Commission des affaires sociales

Réunion du lundi 30 janvier 2023 à 15h00

La réunion

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La séance est ouverte à quinze heures.

La commission poursuit l'examen du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (n° 760) (Mme Stéphanie Rist, rapporteure générale).

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Chers collègues, nous poursuivons l'examen du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS) pour 2023. Ce matin, nous avons examiné 58 amendements ; il n'en reste plus que 5 503 en discussion !

Article 1er (suite) : Fermeture des principaux régimes spéciaux de retraite

Amendements identiques AS1328 de M. Philippe Juvin, AS3787 de M. Pierre Dharréville, AS4786 de M. François Ruffin et AS6927 de Mme Sabrina Sebaihi.

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Parmi les raisons pour lesquelles les régimes spéciaux de retraite font débat figurent le besoin éventuel d'assurer leur équilibre avec des financements publics, donc avec l'argent du contribuable, et les modalités de liquidation des droits à la retraite exorbitantes du droit commun.

Par son amendement AS1328, Philippe Juvin souhaite que le régime spécial de la Banque de France ne soit pas clôturé. Comme il l'a indiqué ce matin, son financement, certes singulier, est assurément suffisant. Il a des provisions qui permettent de verser les pensions sans recourir à l'argent du contribuable. Ce régime s'autofinance grâce aux gains issus de placements. Véritablement spécifique, il doit faire l'objet d'une analyse distincte de celle qui prévaut pour les autres régimes spéciaux, à la clôture desquels nous sommes favorables.

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Nul n'ignore que nous demandons le retrait de tout le texte, dont l'article 1er relatif aux régimes spéciaux. Nous sommes aussi opposés à la méthode utilisée pour modifier notre régime de retraite. Nous ne nions pas les réformes à faire, mais celle que vous proposez et la façon employée semblent tout à fait inacceptables. En fin de semaine dernière, la Première ministre a déclaré devant des journalistes que le report de l'âge légal à 64 ans n'était plus négociable. Je me suis demandé à quel moment il l'avait été... Jamais, je pense, car c'est la véritable raison d'être de ce projet de loi. Nous demandons la suppression de l'article 1er et le retrait du texte.

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Le régime de la Banque de France ne tombe pas du ciel. Il a plus de deux cents ans. Il a été créé par le citoyen Benjamin Delessert, dont une erreur dans le calcul des taux de cotisation a permis à cette caisse d'accumuler beaucoup d'argent – comme quoi, pour équilibrer les comptes, mieux vaut les erreurs d'un révolutionnaire que les bons calculs d'un macroniste !

Ce régime spécial a fait l'objet d'attaques virulentes, ayant notamment eu pour effet de supprimer la majoration de pension appelée « bénévolence ». Pourtant, les projections du Conseil d'orientation des retraites (COR) sont sans appel : ce régime va de mieux en mieux. Depuis 2012, chaque projection montre que les ressources propres ne font qu'augmenter. Il s'agit donc d'un régime qui se finance seul sur trente ans.

Si ce régime est rentable, c'est aussi grâce à l'auto-administration des assurés, qui pilotent la collecte des fonds, ainsi qu'à l'évolution parallèle des salaires et des pensions, ce qui maintient le bon fonctionnement du système. Mieux vaut des assurés qui gèrent leurs comptes que des experts-comptables du Gouvernement qui les plument ! L'équilibre d'un budget est une question de démocratie. Aucune caisse n'a de meilleure sécurité que la surveillance des fonds par les assurés eux-mêmes.

Ce régime ne reçoit pas d'argent de l'État pour sa bonne marche. Même lorsqu'il prétend récupérer de l'argent, le Gouvernement parvient à en perdre, c'est incroyable ! Enfin, cette caisse est profitable et elle verse ses excédents au budget général. Nous avons donc intérêt à son existence. Pour nos finances publiques comme pour les droits des salariés, ici ceux de la Banque de France avec lesquels nous marcherons demain, nous proposons par l'amendement AS4786 la suppression des alinéas 3 et 4.

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L'amendement AS6927 a été défendu à merveille par mes collègues.

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Sur la forme – approche jamais très convaincante mais non sans importance dès lors que nous écrivons la loi – l'adoption des amendements aurait pour effet d'affilier tous les salariés actuels de la Banque de France au régime général.

Sur le fond, j'observe, chers collègues, que vous défendez un système par capitalisation. Le régime de retraite de la Banque de France se rapproche de celui de la fonction publique sur certains points, mais il n'en reste pas moins spécifique. Par exemple, les cotisations sont prélevées non seulement sur le traitement nominal, mais aussi sur certaines primes. La prise en compte des bonifications dans le calcul du montant de la pension diverge de celle de la fonction publique. De ce point de vue, la fermeture de ce régime est cohérente avec notre objectif de lisibilité, justice et équité du système de retraite.

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Je crois être le seul magistrat de la Cour des comptes de cette assemblée à avoir contrôlé, à ce titre, le régime de retraite de la Banque de France, il y a un tiers de siècle.

Il ne s'agit pas tout à fait d'un régime par capitalisation, mais en semi-capitalisation. Le capital constitué par les cotisations des salariés dégage des revenus qui, s'ils ne couvrent pas le montant des prestations, sont complétés par une subvention d'équilibre de la Banque de France. Dans le régime créé par Napoléon Ier, les pensions de retraite étaient des indemnités de bénévolence... On n'en parle plus depuis la réforme du régime, il y a une quinzaine d'années, inspirée par le rapport de la Cour des comptes qui en démontrait l'archaïsme.

De quoi vit la Banque de France ? Du monopole de l'émission, qui lui assure des bénéfices considérables, qu'elle reverse partiellement au budget de l'État. Il est savoureux de voir des groupes politiques ayant toujours combattu la capitalisation défendre un régime fondé sur ce principe !

Il demeure un problème de fond, qui n'est pas traité par le texte. Fin décembre 2021, les réserves du régime s'élevaient à 15,4 milliards, d'après le rapport du COR. Qui en est propriétaire ? La réponse est simple : à partir du moment où il s'agit du produit de la capitalisation des cotisations des salariés, ils sont les propriétaires. Dès lors, la mise en extinction du régime n'impose-t-elle pas de reverser au personnel une partie du fonds de capitalisation ? Je rappelle que ce sont des fonds privés et non publics.

La précédente tentative de réforme envisageait de disposer de ces fonds. Le Conseil constitutionnel aurait certainement annulé cette disposition, s'agissant de fonds privés. Il faut indemniser : la Constitution y oblige. Madame la rapporteure générale, pouvez-vous nous éclairer sur cette délicate question ?

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Nous avons eu ce débat, comme d'autres, lors de l'examen du projet de loi instituant un système universel de retraite. Il était déjà surprenant de voir défendre un régime par semi-capitalisation pour préserver la retraite par répartition... La CGT, associée à la gestion de ce régime très particulier, faisait état d'une cotisation de 7,85 % des rémunérations alimentant un capital placé en Bourse pour générer des excédents. Mais ceux-ci sont insuffisants. Avec 17 000 bénéficiaires de la retraite pour 10 000 cotisants, le déséquilibre démographique est patent. D'après un rapport du Sénat publié en 2018, le déficit du régime s'élève à 428 millions d'euros pour l'année 2019. Le contribuable vient donc bel et bien à la rescousse du système.

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J'ai entendu certains arguments dont le sens et la cohérence m'échappent. D'abord, il ne s'agit pas de ponctionner les réserves du régime de retraite de la Banque de France, qui en conservera l'intégralité. Il s'agit de faire converger la protection sociale : telle est la finalité politique de la suppression des régimes spéciaux prévue par le projet de loi, dans une logique d'égalisation des conditions. Le régime de retraite de la Banque de France est fondé sur un modèle économique qui lui permet de générer des réserves. Chacun peut se demander si ces réserves, et donc les différences de traitement entre les salariés du régime et les autres, doivent perdurer.

Ensuite, l'argument selon lequel il faudrait préserver ce régime parce qu'il est excédentaire est surprenant. Si tel est le cas, chers collègues de la NUPES, il faut revoir votre argumentaire sur les régimes spéciaux en déficit ! L'État contribue à hauteur de 6 milliards d'euros au financement des régimes spéciaux. C'est une des raisons pour lesquelles nous souhaitons les placer en extinction.

Enfin, l'argument selon lequel les régimes spéciaux sont justifiés par la pénibilité des métiers doit être nuancé. Sans vouloir en aucune manière jeter l'opprobre sur les salariés de la Banque de France, il me semble que la pénibilité de leur métier n'est pas comparable avec d'autres, notamment ceux qui feront l'objet, dans le cadre du projet de loi, de mesures d'accompagnement ambitieuses.

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Comme Charles de Courson, j'aimerais savoir comment sera mise en œuvre l'extinction du régime de retraite de la Banque de France. N'y a-t-il pas lieu de prévoir une période transitoire avant sa suppression, pour permettre le traitement de ces réserves, qui appartiennent aux salariés ? D'autres situations ont démontré qu'un délai de six mois peut s'avérer insuffisant pour les instances de concertation chargées de ces questions.

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Depuis le début, on nous dit que la réforme est le fruit d'une grande concertation à laquelle tous les acteurs sont associés. Mais d'après le conseiller général de la Banque de France – c'est le nom du représentant du personnel –, la direction de la Banque de France, les organisations syndicales et les agents ont appris la suppression de leur régime de retraite par voie de presse ! Le 9 décembre 2022, les organisations syndicales ont demandé au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion de les recevoir. À la date du 25 janvier 2023, ils n'avaient pas reçu la moindre réponse. Que le ministre laisse lettre morte une demande d'entretien des organisations syndicales alors que la suppression d'un régime spécial est envisagée illustre, à mes yeux, la pseudo-concertation qui a présidé à cette réforme.

Le seul rendez-vous entre la direction de la Banque de France et le cabinet d'Olivier Dussopt a eu lieu début décembre. Singulièrement, les organisations syndicales n'y étaient pas associées. Il s'agit d'un argument supplémentaire pour ne pas souscrire à la suppression de ce régime spécial.

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Messieurs de Courson et Bazin, il ne s'agit pas, comme l'a rappelé Marc Ferracci, de modifier la propriété des réserves du régime de retraite de la Banque de France. Leur traitement est décorrélé des règles applicables aux nouveaux contrats au 1er septembre.

Monsieur Guedj, je vous propose d'adresser vos observations au ministre. Nous, députés, avons auditionné les représentants de la Banque de France. Peu de collègues étaient présents.

Enfin, comme l'indique le rapport joint au projet de loi, la durée de vie en retraite des femmes relevant du régime de la Banque de France est de trente-cinq ans, contre vingt-quatre ans pour les affiliées au régime général. La suppression est une mesure de justice.

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Madame la rapporteure générale, cela m'inspire plutôt l'envie que toutes les femmes passent trente-cinq ans à la retraite au lieu de vingt-quatre ! Et, monsieur Ferracci, un manutentionnaire reste un manutentionnaire, son métier n'est pas moins pénible sous des dorures que dans un hangar. La question générale soulevée par la discussion sur les régimes spéciaux de retraite est la diversion : quand 80 % de la population est opposée à un projet de loi, le plus simple est de trouver des boucs émissaires et de monter pensionnés et cotisants les uns contre les autres. En parlant de quarante-deux régimes de retraite, vous incluez tous les régimes – spéciaux, complémentaires et de base, soit 100 % des salariés. Cela ne veut pas dire grand-chose !

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques AS882 de M. Jérôme Guedj, AS3790 de M. Yannick Monnet, AS4785 de Mme Mathilde Panot et AS6564 de Mme Laure Lavalette.

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Je suppose que le Gouvernement n'a pas davantage consulté les syndicats de clercs de notaires et le syndicat national des notaires au sujet de la suppression du régime spécial des clercs et employés de notaires. Nous nous opposons à cette méthode, à ce principe, à l'absence de concertation ainsi qu'à la brutalité avec laquelle le Gouvernement agit. Avant toute réforme des régimes de retraite, il faut concerter pour agir avec l'accord des organisations. Par l'amendement AS882, nous demandons la suppression des alinéas 5 à 8.

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Nous sommes opposés à la suppression des régimes spéciaux. Ce qu'a dit Marc Ferracci est parfaitement juste : les pénibilités ne se comparent pas. Or, les régimes spéciaux correspondent à des types de métiers. Ils ont été créés par les salariés qui les exercent, qui ont conquis des droits attachés aux particularités de leurs activités.

Supprimer les régimes spéciaux, c'est refuser de tenir compte de la spécificité de chaque métier en matière de pénibilité. Il est vrai que la pénibilité n'est pas trop votre affaire : en 2017, la majorité a supprimé quatre critères de pénibilité, dont la manutention !

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L'amendement AS4785 vise à empêcher la suppression du régime associé à la caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires. Sa spécificité est d'assurer simultanément contre les risques vieillesse et maladie, ce qui permet d'équilibrer les comptes puisque l'excédent d'une branche couvre les besoins de financement de l'autre. Nous souhaitons son maintien pour plusieurs raisons.

D'abord, cette caisse est intégralement autofinancée grâce notamment au paritarisme. Si les assurés gèrent eux-mêmes le niveau des cotisations et les modes de mutualisation pour couvrir leurs risques une fois la vieillesse venue, les besoins de financement sont couverts car ils affectent les recettes là où il faut des dépenses.

Ensuite, la caisse a pris certaines initiatives qui méritent d'être appliquées à l'ensemble de la sécurité sociale, non d'être liquidées en raison de leur originalité. Elle fonctionne sur la base de comités de retraités : depuis quarante ans, des dizaines de bénévoles, dans tout le pays, accompagnent les pensionnés dans l'exercice de leurs droits. Ils sont formés pour ce faire par les équipes de la caisse. Par ailleurs, l'assuré, le cotisant, le retraité et le malade sont une seule et même personne, ce qui favorise des parcours d'accès aux droits plus favorables et qui ne laisse tomber personne dans l'exercice des droits et la liquidation des pensions.

Enfin, ce régime a obtenu des avancées importantes en matière de pension de réversion, notamment un droit d'option qui mériterait lui aussi d'être regardé de près puisqu'il élève le niveau d'indemnisation des personnes dans une situation où la paupérisation menace.

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Il faut préserver le régime spécial des clercs et employés de notaires. Nous parlons ici de 76 000 personnes qui cotisent à une caisse excédentaire, dans une activité soutenue et organisée. Notre commission a auditionné leurs représentants, qui ont clairement indiqué n'avoir jamais demandé de participation à la collectivité et avoir toujours puisé dans leurs réserves propres en cas de déficit. La suppression de ce régime poserait des problèmes de recrutement à la profession. Chers collègues, par l'amendement AS6564, je vous appelle à empêcher le Gouvernement de fermer ce régime spécial.

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Il s'agit d'améliorer la lisibilité du système de retraite. Nous avons auditionné la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN). Je suis d'accord avec vous sur un point, chers collègues : ce régime est sans doute le plus proche du régime général, celui dont le financement est le plus autonome et donc celui qui demande le moins de subventions complémentaires. Mais c'est aussi l'un des régimes où la proportion de retraités polypensionnés est la plus élevée : sa suppression simplifiera donc le système global.

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Madame la rapporteure générale, vous avez dit vous-même que ce régime ne pose aucun problème d'équilibre. Vous ne pouvez pas justifier sa suppression par un déficit structurel. Vous avez dit qu'il était fort peu aidé par l'État ; en réalité, il ne l'est pas du tout ! Le budget de l'État ne lui verse pas un sou.

Par ailleurs, vous n'avez pas répondu à ma question sur la propriété des réserves. La suppression des régimes spéciaux se justifie seulement si l'on considère que la justice entre les Français exige que tous soient affiliés au régime général – telle est ma position, inchangée depuis un tiers de siècle Pouvez-vous rappeler le montant des réserves de la CRPCEN et dire ce qu'il est prévu d'en faire ?

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Un régime en équilibre ou en excédent n'aurait pas, pour ce motif, à converger avec le reste de notre protection sociale ? Cet argument semble difficile à entendre de la part de ceux qui ont demandé le maintien de régimes en déficit. Il faut un minimum de cohérence !

Monsieur Monnet, Hadrien Clouet vous a démenti. Certes, les pénibilités ne se comparent pas. Mais, au sein d'un même régime spécial, des métiers à la pénibilité distincte peuvent coexister. Hadrien Clouet a donné l'exemple du manutentionnaire de la Banque de France, dont le métier est à l'évidence plus pénible que celui d'un banquier ou d'un analyste économique de la même Banque de France. C'est à ces différences que veut répondre la réforme en individualisant le diagnostic grâce à des visites médicales à 45 et à 61 ans, ce qui permettra de partir tôt et de bénéficier de fonds de reconversion ainsi que d'un investissement inédit dans la prévention, pour lequel seront dépensés 1 milliard d'euros sur cinq ans.

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L'exposé sommaire de l'amendement AS882 mentionne « le régime spécial de retraite des notaires et clercs de notaires ». Or, les premiers sont assurés à la Caisse de prévoyance et de retraite des notaires, à ne pas confondre avec la CRPCEN. De surcroît, les assurés d'Alsace et de Moselle ne relèvent pas de ces régimes. Il importe, pour la clarté de nos débats, de conserver un bon degré de précision.

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Marc Ferracci a rappelé la volonté, dans ce projet de loi, d'aller vers davantage d'individualisation. C'est d'ailleurs l'un des reproches que nous lui adressons. Il procède de la volonté de briser les garanties collectives pour aller vers une responsabilisation individuelle, conformément à la logique poursuivie par plusieurs projets de loi du Gouvernement. Vous attaquez une fois de plus les mécanismes collectifs.

Dans le régime des clercs de notaire, la part des cotisations des bénéficiaires est plus élevée que dans le régime général. Le financement par les cotisants est plus important qu'ailleurs, comme c'est le cas à la RATP, où les droits supplémentaires sont financés par une surcotisation, également versée par l'employeur. Par ailleurs, ce régime spécial finance la retraite, mais aussi la maladie, la maternité, le décès et l'invalidité, auxquels le texte ne touche pas. La cohérence m'échappe. Ce que je comprends, c'est que deux régimes, ceux de la RATP et des industries électriques et gazières, sont dans le viseur du Gouvernement. Il en a ajouté d'autres pour faire en sorte que cela ne se voie pas trop.

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Comme l'a dit Thibault Bazin, la CRPCEN ne concerne pas les notaires. Par ailleurs, les amendements semblent dater de l'époque où l'on avait un métier pour la vie – on devenait clerc de notaire à la sortie de ses études et on le restait jusqu'au bout. Aujourd'hui, on vit plus longtemps et on change de métier. S'engager pour toute une carrière peut même faire peur à certains jeunes gens.

Par conséquent, le nombre de polypensionnés augmente. Or, les règles, notamment en matière de droits familiaux, s'agissant des pensions de réversion et de la prise en compte des enfants, ne sont pas cohérentes d'un régime à l'autre. Faire en sorte que tous les salariés – dans un premier temps – relèvent du même régime est une bonne démarche.

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Pierre Dharréville a dit l'essentiel : le Gouvernement réforme des régimes spéciaux excédentaires en présentant leurs bénéficiaires comme des privilégiés. Or, les clercs de notaire partent à un âge moyen de 62 ans et ils n'ont pas plus de droits que la moyenne des retraités. Leur régime est excédentaire, ce qui permet de financer aussi des prestations sociales. S'agit-il de faire des économies de bout de chandelle tout en appauvrissant les caisses sociales concernées ? Comment sera compensé l'éventuel déficit du système de prestations maladie ? Par ailleurs, si l'excédent des caisses de retraite concernées est versé au régime général, un alignement du taux des cotisations patronales aura lieu. Faut-il comprendre que les cotisations patronales diminueront pour les clercs de notaire ? J'aimerais obtenir des précisions.

La réforme de ce régime spécial sert d'habillage à celle d'autres régimes, considérés privilégiés. Est-elle nécessaire ? Quel est son coût pour les finances publiques ? Quelles seront ses conséquences pour les employeurs de clercs de notaire ? Ne revient-elle pas à faire un cadeau aux notaires ?

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Quand on a supprimé la première classe dans les transports express régionaux, j'ai trouvé ça dommage : j'aurais préféré supprimer la seconde classe et que tout le monde monte en première ! Vous faites la même chose avec les régimes de retraite : à ceux qui avaient davantage de conquis sociaux, qui pouvaient partir un peu plus tôt, vous dites que c'est terminé. Cela améliorera-t-il le sort des autres ? Pas du tout.

Nos amendements, dans cette partie du texte, demandaient que tous les travailleurs de la deuxième ligne, les auxiliaires de vie, les assistantes maternelles, les caristes, les manutentionnaires, les ouvriers du bâtiment et de la grande distribution, les chefs de rayon et autres aient des avantages, qu'ils puissent partir à la retraite plus tôt grâce à une reconnaissance de la pénibilité de leur travail. Hélas, ils ont été déclarés irrecevables.

Depuis que le Président de la République a déclaré à la télévision qu'il faudrait « nous rappeler aussi que notre pays, aujourd'hui, tient tout entier sur des femmes et des hommes que nos économies rémunèrent si mal », qu'avez-vous fait pour ces métiers ? Rien. Alors que les salaires ne sont pas indexés sur l'inflation, qui voit son petit pouvoir d'achat le plus érodé ? Ce sont eux. C'est la peine qu'ils reçoivent à la place d'une récompense. Et la double peine, c'est sur eux qu'elle pèsera le plus avec des trimestres et des années supplémentaires pour les travailleurs du bâtiment et les auxiliaires de vie sociale. Le minimum aurait été de nous permettre de discuter de la nécessité des régimes particuliers pour ceux qui, dans leur corps ou dans leur cœur, souffrent particulièrement au travail.

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Monsieur de Courson, comme je l'avais dit, les réserves de la caisse s'élevaient à 800 millions d'euros en 2019. L'idée n'est pas de modifier le régime de propriété de ces réserves. Les relations financières avec le régime général resteront les mêmes. J'ajoute que, comme Nicolas Turquois l'a dit, ce régime compte beaucoup de polypensionnés. La durée moyenne de cotisation y est de dix ans, d'après les responsables de la caisse que nous avons auditionnés. Ce qui est prévu est aussi une mesure de simplification.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques AS883 de M. Jérôme Guedj, AS3792 de M. Pierre Dharréville, AS4781 de Mme Mathilde Panot, AS4818 de M. François Ruffin, AS4822 de Mme Rachel Keke, AS4829 de M. Hadrien Clouet, AS6560 de Mme Laure Lavalette et AS6929 de Mme Sabrina Sebaihi.

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Nous en arrivons au régime qui, avec celui de la RATP, motive réellement votre réforme : celui des industries électriques et gazières, dont ni l'histoire ni la situation ne justifient l'abolition. Les autres caisses supprimées ne le sont que pour le décor.

Il ne coûte rien à l'État : il ne bénéficie pas d'un euro de subventions. Le surcoût lié à la situation démographique est directement compensé, depuis l'adossement au régime général, par les employeurs. Par ailleurs, ce régime spécial tient compte des situations de pénibilité. En la matière, nous souhaitons qu'on aille plutôt vers un alignement par le haut.

Quand ce régime spécial a été créé, en 1945, c'était d'une certaine manière dans l'attente, légitime, que le régime général, alors en cours de création, améliorerait encore ses prestations. Cela n'a pas été le cas. Vous nous proposez de nouveau de niveler vers le bas un régime qui n'a pas de problème financier mais qui est marqué par des enjeux de pénibilité qui justifient son maintien en l'état.

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Le régime des électriciens et gaziers est profondément lié à l'importance que notre pays accordait, durant la reconstruction, à la question énergétique et à la volonté de bâtir des entreprises publiques puissantes capables de relever les défis. Ce régime s'est consolidé au fil du temps pour garantir aux électriciens et aux gaziers un haut niveau de droits, correspondant à ce qu'ils donnent dans leur travail au cours de leur carrière.

Cette caisse est excédentaire. Elle a largement contribué à alimenter les comptes du régime général ces dernières années. On ne peut pas faire à ce régime le procès d'être tourné vers lui-même et de refuser la solidarité : c'est l'inverse qui est vrai, même si on ne lui a pas toujours demandé son avis. Les électriciens et les gaziers cotisent à un niveau supérieur et se constituent mutuellement des droits à la retraite correspondant à leur situation. C'est un modèle vers lequel il faudrait se tourner. Il ne s'agit pas, à nos yeux, de régimes spéciaux mais pionniers. Nous sommes attachés à la défense de ces conquis sociaux, comme disait Ambroise Croizat. C'est pourquoi nous demandons la suppression des alinéas 9 à 11.

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Je défends l'amendement AS4781. Par le système du service actif, le régime des industries électriques et gazières prend en compte les métiers dont la pénibilité est importante. Beaucoup a déjà été dit à ce sujet, mais nous n'arrivons décidément pas à voir en quoi la suppression de ce régime spécial répondrait à un objectif de justice et d'équité. La justice consisterait, au contraire, à permettre aux salariés qui en sont privés de bénéficier des droits en vigueur en son sein.

Il y a par ailleurs une aberration, déjà évoquée : le régime des industries électriques et gazières est largement excédentaire. Il a notamment servi à financer le régime des agriculteurs et des artisans. Contrairement à ce que disait tout à l'heure Marc Ferracci, c'est un argument, surtout quand on passe son temps à dire, pour se justifier, que l'argent manque.

Enfin, en fermant le régime spécial des industries électriques et gazières pour les nouveaux entrants tout en maintenant, et c'est heureux, le même niveau de dépenses pour les personnels déjà affiliés, vous lui ferez perdre 100 millions d'euros. Bref, vous le sabotez pour mieux justifier ce qui est votre but réel : baisser les pensions. C'est une réforme pour payer moins.

Il serait bon d'entendre les personnels de ces secteurs, notamment les salariés d'EDF, qui étaient très massivement en grève le 19 janvier dernier. Ils le referont demain, j'en suis sûr, et probablement encore les jours suivants.

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« J'ai été appelé chez moi à une heure du matin, dans mon lit, et je ne suis rentré qu'à neuf heures. Chez moi, ça inquiète la famille, ça inquiète tout le monde, et c'est nous qui sommes sur le terrain. » C'est un gazier, Farid, qui m'expliquait cela. Il m'a parlé de son logement d'astreinte, de ses permanences et de son augmentation salariale de 0,3 % cette année.

Quel mal faites-vous, en permanence, au service public ! Regardez l'état de notre pays. À l'hôpital, on peut attendre quarante-quatre heures dans un couloir. On recrute des enseignants dans des rendez-vous de l'emploi. Les trains ne circulent plus. Vous avez éliminé le régime spécial du rail alors qu'il manque des milliers de conducteurs. Dans ma région, des trains ne circulent pas faute de conducteur. Voulez-vous que ce soit la même chose pour le gaz et l'électricité ? En arrêtant de peser sur le travail, de faire en sorte qu'il ne soit pas rémunéré comme il faut, en indexant les salaires non sur l'inflation mais sur les dividendes, par exemple, on aurait sans difficulté du monde dans tous ces secteurs.

Vous êtes en train d'éroder, un par un, les piliers de notre pays – celui de la République, l'école ; celui de l'État social, l'hôpital. On voit leur état après cinq ans de vos bons et déloyaux services à leur égard. La même chose risque de se produire dans le domaine de l'électricité : vous nous direz dans quelques années qu'on n'arrive pas à recruter ! Ce sera normal : les astreintes, les salaires faibles, cela se compense.

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Nous souhaitons, par nos amendements, que le régime spécial des industries électriques et gazières soit maintenu. Les régimes spéciaux ne sont pas des privilèges, mais le résultat de luttes livrées pour faire reconnaître la pénibilité de métiers essentiels pour la société. Le Gouvernement parle de privilèges, mais de quoi s'agit-il ? D'avoir des horaires de travail décalés, de jour comme de nuit, de travailler les jours fériés ou les fins de semaine !

Le Gouvernement cherche à niveler par le bas, à prendre à ceux qui galèrent le peu qu'ils ont conquis par leurs luttes. Ce qu'il veut généraliser, c'est la pénibilité, qu'il ne reconnaît pas. Les principaux syndicats représentatifs des branches concernées sont contre la suppression des régimes spéciaux. Mais le Gouvernement refuse de les écouter, par mépris, comme d'habitude. Il est bien sûr possible de maintenir ces régimes : c'est une question de choix politique, de choix de société. Les régimes des véritables privilégiés n'ont pas été touchés. Faisons le choix du bon sens en supprimant les alinéas 9 à 11 !

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Mon amendement vise aussi à préserver les caisses de retraite mises sur la sellette. Elles élargissent l'horizon du monde du travail : le principe des caisses de retraite spécifiques, des régimes pionniers, c'est d'inventer des manières de se protéger, de mutualiser l'argent, de tester des choses qui peuvent ensuite inspirer le régime général.

En l'occurrence, il n'est question que de quelques milliers d'agents d'exploitation, de personnes qui ont des horaires décalés, qui travaillent la nuit et le dimanche, qui sont d'astreinte, qui subissent une usure physique, qui sont responsables de la sécurité des autres et qui, une fois à la retraite, continuent souvent de travailler – un électricien va généralement s'occuper des pannes dans le voisinage, exercer ainsi son activité avec pour seul salaire sa pension de retraite.

Vous oubliez que la possibilité du départ anticipé va souvent de pair avec une pension incomplète. Il y a non seulement des corps usés et abîmés, mais aussi un manque d'années de service actif et donc une pension réduite. À ce sujet, on ne sait pas la part réelle des départs à 57 ans. Tout le monde en parle mais il n'existe pas de chiffres. On ne sait pas non plus combien ces régimes ont reversé à la caisse du régime général puisque, depuis 1974, la compensation vieillesse généralisée fait que ces régimes spéciaux contribuent au régime général. Combien ont-ils apporté ou, en d'autres termes, combien leur doit-on ?

Vous vous en prenez à ces régimes spéciaux dans la continuité de votre offensive contre la pénibilité au travail. Vous avez supprimé quatre facteurs de pénibilité : les charges lourdes, les agents chimiques dangereux, les vibrations mécaniques et les postures pénibles. Apparemment, pour la majorité, le marteau-piqueur est bon pour la santé... Au lieu de supprimer des régimes de compensation de la pénibilité, il faut plus que jamais les étendre à l'ensemble des agents d'exploitation des industries lourdes, des industries électriques et gazières, ainsi que des transports en commun, de Paris à Vierzon en passant par Toulouse. Pour notre part, nous n'oublions pas que nous devons nous inspirer des régimes pionniers.

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Parmi les trois régimes spéciaux que nous souhaitons conserver, celui de la branche professionnelle des industries électriques et gazières revêt une signification particulière. Les entreprises qui exercent en France des activités de production, de transport, de distribution, de commercialisation et de fourniture d'électricité et de gaz font face à de fortes disparités en matière de salaires comme de prix. Le régime spécial permet de gommer les inégalités induites par les différences de rémunération, mais aussi de prendre en compte la pénibilité du travail de ceux qui occupent les postes en service insalubre.

La conjoncture nous appelle également à faire preuve de retenue quant au statut des près de 136 000 futurs actifs rattachés à la branche. N'ajoutons pas à la crise matérielle de l'énergie, grande oubliée d'Emmanuel Macron ces six ou sept dernières années, une crise des ressources humaines.

Si le Gouvernement compte sur la suppression de ce régime pour faire baisser la contribution tarifaire d'acheminement, nous avons une idée pour vous : nous suggérons plutôt d'agir sur la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques et la taxe sur la valeur ajoutée, comme nous le demandons depuis de nombreuses années.

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Je défends l'amendement AS6929. Les infrastructures, particulièrement de gaz et d'électricité, vieillissent. Les métiers se transforment, notamment avec le développement du travail en grande hauteur. Vous voulez à tout prix développer le nucléaire, ce à quoi nous nous opposons. C'est le moment que vous choisissez pour changer les conditions du métier et de l'accès à la retraite, tout en aggravant les conditions de travail.

Ce régime est un conquis social essentiel, qui récompense l'exercice d'une mission de service public. Ces agents sont disponibles en tout lieu et en toute heure, comme on l'a vu pendant l'épidémie. Ils étaient en première ligne quand il a fallu, lors des confinements, tenir les infrastructures. Il n'y a aucune espèce de raison, conjoncturelle ou structurelle, de changer ce régime de retraite. Nous nous honorerions en le gardant.

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L'âge moyen de départ des agents des industries électriques et gazières est de 60 ans, deux ans de moins que dans le régime général. Toutefois, rien n'indique que l'âge effectif sera de 62 ans en 2024 : ce sera seulement le moment de l'application aux salariés des industries électriques et gazières de la montée en charge de l'augmentation de l'âge légal.

S'agissant de la situation financière, l'équilibre de ce régime repose sur un mécanisme d'adossement qui conduit à distinguer deux catégories de droits : les droits équivalents au droit commun des salariés, qui font l'objet de l'adossement au régime général, et les droits dits spécifiques, propres au régime spécial. Ces derniers sont financés, notamment pour ce qui concerne les activités d'acheminement d'énergie, par une contribution tarifaire spécifique payée par les clients pour financer les droits acquis avant 2005, et par une cotisation des entreprises pour ceux acquis après l'adossement au régime général. Ce n'est que grâce à ce mécanisme, qui repose sur une taxe affectée, que le régime est équilibré.

Vous êtes revenus sur la pénibilité. Nous en avons déjà débattu ce matin et nous le ferons de nouveau lors de l'examen de l'article 9. Nous renforcerons grâce à ce texte les mesures qui la prennent en compte.

Monsieur Ruffin, vous attribuez toute la misère de notre société à la fin de ce régime spécial. Il est difficile de vous suivre sur ce terrain. Personne ne nie qu'il y a une question d'attractivité à la RATP, mais elle existe alors que le régime spécial s'applique.

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Lors de la réforme de 2004, on a découpé le régime de retraite des électriciens et gaziers en trois, et non en deux : le régime de base, c'est-à-dire le régime général, le régime complémentaire, et enfin le régime chapeau financé par un impôt, un élément de la contribution au service public de l'électricité, que chacun retrouve sur ses factures.

Quelle est donc la portée de ces alinéas ? Est-ce le régime chapeau qui disparaît pour les nouvelles recrues des industries électriques et gazières, l'adossement au régime général et les complémentaires étant maintenus ?

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Selon les derniers chiffres dont on dispose, ceux de l'année 2021, 6 milliards d'euros de pensions sont versés chaque année. Personne n'en parle, mais il a fallu mettre en place en 2005 la contribution tarifaire d'acheminement, qui représente 2 milliards d'euros à l'heure actuelle. Par qui cette contribution est-elle payée ? Par tous les foyers utilisant l'électricité. Ce régime n'est équilibré qu'ainsi : les contributions des salariés ne couvrent que 68 % des pensions versées. Par ailleurs, ces salariés bénéficient d'avantages tarifaires substantiels, accordés jadis. La contribution tarifaire d'acheminement sera-t-elle supprimée lorsque le régime spécial n'existera plus ? Sinon, l'ensemble des usagers continuera à être pénalisé.

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François Ruffin a raison : vous n'aimez pas l'école et vous y avez inoculé le virus de la rage. Vous n'aimez pas l'hôpital et vous avez inoculé les règles comptables qui l'ont abîmé. Vous n'aimez pas les agents du service public et vous vous apprêtez à leur inoculer, à eux aussi et à coups de grosses seringues, le virus de la rage. Vous oubliez une chose : contrairement à ce qu'a dit Philippe Vigier, le régime des industries électriques et gazières est excédentaire. La contribution tarifaire d'acheminement se traduit par 800 millions d'euros, cumulés sur le dos des usagers et ponctionnés par l'État.

Trois paires de réacteurs de type EPR seront construites, une fois le débat public terminé. Nous avons besoin de robinetiers, de chaudronniers soudeurs, d'agents de conduite, d'agents de maintenance ! Pour la corrosion sous contrainte dans nos centrales, on doit faire appel à des soudeurs des États-Unis ! Nous avons un problème de recrutement, donc d'attractivité. Pour notre part, nous proposons d'élargir aux nomades du nucléaire le statut des électriciens gaziers. Vous, vous choisissez ce moment-là pour répandre la rage en mettant ce statut en cause. Si on vous coupe le courant deux ou trois heures dans vos permanences, je ne veux pas vous entendre pleurer !

(Exclamations.)

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Si on toque à votre porte pour vous expliquer en quoi cette réforme est mauvaise, ne venez pas pleurer non plus ! J'invite l'ensemble des salariés qui en sont les victimes à discuter avec les parlementaires, dans les permanences, pour expliquer ce qui se passe, dans une forme de démocratie sociale dynamique, interactive, les yeux dans les yeux. Ne pas avoir de courant deux heures par jour, quand on le coupe aux précaires de l'énergie, ce n'est pas la mer à boire !

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Pas de provocation ! Je suis obligée de vous rappeler à un minimum de discipline. C'est insupportable, vraiment ! Vous faites la leçon, vous nous dites que nous n'aimons pas le service public, vous faites questions et les réponses. Arrêtez cela !

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Il faut faire confiance à l'avenir. Nous ne sommes pas là pour parler des salaires ou de l'attractivité de certains métiers par rapport à d'autres, mais des régimes spéciaux. À leur création, ils permettaient de reconnaître la pénibilité de certains métiers, mais on ne peut pas dire que ce soit toujours le cas. Des évolutions, des améliorations ont eu lieu, que vous le reconnaissiez ou non.

Comme François Ruffin, j'ai déposé des amendements déclarés irrecevables. J'admets que le PLFRSS n'était pas forcément le bon véhicule législatif. Nous proposons un traitement individuel des situations, au moyen de visites médicales à 45 et 61 ans, étant entendu que quatre Français sur dix partiront de toute manière à 62 ans. Avec ce système, ma mère, couturière presque toute sa carrière avant de terminer femme de ménage, serait partie à la retraite à 61 ans plutôt qu'à 64 ans, ce qu'elle a dû faire pour avoir une retraite à taux plein.

En ce qui concerne le régime des électriciens et gaziers, dès lors que 1,6 milliard d'euros lui sont affectés chaque année, vous ne pouvez pas soutenir qu'il est excédentaire.

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Il faut parler des salaires car ce sont eux qui permettent de financer le système de retraite. Quand on n'augmente pas les salaires, on n'augmente pas les cotisations.

J'apporte tout mon soutien aux électriciens et aux gaziers qui, pour combattre votre réforme des retraites, sont en train de rétablir le courant aux familles à qui on l'a coupé – 300 000 personnes dans notre pays. Ils basculent en heures creuses, notamment à Marseille, les boulangers étranglés par la hausse du prix de l'énergie.

Mes collègues ont expliqué les effets sur le service public de la suppression du régime pionnier des industries électriques et gazières. On sait bien ce qui va se passer puisque les travailleurs des sous-traitants du nucléaire ne bénéficient pas de ce statut. Pourtant, ils accomplissent 80 % de la maintenance nucléaire et ils reçoivent 80 % de la dose radioactive. Je rappelle, à ce sujet, que les rayonnements ionisants ne font pas partie des critères de pénibilité... Un employé, Patrice Girardier, a dit en 2016 : « nous, les sous-traitants [...] , étions de la chair à canon ». Il a lui-même développé un cancer de la thyroïde, non reconnu en tant que maladie professionnelle, et il a été licencié parce qu'Orano a considéré impossible de le recaser.

On sait donc ce qui se passe pour les personnes qui ne bénéficient pas du statut des industries électriques et gazières, outre les questions de sûreté et de sécurité nucléaires que cela soulève. Comme le disent les sous-traitants du nucléaire de Romans-sur-Isère, où l'on assemble le combustible, ils ne font pourtant pas de la raviole ! Cela donne des gens qui devront travailler longtemps, avec de mauvaises conditions et de mauvaises paies. L'un d'eux, après trente-neuf ans dans le nucléaire, m'a indiqué être payé 1 300 euros par mois, avec quelques primes. Au lieu de supprimer le régime des industries électriques et gazières, il faut au contraire l'élargir.

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Je voudrais confronter aux faits les propos tenus à l'instant. Vous dites, madame Berete, que nous ne sommes pas là pour parler des salaires. Or, si vous menez une réforme des retraites, c'est parce que vous avez prévu de geler les salaires des fonctionnaires, donc leurs cotisations, ce qui mettra en péril le financement du système.

Vous nous dites aussi qu'un régime spécial n'est pas nécessaire pour les travailleurs des industries électriques et gazières parce que la manière de travailler a changé. Quand vous aurez grimpé sur des poteaux dans la nuit en pleine tempête, vous nous expliquerez en quoi consiste le changement par rapport à dix ans auparavant. Quand vous vous serez occupée d'un réseau d'électricité en montagne, quand vous serez allée dans des conduites réparer des fuites, vous pourrez en parler. Pardon, madame Berete : la pénibilité est réelle dans ces métiers. Vous ne pouvez pas vous contenter d'un « circulez, il n'y a rien à voir ». Si, il faut aller voir ce qui se passe sur le terrain, y compris dans les industries nucléaires. Ces travailleurs, qui sont littéralement sous pression, ont besoin de nous.

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Monsieur Jumel, tout ce qui est excessif est insignifiant. J'étais d'accord avec vous jusqu'à ce que vous prêchiez les coupures d'électricité. Il est incroyable d'appeler, en tant que législateur, à bafouer la loi.

La majorité, qui souhaite relancer le nucléaire, doit appeler à la rescousse, face aux difficultés actuelles, des soudeurs canadiens et américains pour sauver ce secteur. Je tiens à lui dire qu'elle ne peut pas, en même temps, refuser qu'il y ait quelque chose qui attire les soudeurs. Ils ne s'enrôleront pas uniquement pour faire plaisir à Emmanuel Macron, mais parce qu'ils y trouveront un intérêt, un système qui les protège.

Le Rassemblement national soutient ce régime spécial. Pour autant, il n'appelle pas à faire du chantage, à exercer une pression sur les élus. C'est antidémocratique et cela donne une image déplorable aux électeurs qui nous ont fait confiance et aux jeunes gens. Je vous invite, monsieur Jumel, à retirer vos propos sur ce point.

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Je soutiens les propos de Mathilde Panot et de Sébastien Jumel. Les salariés du nucléaire sont un bon exemple, qui illustre bien ce qui nous oppose. Vous parlez de mesures individuelles, de visites médicales, certes importantes ; nous parlons de protections collectives. On connaît la dureté de ces métiers, on sait que les conditions auxquelles les gens sont soumis vont les amener à subir, soit pendant soit après leur carrière, des problèmes de santé. C'est de l'avenir de ces personnes et de leur capacité à profiter de leur retraite que nous sommes en train de parler.

Notre désaccord vient du fait que nous n'avons, pour notre part, pas besoin qu'un médecin examine une personne à 55 ans ou même à 45 ans, pour savoir que porter des charges lourdes toute sa vie procure des problèmes de dos à la retraite, et qu'être exposé à des produits toxiques génère des problèmes de santé. Nous avons besoin de protections collectives. C'est pour cette raison que nous défendons les régimes spéciaux et un système de retraite juste.

Ce n'est pas la première réforme des retraites, même si vos prédécesseurs n'avaient pas eu besoin de stratagèmes tels qu'un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. L'âge de départ à la retraite a augmenté de plus d'un an et neuf mois depuis 2010. Plus d'un quart de cette hausse s'explique par la diminution des départs à la retraite avant 60 ans : ce sont donc principalement les gens qui ont commencé le travail très tôt qui travaillent plus longtemps. C'est la logique que vous voulez poursuivre avec votre réforme, que ce soit par l'augmentation de l'âge légal de départ à la retraite ou par la fin des régimes spéciaux. Nous soutenons, pour notre part, les amendements préservant l'ensemble de ces régimes.

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La suppression de ce régime spécial pose des problèmes techniques. La Caisse nationale des industries électriques et gazières gère le risque vieillesse mais aussi les risques accidents du travail, maladies professionnelles, invalidité et décès, qui font eux aussi appel à des notions de pénibilité et de prévention. Comment circulera l'information, sachant qu'il faudra continuer à ouvrir des droits dans ces branches et qu'il faut aussi tenir compte de l'existence, à proximité immédiate, de la Caisse d'assurance maladie des industries électriques et gazières (CAMIEG) ?

D'ailleurs, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 avait transféré une partie des excédents de la section des actifs de la caisse d'assurance maladie des industries électriques et gazières vers la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, déficitaire. La CAMIEG devait s'équilibrer avec une augmentation du niveau des prestations versées et une baisse des cotisations des actifs. Que deviendra cette mesure ? Le système d'information de la Caisse nationale d'assurance vieillesse ouvrira-t-il encore des droits sur l'assurance maladie de la CAMIEG ? Comment les caisses fonctionneront-elles ensemble ? Enfin, votre mesure, censée ne concerner que les nouveaux entrants, s'appliquera-t-elle aux apprentis ?

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Monsieur Bazin, le système reste le même pour les autres branches de cette caisse. Les relations qu'elle entretient déjà avec le régime général ne changent pas.

Monsieur de Courson, le stock reste en droit commun et en droit spécifique. Les nouveaux entrants relèveront du régime général.

Monsieur Vigier, la contribution tarifaire d'acheminement s'éteindra progressivement à mesure que disparaîtront les droits ouverts avant 2004.

Madame Panot, monsieur Delaporte, parlons des salaires, en effet ! Nous avons commencé ce matin en abordant la situation des fonctionnaires. Le sujet est important dans une réforme des retraites. Nous avons tout intérêt à ce que les salaires augmentent puisque la masse salariale représente 75 % des ressources du système des retraites. En 2018, la masse salariale augmentait de 3,5 % tandis que l'inflation se montait à 1,6 %. En 2022, elle augmentait de 8,6 % alors que l'inflation atteignait 5,4 %.

Madame Chatelain, ce texte ne prévoit pas seulement des mesures individuelles. Au-delà des visites de suivi, essentielles pour contrôler l'évolution des troubles musculo-squelettiques (TMS) et préconiser des mesures préventives afin d'atténuer les conséquences de l'exercice de métiers dont la pénibilité est reconnue, des mesures collectives figurent dans le projet de loi. Je pense au rôle dévolu aux branches pour identifier les métiers exposés aux risques. Elles pourront s'appuyer sur le futur fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle, que le Gouvernement entend doter de 1 milliard d'euros.

La commission rejette les amendements.

Amendements AS829, AS828, AS827, AS826, AS825, AS824, AS823, AS822, AS821, AS820, AS819, AS818, AS817, AS816, AS815, AS814, AS813, AS812, AS811, AS810, AS809, AS806 et AS805 de M. Jérôme Guedj (discussion commune).

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Je défends les amendements AS829 à AS817. Puisque vous ne voulez pas maintenir le régime spécial de retraite des industries électriques et gazières, nous proposons de repousser l'échéance de cette mort annoncée.

J'en profite pour rappeler que la contribution tarifaire d'acheminement du gaz n'est pas une subvention. Elle ne vient pas en sus des financements par les entreprises : elle en remplace une partie. Les entreprises ayant moins de charges, leurs tarifs baissent. Le montant total de la facture ne change pas pour les usagers mais la part des taxes et contributions sera plus importante tandis que le tarif aura baissé. Je ne veux pas qu'on laisse croire, quand je dis que ce régime est à l'équilibre sans subvention, que la contribution tarifaire d'acheminement serait une subvention déguisée. Au contraire, j'insiste sur la pertinence de ce régime spécial, qui a déjà connu bon nombre de réformes : celle des régimes spéciaux en 2008, la réforme Woerth en 2010 ou encore la réforme Touraine en 2014. Le régime s'est suffisamment rapproché du régime général pour qu'il ne soit pas nécessaire d'aller plus loin.

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Je défends les amendements AS816 à AS805. Vous ne pouvez pas dire, madame la rapporteure générale, que le problème des salaires serait compensé par une évolution de la masse salariale. La hausse de la masse salariale résulte de la démographie, notamment de celle de l'emploi. Ce n'est pas parce que le taux de l'inflation est de 3 % et que la masse salariale augmente de 8 % que les salaires progressent. Les salaires ne suivent pas l'inflation. Le niveau des salaires et l'évolution des cotisations de chaque salarié ne permettent pas un système de retraite décent. En gelant l'évolution des salaires, vous avez altéré le financement du système jusqu'à en menacer l'équilibre, puisque vous avez réduit les cotisations patronales. Je me suis permis de corriger votre propos car nous devons raisonner avec rigueur pour préserver les droits des salariés.

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Monsieur Guedj, avis défavorable à une date d'extinction des régimes spéciaux incertaine.

Monsieur Delaporte a raison : il faut être précis. Le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale, duquel proviennent les chiffres que j'ai cités, montre que les salaires tirent la masse salariale vers le haut. Les salaires ont ainsi augmenté de 1,9 % en 2018 et de 5,3 % en 2022.

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En 1946, alors que l'ensemble des industries électriques et gazières avaient largement collaboré, Marcel Paul a nationalisé, après les avoir regroupés, les producteurs d'électricité et de gaz. L'ensemble des salariés ont ensuite participé à la construction des infrastructures de transport de l'énergie, payant un lourd tribut en vies humaines à cause des nombreux accidents du travail qui furent à déplorer. Votre contre-réforme abolit l'héritage du monde du travail alors que vous sacralisez l'héritage des rentiers avec complaisance. Nous aimerions tant que vous dénonciez l'absence de pénibilité pour les héritiers de la finance, enrichis par leur monopole et la spéculation de crise ! Ne vous en prenez pas aux conquêtes sociales, rétablissez un peu de justice sociale en mettant à contribution la boursouflure financière de notre pays ! Stoppez votre fanatisme à déshériter les travailleurs et les classes populaires ! Nous invitons tous les électriciens et les gaziers à défendre leur héritage légitime. Notre groupe sera à leurs côtés pour protéger ce secteur à qui nous devons tant.

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Je voudrais revenir sur les propos de Sébastien Jumel tout à l'heure, que je prends comme une forme de menace contre nos permanences et nos collaborateurs. (Exclamations.) Nous nous engageons, forts de nos convictions. Elles ont beau être très différentes, la menace physique, quelle qu'elle soit, reste condamnable. Ces méthodes sont inacceptables.

S'agissant de l'amendement, le régime spécial de retraite des industries électriques et gazières est excédentaire. Les régimes excédentaires sont plutôt ceux dont les professions connaissent une croissance démographique car ils comptent davantage d'actifs que de retraités, contrairement aux régimes déficitaires. Ainsi, si le régime de retraite des agriculteurs était excédentaire dans les années 1960 parce que la France comptait de nombreux agriculteurs, ce n'est plus le cas aujourd'hui. Les industries électriques et gazières se trouvent dans une situation contraire, ce qui permet de comprendre l'intérêt à ne plus disposer que d'un seul régime de retraite pour les salariés : les démographies des métiers évoluent et on ne peut pas affirmer ce que seront les métiers de demain.

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Je me faisais la réflexion, en lisant les dates d'extinction du régime spécial prévues par les amendements, que même si ce régime est fermé aux nouveaux entrants, il perdurera bien au-delà du 1er janvier 2050. Vous m'aviez confié ainsi qu'à une collègue, madame la présidente, une mission « flash » sur le régime de régime de sécurité sociale des mines, fermé aux nouveaux entrants depuis 2011 : il y aura sans doute des ayants droit jusqu'en 2100 !

Cela pose la question de la transition. Celle qui suivra la suppression des régimes spéciaux sera longue et délicate, d'autant qu'ils ne gèrent pas seulement le risque vieillesse mais également les accidents du travail et les maladies professionnelles. En les fermant, on prend le risque, comme cela s'est déjà produit, de négliger les spécificités de ces régimes et des emplois qui y sont liés tandis que les salariés perdront le bénéfice d'un guichet unique, ce qui dégradera la qualité de leur suivi. Ne pourriez-vous vous engager à tirer les leçons des erreurs du passé, notamment lors de la période de transition, pour garantir un bon suivi et assurer une meilleure prévention ?

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J'ai senti que mon propos de tout à l'heure avait perturbé la commission, aussi vais-je préciser ma pensée. Certaines choses m'empêchent de dormir, d'autres moins. Lorsqu'on coupe le courant chez des gens qui n'ont plus les moyens de faire face aux dépenses d'énergie, cela m'empêche de dormir. Lorsque les boulangers, chez moi, font face à une explosion du coût de l'énergie, cela m'empêche de dormir. Lorsque des industries, chez moi, sont fragilisées parce que vous êtes incapables de prendre soin de l'économie réelle en régulant les tarifs de l'énergie, cela m'empêche de dormir. Je vous confirme que je suis moins empêché de dormir à l'idée de savoir que ceux qui portent des manteaux de fourrure pourraient être privés de deux ou trois heures de courant dans la journée. (Vives exclamations).

Enfin, soyons objectifs : s'il y a grève, la production baissera et il faudra choisir entre chauffer l'hôpital, les Ehpad ou nos permanences. Je préfère qu'on redonne de la lumière aux hôpitaux et aux Ehpad plutôt qu'à nos permanences. J'assume mes propos.

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Ces débats auront au moins eu le mérite de révéler vos incohérences, au premier rang desquelles celles de Sébastien Jumel. Cela ne vous a pas empêché de dormir de ne pas voter notre proposition de loi visant à inciter les entreprises à augmenter les salaires nets de 10 %, de ne pas voter nos amendements de taxation des superprofits et de faire élire Laure Miller qui votera des deux mains cette réforme à laquelle vous faites mine de vous opposer en déposant une myriade d'amendements !

(Exclamations)

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Les propos de Sébastien Jumel sont inutilement provocateurs et scandaleux. La NUPES s'offusque des propos de Gérald Darmanin mais on voit là ce qu'elle est capable de faire : chauffer à blanc l'opinion publique, appeler à couper l'électricité dans les permanences. Ce sont nos salariés, nos collaborateurs qui travaillent dans les permanences ! Est-ce cela que vous voulez ? Pouvons-nous admettre que vous transformiez l'Assemblée nationale en « zone à défendre » (ZAD) ? C'est inadmissible !

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS3793 de M. Yannick Monnet.

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Nous sommes opposés à la suppression des régimes spéciaux. La Première ministre en a fait un principe d'équité. C'est confondre équité et égalité. L'égalité, c'est donner la même chose à tout le monde. L'équité, c'est donner à chacun en fonction de ses spécificités. L'équité est un principe de justice distributive alors que l'égalité est un principe de justice commutative, enseigne Aristote. Certains métiers, plus pénibles que d'autres, ont des caractéristiques qui justifient des régimes spéciaux, qui étaient précurseurs d'une juste appréhension du travail et de ses effets sur les travailleurs. Ce que vous présentez comme une avancée n'est qu'un recul des droits sociaux. Seuls les régimes spéciaux permettent de compenser la pénibilité en proposant l'unique solution qui vaille : un départ anticipé. La comparaison avec le régime général, dont les droits collectifs à la reconnaissance et à la compensation de la pénibilité ont été réduits jusqu'à l'insignifiance, n'est pas sérieuse. Au contraire, ces régimes spéciaux devraient nous inspirer. Leur histoire est celle d'une conquête sociale, liée au besoin de développement du pays, à la nécessité de fidéliser et de qualifier ses salariés. On ne dit pas autre chose aujourd'hui quand on parle de redonner du sens au travail, de rémunérer correctement les emplois, de reconnaître les qualifications. Non à la suppression des régimes spéciaux, car elle représente un nivellement par le bas des droits de tous !

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Les alinéas que vous proposez de supprimer sont rédactionnels. Il s'agit d'éliminer la référence à des articles qui n'existent plus.

Avis défavorable.

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Madame la rapporteure générale, vous disiez tout à l'heure que je parlais des misères de notre société. En fait, je parlais de ceux qui ont tenu le pays debout pendant la crise sanitaire, et qui continuent. Qu'attendait-on après pareille crise ? Une loi de valorisation du travail, de reconnaissance du travail, de rémunération du travail, où l'on parle salaire mais pas seulement. À la place, il y a une loi de punition, composée de trimestres, d'années supplémentaires qu'il faudra supporter pour aller jusqu'au bout alors que bien souvent l'inaptitude précède l'âge de la retraite.

Ce faisant, vous instillez dans la société le dégoût du travail quand il n'est ni reconnu ni rémunéré – ce qui explique d'ailleurs les difficultés à recruter dans de nombreux secteurs – et vous instillez le dégoût de la démocratie. Quand sept Français sur dix disent non, huit salariés sur dix disent non, des millions de Français descendent dans la rue pour dire non, tous les syndicats unis disent non, vous faites comme si de rien n'était et vous continuez votre petit bonhomme de chemin. En cela, vous introduisez de la tension dans la société. Le problème se délitera en ressentiment. Vous en êtes la cause par votre surdité. Le Président de la République a évoqué à six reprises l'unité de la nation dans ses vœux. Mais c'est lui, avec vous, qui a brisé l'unité de la nation en proposant une loi de cette nature à ce moment de notre histoire, où l'on aurait au contraire eu besoin d'une grande loi de réconciliation avec le travail.

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Depuis ce matin, une petite musique me gêne : il y aurait dans la salle les députés du peuple et ceux du grand capital. Nous sommes tous les députés de la nation et j'aimerais que les débats portent sur le fond. Hier soir, à l'occasion d'une rencontre citoyenne, j'ai discuté de la réforme des retraites avec des militants de la NUPES et des membres issus du mouvement des gilets jaunes. Je vous assure que les débats étaient beaucoup plus précis et constructifs.

Nous réformons les régimes spéciaux par équité. Nous sommes tous attachés à ce que les retraites financent les retraites et la solidarité nationale, la solidarité nationale. Or aujourd'hui, 11 milliards d'euros des impôts des Français compensent des régimes spéciaux, en plus des 30 milliards d'euros de compensation des régimes publics. Enfin, avec la clause du grand-père, personne ne sera pris en traître ; le contrat des salariés embauchés restera bel et bien respecté.

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Je propose un régime spécial pour les commerçants et les artisans, dont la NUPES ne parle jamais. Ces gens ont commencé tôt ; ils travaillent dur, sept jours sur sept ; ils ont cotisé pour tout le monde et notamment pour les fonctionnaires.

Il n'y a plus de raison de maintenir les régimes spéciaux, c'est une question d'équité. Les Français ne supportent plus que les salariés soumis aux mêmes types d'activité et subissant la même pénibilité ne bénéficient pas des mêmes conditions de départ à la retraite. Ou bien, il faut créer un régime spécial pour chaque métier.

Monsieur Ruffin, je suis d'accord : la nation doit être unie et réconciliée autour du travail. Mais je voudrais dénoncer la lourde responsabilité de la gauche dans la dévalorisation et le dévoiement du rapport des Français au travail. En imposant les trente-cinq heures, vous avez abîmé le lien des Français avec le travail au point qu'ils ne le perçoivent plus comme source d'épanouissement et qu'ils oublient qu'il a fait la grandeur de notre pays. Vos propos m'inquiètent car vous persistez à tenir ce discours qui affaiblit le pays en faisant croire aux Français qu'ils pourraient profiter de la même solidarité nationale et obtenir les mêmes droits, qu'ils travaillent ou non.

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Seconde confrontation aux faits de propos tenus à l'instant : Émilie Bonnivard a réussi à accumuler en deux minutes de nombreux poncifs, qui ne font que détourner notre attention du fond. C'est vrai, il n'y a pas d'un côté les députés du peuple et de l'autre ceux du grand capital ; sortons de ces accusations caricaturales. En revanche, les défenseurs des travailleurs ne peuvent que s'opposer à cette réforme pour que les salariés puissent continuer à exercer leur métier longtemps, en bonne santé, avant de profiter des fruits de leur travail. Les trente-cinq heures, loin de détruire la valeur du travail, en ont fait un vecteur d'émancipation, pour que les travailleurs restent des êtres libres et puissent profiter de loisirs. Quand on gagne de l'argent et qu'on se tient à un nombre maximal d'heures, on gagne aussi le temps de se reposer. La retraite est un droit ouvert par le travail, qui lui donne de la valeur. Je ne comprends pas cette philosophie selon laquelle le travail serait un absolu dans la vie. Ce raisonnement conduit aux pires horreurs et à l'exploitation.

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Ça y est ! Nous voilà esclavagistes maintenant !

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Le travail, c'est vrai, peut être émancipateur, mais à plusieurs conditions. Tout d'abord, il faut respecter les salariés, en particulier leurs conditions de travail et leur santé, grâce à des politiques de prévention. Or, vous avez nui à la santé des travailleurs en supprimant les comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Le travail est émancipateur s'il a un sens et que le salarié sait pourquoi il se lève le matin. En mettant à mal les services publics, en leur assénant qu'ils pouvaient faire mieux avec moins, vous avez abîmé le sens du travail pour bon nombre de fonctionnaires. Le travail est émancipateur quand on a les moyens de faire de la belle ouvrage. Or, l'intensification du travail et l'absence d'autonomie des salariés ont amoindri cette capacité d'émancipation.

Alors que le travail est de moins en moins émancipateur, vous mettez la santé des salariés en danger. C'est pourquoi nous nous opposerons fermement à votre volonté de prolonger la durée du travail, contraire à nos convictions. Nous défendons le partage du temps de travail pour qu'il soit émancipateur, qu'il permette à tous d'avoir une vie familiale et personnelle, et de prendre le temps de se cultiver, de se divertir, d'échanger, de militer, et demain de manifester !

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS3802 de M. Pierre Dharréville.

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Les crises successives que nous traversons auraient milité pour une République apaisée, réconciliée avec elle-même, afin de se donner le temps de réarmer l'hôpital, de réparer l'ascenseur social de l'école, de réaffirmer la présence de la République partout et pour tous. Au lieu de cela, le chef de l'État, qui a l'itinéraire d'un enfant gâté, a choisi de cliver, de bousculer, de violenter le pays.

Face à cela, j'entends que nous sommes tous des députés... Certes, mais nous ne représentons pas les mêmes ! Ne croyez pas que nous laisserons les Français en prendre plein la figure en ronronnant comme des chats dans les grands fauteuils rouges de l'Hémicycle ! Non. Nous allons faire entrer la colère, d'abord en commission, puis en séance publique, et nous espérons bien qu'elle enflera dans la rue, les usines, les services publics, pour renverser cette mauvaise réforme. Nous avons envie de vous bousculer jusqu'au point de retrait de ce projet de loi. Faites-vous à l'idée ! Puisque vous avez choisi de ne pas apaiser les tensions, de ne pas réconcilier la France avec elle-même, admettez qu'il y ait des actes de résistance. J'ai compris que cela n'enthousiasmait pas tout le monde. Mais nous assumons d'être entrés en résistance à des projets de ce type.

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Ces amendements sont un prétexte pour prendre la parole puisqu'ils visent des alinéas rédactionnels. Avis défavorable.

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Après les considérations philosophiques et quelquefois délirantes entendues, je voudrais que l'on revienne au concret. Éloignons-nous du rapport du COR, qui satisfait beaucoup de monde puisque chacun y trouve manifestement ce qu'il cherche. Regardons plutôt autour de nous. Les centenaires sont de plus en plus nombreux. On peut s'en réjouir...

(Exclamations.)

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Du calme s'il vous plaît ! Dès qu'on n'est pas d'accord avec vous, c'est le brouhaha !

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Certains passent autant de temps à la retraite qu'au travail, et demain sûrement plus. Je sais bien que vous en rêvez et que vous réclamez le droit à la paresse. Mais pouvez-vous, sans rire, convaincre nos concitoyens que nous pourrions conserver notre régime de solidarité, malgré le grave problème démographique qui se pose, sans réforme ? Ils ne vous croient pas. Alors seriez-vous, par hasard, favorables à un régime par capitalisation ?

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Chers collègues de la NUPES, vous êtes en nombre, mais vous parlez entre vous. Dès que quelqu'un n'est pas d'accord avec vous, c'est le brouhaha. Madame Panot, je vous entends d'ici !

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De nombreux collègues prétendent que ma famille politique aurait insufflé une sorte de culture de la paresse. Ils devraient garder en mémoire certains faits. Lorsque le Front populaire a créé un sous-secrétariat d'État à l'organisation des loisirs, confié à Léo Lagrange, l'extrême droite en général et l'Action française en particulier ont mené une campagne de calomnies, sur fond de « ministre de la paresse ». En 1940, quand le maréchal Pétain a reçu les pleins pouvoirs, il a désigné responsables de la défaite la gauche et le gouvernement de Front populaire, qui avaient insufflé dans le pays un « esprit de jouissance ». J'aimerais que l'on arrête d'utiliser un tel vocabulaire, qui non seulement a servi aux pires moments de notre histoire, mais en plus n'est qu'un tissu de stupidités.

Enfin, en 1883, lorsque Paul Lafargue a publié Le Droit à la paresse, les ouvriers – y compris des enfants – travaillaient douze heures par jour et il n'y avait pas de droit à la retraite. Avec ce livre, pour la première fois, un penseur socialiste a commencé à concevoir une société où le travailleur n'existait pas seulement pour travailler. Je ne partage pas totalement la pensée de Paul Lafargue. Mais ce n'était pas n'importe qui : toutes les grandes figures de la gauche, à commencer par Jean Jaurès, étaient à son enterrement. Son livre n'était pas une ode à ne rien faire. Il s'agissait d'affirmer la dignité de l'être humain en considérant que celui-ci n'était pas sur terre pour souffrir. Arrêtons les sottises et discutons sérieusement !

(Applaudissements.)

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Le fait que nous ayons le droit à la paresse perturbe, voire traumatise certains d'entre vous. Le temps libre fait partie du progrès social ; c'est même une conquête essentielle. Ce n'est pas uniquement la reconstitution de la force de travail : c'est du loisir, du temps pour nous – que l'on appelle cela congés payés ou diminution du temps de travail. On travaille aujourd'hui 1 400 heures par an en moyenne, contre 1 900 heures en 1950. C'est le sens du progrès. Par ailleurs, plus on produit dans une économie carbonée, plus on va dans le mur, compte tenu du changement climatique. Il faut ouvrir les yeux sur notre système économique et social. Oui à la paresse et à la réduction du temps de travail !

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Nous devrions nous en tenir au texte. Une discussion générale s'est engagée. Elle n'est pas inintéressante en dépit de quelques excès. Il faut savoir respecter l'histoire, or certains veulent réécrire l'histoire.

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L'écrire correctement, déjà, ce serait bien !

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La question de la paresse n'est pas venue de nos bancs : elle a surgi ce matin lorsque nous avons voulu rappeler certains principes devant être au fondement de la réforme, notamment la valorisation du travail, et fixer une ambition de renouvellement des générations pour assurer l'équilibre du système. À ce moment-là, on nous a répondu : « Surtout pas la valorisation du travail, il y a un droit à la paresse ! » À cet égard, Sandrine Rousseau a l'honnêteté d'exposer son point de vue.

Il ne faut pas confondre paresse et repos. Le repos suit le travail alors que la paresse est un goût pour l'oisiveté. Si l'on veut fournir une protection sociale, il faut s'en donner les moyens et cela passe par le travail : tous ceux en capacité et en âge de travailler doivent le faire ; ensuite, ils ont le droit de se reposer. Il est essentiel de réinstaurer de la confiance dans notre système, notamment de la part de la nouvelle génération qui doute de la transmission du patrimoine que constitue la sécurité sociale. Cela suppose de revaloriser le travail. Alors que l'on constate certaines injustices envers des personnes qui ont beaucoup travaillé sans compter leurs heures, il n'est pas possible d'envoyer en plus le message selon lequel le fait de ne pas travailler donnerait des droits.

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On n'a jamais autant bossé ! Les gens travaillent dur ! Vous les méprisez !

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Personne ne méprise personne dans cette commission. Pas de provocation, s'il vous plaît !

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La retraite, c'est le droit au repos des vieux travailleurs, selon le programme du Conseil national de la Résistance. Quant à la paresse, elle peut être un moment du temps de repos, au moins ! En tout cas, si l'on critique la paresse, peut-être peut-on critiquer aussi ceux qui s'enrichissent en dormant. On nous explique qu'il n'y a pas d'argent dans ce pays. Mais jamais le produit intérieur brut par habitant n'a été aussi élevé ! Parlons de tout si c'est ce que vous voulez, mais alors parlons aussi de ceux à cause de qui le système est grippé. J'espère que les Français réussiront à le dégripper demain !

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Nos concitoyens attendent de nous que nous trouvions un équilibre entre temps de repos et temps de travail, mais aussi et surtout un équilibre des comptes sociaux. Or, à mon avis, l'un ne va pas sans l'autre.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS3803 de M. Yannick Monnet.

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Cet amendement est l'expression de notre volonté de ne pas supprimer les régimes spéciaux. Toutefois, je vais vous faire une confidence. J'aurais été prêt à discuter de cette suppression des régimes spéciaux si nous avions conservé l'esprit d'Ambroise Croizat, qui voulait faire de la retraite « non plus l'antichambre de la mort mais une nouvelle étape de la vie ». L'idée de la retraite est de construire des choses positives, de protéger les gens. En quoi améliorez-vous la vie des retraités en supprimant les régimes spéciaux ? C'est un recul de la protection. J'ai même le sentiment que, dès que l'on défend un peu de bonheur pour les retraités, cela vous horripile.

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Vous dites n'importe quoi. Ramener la question des retraites à une logique comptable, c'est nier l'importance d'une vraie protection. Si l'on trouve de nouvelles recettes, on peut avoir un système de retraites qui protège correctement tout le monde. Par exemple, en augmentant les salaires, comme nous vous l'avons proposé, on fait entrer des cotisations supplémentaires. En supprimant la différence salariale entre hommes et femmes, on obtient 6 milliards d'euros supplémentaires, et encore 8 milliards d'euros de plus en faisant cotiser les rentiers. Ce n'est pas un problème d'argent, c'est un choix de société. Nous ne faisons pas le même.

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Votre raisonnement pourrait se tenir s'il n'y avait pas de problème démographique. Or, nous savons tous qu'il n'y a plus assez de cotisants par rapport au nombre de retraités.

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Nous devrions pouvoir nous rassembler autour du principe de solidarité nationale, dont le système par répartition est l'un des éléments fondamentaux. Nous sommes tous attachés à l'idée selon laquelle les cotisations équilibrent les pensions. Ce principe était au frontispice de la réforme de 1945. Or, dès que l'on commence à financer le système en faisant appel au budget de l'État, comme c'est le cas avec les régimes spéciaux, on n'est plus dans une logique de répartition.

Je citerai à mon tour Ambroise Croizat : « Faire appel au budget des contribuables [...] serait subordonner l'efficacité de la politique sociale à des considérations purement financières. Ce que nous refusons. » Nous aussi, nous refusons de mettre en péril l'intégrité de notre système par répartition, parce que c'est un fondement de la solidarité nationale. Nous ne souhaitons pas renoncer à ce projet. Par souci de cohérence politique et historique – car Ambroise Croizat était communiste et je lui rends hommage à ce titre-là aussi – vous devriez reconsidérer vos positions.

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Si vous êtes si déterminés à ne pas faire appel aux contribuables pour financer la protection sociale, il faut arrêter la foire aux exonérations. Elles coûtent chaque année 75 milliards d'euros et elles sont compensées par l'impôt. Nous devrions pouvoir nous rejoindre sur ce point.

Par ailleurs, certaines contributions de l'État résultent de choix qu'il a faits lui-même. S'il faut équilibrer le régime de la SNCF, c'est que l'on a empêché les cheminots de continuer à y adhérer. Quand c'est nécessaire, l'État doit intervenir pour concrétiser la solidarité nationale.

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Madame la rapporteure générale, vous ne pouvez vous abriter derrière la démographie car c'est l'un des grands absents de la réforme. Le COR prévoit un retour à l'équilibre d'ici à 2070 au regard des évolutions démographiques. Or, cette année, notre pays a enregistré son taux de fécondité le plus bas depuis l'entre-deux-guerres. Tant que vous n'aurez pas une politique nataliste, vous n'aurez pas le droit d'invoquer la démographie. Nous avions, quant à nous, déposé un amendement, symbolique, pour octroyer une part pleine dès le deuxième enfant car ce sont les bébés de 2023 qui paieront les retraites de 2043. Et vous, que faites-vous pour les naissances ?

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Je remercie Marc Ferracci d'avoir rendu hommage au fondateur de notre système social. Malheureusement, vous détricotez patiemment ce système depuis 2017. Rendre hommage à l'édifice des droits sociaux, ce devrait être aussi le respecter au lieu de revenir sur des droits acquis.

Nous aussi, nous souhaitons un financement pérenne. Le problème est que le débat se déroule dans le vide car les projections sur la base desquelles vous calculez le déficit ne sont pas fondées. En tout cas, nous les contestons – comme le COR d'ailleurs !

Du reste, les 17,7 milliards d'euros que vous entendez économiser pour équilibrer le système pèsent à 100 % sur les salariés, lesquels vont devoir différer leur départ. Ces économies sont prélevées sur la vie des salariés, ce qui n'était pas le cas lors des précédentes réformes : l'effort portait en partie sur les cotisations salariales, sur les cotisations patronales et sur les retraités actuels. Nous contestons ce choix. Il y avait d'autres manières de financer un déficit ponctuel.

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Nous avons entendu plusieurs fois l'argument de la démographie, lié à celui de la natalité que met en avant le Rassemblement national. Vous avez expliqué vingt-cinq fois qu'il n'y avait plus que 1,7 actif pour un retraité, contre 3 actifs pour un retraité auparavant. Or, le point de référence se situe dans les années 1970. Un actif d'aujourd'hui est trois fois plus productif qu'un actif de cette époque ! Au début du XXe siècle, un salarié travaillait en moyenne 3 000 heures par an. C'est 1 500 heures désormais. Dans le même temps, la productivité a été multipliée par quarante. La question est de savoir si l'on tire profit de cette augmentation pour gaver les actionnaires ou bien si l'on en fait bénéficier le plus grand nombre en libérant du temps – dans la semaine, l'année ou la vie.

Quant à la natalité, j'ai entendu le Rassemblement national prendre pour exemple la Hongrie, où l'avortement est quasiment interdit et où les femmes doivent écouter le cœur du fœtus avant de pouvoir avorter – c'est-à-dire de disposer de leur corps. Le Rassemblement national aurait pu parler aussi de la Pologne, où Izabela et Agnieszka sont mortes car, là-bas aussi, l'avortement est pour ainsi dire interdit.

Savez-vous quel département, outre-mer exclu, reçoit le moins de prestations sociales ? C'est la Seine-Saint-Denis. Je ne crois pas avoir jamais entendu Jean-Marie Le Pen se plaindre que sa retraite soit payée par des jeunes des quartiers populaires.

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Notre collègue Arthur Delaporte disait que les précédentes réformes avaient joué sur les cotisations salariales et patronales. Dont acte. Vous serez toutefois d'accord pour considérer que, si l'on joue sur les cotisations salariales, la retraite diminue. Si l'on augmente les cotisations patronales, ce sont les entreprises qui sont mises à contribution. Tel n'est pas le choix qui a été fait.

Par ailleurs, la loi Touraine du 20 janvier 2014 a prévu, pour tout le monde, quarante-trois années de cotisation en 2035. La gauche a demandé, lorsqu'elle était aux responsabilités, de faire l'effort de travailler plus longtemps. On était loin de la retraite à taux plein à 60 ans voulue par François Mitterrand ! À aucun moment, d'ailleurs, le Parti socialiste n'a demandé, à travers des propositions de loi ou de résolution, le retour à la retraite à 60 ans.

Il est exact que l'on consent 75 milliards d'euros d'exonérations salariales. Mais souvenez-vous du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi ! Qu'avons-nous entendu en commission de finances alors, Charles de Courson et moi ! Ce devait être l'alpha et l'oméga du plein emploi et de la compétitivité. Tous les jours, on nous annonçait l'inversion de la courbe du chômage. Nous savons tous comment cela s'est terminé. Un peu de modestie, de part et d'autre, ne serait pas superflu.

Yannick Monnet a déclaré que la question des retraites échappait à toute logique comptable. Cette phrase m'a troublé car elle est inexacte. Malheureusement, sur les 346 milliards d'euros versés, seuls 79 % sont couverts par les cotisations sociales. Où trouve-t-on le reste ? Là est le vrai problème. Chacun peut avoir des avis différents et des propositions différentes sur la question, c'est normal. Mais ne disons pas que tout est compensé à l'euro près !

Je termine en précisant mon propos de tout à l'heure : c'est bien 1,7 milliard d'euros que l'on va chercher dans les poches de tous les Français à travers la contribution tarifaire d'acheminement, soit 13 euros par famille pour une facture annuelle de 800 euros. Tout le monde participe au paiement de ces retraites. Se contenter d'une rustine n'est pas la meilleure idée.

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Certaines choses ont changé depuis les années 1970. Je ne suis pas sûr que la productivité ait augmenté autant que l'a dit Mathilde Panot. Entre-temps, la couverture sociale, qui est l'honneur de notre pays, s'est améliorée, notamment en ce qui concerne le handicap. L'espérance de vie a augmenté. Nous devons faire face au défi du vieillissement, avec les enjeux que cela suppose pour la branche autonomie. Il n'est possible de couvrir ces risques que si un nombre suffisant de personnes travaillent, donc cotisent.

Le système par répartition suppose un renouvellement des générations. La question démographique n'est pas négligeable. Selon l'Union nationale des associations familiales, qui a tenu un colloque à l'Assemblée nationale il y a près d'un an, le désir de maternité est de 2,3 enfants par femme. Or, le taux de natalité est seulement de 1,8. On ne soutient pas assez les femmes qui souhaitent avoir des enfants. Pour aider les mères qui travaillent à concilier vies professionnelle et familiale, il faut revenir sur les coups de rabot successifs qui ont diminué leur pouvoir d'achat – abaissement du quotient familial, mise sous condition des allocations familiales qui contrevient au principe d'universalité de cette prestation, indemnités journalières en cas de maladie pour les mères de trois enfants et plus. En tant que rapporteure générale, Stéphanie Rist sait que la branche famille, excédentaire, a été ponctionnée de 2 milliards d'euros. Peut-être faudrait-il utiliser l'excédent pour accompagner ces femmes !

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Cher Thibault Bazin, vous qui êtes rapporteur pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles, la branche famille n'a pas été ponctionnée : il s'agissait d'un transfert de dépenses relevant de l'assurance maladie.

Arthur Delaporte a parlé d'un déficit ponctuel prévu par le COR. C'est du ponctuel qui devrait durer jusqu'en 2070... C'est en fait un déficit générationnel, confirmé par les derniers rapports. D'habitude, cher collègue, vous prenez en exemple les socialistes espagnols. L'âge légal de départ à la retraite est de 66 ans en Espagne, porté à 67 ans en 2027.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS3805 de M. Pierre Dharréville.

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À Dieppe, nous avons un bel hôpital auquel nous sommes attachés. Quand nous avons décidé de donner le nom d'Ambroise Croizat à l'esplanade qui le borde, comme symbole de notre attachement à ceux qui avaient labouré le terrain des utopies et en avaient fait des réalités concrètes, nous avons fait venir son petit-fils. Eh bien, celui-ci ne supporte pas que les libéraux citent son grand-père pour détourner ses propos. Il a d'ailleurs écrit une lettre ouverte pour rappeler qu'Ambroise Croizat s'était battu pour l'universalité, c'est-à-dire la couverture de l'ensemble de la population du pays. Il était pour une gestion démocratique par des administrateurs élus au suffrage direct, pour les trois quarts par les assurés sociaux et pour un quart par le patronat. Ceux qui ont étatisé la gestion de l'assurance maladie et de l'ensemble de la protection sociale sont mal inspirés de le citer. Un autre des principes promus par Croizat est la solidarité par des mécanismes de redistribution au profit des plus faibles. Enfin, Croizat défendait l'unité, par le regroupement de l'ensemble des risques sociaux au sein d'un même régime. Ce dernier aspect permet aux libéraux de prétendre qu'Ambroise Croizat souhaitait la disparition des régimes spéciaux. Mais selon lui, l'idéal était d'intégrer les bénéfices des régimes spéciaux pour tirer vers le haut le régime général et non, comme vous le proposez, pour tirer vers le bas tous les retraités. Ne vous référez donc pas à Croizat !

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S'il appartient à la France, il appartient surtout aux personnes assises du côté gauche de cette salle. Je rappelle qu'Olivier Véran voulait supprimer la référence à la sécurité sociale dans la Constitution.

Suivant l'avis de la rapporteure générale, la commission rejette l'amendement.

Amendement AS4784 de M. Hadrien Clouet.

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Nous demandons de ne pas toucher au régime de retraite du Conseil économique, social et environnemental. Sur cent soixante-quinze membres, le Conseil compte cinquante-deux syndicalistes et dix-sept représentants d'entreprises. C'est sans doute pour cela que vous le visez.

Nous avons proposé, en revanche, de supprimer un autre régime spécial : celui du Président de la République. Lui peut toucher une retraite de 5 500 euros brut par mois tout en siégeant au Conseil constitutionnel pour 13 700 euros brut mensuels. En plus, il a sept collaborateurs et deux agents de police à sa disposition pendant cinq ans, puis trois collaborateurs et un agent. Mais l'amendement a été déclaré irrecevable...

Madame Bonnivard, vous avez parlé de l'épanouissement au travail. Nous vous invitons à aller porter des charges lourdes : vous verrez s'il est épanouissant de se casser le dos pour un salaire de misère. Moi, je l'ai fait. (Exclamations.) Je peux vous dire que les gens que j'ai côtoyés à l'usine ne sont pas d'accord avec la réforme.

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Pourriez-vous défendre votre amendement au lieu de vous en servir comme d'un simple support pour prendre la parole ? La remarque vaut pour tous, chers collègues.

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C'est ce que je fais, mais certains propos sont insupportables ! Puisqu'il a été question des paresseux, je vais citer quelques mots d'une chanson que vous n'aimez pas beaucoup, L'Internationale : « Ouvriers, paysans, nous sommes / Le grand parti des travailleurs. / La terre n'appartient qu'aux hommes. / L'oisif ira loger ailleurs. » L'oisif, c'est le capitaliste, celui qui ne fiche rien et qui gagne beaucoup d'argent sur notre dos.

Madame Lavalette, si nous n'avons pas voté votre proposition de loi visant à augmenter les salaires, c'est parce qu'elle comportait une exonération de cotisations. Il aurait plutôt fallu que le Rassemblement national prône l'augmentation du Smic, qui permet de faire entrer davantage de cotisations et donc de mieux financer les retraites.

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Je suis navrée de subir ce mépris de classe. Monsieur Léaument n'a pas de leçon à me donner. Vous ne connaissez pas mes origines. Il se trouve que je suis issue d'une famille d'agriculteurs montagnards qui n'avaient quasiment rien pour vivre. Mes parents étaient artisans et commerçants. Mon père a commencé à travailler à 15 ans.

Dans les propos auxquels vous faisiez référence, à aucun moment je n'ai parlé de pénibilité. J'ai dit que faire croire aux Français qu'ils pouvaient avoir le même niveau de solidarité en travaillant toujours moins, comme vous le prétendez, était un mensonge, et que vous abîmiez notre pays. Oui, le travail est épanouissant. Notre rôle est de permettre à nos concitoyens d'évoluer, d'avoir plusieurs carrières. Tel était le sens des amendements que je défendais. Tous les métiers sont nécessaires. Il convient de reconnaître la difficulté de certains d'entre eux et de donner la possibilité d'en changer.

Monsieur Corbière, je suis rapporteure spéciale pour les crédits du tourisme et très attachée au tourisme social. Je crois au repos comme je crois à la retraite et au droit de bénéficier du fruit de son travail. Mais pour avoir tout cela, le préalable, c'est le travail.

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Le Rassemblement national s'oppose à cette réforme des retraites. Nous combattons la suppression des régimes spéciaux de la RATP et des industries électriques et gazières, que nous considérons justifiés et mérités. Les salariés concernés s'acquittent de missions d'intérêt général.

Tel n'est pas le cas du Conseil économique, social et environnemental. D'abord, c'est une institution coûteuse : près de 50 millions d'euros par an. Ensuite, nous n'avons pas besoin de trois chambres : l'Assemblée nationale et le Sénat suffisent. Enfin, le mode de désignation des membres du Conseil économique, social et environnemental pose problème car ils sont nommés, pour ne pas dire cooptés. C'est un peu la République des copains. Cette institution n'est ni démocratique ni représentative. Nous sommes pour la suppression de ce régime spécial.

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Pour avoir eu l'honneur de contrôler pendant cinq ans, au titre de la commission des finances, le Conseil économique, social et environnemental, je crois avoir approché son mode de fonctionnement, qu'il s'agisse des membres désignés ou de l'ensemble du personnel administratif. Cette institution est utile et importante. On ne peut pas, d'un côté, déclarer que la parole doit être donnée aux citoyens et, de l'autre, prétendre inutiles les personnes qui les représentent au sein du Conseil économique, social et environnemental. C'est parce que le paritarisme est sous-dimensionné en France, parce que les citoyens n'ont pas assez la parole, que l'on observe de fortes crispations sur certains sujets.

En revanche, que l'on veuille maintenir le régime spécial de ses membres me surprend. Quand on connaît le fonctionnement de l'institution, cela ne paraît pas nécessaire. Les personnes concernées, qui ont de grandes qualités, exercent d'autres fonctions dans des syndicats ou des entreprises. Nous soutiendrons la suppression de ce régime spécial.

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J'ai entendu des collègues du Rassemblement national parler de comité Théodule à propos du Conseil économique, social et environnemental. Cette vision est complémentaire de l'anticorporatisme caractéristique du Rassemblement national. C'est l'occasion de rappeler que le Conseil économique, social et environnemental joue un rôle important. L'inclure dans cette réforme, c'est donner l'impression qu'il ne sert à rien, que ses membres sont des paresseux. Pour notre part, nous croyons sincèrement à sa nécessité pour appuyer les décisions que nous prenons au Parlement et pour faire vivre la démocratie.

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Je suis favorable à la suppression de ce régime spécial, d'autant plus qu'il est minuscule. Mais cela pose la question des régimes du Sénat et de l'Assemblée nationale. La rapporteure générale dit qu'ils relèvent de la loi organique. Je suis en train de le vérifier car je n'en suis pas sûr. Quoi qu'il en soit, nous pourrions parfaitement demander au bureau – puisque ce sont les bureaux des assemblées qui gèrent ces régimes – d'adopter un texte de principe demandant qu'à compter de la prochaine législature, ce soient les règles du régime général qui s'appliquent. On ne peut demander des efforts aux autres sans donner l'exemple soi-même.

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Le régime des députés a déjà été calé sur le régime général.

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Ce n'est pas exact. Par exemple, un nouveau député cotise double pendant son premier mandat.

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Madame Bonnivard, vous dites que les Français ne peuvent avoir le même niveau de vie en travaillant moins. Les faits démentent vos propos car, depuis vingt ans, le nombre d'heures travaillées annuellement a augmenté, certes modestement de 1 605 heures à 1 609 – cette croissance s'explique en partie par le fait que la retraite est moins longue qu'il y a vingt ans. Cette hausse est à rebours de la tendance longue. En effet, l'histoire du mouvement ouvrier repose sur deux piliers : la dignité, l'émancipation et la réalisation par le travail, à savoir la fierté de gagner sa vie en travaillant ; l'augmentation du temps libéré par rapport au temps travaillé grâce à la fin du travail des enfants, le dimanche chômé, le samedi à l'anglaise, les congés payés et la retraite à 60 ans. Ce sens de l'histoire s'est inversé par imitation des États-Unis où le temps de travail croît. Deuxième élément erroné, l'espérance de vie en bonne santé n'augmente plus depuis vingt ans. Enfin, la dureté du travail ne diminue pas, elle augmente : la part des salariés subissant trois contraintes physiques et trois contraintes de temps de pénibilité mentale est passée respectivement de 12 % à 34 % et de 6 % à 35 %.

Quand on met tout cela bout à bout, le projet est bien une contre-réforme, qui va à l'encontre de ce qu'il faudrait faire pour améliorer la santé des Français.

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C'est dommage, nous ne parlons pas du tout de l'amendement.

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C'est la deuxième fois aujourd'hui que le Rassemblement national porte un coup aux instances républicaines et démocratiques. Il accuse les membres du Conseil économique, social et environnemental d'incarner la République des copains. Ces propos populistes sont graves. De nombreux membres du Conseil appartiennent à des organisations syndicales ou à des associations : à n'en pas douter, ils apprécieront vos accusations.

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Nous n'avons décidément pas les mêmes chiffres, monsieur Ruffin. Selon une étude de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques d'octobre 2021, l'espérance de vie sans incapacité sévère s'élevait à 83 ans pour les femmes et à 80 ans pour les hommes ; l'espérance de vie sans aucune incapacité était de 77 ans pour les premières et de 75 ans pour les seconds. Depuis 2008, l'espérance de vie sans incapacité à 65 ans a augmenté de 2 ans et 1 mois pour les femmes et de 1 an et 11 mois pour les hommes.

Une loi organique est nécessaire pour fondre le régime de retraite des parlementaires dans le régime général. En 2017, le bureau de l'Assemblée nationale a modifié les paramètres et les règles en les alignant sur le régime des fonctionnaires ; une affiliation au régime général nécessiterait une loi organique, que prévoyait la réforme de 2020, qui n'a pas abouti.

La commission rejette l'amendement.

Amendements AS3811 de M. Yannick Monnet, AS3816 et AS3821 de M. Pierre Dharréville, AS3824 et AS3827 de M. Yannick Monnet.

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Vous avez compris notre opposition à ce texte dont j'aimerais que vous saisissiez la portée. L'affaire n'est pas entendue. Vous devez vous faire à l'idée de renoncer à ce projet de loi, qui n'a pas de majorité dans le pays. Vous commettriez une violence insupportable contre le peuple si vous choisissiez de passer en force. J'insiste sur ce point car le début de l'examen au Parlement pourrait faire croire que le processus législatif ira tranquillement à son terme. Cela ne va pas se passer ainsi. Réfléchissez à cette idée qui va s'imposer à vous. Si j'en crois le journal Le Monde de ce jour, certains d'entre vous commencent à y penser : je les y encourage car c'est un mouvement positif. Le texte supprime, de façon incohérente, certains régimes spéciaux et pas d'autres. Vous connaissez notre attachement à plusieurs d'entre eux pour des raisons déjà exposées. Ces régimes sont des dispositifs de résistance à l'ordre libéral, le libéralisme ayant beaucoup abîmé le travail et nos vies depuis trente à quarante ans.

Les attaques portées à plusieurs reprises par le Rassemblement national contre le Conseil économique, social et environnemental ne nous surprennent pas. Mais nous refusons de nous y habituer. Le Conseil regroupe des forces sociales et associatives qui jouent un rôle considérable dans notre société. Il porte un regard utile sur de nombreuses questions et il nourrit nos travaux. Nous sommes très attachés à cette institution démocratique.

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Je vous rejoins sur l'importance du Conseil économique, social et environnemental, qui accomplit notamment un bon travail sur les questions de santé. J'ai pu m'en rendre compte lorsque le Conseil m'a auditionnée.

En revanche, je suis totalement défavorable à vos amendements. Nous commençons un débat que nous allons poursuivre plusieurs semaines. À l'issue de ces discussions, nous verrons bien quel sera le vote de notre assemblée. C'est cela, la démocratie.

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Nous pouvons saluer la mobilisation qui a eu lieu il y a une dizaine de jours et celle qui aura lieu demain car elles se font dans une démarche de responsabilité. Nous devons entendre ce mouvement qui relève de la démocratie sociale. Mais il y a aussi la démocratie politique. Celle-ci se joue maintenant et ici, dans une configuration tout à fait inédite dans la Ve République que vous ne manquez pas de souligner depuis juin dernier. Si des améliorations sont à apporter au texte – sur les femmes, les carrières longues, l'index des seniors, la pénibilité –, c'est ici qu'elles doivent être discutées et, vote par vote, décidées. Il faut cesser toute forme de chantage.

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Troisième confrontation aux faits de propos tenus à l'instant : le système espagnol, que Paul Christophe a mentionné, connaît une durée de cotisation très inférieure à celle appliquée en France : 37,5 annuités là-bas contre 43 annuités chez nous. Le taux de remplacement net s'élève à 80 % de l'autre côté des Pyrénées, 74 % en France. Les pensions ont progressé de 8,5 % sous le gouvernement de Pedro Sánchez, qui a plafonné les retraites les plus élevées à 3 058 euros par mois et proposé une élévation graduelle des cotisations de 30 % entre 2025 et 2050. Si vous voulez vous inspirer des Espagnols, regardez bien ce qu'ils font avant de dire des bêtises.

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Madame Panot, la question de la natalité est totalement évacuée du débat alors que les bébés qui naissent aujourd'hui seront les cotisants de demain. Nous n'avons d'autre inspiration que la campagne présidentielle de Marine Le Pen, qui proposait l'octroi d'une part fiscale pleine dès le deuxième enfant et un prêt pour soutenir les familles. Deux visions s'opposent : vous soutenez l'immigration massive ; nous soutenons les familles françaises. Nous ne voulons pas importer de main-d'œuvre étrangère contrairement à vous, qui montrez là votre conception capitaliste. Vous voulez que des étrangers viennent faire le travail des Français. Défenseurs d'une politique plus humaine, nous refusons la baisse des salaires et nous soutenons leur hausse dans les métiers qui en ont besoin, ce que vous avez rejeté. Le Rassemblement national veut soutenir les familles, encourager la natalité et aider les femmes qui travaillent à avoir des enfants ; vous défendez l'immigration incontrôlée et le remplacement des bébés par des immigrés.

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Ce n'est pas parce que nous avons examiné deux ou trois amendements que les choses sont jouées. Nous sommes favorables à des allers-retours permanents entre les gens, la rue et l'Assemblée nationale. Vous avez pris les propos de Pierre Dharréville comme une menace alors qu'ils sont une promesse. Demain, il y aura du monde dans la rue, des électriciens-gaziers, des cheminots... La France sera rassemblée pour s'opposer à votre mauvais projet. Les salariés du public et du privé, les retraités, les jeunes, vous êtes seuls contre tous ! Il faut que vous arrêtiez de penser que vous pouvez faire ce que vous voulez parce que vous avez été élus.

Nous défendons l'idée de soumettre votre projet à référendum. Nous ferons tout ce qui est possible pour empêcher son adoption. Demain, quand vous verrez la rue, vous tremblerez. Ce sera autre chose qu'une lumière allumée ! La rue va s'exprimer et vous retirerez ce projet.

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Pas de menace, monsieur Jumel ! Quand vous dites que nous allons trembler, vous proférez une menace.

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La liberté de manifester est une liberté constitutionnelle. La promesse d'exercer une liberté garantie par la Constitution ne représente pas une menace.

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Nous sommes souvent interpellés sur le régime de retraite des parlementaires. Le texte traite de celui de la troisième chambre, le Conseil économique, social et environnemental, ce qui pourrait instiller l'idée que nous préserverions les privilèges des parlementaires. J'ai compris que ce sujet relevait d'une loi organique et non d'une loi simple. Mais la plupart des concitoyens que je rencontre sont persuadés que nous conservons l'ancien régime. Or, le régime de retraite des députés a été aligné sur celui des fonctionnaires en 2018. Les 172 trimestres et l'âge légal commun de départ s'appliquent.

Afin de réinstaurer un climat de confiance, pourriez-vous, madame la rapporteure générale, prendre l'engagement d'appliquer la réforme aux parlementaires ? Ce serait un engagement vis-à-vis de nous-mêmes puisque nous votons la loi organique. Il importe de ne pas laisser prospérer l'idée que nous bénéficierions d'avantages spécifiques et de montrer que nous fournissons les mêmes efforts que le reste de la population.

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Les propos de Sébastien Jumel ont été pris comme des menaces, ce qu'ils n'étaient pas. La menace qui plane sur les gens est constituée par les deux années de retraite que vous vous apprêtez à leur voler. La menace, c'est votre volonté de passer en force et d'imposer cette réforme injuste que les Français rejettent massivement.

Madame Berete, vous regrettez de ne pas avoir pu déposer des amendements. Mais nous aussi, nous le regrettons ! Pourquoi cela n'a-t-il pas été possible ? Parce que le véhicule législatif choisi par la majorité relative à laquelle vous appartenez interdit les propositions. Vous avez muselé le débat ! Les Français perçoivent nettement la menace qui pèse sur eux parce qu'elle fait écho à leur vie au travail, loin de s'apparenter à une promenade de santé. De nombreux Français éprouvent la pénibilité, l'usure, les TMS et les risques psycho-sociaux. La menace, c'est vous qui la représentez pour les citoyens. Quand on entend dire qu'il ne faut pas bordéliser, on sait qui bordélise : le Gouvernement, qui maintient sa réforme.

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Les premiers députés qui ont fait en sorte que le régime de retraite de leurs collègues soit aligné sur le régime général sont Charles de Courson, Thierry Benoit et votre serviteur. Cette évolution avait suscité quelque émotion sur tous les bancs. Comment imaginer que l'on puisse protéger les parlementaires ? C'est impossible, même si la dilution totale du régime des parlementaires dans le régime général ne relève pas de ce texte. Quoi qu'il arrive, nous souhaitons préserver ce que nous avons obtenu après de longues années de combat au Parlement, où le conservatisme était tout à fait transpartisan. Certains dénonçaient même les régimes spéciaux à l'exception du leur, qu'ils auraient aimé conserver. Les parlementaires ne doivent pas échapper à la règle.

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Tous ceux qui ont voté la précédente tentative de réforme – si l'on peut s'exprimer ainsi puisque le troisième alinéa de l'article 49 de la Constitution avait finalement été invoqué – doivent se souvenir qu'une loi simple et une loi organique étaient prévues pour instaurer le régime universel. L'ancienne majorité présidentielle défendait l'idée d'une dilution du régime des parlementaires dans le régime universel, le régime spécial étant appelé à s'éteindre. Je me permets de rappeler ce fait aux membres actuels de l'actuelle minorité présidentielle.

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Si, vous êtes 250 élus pour 577 sièges !

Il y a un problème de cohérence intellectuelle. Philippe Vigier l'a rappelé : nous, nous n'avons pas changé. Nous continuons de souhaiter que tout le monde soit logé à la même enseigne. Si nous votons des réformes qui affectent les gens sans nous appliquer les mêmes règles, faites attention à la montée du populisme. Le Gouvernement avait déposé une loi simple et une loi organique en 2020, il ne présente qu'une loi simple aujourd'hui. On m'a dit qu'il fallait une loi organique pour aligner le régime des parlementaires sur le régime général, si bien que mes amendements ont été déclarés irrecevables.

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Je tiens à vous alerter sur votre attitude, qui relève de l'extrémisme. Un sondage de l'Ifop montre que 79 % des Français pensent qu'une explosion sociale va se produire et que 52 % d'entre eux la souhaitent. Nous, nous sommes les modérés ici. (Rires parmi les députés des groupes RE, LR, Dem et HOR.) Nous sommes les modérés parce que nous faisons de notre mieux pour que le pays soit conduit dans l'apaisement. Nous ne voulons pas qu'un sentiment d'injustice ronge le cœur des gens, sentiment que vous ne cessez d'attiser.

Quand tous les syndicats sont unis contre la réforme, vous devriez les écouter. Quand la CFTC affirme que la ligne rouge est franchie avec les quarante-quatre ans de cotisation, vous devriez l'écouter. Quand la CFDT dit que les perdants de la mondialisation paient la plus grande partie de la facture des retraites, vous devriez l'écouter. Quand la CGT vous demande jusqu'où vous seriez prêts à aller pour gagner 0,1 % de produit intérieur brut, vous devriez l'écouter. Quand deux millions de Français descendent dans la rue il y a dix jours, vous devriez les écouter. Quand des millions de Français sortiront à nouveau dans la rue demain, vous devriez les écouter. Quand sept Français sur dix sont opposés à cette réforme, vous devriez les écouter. Quand huit salariés sur dix le sont aussi, vous devriez les écouter. Si vous n'écoutez pas tous ces gens, si vous refusez le dialogue, comment les choses vont-elles tourner ? Vous êtes sourds à ce que dit le pays. Si celui-ci déborde, ce sera votre faute !

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Monsieur Ruffin, c'est la première fois que l'on me traite d'extrémiste. Est-ce extrémiste de travailler sur un texte dont l'objectif est de préserver notre système par répartition ? Le principe de ce projet de loi figurait sur nos tracts de campagne des législatives : est-ce extrémiste ? Sommes-nous extrémistes de tenter d'avoir un débat sur le fond alors que certains amendements ne sont que des prétextes à appeler à la manifestation ? Il me semble que non.

Le régime de retraite des députés est aligné sur celui des fonctionnaires en 2018. Mais il s'agit toujours d'un régime spécial. Une proposition de loi organique est nécessaire pour intégrer ce régime dans le régime général. Monsieur de Courson, plusieurs membres de la majorité ont défendu cette orientation. Rien ne vous empêche de déposer une proposition de loi organique. La question pourrait également être posée aux sénateurs, dont certains sont actuellement en campagne, car eux n'ont pas aligné leur régime sur celui des fonctionnaires.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS7206 de M. Nicolas Turquois.

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J'ai élaboré cet amendement avec l'Agirc-Arrco. La rédaction de l'article 1er peut laisser penser que les personnes relevant des articles L. 311-2 et L. 311-3 du code de la sécurité sociale seront affiliées aux institutions de retraite complémentaire. Or, certaines de ces populations étant éloignées du salariat – loueurs de meublés, vendeurs de biens sur des plateformes en ligne –, l'évaluation de leurs droits serait difficile. L'amendement vise à lever le doute.

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Je me suis également interrogée sur les effets de ces évolutions dans mes échanges avec le Gouvernement. Rassurez-vous, ces dispositions ne modifient pas la liste des personnes affiliées à l'Agirc-Arrco et l'interprétation des conditions d'affiliation restera identique. Celles mentionnées à l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale ne sont pas les mêmes que celles de l'article L. 311-3 du même code.

En revanche, l'alinéa 32 est nécessaire pour assurer l'affiliation des nouveaux salariés recrutés au statut de l'Agirc-Arrco, en plus de celle au régime général.

Je propose donc de retirer l'amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.

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Madame la rapporteure générale, je vais vous dire en quoi vous appartenez à un parti d'extrémistes. Les dividendes distribués ont atteint un niveau inédit, d'après le journal Les Échos de mon ami Bernard Arnault. Total a fait des profits et distribué des dividendes d'un niveau sans précédent. Les dirigeants du CAC40 ont augmenté leur salaire de 52 %. Pendant ce temps, vous ne bougez pas le petit doigt. Lors de la première phase de l'épidémie, les secteurs de l'assurance, de la grande distribution et du numérique se sont gavés sans que vous n'ayez réagi. Les secteurs de l'énergie, de l'industrie agroalimentaire et du transport de conteneurs se gavent avec la guerre en Ukraine, et vous ne réagissez pas. La seule chose que vous faites, c'est supprimer quelques avantages tirés du travail. Alors, oui, vous êtes des extrémistes et vous mettez le feu au pays.

Des gens continuent de faire tourner les hôpitaux, les écoles, les transports et la grande distribution. On leur a promis une récompense et une reconnaissance salariale. Or, il n'y a rien, pas même l'indexation des salaires sur l'inflation. Leur pouvoir d'achat, déjà modeste, est rogné tous les jours. Le Président de la République disait en 2019 que, pour les salariés peu qualifiés et ceux à la carrière fracturée, « bon courage déjà pour arriver à 62 ans ». Depuis que l'âge légal de départ est passé de 60 à 62 ans, le nombre de seniors percevant le revenu de solidarité active (RSA) a été multiplié par quatre. Et maintenant, vous souhaitez accentuer cette tendance. Voilà pourquoi vous êtes des extrémistes. Si cela déborde dans la rue, cela viendra du fait que vous ajoutez en permanence de la colère à la colère.

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Nicolas Turquois a raison de poser la question du périmètre de l'affiliation au régime Agirc-Arrco. Madame la rapporteure générale, vous n'avez cité que l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale. Mais celui-ci renvoie à l'article L. 311-3 du même code. Dans la trentaine de catégories concernées, vous trouvez les présidents de société coopérative de banque, les salariés au titre des sommes ou avantages mentionnés au premier alinéa de l'article L. 242-1-4, les entrepreneurs salariés et les entrepreneurs associés, les administrateurs des groupements mutualistes, les présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées et des sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées...

Notre collègue fait bien de demander si toutes ces professions devront adhérer à l'Agirc-Arrco, régime paritaire qui exclut de son champ certaines catégories professionnelles. Pourriez-vous nous éclairer ?

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Lors de son audition devant les commissions des finances et des affaires sociales, le 19 janvier, le président du COR a rappelé que le régime Agirc-Arrco était très excédentaire. Madame la rapporteure générale, serait-il possible d'insérer, avec les syndicats qui en feraient la demande, un dispositif visant à distribuer sous forme de pensions les réserves financières considérables du régime, qui s'élèvent à environ 86 milliards d'euros ?

M. Ruffin a raison de s'interroger sur la réaction du pays face à un projet de loi dont les soutiens sont extrêmement minoritaires. Souvenez-vous du Président de la République affirmant, le 24 avril dernier, au soir de sa réélection : « Je sais aussi que nombre de nos compatriotes ont voté ce jour pour moi non pour soutenir les idées que je porte mais pour faire barrage à celles de l'extrême droite. » Ne l'oubliez jamais !

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Les oppositions, notamment François Ruffin, tentent de convaincre par l'outrance. J'ai demandé ce matin que l'on me cite un pays dans lequel le système de retraite par répartition était aussi large et où l'âge légal de départ à la retraite était de 62 ans. Je n'ai toujours pas de réponse. Si on me montre qu'un tel pays existe, je reverrais peut-être mon opinion. Nous sommes convaincus que, si nous ne faisons rien, le système par répartition, qui représente une chance pour le pays et pour les salariés, s'écroulera ou distribuera des pensions beaucoup plus faibles aux retraités, dont les revenus décrocheront de ceux des actifs. Apportez des démonstrations au lieu de crier sans argumenter !

J'entends vos arguments, madame la rapporteure générale, sur le périmètre de l'Agirc-Arrco. Je conserve néanmoins quelques doutes et je partage l'analyse de Charles de Courson. Je retire l'amendement mais je vais m'assurer de l'absence d'erreurs dans les affiliations d'ici à la séance publique.

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Monsieur Bazin, vous mettiez dans le même sac Assemblée nationale, Sénat et Conseil économique, social et environnemental. Mais les deux premières assemblées sont élues démocratiquement, contrairement à la troisième.

La NUPES s'offusquait quant à elle de ma proposition de suppression du régime spécial du Conseil économique, social et environnemental. Mais nous sommes favorables à la suppression de l'institution elle-même, comme – nous avons vérifié – Jean-Luc Mélenchon. Il est d'accord avec nous !

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On tient des propos outranciers, on appelle à la « résistance », on traite la rapporteure générale d'extrémiste. Cela me heurte profondément. La violence de ce vocabulaire contribue à libérer les instincts les plus primaires, à contester la démocratie en refusant leur légitimité aux urnes. Est-il besoin de rappeler que la démocratie, ce n'est pas invectiver sans fin vos collègues mais vous exprimer dans le cadre républicain de l'Assemblée nationale pour défendre vos positions de manière sereine ?

En réalité, vous rêvez de scènes insurrectionnelles, de chaos ; vous rêvez de faire de l'Assemblée nationale une ZAD. C'est inacceptable. Vous appelez à la domination de la voie de fait sur l'état de droit et vous voudriez bafouer les principes de la République. (Exclamations.) Il est temps de cesser d'inoculer le virus de la méfiance, de surfer sur le malaise social, d'amplifier les peurs et de dramatiser les imaginaires. Parlons retraites, travaillons dans l'apaisement pour faire évoluer la réforme nécessaire que nous proposons.

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Je m'interroge sur les alinéas 33, 34 et 35 et sur la question de l'assiette de cotisation. Les métiers visés à l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale ont souvent une assiette de cotisation étroite – et par conséquent des pensions de retraite faibles. Or, dans l'exposé des motifs de cet article 1er, on lit : « Cette mesure nécessitera à terme de revoir le circuit financier de financement de ces régimes. Des travaux seront conduits en ce sens en 2023 dans la perspective du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024. » Nous n'en sommes qu'à l'article 1er de ce PLFRSS 2023 ; vous renvoyez déjà au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 !

Il y a un écueil dans ce projet de loi : rien n'a été codifié en ce qui concerne l'assiette de cotisation, notamment des indépendants. Madame la rapporteure générale, pourrons-nous avoir des détails sur ce point d'ici à la séance publique ? Certaines professions ne seraient pas concernées par le transfert alors que, dans beaucoup d'entre elles, on ne compte pas ses heures et l'on a pourtant de petites retraites. Pourrons-nous accomplir cette ambition que tous les retraités atteignent au moins 85 % du Smic net ? Pour valoriser le travail, il faut valoriser ceux qui ont travaillé toute leur vie.

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Monsieur Turquois, il y a un pays où l'on peut s'arrêter de travailler à 62 ans : la France ! Notre système de retraite est viable ; nous avons seulement un problème de recettes qui pourrait se régler en augmentant de 1 % les cotisations patronales ou en prélevant 10 % des aides aux entreprises, dont les économistes s'accordent à penser qu'une bonne moitié est absolument inutile alors qu'elles s'élèvent à 157 milliards par an, soit un tiers du budget de l'État. Il s'agit de préserver nos acquis. La retraite à 62 ans existe et elle est viable : soyons-en fiers !

L'amendement AS7206 est retiré.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure générale, la commission rejette successivement les amendements AS3828 de M. Yannick Monnet et AS3829 de M. Pierre Dharréville.

Amendement AS886 de M. Jérôme Guedj.

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Nous avons essayé de vous convaincre que la fermeture des régimes spéciaux était inopportune. Avec cet amendement de repli, nous proposons que la date de leur fermeture ne soit pas fixée arbitrairement mais à l'issue d'une concertation avec les organisations syndicales et patronales.

Nous voulons faire vivre ce que vous piétinez : la démocratie sociale. Mme Panosyan-Bouvet disait tantôt que la démocratie politique devait primer, tout en saluant l'ampleur du mouvement social du 19 janvier, mouvement dont j'espère qu'il sera plus important encore demain. Dans l'histoire de notre pays, la démocratie et la légitimité des parlementaires vont de pair avec la force du mouvement social, des syndicats. Vous martelez que vous êtes légitimes parce que le Président de la République aurait été élu avec cette réforme des retraites dans son programme. Vous savez que ce n'est pas vrai.

Vous voulez ignorer l'importance du lien entre démocratie sociale et démocratie politique. Voilà ce qu'écrivait Léon Blum dans À l'échelle humaine : « La démocratie politique ne sera pas viable si elle ne s'épanouit pas en démocratie sociale ; la démocratie sociale ne serait ni réelle ni stable si elle ne se fondait pas sur une démocratie politique. » Corrigeons votre projet au moins sur ce point ! Oubliez votre rouleau compresseur et associons la démocratie sociale !

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Avis défavorable comme pour tous les amendements qui reculent l'entrée en vigueur de la réforme. En tant que parlementaires, nous avons une légitimité démocratique.

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Vous avez souri lorsque François Ruffin s'est présenté comme modéré face à l'extrême violence de cette réforme. J'insiste : je suis inquiet. Vous disposez des outils juridiques pour passer en force, seuls contre le peuple français. Mais si vous le faites, vous allez nourrir une colère noire, une colère sombre, une humiliation. Elles vous reviendront à la figure comme un boomerang.

Nous vous proposons un autre chemin : non seulement écouter, mais entendre. Vous me trouvez parfois trop raide, trop rude, trop direct. Je vous promets qu'à côté de la colère des Français, ce n'est rien du tout. Qu'ont fait les gens ? Ils sont allés sur le simulateur de votre réforme – l'aide à domicile, la décortiqueuse de coquilles, la trieuse de verre, le verrier au bouchot, le cariste – pour savoir à quelle sauce ils allaient être mangés. Je vous assure que la violence de leur colère n'est rien à côté de celle de mes mots policés. Rien !

Notre responsabilité est de faire entendre cette colère. Il est légitime et juste que les organisations syndicales la traduisent dans la rue. Si vous n'entendez ni la nôtre ni la leur, vous serez responsables de l'avènement d'une République émiettée, éclatée, qui perd son sens en cessant d'incarner un État qui prend soin, qui protège et qui rassemble.

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Cet amendement a le mérite de porter le fer contre « l'intolérance avec ce qui ne cadre pas avec le juste milieu arbitrairement proclamé », ce que Pierre Serna appelle « l'extrême centre », pour lequel il y aurait de bonnes réformes dans l'absolu. Nous défendons, nous, la démocratie sociale, qui fonde le paritarisme. Cet amendement ne vise pas à reporter l'entrée en vigueur de la réforme. Il demande seulement l'organisation d'une concertation avec les organisations syndicales et patronales. Si même la concertation et le paritarisme vous font peur, alors c'est la démocratie qui vous effraie. La voix du peuple peut s'exprimer de différentes manières : dans l'entreprise, dans la rue ou à l'Assemblée nationale. Chaque fois, elle est légitime. Je vous demande de l'entendre.

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Madame Yadan, François Ruffin a dit tout à l'heure que 52 % des Français souhaitaient une explosion sociale. Il faut envisager ce chiffre avec calme et regarder ce qui se passe dans le pays. On voit beaucoup de colère en raison de la réforme des retraites, mais plus largement parce que la situation sociale est compliquée, parce que les factures de gaz et d'électricité augmentent et que les gens ne peuvent les payer car les salaires, eux, n'augmentent pas. Une large partie du peuple partage l'idée selon laquelle, pour les riches, il y a toujours de l'argent. Vous leur avez encore fait 8 milliards d'euros de cadeaux fiscaux en engageant la responsabilité du Gouvernement sur le budget. Nous ne faisons que vous alerter. Le risque d'une explosion sociale est réel. Ne méprisez pas la volonté populaire !

J'ajoute que, si nous siégeons ici, c'est à la suite d'insurrections. Trois de nos républiques sont nées d'insurrection : la Première, la Deuxième et d'une certaine manière la Quatrième car la libération de Paris était le fait d'une insurrection. Quand vous refusez de voir que la colère populaire peut s'exprimer d'une manière qui sort des cadres institutionnels, vous êtes à côté de la plaque. N'oubliez jamais l'article 35 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1793 : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. » (Interruptions.) Notre peuple a la mémoire longue. Nous vous disons de faire attention car il y a de la tension dans le peuple français.

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Depuis des semaines, on entend répéter – pour convaincre les Français de soutenir cette réforme – que, si on ne fait rien, les pensions vont baisser. Vous aimez les modèles étrangers et vous donnez souvent la Suède en exemple. Or, dans ce pays, 92 % des femmes et 72 % des hommes ont vu leur pension baisser avec le report de l'âge légal. Répéter le même mensonge quarante fois n'en fera pas une vérité. Arrêtez !

N'importe quel enfant peut comprendre ce qui se passe. Presque un Français sur deux ne travaille pas jusqu'à l'âge de la retraite. Demain, beaucoup n'auront pas une retraite à taux plein, subiront une décote ou n'obtiendront plus la surcote. Votre rhétorique ne prend plus. Un sondage Harris Interactive montre aujourd'hui une hausse de l'opposition à cette réforme. Cessez de prendre les Français pour les idiots en mentant continuellement ! Ils ont fait leurs calculs et ils se sont rendu compte. Non seulement leurs pensions ne seront pas préservées, mais elles baisseraient de façon significative. Pour moi-même, je m'en fiche : j'ai fait des études, je suis arrivé tard sur le marché du travail, cette réforme ne changera rien pour moi. Mais il faut être hors sol pour imaginer que des maçons, des carreleurs, des couvreurs pourront aller jusqu'à 64 ans. Mon père est couvreur. Il est déjà usé à 59 ans. Ses genoux doublent de volume le soir. Stop !

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Il est logique que nos concitoyens ne se réjouissent pas à l'idée d'un effort supplémentaire et de travailler quelques mois supplémentaires, un an ou peut-être deux ans supplémentaires pour certains. Cependant, 40 % des Français continueront à partir à 62 ans grâce aux critères de pénibilité.

Les Français disent à 75 % qu'ils ne veulent pas de cette réforme. Mais au fond, la moitié d'entre eux sait qu'il faut une réforme. Au fond de vous-mêmes, vous savez très bien qu'il faut cette réforme. Quand les mirages que vous présentez se seront dissipés et que vous ouvrirez les yeux en retombant sur la terre ferme, vous devrez reconnaître qu'aucun pays en Europe n'a pu échapper au recul de l'âge de la retraite ou à l'augmentation du nombre de trimestres nécessaires. Les prévisions du COR ont intégré le recul de l'âge légal de départ à 64 ans prévu par la réforme Touraine. J'espère que les socialistes assument cette réforme. Mais elle ne suffit pas.

Il faut relire Michel Rocard qui, en 1999, dix-huit ans après la réforme de 1981, disait : « Je vais vous confier un petit secret : j'ai été l'un des rares à déclarer en Conseil des ministres que c'était une folie. [...] Je savais que ce serait une conquête temporaire et dangereuse. » Vous le savez tous au fond de vous ! Et beaucoup de Français – qui ne sont pas contents, je le constate comme vous – le savent très bien aussi.

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Le modèle suédois repose à la fois sur la capitalisation et sur la répartition. C'est la raison de son échec. Nous proposons au contraire de sauver le système par répartition. Mais celui-ci est déficitaire de 30 milliards d'euros tous les ans, financés par la dette. Vous voulez en ajouter 15 autres. Ce n'est pas supportable. Monsieur Ruffin, je ne vous comprends pas : comment pouvez-vous jouer sur les peurs de cette façon ? Ne voulez-vous pas, vous aussi, la survie de notre système ?

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Si les gens ne sont pas d'accord, ce n'est pas parce qu'ils sont égoïstes et qu'ils ne pensent qu'à leur propre vie – cela pourrait suffire, d'ailleurs. Mais ils en ont ras-le-bol qu'on leur dise que c'est à eux de payer votre politique, qu'il est impossible de taxer les superprofits. Pour régler le déficit conjoncturel du régime des retraites, il suffirait de prélever 2 % de la fortune des quarante personnes les plus riches. Ras-le-bol de vous voir refuser de partager les richesses !

(Exclamations.)

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Vous dites vouloir sauver la répartition. C'est faux ! Ce que vous voulez sauver, c'est la fortune des plus riches. Et pourquoi ? Parce que vous croyez que la fortune des riches ruisselle. C'est faux ! Tous les économistes le savent, les Français aussi. S'ils ne sont pas d'accord, encore une fois, ce n'est pas par égoïsme. Ce serait bien assez, lorsqu'ils voient leurs parents brisés par le travail et les chômeurs de longue durée qui, à 55 ans, se retrouvent au RSA. Le sentiment d'injustice est immense. Vous le savez, vous l'entendez. Revenez à la raison !

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Monsieur Ménagé, le rapport du COR dit qu'il y aura, à terme, diminution des pensions alors qu'elles vont augmenter avec cette réforme, notamment pour les femmes : + 2,2 % pour la génération 1972.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 1er non modifié.

Article 2 : Mise en place d'un indicateur relatif à l'emploi des salariés âgés

Amendements de suppression AS3161 de M. Pierre Dharréville, AS3742 de M. Sébastien Peytavie, AS3909 de Mme Sandrine Rousseau, AS4788 de M. Hadrien Clouet et AS4989 de Mme Marie-Charlotte Garin.

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Pourquoi cet index des seniors est-il présent dans ce projet de loi, et pourquoi proposons-nous de le supprimer ? Lors de la législature précédente, la Macronie avait déjà tenté d'abîmer notre droit à la retraite. L'un des arguments qui avait fait capoter votre projet, c'est qu'un peu moins d'une personne sur deux, lorsqu'elle liquide sa pension, n'occupe déjà plus d'emploi. Allonger la durée de travail ne ferait que grossir ce nombre. C'est un écueil considérable pour votre projet.

Depuis quelques mois, le Gouvernement prétend donc faire de l'emploi des seniors une priorité après avoir, par ordonnances, détricoté le droit du travail, accru la précarité et fragilisé les travailleurs. L'indicateur qui nous est proposé est une mesure d'affichage, qui n'aura aucun effet sur les conditions d'emploi des salariés seniors. Aucune obligation n'est imposée aux entreprises, hors celle de rendre l'index public. C'est beaucoup de bruit pour rien. Il faudrait pourtant regarder de près cette réalité sociale. Il n'est pas normal que des salariés en fin de carrière soient mis dehors alors qu'ils pourraient continuer à travailler, comme il n'est pas normal que les salariés qui ne le peuvent pas se retrouvent dans un entre-deux mal pris en compte, ni emploi ni chômage. Votre réforme va aggraver la situation car davantage de gens seront concernés.

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Ce projet de loi prétend miser sur l'emploi des seniors par un unique outil : l'index des seniors. Mais si les entreprises veulent échapper à l'amende, elles n'ont qu'une seule chose à faire : publier leur index. Elles n'ont même pas besoin de résultats. Vous imitez, au rabais, l'index de l'égalité professionnelle qui a pourtant prouvé son inefficacité dans la lutte contre les discriminations au sein des entreprises.

Ce qu'ont en commun ces deux indicateurs, c'est le flou. L'imprécision des critères de l'index de l'égalité professionnelle a permis à des entreprises d'obtenir des notes élevées alors que la réalité était peu reluisante. Mais des sanctions étaient au moins prévues en cas de résultats insuffisants. Ici, il suffira aux entreprises de publier l'index des seniors pour échapper à toute sanction, même avec une note de 2 sur 20 ! Il ne servira que de faire-valoir pour des entreprises peu scrupuleuses qui considèrent les seniors comme des salariés jetables. Le grand plan du Gouvernement se résume à une coquille vide. Pourtant, l'urgence est là, les discriminations fondées sur l'âge criantes : 63 % des salariés entre 44 ans et 55 ans en recherche d'emploi n'ont pas été sollicités par des recruteurs au cours des six derniers mois.

Le groupe Écologiste - NUPES appelle à la suppression de cet article et de l'indicateur qu'il crée. Car celui-ci sera – comme son prédécesseur l'index de l'égalité professionnelle – détourné par des entreprises qui ne subiront aucune sanction financière. Nous voulons, nous, une politique ambitieuse pour un travail digne et pour un repos digne.

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L'un des défauts majeurs de cette réforme est que toutes les contraintes sont supportées par les salariés. L'index des seniors est la seule et unique mesure qui s'adresse aux entreprises et il est uniquement incitatif. Aucune sanction n'est prévue.

Au restaurant, parfois, une feuille de salade est posée sur votre assiette, pour faire joli : l'index des seniors, c'est la feuille de salade de la réforme des retraites. Il n'a aucune utilité, aucune espèce de conséquence pour les entreprises. Si l'on voulait s'attaquer au problème de l'emploi des seniors, on ferait quelque chose de différent ; on s'intéresserait au déroulé des carrières, aux horaires de travail, à la pénibilité. La France se distingue en Europe par l'importance des TMS et par la difficulté des conditions de travail, par conséquent par des taux d'incapacité et d'invalidité supérieurs à la moyenne.

Une feuille de salade sur une assiette de restaurant, ça ne sert pas à grand-chose. C'est de la décoration. Nous proposons de l'enlever et de travailler véritablement le sujet.

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Cet article 2 est un bel exemple d'application de la feuille de route du Medef, qui impose aux personnes de plus de 60 ans la triple peine.

Première peine : le Gouvernement s'apprête à leur imposer de travailler jusqu'à 63, 64, 67 ans. Cette idée n'est jamais remise en question. On parle du travail des seniors comme s'il s'agissait d'un fait naturel, qui va de soi. Rappelons que l'on parle d'aides-soignantes, d'éboueurs, de caristes, de profs qui vont devoir peiner jusqu'à 64 ans !

Deuxième peine : il sera impossible de toucher quoi que ce soit si l'on souhaite partir avant. Ceux qui partent aujourd'hui à 62 ans devront cotiser deux années supplémentaires sous peine de tomber dans le sas de précarité. Il concernait en 2021 la moitié des personnes de 61 ans, c'est-à-dire que la moitié des gens qui ont dépassé 60 ans ne sont plus ni en emploi, ni en retraite. Ils sont au RSA, en invalidité, au chômage...

Troisième peine : le Gouvernement a reculé en supprimant de son texte les pénalités contre une entreprise qui ne recrute aucune personne dite « senior ». En n'imposant pas la moindre sanction, Emmanuel Macron entend faire peser le poids de leur non-emploi sur les seniors eux-mêmes. On sait ce que valent les demandes du Gouvernement aux entreprises. On a vu Bruno Le Maire demander poliment aux fournisseurs d'énergie de faire un effort, tout cela autour d'une galette des rois. Tremblez ! Ici, c'est pareil : la seule obligation, c'est la publication de l'indicateur. Ce qu'il doit être précisément, on ne le sait même pas.

Ce que vous proposez, c'est une désorganisation généralisée qui n'aura d'autre effet que l'usure des corps et des esprits, sans aucun contrôle. Nous ne partageons pas votre vision d'une société où le travail est le seul horizon. En attendant l'abandon de ce projet, nous proposons par l'amendement AS4788 de supprimer cet article.

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Vous proposez la mise en place d'un indicateur relatif au taux d'emploi des salariés de plus de 55 ans. Je rappelle que le taux d'emploi des 55-64 ans est en deçà de la moyenne européenne. Rien ne laisse penser que cet indicateur permettrait de l'améliorer ne serait-ce qu'un peu. Parmi les retraités nés en 1950, un tiers n'était plus en emploi l'année précédant sa retraite. Plus précisément, c'est le cas de 37 % des femmes et de 28 % des hommes. Le recul de l'âge de départ à la retraite ne fera qu'accroître le nombre de gens pris dans ce sas de précarité, ni en emploi ni à la retraite.

C'est le Président de la République qui, en 2019, avait dit : « Tant qu'on n'a pas réglé le problème du chômage dans notre pays, franchement, ce serait assez hypocrite de décaler l'âge légal. » Dans cet article 2, tout est de l'affichage. Il n'y a aucune contrainte alors que l'index de l'égalité professionnelle a déjà eu très peu d'effet ; les seules améliorations sont structurelles, à long terme. Nous ne voyons aucune raison de soutenir cet index et nous en demandons la suppression.

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L'article 2 n'est ni une feuille de salade, ni la feuille de route du Medef qui, je le rappelle, y est opposé. Il crée un outil utile pour les employeurs comme les salariés. Un changement culturel est nécessaire car notre taux d'emploi des seniors est bas ; nous avons besoin de savoir comment, dans chaque entreprise, améliorer les choses, aller plus loin en matière d'intégration des salariés âgés. En supprimant l'article, ces amendements suppriment aussi les négociations obligatoires sur l'emploi des seniors.

Avis défavorable.

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Le travail des seniors devrait être au cœur de ce projet de loi. Le groupe Les Républicains avait déposé des amendements sur l'aménagement du travail à temps partiel de manière choisie, sur la baisse des cotisations patronales à partir de 60 ans, sur le déplafonnement du compte personnel de formation à partir de 50 ans ou encore sur la valorisation du mentorat et du tutorat en entreprise, pour que ceux qui travailleront jusqu'à 64 ans trouvent un sens à leur activité et puissent le faire de la meilleure manière possible. Je regrette que ces amendements aient été déclarés irrecevables. C'est une conséquence du choix d'un PLFRSS. Cela nous prive d'un débat sur les contreparties acceptables à l'effort demandé aux Français.

Je rappelle que le Medef n'est pas satisfait de cet index, puisque l'on comparera des entreprises très différentes. J'espère que nous pourrons avoir dans l'hémicycle un vrai débat, car c'est une lacune du projet de loi qu'il faudra combler si nous voulons avancer.

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Les programmes de préretraite datent d'il y a cinquante ans. Autrement dit, depuis cinquante ans, gauche et droite se sont accommodées de l'idée qu'il faut montrer la sortie aux salariés de 50 ou 55 ans. C'est une spécificité qui distingue notre pays de ses voisins, en particulier scandinaves, et c'est une source d'anxiété pour nos concitoyens, en particulier le tiers des non-retraités de 62 ans au chômage ou inactifs sans pouvoir faire valoir leurs droits à la retraite. Comment continuer ainsi deux ans de plus, voire davantage, pour bénéficier du taux plein ?

Le décalage de l'âge pivot, qui figure aussi dans notre projet, fera augmenter le taux d'emploi en fin de carrière. Toutefois, ce n'est pas suffisant. Comme l'a dit la Première ministre, l'index des seniors est une première réponse. Mais elle n'est pas suffisante non plus. Il permet aux entreprises, aux branches et à nous tous de prendre conscience de ces pratiques ancrées depuis cinquante ans chez les chefs d'entreprise comme chez les salariés.

La situation actuelle n'est pas une fatalité. En Finlande, où le taux d'activité des seniors était plus bas qu'en France au début des années 2000, il atteint des niveaux record, autour de 70 % pour les personnes de 61 à 64 ans. Une telle évolution suppose des éléments qu'il faudra traiter dans les textes à venir sur le travail, dont la retraite progressive et la formation professionnelle – qui paradoxalement concerne davantage les cadres que les ouvriers, les employés et les travailleurs de plus de 50 ans. Ce sont de grandes avancées. Saluons l'index des seniors pour ce qu'il est : nécessaire, mais pas suffisant.

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Cet article 2 est un cavalier social. Je parie qu'il sera censuré par le Conseil constitutionnel si le texte va à son terme.

L'enjeu crucial pour l'avenir de nos retraites est notre capacité à faire augmenter de manière volontaire le taux d'emploi des travailleurs âgés – les 55-65 ans. Or, le projet de loi ne contient presque rien à ce sujet. Il y a seulement une petite mesure bienvenue selon laquelle le cumul emploi-retraite ouvrirait désormais des droits à pension.

Pour combler cette lacune, nous avions suggéré plusieurs pistes à la Première ministre. Pourquoi ne pas moduler les cotisations patronales selon l'âge, comme pour les jeunes ? C'est une proposition de la Confédération des petites et moyennes entreprises, entre autres. Deuxième piste : obliger les entreprises à négocier sur la qualité du taux d'emploi des seniors et les moyens de combattre l'effet d'éviction de ces derniers. Troisièmement, améliorer le recours à la retraite progressive qui, certes, est étendu à la fonction publique, mais le vrai problème reste le secteur privé. Enfin, abonder le compte personnel de formation ou instaurer un cliquet pour éviter un désinvestissement dans la formation des 55-65 ans.

Voilà qui concourrait à une vraie politique d'emploi des seniors. Elle est absente du texte et l'index des seniors n'apportera aucune amélioration. Je suis favorable aux amendements de suppression dans l'espoir d'éviter une censure du Conseil constitutionnel qui serait désagréable au Gouvernement.

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Avec l'article 2, nous sommes censés aborder les mesures positives de la réforme, mais l'index des seniors est une fumisterie majeure. Vous mettez l'accent sur un problème dont tout le monde convient qu'il est central : on pourrait rétablir l'équilibre du système des retraites en améliorant le taux d'emploi des seniors. Mais, alors que les efforts devraient se concentrer sur cette priorité, vous agitez un hochet, vous donnez un os à ronger, un prétendu moyen d'agir pour l'emploi des seniors qui est, en réalité, complètement dévitalisé.

À peine un quart des salariés seront concernés. Les sanctions encourues sont virtuelles. Elles ne pénalisent que l'absence de publication et non l'échec à atteindre un objectif quantifié. Vous prétendez remédier au caractère déséquilibré de la réforme par cette mesure. Ce que disait le Président de la République il y a trois ans et demi reste d'actualité : on ne peut pas repousser l'âge de la retraite tant que l'on n'a pas significativement augmenté le taux d'emploi des seniors. Cette augmentation significative n'a pas eu lieu depuis. Mais vous décidez de repousser l'âge légal. Pourtant, s'il y avait un point susceptible de faire consensus, ce serait bien une loi dédiée à l'emploi des seniors, puis un bilan au bout de quelques années.

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Je ne demande qu'à être convaincue par cet article. Si j'ai bien compris, demander aux entreprises de produire un index résoudra le problème de l'emploi des seniors. Mais, en l'absence de sanctions financières, comment le Gouvernement et la majorité vont-ils obliger les entreprises à embaucher ou à préserver les seniors ?

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Cet article met en pratique l'hypocrisie qu'évoquait Emmanuel Macron en 2019. Sa portée est ridicule au regard des enjeux. Il ne concerne que les entreprises de plus de trois-cents personnes alors que près de la moitié des salariés travaille dans une entreprise d'un effectif inférieur. La moitié des salariés ne sont donc pas concernés par l'index, qui n'est par ailleurs qu'une photographie. Et on demandera aux inspecteurs du travail, peu nombreux et qui ont déjà d'autres chats à fouetter comme la prévention des risques professionnels et des accidents du travail, de vérifier l'existence de cet index qui ne change rien à rien ? Vous qui donnez sans arrêt des leçons d'efficience de l'emploi des deniers publics, vous êtes champions toutes catégories !

Vous savez que cet article n'aura aucun effet. Il est là pour faire semblant. Nous n'avons aucune envie de cautionner cette démarche. Ce qu'il faudrait, c'est un vrai travail sur l'emploi des seniors, que nous réclamons de longue date et qui nécessiterait du sérieux et du temps. Nous serions prêts à l'entreprendre.

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L'article impose aux entreprises de produire et de publier un index, mais pas d'améliorer l'emploi des seniors. C'est étrange. Il y a une dizaine d'années, le contrat de génération, négocié avec les organisations syndicales, permettait d'encadrer les entrées et sorties progressives au sein de l'entreprise.

L'index n'empêchera nullement la catastrophe qui vient. Les seniors licenciés à 57 ou 59 ans ne retrouvent pas d'emploi parce que leur niveau de salaire correspond à une expérience de plusieurs décennies et que leur mobilité est plus contrainte qu'à 20 ans. Tout ce qu'on leur propose est très en dessous de ce à quoi ils peuvent prétendre. Ni en emploi, ni à la retraite, ils sont au chômage ou en invalidité, voire au RSA.

À la page 23 de l'étude d'impact, à propos des impacts sociaux de la mesure, on lit : « Impact sur les jeunes : sans objet. » En d'autres termes, le report de l'âge de la retraite n'aura aucun impact sur les jeunes. Je rappelle que le président du COR a eu un sourire, pour ne pas dire plus, quand on lui a expliqué qu'il fallait passer du modèle économétrique de simulation et d'analyse générale de l'économie, dit Mésange, à l'approche comptable dont le modèle, comme par hasard, fait apparaître deux créations d'emploi chez les jeunes pour une seule chez les seniors.

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L'employabilité des seniors nous préoccupe tous. L'article a pour intérêt d'améliorer la transparence. Pour modifier les comportements et négocier entre partenaires sociaux, il faut des indicateurs. De ce point de vue, l'index peut avoir un effet puissant. Il ne résoudra pas le problème de l'employabilité mais il permettra au moins de savoir ce qu'il en est. Il pourrait aussi être un critère d'exemplarité des entreprises.

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On savait l'intérêt commercial à prétendre faussement une production écologique ou locale. On découvre grâce au Gouvernement, peut-être sur le conseil de McKinsey, la mesure purement cosmétique visant à se prétendre inclusif envers les seniors. Certes, elle ne coûte pas grand-chose. Mais elle ne résoudra pas le problème. L'index est une façon de répondre à l'argument avancé par le Président de la République quand il jugeait « hypocrite » de repousser l'âge de départ sans régler l'employabilité des seniors. D'autres mesures auraient été possibles pour s'y efforcer, qu'il ne nous est pas autorisé de proposer dans le cadre du présent véhicule législatif. Je pense notamment à la formation, puisque seul un travailleur de plus de 55 ans sur dix utilise son compte personnel de formation. On pourrait aussi accompagner les entreprises afin qu'elles gardent les seniors en leur sein.

Je ne me vois pas dire aux femmes de 55 ans qui me rencontrent dans ma permanence, et qui ont perdu confiance parce que le système que vous défendez leur donne un sentiment de péremption, qu'on a réglé leur problème de chômage par un index.

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La Cour des comptes a montré l'inefficacité des contrats de génération, qui ont donc été supprimés en 2017. Ce n'est pas un quart des salariés qui sera concerné par l'index, mais 55 % selon l'Insee.

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Cela ne tient pas compte de la fonction publique !

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Cela fera encore plus alors.

Le texte améliore l'information et la transparence. Il impose une négociation obligatoire sur l'emploi des seniors – une mesure forte peu abordée ici.

Nous en viendrons à l'article 13 aux transitions entre emploi et retraite.

Enfin, comme Mme Panosyan-Bouvet l'a dit, l'indicateur est nécessaire, non suffisant. Il faut ajouter les mesures que nous avons commencé à énumérer ce matin, notamment celles du texte à venir sur le plein emploi, qui concerneront aussi l'emploi des seniors.

La commission rejette les amendements.

Amendement AS7243 de M. Thibault Bazin

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L'exposé des motifs de l'article parle de « faire de l'emploi des seniors une priorité des entreprises ». Mais c'est du pays tout entier qu'il doit être une priorité. L'index ne sera pas l'unique moyen de favoriser l'emploi des seniors. Dans sa rédaction actuelle, l'article pose d'ailleurs plus de problèmes qu'il n'en résout. Ainsi l'index n'est-il pas du tout adapté au sport professionnel.

Il faudrait étendre la réflexion à un véritable plan de formation qui définisse un parcours permettant des reconversions. Avec l'âge, certains métiers deviennent difficiles. En matière de prévention, nous n'avons pas été au rendez-vous. Il faudrait également un choc fiscal d'incitation à l'embauche.

Il convient ensuite de réfléchir, en lien avec la branche accidents du travail et maladies professionnelles, au rapport entre maladies professionnelles et cotisations des entreprises. Celles-ci ne doivent pas être pénalisées si un de leurs salariés déclare une maladie imputable à ses précédents employeurs.

En matière de retraite progressive, le projet de loi ne va pas assez loin. Il faudrait construire les fins de carrière de manière plus souple, les adapter, notamment concernant les rythmes. De ce point de vue, le dispositif des deux ans ne convient pas. Les comptes épargne-temps pourraient aussi être mobilisés.

Il y va surtout de notre rapport à nos seniors. La formulation « salariés âgés » est parlante ; elle peut d'ailleurs poser un problème d'intelligibilité. En tout cas, on pourrait valoriser ceux qui sont expérimentés comme on le fait dans d'autres pays. Ils pourraient former la nouvelle génération, lui transmettre leur savoir.

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Demande de retrait au profit d'un amendement ultérieur qui tend à remplacer l'expression « salariés âgés » par « seniors ».

L'amendement est retiré.

Amendements AS2350 de M. Stéphane Viry, AS7205 de M. Bruno Fuchs, AS2351 de M. Stéphane Viry, AS7204 de M. Bruno Fuchs, AS2352 et AS2353 de M. Stéphane Viry (discussion commune).

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Par l'amendement AS2350, je propose de remplacer « salariés âgés » par un terme juridiquement plus clair et moins péjoratif. L'amendement AS2351 remplace « âgés » par « expérimentés ». C'est plus valorisant. Le tutorat ou le mentorat représentent un véritable apport dans les entreprises. L'amendement AS2352 remplace le même mot par l'expression « de plus de 55 ans », et l'amendement AS2353 par « de plus de 57 ans ».

Quand on dit « âgés », à quel âge exactement pense-t-on ? Les dispositifs de retraite progressive s'appliquent aux deux dernières années d'activité. Cela veut-il dire que, si l'âge de départ est à 64 ans, on n'est âgé qu'à 62 ans ? On pourrait plutôt profiter des rendez-vous de prévention à mi-carrière pour proposer des reconversions professionnelles vers des métiers plus adaptés, où il serait possible de transmettre son expérience.

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Avis favorable à l'amendement AS2350, que je préfère aux autres. Nous allons débattre de l'âge qu'implique le mot « senior ».

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C'est un amendement cosmétique qu'on dirait rédigé par une main de catégorie socio-professionnelle supérieure du Medef. Il faut conserver les mots dans leur crudité : pas la peine de les envelopper de « seniors » et autres enjolivements. Pour beaucoup de salariés d'autres catégories professionnelles, dire « âgés » est un minimum : arrivés à 60 ans, ils sont cassés, brisés, usés. Si nous avions déposé un amendement de réécriture de ce genre, c'est plutôt en ce sens que nous l'aurions rédigé.

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Que faire pour améliorer le taux d'emploi des seniors ? Ce que je comprends, c'est que vous combattez l'emploi des seniors, préférant l'oisiveté ou la paresse. Pour ma part, je rencontre des seniors qui aimeraient que l'on construise des parcours leur permettant de continuer à travailler, même si ce n'est peut-être pas autant qu'avant ou pas dans le même métier. Certains veulent aller au-delà de l'âge de départ grâce au cumul emploi-retraite ; ils ont souvent de petites pensions après une carrière hachée et ils n'ont le droit de travailler que pour 300 euros par mois au maximum. Bien sûr, il y a des personnes qui ont été brisées et il faut y être sensible. Nous avons à faire en matière de prévention. Mais il y a d'autres parcours, qui ne sont pas réservés aux catégories supérieures. Il faut pouvoir accompagner les salariés exerçant tous les métiers, chacun selon son parcours.

Je ne suis pas sûr que l'index des seniors soit l'alpha et l'oméga d'une politique d'emploi des seniors. Il y manque beaucoup éléments. Mais un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale n'est pas le lieu pour les aborder. Il est dommage que nous n'ayons pu débattre d'une politique cohérente, faute d'avoir été saisis de l'ensemble des textes y concourant. À l'arrivée, la réforme des retraites est une double peine : on dit aux seniors de travailler plus longtemps alors qu'ils ne sont plus dans l'emploi et que l'on n'a pas créé les conditions – fiscales et de formation – leur permettant d'y demeurer.

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Il faut mettre les bons mots sur les choses. Le terme « âgés » prend en compte l'usure des corps et les maladies professionnelles. Celui de « seniors » minore ces difficultés. Oui, ce sont des salariés âgés et c'est pour cette raison qu'ils ont besoin d'aménagements du travail, de pouvoir s'interroger sur leur carrière ou de formations.

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En effet, l'index des seniors n'est pas l'alpha et l'oméga. Nous ne le présentons pas ainsi. Ce n'est pas la seule réponse au chômage des seniors. La première est de faire reculer le chômage dans sa globalité car c'est ce qui changera le regard des employeurs. Les propos de la NUPES sur ces derniers, qui seraient tous cassés ou brisés, n'aident pas non plus à valoriser leur emploi.

En outre, il ne faut pas laisser dire que notre réforme ne prendrait pas en considération les personnes usées par le travail. Elle prévoit des dispositions permettant un départ anticipé, mais aussi évitant cette usure grâce à la prévention.

La commission adopte l'amendement AS2350.

En conséquence, les autres amendements tombent.

Amendement AS3797 de M. Sébastien Peytavie.

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Il s'agit, dans cet amendement et dans ceux qui suivront, de moduler les sanctions selon les effectifs de l'entreprise. Certains crieront à l'obstruction. Je demande un débat sur le sujet.

Le taux d'emploi des 60-64 ans n'est que de 33 %. Face à ce chiffre alarmant, Olivier Dussopt a dit qu'il fallait gagner la bataille de l'emploi des seniors. Mais le compte n'y est pas. En l'état, l'index des seniors ressemble à une coquille vide destinée à ne pas froisser le patronat, non à un plan de bataille. Nous proposons d'en faire un outil ambitieux de lutte contre l'âgisme qui gangrène le monde du travail. À cette fin, les sanctions seraient encourues en cas non seulement de défaut de publication de l'index, mais également de résultats insuffisants. Pour un vrai impact sur les pratiques des entreprises, il faut une définition claire et précise des indicateurs. Nous proposons une sanction financière suffisamment lourde et adaptée à la taille des entreprises, soit 3 % de la masse salariale pour les PME, 7 % pour les entreprises de taille intermédiaire et 10 % pour les grandes entreprises. C'est le strict minimum pour espérer un changement.

Il est également crucial d'appliquer le dispositif rapidement. Dans le contexte de menace sur nos retraites, il faut aux seniors une fin de carrière digne. Nous le devons aux milliers d'entre eux victimes de discriminations à l'embauche et de l'acharnement d'un Gouvernement qui les discrimine au quotidien depuis qu'il a durci les conditions d'accès à l'assurance chômage. C'est de la vie des gens que l'on discute ici ! Combien de temps pour instaurer un index des seniors ? Combien pour engager les négociations ensuite ?

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Nous faisons confiance aux branches pour négocier les indicateurs. Par ailleurs, une date de mise en œuvre existe : automne 2023 pour les entreprises de plus de 1 000 salariés et mars 2024 pour celles de plus de 300.

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En 2010, avant le report de l'âge légal de 60 à 62 ans, le taux d'emploi des 60-64 ans était de 19 %. Il a également chuté entre 1980 et 1986 après l'abaissement de l'âge légal de 65 à 60 ans. Cela montre que cet âge légal est un levier efficace pour accroître ce taux et maintenir les seniors dans l'emploi. La réforme va donc augmenter le nombre de seniors qui travaillent car, quand l'employeur et le salarié décident du moment où celui-ci va quitter l'entreprise, dans le cadre d'un plan de départ volontaire ou d'une rupture conventionnelle, ils prennent en considération la borne qu'est l'âge légal.

Ce levier puissant n'est pas le seul sur lequel agir. Le cumul emploi-retraite, qui ouvrira des droits à pension si la réforme est adoptée, en est un autre. La modification des règles de l'assurance chômage au profit des personnes qui travaillent ou souhaitent travailler l'est également : la prime associée à la reprise d'emploi sera plus élevée pour les seniors.

L'index ne sert pas seulement à responsabiliser les entreprises. Je vous invite à discuter avec des gens de 55 ans qui cherchent un emploi. Ils envoient des CV, par milliers parfois, à des entreprises qui n'ont pas prévu d'embaucher des seniors, mais ne le disent pas. L'index permettra de savoir quelles entreprises jouent le jeu de l'emploi des seniors, de cibler les recherches et d'éviter le découragement. Discutez avec les conseillers de Pôle emploi ; vous comprendrez qu'améliorer la recherche d'emploi est une des fonctions de l'index.

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Contrairement aux idées préconçues, une étude montre qu'un départ précoce à la retraite ne règle pas le problème du taux d'emploi des seniors. Au contraire, ce dernier s'améliore quand on décale l'âge de départ. Ensuite, 100 000 seniors en plus qui travaillent, c'est 1 milliard d'euros de recettes supplémentaires.

En ce qui concerne l'index, pourquoi ne pas l'imposer aux entreprises de moins de trois-cents salariés, jusqu'au seuil de cinquante salariés ? Le porte-parole du Gouvernement a dit envisager des sanctions financières. Où en est la réflexion sur ce point ?

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L'index des seniors illustre un invariant de votre politique : être durs avec les salariés. Il y a quelques mois, la réforme de l'assurance chômage a réduit de manière drastique la durée d'indemnisation des seniors. Mais vous êtes faibles avec les grandes entreprises qui, elles, n'encourent aucune sanction. Conjuguée à la casse du système social, l'absence d'une véritable politique de l'emploi provoquera inéluctablement une hausse du nombre de seniors qui ne sont ni en emploi ni à la retraite. Aujourd'hui, 26 % de ces personnes sont au chômage tandis que 23 % n'ont pas de revenus, autrement dit elles dépendent soit des allocations et des prestations sociales, soit de leur famille ou de leur conjoint – imaginez ce que peut ressentir une personne qui a travaillé toute sa vie pour finir aux crochets de quelqu'un ! Vous créez une trappe à pauvreté pour des gens qui ont travaillé toute leur vie. Avec l'expérimentation en cours sur le RSA, dont les bénéficiaires devront travailler pour continuer à percevoir l'allocation sans se constituer des droits à la retraite, vous promettez un monde de précarité à tout âge.

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Vous reconnaissez le problème que pose l'emploi des seniors. M. Ferracci a précisé les mesures que le Gouvernement entend prendre pour y remédier. Convenez qu'elles ne sont pas à la hauteur. Vous prétendez que l'index des seniors résoudra le problème en contribuant à changer les mentalités. Admettez qu'il n'est pas une solution miracle !

Farida Amrani vous a interrogés sur les moyens envisagés pour éviter qu'un nombre accru de seniors se trouvent sans emploi du fait du décalage de l'âge de départ. Je crains que vous ne reproduisiez le mauvais tour joué avec Parcoursup. Votre discours était alors : « Nous instaurons une sélection mais, rassurez-vous, nous améliorerons l'orientation en doublant le nombre de professeurs principaux et en organisant des visites dans les universités. » Finalement, la sélection est bien là, pas les contreparties qui devaient faire avaler la pilule. Je réitère donc la question : comment pallier les immenses difficultés que posera le décalage de l'âge de départ à la retraite ?

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Il faut n'avoir jamais croisé un directeur des ressources humaines pour imaginer qu'un index changera quoi que ce soit. Le report de l'âge légal n'aura aucun impact sur l'emploi des seniors. Quant à l'efficacité d'éventuelles sanctions, vous n'ignorez pas que certaines entreprises préfèrent payer les amendes plutôt qu'embaucher des personnes en situation de handicap. Il en ira de même pour l'emploi de seniors. Faute d'idées, vous en êtes réduits à proposer un indicateur ou un numéro vert.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS858 de M. Joël Aviragnet.

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L'index aura aussi peu d'effet que les mesures d'amélioration de la qualité de vie au travail ou d'insertion des personnes en situation de handicap.

L'amendement assigne à l'employeur l'objectif d'améliorer l'embauche des seniors et de les maintenir en activité comme il le fait pour les travailleurs moins âgés. La loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail prévoit une visite médicale obligatoire à 45 ans. Nous devons faire preuve de cohérence dans les mesures que nous adoptons. Sinon, les entreprises peinent à les appliquer.

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Avis défavorable.

Le président du COR a rappelé qu'il ne fallait pas opposer l'embauche d'un jeune et celle d'un senior. Les États dont le taux d'emploi des seniors est le plus fort sont aussi ceux dans lesquels le taux d'emploi des jeunes est le plus élevé.

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Il s'agit d'un amendement de bon sens pour trois raisons. D'abord, il substitue à un objectif une prescription. Ensuite, il précise l'âge à partir duquel une personne est qualifiée de senior. Enfin, il est opérationnel puisqu'il impose à l'employeur d'agir sans discrimination. Or, on sait que les seniors en sont particulièrement victimes, qu'il s'agisse de formation, de salaire ou de placardisation.

Selon une étude de Simon Rabaté et Julie Rochut sur l'impact de la réforme des retraites de 2010 sur l'activité des seniors en France, 33 % des personnes dont l'âge de départ a été décalé de deux ans sont au chômage, 17 % en arrêt maladie ou en invalidité et 10 % inactifs. Autrement dit, 60 % des personnes concernées ne sont pas en emploi. Le report de la retraite ne permet pas de maintenir les gens sur le marché du travail. Cela ne fonctionne pas. Je réitère à mon tour la question : puisque vous escomptez un effet limité de l'index sur l'emploi des seniors, quelles autres solutions proposez-vous ?

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Je m'étonne que certains amendements examinés par la commission des finances aient subi ici les fourches caudines de l'irrecevabilité, en particulier sur le cumul emploi-retraite.

Il faut manier les comparaisons avec précaution. Ainsi, le taux de chômage des 50 ans et plus est-il l'un des plus bas avec 5,5 %.

Il paraît dangereux d'imposer aux entreprises des contraintes législatives. Si nous voulons obtenir des résultats, ce sont les branches professionnelles qui doivent s'emparer du sujet.

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Monsieur Clouet, il existe d'autres études qui établissent un lien de causalité entre report de l'âge légal et emploi des seniors. Il est vrai que le taux d'inactivité augmente. Mais l'impact sur le taux d'emploi est réel.

La réforme propose de nombreuses mesures destinées à protéger les personnes hors d'état d'exercer un emploi – incapacité ou inaptitude – ainsi que celles qui ont subi des métiers pénibles. Une fois que les branches professionnelles auront pris en considération les trois critères – port de charges lourdes, postures pénibles et vibrations mécaniques –, les salariés pourront soit partir plus tôt, après la visite médicale à 61 ans, soit obtenir un congé de reconversion, soit bénéficier d'un accompagnement en matière de prévention. Il faut considérer les bénéfices du report de l'âge légal pour le taux d'emploi des seniors et les finances publiques comme la cohérence globale de la réforme.

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Monsieur Clouet, les mêmes auteurs estiment que « cette combinaison de réformes a eu un impact indéniable : au cours des vingt dernières années, l'emploi des travailleurs âgés a augmenté régulièrement et significativement avec une forte accélération au cours des dernières années ». Les sujets de discorde ne manquent pas mais les économistes s'accordent sur les effets positifs sur l'emploi des seniors des réformes ayant repoussé l'âge de départ à la retraite.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS3139 de M. Yannick Monnet.

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Pourquoi ne pas ouvrir un numéro vert pendant que vous y êtes ? Vous nous avez habitués à plus de créativité. Il n'est pas besoin de démontrer le caractère inopérant de l'index. Le taux d'emploi des seniors s'est détérioré, notamment sous l'effet des précédentes remises en cause de l'âge de départ à la retraite. Rien ne permet de penser que votre réforme sera bénéfique à cet égard. En revanche, tout indique qu'elle transférera des charges à l'assurance chômage et aux départements, puisque le nombre de seniors éligibles au RSA sera multiplié par quatre.

Ensuite, 495 000 seniors sont contraints de cumuler une retraite de misère et un emploi de misère alors que leur corps souffre. Votre réforme ne leur apporte aucune aide.

Enfin, quels sont les freins à l'emploi des seniors ? La nature précaire des contrats ; le nouveau salaire, nettement inférieur à l'ancien dans l'entreprise qui les a virés sans ménagement ; l'absence de formation pour s'adapter au nouvel emploi ; les obstacles à la mobilité, en particulier dans les territoires ruraux. Autant de sujets sur lesquels votre réforme est muette !

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Dans les territoires ultramarins, où le chômage des jeunes bat des records, que ferez-vous pour l'emploi des seniors ?

M. Ferracci rêve une cohérence avec la réforme de l'assurance chômage qui oblige à retrouver du travail. Je lui en donne crédit : avec ce PLFRSS, vous contraignez les seniors à retrouver du travail coûte que coûte.

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Pour que l'index améliore les conditions d'emploi des salariés âgés, il faudrait que l'employeur ne se contente pas de viser un objectif mais qu'il l'atteigne. Je reviens sur la question de mes collègues : que comptez-vous faire pour améliorer l'emploi des seniors ?

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Je vous saurais gré de ne pas détourner mes propos, monsieur Jumel. J'ai évoqué un complément de salaire destiné à aider les seniors à retrouver un emploi. J'accepte volontiers le débat dès lors qu'il évite les arguments mensongers.

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J'entends ce que vous dites, je n'avais pas saisi l'intégralité de vos propos. Néanmoins, je maintiens que la réforme de l'assurance chômage pénalisera les seniors qui font souvent partie des charrettes de licenciement car ils coûtent cher et leur productivité est mise en doute. Je vous reconnais une cohérence : d'un côté, vous tapez sur les chômeurs ; de l'autre, vous aggravez le chômage des seniors en repoussant l'âge de départ.

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Madame Keke, le projet de loi comporte deux volets sur l'emploi des seniors : l'index et la recherche de la transparence ; l'obligation de négocier dans les branches. Ils seront complétés lors de l'examen du projet de loi sur le plein-emploi. S'agissant des contraintes, je doute de leur efficacité en raison de la diversité des situations dans les entreprises. Il est préférable de laisser les branches choisir les solutions les plus adaptées.

La commission rejette l'amendement.

Amendements AS2354, AS2355, AS2357 et AS2356 de M. Stéphane Viry, amendements AS3777 de M. Max Mathiasin et AS837 de M. Jérôme Guedj (discussion commune).

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Les quatre amendements de Stéphane Viry ont pour objet de substituer à la notion de « salariés âgés » celle de « seniors » – amendement AS2354 –, celle de « salariés expérimentés » – amendement AS2355 – ou encore de préciser l'âge des personnes concernées – plus de 55 ans pour l'amendement AS2356 ou plus de 57 ans pour l'amendement AS2357.

Compte tenu de votre préférence pour le mot « seniors », madame la rapporteure générale, je retire trois amendements pour ne conserver que l'amendement AS2354.

Les amendements AS2355, AS2357 et AS2356 sont retirés.

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L'article ne nous dit pas ce qu'est un senior. C'est bizarre. Afin de contribuer à une meilleure législation, l'amendement AS3777 vise à définir les seniors comme les personnes de 50 ans et plus.

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Charles de Courson, une nouvelle fois, appuie où ça fait mal. Vous créez un index des seniors mais nous ne savons ni ce qu'est l'index – la définition des critères sur la base desquels l'emploi sera pris en compte est renvoyée à plus tard –, ni ce qu'est un senior. L'amendement tend donc à préciser qu'un salarié est considéré senior dès lors qu'il est âgé d'au moins 50 ans, ce qui n'exonère pas l'employeur d'efforts en amont en matière de formation pour préparer la poursuite de sa carrière.

Il est étrange de faire de l'index l'alpha et l'oméga de vos mesures pour développer l'emploi des seniors. J'ai noté que vous êtes toutefois plusieurs à en souligner l'insuffisance. Nous n'avons cessé de le répéter : nous aurions dû consacrer notre énergie à travailler ensemble pour accroître le taux d'emploi des seniors. C'eût été la véritable réforme des retraites, une réforme qui aurait répondu aux besoins des salariés tout en assurant l'équilibre financier du système. Faute de progression rapide de l'emploi des seniors, vous êtes condamnés à courir après ce qui constitue le cœur des inégalités de notre système.

Précisons au moins l'âge à partir duquel le timoré index des seniors s'applique. Nous sommes également favorables à la proposition de Philippe Vigier d'abaisser le seuil de trois-cents à cinquante salariés.

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Nous sommes tous sensibles au problème de l'emploi des seniors. Sous la précédente législature, une mission d'information sur l'emploi des travailleurs expérimentés avait été menée par Didier Martin et Stéphane Viry. D'autres propositions viendront dans les futurs textes compléter les mesures soumises aujourd'hui.

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Avis favorable à l'amendement AS2354, défavorable aux autres.

Il est indispensable de conserver une flexibilité. Les études de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques montrent que les discriminations fondées sur l'âge commencent à partir de 40 ou 45 ans. La politique en matière d'emploi des seniors varie selon que l'activité relève du tertiaire, de la sylviculture, de l'industrie de la construction, etc. Il n'est donc pas souhaitable d'inscrire dans la loi un âge qui pourrait s'avérer inapproprié.

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Marc Ferracci s'est félicité que le projet de réforme lève une contrainte. Mais l'âge légal n'est pas une contrainte. Personne n'est obligé de partir à cet âge-là – la date butoir est à 67 ans dans la fonction publique et à 70 ans dans le secteur privé. Votre projet a au contraire pour effet de rogner une liberté. Vous usez d'une tautologie en affirmant que, si l'on oblige les seniors à travailler plus, certains travaillent plus. Heureusement que le taux d'emploi augmente lorsque les gens sont forcés de travailler !

Le taux d'emploi doit être analysé de manière fine, par catégorie socioprofessionnelle. Chez les cadres, la réforme de 2010 a entraîné une légère hausse – il est question ici de maintien dans l'emploi et non d'accès – tandis que les ouvriers et les employés ont connu une hausse du chômage trois fois plus forte que celle de l'emploi. On peut parler d'une machine à précariser. Une question morale nous est posée : un emploi vaut-il un chômeur ? Je pense que non, contrairement à vous.

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Madame la rapporteure générale, l'amendement auquel vous êtes favorable ne résout pas le problème. Je ne suis pas insensible à votre argument selon lequel il faut laisser les branches définir ce que recouvre la notion de senior en leur sein. Mais il faut malgré tout fixer un âge. Le fait de remplacer « personnes âgées » par « seniors », même si l'intention est louable, ne suffit pas.

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Nous nous payons de mots. Après avoir substitué « seniors » à « personnes âgées », nous ne savons toujours pas à quel âge correspond cette notion. Parlons-nous du senior dans l'aviation, du maçon ou de celui qui travaille dans une petite entreprise ? Et pourquoi limiter l'index aux entreprises de plus de trois-cents salariés ? Si vous refusez de définir un seuil d'âge pour les seniors, notre débat aura été vain.

Il faut un travail en amont pour assurer aux seniors des conditions d'emploi acceptables, sans quoi ils préfèrent quitter leur poste ou être placés en congé maladie. Ces départs pèsent sur l'entreprise. Si nous voulons développer l'emploi des aînés, nous devons réfléchir sans dogmatisme. Madame la rapporteure générale, vous êtes réticente à imposer des contraintes aux patrons. Mais il faut bien que la loi fixe le cadre dans lequel l'humain s'épanouit.

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Mme la rapporteure générale l'a rappelé : l'index des seniors n'est qu'une mesure parmi d'autres. L'obligation de négociation dans les branches incitera les employeurs à embaucher des seniors ; la retraite progressive dont nous avons peu parlé jusqu'ici est un bon outil de maintien dans l'emploi ; nos actions contre le chômage seront poursuivies ; le prochain projet de loi sur l'emploi renforcera la formation et l'accompagnement des seniors.

Que proposent la NUPES et le RN ? La NUPES se contente de prôner une hausse des cotisations et des taxes. Pensez-vous vraiment que cela soit de nature à améliorer l'emploi des seniors ? N'y a-t-il pas, au contraire, un risque de casse de l'emploi ? Quant au RN, il se borne à préconiser un renforcement de la politique nataliste. Que fait-on en attendant pendant vingt ans ?

Il faut être réaliste et tenir un discours de vérité. La situation n'est pas facile mais nous nous employons à trouver des solutions.

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L'article 2 n'est pas abouti. Pour en dissiper le flou, il faudra le mettre en cohérence avec l'ensemble des politiques publiques en faveur de l'emploi des seniors et ajuster l'âge à partir duquel l'index s'appliquera.

La commission adopte l'amendement AS2354.

Puis elle rejette successivement les amendements AS3777 et AS837.

La séance est levée vingt heures.

Présences en réunion

Présents. – M. Éric Alauzet, Mme Farida Amrani, Mme Bénédicte Auzanot, M. Thibault Bazin, M. Christophe Bentz, Mme Fanta Berete, Mme Anne Bergantz, M. Elie Califer, M. Victor Catteau, M. Pierre Cazeneuve, M. Paul Christophe, M. Hadrien Clouet, M. Paul-André Colombani, M. Charles de Courson, Mme Laurence Cristol, Mme Christine Decodts, M. Arthur Delaporte, M. Pierre Dharréville, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Karen Erodi, M. Marc Ferracci, M. Thierry Frappé, Mme Marie-Charlotte Garin, Mme Anne Genetet, M. François Gernigon, M. Jean-Carles Grelier, M. Jérôme Guedj, Mme Claire Guichard, Mme Mathilde Hignet, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Sandrine Josso, Mme Rachel Keke, Mme Fadila Khattabi, Mme Laure Lavalette, M. Didier Le Gac, M. Antoine Léaument, M. Jérôme Legavre, Mme Katiana Levavasseur, M. Matthieu Marchio, Mme Joëlle Mélin, M. Yannick Monnet, M. benoît Mournet, M. Serge Muller, Mme Astrid Panosyan-Bouvet, Mme Mathilde Panot, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, Mme Maud Petit, M. Sébastien Peytavie, Mme Stéphanie Rist, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, M. François Ruffin, M. Emmanuel Taché de la Pagerie, Mme Prisca Thevenot, M. Nicolas Turquois, M. Frédéric Valletoux, M. Philippe Vigier, M. Alexandre Vincendet, M. Stéphane Viry, M. Christopher Weissberg, Mme Caroline Yadan

Excusés. - M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Isabelle Valentin

Assistaient également à la réunion. - M. Gabriel Amard, Mme Émilie Bonnivard, M. Louis Boyard, M. Xavier Breton, Mme Cyrielle Chatelain, M. Alexis Corbière, M. Jean-François Coulomme, M. Fabien Di Filippo, Mme Caroline Fiat, M. Grégoire de Fournas, Mme Raquel Garrido, Mme Clémence Guetté, M. Sébastien Jumel, Mme Karine Lebon, Mme Pascale Martin, M. Thomas Ménagé, Mme Nathalie Oziol, M. Thomas Portes, M. Nicolas Sansu, Mme Danielle Simonnet, Mme Sophie Taillé-Polian, Mme Aurélie Trouvé