Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Réunion du jeudi 5 avril 2018 à 14h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • centre
  • juge
  • mineur
  • retour
  • rétention
  • rétention administrative
  • séjour
  • éloignement

La réunion

Source

La réunion débute à 14 heures 10.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, Présidente.

La Commission examine, en application de l'article 88 du Règlement, les amendements à la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites (texte de la Commission n° 819) (Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure).

Le tableau ci-dessous récapitule les décisions de la Commission :

ArticleAmendementAuteurGroupeSort
1er54M. HUYGHE SébastienLes RépublicainsRejeté
1er34M. BERNALICIS UgoLa France insoumiseRejeté
1er12M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
1er37Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté
1er22M. NURY JérômeLes RépublicainsRejeté
1er35M. BERNALICIS UgoLa France insoumiseRejeté
1er13M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
1er38Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté
1er32Mme OBONO DanièleLa France insoumiseRejeté
214M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
239Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté
236M. BERNALICIS UgoLa France insoumiseRejeté
ap. 233Mme OBONO DanièleLa France insoumiseRejeté
311Mme LORHO Marie-FranceDéputés non inscritsRejeté
3 bis15M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
3 bis40Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté
ap. 3 bis31M. BERNALICIS UgoLa France insoumiseRejeté
ap. 3 bis30M. BERNALICIS UgoLa France insoumiseRejeté
424M. SAULIGNAC HervéNouvelle GaucheRejeté
516M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
542Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté
550M. HUYGHE SébastienLes RépublicainsRejeté
549M. HUYGHE SébastienLes RépublicainsRejeté
552M. HUYGHE SébastienLes RépublicainsRejeté
551M. HUYGHE SébastienLes RépublicainsRejeté
617M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
623Mme MÉNARD EmmanuelleDéputés non inscritsRejeté
643Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté
653 rect.M. HUYGHE SébastienLes RépublicainsRejeté
618M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
644Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté
648M. LATOMBE PhilippeMouvement démocrate et apparentésRejeté
719M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
745Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté
820M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
846Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté
921M. SADDIER MartialLes RépublicainsRejeté
947Mme DUBY-MULLER VirginieLes RépublicainsRejeté

La Commission poursuit l'examen des articles du projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d'asile effectif (n° 714) (Mme Élise Fajgeles, rapporteure).

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Mes chers collègues, nous reprenons l'examen des articles du projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d'asile effectif.

Avant l'article 10 (Suite

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL589 de Mme Elsa Faucillon et CL746 de Mme Delphine Bagarry.

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L'amendement CL589 vise à supprimer la possibilité de maintenir les mineurs non accompagnés en zone d'attente. Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile reconnaît la possibilité que des mineurs non accompagnés soient maintenus en zone d'attente « de manière exceptionnelle ». Nous relevons que les cas « exceptionnels » permettant ce maintien sont très larges et sans lien manifeste avec la situation personnelle des intéressés. Nous y reviendrons aussi s'agissant des centres de rétention.

La France devrait privilégier les mesures de protection à l'égard des mineurs non accompagnés. Cette dénomination a été introduite en 2016 pour remplacer celle de « mineurs isolés étrangers » afin de faire prévaloir l'idée que ces mineurs sont avant tout des enfants.

Sur ce sujet, on nous oppose en ce moment le fait que des discussions gouvernementales sont en cours et que l'on attend divers rapports sur l'asile et l'immigration. Cependant, la question de la protection ou de la scolarisation de ces mineurs ne relève pas de cette problématique mais plutôt de la justice, de la solidarité ou de la santé. Puisque l'occasion nous en est donnée, je crois qu'il faut nous en saisir pour avancer.

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Notre pays doit pouvoir garantir que les mineurs, quels qu'ils soient, accompagnés ou non accompagnés, ne feront jamais l'objet d'une mesure privative de liberté. Nous serions ainsi exemplaires en matière de politique de protection de l'enfance. Notre pays s'honorerait en faisant entrer une telle disposition dans la loi.

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Nous aborderons ultérieurement la question des centres de rétention. À ce stade, nous n'évoquons que les zones d'attente, qui ont leurs spécificités. Un jour franc permet de s'assurer que les droits des mineurs sont préservés, de contacter les autorités du pays d'origine, de mandater un administrateur judiciaire ad hoc pour évaluer leur situation. Évidemment, en zone d'attente, le mineur dispose, comme les majeurs, de droits lui permettant d'avoir accès à un interprète, un médecin, un conseil juridique et associatif. Pendant ce jour franc, tout se met en place pour que ses droits soient garantis dans la zone d'attente – il n'est pas entré juridiquement sur le territoire français.

Indépendamment du débat que nous pourrons avoir sur la rétention en centre administratif, je suis défavorable aux amendements en raison des conditions particulières de protection des droits des mineurs en zone d'attente.

La Commission rejette successivement les amendements.

Article 10 (art. L. 213-9, L. 222-4 et L. 222-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Vidéo-audience et traitement des appels irrecevables

La Commission en vient à l'amendement CL588 de Mme Elsa Faucillon.

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Lors des auditions qui ont servi à préparer cet amendement, nous avons beaucoup entendu dire que la généralisation du recours à la vidéo-audience, y compris sans l'accord de la personne concernée, réduisait les droits de cette dernière.

Cette généralisation pose particulièrement problème pour ce qui concerne le droit d'asile et le droit des étrangers. Comme le disait hier notre collègue Laurence Vichnievsky, l'oralité revêt une importance majeure pour la compréhension par le juge du parcours de la personne étrangère. La relation créée pour établir un lien est essentielle. Il faut aussi souligner les difficultés techniques qui, de l'avis de ceux qui ont vécu cette expérience, sont relativement nombreuses. Tous ceux qui participent à des réunions par Skype savent à quel point l'outil est peu pratique lorsque l'on doit prendre une décision sérieuse. Il crée aussi évidemment une distance préjudiciable aux droits de la défense.

Par ailleurs, dans le cadre des appels formés contre les ordonnances de maintien en zone d'attente, prises par le juge de la liberté et de la détention, l'article 10 prévoit que le juge pourra rejeter les déclarations d'appels manifestement irrecevables, par ordonnance motivée, sans avoir préalablement convoqué les parties. Or, cette disposition porte atteinte au droit à un recours effectif et à l'accès au juge, en violation de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux.

Nous demandons en conséquence la suppression de l'article 10.

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Avis défavorable. Je rappelle que le Conseil constitutionnel estime que le recours à la vidéo-audience s'effectue dans le cadre d'une bonne administration de la justice et du bon usage des deniers publics. J'ajoute que le procédé est déjà utilisé dans un certain nombre de juridictions et que le témoignage de notre collègue Laetitia Avia, s'agissant de son usage pour l'hospitalisation d'office, montrait bien qu'il pouvait présenter des avantages pour les personnes concernées – elles peuvent être moins impressionnées dans ces conditions.

Il n'y a donc pas lieu d'avoir une position de principe sur la vidéo-audience, si ce n'est qu'il est positif de bénéficier de nouveautés technologiques pour une bonne administration de la justice.

Les appels irrecevables sont notamment ceux formés trop tard. On aura beau retourner la question dans tous les sens, il est logique que les appels forclos soient écartés plus rapidement par le juge.

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Si on estime que la vidéo-audience est favorable à la personne entendue, une solution qui donnerait satisfaction à tous consisterait à recueillir l'accord de cette dernière pour mettre en oeuvre cette procédure. Nous pourrions supprimer uniquement la disposition de l'article 10 qui prévoit que l'on se passe de ce consentement.

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La rapporteure a raison. La vidéo-audience sera de plus en plus utilisée en matière de justice. Lors de nos auditions, les représentants des avocats, qui s'opposaient à ce point du texte, reconnaissaient que, même en cour d'assises, on pouvait avoir recours à la vidéo-audience pour entendre des témoins. Nous voyons bien que cette pratique se généralise. Elle permettra de rendre des décisions de façon plus efficace et plus rapide. Eu égard aux flux migratoires actuels et à ceux encore plus importants que nous connaîtrons sans doute demain, et donc à l'afflux de dossiers à traiter, il faut trouver des outils plus adaptés.

La Commission rejette l'amendement.

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Madame la présidente, pourriez-vous nous donner quelques éléments sur l'organisation de la suite de nos débats en commission ?

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Monsieur Rudigoz, nous serons contraints de suspendre nos travaux en Commission dans quelques heures pour examiner, dans l'hémicycle, la proposition de loi relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites, qui est inscrite à l'ordre du jour. Nous ne reprendrons pas aujourd'hui l'examen du projet de loi qui nous occupe car cela ne pourrait se faire qu'à une heure déraisonnable, vers minuit et demi ou une heure du matin. Nous ne pouvons pas non plus nous réunir demain matin en raison de la commission mixte paritaire qui est convoquée sur le projet de loi relatif à la protection des données personnelles. Nous reprendrons donc nos travaux demain à quatorze heures, pour terminer l'examen du texte dans la soirée ou dans la nuit.

Je vous précise que nous avons examiné 225 amendements en quatorze heures. Sachant que nous devons encore en appeler 528, si nous conservons ce rythme, il nous faudra vingt-huit heures pour parvenir à la fin du projet de loi. J'en appelle donc à la responsabilité de chacun pour faire en sorte que ce débat se déroule dans les meilleures conditions.

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Nous examinons un texte très important. Vouloir terminer dans la nuit de vendredi à samedi n'est pas raisonnable... Pourquoi ne pas reprendre l'examen mardi ?

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Nous avons besoin de travailler dans ce délai car nous avons des échéances impératives : l'examen du texte en séance publique commence le lundi 16 avril et le délai de dépôt des amendements doit être fixé en conséquence. Il revient maintenant à chacun de faire en sorte que le débat avance.

La Commission examine l'amendement CL800 de Mme Martine Wonner.

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Cet amendement porte sur le consentement des personnes à la tenue des vidéo-audiences.

Si accroître le recours à la vidéo-audience est nécessaire pour réduire certains délais, ou pour le confort de certains demandeurs d'asile, cette procédure ne convient pas à tous les requérants, notamment ceux qui ont besoin d'un contact humain pour délivrer un récit souvent douloureux. Il est donc nécessaire de toujours recueillir le consentement des personnes plutôt que d'imposer systématiquement la vidéo-audience.

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Certaines personnes peuvent ne pas souhaiter les vidéo-audiences, mais pour une bonne administration de la justice et une bonne gestion des deniers publics, il n'est pas possible de recueillir systématiquement l'accord des personnes entendues, et d'avoir parfois oui ou parfois non recours à la vidéo-audience. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL806 et CL802 de Mme Martine Wonner.

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Ces amendements tendent aussi à solliciter le consentement des requérants à l'utilisation de la vidéo-audience.

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Avis défavorable, pour les mêmes arguments que précédemment.

La Commission rejette successivement les amendements CL806 et CL802.

Elle en vient à l'amendement CL807 de Mme Martine Wonner.

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Cet amendement prévoit l'accompagnement du requérant par un interprète à ses côtés lors de l'audience. Nous savons tous en effet que la langue est un obstacle majeur à l'expression du récit.

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Je partage les intentions des auteurs de l'amendement mais cette mesure est délicate à mettre en place. En effet, il peut s'agir de langues rares. Nous ne pouvons pas rendre opposable le droit à un interprète partout sur le territoire alors que ce n'est pas matériellement possible. Si un interprète n'est pas physiquement présent, on peut toujours mettre en place un interprétariat par téléphone afin que le requérant soit entendu correctement. Avis défavorable.

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J'entends bien vos arguments et je les comprends : la réalité s'impose à nous et il y a en effet des compétences rares en matière d'interprétariat. Dans ces cas-là, la vidéo-audience n'est peut-être pas adaptée. Ne faudrait-il pas envisager des exceptions à la vidéo-audience de façon que l'interprète soit systématiquement aux côtés du requérant ?

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient à l'amendement CL437 de M. Jean-Christophe Lagarde.

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Cet amendement vise à supprimer l'absence de convocation des parties préalablement à un rejet de déclaration d'appel manifestement irrecevable. Dans ce genre de procédure, il est important de respecter les droits de la défense eu égard aux conventions internationales qui nous lient.

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Même argument que précédemment : quand un appel est forclos, il est forclos. On aura beau convoquer les parties et organiser les choses comme on le voudra, il sera irrecevable. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette ensuite l'amendement CL439 de M. Jean-Christophe Lagarde.

Elle en vient à l'amendement CL60 de M. Fabien Di Filippo.

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La Cour des comptes a chiffré en 2015 le coût moyen d'un débouté à 5 528 euros et celui d'un demandeur d'asile à 13 724 euros. Les 45 000 déboutés restés en 2017 représentent donc un coût annuel de 368,82 millions d'euros.

L'objet du présent amendement est d'instaurer une caution de 200 euros pour les demandeurs d'asile déboutés qui font appel, caution remboursée en cas de décision favorable. Plus de 80 % des recours étant rejetés, la diminution probable du nombre de demandeurs, soit directement, soit via les associations qui financeraient cette caution, générerait une soulte de plus de 60 millions d'euros. Sans compter l'incidence de la réduction du délai pour les véritables demandes d'asile et sur les places libérées dans les centres d'accueil de demandeurs d'asile (CADA), les centres de rétention administrative (CRA) et les hébergements d'urgence où les déboutés séjournent faute de place disponible alors qu'elles sont réservées aux demandeurs en attente, aux primo-arrivants et aux sans domicile fixe.

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Même avis que précédemment. Comme on ne fait pas payer de caution à un étranger qui veut entrer sur le territoire français, on ne fait pas payer de caution aux déboutés du droit d'asile qui exercent leur droit au recours. Avis défavorable.

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Effectivement, il suffit de le décider. Il serait intéressant que les Français aient un débat sur ce coût. J'ai demandé au ministre de nous communiquer les chiffres. Je maintiens – après vérification tant ce montant est stupéfiant – que les Allemands ont dépensé 42 milliards d'euros en deux ans pour l'accueil de 1 million de réfugiés. Qu'en est-il en France ? Eu égard à la crise migratoire que nous connaissons, il est indispensable de discuter du coût de l'accueil de ces personnes. Mme Merkel avait annoncé que les Allemands feraient face. Nous ne pouvons nous exonérer de ce débat.

Les amendements proposés par mes collègues et visant à instaurer une caution ne me semblent pas de nature à être rejetés d'un revers de main. Si l'accueil fait partie de nos grands principes, il en est de même de la transparence. Or, l'accueil des étrangers se fait sans l'assentiment des Français et sans transparence.

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Il s'agit de gens qui ont décidé de quitter leur pays pour aller demander l'asile ailleurs, en affrontant les pires difficultés, en traversant la Méditerranée sur des canots pneumatiques au risque de leur vie. Comment peut-on parler de caution dans des cas pareils ? Il n'est pas question ici de louer une voiture ou un appartement.

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L'amendement que je défendais ne concernait pas les demandeurs d'asile, bien entendu, car ce serait complètement contraire à nos principes. Je parlais de visas, notamment pour les étudiants. Des pays, comme l'Australie, contrôlent les ressources des étudiants qui vont y effectuer leurs études. Il n'est pas absurde de vérifier que ceux qui viennent dans un pays pour bénéficier d'une prestation disposent des ressources pour y vivre sans faire appel à la solidarité nationale. J'apporte cette précision pour que le débat ne soit pas caricaturé. Je rappelle que le nombre de titres de séjour accordé aux étudiants a fortement augmenté : nous sommes passés de 73 000 à 92 000 en 2017.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 10 sans modification.

Les procédures d'éloignement

Article 11 (art. L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Modalités d'éloignement des étrangers

La Commission est saisie de deux amendements identiques CL590 de Mme Elsa Faucillon et CL690 de M. Jean-Michel Clément.

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Nous demandons la suppression des alinéas 1 à 4. Ce sont des dispositions de cohérence avec l'article 23 du projet de loi en vertu desquelles un étranger qui a déposé une demande d'asile et qui souhaite solliciter par ailleurs un titre de séjour doit effectuer cette seconde démarche parallèlement à la première. Il est également précisé qu'en cas de rejet de la demande d'asile et de la demande de titre de séjour, l'étranger doit faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF).

Cette mesure a pour effet de limiter de manière significative la possibilité de présenter une demande d'admission au séjour sur un fondement nouveau, suite à un refus de demande d'asile, par exemple lorsque l'intéressé justifie de liens familiaux avec la France, de l'existence d'une bonne intégration ou rencontre de graves problèmes de santé.

Cette limitation s'inscrit dans la logique de l'accélération de la procédure au détriment des droits de la personne.

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Il est bon de vouloir faciliter les procédures. Mais aujourd'hui, il est pratiquement impossible de déposer une demande d'asile en même temps qu'une demande de titre de séjour pour un autre motif. Aller dans une ambassade est considéré comme un signe d'allégeance et fait tomber la demande d'asile.

On compare toujours notre situation à celle de l'Allemagne, mais dans ce pays, un examen médical complet est imposé dès l'arrivée, ce qui élimine beaucoup de recours par la suite sur d'autres fondements. Bref, si je comprends le caractère opérationnel de ces dispositions, je m'interroge sur leur mise en place.

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Prévoir que toutes les demandes de droit d'asile et de titre de séjour doivent être déposées en même temps sert plusieurs objectifs. C'est d'abord, pour l'administration ou la justice administrative, une mesure de simplification et d'accélération du traitement des demandes, ce qui répond à l'objet de ce texte. Les demandeurs d'asile ou ceux qui souhaitent obtenir un autre titre de séjour seront très rapidement informés sur leurs possibilités de rester, ou pas, sur le territoire.

Mais cela n'empêche absolument pas qu'une demande soit déposée pour un autre motif en cas de circonstances nouvelles. Si, par exemple, on peut attester, après avoir été débouté du droit d'asile, qu'une maladie a été contractée et qu'il existe des circonstances nouvelles, la demande sera étudiée au titre de la procédure « étranger malade » par l'OFII. Avis défavorable.

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Est-il possible de déposer une demande d'asile et une demande de titre de séjour en même temps ? Peut-on faire une demande de titre de séjour sans avoir de passeport ? Je crois que juridiquement, ce n'est pas possible.

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Dans la pratique, cela se fait déjà. Après l'adoption de cet article, il y aura une montée en puissance de la formation. Les préfectures devront l'accompagner. Ce texte vise aussi à améliorer l'accueil et à faire face à un nombre plus important de demandes enregistrées par les préfectures.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Ce que nous refusons, c'est qu'un certain nombre de personnes demandent successivement des choses différentes. Qu'elles demandent, lorsqu'elles arrivent, un titre de séjour sur différents fondements, c'est possible. Elles peuvent aussi demander un titre de séjour pour raison médicale après leur arrivée. Mais nous ne voulons pas qu'après le rejet d'une demande pour un motif, il soit ensuite possible d'en invoquer un deuxième, et ainsi de suite.

La Commission rejette ces amendements.

Elle examine l'amendement CL496 de Mme Bénédicte Taurine.

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Le premier alinéa de l'article prétend traiter de la question de l'asile et de l'immigration avec humanité et fermeté, comme l'avance le Président de la République. Pourtant, dans ce projet de loi, nous ne voyons que de l'inhumanité. L'article 11 est un concentré de cynisme et de brutalité envers celles et ceux qui fuient toutes sortes d'atrocités.

Cet article précise que toute personne ayant reçu un double refus, de demande d'asile et de titre de séjour, doit faire l'objet d'une OQTF. En réalité, l'administration en charge d'étudier ces demandes simultanées peut, mais ne doit pas, prendre une mesure d'OQTF. Nous avons eu un différend avec le ministre sur la différence entre pouvoir et devoir hier soir, qui a d'ailleurs plutôt tourné en ma faveur.

L'article 11 prévoit donc une automatisation des OQTF ne permettant pas à l'administration d'étudier l'histoire de chacun, avec ses particularités, alors même que cela pourrait éviter le lancement de ce type de procédures arbitraires. Il est aussi prévu d'étendre les motifs d'interdiction de retour sur le territoire français. Il s'agit d'une mesure liberticide, à notre sens, qui place ces personnes dans une situation d'incertitude et de crainte constante, les poussant à choisir de vivre dans la clandestinité. Ce projet de loi échoue donc à accorder l'hospitalité et l'écoute dont ces personnes ont cruellement besoin.

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Il s'agit de questions techniques d'alignement de délais. Lorsque deux décisions de refus sont rendues, avec deux délais de recours différents, il est de bonne administration de la justice de s'aligner sur l'un ou sur l'autre. En l'occurrence, nous retenons le délai de contestation du refus de l'asile, de manière qu'il n'y ait pas d'incompréhension. Avis défavorable.

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Cette mesure n'est pas simplement « technique » : elle va avoir des effets sur la réalité concrète des personnes qui vont la subir. Le recours contre une OQTF doit se faire dans les 48 heures, ce ne sont pas les conditions les plus acceptables.

Puisque nous parlons de délais, je constate que nous avons repris nos travaux à 14 heures. Et j'ai appris que nous allions les suspendre pour retourner en séance publique…

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C'était précisé dans la convocation. Vous ne pouvez pas tout contester…

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Si, c'est mon bon droit, madame la présidente ! Cela fait partie de mes pouvoirs de tout contester, et je m'y emploie avec une certaine détermination, je vous l'accorde !

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En l'occurrence, c'est de la mauvaise foi. Faites un effort !

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Vous êtes un contestataire de nature !

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Peut-être, monsieur le ministre, mais je crois qu'il est à propos de contester une telle organisation des débats et ce genre de texte…

La Commission rejette l'amendement.

Elle adopte ensuite deux amendements rédactionnels identiques CL286 de la rapporteure et CL141 de Mme Alexandra Valetta Ardisson.

Elle en vient à l'amendement CL391 de M. Jean-Louis Masson.

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Monsieur le ministre d'État, j'ai beaucoup de sympathie pour vous. Or je vous sens frustré, au fil de l'examen de ces articles, puisque les choses risquent de ne pas aller aussi vite que vous l'espériez. Je vous propose donc de supprimer la référence « depuis plus de trois mois ». Il n'y a pas lieu en effet d'imposer aux autorités compétentes de délai minimum de résidence s'agissant d'une menace pour l'ordre public ou de la commission d'une infraction par un étranger. Ce sont des situations suffisamment graves pour que nous n'imposions pas un délai de résidence.

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Vous proposez de modifier le droit existant, mais je vous rappelle que lorsqu'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public, il fait l'objet non pas d'une OQTF mais d'un arrêté d'expulsion. Votre proposition présente donc peu d'utilité. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de cinq amendements, CL127, CL128 et CL129 de M. Jean-Carles Grelier, CL214 de M. Éric Diard et CL392 de M. Jean-Louis Masson, pouvant faire l'objet d'une discussion commune.

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L'article 11 précise les motifs permettant de refuser le bénéfice du délai de départ volontaire à l'étranger qui présente un risque de soustraction à la mesure d'éloignement.

Les amendements CL127, CL128 et CL129 élargissent les motifs de refus de ce délai à tous les étrangers en situation régulière en France qui ont été condamnés pénalement ou ont été inclus dans une fiche « S » par nos services de renseignement. Si nous pouvons refuser le délai d'OQTF pour celles et ceux qui ont usé de contrefaçons pour des papiers d'identité, c'est bien le minimum de le prévoir également pour ceux qui ont été condamnés ou fichés.

Quant à l'amendement CL214, il met en place un système qui permettrait d'assortir les condamnations d'étrangers à des peines de prison d'une OQTF. Selon les chiffres de la Chancellerie, nos prisons comptent 15 000 étrangers. Permettre à la justice de renvoyer les étrangers qui ont été condamnés à être incarcérés en France pourrait résoudre le problème de la surpopulation carcérale.

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Toujours pour aider le ministre, je propose d'ajouter un alinéa ainsi rédigé : « Si l'étranger a commis une infraction pénale sanctionnée par un jugement définitif des tribunaux compétents ». La personne qui se trouve dans ce cas n'a plus de raison, en effet, de bénéficier du droit d'asile.

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Ces amendements obéissent à la même logique : faire prononcer une peine automatique. Souvenons-nous des débats que nous avons eus cet été s'agissant du projet de loi pour la confiance dans la vie politique, lorsque nous parlions d'inéligibilité : il n'est pas possible d'arriver à une peine automatique, y compris dans ce cadre.

Ce qui est possible, et que le code permet déjà, c'est qu'une condamnation judiciaire entre dans les critères d'analyse de l'administration pour évaluer la menace que fait peser un étranger sur l'ordre public. Le préfet, le ministre dans les cas les plus sérieux, peut prendre alors un arrêté d'expulsion. Mais cette expulsion ne saurait être automatique : ce serait contraire à notre Constitution. Avis défavorable à l'ensemble des amendements.

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Pardon, madame la rapporteure, mais à aucun moment il n'est prévu que cette mesure doit être d'application systématique. Il est proposé de faire figurer parmi les motifs le fait d'avoir été condamné sur le territoire de la République. Il n'y a pas d'automaticité. Ce serait un motif beaucoup moins flou que celui qui est actuellement retenu par la loi.

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Je ne reviens pas sur les aspects juridiques, très bien expliqués par M. Reda. Monsieur le ministre : comment nos compatriotes peuvent-ils comprendre que des gens qui ont commis des infractions, voire des crimes, sur le territoire, et qui ont été condamnés, continuent à bénéficier du droit d'asile et à rester en France ? C'est proprement hallucinant. Beaucoup de Français sont très inquiets à cet égard, surtout en ce moment.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Je comprends que compte tenu du contexte, un certain nombre de personnes puissent être inquiètes. Je veux expliquer exactement la situation. Pour mémoire, 3 000 personnes de nationalité étrangère sont inscrites au fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) et suivies pour radication.

Si elles sont en situation irrégulière, elles doivent faire l'objet d'une OQTF car elles présentent une menace pour l'ordre public. Je tiens à vous rassurer sur ce point : les préfets sont pleinement mobilisés pour prendre des OQTF à l'encontre de tous les étrangers en situation irrégulière qui présentent de telles menaces. Après l'attentat de Marseille, j'avais appelé plus précisément leur attention sur ces cas.

En revanche, lorsque les personnes sont en situation régulière, parce qu'elles habitent en France depuis des années, qu'elles sont mariées à un Français ou qu'elles sont parent d'un enfant français, elles font l'objet d'un arrêté d'expulsion. Nous en prenons régulièrement. Mais nous devons nous assurer qu'après l'expulsion, ces personnes ne seront pas susceptibles de faire l'objet de traitements inhumains dans les pays où elles sont envoyées. Certains pays refusent cependant de dire s'ils se conforment aux droits humains. Dans ce cas, nous les gardons sous assignation à résidence. Mais il est arrivé que des personnes fassent appel au motif que nous les maintenions trop longtemps dans cette situation.

Croyez-moi, nous surveillons ces deux types de personnes.

La Commission rejette successivement les amendements CL127, CL128, CL129 CL214 et CL392.

Elle aborde l'amendement CL375 de Mme Muriel Ressiguier.

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Alors que la loi actuelle prévoit la possibilité d'octroyer un délai de départ volontaire, permettant au préfet de prendre le temps d'étudier minutieusement et d'apprécier le cas de chacun, le projet de loi envisage d'inscrire dans le droit la criminalisation des étrangers et étrangères dont les conditions d'accueil sont déjà particulièrement difficiles. Tous les motifs énumérés par le Gouvernement pour justifier l'automatisation de l'interdiction de retour sur le territoire français (IRTF) ne sont, de notre point de vue, que le résultat de la situation dans laquelle ces personnes sont placées contre leur gré. Le texte n'aboutira qu'à multiplier le nombre d'expulsions et à induire chez les personnes concernées l'idée qu'elles sont indésirables et doivent vivre cachées. Or cela va à l'encontre de l'intention du Gouvernement qui veut mener une politique plus efficace. D'où notre amendement.

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L'ensemble des mesures prévues à l'article 11 visent, s'agissant de l'IRTF, à nous mettre en conformité avec un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne sur la date de commencement de l'interdiction du retour. Nous avons une faible marge de manoeuvre sur ce point. En ce qui concerne les OQTF, nous sommes pleinement dans la ligne de la directive européenne « Retour ». J'émets donc un avis défavorable à votre amendement.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CL168 de M. Éric Ciotti et CL 393 de M. Jean-Louis Masson.

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L'amendement CL168 vise à diminuer le délai de départ volontaire après le prononcé d'une OQTF. Aujourd'hui, il est de trente jours. Je propose de le ramener à sept jours pour éviter que les personnes faisant l'objet d'une OQTF se soustraient au contrôle des autorités de notre pays.

Quant à mon amendement CL268, c'est un amendement de cohérence qui permet de mieux sanctionner la volonté délibérée de refuser l'enregistrement des empreintes digitales.

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Si l'on veut que les départs volontaires soient efficaces, si l'on veut que les personnes ne reviennent pas, il faut disposer d'un temps suffisant pour construire un vrai projet avec l'étranger. Le délai de trente jours me paraît donc tout à fait raisonnable. Avis défavorable.

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L'amendement CL393 est légèrement différent de l'amendement CL168 : nous proposons de diviser le délai de trente jours par deux et de le ramener à quinze jours. Je soumets cette solution équilibrée à l'appréciation de la Commission.

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Vous faites preuve d'une très grande naïveté, madame la rapporteure. Vous dites que trente jours correspondent au temps nécessaire pour préparer le départ. J'ai tendance à penser, hélas, que trente jours correspondent au temps nécessaire aux personnes concernées pour se soustraire aux autorités administratives de notre pays.

La Commission rejette successivement les amendements CL168 et CL393.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CL287 de la rapporteure.

Ensuite, elle est saisie de l'amendement CL268 de M. Éric Ciotti.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l'amendement.

Puis elle en vient à l'amendement CL759 de Mme Valérie Boyer.

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Selon les données du ministère de la justice, 14 964 ressortissants étrangers se trouvaient dans les prisons françaises au 1er février 2017 sur un total de 69 077 détenus, soit à peu près 22 % de l'ensemble de la population carcérale. Il y a environ 2 000 prisonniers algériens, 1 800 Marocains, 1 400 Roumains et 1 100 Tunisiens. Ils représentent à eux seuls 42 % des étrangers détenus en France. Ajoutons les 24 000 fichés S et les 20 000 personnes considérées comme danger potentiel du fait de leur radicalisation au fichier du traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation. Nous sommes bien loin des vingt expulsions annoncées par le ministre de l'intérieur.

La loi actuelle est normalement très claire. Si un étranger en situation irrégulière circule sur le sol français sans titre de séjour, il doit être expulsé. Qu'il soit délinquant ou non, la règle est la même pour tous. La capacité d'un État à éloigner les étrangers qui commettent des actes de délinquance est inhérente au concept de souveraineté. Dans un contexte de menace terroriste sans précédent et de hausse continue de la délinquance, la préservation de l'ordre public exige de revoir le droit actuel afin d'expulser systématiquement les étrangers incarcérés ou représentant une menace pour l'ordre public. Quelqu'un qui n'accepte pas nos lois, qui met en danger la vie d'autrui ou la liberté d'une autre personne en France n'a pas sa place sur notre territoire. Expulser les étrangers délinquants ou qui menacent l'ordre public est une mesure de bon sens et relevant d'un simple principe de précaution. C'est tout le sens de mon amendement que je vous demande, mes chers collègues, de voter.

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Ce n'est pas l'objet de l'amendement CL759 qui vise à couper l'aide publique au développement aux pays qui ne reprennent pas leurs ressortissants.

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Excusez-moi, madame la rapporteure. L'amendement CL759 vise à poser un principe de réciprocité et à faire respecter l'état de droit en France. Je suis particulièrement choquée qu'on refuse d'accueillir sur leur territoire les ressortissants maliens expulsés alors que des soldats français risquent leur vie tous les jours au Mali. On subit ainsi une double peine. Les relations que nous avons avec ces pays doivent changer : ils doivent accepter le retour de leurs ressortissants.

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Je ne suis pas convaincue que cet amendement ait vraiment sa place dans notre discussion en commission des Lois même si la non-délivrance des laissez-passer consulaires nous concerne, s'agissant notamment du délai de rétention. J'ai auditionné M. Teixeira da Silva, ambassadeur chargé des migrations. Il nous a fait part de discussions diplomatiques avec les pays qui délivrent très peu de ces documents. Peut-être le ministre d'État voudra-t-il en dire un mot mais cette question dépasse le cadre du texte. On ne peut pas la réduire à une sanction financière. Il faut respecter le cadre de la négociation diplomatique. Avis défavorable.

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Le centre de rétention administrative (CRA) de Marseille, dans lequel je me suis rendue, compte 107 places ; 50 % de ceux qui y sont hébergés sortent de prison et cela coûte 400 euros par jour et par personne. Les 120 policiers qui y sont affectés et qui s'acquittent de toutes les procédures nécessaires ne peuvent rien faire si les laissez-passer consulaires ne sont pas délivrés. Je trouve particulièrement choquant que les pays qui bénéficient de l'aide au développement refusent leurs propres ressortissants ou mettent de la mauvaise volonté à les accueillir. Le Président de la République Emmanuel Macron avait affirmé : « toutes celles et tous ceux qui, étant étrangers en situation irrégulière, commettent un acte délictueux, quel qu'il soit, seront expulsés ». Que les pays d'origine acceptent leurs propres ressortissants est le minimum ! L'aide au développement, c'est plus de 9 milliards d'euros et le Président de la République s'est engagé à faire passer ce budget à 15 milliards en 2022. On ne peut pas rester dans cette situation ! À un moment donné, il faut prendre des mesures. C'est le coeur du sujet qui nous occupe puisque ce texte traite de l'immigration et du droit d'asile.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Tout d'abord, soyez rassurée, 70 % des personnes en situation irrégulière qui sortent de prison sont aujourd'hui éloignées – ce n'est pas 100 % mais ce n'est pas négligeable.

S'agissant des laissez-passer consulaires, par le passé, comme certains pays en accordaient peu, les préfets finissaient effectivement par ne plus en demander. Nous avons repris cette démarche et passé un accord avec plusieurs pays. Non seulement nous demandons aux préfets d'exiger systématiquement ces documents aux consulats, mais nous avons installé une équipe dédiée au ministère de l'intérieur. Nous pouvons ainsi, lorsque les préfets n'obtiennent pas ces laissez-passer, reprendre les choses en main au ministère et traiter directement avec les ministres des pays concernés.

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Monsieur le ministre, une fois que vous reprenez la main, que mettez-vous dans la balance ? Comment la discussion s'engage-t-elle ? Pensez-vous que ce n'est qu'un problème de niveau hiérarchique ?

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Je mets des choses en balance, monsieur Bernalicis, mais je préfère le faire avec les ministres des pays concernés plutôt que sur la place publique. Dans ce genre de négociations, plus directement on discute, mieux on aboutit à des résultats.

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Je suis choquée par les propos de Mme Boyer qui fait certains amalgames particulièrement graves entre réfugiés, demandeurs d'asile et personnes sortant de prison – tout le monde est mis dans le même sac. Ce sont des propos extrêmement dangereux pour notre démocratie.

L'aide au développement existe mais elle est insuffisante aux niveaux européen et international, au regard des besoins et des sommes que les ressortissants qui vivent à l'étranger sont en mesure de rapatrier dans leur pays d'origine. La France agit mais il faudrait qu'elle en fasse davantage. Vos propositions ne mènent à rien, sauf à jeter le discrédit et à soutenir des thèses extrémistes particulièrement graves.

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Je ne peux pas laisser dire que Mme Boyer fait des amalgames : elle a donné des chiffres et très précisément circonscrit le périmètre des personnes concernées. La France est le troisième pays de l'OCDE en nombre de réfugiés résidant sur son territoire en 2016, derrière l'Allemagne et la Turquie. Cela montre bien, si on sort de raisonnements très théoriques, que la France est généreuse. Mais elle a aussi le droit de protéger ses concitoyens. Ces personnes ont eu leur chance : s'ils ne la saisissent pas, s'ils commettent des infractions ou des crimes, la logique veut qu'ils quittent la France.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

J'ai aussi été extrêmement précis dans ma réponse.

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Madame Boyer, votre proposition ferait peser sur les populations, sur ces personnes qui fuient souvent leur pays pour des raisons de pauvreté, de persécution, de menace, de violence ou de conflit, les conséquences du comportement de l'État central. Vous ne feriez qu'encourager la dégradation des conditions des ressortissants concernés. L'aide au développement apporte un soutien aux populations dans le cadre de projets précis, localisés. Votre amendement aurait l'effet inverse de celui que vous recherchez et pose un vrai problème éthique.

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Dans son rapport pour avis, la présidente de la commission des Affaires étrangères encourage le renforcement du dialogue bilatéral, la diplomatie et l'aide au développement – solution pour mettre un terme à certaines pratiques.

La Commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'amendement CL288 de cohérence de la rapporteure.

Elle aborde, en discussion commune, les amendements CL621 de Mme Muriel Ressiguier, CL331 de M. Loïc Prud'homme et CL628 de Mme Danièle Obono.

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Je défendrai conjointement les amendements CL621 et CL331. En complément de nos amendements visant à rappeler au préfet qu'il doit toujours examiner pleinement et sérieusement la situation de tout étranger et n'être en aucun cas en situation de compétence liée, nous souhaitons modifier l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le même sens, cette fois pour le cas le plus problématique des interdictions de retour sur le territoire français. Il y a sept ans, seul un juge pénal pouvait prononcer une telle mesure, alors appelée interdiction judiciaire du territoire. L'IRTF a été créée en 2011 et pouvait être prononcée dans des cas limités. En six ans, on en est arrivé à la banalisation la plus complète d'une mesure particulièrement attentatoire aux droits et libertés fondamentales. Depuis la loi du 7 mars 2016, dans de nombreux cas, le préfet est obligé de prendre une IRTF, la seule dérogation permise étant les circonstances humanitaires. La seule marge de manoeuvre concerne la durée de l'interdiction qui peut aller jusqu'à trois ans. Nous proposons de mettre fin à cette automaticité.

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Ces trois amendements me semblent contraires à l'article 11 de la directive « Retour » du 16 décembre 2008 en vertu de laquelle les décisions de retour sont assorties d'une interdiction d'entrée dans deux cas : lorsqu'aucun délai n'a été accordé pour le départ volontaire ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée. Je suis d'avis de respecter nos engagements européens et donc défavorable à ces amendements.

La Commission rejette successivement les amendements CL621, CL331 et CL628.

Elle est saisie de l'amendement CL169 de M. Éric Ciotti.

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Cet amendement vise à porter l'interdiction de retour sur le territoire français à une durée maximale de dix ans alors qu'elle n'est que de trois ans aujourd'hui, ce qui paraît très largement insuffisant à l'encontre de ceux qui ont violé nos lois.

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La directive « Retour » du 16 décembre 2008 dispose que l'interdiction est limitée à cinq ans, sauf – et seulement sauf – menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale. Avis défavorable.

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Accepteriez-vous un sous-amendement portant cette durée à cinq ans, madame la rapporteure, monsieur le ministre ? (Sourires.)

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Pour le moment, l'avis de la rapporteure est bien défavorable à cet amendement.

La Commission rejette l'amendement.

Elle aborde l'amendement CL394 de M. Jean-Louis Masson.

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Cet amendement vise précisément à prévoir la faculté – non l'obligation, madame la rapporteure – de porter le délai précité à cinq ans. C'est un bon équilibre entre la proposition de M. Ciotti et le droit actuel. Par ailleurs, cela correspond au délai maximal fixé par le droit européen. Vous ne pouvez donc invoquer ce dernier pour vous opposer à cet amendement.

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Eh bien, si ! Nous ne sommes pas dans le même cas de figure puisque vous demandez ici de porter ce délai à cinq ans en cas de condamnation définitive à une peine d'emprisonnement. Nous retombons sur la problématique de la peine automatique : une sanction administrative découlant automatiquement d'une décision de justice pénale sans que le juge l'ait explicitement prononcée est contraire à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

La Commission rejette l'amendement.

Elle adopte ensuite l'article 11 modifié.

Article 12 (art. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Procédure administrative et contentieuse de l'éloignement

La Commission est saisie de l'amendement CL332 de Mme Danièle Obono.

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Au premier abord, cet article semblait aller dans le sens d'un meilleur accompagnement des étrangers faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français – obligation dont l'automatisation est prévue par ce projet de loi – ainsi que dans celui de l'amélioration des conditions de travail du juge des libertés et de la détention et du juge administratif. La réalité est qu'une telle mesure ne fait qu'allonger la durée de rétention de la personne faisant l'objet d'une OQTF. Cela va à l'encontre de l'article 5 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au titre de laquelle la France a été condamnée à de multiples reprises. Il est malheureux de constater que le Gouvernement n'applique pas avec autant de zèle ce type de dispositions alors qu'il s'empresse de se conformer aux directives imposées par l'Union européenne. Si vraiment le but est d'améliorer l'accueil des étrangers avec humanité, il serait beaucoup plus pertinent et nécessaire d'accorder aux juges les moyens humains et financiers dont ils ont cruellement besoin. Cela serait bien plus utile que de leur accorder, lors de chaque quinquennat, des délais supplémentaires pour exercer convenablement leurs prérogatives.

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L'allongement du délai devant le juge administratif est consécutif à l'allongement de celui devant le juge des libertés et de la détention. Tous les magistrats nous l'ont dit : cet accroissement est nécessaire pour traiter les demandes dans de bonnes conditions. Parfois vous nous demandez d'allonger les délais, parfois de les raccourcir et d'aller plus vite. Nous préférons écouter les professionnels de justice. Mon avis sera donc défavorable.

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Nous évaluons simplement si les délais que vous proposez sont attentatoires aux libertés et à la restriction d'aller et venir ! Si vous ne faites pas de différence, nous avons un problème… Les magistrats nous ont dit en effet qu'en l'état actuel des choses, il leur était difficile d'examiner convenablement les demandes dans les délais impartis. Pourquoi ? Simplement parce que la France a deux fois moins de juges par habitant que l'Allemagne. Vous prenez souvent l'Allemagne en exemple : multipliez par deux le nombre de magistrats en France et nous rediscuterons !

La Commission rejette l'amendement.

Elle procède ensuite à l'examen de l'amendement CL98 de Mme Marietta Karamanli.

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Cet amendement traduit une proposition du rapport sur l'application de la loi du 7 mars 2016 relative aux droits des étrangers en France. Nous proposons d'abroger le I bis de l'article L. 512-1 du CESEDA concernant l'obligation de quitter le territoire français (OQTF) dite « de six semaines », qui prive l'étranger de garanties procédurales, sans que les magistrats ne parviennent à tenir ces délais impossibles.

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La procédure d'OQTF à six semaines a été créée très récemment, afin d'accélérer le traitement des dossiers des déboutés du droit d'asile. Vous avez raison, les juges administratifs ont connu des difficultés lors de la mise en place de cette nouvelle procédure. Mais elles commencent à être réglées. Laissons-lui le temps de s'installer. Avis défavorable.

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Nous faisons confiance aux magistrats qui pratiquent au quotidien. Or, ils nous ont fait savoir que cette procédure n'était pas utile, ou à tout le moins pas bien suivie.

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J'ai déposé un amendement très proche, le CL691. Le droit des étrangers est complexe. Nous vous offrons une occasion de le simplifier en supprimant cette OQTF à six semaines. Celle-ci, en effet, n'est pas appliquée. Son articulation avec les nouvelles dispositions du projet de loi risque très vite de poser des problèmes contentieux. Enfin, les droits des étrangers sont quasiment inexistants dans ce cadre – ces étrangers n'ayant souvent pas rencontré leur avocat, n'étant pas présents à l'audience et leur dossier se révélant toujours très maigre.

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Pour les mêmes raisons, je ne suis pas favorable à cet amendement.

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient à l'amendement CL99 de Mme Marietta Karamanli.

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Nous souhaitons instaurer des délais raisonnables pour le jugement. Nous proposons de porter à cinq jours le délai lorsque le juge administratif statue sur la légalité de l'OQTF visant un étranger placé en détention.

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Avis défavorable. Le projet de loi me paraît suffisant.

La Commission rejette l'amendement.

Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette ensuite les amendements CL692 et CL691 de M. Jean-Michel Clément.

La Commission adopte deux amendements de précision rédactionnelle CL289 et CL290 de la rapporteure.

Elle procède ensuite à l'examen de l'amendement CL97 de Mme Marietta Karamanli.

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Il convient de maintenir la possibilité pour le requérant de s'opposer à une audience en vidéo-conférence.

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Nous avons déjà beaucoup discuté de ce sujet. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine les amendements identiques CL798 de Mme Martine Wonner et CL858 de M. Erwan Balanant.

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Je défendrai conjointement les amendements CL798, CL804, CL846 et CL849 qui concernent la vidéo-audience. Nous défendons toujours les mêmes arguments. Je crains donc la même réponse de la rapporteure.

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Il faut tenir compte du consentement. C'est un élément fondamental de notre modernité. Au coeur du consentement, il y a l'autonomie de la volonté et nous ne pouvons laisser penser que nous la remettons en cause. Toute personne qui ne souhaite pas être jugée par vidéo-audience doit pouvoir être entendue physiquement.

La Commission rejette ces amendements.

Elle rejette également successivement les amendements CL804, CL846 et CL849 de Mme Martine Wonner.

Puis elle adopte l'article 12 modifié.

Article 13 (art. L. 512-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Aide au retour volontaire en rétention

La Commission examine les amendements identiques CL170 de M. Éric Ciotti et CL472 de M. Jean-Christophe Lagarde.

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Cet amendement vise à supprimer l'article 13. Nous considérons que l'octroi de l'aide au retour volontaire ne se justifie pas pour les étrangers en rétention.

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Madame la rapporteure, vous vous êtes déclarée très favorable au retour volontaire. Nous le sommes également ! Mais accorder l'aide au retour en fin de procédure, pour un retour obligatoire, n'est pas cohérent Cela revient à discréditer tout ce qui a été fait précédemment.

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Je ne suis pas du tout d'accord avec vous. Cette aide rend la procédure de retour beaucoup plus humaine. Elle est également très efficace pour lutter contre l'immigration irrégulière. Elle permet de construire un véritable projet d'insertion, de formation et de développement professionnel avec l'étranger, tout en participant au développement économique des pays d'origine.

Lorsque cette proposition est faite en rétention, elle est encore plus humaine. Il ne vous a pas échappé qu'un certain nombre d'étrangers se trouvent dans des situations extrêmement difficiles : ils ne savent pas exactement quand ils vont partir et ne comprennent pas toujours ce qui leur arrive. Cette aide, ce n'est pas un simple pécule qu'on leur donne ! L'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) construit une véritable proposition avec l'étranger et lui permet de se projeter et d'envisager positivement son retour.

Par ailleurs, cela limite les manoeuvres dilatoires contre les procédures d'éloignement – comme les refus d'embarquer. Je rappelle qu'un retour volontaire coûte deux fois moins cher qu'un retour forcé puisqu'il n'y a pas d'escorte à payer.

Bref, tant pour la personne détenue que pour l'État français, la proposition d'aide au retour volontaire pendant la rétention est une mesure positive.

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J'ajouterai que cette proposition est issue de l'évaluation de la loi du 7 mars 2016 et émane d'une personne hautement qualifiée pour la formuler, le directeur général de l'OFII. Vous êtes attachés à l'efficience et au pragmatisme : ce dispositif est opérationnel au Royaume-Uni et en Belgique. Cette dernière utilise d'ailleurs les mêmes équipes administratives pour pratiquer le retour volontaire et le retour forcé. Cette mesure, utile, ne doit pas être supprimée.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle se saisit de l'amendement CL395 de M. Jean-Louis Masson.

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Les Républicains croient en la valeur de l'exemple. Il nous paraît donc assez surprenant de traiter de la même façon des demandeurs d'asile déboutés qui ont respecté les lois de la République et ceux qui ne les ont pas respectées. Nous proposons donc le plafonnement à 50 % de l'aide au retour pour les personnes ayant fait l'objet de condamnations pénales.

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Une condamnation pénale ne peut entraîner automatiquement une sanction administrative. Il faut que le juge puisse expressément la prononcer. Avis défavorable.

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Monsieur le ministre, il serait utile que le juge puisse prononcer une réduction de cette aide ! Comment voulez-vous que nos concitoyens comprennent que des gens coupables de crimes et délits sur notre territoire se voient octroyer une aide – c'est une prime de mauvaise conduite ! – pour les inciter à retourner chez eux et peut-être ensuite à revenir en France ?

Si le dispositif proposé par cet amendement n'est pas le bon, travaillons à en trouver un autre. Mais il n'est pas acceptable que l'aide soit la même pour tous – les étrangers respectueux de nos lois et ceux qui les ont violées.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Je peux vous assurer qu'il sera difficile de revenir en France.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 13 sans modification.

Après l'article 13

La Commission examine l'amendement CL101 de Mme Marietta Karamanli.

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Au cours des quinze dernières années, nous avons été saisis de projets de loi sur l'asile environ tous les deux ans. Nous souhaitons que le Parlement dispose d'un rapport d'évaluation du dispositif d'aide au retour volontaire. Cela nous permettra de ne pas revenir à chaque fois sur ce sujet.

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Je vous l'ai dit, je suis particulièrement attachée à la procédure de retour volontaire. Je suis par ailleurs membre parlementaire du conseil d'administration de l'OFII. Je ferai remonter votre demande. Mais vous connaissez ma position sur les demandes de rapports : saisissez-vous du sujet mais n'alourdissons pas le projet de loi. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Article 14 (art. L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Surveillance de l'étranger sous OQTF avec délai de départ volontaire

La Commission examine les amendements identiques CL100 de Mme Marietta Karamanli et CL333 de M. Éric Coquerel.

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Nous souhaitons supprimer cet article car il laisse à croire que l'étranger a forcément l'intention de se soustraire à la mesure d'éloignement dont il est l'objet. L'article 14 s'inscrit dans une tendance de méfiance généralisée envers les étrangers. Certaines personnes peuvent être de mauvaise volonté mais les généralisations ne sont pas propices à la cohésion sociale.

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Le Gouvernement n'a pas pris l'indispensable précaution de vérifier la constitutionnalité des mesures proposées. Il est question de contraindre les étrangers faisant l'objet d'une OQTF avec délai de départ volontaire de résider dans un lieu qui leur a été assigné. Cela contrevient à la liberté d'aller et venir et criminalise les étrangers, en les mettant sur le même plan que les terroristes – soumis à ce type de procédure. L'article 14 ne prend absolument pas en compte leurs contraintes personnelles : ces personnes doivent rester dans un périmètre proche du lieu où elles habitaient. Par ailleurs, la possibilité accordée aux autorités de placer tous ces étrangers dans un même lieu induit la création d'une sorte de centre de rétention qui ne dit pas son nom. Nous proposons la suppression de cet article.

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Le taux d'éloignement des déboutés du droit d'asile est extrêmement faible. Afin de mieux faire respecter l'État de droit et les mesures d'éloignement, nous devons trouver des solutions concrètes et efficaces. Privilégier l'assignation à résidence est tout à fait adapté à la situation.

La décision du Conseil constitutionnel du 30 novembre 2017 à la suite d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) valide le principe de ces assignations à résidence en droit des étrangers, dès lors que leur objet est « d'une part, de garantir la représentation de l'étranger soumis à une mesure d'éloignement du territoire, et, d'autre part, d'organiser les conditions de son maintien temporaire sur le territoire français, alors qu'il n'a pas de titre l'autorisant à y séjourner, en tenant compte des troubles à l'ordre public que ce maintien est susceptible d'occasionner ». Il s'agit dans ce cas de non-respect de la loi. Dans son avis, le Conseil d'État a également déclaré la mesure conforme. Avis défavorable.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CL291 de Mme Élise Fajgeles, rapporteure.

Elle passe à l'examen de l'amendement CL485 de M. Sébastien Huygue.

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En la matière, préciser une durée n'a pas de sens puisque la personne concernée doit légalement se conformer au délai de départ volontaire. Si elle ne le respecte pas ce délai, elle ne respecte pas la décision de l'autorité administrative. Lever la contrainte de résidence revient à la récompenser de ne pas avoir respecté nos institutions.

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Votre préoccupation est satisfaite par l'article L. 561-2 du CESEDA. Deux types d'assignation à résidence sont prévus : celle que nous proposons dans le projet de loi et l'existante. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle se saisit ensuite de l'amendement CL490 de M. Jean-Christophe Lagarde.

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Cet amendement prévoit qu'en cas de non-respect des dispositions de l'article L. 513-4 du CESEDA, l'étranger pourra être sanctionné d'une amende de quatrième classe et ne pourra prétendre à l'aide au retour.

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Vous proposez une dépénalisation de la violation de l'OQTF, qui est actuellement un délit. J'y suis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 14 ainsi modifié.

Article 15 (art. L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Interdiction de circulation sur le territoire français

La Commission se saisit des amendements identiques CL102 de Mme Marietta Karamanli et CL334 de M. Bastien Lachaud.

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Nous souhaitons la suppression de l'article 15 qui constitue une atteinte à la liberté de circulation – les biens peuvent circuler dans l'espace Schengen, mais plus les hommes et les femmes… Cet article est également contraire au principe de solidarité entre les États membres de l'Union européenne. Il découle du règlement Dublin et s'inscrit dans une pratique générale et délétère : les États membres repoussent les migrants vers le pays par lequel ils sont rentrés dans l'Union européenne – nous connaissons tous la situation dramatique que cela engendre en Italie et en Grèce. Ce système ne permet pas d'apporter une solution constructive à l'afflux de migrants et conduit simplement à la déresponsabilisation des États membres, qui préfèrent la solution de facilité – l'expulsion. Cela souligne tristement l'absence de solidarité au sein de l'Union européenne.

Ugo Bernalicis. Cette mesure constitue une atteinte aux libertés et droits les plus fondamentaux. Elle permet la remise à un autre membre de l'Union européenne d'un étranger s'il est en possession d'un titre de séjour de l'État en question, assortie d'une interdiction de circulation sur le territoire français pouvant aller jusqu'à 3 ans.

Cette mesure ne tient aucun compte de la réalité car elle suppose que les étrangers n'ont aucune attache sur leur terre d'accueil. Or, ces personnes sont souvent sur notre sol depuis de nombreuses années. Elles ont réussi à y construire leur vie de famille. Si elle était adoptée, cette disposition piétinerait tous leurs efforts. Par ailleurs, elle contrevient à la Convention européenne des droits de l'homme, qui consacre la liberté de circulation.

Enfin, l'article 15 criminalise encore davantage les étrangers et en fait une catégorie distincte du reste de la population. En effet, la mesure ne s'appliquera qu'aux ressortissants des pays hors Union européenne. Ce mépris affiché pour les droits humains est intolérable. Il doit être combattu sans hésitation par un vote de suppression de cet article !

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Il n'y a rien d'intolérable ! Vous surinterprétez ces dispositions… Il s'agit simplement d'un alignement afin que toutes les personnes soient traitées de la même manière. Actuellement, les étrangers résidents réguliers de l'Union européenne ont un droit au séjour en France plus important que les étrangers citoyens de l'Union européenne. En effet, nous avons le droit d'interdire de retour un Européen qui se livre à un abus de droit ou qui fait peser une menace à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société française, mais nous ne pouvons qu'expulser le tiers résident d'un pays non européen ! Avis défavorable.

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S'aligner sur l'intolérable ne rend pas les choses moins intolérables.

La Commission rejette ces amendements.

Elle examine ensuite l'amendement CL202 de M. Éric Diard.

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L'article 15 traite de la décision par l'autorité administrative de remise de l'étranger ressortissant d'un pays tiers aux autorités de l'État membre qui l'a admis au séjour. Il dispose que cette remise peut être assortie d'une interdiction de circulation sur le territoire français (ICTF) d'une durée maximale de trois ans.

L'amendement de mon collègue Éric Diard vise à supprimer cette durée maximale, pour ne pas contraindre l'autorité administrative dans un délai et protéger, si besoin, l'ordre public sur une plus longue durée.

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À nouveau, il s'agit d'appliquer aux ressortissants de pays tiers résidents de l'Union européenne le droit existant pour les ressortissants européens, tel que prévu à l'article L. 511-3-2 du CESEDA. Nous souhaitons éviter les situations discriminatoires. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte les amendements de cohérence CL292 et CL293 ainsi que les amendements rédactionnels CL294 et CL295 de la rapporteure.

Elle en vient à l'examen de l'amendement CL203 de M. Éric Diard.

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Dans le silence de la loi, l'autorité administrative peut abroger à tout moment sa décision. Il serait préférable de demander des garanties quant au bien-fondé de cette abrogation car elle engendre d'importantes conséquences. C'est l'objet de cet amendement.

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Une fois encore, nous nous alignons sur la formulation retenue pour les étrangers ressortissants européens. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

La Commission examine l'amendement CL204 de M. Éric Diard.

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Compte tenu des conséquences potentielles pour l'ordre public de l'annulation d'une interdiction de circulation, nous demandons qu'une telle décision soit motivée et communiquée au représentant de l'État.

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Cette précision me semble inutile. S'il y a besoin de connaître les motifs d'une telle abrogation, cela peut se faire directement dans le cadre d'échanges entre le Gouvernement et les préfets.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 15 modifié.

Après l'article 15

La Commission est saisie de l'amendement CL630 de M. Bastien Lachaud.

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Une justice bis existe en l'état actuel du droit, notamment pour les étrangers qui ont fait l'objet d'une décision de refus d'entrée au titre de l'asile ou d'une décision de transfert. Nous proposons de modifier la procédure afin que ce ne soit plus un juge unique qui soit chargé de statuer, mais trois. Les dispositions en vigueur peuvent laisser une part importante à la subjectivité et à la partialité alors qu'une formation de jugement composée de trois magistrats permettrait d'éviter ce risque, grâce aux interactions et aux échanges entre les juges. Nous souhaitons aussi qu'un rapporteur public présente des conclusions ; cela constituerait une garantie majeure. Je rappelle qu'il s'agit d'un magistrat qui ne participe pas à la délibération mais qui étudie le dossier et qui présente des conclusions orales sur la solution à envisager. Cet amendement vise à aligner le droit au recours des personnes demandant l'asile sur le droit commun afin de garantir pleinement le respect des droits procéduraux.

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Dans l'idéal, nous pouvons tous être favorables à des formations collégiales, mais vous savez bien que ce n'est pas possible si nous voulons atteindre notre objectif de maîtrise des dépenses publiques. Il existe par ailleurs un grand nombre de domaines, administratifs ou judiciaires, qui sont examinés par un juge unique. C'est le cas de fonctions aussi sensibles que celles de juge des enfants, aux affaires familiales, ou des libertés et de la détention. On ne peut pas dire que seul le contentieux des étrangers est concerné. Je donne donc un avis défavorable.

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Je voudrais vous encourager à atteindre l'idéal, madame la rapporteure. Ce n'est pas une question abstraite : nous voulons une justice de qualité et le droit des étrangers n'est qu'un début. Nous espérons améliorer les conditions de délibération dans d'autres contentieux. Pour nous, ce sont les garanties des droits qui doivent déterminer l'action, et non les contraintes budgétaires. Il s'agit en effet de besoins fondamentaux. C'est peut-être ce qui nous différencie : nous ne considérons pas que les contraintes budgétaires doivent déterminer les politiques à mener, mais au contraire que les politiques conditionnent les besoins budgétaires.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement CL634 de Mme Muriel Ressiguier.

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Cet amendement de repli vise à mettre fin à ce qui constitue, nous l'avons dit, une justice bis pour les personnes étrangères. J'espère que cette proposition entrera davantage dans vos contraintes budgétaires que la précédente. Si vous ne souhaitez pas réformer toute la procédure du contentieux administratif lié à la rétention, vous pourrez peut-être accepter une des garanties que nous souhaitons, à savoir le rétablissement de la présence d'un rapporteur public. C'est une garantie procédurale majeure pour s'assurer que les dossiers sont traités sérieusement et de manière exhaustive. Un tel format – un juge unique et un rapporteur public – n'est pas nouveau. Il existe dans d'autres domaines, énumérés à l'article R. 222-13 du code de justice administrative, notamment les recours sur la notation et l'évaluation professionnelle des fonctionnaires ou encore la communication des documents administratifs – après une saisine de la commission compétente en la matière, par exemple. Par cet amendement, nous ne faisons que restaurer une garantie dont les justiciables étrangers ont été privés sans autre justification que des motifs comptables et budgétaires. J'espère que vous ferez au moins un effort sur ce point.

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Il n'existe ni justice bis, ni honte à vouloir maîtriser les dépenses publiques. Par conséquent, avis défavorable.

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Ce que vous entendez par la maîtrise des dépenses publiques me laisse pantois. Il serait étrange de penser que les garanties procédurales sont importantes pour les cas que j'ai cités et non pour les étrangers. Et franchement, combien coûterait notre amendement ? Je peux vous faire quelques propositions si vous souhaitez retrouver des marges de manoeuvre budgétaires. Remettez en place l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF). C'est rapide et cela rapportera 3,5 milliards d'euros. Je ne pense pas qu'instaurer un rapporteur public coûterait autant – quelques millions d'euros, tout au plus. La vraie question est de savoir quelles garanties de droit on veut instaurer et ensuite de mettre les moyens nécessaires en face, au lieu de faire le contraire. Sinon – et vos « chantiers de la justice » sont mal partis à cet égard –, vous passerez votre temps à adapter la justice aux moyens, et non aux enjeux qui fondent notre état de droit et notre République.

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient ensuite à l'amendement CL635 de M. Loïc Prud'homme.

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Nous vous proposons un autre amendement de repli, correspondant à des demandes formulées par les agents de la CNDA, qui ont fait grève pendant plusieurs semaines et connaissent bien ces sujets. Nous demandons la suppression des télé-audiences : le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permet que les audiences ne se déroulent plus en présentiel mais par visio-conférence, afin que la justice soit plus rapide et moins chère quand il s'agit des étrangers – car c'est encore une question budgétaire. De nombreux acteurs – des avocats, des magistrats et des personnes venant en aide aux migrants – ont souligné que cela nuit à la qualité de la procédure, en particulier aux témoignages qui doivent permettre de rendre compte de la réalité des parcours, et donc in fine à l'objectif de protection. On ne peut pas transiger avec les garanties de droit et le sérieux de la justice dans un contentieux aussi grave.

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Sans entrer de nouveau dans le débat sur la vidéo-audience, je voudrais rappeler que les escortes sont très lourdes pour les forces de l'ordre mais aussi pour les personnes en rétention. Elles obligent à se lever tôt le matin et à faire de longues heures de déplacement de manière répétitive. Le recours à la vidéo-audience se justifie tout particulièrement dans ce cas. Je donne donc un avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL636 de M. Ugo Bernalicis.

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Nous proposons de supprimer les tribunaux spécialement aménagés à proximité des pistes d'aéroport, comme l'annexe du tribunal de Bobigny qui se trouve dans un petit tribunal à l'aéroport de Roissy. L'installation de ces tribunaux « sur place » foule aux pieds les principes fondamentaux de la justice. De telles audiences délocalisées ne donnent pas le sentiment que la justice a été bien rendue. Elle est au contraire mal rendue à cause des conditions matérielles dans lesquelles les audiences se déroulent. Par son emplacement, la salle d'audience est totalement imbriquée dans la zone d'attente, ce qui ne permet pas aux personnes jugées de faire la différence entre la police aux frontières et la justice. De plus, on porte atteinte au principe de publicité des débats car il est très difficile d'accéder à la salle d'audience en utilisant les transports en commun. Comme l'affirme Mme Laurence Roques, présidente du syndicat des avocats de France, « cette justice n'est pas rendue au nom du peuple français, lequel ne peut pas assister à l'audience ».

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Je trouve assez contradictoire de s'opposer à la fois aux vidéo-audiences et à ces salles, qui sont distinctes des centres de rétention. Elles permettent d'éviter des trajets interminables et de rendre la justice dans de bonnes conditions, en respectant les droits des personnes retenues. Avis défavorable, donc.

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Je crois que vous confondez un certain nombre de points. Nous sommes opposés à la télé-audience – ou visio-conférence – parce qu'il nous semble important que la personne soit physiquement présente. Nous en avons débattu, et un certain nombre d'anciens magistrats devenus députés se sont exprimés sur ce sujet, de même que des syndicats de magistrats. Je ne reviendrai pas sur leurs nombreux arguments. L'idée, au fond, est qu'il faut bien rendre la justice. Elle s'incarne dans un certain nombre de rites qui font d'elle une autorité à part entière, dans le cadre de la séparation des pouvoirs. Quand un tribunal est quasiment collé à un centre de rétention administrative, on ne rend pas bien la justice et on ne sépare pas bien les pouvoirs. Je comprends vos raisons : il est plus simple de traverser la rue que de prévoir une escorte, mais nous ne demandons pas une distance de 150 kilomètres. Nous sommes au contraire pour une justice de proximité, avec des lieux de justice bien répartis partout sur le territoire. Il y a une petite différence entre un tribunal implanté juste à côté du centre de rétention administrative et un autre situé à quelques kilomètres ou à quelques centaines de mètres – ce qui serait déjà plus acceptable. Nous pensons que défendre des principes a encore un sens en 2018.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement CL637 de Mme Danièle Obono.

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À la suite des recommandations formulées par le Syndicat de la juridiction administrative et par l'Union syndicale des magistrats administratifs, nous souhaitons mettre un terme à la lente dégradation de la justice des étrangers et à la réduction des garanties qui leur sont accordées. Notre amendement met fin à la distinction inadmissible qui a été créée par la loi du 7 mars 2016 entre deux types de recours contre les obligations de quitter le territoire français (OQTF). Les conditions d'examen des recours sont dégradées pour les magistrats comme pour les personnes requérantes. Pour certaines OQTF, les garanties ont été substantiellement réduites : les délais de recours sont passés de 30 jours à 15 et les délais de jugement de 3 mois à 6 semaines, les formations de jugement ne comptent plus trois juges, mais un seul, et il n'y a plus de conclusions du rapporteur public, ce qui met fin à une garantie majeure. Comme le demandent les syndicats, notre amendement CL637 permettra de revenir à un seul régime juridique pour les OQTF en supprimant celles dites de « six semaines ».

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Nous avons déjà eu l'occasion de débattre des OQTF de « six semaines ». Pour les mêmes raisons que précédemment, je donne un avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle est saisie de l'amendement CL569 de M. Loïc Prud'homme.

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Cet amendement concerne les accords de réadmission visant à faciliter la réadmission des migrants interpellés en situation irrégulière. L'Union européenne considère ces outils comme des éléments importants de la gestion concertée des flux migratoires qu'elle a développée avec ses partenaires dans le cadre de la stratégie de lutte contre l'immigration irrégulière et de la politique de retour. Cette stratégie d'externalisation des contrôles migratoires pose un certain nombre de difficultés sur les plans humains et éthiques, qui sont dénoncés par les associations protectrices des droits humains. C'est en particulier le cas lorsque les accords de réadmission sont signés avec des pays n'offrant pas les mêmes garanties que nous pour le respect des normes internationales en matière de protection des droits des migrants, voire en matière d'asile. Notre amendement vise à rendre effectif le principe de réciprocité de ces accords. Pour notre groupe, il est indispensable que la France ne puisse pas renvoyer des étrangers vers un pays ne présentant pas les mêmes garanties que nous pour le droit d'asile.

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Je rappelle qu'un accord de réadmission n'est pas nécessaire pour qu'un étranger soit éloigné vers le pays dont il a la nationalité, que l'OFPRA, s'il a été saisi, aura certainement reconnu la qualité de réfugié en cas de risque de torture ou de mauvais traitements, et que l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme empêche de reconduire dans son pays d'origine une personne risquant d'y être soumise à la torture ou à des traitements inhumains. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement CL632 de Mme Bénédicte Taurine.

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Nous demandons la présence d'un rapporteur public. La justice fait des économies sur le dos des personnes étrangères en dégradant les conditions d'examen de leur dossier par les magistrats. C'est une justice bis, je le répète – et nous ne sommes pas les seuls à faire ce constat. Il n'y a pas d'autre raison à cette dégradation des droits que la situation des personnes étrangères : elles constituent une population plus fragile, plus atomisée et moins mobilisable que d'autres. En droit des étrangers, le procès devant un juge administratif a majoritairement lieu, depuis un décret de 2011, sans la garantie qu'apporte la présence d'un rapporteur public, c'est-à-dire un deuxième regard sur les dossiers examinés. Le rapporteur public ayant été maintenu pour de nombreux autres contentieux, nous ne comprenons pas pourquoi on le supprimerait, de manière inéquitable, en droit des étrangers. Notre amendement vise à rétablir sa présence.

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Nous avons déjà abordé ce sujet. Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Les mesures d'éloignement

Article 16 (art. L. 551-2, L. 552-1, L. 552-4 à L. 552-7, L. 552-10 et L. 552-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Modalités et régime juridique de la rétention administrative

La Commission est saisie de l'amendement CL335 de M. Loïc Prud'homme.

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L'article 16 apporte une réponse inadaptée et attentatoire aux libertés individuelles, qui parachève votre défiance à l'égard des magistrats et votre mépris pour les droits fondamentaux. Vous souhaitez inscrire dans la loi le caractère punitif de la rétention des étrangers en doublant, voire en triplant le temps de rétention, et en contraignant les magistrats par une habile rédaction. Sur 45 000 personnes étrangères en rétention en 2016, le taux d'exécution des mesures d'éloignement était inférieur à 46 % : ce seul chiffre montre que le système considère la rétention comme une sanction plutôt que comme une préparation au renvoi – et vous allez renforcer ce système. Par ailleurs, le temps moyen de rétention s'élevait à 12,7 jours en 2016 : on est bien loin des 45, 90 ou 135 jours prévus dans le projet de loi.

Ce n'est pas pour rien que la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, Mme Adeline Hazan, a proposé en février dernier de diminuer la durée d'enfermement au lieu de l'augmenter comme vous le souhaitez. La privation de liberté ne doit pas être traitée comme une question d'affichage ou de communication. Notre groupe dénonce avec force l'article 16 dont nous demandons la suppression. En réalité, aucun membre de la police aux frontières ne pense que l'augmentation de la durée de rétention est de nature à régler un quelconque problème. C'est un secret de Polichinelle. Ceux qui restent aujourd'hui 45 jours en rétention ne feront qu'y rester 90 jours, sans autre résultat. De quoi avez-vous donc peur, monsieur le ministre ?

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L'article 16 modifie les conditions de la rétention administrative. C'est un article important qui ne concerne pas la durée de celle-ci. Nous aurons un débat complet au fil de la soixantaine d'amendements déposés. Je donne un avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle en vient à l'amendement CL269 de M. Éric Ciotti.

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Tous les efforts investis dans les politiques des visas, des frontières et de l'asile sont réduits à néant si une petite minorité seulement des déboutés et des personnes entrées irrégulièrement sur notre territoire est éloignée. Il n'y a pas de gestion possible de l'immigration sans politique de retour efficace. Le placement en rétention doit devenir la règle et non plus l'exception. M. Éric Ciotti, qui est le premier signataire de l'amendement, a eu l'occasion d'évoquer cette question. Monsieur le ministre de l'intérieur, l'attentat commis à Marseille le 1er octobre 2017 a cruellement souligné le caractère non systématique du placement en rétention des étrangers contrôlés en situation irrégulière. À la suite de cet attentat, vous avez rappelé par circulaire la nécessité que ce soit le cas s'il existe un risque de fuite et si l'étranger ne présente pas suffisamment de garanties de représentation. Le droit antérieur à la loi du 7 mars 2016 prévoyait le placement en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de 48 heures, lorsque l'étranger ne peut quitter immédiatement le territoire. Notre amendement CL269 vise à rétablir cette disposition.

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Je suis absolument opposée à l'affirmation selon laquelle le placement en rétention doit être la règle et l'assignation à résidence l'exception. Je pense au contraire que cette dernière mesure doit avoir un caractère prioritaire. C'est une avancée importante de la loi du 7 mars 2016, à laquelle nous restons très attachés. Les associations, mais aussi la police aux frontières et les personnes travaillant dans les centres considèrent que tout le monde n'a pas vocation à y être placé. C'est une mesure d'enfermement, de privation de liberté, accessoirement coûteuse pour les finances publiques. Si la rétention peut être nécessaire, dans des conditions que nous modifions afin d'améliorer les éloignements, nous continuons à penser important de renforcer l'assignation à résidence. Les articles 17 et 18 du projet de loi ont pour objet d'augmenter son efficacité et de réduire l'attrait de la rétention. L'objectif est une meilleure efficience, si possible via l'assignation à résidence. Je donne donc un avis défavorable à votre amendement.

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J'ai une question pour le ministre d'État, ministre de l'intérieur. Afin d'éclairer nos débats, quel est le taux d'exécution des mesures d'éloignement des étrangers faisant l'objet d'un placement en rétention administrative – je crois qu'on le connaît – et de ceux faisant l'objet d'une assignation à résidence ? Ce que soutiennent ceux qui veulent donner la priorité à la rétention, par amendement, est qu'elle est plus efficace pour l'éloignement, mais la rapporteure dit qu'il n'en est rien. Une statistique constituerait un bon juge de paix. Je ne crois pas que nous l'ayons eue quand nous avons travaillé sur le rapport d'application de la loi du 7 mars 2016 – je m'exprime sous le contrôle de M. Jean-Michel Clément. Ce serait utile pour savoir quel est le dispositif préférable sur le plan technique.

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Le premier alinéa de l'amendement pose de vraies difficultés sur le plan opérationnel. Il est en effet question de personnes qui ne peuvent pas quitter « immédiatement » le territoire. La référence aux garanties de représentation est, en revanche, bien plus raisonnable. Si l'on suivait cette proposition, la rétention s'appliquerait de manière automatique car personne ne peut quitter immédiatement le territoire. Les débats que nous avons eus précédemment ont permis de rappeler que l'objectif est d'organiser efficacement, et avec au moins un minimum d'humanité, le retour dans le pays d'origine ou un pays sûr lorsqu'une OQTF a été prononcée.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Je voudrais rappeler notre philosophie générale. Les chiffres, qui sont importants à mon avis, montrent qu'il y a eu une diminution extrêmement forte de la demande d'asile en Europe – elle a été divisée par deux, je l'ai dit – mais que nous avons en revanche continué à connaître une demande d'asile particulièrement élevée en France au cours des trois dernières années. La hausse était ainsi de 17 % en 2017. Nous devons prendre un certain nombre de mesures qui figurent dans ce projet de loi.

En ce qui concerne l'éloignement des déboutés du droit d'asile, nous souhaitons qu'il y ait dans un premier temps une assignation à résidence, comme le demande la directive « Retour », car c'est la mesure la moins privative de liberté. Ce dispositif a conduit dans le passé à des taux d'éloignement faibles, les risques de fuite étant particulièrement élevés. Environ 10 % des personnes assignées à résidence finissaient par être éloignées. Un article du projet de loi, que nous allons examiner par la suite, nous donnera les moyens de contrôler si les personnes assignées à résidence se trouvent bien là où elles doivent être : on leur demandera d'y rester trois heures par jour afin de permettre des vérifications.

Selon les règlements européens, la rétention reste évidemment l'exception. Encore faut-il qu'elle soit utile ! La proportion de rétention par rapport à l'éloignement est de 37 %, ce qui signifie que nous sommes loin de faire en sorte que tous les gens placés en rétention soient éloignés. C'est pourtant notre but puisqu'il s'agit majoritairement de déboutés du droit d'asile et que, nous l'avons dit depuis le début, nous voulons trancher assez vite entre les déboutés et les réfugiés, que nous devons insérer le plus vite possible dans notre société.

Nous souhaitons étendre à 90 jours la durée de la rétention, ce qui nous laissera très en deçà de beaucoup de pays européens, où elle est de 160 à 180 jours.

Trois principaux phénomènes expliquent l'augmentation de la demande d'asile en France. Le premier tient au fait qu'un certain nombre de personnes, venues particulièrement d'Afrique occidentale, essaient d'arriver non pas en Europe en général, mais en France en particulier, pays avec lesquels ils ont des attaches historiques.

Le deuxième phénomène procède de mouvements secondaires : des pays comme l'Allemagne et la Suède ont beaucoup accueilli au cours des dernières années, mais beaucoup débouté depuis. Des gens qui s'y sont vu refuser l'asile tentent, si je puis dire, une deuxième chance en France.

Troisième phénomène : des pays ont demandé que leurs citoyens soient dispensés de visa pour circuler dans l'Union européenne. Or, certains de leurs ressortissants déposent une demande d'asile dès qu'ils y entrent. Dans plusieurs États, comme l'Allemagne, cette demande est examinée en quelques jours, voire quelques semaines en cas d'appel ; en France, ce traitement peut être extrêmement long. Historiquement, l'Albanie figurait au nombre de ces États dont les ressortissants sont dispensés de visa ; ses citoyens représentent aujourd'hui 20 % des places du dispositif national d'asile. C'est pour cela que je m'y suis rendu et que j'ai eu des discussions avec les autorités albanaises. Elles ont fait des efforts importants pour que leurs ressortissants soient moins nombreux à quitter leur territoire pour demander l'asile dans les pays concernés, dont la France. En six mois, le nombre des départs a diminué de 34 %, ce qui est tout à fait remarquable. Nous nous heurtons toutefois à un certain nombre de difficultés ; c'est précisément pourquoi nous devons corriger notre législation, ce que vous êtes invités à faire.

Les chiffres nous donnent d'ailleurs raison puisqu'en deux mois les mesures d'éloignement ont augmenté de 14 % par rapport à 2017. Nous progresserons encore si vous décidez de réduire les délais d'examen de l'asile.

Faute d'obtenir les laissez-passer consulaires, les préfets ont cessé de les réclamer, avez-vous dit. Nous avons travaillé avec les pays africains et nous sommes désormais en passe de disposer de ces sauf-conduits. Toutefois, à l'évidence, nous avons besoin de plus de temps pour les obtenir. C'est pourquoi il est très important de passer à quatre-vingt-dix jours, étant entendu que le Gouvernement acceptera l'amendement soutenu par la rapporteure permettant de mieux séquencer cette période.

Je m'engage devant vous à faire en sorte d'améliorer les conditions de rétention, dont vous avez souligné la difficulté. Je rappelle que des droits y sont déjà exercés : un suivi médical est assuré, des associations ont passé des conventions avec l'État pour un suivi juridique des personnes placées. Enfin, puisque nous allongeons la durée de rétention, des travaux seront entrepris pour que les conditions soient plus acceptables qu'elles ne le sont.

Ayons à l'esprit que, contrairement à ce que l'on a pu insinuer, ces centres de rétention sont faits pour éloigner, non pour punir : nous avons la volonté de l'éloignement, certes, mais dans les meilleures conditions.

La Géorgie vient d'obtenir la dispense de visa vers l'Union européenne pour ses ressortissants et, en trois mois, nous avons été confrontés au même phénomène qu'avec l'Albanie. Nous voulons donc passer avec la Géorgie des accords similaires. En général, les Albanais qui arrivent sur notre sol sans visa et déposent des demandes d'asile viennent avec leur famille, dont des enfants. Pendant leur séjour en CRA, soit ils acceptent d'être séparés de leurs enfants qui sont alors confiés à l'Aide sociale à l'enfance (ASE), soit ils le refusent et les enfants sont placés avec eux en rétention. Des travaux particuliers seront entrepris afin que les conditions de rétention de ces familles avec enfants soient plus dignes. Je ne parle pas ici d'actions qui seraient menées dans deux ou trois ans. En 2018, nous investirons au total 1,5 million d'euros pour améliorer les CRA et, partant, les conditions de séjour.

Voilà ce que je souhaitais vous dire de la philosophie qui nous anime afin d'éclairer la discussion des amendements.

La Commission rejette l'amendement CL269.

Elle est saisie de l'amendement CL905 de la rapporteure.

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La loi du 20 mars 2018 a introduit dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à l'initiative du groupe La République en Marche et de Mme Coralie Dubost, l'obligation de prendre en compte l'état de vulnérabilité des personnes avant de décider un placement en rétention administrative dans le cadre d'une procédure de réadmission – de type Dublin.

Par cet amendement, je vous propose que cette préoccupation humanitaire puisse concerner toutes les personnes avant un placement en rétention administrative, que ce soit ou non dans le cadre de la procédure Dublin. Ceci permettra de prendre en compte toutes les situations de vulnérabilité, notamment le handicap.

La Commission adopte l'amendement qui a recueilli un avis favorable du ministre.

Elle examine l'amendement CL656 de Mme Danièle Obono.

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Dans un esprit de cohérence avec les amendements présentés lors de l'examen de la proposition de loi de M. Jean-Luc Warsmann, nous proposons de revenir à l'état du droit antérieur à sa promulgation. Ce texte a posé une barrière supplémentaire à l'un des rares droits fondamentaux accordés aux personnes étrangères : le droit d'asile. Il remet en cause la protection des intéressés et participe à la systématisation de l'enfermement d'hommes, de femmes et d'enfants au prétexte de faciliter un transfert dont on sait qu'il n'aura jamais lieu, ce que constatent d'ailleurs bien des acteurs de terrain.

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Nonobstant un certain nombre de dispositions ajoutées par le Sénat, sur lesquelles nous revenons par des amendements présentés par le groupe majoritaire, nous avions voté la proposition de loi en question. L'avis est donc défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL907 de la rapporteure, CL517 de M. Matthieu Orphelin, CL836 de M. Florent Boudié, ainsi que l'amendement CL860 de M. Erwan Balanant.

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Il s'agit de respecter les engagements pris au moment de l'examen de la proposition de loi susmentionnée et de revenir sur les ajouts du Sénat qui ont inutilement durci le texte.

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Comme l'a dit M. Mathieu Orphelin, nous souhaitons rétablir la proposition de loi dite Warsmann dans sa rédaction de première lecture issue des discussions entre le Gouvernement et l'Assemblée nationale. À cette fin, il est proposé de supprimer les ajouts du Sénat portant sur les critères de mise en rétention et sur le risque non négligeable de fuite.

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Je n'ai rien à ajouter, mon amendement étant rédigé de façon légèrement différente.

La Commission adopte les amendements CL907, CL517 et CL836.

En conséquence, l'amendement CL860 tombe.

La Commission étudie, en discussion commune, les amendements CL619 de Mme Bénédicte Taurine, CL861 de M. Erwan Balanant, CL626 de Mme Elsa Faucillon, CL124 de Mme Marietta Karamanli, CL864 de Mme Florence Granjus et CL522 de M. Matthieu Orphelin.

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L'amendement CL619 vise à interdire que les enfants étrangers fassent l'objet d'une rétention. Nous souhaitons de la sorte garantir, lorsqu'ils sont en situation dite irrégulière sur notre territoire, ainsi que leurs parents, l'intérêt supérieur des enfants, tel que le définit l'article 3 de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE). On comptait près de 10 000 mineurs isolés étrangers en France en 2017 tandis que 50 000 autres sont arrivés avec leurs parents. Il est primordial de s'assurer que leurs parents, tuteurs ou personnes légalement responsables ne pourront être placés en rétention.

La France fait l'objet d'une surveillance régulière de la part de l'ONU et, au mois de mai 2017, le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef – United nations international children's emergency fund) a dénoncé les risques encourus par ces enfants dans notre pays.

Nous devons mettre fin aux violations graves dans ce domaine en interdisant le placement en rétention des mineurs, même accompagnés de leurs parents. Les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant que les mineurs de moins de 18 ans ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français (OQTF) sont insuffisantes.

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L'amendement CL861 interdit le placement en rétention de mineurs. J'ai entendu votre explication, monsieur le ministre : à mes yeux l'idée n'est certainement pas de séparer les enfants de leurs parents juste avant l'éloignement, mais de revenir à la situation qui prévalait avant la promulgation de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, lorsque le placement en rétention des enfants était interdit. Cette loi a prévu la rétention à titre dérogatoire mais son usage est devenu trop fréquent dans certaines préfectures. C'est pourquoi il faut l'interdire à nouveau et trouver un dispositif d'hébergement à proximité des aéroports, juste avant le départ de ces familles lorsqu'elles sont légitimement déboutées du droit d'asile.

Il convient d'autant plus d'interdire la rétention des mineurs que nos centres ne sont pas adaptés, même si j'ai noté qu'ils allaient bénéficier de travaux d'amélioration.

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L'amendement CL626 pose le principe de l'interdiction du placement en rétention administrative des enfants et adolescents migrants – qui représentent quand même un migrant sur trois ! – car cet enfermement est contraire aux dispositions de la Convention internationale des droits de l'enfant. Nous nous enorgueillissons souvent, à juste titre, d'être le pays des droits de l'homme : il est à mes yeux inconcevable d'y voir une enfance parquée derrière les barbelés !

Je rappelle que, le 19 janvier 2012, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour le placement en rétention d'une famille et de deux enfants en bas âge sur la base de la violation des articles 3, 5 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme relatifs aux traitements inhumains dégradants, au droit au respect de la vie familiale et au droit à la liberté et à la sûreté.

Eu égard aux conditions de rétention, tout placement d'enfant dans nos CRA va à l'encontre du droit international et des droits de l'homme. La circulaire du 6 juillet 2012 vise effectivement à restreindre le recours à la rétention administrative des familles, mais la réalité des faits a grandement modéré son efficacité. Le nombre des enfants en rétention explose, renouant avec ce qu'il était avant la promulgation de la loi du 29 juillet 2015 réformant le droit d'asile. Il est presque supérieur à ce que nous avons connu sous la présidence Sarkozy et le ministère Hortefeux ! Enfin, le phénomène est encore plus massif à Mayotte alors que les conditions de rétention y sont notoirement indignes.

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La question des mineurs et des enfants nous préoccupe particulièrement. Nous savons tous que la rétention de mineurs, accompagnés ou non, est contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant comme elle est contraire aux dispositions des articles 3, 5 et 8 de la CEDH. Par ailleurs, le 8 février dernier, le Défenseur des droits a appelé l'attention du Premier ministre sur l'augmentation préoccupante du nombre de ces placements.

Depuis le 1er janvier 2018, 40 enfants ont été placés en CRA sans compter les retenus à Mayotte. En 2017, ils ont été 275, soit presque autant que pour les années 2012, 2013, 2014 et 2015 réunies. Et encore n'est-il tenu aucun compte de la situation de Mayotte où 4 285 enfants ont été enfermés en CRA en 2016, ni des enfants placés en zone d'attente.

En 2016, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France pour pratiques dégradantes à l'encontre des enfants enfermés. Mais cela n'a pas suffi à faire bouger les lignes. L'occasion de le faire nous est donnée aujourd'hui, ce qui est de notre devoir de parlementaires responsables. Tel est le sens de notre amendement CL124.

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Beaucoup de choses ont déjà été dites au sujet du placement en rétention administrative des familles et des enfants. Je rappellerai donc que la France a fait l'objet de cinq condamnations de la part de la Cour européenne des droits de l'homme. Le 31 octobre 2017, il m'a d'ailleurs été donné d'entendre le Président de la République en ce lieu très solennel, au sein duquel les magistrats sont empreints d'une grande sagesse. Ce sont ces juges qui, à cinq reprises, ont condamné la France pour traitements inhumains et dégradants !

J'ai entendu vos propos portant sur les conditions de cette rétention, monsieur le ministre, et pris bonne note de votre intention de les améliorer. Il n'en demeure pas moins que la pratique consistant à séparer les enfants de leurs parents constitue à mes yeux un non-choix.

Nous ne reviendrons pas sur la situation très complexe qui règne à Mayotte.

L'amendement CL864 est là pour dire non à la rétention des mineurs. Pouvons-nous réfléchir ensemble, à l'Assemblée nationale, à une solution ? En tant que médecin, je ne peux approuver la pratique de la rétention. J'ai entendu vos justifications au sujet de situations particulières, comme celle des familles albanaises ; je n'y reviendrai pas non plus mais, encore une fois, pouvons-nous travailler ensemble d'ici l'examen de ce texte dans l'hémicycle à trouver une solution digne ?

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Personne parmi nous, y compris M. le ministre, ne peut se satisfaire du placement de mineurs en rétention. Les condamnations de la France par la Cour européenne, singulièrement celle de 2016, constituent une alerte pour nous tous.

L'amendement CL522 est peut-être un moyen d'envisager l'arrêt progressif du recours au placement en rétention, en limitant l'interdiction à la métropole afin de se donner du temps pour trouver des solutions pour l'ensemble du territoire national. Comme notre collègue Martine Wonner, je souhaite que nous parvenions à un texte commun pour interdire très rapidement la rétention administrative des mineurs en France.

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Mme Stella Dupont vient très justement de le dire : nous sommes tous extrêmement sensibles à la question de la rétention des mineurs. Précisons bien qu'il n'y a pas de mineurs non accompagnés en rétention dans notre pays, comme l'a rappelé le ministre d'État : la question est celle de la rétention des familles, car des mineurs peuvent être placés en rétention avec leur famille.

Il nous est à tous insupportables de voir des enfants en rétention administrative, c'est ce qui motive ces amendements.

La situation de Mayotte a toutefois aussi été évoquée : 4 000 mineurs en famille y sont placés en rétention, ce territoire étant soumis à une très forte pression migratoire. À ce stade, il n'est pas possible d'adopter ces amendements pour mettre un terme à la rétention administrative des mineurs sans disposer d'une étude d'impact portant sur à Mayotte.

Il n'en fallait pas moins poser ce débat politique, et M. le ministre d'État en a pris sa part. Je rappelle qu'autant il est terrible de voir des enfants en rétention, autant l'idée qu'ils puissent devenir un enjeu aux mains des passeurs et des filières est odieuse ; il faut conserver cela à l'esprit lorsque l'on aborde ce débat. C'est pourquoi je donnerai un avis défavorable à ces amendements, tout en rappelant qu'il faut poursuivre la réflexion afin de trouver la solution la plus humaine possible que nous appelons tous de nos voeux.

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Personne ne peut se réjouir des migrations des mineurs, encore moins de leur rétention. Personne d'ailleurs ne se réjouit de travailler sur un texte comme celui qui nous est soumis, parce que ce sujet est difficile et sensible humainement. Seulement, comme le disait la rapporteure, il existe des filières ainsi que des passeurs. Des gens font du trafic d'êtres humains leur activité principale. Au pays des droits de l'homme, ce n'est pas non plus acceptable.

Il faut donc, hélas, voir les deux aspects du problème, et tenter de trouver les équilibres nécessaires. Si on accélère les procédures et que l'on fait en sorte de répondre le plus rapidement possible aux demandes d'asile, c'est aussi pour donner des signes, en particulier à ceux qui, s'adonnant à ces trafics, mettent des mineurs et des majeurs en danger, et en tirent des subsides non négligeables. Nous ne pouvons que condamner de telles activités.

Monsieur le ministre d'État, la politique européenne marque-t-elle des points dans sa lutte contre ces trafics ? Ils nous amènent en tout cas à réagir et à prendre des décisions parfois difficiles, mais ô combien nécessaires tant pour ceux qui migrent que pour nos États.

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C'est précisément parce qu'il existe des filières et des trafics que nous devons mieux protéger les enfants. Au contraire, le projet de loi qui diminue les droits accordés aux demandeurs d'asile et aux migrants les atteint aussi. Ils devraient pourtant être considérés comme mineurs avant d'être regardés comme étrangers. Nous franchissons un degré supplémentaire dans la distorsion entre notre devoir de protection et la réalité de droits qui diminuent.

Je n'en doute pas, sur ce sujet, la sensibilité de chacun est extrêmement forte, mais mon appel va au-delà. Cela dit, madame la rapporteure, j'ai beaucoup de mal à vous entendre dire que la situation de ces enfants est insupportable et à vous voir finalement refuser tous les amendements sur le sujet. Vous considérez qu'en définitive il faut en rester au statu quo sous prétexte qu'il existe des filières. Je vous avoue ma profonde émotion et mon désarroi.

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Je demande que nous prenions le temps de réfléchir aux principes des droits et de la protection des enfants, car nous avons affaire à un texte qui durcit les conditions de leur accueil.

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Il ne suffit pas d'annoncer que l'on partage la même analyse. Les parlementaires peuvent être en désaccord avec l'administration, avec le ministre d'État ou avec l'exécutif tout en exigeant qu'une solution soit apportée à un problème. Clairement, la solution apportée aujourd'hui n'est pas la bonne.

Si c'était facile, nous ne serions pas là, mais tout de même : au vu des chiffres le problème ne semble pas insoluble. Même les personnes déboutées ont vécu des situations difficiles. Elles n'ont pas le droit de rester, mais ce qu'elles ont vécu est déjà traumatisant. Qu'on les traite au moins dignement ! On doit progresser, par exemple, en ce qui concerne les conditions d'hébergement, car aujourd'hui elles ne sont pas bonnes.

On ne peut pas dire que l'on est d'accord avec le fond des amendements, et émettre ensuite un avis défavorable. J'appelle l'attention de tous les collègues sur le fait que nous avons une responsabilité : il nous appartient de dire que nous ne sommes pas d'accord. Je suis persuadé que si nous refusions une solution, les responsables en trouveraient une autre pour que nous puissions avancer ensemble.

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La réponse de la rapporteure est incompréhensible. Nous sommes en désaccord sur de nombreux points, mais je pense vraiment que la rétention et l'enfermement des enfants réunit une très large majorité d'entre nous, si ce n'est la totalité. Je crois à la sincérité des propos tenus sur l'indignité de la situation faite aux enfants. Il est donc d'autant plus incompréhensible que ces déclarations aboutissent à l'idée que, malgré tout, on peut tolérer le statu quo.

En 2017, pour la seule métropole, la France a enfermé 275 enfants en centre de rétention, dont de nombreux nourrissons, soit presque autant que des années 2012 à 2015. Voilà la situation que nous tolérons, malgré les déclarations d'intentions. Le Défenseur des droits a rappelé que depuis le 1er janvier 2018, 40 enfants, sans compter ceux retenus à Mayotte ont connu la douloureuse expérience de l'enfermement. Nous avons la possibilité, ici et aujourd'hui, grâce aux propositions issues de toutes les sensibilités politique de l'Assemblée nationale, de marquer très clairement et fermement notre opposition à ces pratiques.

L'existence des passeurs ne constitue pas un argument. Tout le monde est d'accord pour se battre contre la traite et les trafics, mais je ne vois pas comment on mènerait ce combat en enfermant des enfants. Cet enfermement ne fait qu'ajouter des souffrances et des traumatismes à ceux qui existent déjà. Il est incompréhensible et injustifiable de nous parler d'abord du caractère intolérable d'une pratique pour, ensuite, non seulement la tolérer, mais faire en sorte qu'elle se perpétue.

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Tous ceux qui ont eu à connaître de près ou de loin l'activité des juges des enfants savent que le pire du pire est de séparer les enfants de leurs parents. Il s'agit toujours d'une solution extrême. Je rappelle également que la rétention n'est pas la détention. Il est vrai que nos centres de rétention ressemblent à des centres de détention, mais il faut que nous fassions des efforts pour faire évoluer les choses, ce qui est prévu.

Je le répète, et toutes les mamans, tous les papas parmi nous le savent : le pire est d'être séparé des siens. Sur ce sujet non plus, il n'existe pas de solution parfaite.

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Mme la rapporteure a clairement noté la convergence de vues de l'ensemble des forces politiques sur l'indécence et l'indignité de la situation actuelle. Quiconque est entré dans un centre de rétention administratve prend vraiment la mesure du problème.

Je note l'engagement de retravailler le sujet. Cela dit, il faut que nous nous donnions un calendrier. Pouvons-nous réfléchir à certains points avant la séance publique ? Devrons-nous porter de nouvelles idées dans l'hémicycle ? Beaucoup de choses intéressantes ont été dites, notamment par Mme Vichnievsky sur le fait que la séparation entre parents et enfants était la pire des solutions. J'ai l'impression que nous devons agir et réfléchir collectivement. Cela n'épuisera pas le sujet, mais il est très important d'avancer.

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À la suite des propos de Mme Vichnievsky et de M. Orphelin, je répète qu'il faut écarter autant que possible le scénario de la séparation. Monsieur le ministre d'État, nous sommes totalement engagés à vos côtés dans la lutte contre les filières et les passeurs mais, surtout, ne faisons pas de raccourci quand on parle des mineurs en rétention.

Vous avez très justement dit tout à l'heure que certains centres de rétention, pour ne pas dire tous, n'étaient pas adaptés à l'accueil des plus petits. Pourrions-nous adopter une solution temporaire et intermédiaire tant que les travaux n'ont pas été effectués ? J'avoue que je me fais presque violence en disant cela : je ne veux pas vous laisser croire que je souhaite voir des mineurs en rétention. Toutefois, je sens bien que, dans certaines situations, comme je suis contre la séparation, il s'agit peut-être de la moins mauvaise solution. Travaillons, allons vers la rétention la plus courte et la plus digne possible ! Aujourd'hui, nous n'y sommes pas. Peut-être pourrions-nous surseoir à la rétention de mineurs tant que les travaux ad hoc n'ont pas été faits ? Pouvons-nous réfléchir ensemble à la moins mauvaise solution possible avant la séance publique ?

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Je soutiens la proposition de « moratoire » de Mme Wonner, mais je voudrais remettre la coupe des hors sujets à M. Rémy Rebeyrotte. Quel est le rapport entre les filières et l'enfermement des d'enfants ? J'aimerais bien comprendre.

La folie, c'est d'appliquer toujours les mêmes méthodes en espérant un résultat différent. On fait encore du répressif et de l'enfermement, mais nous parlons d'enfants. La question n'est pas de savoir si certains ont un coeur et d'autre pas : il y a des enfants en jeu ! Vous nous expliquez que les enfermer sera dissuasif pour les filières. Sans doute ceux qui les organisent seront-ils impressionnés et émus par cette menace ? La façon dont vous réfléchissez est très loin de la réalité.

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Le constat relatif à la rétention des mineurs est totalement partagé et le sujet est ancien. Je me souviens qu'en 2011, M. François Hollande, candidat à l'élection présidentielle, avait pris l'engagement d'abroger la rétention pour les mineurs. Il y a un paradoxe dans la loi du 7 mars 2016 car elle inscrit pour la première fois la rétention des mineurs dans le marbre, tout en en limitant l'application de la procédure puisqu'elle énumère des critères et qu'elle précise que la rétention ne peut avoir lieu que quarante-huit heures avant l'éloignement.

Quelle est la réalité de la situation de la rétention des enfants, au-delà du fait qu'ils sont forcément placés avec leurs familles dans des locaux spécialement dédiés ? Dans les faits, il y a une dichotomie totale entre la situation en métropole et outre-mer.

En métropole, sur 26 000 retenus, on compte 275 enfants et 134 familles. C'est dire que les services de l'État ont une approche très restrictive en matière de rétention des mineurs. Une attention particulière est portée aux cas des mineurs, ce qui signifie que la loi du 7 mars 2016 a été utile. Je note par ailleurs que l'augmentation du nombre d'enfants en rétention n'est qu'un effet collatéral de l'évolution générale des flux ; elle n'est pas le fait de ce Gouvernement. Le mouvement était identique et constant sous le précédent quinquennat.

La situation est différente à Mayotte où 4 200 enfants sont retenus chaque année. Dans ces conditions, l'interdiction de la rétention des mineurs créerait une situation explosive. Ce problème n'existe pas sur le territoire métropolitain.

Je pense qu'il faut poursuivre la discussion. Comme le proposait M. Matthieu Orphelin, nous devons être en mesure de suivre un calendrier d'actions qui tienne compte des impératifs de l'État et de la nécessité de solutions opérationnelles pour l'éloignement. Dans l'immédiat, monsieur le ministre d'État, je crois qu'il sera très important de traduire concrètement, dès le projet de loi de finances pour 2019, l'engagement d'allouer des moyens supplémentaires afin de garantir des conditions acceptables de rétention pour les mineurs – en particulier en matière de locaux.

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Je voudrais remercier Mme Sonia Krimi d'avoir dit, en réactualisant la formule giscardienne, que personne n'avait le monopole du coeur. Sur tous les bancs, chacun a pu s'interroger en visitant un centre de rétention administrative. Lorsque je me suis rendu pour la première fois dans un CRA, à la fin de l'année 2005 à Coquelles, en compagnie de votre actuel directeur de cabinet, monsieur le ministre d'État, nous nous sommes interrogés. Jeune fonctionnaire du ministère de l'intérieur, je me souviens avoir quitté ce centre, où se trouvaient des familles avec des enfants, en me demandant vraiment si ce que nous faisions était bien. La vérité est que, dès lors que nous voulons éloigner des étrangers en situation irrégulière et que nous souhaitons respecter l'intérêt de l'enfant, on ne peut pas imaginer une seconde de séparer les familles. Si l'on sépare les familles, on fait quelque chose de totalement inacceptable, et si l'on exclut tout placement en rétention des familles, on donne un droit de séjour en France ad vitam aeternam à toute personne ayant un enfant. On voit bien le conflit de logiques que l'autorité politique doit résoudre.

Comme M. Florent Boudié, je me souviens de la campagne présidentielle de 2012. La question avait même été évoquée pendant le débat télévisé entre MM. Nicolas Sarkozy, Président de la République, et François Hollande. Ce dernier avait écrit à la Cimade un courrier annonçant qu'il abrogerait la rétention des familles dès mai 2012. Bien sûr, une fois élu, il n'a pas tenu son engagement car le réalisme s'est imposé.

Le terme juridique « rétention administrative » est relativement inadapté car ces lieux sont aussi des centres de préparation à l'éloignement. Des acteurs associatifs et les délégations de l'OFII sont présents dans des lieux fermés qui offrent des conditions d'accueil quasi hôtelières en réalité – qu'il convient d'améliorer, bien sûr, avec des espaces pour les familles. Ce ne sont pas des centres de détention. Il faut que nous insistions sur le fait qu'il s'agit de lieux de préparation à l'éloignement. Nous devons, concrètement, nous donner les moyens de les utiliser avec discernement et humanité, mais aussi avec beaucoup de réalisme, car si nous adoptions les amendements que l'aile gauche de la majorité et le groupe La France insoumise nous proposent, il n'y aurait plus de politique d'éloignement.

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En effet, personne n'a le monopole du coeur. Nous considérons tous qu'il est insupportable et douloureux qu'un enfant se trouve en centre de rétention et, en même temps, il serait insupportable de devoir séparer les familles. Les propos de Mme Laurence Vichnievsky à ce sujet me paraissent justes et forts. Certaines situations deviennent donc inévitables. Ceux dont nous doutons qu'ils aient un coeur en revanche, ce sont les passeurs. Leur stratégie est très simple : ils cherchent toutes les failles qui permettent de contourner la loi pour gagner plus d'argent et exploiter davantage ceux qu'ils transforment en objets que l'on trimballe au travers des frontières. Leur trafic doit être combattu. L'interdiction de l'enfermement des mineurs constituerait une aspérité dont ils se saisiraient pour faire prospérer leur commerce.

Afin d'avancer, je pense que nous devons entendre les engagements du ministre d'État pour que les choses se passent mieux

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Onze inscrits s'étant exprimés dont cinq du groupe La République en marche, je donne la parole à M. le ministre d'État.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Je comprends les problématiques qui sont les vôtres et le cas de conscience auquel chacun est confronté. J'avais annoncé que je ne parlerais pas des débats en Conseil des ministres, que nous avons toujours, sur le problème des mineurs non accompagnés. Sachez seulement que nous nous sommes demandés s'il fallait que la question soit gérée par le ministère de l'intérieur ou par le ministère des affaires sociales. Devions-nous considérer le mineur non accompagné en tant que mineur ou en tant qu'étranger ? J'ai plaidé, et je pense que cette solution sera retenue, pour qu'il soit d'abord considéré comme un mineur. C'est dans cette direction que nous chercherons un certain nombre de solutions.

Pour revenir aux amendements, comprenez bien que, si nous excluions systématiquement l'éloignement des familles avec enfant, nous ne pourrions plus jamais éloigner qui que ce soit. C'en serait fini de la politique que nous mettons en place, qui vise à répondre aux demandeurs d'asile en six mois pour que les déboutés puissent retourner dans leur pays dignement, et que les autres puissent s'insérer en France.

Nous sommes aussi confrontés à des cas particuliers qui deviendront explosifs si nous ne parvenons pas à les gérer. Durant le mois qui vient de s'écouler, j'ai dû m'occuper de la situation à Mayotte. Croyez-moi, il n'a pas été si facile d'éviter que l'on en vienne à des affrontements graves, à la pire violence. J'ai envoyé sur place de nombreuses unités mobiles et de nombreux fonctionnaires. La situation reste aujourd'hui extrêmement compliquée. Il faut aussi gérer notre relation avec les Comores. Le ministre des affaires étrangères s'entretient en ce moment presque tous les jours avec son homologue comorien.

Les pays dont les ressortissants peuvent venir en France sans visa posent un autre problème. Cette possibilité constitue pour eux une espérance, l'engagement d'un dialogue avec l'Europe et une promesse de développement. Mais, même s'ils ont fait des efforts – des agences gèrent les départs en direction de la France –, la procédure est détournée par certains. Le problème, c'est lorsque 20 % des places du dispositif d'asile sont occupées par des Albanais : il est engorgé, ce qui a des conséquences pour les centres d'hébergement d'urgence qui sont à leur tour embolisés. Finalement, si vous composez le 115, ce numéro d'urgence destiné à ceux qui n'ont pas d'hébergement ne répond plus. Voilà ce qui est en jeu.

Je vous demande, en conséquence, de bien réfléchir. La loi ne s'appliquera qu'au mois de novembre prochain. Je veux bien m'engager devant vous à faire en sorte que, dans les centres qui accueillent des familles – tous les CRA ne sont pas concernés –, on travaille dès aujourd'hui à proposer des conditions d'hébergement dignes. Je rappelle aussi que les familles n'ont pas vocation à rester dans ces lieux très longtemps. Théoriquement, elles n'y demeurent que pendant un très bref délai puisque leur pays est prêt à les accueillir.

Il reste que, si nous ne les accueillons pas quelques jours dans ces centres, le risque de fuite est important. Renoncer à le faire reviendrait à se vouer à l'impuissance. Or, je pense que, dans ce domaine, nous devons montrer notre capacité à agir, dans la dignité, mais à agir. Il n'est rien de pire que l'impuissance. On finit toujours par vous la reprocher. Il ne faut pas dire : « C'est une fatalité ; on n'y peut rien ! » Trop de gens ont cette attitude. On peut toujours quelque chose ; on peut toujours changer le destin. C'est pourquoi je soutiens Mme la rapporteure, même si elle n'en a pas besoin, en émettant un avis défavorable à tous les amendements en discussion commune.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle examine l'amendement CL103 de Mme Marietta Karamanli.

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Les deux premiers alinéas de cet article visent à repousser l'effectivité des droits du demandeur d'asile placé en rétention de communiquer avec un interprète, un conseil, un médecin, son consulat ou toute personne de son choix. Cet amendement y remédie.

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Il est précisé que la personne peut faire appel à un avocat ou à un médecin dès le placement en rétention. Mais ce n'est qu'à l'arrivée au centre de rétention que ces droits peuvent être mis en oeuvre. Cet article permet une meilleure opérationnalité de l'accès aux droits.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CL134 de Mme Marietta Karamanli et CL337 de M. Éric Coquerel.

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L'amendement CL134 vise à supprimer les alinéas 3 à 10. L'assignation à résidence ne peut être imposée à des étrangers ayant fait l'objet de sanctions qui ne sont plus en vigueur. Cette mesure insensée amènerait à assigner à résidence des individus qui ne sont plus considérés fautifs aux yeux du droit, en présumant qu'ils chercheront forcément à se soustraire à l'obligation de quitter le territoire qui pèsent sur eux.

L'alinéa 9 vise à remplacer le mot « lieu » par les mots « local affectés à son habitation principale ». Cela favorisera les demandeurs d'asile les plus riches, qui bénéficient déjà d'une certaine stabilité, au détriment des plus démunis contraints de rester en rétention.

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L'amendement CL337 vise à supprimer les alinéas 3 à 7. Il fait prévaloir l'intérêt du requérant ou la qualité de la prise de décision sur la simple facilité organisationnelle, laquelle pourrait être résolue par l'octroi à l'autorité judiciaire, en l'occurrence le JLD, de moyens supplémentaires. La lecture de l'étude d'impact, de l'exposé des motifs et du dispositif lui-même montre que cette réforme n'est pas envisagée dans l'intérêt du requérant ou pour améliorer la qualité de la décision du juge.

Le JLD dispose actuellement de 24 heures pour statuer sur la requête du préfet aux fins de prolongation de la rétention, délai que le Gouvernement propose d'augmenter afin d'éviter un phénomène massif d'engorgement. Nous pensons que ce n'est pas la bonne porte d'entrée. Nous avons insisté à plusieurs reprises sur la nécessité de donner des moyens à la justice. Nous rappelons que la France a été condamnée en 2016 par la CEDH, la Cour ayant considéré que l'ensemble des aspects conditionnant la rétention devaient être examinés dans un délai très bref.

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Les alinéas 3 à 7 prévoient de doubler le temps accordé au JLD pour statuer. Les magistrats auditionnés nous l'ont indiqué : le délai actuel de 24 heures est trop court. Il impose de mobiliser, le week-end, des juges spécialisés dans les affaires familiales ou la justice des enfants, qui se voient ainsi amenés à statuer sur un contentieux technique qu'ils maîtrisent mal.

S'agissant de l'alinéa 9 et de l'assignation à résidence, il nous a été rapporté des cas où des assignations avaient été faites dans des bidonvilles, desservis par des postes restantes. Cela rend la mesure inopérante, alors que nous voulons au contraire renforcer son efficacité. Avis défavorable sur les deux amendements.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle est saisie de l'amendement CL460 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.

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L'amendement assure à l'étranger un accès effectif à la procédure en rendant possible sa pleine compréhension de son audition devant le JLD. En sus d'apporter une aide matérielle, l'idée est d'éviter un contentieux supplémentaire.

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L'assistance d'un interprète est une garantie prévue par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

L'amendement est retiré.

La Commission est saisie de l'amendement CL362 de M. Loïc Prud'homme.

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Cet amendement encadre le droit au recours des personnes en rétention qui ont saisi le JLD. De nombreuses associations, dont la Cimade, dénoncent régulièrement des situations où la personne étrangère est reconduite à la frontière alors même que le juge n'a pas statué sur sa requête. En février, la CEDH a condamné la France pour avoir expulsé un homme soumis à un risque de torture en Algérie sans qu'il ait pu exercer son droit au recours, et avoir ainsi violé l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme sur l'interdiction de la torture.

Pour prévenir de telles atteintes, cet amendement prévoit un recours devant le JLD suspensif. Tout agent public ayant pris une décision d'éloignement dans ces conditions est passible de poursuites sur le fondement de l'article 432-4 du code pénal.

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Il convient de rappeler les offices des deux juges saisis. La décision du JLD – le juge judiciaire – porte sur la légalité de la rétention ; elle interviendra au quatrième jour si le projet de loi est adopté en l'état. Elle est sans effet sur la légalité de la mesure d'éloignement, question sur laquelle c'est le juge administratif qui statue au sixième jour, toujours suivant le projet de loi.

Le cas que vous avez rapporté ne pourrait donc plus se produire aujourd'hui. Ce calendrier rend impossible le fait d'expulser avant la décision du juge administratif. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, à défaut de quoi j'émettrai un avis défavorable.

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L'objet de cet amendement est d'empêcher les expulsions sauvages, régulièrement dénoncées par les associations. Ne nous voilons pas la face et encadrons mieux la procédure pour assurer le respect des droits des personnes ! Je maintiens l'amendement.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine l'amendement CL340 de Mme Bénédicte Taurine.

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Il s'agit de supprimer l'alinéa 7, disposition qui entaille profondément les droits et libertés en ouvrant la possibilité d'enfermer une personne jusqu'à 135 jours – plus de quatre mois. Avec le triplement de la durée de rétention, l'enfermement des migrants devient une peine de détention. Les préfets condamnent de facto à la prison des personnes considérées criminelles. C'est la raison pour laquelle la majorité des associations d'aide aux migrants et de défense des droits de l'homme s'opposent à cette mesure de surcroît inefficace. Comme l'a souligné le Conseil d'État et comme nous l'apprend l'étude d'impact, dans 90 % des cas où la personne retenue a été éloignée, elle l'a été avant trente jours. Nous vous proposons de revenir à la raison et d'écarter cette mesure liberticide.

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L'alinéa 7 prévoit que le JLD qui prend une décision sur la rétention d'un étranger en informe le juge administratif. Je ne vois pas en quoi cette disposition pose un quelconque problème sur le plan des principes ou du droit.

La Commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CL296 de Mme la rapporteure.

Elle est saisie de l'amendement CL336 de Mme Danièle Obono.

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Par cet amendement, nous proposons de préserver l'office du juge administratif. En effet, l'alinéa 8 étend l'obligation de motivation spéciale à laquelle doit répondre le juge pour assigner à résidence un étranger en rétention lorsque la personne a fait précédemment l'objet d'une mesure d'éloignement. L'idée est bien d'imposer la rétention comme régime de base. Cela constitue une tentative de restreindre l'office du juge pour le contraindre à prononcer la rétention. Celle-ci est alors considérée comme une peine. La rétention administrative ne doit pas être érigée en solution de principe et l'office du juge administratif, en tant que défenseur des libertés, doit être préservé.

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Cet alinéa précise que le JLD doit motiver spécialement sa décision lorsqu'il lève la rétention d'un étranger qui a déjà fait obstacle à une précédente mesure d'éloignement. À nouveau, je ne vois pas ce qu'il y a d'excessif ou de disproportionné dans cette mesure, qui me paraît au contraire tout à fait adaptée à la situation. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est saisie de deux amendements identiques CL338 de M. Bastien Lachaud et CL714 de Mme Sonia Krimi.

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L'alinéa 10 porte à dix heures le délai durant lequel le ministère public peut déclarer un appel suspensif. Cette disposition prolonge arbitrairement de quatre heures la durée de rétention de l'étranger. L'exposé des motifs du projet de loi ne donne aucun élément permettant de justifier la position du Gouvernement. Ce dernier cherche à rogner les droits procéduraux et à augmenter la durée de rétention des personnes étrangères.

Cet amendement vise à maintenir la situation juridique actuelle, qui permet de garantir le droit et la liberté des personnes.

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Le délai était de quatre heures en 2003, avant de passer à six heures en 2011. Vous proposez aujourd'hui de le porter à dix heures. Où cela va-t-il s'arrêter ? Sur le plan des principes, l'enfermement demeure une mesure lourde ; il est vécu comme une peine, la plus élevée dans l'échelle des peines de notre pays.

Sur le plan juridique, le séjour irrégulier n'est plus un délit depuis 2012. Il n'y a par conséquent aucune raison de maintenir à disposition un étranger, ne serait-ce qu'une heure après que sa remise en liberté a été prononcée. Sur le plan matériel, compte tenu de l'ambition de ce projet de loi en matière d'éloignement, la libération immédiate des personnes retenues est légitime. Sur le plan financier enfin, le coût du maintien en rétention dans l'attente d'une décision du procureur de la République est non négligeable. J'ai fait le calcul, monsieur le ministre : 8 000 personnes ont été libérées par le JLD. Au regard du coût d'une journée en rétention, cette mesure, qui consiste à garder des personnes pourtant libérées, reviendrait à 1,2 million d'euros.

Pour toutes ces raisons, je vous invite vivement à supprimer cet alinéa.

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Cette disposition vise à une meilleure efficacité des dispositifs d'éloignement. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CL486 de M. Sébastien Huyghe et CL510 de M. Christophe Lagarde, et l'amendement CL524 de M. Christophe Lagarde.

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Nous avons parlé des possibilités de recours pour les demandeurs. Il s'agit cette fois de permettre au ministère public de demander un recours suspensif dans les cas où l'intéressé ne dispose pas de garanties de représentation effectives ou qu'il présente une menace grave pour l'ordre public. En d'autres termes, cette mesure peut être mise en oeuvre si le ministère public considère qu'il existe un risque que la personne disparaisse et qu'on ne la retrouve plus.

Cela demande un peu de temps. Le Gouvernement a considéré que le délai de six heures était trop réduit et propose de le porter à dix heures. À notre sens, un délai de vingt-quatre heures serait raisonnable.

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En outre, il existe des situations particulières, lorsque la notification survient le soir ou la veille d'un jour férié. Il nous semble qu'un délai de vingt-quatre heures serait raisonnable. À défaut, nous proposons de le ramener à seize heures.

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Je souhaite préciser que, si cette mise à disposition de la justice a été validée par le Conseil constitutionnel, celui-ci a néanmoins conditionné la procédure à un délai très bref. Le Conseil d'État a jugé que l'allongement à dix heures était conforme à cette exigence, mais un délai de vingt-quatre heures serait manifestement excessif. Avis défavorable aux trois amendements.

La Commission rejette successivement les amendements identiques CL486 et CL510 et l'amendement CL524.

Elle examine, en discussion commune, l'amendement CL133 de Mme Marietta Karamanli et les amendements identiques CL253 de Mme Marietta Karamanli, CL560 de M. Max Mathiasin et CL715 de Mme Sonia Krimi.

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L'allongement de la rétention, rendu possible par les alinéas 13 à 17, est censé permettre d'augmenter le nombre d'éloignements – ce que l'étude d'impact, faute de données chiffrées, ne parvient pas à démontrer.

En 2013, un rapport de M. Matthias Fekl au Premier ministre a montré qu'au-delà de trente jours, la prolongation de la rétention pouvait s'apparenter à une privation inutile de liberté, la grande majorité des éloignements ayant lieu entre le sixième et le trente-deuxième jour. Sa conclusion est que la prolongation de la rétention au-delà d'un mois n'apparaît pas déterminante dans la lutte contre l'immigration irrégulière. En revanche, cette mesure comporte le risque de priver de liberté inutilement les étrangers qui ne pourront pas être reconduits.

Du point de vue constitutionnel, cette mesure est manifestement disproportionnée, compte tenu de l'atteinte aux libertés individuelles qui en résulterait ; elle semble par ailleurs inefficace au regard de l'objectif affiché.

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L'amendement CL715 vise à maintenir la durée de rétention à 45 jours. Nous partageons tous le souhait de renforcer notre capacité d'éloignement des personnes en situation irrégulière, mais je suis convaincue que cela ne peut se faire en allongeant la durée de rétention administrative.

J'ai entendu plusieurs arguments, légitimes, en faveur de l'allongement de la durée de rétention. S'agissant de la nécessité d'une harmonisation européenne, prenons garde à ce qu'elle ne conduise pas à une uniformisation qui diluerait les cultures politiques et juridiques des États membres. Nos différences doivent être respectées et nous n'avons pas à nous aligner sur le moins-disant en matière de respect des droits.

S'agissant de mener une politique dissuasive, nous savons que les étrangers qui gagnent notre pays – comme je l'ai fait il y a de cela treize ans –, quelles que soient les conditions, considèrent que leur vie en France est préférable à celle qu'ils auraient eue dans leur pays d'origine. Je n'ai pas fui une guerre, je suis venue chercher la liberté. La dissuasion et les peines, aussi sévères soient-elles, n'empêcheront jamais les étrangers de venir.

Sur l'utilité d'enfermer des personnes plus longtemps pour permettre leur éloignement, il faut savoir que, dans 46 % des cas, les laissez-passer consulaires ont été obtenus avant le quarante-cinquième jour et dans 3 % des cas après ce délai.

Au regard de ces quelques éléments, l'extension de la durée de rétention administrative à 90 jours me paraît inefficace et coûteuse.

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La plupart des mesures d'éloignement sont prises dans les quinze premiers jours. On ne voit donc pas l'intérêt d'allonger la durée de rétention et de maintenir ces personnes dans l'attente d'une expulsion. Si l'on veut être à la fois dans l'humanité et dans l'efficacité, il semble judicieux de maintenir la durée actuelle.

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Je souhaite intervenir suite aux prises de position entendues depuis plus d'une heure sur la question de la rétention. M. Larrivé, notamment, a expliqué que, selon lui, encadrer la rétention allait réduire notre efficacité en matière de reconduite.

Cette vision extrêmement restrictive qui lie la reconduite au placement en rétention me pose un problème de fond. La rétention est l'exception ; il est utile de le rappeler. Limiter sa durée me semble aller dans le bon sens. Lier l'efficacité de la politique de reconduite à la stricte rétention, c'est imposer que chaque personne reconduite passe par la rétention, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui et devrait l'être encore moins demain. Les reconduites volontaires et les démarches accompagnées sont bien plus efficaces que toutes les expulsions contraintes. Il ne faut pas se tromper : notre politique doit être efficace, mais pas concentrée sur la rétention.

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Le débat sur la durée de rétention va se poursuivre, d'autres amendements proposant d'allonger cette durée en aménageant la proposition qui figure dans le texte de loi initial.

Je le disais lors de la discussion générale : la rétention n'est pas la mesure d'éloignement privilégiée, c'est l'assignation à résidence. Le texte de loi vise à renforcer la mesure d'assignation à résidence pour lui donner une crédibilité.

Nous nous plaçons ici dans le cas de personnes en rétention administrative, pour lesquelles les mesures d'éloignement n'ont pas une efficacité suffisante. Lors des auditions, nous avons interrogé les forces de l'ordre, les autorités préfectorales, la police aux frontières. Nous avons tous visité un centre de rétention administrative ; nous avons pu nous faire une idée très précise du sujet.

L'allongement systématique de la durée de rétention n'est pas souhaitable parce que nous savons que la rétention n'est pas bénéfique pour ceux qui sont placés dans une inactivité absolue. Néanmoins, l'autorité administrative doit disposer de possibilités d'allongement de la durée de rétention, et le groupe La République en Marche présentera un amendement proposant un nouveau séquençage.

L'inefficacité des mesures d'éloignement des personnes placées en rétention tient à plusieurs cas : la non-délivrance des laissez-passer consulaires et le recours à des mesures dilatoires telles que le refus d'embarquer ou le refus de participer à l'entretien consulaire. Ce sont des délits mais ils ne sont pas systématiquement poursuivis par l'autorité judiciaire. Dans ce cas, il est important que l'autorité administrative puisse prendre le relais.

Nous avons entendu des forces de police qui ne souhaitent pas un allongement de la durée de rétention et qui, en même temps, sont désabusées et ne savent plus comment appliquer la loi. Que faire après trois refus d'embarquer ? Le délai de quarante-cinq jours est vite atteint. Il fallait trouver une solution, elle vous sera présentée dans les amendements suivants. Permettre l'allongement de la durée de rétention, c'est aussi permettre l'application de la loi en matière d'éloignement. J'émets donc un avis défavorable à ces amendements.

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Il ne faut pas se le cacher : nous avons un problème avec les centres de rétention administrative. Le ministre l'a souligné en annonçant une série de travaux. Quand j'ai visité le CRA de Rennes, j'ai été particulièrement choqué de l'ambiance de cet endroit. Contrairement à ce qu'a dit M. Larrivé, les CRA ne sont pas des structures hôtelières : ils s'approchent plus de l'univers carcéral. Celui de Rennes est entouré d'une double barrière de barbelés de six mètres de haut et d'un mirador. Et, suite aux tentatives d'évasion, ils sont obligés de l'équiper d'une vidéosurveillance et d'un filet anti-parachutages.

Je comprends les problématiques d'efficacité. Mais je suis d'avis d'en rester à une période maximale de rétention de quarante-cinq jours, car les personnes retenues n'ont rien à faire. Ce n'est pas comme la prison où il y a des activités. Il n'y a rien à faire dans un CRA à part aller dans la salle de télévision quand elle fonctionne. Ceux qui y rentrent ne savent pas quand ils vont en sortir. Peut-être dans les quarante-huit heures quand le juge des libertés et de la détention se sera prononcé, peut-être dans cinq jours, dans dix jours ou dans quarante-cinq. C'est ce qui est terrible. Nous devons travailler pour que ces situations soient humainement tolérables pour des personnes qui, parfois, ne doivent pas rester dans notre pays.

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Nous sommes dans un État de droit : lorsque nous faisons face à un élément qui ne fonctionne pas, nous devons trouver les moyens de lui rendre son efficacité. Ici, la question posée est celle des laissez-passer consulaires. Les auteurs des amendements s'interrogent sur l'utilité et l'efficacité du dispositif proposé par le Gouvernement. En quoi l'allongement de la durée de rétention serait-il utile ou efficace ? Tout simplement, dans un certain nombre de situations, on constate que la durée de rétention est trop courte pour être efficace. Face à cet état de fait, laissons-nous les choses en l'état ou essayons-nous de trouver des mécanismes et des aménagements pour y remédier ?

Je rappelle que cela n'implique aucun changement dans la hiérarchie des moyens de surveillance, qu'il s'agisse de l'assignation à résidence ou de la rétention administrative. Il ne s'agit pas non plus d'une harmonisation européenne car la directive permettrait, comme c'est le cas dans de nombreux pays, d'aller jusqu'à 180 jours. La limite actuelle de quarante-cinq jours de rétention représente un quart du maximum autorisé dans l'Union européenne. Cela n'empêche pas de discuter de mécanismes d'allongement ou des conditions à poser à cet allongement.

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Contrairement aux députés de la majorité, je ne souhaite pas poursuivre inutilement nos débats, je passe donc mon tour.

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Comme le disait M. Balanant, il est nécessaire de repenser nos CRA. J'ai visité celui de Saint Exupéry. Malgré sa proximité de Lyon – sans doute une des plus belles villes du monde, monsieur le ministre ! –, il y a un problème. C'est un ancien hôtel transformé, année après année, en CRA. L'outil n'est pas fonctionnel au regard de ses objectifs. Aujourd'hui, ce ne sont pas des lieux adaptés à la fonction qui leur est confiée. Un travail de conception de nouveaux outils s'impose. C'est un coût pour l'État, mais une nécessité si nous voulons concilier dimension humaine et nécessité de disposer d'instruments permettant la rétention en vue de l'éloignement.

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Ce qui est étonnant dans ce débat, c'est que nous oublions que nous discutons d'une évolution de la durée maximale. Pour les personnes dont la durée de rétention est inférieure, rien ne changera. Il est simplement question d'augmenter l'efficacité de notre dispositif en laissant aux fonctionnaires en charge de ces tâches la possibilité d'éviter les manoeuvres dilatoires et de pouvoir accomplir ce qu'ils doivent faire. Il n'est pas question d'abattage administratif, pour reprendre la formulation odieuse qui a été employée hier, mais d'un système simplement efficace.

La Commission rejette l'amendement CL133 puis les amendements identiques CL253, CL560 et CL715.

Elle en vient à l'amendement CL518 de M. Matthieu Orphelin.

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L'amendement vise à apporter une réponse graduée. Il présente deux différences avec celui de mes collègues de La République en Marche qui sera présenté ensuite. Tous deux suggèrent une gradation, mais je propose un séquençage en quarante-cinq jours, puis trois périodes de quinze jours qui pourront s'ajouter dans le cas de manoeuvres dilatoires. L'amendement présenté par le groupe La République en Marche, prévoit une première période de soixante jours, puis deux fois quinze jours.

Mais ce qui me dérange surtout dans l'amendement présenté au nom du groupe LaREM, c'est qu'une condition laisse place à l'interprétation. Une des justifications du « rebond » – c'est le terme utilisé pour la prolongation de la rétention – est que l'administration peut raisonnablement penser que l'attribution des documents de voyage interviendra prochainement. Les termes de « raisonnablement » et de « prochainement » sont subjectifs. C'est une deuxième différence avec l'amendement que je vous propose, auquel j'invite la Commission à se rallier.

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Avis défavorable. Je suis plutôt favorable à la proposition faite par le groupe La République en Marche.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL821 rectifié de M. Florent Boudié, CL461 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, CL633 de M. Dimitri Houbron, les amendements identiques CL171 de M. Éric Ciotti et CL760 de Mme Valérie Boyer, l'amendement CL61 de M. Fabien Di Filippo et l'amendement CL668 de Mme Muriel Ressiguier.

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L'allongement de la durée de rétention administrative, proposé par le Gouvernement, fait débat. Nous l'avons constaté suite à une série d'interventions au cours des dernières semaines. Il faut le comprendre. Rien n'est anodin s'agissant d'une mesure privative de liberté. Mais il faut ajouter deux remarques.

La première est que, dans notre droit, l'assignation à résidence reste le principe, quitte à ce qu'elle soit renforcée. C'est l'un des objectifs du projet de loi : consolider les garanties de représentation dans le cadre de l'assignation à résidence.

La seconde est que les flux migratoires sont, par nature, internationaux. La France n'est pas la seule destination ; c'est le territoire de l'Union européenne en général qui est recherché, certains pays étant plus prisés que d'autres. Si les flux sont internationaux, il faut étudier les règles européennes : une directive fixe la durée maximale de rétention à 180 jours. Aujourd'hui, en France, elle est de quarante-cinq jours.

C'est dans ce contexte que le Gouvernement propose de porter cette durée maximale à quatre-vingt-dix jours. Nous sommes d'accord, considérant qu'il est utile, dans un certain nombre de cas, d'allonger la durée. Cela nous a été confirmé lors des auditions du préfet de police de Paris et du directeur central de la police de l'air et des frontières. Nous souhaitons que cette durée soit ciblée sur les cas dans lesquels elle sera utile à l'éloignement. C'est pourquoi notre proposition consiste à ce que, après les séquences de deux jours puis vingt-huit jours prévues par le droit existant, le JLD puisse, sous conditions, allonger cette période jusqu'à trente jours pour les cas d'urgence absolue, de menace à l'ordre public, d'obstruction et de non-délivrance des titres de transport et de voyage.

Deux autres séquences de quinze jours peuvent venir s'ajouter, toujours soumises au JLD et réservées à deux cas seulement : lorsque l'autorité administrative peut prouver que les documents de voyage seront délivrés dans un bref délai et quand il y a obstruction volontaire des retenus. Il s'agit, pour l'essentiel, de décourager les refus d'embarquement et de présentation devant l'autorité consulaire.

Tel est l'objet de notre amendement CL821 rectifié.

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Nous souhaitons également restreindre la durée de rétention en raison de ses conditions matérielles. La différence entre notre proposition et celle qui vient d'être présentée par M. Boudié est que, entre trente et soixante jours, nous souhaitons instaurer un intervalle de deux fois quinze jours, ce qui permet de maintenir les quarante-cinq jours qui sont aujourd'hui la norme.

Les conditions posées pour la prolongation au-delà de soixante jours, qui ne figurent pas dans l'amendement proposé par le groupe du Mouvement démocrate et apparentés et ont été ajoutées par M. Boudié, me semblent aller dans le bon sens. Je souhaiterais, pour l'examen en séance publique, que nous arrivions à une version commune qui retiendrait le séquençage que nous proposons, car il nous semble garantir les droits des personnes retenues et instaurer des dispositifs supplémentaires pour aller jusqu'à quatre-vingt-dix jours.

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Satisfait par l'amendement CL821 rectifié présenté par le groupe LaREM, je retire l'amendement CL633.

L'amendement CL633 est retiré.

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Je voudrais rappeler que 500 000 migrants sont entrés irrégulièrement dans l'espace Schengen en 2016, après le record historique de 1,8 million d'entrées irrégulières en 2015 selon Frontex. On comptait ces dernières années plus de 100 000 entrées irrégulières par an. Sur les 21 296 étrangers retenus, 8 689 ont été effectivement éloignés en 2017. Parmi eux, 32 % l'ont été après quinze jours de rétention et 10 % après trente jours. En France, nous accueillons avec beaucoup de générosité ; les étrangers en situation irrégulière ont toutefois vocation à rentrer dans leur pays. Mon collègue Éric Ciotti et de nombreux autres élus du groupe Les Républicains ont raison : nous devons replacer la rétention administrative au coeur de toutes les procédures d'éloignement. Je suis entièrement d'accord avec le Gouvernement, une fois n'est pas coutume : la rétention donne le temps de lancer les démarches de renvoi avec les pays d'origine, souvent peu coopératifs, et j'espère que nous travaillerons sur ce dernier point.

Malheureusement, en portant la durée de rétention maximale à quatre-vingt-dix jours, la France resterait dans la fourchette basse de l'Union européenne. Le ministre de l'intérieur a précisé que nous devions nous inspirer des bonnes pratiques de nos voisins européens, dont acte. La rétention administrative maximale est de 180 jours en Allemagne, 60 en Espagne, douze mois en Suède et sa durée est illimitée au Royaume-Uni et aux Pays-Bas : pourquoi se limiter à 90 jours en France ? Pourquoi ne pas s'aligner sur ces pays en se donnant davantage de temps, tout en maintenant ces individus dans nos centres de rétention ?

Les amendements similaires CL760 et CL61 portent donc le délai de rétention à cent quatre-vingts jours.

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Identique au 760, l'amendement CL171 est défendu.

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Par l'amendement CL668, nous proposons de suivre la recommandation du Contrôleur général des lieux de privation de liberté et de ramener cette durée à trente-deux jours. L'argument du Gouvernement, qui consiste à dire que le taux d'éloignement augmente avec la durée de rétention, est ridicule. De plus, il est contredit par sa propre étude d'impact puisqu'on y apprend qu'environ 90 % des mesures de rétention où la personne retenue a été effectivement éloignée l'ont été avant trente jours et 10,54 % après trente jours de rétention. D'où la recommandation logique du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, que nous proposons ici de transcrire, au nom du droit à la sûreté et des libertés fondamentales des personnes.

Une privation de liberté n'est pas une procédure anodine pour celui qui la vit, d'autant que la majorité des personnes qui font l'objet d'un placement en rétention n'ont commis aucune infraction. Le Gouvernement se complaît dans une logique punitive, mais encore faut-il qu'une faute ait été commise pour pouvoir légitimement la punir ! Comme la majorité de cette assemblée l'a remarqué, ce projet de loi est largement disproportionné. Alors, écoutons l'avis d'une personne qui connaît mieux la question que n'importe quel député, y compris ceux qui ont visité des CRA comme j'ai pu le faire, et suivons l'avis du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

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Entre les visions minimaliste et maximaliste de la rétention, il fallait trouver une solution réaliste et pragmatique. Deux amendements me semblent aller dans ce sens : ceux des groupes La République en Marche et Mouvement démocrate et apparentés.

Je donne un avis favorable à l'amendement CL821 rectifié du groupe LaREM, parce que la proposition de séquençage faite est la plus conforme à ce qui nous a été dit en audition, pour aller vers plus d'efficacité tout en garantissant les droits et en encadrant les décisions du JLD sur ces décisions de prolongation. Avis défavorable, en conséquence, à tous les autres amendements.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

La durée de rétention dans les différents pays d'Europe est beaucoup plus importante qu'en France, et même que celle que nous proposions dans le projet initial. Il ne faut pas confondre la durée maximale et la durée effective. Ce n'est pas parce qu'un pays prévoit une rétention maximale de cent quarante jours que la durée moyenne va tendre vers ce chiffre : elle peut être de trente ou quarante jours, car tout le monde souhaite pouvoir éloigner en un minimum de temps.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Si nous prévoyons des durées relativement importantes, c'est justement pour dissuader un certain nombre de pays qui pourraient tarder à donner les laissez-passer consulaires, sachant que le délai est court. Nous avions proposé une durée plus longue dans le projet de loi initial. La durée de quatre-vingt-dix jours, proposée dans l'amendement de M. Boudié, nous semble convenir. Elle est suffisante pour obtenir les laissez-passer consulaires et elle garantit les libertés parce qu'elle est toujours séquencée par l'intervention du JLD. Surtout, au trentième jour, l'amendement supprime la notion d'obtention du laissez-passer consulaire à bref délai qui pouvait poser des problèmes d'interprétation très sérieux. Aujourd'hui, un certain nombre d'éloignements devenaient impossibles de ce fait, et il y avait effectivement des libérations.

L'amendement CL821 rectifié présenté par M. Boudié est équilibré. Le Gouvernement est prêt à s'y rallier.

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Mon attention a été appelée sur le fait que certains pays attendent la veille de la fin du délai pour donner les laissez-passer consulaires. C'est pour cela que notre amendement maintenait la borne des quarante-cinq jours : si nous allions au-delà, cela augmenterait mécaniquement le temps de rétention utilisé par certains pays jusqu'à la veille de son terme.

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Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Si le délai était de cent soixante jours, ils attendraient le cent cinquante-neuvième : le problème n'est pas là. Il se réglera par la négociation. Si j'accepte les quatre-vingt-dix jours, c'est parce que les discussions que nous avons avec les pays d'où proviennent un certain nombre de migrants laissent penser que nous pouvons obtenir les laissez-passer consulaires dans ce délai.

La Commission adopte l'amendement CL821 rectifié. En conséquence, les amendements CL461, CL171, CL760, CL61 et CL668 tombent.

La réunion s'achève à 18 heures 35.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Laetitia Avia, M. Erwan Balanant, M. Ugo Bernalicis, M. Florent Boudié, Mme Yaël Braun-Pivet, M. Éric Ciotti, M. Jean-Michel Clément, Mme Coralie Dubost, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Élise Fajgeles, Mme Elsa Faucillon, Mme Isabelle Florennes, Mme Paula Forteza, M. Raphaël Gauvain, Mme Marie Guévenoux, M. Dimitri Houbron, M. Sacha Houlié, M. Sébastien Huyghe, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Catherine Kamowski, Mme Marietta Karamanli, Mme Alexandra Louis, M. Jean-Louis Masson, M. Stéphane Mazars, M. Jean-Michel Mis, Mme Naïma Moutchou, Mme Danièle Obono, M. Didier Paris, M. Bruno Questel, M. Rémy Rebeyrotte, M. Robin Reda, M. Thomas Rudigoz, M. Pacôme Rupin, M. Jean Terlier, M. Alain Tourret, Mme Laurence Vichnievsky, M. Guillaume Vuilletet, M. Michel Zumkeller

Excusés. - M. Jean-Michel Fauvergue, M. Jean-Christophe Lagarde, Mme Maina Sage, Mme Alice Thourot

Assistaient également à la réunion. - Mme Delphine Bagarry, M. Christophe Blanchet, Mme Valérie Boyer, M. Fabien Di Filippo, Mme Stella Dupont, M. Brahim Hammouche, Mme Sonia Krimi, Mme Sandrine Mörch, M. Matthieu Orphelin, M. Loïc Prud'homme, Mme Sabine Rubin, Mme Alexandra Valetta Ardisson, Mme Martine Wonner