et 117 euros pour les départements. De 2012 à 2017, son enveloppe globale a baissé de 11 milliards d'euros, ce qui n'a pas été sans conséquences pour les collectivités territoriales.

À partir de 2017 nous avons sanctuarisé la DGF à 27 milliards, mais l'ensemble des concours de l'État – 47 milliards en 2022 – a augmenté de 2,2 %, contre 1,2 % pour l'inflation. Les deux mécanismes du filet de sécurité et de l'amortisseur sur les prix de l'énergie et de l'électricité ont permis d'abonder les moyens des collectivités territoriales à hauteur de 2,8 milliards, là où une hausse mécanique de la DGF indexée sur l'inflation ne les aurait fait progresser que de 1,1 milliard.

Les associations d'élus et le Comité des finances locales, à l'exception de son président, ne demandent plus l'indexation sur l'inflation : ils souhaitent un dialogue et des mesures adaptées aux besoins des collectivités car une simple indexation risque d'aider davantage, en proportion, les collectivités qui n'ont pas le plus besoin d'un soutien supplémentaire. Le filet de sécurité de 1,5 milliard et l'amortisseur, qui a évité des hausses de 20 à 30 % des coûts de l'énergie et de l'électricité pour certaines collectivités ont été ajustés. Les 320 millions de DGF supplémentaires en 2023 ont neutralisé les effets de la péréquation. Autrement dit, nous avons fait du cousu main dans le budget que nous avons adopté.

Parallèlement, à la suite de la révision des bases théoriques, indexées sur l'inflation, les taxes foncières sur le bâti ont augmenté de 3,4 % en 2022 et progresseront de 7 % en 2023. À l'Assemblée nationale, une partie des oppositions s'est interrogée sur le maintien d'une mécanique d'indexation sur l'inflation, à l'inverse des cosignataires de cette proposition. Les amendements que j'ai déposés me permettront de revenir sur cette question.

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Nous partageons le constat de la proposition de loi organique : la DGF versée par l'État se substitue à un ensemble de taxes locales initialement prélevées par les collectivités. Il est donc nécessaire d'assurer un montant constant de dotation en termes réels, année après année, pour que les collectivités puissent relever leurs propres défis financiers.

La première des collectivités territoriales reste la commune. Selon l'étude de La Banque postale, en partenariat avec l'Association des maires de France, un grand nombre de communes sont exsangues car l'inflation fait exploser leurs charges. Les plus petites sont les plus touchées par l'inflation et comparativement les plus pénalisées par la stagnation de leur dotation. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement visant à indexer la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) sur l'inflation. Il est essentiel que l'inflation ne condamne pas tous les projets d'investissement des communes rurales, sans quoi elles en mourront.

Le Gouvernement tend souvent à oublier ces petites communes qu'il rêve, hélas, de voir disparaître. Le groupe Rassemblement national estime au contraire qu'elles font la richesse de nos territoires. Nous devons les chérir et les soutenir. Oui, nous devons revoir sur le long terme l'aménagement de notre territoire. Dans la France de demain, il faudra dynamiser les zones rurales car, c'est une évidence, nous ne pourrons pas tous vivre dans les villes. Il faut donc soutenir les collectivités territoriales, dont les communes, et leur assurer un financement durable de leur dotation. Nous soutenons l'indexation de la DGF sur l'inflation car nous la jugeons nécessaire. Elle représentera cependant un coût considérable pour nos finances publiques.

C'est pourquoi nous avions déposé un amendement visant à financer cette mesure en minorant les ressources que la France affecte au budget de l'Union européenne. Il a été déclaré irrecevable pour des motifs fallacieux. Je rappelle que le projet de loi de finances pour 2023 fixe la contribution de la France à 24,5 milliards, une manne énorme qui nous est redistribuée seulement partiellement et sans que nous puissions décider de son affectation.

Les députés du Rassemblement national voteront donc ce texte que soutiennent par ailleurs les associations d'élus locaux, dont nous souhaitons faire entendre ici la voix.

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Je vous remercie de m'accueillir au sein de votre commission.

Frédéric Roig, ancien député de ma circonscription, aujourd'hui président de l'AMF34, l'Association des maires de l'Hérault, constatait hier dans Le Midi libre : « C'est le maire qui se fait engueuler en premier. Les citoyens se tournent toujours vers l'élu qui est le plus à même de faire vivre notre démocratie au quotidien. C'est l'histoire de notre république. »

La question de l'indexation de la DGF sur l'inflation est plus politique que technique : quelle autonomie de gestion voulons-nous pour nos collectivités ? Quelle considération portons-nous aux élus, mais aussi aux habitants, dans ce cadre communal qui, mieux que tout autre, peut nous faire sentir pleinement citoyens ?

Tout ce qui augmente l'autonomie des communes, notamment l'indexation de la DGF sur l'inflation, a la faveur du groupe La France insoumise. Nous soutenons donc cette proposition de loi organique du groupe GDR.

L'autonomie des communes est mise à mal par la suppression d'impôts locaux, sans que soient recherchées remise à plat ou « coconstruction », même a posteriori. Cela marque une rupture de confiance entre les maires et l'exécutif. En choisissant d'empêcher tout débat sur les finances des collectivités à l'automne dernier, par dix utilisations de l'article 49.3, le Gouvernement, croyant clouer le bec aux oppositions alors qu'il était minoritaire, a lancé aux élus locaux : « Circulez, y a rien à voir ! »

Ce qu'il ne fallait surtout pas voir, c'étaient les conséquences de la suppression d'une recette, un nouveau cadeau aux entreprises, qui n'en demandaient pas tant. On jurait que la CVAE allait être compensée : elle ne l'est pas entièrement. On annonçait la création d'un Fonds vert pour accélérer la transition écologique dans les territoires : ses 500 millions additionnels n'iront pas à des investissements locaux. La circulaire du 14 décembre 2022 demande aux préfets de s'assurer que les collectivités bénéficient du fonds, au moins à hauteur de la compensation de CVAE prévue. Non seulement la compensation s'évapore après 2023 mais on force la main aux maires, lesquels ne pourront pas investir en fonctionnement. Car subventionner une cantine de qualité, recruter une Atsem – agente territoriale spécialisée des écoles maternelles – de plus à l'école, soutenir une association sportive ou caritative, c'est aussi investir pour l'avenir.

Le Gouvernement n'est pas le seul fautif. La mise à mal a débuté avec la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite Notre, de Manuel Valls, Bernard Cazeneuve et Emmanuel Macron, largement décriée par nos élus, et avec les baisses de dotation régulières voulues par François Hollande. Après avoir diminué de 11,2 milliards entre 2013 et 2017, la DGF est tombée à 27 milliards. Sa stabilité depuis 2017 est un trompe-l'œil : les charges augmentent et l'inflation se poursuit. Si la DGF avait été indexée sur l'inflation, telle que la Banque de France la calcule, elle serait aujourd'hui de 31 milliards. Il manque donc 4 milliards aux collectivités pour investir.

Nombreux sont les élus qui jettent l'écharpe à terre. On pourrait en conclure avec cynisme qu'il faut supprimer les communes car être maire est trop compliqué. On doit plutôt redonner confiance à nos concitoyens dans la capacité des élus à changer la vie des gens, même modestement. Cela passera par l'échelon communal. En indexant la DGF sur l'inflation, on crée un peu de visibilité et on donne aux communes les moyens d'investir pour l'avenir. Redonnons donc aux élus locaux les moyens de faire république !

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J'ai bien écouté notre collègue Rémy Rebeyrotte : nous avons changé de méthode. Mais, du coup, on ne comprend plus rien ! C'est ce qui se passe dans les territoires : à force d'instaurer des règles toujours plus subtiles et complexes, qui visent à harmoniser toujours davantage des territoires pourtant fondamentalement différents, on leur fait perdre leur latin.

La démocratie y a-t-elle gagné quelque chose ? La participation des citoyens dans la vie locale s'est-elle accrue grâce à la complexification de nos normes financières locales ? J'ai tendance à penser que non, au regard de l'effritement du nombre de candidats aux élections locales et de la diminution d'une participation qui résistait pourtant à l'abstention. On ne comprend pas mieux les règles aujourd'hui.

Depuis une décennie, plutôt que d'assumer un discours politique qui ne convient pas aux Français – la suppression des petites communes –, les majorités successives ont déployé des règles qui tendaient à asphyxier les collectivités, avec des systèmes de calcul incompréhensibles, notamment pour celles qui ne disposent pas de services financiers étoffés. Résultat, ce sont les plus gros qui s'en sortent le mieux – il est plus facile de comprendre les règles lorsque l'on dispose d'un service financier que quand un secrétaire de mairie s'occupe de tout. Ou alors, comme certaines intercommunalités, il faut recourir à des cabinets de conseil et d'audit, qui optimisent le coefficient d'intégration fiscale et font gagner 10 000 ou 12 000 euros de DGF. Voilà la réalité dans nos territoires !

Augmenter de façon linéaire la DGF en l'indexant sur l'inflation, est-ce la solution ? Je n'en suis pas certain mais c'est peut-être un début de réponse. Dans tous les cas, il faudra une réforme globale des moyens des collectivités territoriales, une réforme qui fixe des règles simples et compréhensibles par tous, permettant à la démocratie de s'exprimer. C'est ce que nous avons complètement oublié. Matin et soir, on fait le culte de la démocratie locale, on trouve formidables tous ces élus locaux qui s'investissent, mais on dégrade chaque jour la capacité de nos concitoyens à comprendre le système, donc à l'accepter.

Comme nous avons changé de méthode, selon M. Rebeyrotte, je regrette que le grand chantier de la réforme de la dotation globale de fonctionnement, pourtant promis et annoncé, ait été oublié, caché, abandonné, au profit d'une actualité éloignée des préoccupations des collectivités territoriales. Il est grand temps que nous nous attaquions au vaste chantier de l'autonomie financière et fiscale des collectivités territoriales.

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La proposition de loi organique vise à ajouter un alinéa à l'article 6 de la loi organique relative aux lois de finances de 2001, garantissant que le montant des recettes de l'État directement rétrocédées aux collectivités ne puisse être inférieur, à périmètre constant, au montant de l'année précédente, majoré de l'inflation.

La loi de finances pour 2023 apporte soutien et protection aux collectivités territoriales, le budget qui leur est alloué ayant été construit en concertation avec les associations nationales d'élus. Confronté à un contexte inédit, le Gouvernement a fait le choix d'un soutien massif à toutes les strates des collectivités territoriales afin de les protéger au mieux des conséquences de la crise énergétique. Cet accompagnement a pris différentes formes.

D'abord, le Gouvernement a sanctuarisé l'enveloppe globale de la DGF, la principale dotation de fonctionnement de l'État aux collectivités territoriales. Après une période de stabilité, celle-ci a progressé pour la première fois depuis plus de treize ans, atteignant 320 millions, davantage que les 210 millions prévus en septembre 2022. Un tel levier a pour conséquence de garantir le maintien ou l'augmentation de la dotation pour une large majorité de communes et de leur permettre d'assurer les missions de service public. Les territoires ruraux bénéficieront largement de la hausse, avec une dotation de solidarité rurale de 200 millions. Quant à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, elle s'élève à 90 millions et la dotation d'intercommunalité, à 30 millions.

Le second levier réside dans les nombreuses mesures d'accompagnement des investissements des collectivités – le filet de sécurité, pour faire face à la hausse du coût de l'énergie ; la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ; la création du Fonds vert ; l'augmentation de la dotation pour la protection de la biodiversité ; l'instauration d'une dotation exceptionnelle de 107 millions visant à compenser les pertes de recettes fiscales pour les régions. Les crédits de paiement du programme Conditions de vie outre-mer ont été augmentés de 43 millions, dont 30 millions destinés au contrat de redressement des outre-mer. Une aide exceptionnelle de 300 millions d'euros a également été ajoutée au projet de loi de finances pour 2023 en faveur des collectivités qui organisent des transports publics.

Par ailleurs les aides à destination des communes en grande difficulté ont quintuplé, pour atteindre 10 millions. Elles visent à soutenir les communes dans lesquelles des circonstances anormales ont entraîné un déséquilibre budgétaire.

Enfin, comme en 2021, les marges de manœuvre financière des collectivités territoriales ont augmenté en 2022. Leur capacité d'autofinancement a été bien supérieure à ce qu'elle était avant la crise. Dépassant les prévisions, les recettes réelles de fonctionnement, soutenues par des recettes fiscales dynamiques, ont progressé de 10,2 milliards en 2022 et surpassé de 8,3 % leur niveau d'avant la crise. Les dépenses sont maîtrisées et l'investissement progresse : la croissance des dépenses réelles de fonctionnement des collectivités atteint ainsi 4,5 % en 2022, soit plus 8 milliards.

L'investissement, tiré par la hausse des dépenses d'équipement, a continué sa progression par rapport à 2021, à hauteur de 5,6 %. Les investissements restent donc dynamiques malgré les difficultés rencontrées dans les territoires.

L'ambition du groupe MODEM est avant tout de permettre aux collectivités territoriales de tenir et de franchir cette crise, pour continuer d'investir. C'est ce que permet la loi de finances pour 2023.

Une indexation de la DGF sur l'inflation serait une forme de saupoudrage. Nous aiderions davantage les collectivités qui en ont le moins besoin, et réciproquement. L'indexation de cette ressource dynamique sur l'inflation serait en outre contre-productive puisqu'elle n'apporterait que 1,7 milliard. Nos territoires attendent et valent beaucoup mieux.

Pour toutes ces raisons, le groupe MODEM ne votera pas en faveur de ce texte.

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Le texte pose une question importante, celle du modèle de décentralisation que nous voulons. Souhaitons-nous une puissance publique à deux vitesses, dont l'extension locale est désarmée et dont l'État central délègue ses compétences sans être à la hauteur quand il s'agit de donner les moyens de les exercer, ou des services publics de proximité répondant aux attentes de nos concitoyens et des collectivités locales attentives aux besoins de leurs habitants et disposant des moyens de leurs ambitions ?

Il n'est pas possible de rappeler à longueur de discours à quel point les collectivités territoriales sont essentielles tout en laissant faire le démantèlement de leurs moyens, qui les laisse exsangues et les plonge dans la difficulté pour assumer leurs attributions. Je parle bien sûr de la chute drastique de la DGF, qui représentait 41,5 milliards d'euros il y a dix ans, 31 milliards il y a cinq ans et 27 milliards aujourd'hui. Il convient de mentionner également l'effet de ciseau : les compétences s'accroissent – pensons à la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « 3DS » – et les ressources diminuent du fait de la perte d'autonomie fiscale découlant de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales et de la CVAE.

Nous le savons tous, la disparition des services publics de proximité est un facteur déterminant de l'abstention et du vote contestataire : comment ne pas comprendre ces Françaises et ces Français qui éprouvent un sentiment d'abandon, notamment en milieu rural ? C'est pourquoi il faut redonner des ressources aux collectivités, dans l'immédiat pour faire face à l'explosion des factures et, au-delà, pour exercer pleinement leurs missions. Tel était le sens des propositions que nous avions imposées au Gouvernement dans la loi de finances rectificative pour 2022 : compensation aux collectivités de la hausse des dépenses de RSA, de la revalorisation du point d'indice et de la croissance des frais résultant de l'inflation ; les groupes Socialistes et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (LIOT) avaient, à cette occasion, remporté une belle victoire.

Dans la continuité de nos combats communs, nous soutiendrons la proposition de loi organique, qui consiste simplement à empêcher l'inflation de grignoter la DGF. Cela ne doit pas nous empêcher d'aller plus loin et, comme l'évoquait le rapporteur, de poursuivre ce travail par une vraie réforme de la DGF destinée à la rendre plus adéquate aux réalités actuelles.

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Nous tenons à saluer l'initiative du groupe Gauche démocrate et républicaine d'avoir mis à l'ordre du jour une proposition de loi organique qui a trait aux ressources des collectivités territoriales. Les députés du groupe Horizons et apparentés sont particulièrement attachés aux collectivités territoriales, maillons essentiels du fonctionnement de notre pays.

L'indexation de la DGF sur l'inflation est à première vue une idée séduisante : l'exposé des motifs parle même de « bon sens économique ». À y regarder de plus près, cette affirmation peut cependant souffrir certaines objections. D'une part, la DGF est une enveloppe fermée, ce qui signifie qu'une augmentation globale ne se traduit pas forcément par une hausse de la dotation à toutes les collectivités qui la perçoivent. D'autre part, en ce qu'elle regroupe différentes dotations poursuivant des objectifs distincts – compensations, péréquations – à destination de différentes catégories de collectivités et selon des critères d'attribution nombreux et complexes, elle n'est pas un outil facile à manier. Dès lors son indexation sur l'inflation ne semble pas représenter la solution la plus efficace pour protéger les collectivités d'une forte inflation, telle que nous la connaissons encore actuellement.

En réalité, les différents mécanismes de soutien mis en place par les gouvernements successifs et la majorité depuis le début de la crise sanitaire et au plus fort de la crise énergétique sont plus forts que ne l'aurait été une simple indexation de la DGF sur l'inflation. Les députés du groupe Horizons et apparentés ont pris toute leur part de cette politique, puisqu'ils sont à l'origine d'un filet de soutien à l'investissement, déployé dans le cadre de la loi de finances pour 2023, lequel devrait permettre aux collectivités territoriales de faire face à l'inflation et de poursuivre leurs investissements.

Nous connaissons en effet la place de l'investissement public local dans l'investissement public total, donc la nécessité de dégager des marges d'autofinancement au sein des sections de fonctionnement des budgets des collectivités. L'indexation de la DGF sur l'inflation est une proposition qui risque de se révéler court-termiste, puisque les économistes s'accordent à estimer que l'inflation devrait rapidement retrouver des niveaux plus modestes. En période de forte inflation, il est plus adapté de prendre des mesures spécifiques et, en période d'inflation modérée, l'indexation ne représente qu'un soutien modeste.

L'enjeu essentiel autour de la DGF, et plus généralement en matière des transferts de l'État au profit des collectivités territoriales, tient à la visibilité sur plusieurs années. Les collectivités ont besoin de savoir quel sera le montant de leurs dotations dans trois ou cinq ans pour anticiper, prendre des décisions de gestion et d'investissements, et organiser l'incidence sur les budgets des variations potentielles des contributions de l'État. En conséquence, les députés du groupe Horizons et apparentés voteront contre cette proposition de loi organique.

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Beaucoup l'ont dit, les collectivités territoriales, notamment les communes, sont le premier maillon de la République ; dans la période actuelle, elles remplissent de nombreuses missions. Pour les citoyens, les communes représentent des lieux de vie, mais également des services publics, que l'on pense aux crèches, aux écoles, aux activités sportives, aux médiathèques, aux centres de loisirs ou au portage des repas, entre autres. Tous nos concitoyens bénéficient quotidiennement de ces services publics de proximité et exercent sur eux un pouvoir d'intervention bien plus grand que sur les services publics de l'État.

Beaucoup de collectivités sont actuellement exsangues, et cette situation ne résulte aucunement d'une mauvaise gestion de leurs finances. Depuis près de dix ans, elles sont en effet malmenées : cela a commencé en 2011 par la désindexation de la DGF, cela a continué par sa baisse drastique de plus de 11 milliards d'euros entre 2013 et 2017 et cela s'est poursuivi avec la majorité actuelle, qui a supprimé des impôts locaux, taxe d'habitation et impôts de production, cette perte n'ayant été que partiellement compensée. La crise du covid et la poussée inflationniste depuis la fin de l'année 2021 ont grandement accru les dépenses ainsi que la demande de services adressée aux communes. Les maires, qui font face à des demandes croissantes et plus précises, doivent beaucoup intervenir, tant les besoins exprimés par les citoyens sont grands.

Il faut désormais arrêter la casse car les collectivités se situent au bord de l'abîme : il me semble que nous pouvons être nombreux à partager ce constat. Elles sont le cœur de la démocratie, donc il faut mesurer le danger que représentent leurs difficultés dans un moment de crise démocratique aussi aiguë. Nos concitoyens ressentent directement les conséquences de cette situation car, dans certaines communes, les services publics ferment plus tôt et des investissements particulièrement utiles sont reportés, faute de trésorerie : comme l'a rappelé le rapporteur, ce n'est pas la rallonge de 320 millions d'euros opérée en 2023 qui réglera la situation, car elle ne représente qu'une goutte d'eau.

Il est temps de soutenir les collectivités locales : vous dites que l'indexation serait inutile, mais elle apporterait de la visibilité aux élus locaux. Elle ne constitue pas l'alpha et l'oméga de la politique de soutien aux finances des collectivités territoriales, mais elle constitue une mesure d'urgence bienvenue, qui fait sans doute bien plus consensus parmi les maires qu'à la commission des lois de notre assemblée.

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Si nous ne votions pas cette proposition de loi organique, nous serions des hypocrites de première catégorie, car nous rendons tous ici hommage au dévouement des élus locaux lorsque nous parcourons nos circonscriptions, de vœux en commémorations, de marchés en manifestations diverses. Nous nous levons régulièrement dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale pour applaudir un élu local mis en cause ou agressé ; nous saluons ces hussards de la République, qui se trouvent en première ligne quand la tension monte dans le pays du fait de la politique gouvernementale : ils subissent alors les conséquences de choix politiques dont ils ne sont pas responsables. Les élus locaux ne nous demandent pas de la commisération, ni des applaudissements ou de belles déclarations d'amour, ils réclament la traduction en actes de la promesse républicaine pour tous les territoires de la nation.

J'adresse un grand remerciement au groupe Gauche démocrate et républicaine et au rapporteur d'avoir déposé cette proposition de loi organique, qui n'est ni un bouleversement révolutionnaire, ni du terrorisme intellectuel ou de l'outrance radicale, mais un simple retour à une règle qui a prévalu de 1979 à 2011. La DGF, dispositif complexe et opaque, doit être indexée sur l'inflation. Depuis 2003, les collectivités locales font face à des charges découlant de la non-compensation de nombreux transferts de compétences.

Pourtant vous dites, mantra des néolibéraux, qu'il faut libérer les énergies, l'esprit d'entreprise, la capacité d'investir et d'entreprendre, etc. C'est vrai pour tout le monde, sauf pour les collectivités locales ! Elles, vous les contraignez, mais il est vrai qu'est suspecte toute entité qui pourrait être un contre-pouvoir ou qui pourrait vouloir faire autre chose que ce que décide l'Élysée. J'ai entendu une collègue évoquer le vote d'un budget, je suis parlementaire depuis moins d'un an, je n'ai pas le souvenir d'avoir eu le droit de me prononcer sur un projet de loi de finances, je ne me rappelle que de 49.3.

La hausse de la DGF que nous n'avons pas ratifiée est un trompe-l'œil, puisqu'elle est moins élevée que l'inflation : les capacités financières des collectivités ont diminué ou stagné puisqu'elles n'ont pas progressé. Elle ne compense pas non plus des décennies de baisse de la dotation. Prenons l'exemple d'une commune qui m'est chère, celle de Juziers, dans ma circonscription : depuis 2014, sa DGF a été divisée par huit ! Par huit !

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Monsieur Rebeyrotte, les torts sont évidemment partagés, la baisse de la DGF est ancienne et les responsabilités le sont donc aussi. J'avais cependant cru comprendre qu'avec l'arrivée d'Emmanuel Macron un nouveau monde émergeait, dirigé par des professionnels qui en finiraient avec les errements de l'ancien monde. J'attends les preuves ! Des gens vous ont crus, ne les décevez pas !

Les collectivités locales constituent le premier espace de démocratie et de protection sociale grâce à leurs services publics. Elles apportent de la solidarité face aux choix gouvernementaux injustes et brutaux, voilà pourquoi nous soutiendrons avec plaisir cette proposition de loi organique. Je vous invite, mes chers collègues, à faire enfin preuve de courage et de sincérité à l'égard des collectivités et des élus locaux : je ne vois pas comment nous pourrions dire aux maires que nous faisons tout ce que nous pouvons pour les aider à remplir leurs missions, essentielles à la vie de la République et à la cohésion des territoires, si nous n'adoptions pas ce texte.

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Depuis quelques années, de nombreux coups de canif ont été donnés à l'autonomie financière des collectivités territoriales, laquelle n'existe pas dans les faits. Les réformes successives de la fiscalité locale ont conduit à un démantèlement progressif du lien entre les contribuables locaux et les élus territoriaux. Les collectivités doivent faire face à une hausse de leurs charges, alors que leur budget est abondé par des dotations désindexées de l'inflation et des fractions d'impôts nationaux sur lesquelles elles n'ont, à ce jour, aucune marge de manœuvre.

Dès le début de cette année, notre groupe a, avec d'autres, relayé la demande des associations d'élus d'indexer la DGF sur l'inflation, mesure rejetée par le Gouvernement. De manière générale, nous avons défendu et nous défendons toujours l'élaboration d'une loi spécifique de financement des collectivités territoriales, tout comme la constitutionnalisation de leur autonomie fiscale. Dans la continuité de ces combats, nous soutiendrons cette proposition de loi organique.

Avant 2011, la DGF était bien indexée sur l'évolution des prix ; aujourd'hui, son niveau ne correspond plus à la réalité des coûts que doivent supporter les collectivités territoriales ; après la pandémie difficile de covid-19, les élus des territoires affrontent désormais une nouvelle crise liée à une inflation qui pèse fortement sur leur budget. Depuis l'été 2022, l'ensemble des collectivités subissent la hausse des dépenses énergétiques et des prix de l'alimentation : cette situation est difficilement soutenable, surtout pour les plus modestes d'entre elles.

Ces difficultés sont loin d'être derrière nous, et la situation est lourde d'incertitudes. Dans son rapport sur les finances locales de 2022, la Cour des comptes a indiqué que la hausse des charges freinerait l'investissement local et contraindrait les élus à reporter voire à annuler certains de leurs projets. Nous estimons qu'il n'est pas possible de laisser les élus territoriaux dans une situation budgétaire compliquée, qui favorise l'attentisme. La DGF est avant tout un lien qui oblige l'État et qui apporte aux départements et au bloc communal des ressources prévisibles.

Depuis 2017, la DGF est figée autour de 27 milliards d'euros : notre groupe regrette la stagnation du principal concours de l'État aux collectivités territoriales ; du fait de l'inflation, cette stabilité n'est qu'un trompe-l'œil budgétaire qui dissimule une érosion continue. Les aides d'urgence ne suffisent plus, et nous avons besoin d'une réforme structurelle des finances locales. Nous ne remettons pas en cause les aides temporaires votées par l'ensemble des parlementaires sous la forme de filets de sécurité dans les lois de finances rectificative pour 2022 et initiale pour 2023, mais force est de constater que ces dispositifs ne suffisent pas et sont souvent mal calibrés. Nous souhaiterions que le Gouvernement cesse de ne faire que réagir, qui plus est dans l'urgence, pour déployer enfin des réformes structurelles : la réindexation de la DGF sur l'inflation en est une.

Je rappelle la nécessité d'ouvrir un débat de fond sur l'autonomie fiscale et financière des collectivités territoriales, afin d'aboutir à une réforme profonde du fonctionnement de la République et de ses relations avec les territoires.

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Je souhaiterais remercier l'ensemble des groupes qui se sont exprimés. Nous reconnaissons tous l'importance du rôle joué par les collectivités locales, lesquelles assurent proximité, démocratie et services publics – parfois les derniers dans certains territoires. C'est le choix de la méthode qui nous sépare. Les élus des collectivités locales de France doivent voter leur budget et éprouvent parfois du mal à le boucler ; ils savent que les filets de sécurité et les amortisseurs ne donnent pas de perspective sur plusieurs années et ne facilitent pas la préparation des budgets à venir. Voilà pourquoi nous avons choisi un autre chemin, qui repose sur ce qui a déjà fonctionné, à savoir l'indexation de la DGF sur l'inflation ; les collectivités locales bénéficiaient d'une visibilité sur plusieurs années et pouvaient s'organiser. La suppression de cette règle a entraîné de grandes difficultés pour le budget de fonctionnement des collectivités ; celles-ci reportent donc leurs investissements, ce qui posera des problèmes économiques à court terme puisqu'on leur doit 70 % de l'investissement public.

Monsieur Schellenberger, vous souhaitez la tenue d'un vrai débat sur l'organisation et la place des collectivités territoriales : je partage votre vœu mais il y a urgence à répondre aux collectivités. Tel est le sens de cette proposition de loi organique. Les maires doivent avoir des perspectives pour mener leurs projets et répondre aux attentes des citoyens pour faire vivre la démocratie locale.

Article 1er (art. 6 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances) : Inscription dans la loi organique de l'existence de la dotation globale de fonctionnement et indexation de cette dotation sur l'inflation

Amendement CL10 M. Jean-Marc Tellier.

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Cet amendement vise à préciser que le mécanisme d'indexation de la DGF sur l'inflation ne se fait qu'à périmètre constant. Ainsi, cette disposition organique n'empêchera pas le législateur de modifier le périmètre de la DGF.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL2 de M. Julien Rancoule.

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Cet amendement vise à indexer la DETR sur l'inflation. La DETR a pour but de subvenir spécifiquement aux dépenses d'équipement des communes et des groupements de communes situés essentiellement en milieu rural. La crise inflationniste pèse surtout sur les charges des petites communes. Selon une étude de l'AMF et de La Banque postale, les charges à caractère général, notamment les achats de matières premières et les fournitures énergétiques, représentent 45 % des achats des communes de plus de 100 000 habitants et 52 % de celles dont la population oscille entre 500 et 2 000 habitants. Conséquence évidente, les petites communes sont contraintes de rogner sur leurs dépenses d'investissement. Nous souhaitons donc indexer la DETR sur l'inflation afin d'assurer, année après année, la stabilité du montant réel des dotations.

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J'entends votre argument et je souhaiterais idéalement que la DETR et l'ensemble des dotations augmentent dans la même proportion que l'inflation, mais je vous invite à retirer l'amendement pour conserver au texte sa priorité qu'est l'indexation de la DGF.

En outre, la DETR est une subvention directe du budget de l'État et non un prélèvement sur recettes. Il faut éviter de multiplier ces prélèvements, afin de ne pas dénaturer la Lolf.

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Nous sommes opposés à l'amendement. La DETR n'a cessé de progresser, par paliers, depuis 2013, pour atteindre 1 milliard d'euros. Ensuite, il ne faut pas oublier le Fonds de soutien à l'investissement local, créé temporairement par François Hollande et pérennisé lors de la législature précédente sous la forme de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) : elle représente 570 millions d'euros après avoir été augmentée de 6,8 % en 2023, soit 37 millions d'euros. Enfin, vient de se créer le Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires, dit Fonds vert, doté de 2 milliards d'euros. J'ai laissé de côté les 3 milliards d'euros de soutien européen à l'investissement – Fonds européen de développement régional (Feder), Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), programme Liaison entre actions de développement de l'économie rurale (Leader) –, parce que j'ai cru comprendre que nos amis du Front national y étaient absolument opposés, et que je ne voulais pas les fâcher ; je rappelle néanmoins que l'Europe aide nos collectivités territoriales, contrairement à ce que vous racontez. Voilà pourquoi, nous sommes contre l'amendement.

L'une des priorités pourrait être l'augmentation du seuil des marchés publics pour tenir compte de l'inflation et faciliter le travail des collectivités locales avec les entreprises de proximité. Il serait également opportun de réexaminer la répartition de la dotation de solidarité rurale (DSR) au profit des communes rurales, maintenant que la couverture intercommunale du territoire est achevée. De même, il faudrait poser la question du repositionnement des finances locales : je rejoins Raphaël Schellenberger pour regretter la complexité de la DGF, qui repose sur quarante-deux critères : nous ne savons pas comment elle évolue et nous avons besoin d'une fiscalité locale plus transparente. Il s'agit d'un vieux débat, qu'il faudra bien finir par trancher un jour.

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Monsieur Rebeyrotte, ne soyez pas malhonnête : n'oubliez pas qu'il existait un moyen de soutien important aux communes, la réserve parlementaire ; seule une petite partie de cette réserve a abondé la DETR. Vous n'êtes pas plus honnête quand vous parlez de croissance des recettes des collectivités territoriales, puisque vous mélangez les différents niveaux et comparez des intercommunalités avec des communes et des régions avec des départements, alors que certains échelons souffrent réellement.

Dans les communes, l'inflation est galopante dans les cantines et les chantiers, et elle touche également les salaires. Le bouclier tarifaire laisse de côté toutes les villes moyennes, qui assument pourtant des charges de centralités élevées. Vous avez supprimé les leviers fiscaux qui assuraient un minimum d'indépendance financière aux communes, et vous continuez de le faire avec la disparition de la CVAE.

L'amendement est intéressant car il montre que les communes sont de plus en plus dépendantes des subsides de l'État pour investir dans les projets de demain. Cette situation inacceptable frise l'inconstitutionnalité, puisque le principe d'autonomie financière et fiscale des collectivités territoriales est bafoué. Vous vous en gargarisez, vous ne devriez pas !

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Il est toujours intéressant de lire les amendements du Front national. Un élément de celui que nous examinons doit retenir notre attention car il met en lumière l'une des constances de l'extrême droite française : on lit dans l'exposé sommaire que « Le coût financier de cette mesure pourrait tout à fait être compensé par une réduction des budgets consacrés à la politique de la ville. » Tiens donc ! C'est encore sur le dos des quartiers populaires que vous voulez faire des économies. Pourquoi êtes-vous obsédés à ce point par l'idée de matraquer les quartiers populaires ? Peut-être parce qu'ils ne ressemblent pas vraiment à la France que vous idéalisez et que vous souhaitez nous imposer ; peut-être parce qu'ils sont divers et multiculturels. On voit bien votre obsession malsaine, empreinte de racisme et de xénophobie, résumée en une phrase dans l'exposé sommaire d'un amendement ; petite phrase certes, mais ô combien révélatrice. Nous voterons évidemment contre votre amendement.

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Le groupe Les Républicains est favorable à l'indexation de la DGF sur l'inflation, mais la DETR est d'une autre nature. Cette dotation obéit en effet à une logique différente, car elle ne donne pas directement des moyens aux collectivités territoriales, elle soutient des projets. Il s'agit d'une enveloppe importante, mais l'inflation n'est pas forcément un bon indicateur pour son évolution puisque la consommation de la DETR suit aussi la courbe du cycle de l'investissement local, elle-même largement calée sur le cycle électoral local. En outre, l'articulation entre engagement et paiement est assez complexe car les grands projets qui ont besoin de la DETR courent sur plusieurs années : il n'est donc pas si évident que l'inflation soit le bon indicateur pour faire évoluer la dotation.

L'État doit soutenir les investissements du bloc local, notamment dans les fonctions régaliennes. Je souhaite que nous réfléchissions à la refonte générale du dialogue financier local, afin d'aboutir à l'émergence d'une véritable dotation d'investissement. Il y a là un vrai sujet.

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Ma circonscription compte une sous-préfecture, Lodève, qui se trouve à la fois dans une zone de politique de la ville et de revitalisation rurale. Ce cumul concerne de très nombreuses villes, notamment dans le Sud de la France. Ce débat est abscons et montre la méconnaissance du Rassemblement national de la réalité des territoires. Il en va de même pour la DETR, qui s'apparente à une subvention de l'État plafonnant le financement d'un projet à 80 % : si on l'indexe sur l'inflation, on n'augmentera pas la subvention aux collectivités. En outre, la DETR n'est attribuée qu'aux collectivités demandant une subvention pour un projet spécifique, toutes ne la perçoivent donc pas. Enfin, il serait bien plus pertinent d'abonder le fonds de la DETR pour stimuler les investissements, mais il faut, compte tenu du fonctionnement du fonds, que l'épargne brute des collectivités territoriales soit à la hauteur des investissements nécessaires.

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Je vais répondre à mes collègues d'extrême gauche : vous avez établi un rapport entre la politique de la ville et la population immigrée, ce qui est assez réducteur et surprenant de la part de l'extrême gauche.

La DETR finance en moyenne 25 % des projets déposés : c'est insuffisant ! Si la dotation était indexée sur l'inflation, nous pourrions augmenter ce taux, ce qui permettrait aux collectivités territoriales d'investir dans d'autres projets. Il me semble que nous nous accorderons tous sur ce constat.

Les montants alloués à la politique de la ville ont souvent été surévalués pour un résultat pour ainsi dire nul quand les zones rurales ont été abandonnées : nous faisons le pari de la ruralité et nous l'assumons, il y a là une question de justice sociale. Nous comprenons que nos collègues d'extrême gauche, qui sont majoritairement élus dans les banlieues, rejettent ce choix.

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Nous n'avons pas le droit d'opposer les territoires. Les zones rurales comme les quartiers de la politique de la ville, ou quartiers prioritaires ou populaires, ont des besoins particuliers que relaient les collectivités territoriales depuis quelque temps. Le Comité des finances locales (CFL) a regretté que la DGF ne progresse pas dans la même proportion que l'inflation ; l'État l'a certes augmentée de 320 millions d'euros, mais cette hausse est bien plus faible que celle de l'inflation – 1 % pour la DGF selon l'exécutif, 7 % pour les prix. Les dépenses contraintes des collectivités territoriales pèsent sur leurs finances dans l'ensemble du territoire.

Les collectivités locales sont des victimes collatérales d'une rigueur que l'État ne s'applique pas à lui-même. Il faut prendre en compte l'inflation dans l'évolution des dotations, DGF comme DETR.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL1 de M. Jean-Félix Acquaviva.

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Nous profitons de l'examen de cette proposition de loi organique pour revenir sur un sujet important pour la Corse. Nous avons déposé un amendement, qui vise à apporter une réponse au gel depuis 2009 de la dotation de continuité territoriale (DCT), attribuée à la collectivité de Corse pour organiser le service public maritime entre l'île et le continent. Sa vocation première est d'atténuer les contraintes géographiques liées à l'insularité et à ses surcoûts. Ce concours financier essentiel stagne depuis 2009, alors qu'il suivait auparavant le cours de l'inflation.

Les finances locales de la collectivité sont fortement affectées par l'inflation, qui s'élève à presque 6 % en un an : la situation est donc difficile. À titre exceptionnel, la loi de finances rectificative a accordé une rallonge de 33 millions d'euros, mais le ministre délégué chargé des comptes publics, Gabriel Attal, a rappelé en séance publique, le 8 novembre 2002, que ces crédits ne représentaient qu'une solution temporaire.

Nous profitons de ce texte pour qu'une loi organique consacre l'existence d'une dotation au profit de la Corse, dont le montant est fixé par la loi de finances, son évolution ne pouvant être inférieure à l'inflation. Il nous semble essentiel d'inscrire ce principe de revalorisation dans une loi organique, puisqu'une disposition de loi ordinaire pourrait être trop aisément remise en cause, comme cela a d'ailleurs été malheureusement le cas en 2009.

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Je comprends votre intervention, mais je vous demande de retirer l'amendement car il crée un nouveau prélèvement sur recettes, dispositif dérogatoire au principe d'universalité : il faut éviter, autant que faire se peut, de dénaturer la Lolf – loi organique relative aux lois de finances.

Il convient en outre de hiérarchiser les mesures et de donner la priorité à l'indexation de la DGF sur l'inflation, ce qui profitera également à la Corse.

Enfin, l'article L. 4425-26 du code général des collectivités territoriales prévoit une indexation de la DCT sur la DGF jusqu'en 2009. Si nous adoptons le principe d'indexation de la DGF sur l'inflation, il suffira ensuite de modifier le code en loi de finances pour que la DCT soit indexée sur la DGF, donc sur l'inflation.

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Je ne veux pas centrer le débat sur la Corse, mais je regrette votre avis car les mécanismes à l'œuvre sont identiques. La prochaine délégation de service public aérien risque de ne pas être attribuée à cause du coût. Il y a donc urgence à agir pour ne pas pénaliser une population insulaire. Il est dommage que l'on ne puisse pas adapter un principe général à un territoire insulaire, à l'image du service public maritime et aérien. Je le regrette profondément et maintiens évidemment l'amendement.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CL9 de M. Jean-Marc Tellier et CL4 de M. Sébastien Rome (discussion commune).

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Cet amendement de précision rédactionnelle concerne la date d'entrée en vigueur du dispositif. Le mécanisme d'indexation de la DGF sur l'inflation entrerait en vigueur lors du dépôt du PLF pour 2024.

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Notre amendement vise à ce que la proposition de loi organique s'applique dès l'année 2023. Le 49.3 a censuré le débat sur les finances locales du PLF pour 2023. La représentation nationale n'a pas eu l'occasion de défendre des améliorations du texte visant à soutenir les collectivités locales. Nous avions pourtant de nombreuses propositions pour les collectivités, dont l'indexation de la DGF sur l'inflation. La NUPES doit attendre les niches parlementaires pour soumettre ses idées au vote, et je remercie le groupe Gauche démocrate et républicaine d'avoir inscrit le sujet dans la sienne. Nous souhaitons que l'indexation s'applique de manière rétroactive pour l'année 2023, rattrapant ainsi l'absence de vote à l'automne dernier.

Les élus locaux nous disent à quel point cette année est difficile pour leurs collectivités : les dépenses, notamment énergétiques et alimentaires, grimpent ; en outre, les budgets ont dû absorber l'augmentation du point d'indice des fonctionnaires.

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Je ne peux qu'être d'accord avec ces arguments, et je ne vous cache pas y avoir réfléchi. Mais une entrée en vigueur dès 2023 supposerait un projet de loi de finances rectificative, et nous ne pouvons obliger le Gouvernement à en déposer un. Demande de retrait.

La commission adopte l'amendement CL9.

En conséquence, l'amendement CL4 de M. Sébastien Rome tombe.

Amendement CL3 de M. Yoann Gillet.

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La DGF, ressource financière importante pour les collectivités territoriales, comprend différentes composantes que l'amendement prévoit d'indexer sur l'inflation, afin de garantir une juste répartition des ressources et une stabilité des budgets des collectivités. Cela leur permettrait de faire face à l'inflation et de maintenir leurs investissements tout en préservant les services publics locaux.

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Vous souhaitez que chacune des composantes de la DGF soit indexée sur l'inflation, la proposition prévoyant, elle, l'indexation de son montant global.

Il me semble que c'est au comité des finances locales de répartir cette dotation. Je considère qu'il faut laisser la main aux élus locaux. Demande de retrait.

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Notre groupe votera contre cet amendement pour les raisons qui viennent d'être exposées par le rapporteur.

Sans relancer le débat sur le soutien à l'investissement, nous devons faire face au problème de l'inégalité des capacités d'ingénierie entre les communes. Il faudra mener un travail sur ce point.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'article 1er modifié.

Article 2 : Création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs

La commission adopte l'article 2 non modifié.

Elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.

Présidence de M. Sacha Houlié, président.

La Commission examine ensuite le rapport d'information sur les enjeux de l'utilisation d'images de sécurité dans le domaine public dans une finalité de lutte contre l'insécurité (MM. Philippe Gosselin et Philippe Latombe, rapporteurs).

Ces débats ne font pas l'objet d'un compte rendu. Ils sont accessibles sur le portail vidéo du site de l'Assemblée nationale à l'adresse suivante :

Lien vidéo : https://assnat.fr/b00bhi

Examen du rapport d’information sur les enjeux de l’utilisation d’images de sécurité dans le domaine public dans une finalité de lutte contre l’insécurité

Questions des représentants des groupes

Vote

À l'issue des débats, la publication du rapport d'information est autorisée.

La séance est levée à 13 heures 15.

Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné :

M. Florent Boudié, rapporteur sur la proposition de résolution de Mme Aurore Bergé, M. Laurent Marcangeli et plusieurs de leurs collègues tendant à la création d'une commission d'enquête sur la structuration, le financement, l'organisation des groupuscules et la conduite des manifestations illicites violentes entre le 16 mars 2023 et le 4 avril 2023 (n° 1064) ;

Mme Sabine Thillaye, rapporteure pour avis sur les articles 32 à 35 du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense (n° 1033), délégués au fond par la commission de la défense nationale et des forces armées ;

M. Eric Pauget, rapporteur pour avis sur le titre VII de la proposition de loi, adoptée par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie (n° 1071), délégué au fond par la commission des affaires économiques.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Caroline Abadie, M. Jean-Félix Acquaviva, Mme Sabrina Agresti-Roubache, M. Henri Alfandari, M. Erwan Balanant, M. Romain Baubry, M. Ugo Bernalicis, Mme Pascale Bordes, M. Ian Boucard, Mme Blandine Brocard, Mme Émilie Chandler, Mme Clara Chassaniol, M. Jean-François Coulomme, Mme Mathilde Desjonquères, Mme Edwige Diaz, M. Philippe Dunoyer, Mme Elsa Faucillon, Mme Raquel Garrido, M. Philippe Gosselin, M. Guillaume Gouffier Valente, Mme Marie Guévenoux, M. Jordan Guitton, M. Benjamin Haddad, M. Sacha Houlié, M. Timothée Houssin, M. Jérémie Iordanoff, Mme Marietta Karamanli, Mme Emeline K/Bidi, Mme Amélia Lakrafi, M. Philippe Latombe, M. Antoine Léaument, Mme Gisèle Lelouis, M. Didier Lemaire, Mme Marie-France Lorho, M. Benjamin Lucas, M. Emmanuel Mandon, Mme Élisa Martin, M. Thomas Ménagé, M. Nicolas Metzdorf, Mme Danièle Obono, M. Didier Paris, M. Éric Pauget, M. Jean-Pierre Pont, M. Thomas Portes, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, M. Stéphane Rambaud, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Sandra Regol, Mme Béatrice Roullaud, M. Hervé Saulignac, M. Raphaël Schellenberger, Mme Sarah Tanzilli, Mme Andrée Taurinya, M. Jean-Marc Tellier, M. Jean Terlier, Mme Sabine Thillaye, Mme Cécile Untermaier, M. Roger Vicot, M. Guillaume Vuilletet, M. Jean-Luc Warsmann, Mme Caroline Yadan

Excusés. - M. Xavier Breton, M. Éric Ciotti, M. Yoann Gillet, M. Mansour Kamardine, Mme Julie Lechanteux, Mme Naïma Moutchou, M. Thomas Rudigoz

Assistaient également à la réunion. - M. Fabien Di Filippo, Mme Martine Etienne, Mme Karine Lebon, M. Stéphane Lenormand, M. Frédéric Maillot, M. Philippe Naillet, M. Philippe Pradal, M. Sébastien Rome