La réunion

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La séance est ouverte à 9 heures.

Présidence de M. Sacha Houlié, président.

La Commission examine, en nouvelle lecture, le projet de loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l'accompagnement des victimes (n° 2308) (Mme Brigitte Liso, rapporteure).

Lien vidéo : https://assnat.fr/bELwMr

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Le projet de loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l'accompagnement des victimes revient devant notre commission. L'Assemblée l'avait adopté en première lecture le 14 février dernier. La commission mixte paritaire (CMP) n'ayant pu que constater le désaccord entre les deux chambres concernant les principales dispositions du texte, nous l'examinons en deuxième lecture.

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Je me réjouis de vous retrouver pour examiner à nouveau le projet de loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires, même si je regrette que la CMP n'ait pas abouti.

Ce projet de loi ambitieux entend réformer et moderniser le cadre applicable aux dérives sectaires, ce qui est plus que jamais nécessaire. Ce texte s'inscrit dans la stratégie nationale de lutte contre les dérives sectaires et permet d'adapter notre arsenal législatif à l'émergence de nouvelles formes de dérives, notamment celles qui se propagent par l'intermédiaire des réseaux sociaux.

Nous avons adopté en séance publique un texte dont l'équilibre d'ensemble répond aux enjeux, en renforçant la protection des victimes et en adaptant nos moyens de lutte contre toutes les formes de dérives sectaires. Je souhaite que nous nous appuyions sur les acquis de l'important travail mené en première lecture pour accroître l'efficacité de ce texte, sans remettre en question son équilibre.

Vous ne serez donc pas étonnés que je reste défavorable, comme en première lecture, à la plupart des amendements remettant en cause le texte adopté en séance publique.

Je demeure évidemment défavorable à la suppression des articles 1er, 2 et 3, essentiels pour mieux lutter contre les dérives sectaires et accompagner les victimes, et je m'oppose toujours à ce que nous revenions sur les importantes avancées concernant les victimes de thérapies de conversion.

Sur l'article 1er A, je proposerai quelques ajustements pour rendre le texte aussi opérationnel que possible.

Enfin, concernant l'article 4, je souhaite rappeler les efforts que nous avons accomplis pour parvenir à une rédaction équilibrée des dispositions créant de nouvelles infractions de provocation. Cette rédaction tient compte des préoccupations qu'a suscitées l'article : elle permet de préserver la liberté individuelle et le rôle des lanceurs d'alerte tout en répondant à l'enjeu majeur d'une lutte efficace contre les dérives thérapeutiques à caractère sectaire. Je suis intimement convaincue que ces dispositions constituent une avancée décisive face à la diffusion de discours à caractère sectaire dans le domaine de la santé, phénomène qui prend de l'ampleur sur les réseaux sociaux.

Je me réjouis donc que ce dispositif ait été voté, mais je note qu'il existe encore quelques marges d'amélioration. Pour cette raison, je proposerai par amendement de clarifier ces dispositions, dans la continuité des efforts tendant à renforcer la protection des libertés individuelles, notamment la liberté d'expression, sans sacrifier l'efficacité des nouvelles incriminations.

Je souhaite que nos travaux préservent l'équilibre du texte que nous avons adopté et son caractère ambitieux, qui nous permettra d'atteindre les objectifs que nous nous sommes assignés.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Il y a trois dispositions principales. La première, à l'article 1er, vise à ce qu'existe enfin un délit autonome qui protège les personnes contre les dérives sectaires. Le droit ne visait jusqu'à présent que les abus de faiblesse, dans un cadre essentiellement patrimonial. Nous tenons donc à cette nouvelle disposition, ainsi qu'à l'aggravation des pénalités qui l'accompagne à l'article 2.

La troisième disposition tient à l'article 4, celui qui a fait capoter la CMP, avec les articles 1er et 2. Cet article permet de poursuivre et de réprimer les provocations à l'abandon de soin et à l'adoption de fausses pratiques thérapeutiques, qui mettent en danger la vie des personnes. Il s'agit d'une évolution fondamentale de notre droit. Nous regrettons à ce propos les postures prises sur le sujet, en ne considérant que le texte initial, sans tenir compte des modifications que nous avions apportées. Nous continuerons d'ailleurs de le faire : par un amendement conjoint des trois groupes de la majorité et conforme à celui de Mme la rapporteure, nous entendons en effet ajouter les éléments qui sans doute manquaient encore pour préserver un équilibre et garantir les libertés individuelles. Comme cela apparaît dans l'avis du Conseil d'État, la volonté libre et éclairée des personnes doit pouvoir s'exprimer en matière de soins.

En résumé, nous sommes favorables à la présente rédaction du texte, fruit d'un travail conséquent, même si nous envisageons encore des évolutions mineures.

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Nous voilà donc au deuxième examen de ce texte devant notre commission. Les débats se cristallisent autour de l'article 4, qui n'est ni fait, ni à faire. Ce sont les errements juridiques graves de cet article qui empêchent l'adoption du texte. L'échec de la CMP s'explique sans doute par votre refus de faire un pas vers la suppression de cet article.

Se tromper est humain, mais persister dans son erreur est diabolique. Vous préférez pourtant persister au lieu d'écouter ce que tout le monde vous dit depuis le début de l'examen de ce texte, et que nous répéterons encore ce matin. Le Conseil d'État vous l'a dit ; le Sénat vous l'a fait savoir, par son vote et par la voix de la rapporteure de sa commission des lois ; l'Assemblée nationale vous l'a répété en commission et, j'y insiste, lors d'un premier vote en séance. Après l'échec de la CMP, nous vous le disons encore : renoncez à l'article 4 !

Il ne s'agit pas de renoncer à l'ensemble du texte, seulement à cet article. Vous avez vous-mêmes admis qu'il devait être modifié, quand vous l'avez fait évoluer en catastrophe pendant la séance publique. D'autres évolutions, certainement bienvenues, interviendront encore. Nous les appuierons mais elles ne suffiront pas à lever les principales difficultés qui se posent. Cette seule disposition empêche notre groupe de soutenir ce texte. Lutter contre les dérives sectaires est une noble tâche et le texte serait déjà voté, si vous aviez été capables d'écouter au lieu de vous obstiner.

Si vous cherchez sincèrement le consensus sur un sujet si important – un reportage de l'émission « Zone interdite » sur M6 nous en rappelait, cette semaine encore, la gravité –vous devriez écouter les oppositions. L'avis de sagesse rendu par une secrétaire d'État au sujet d'un de nos amendements, pourtant susceptible de tous nous réunir, aura suffi à provoquer un incident de séance et une catastrophe dans les rangs macronistes. Une partie de notre assemblée, manifestement moins soucieuse de lutter contre les dérives sectaires que pour sa propre survie politique, défend son camp plutôt que les victimes de ce mal qui ne fait que progresser.

Vous savez du reste pertinemment que l'article 4 risque fort d'être censuré par le Conseil constitutionnel. Vous préférez pourtant foncer tête baissée vers le mur : comme à votre habitude, vous faites passer votre fierté mal placée avant l'intérêt des Français, et en l'occurrence avant l'intelligibilité et la certitude de la loi.

Ce qui s'est passé en séance est proprement scandaleux. L'incident révèle votre fébrilité, peut-être liée aux élections européennes. Après avoir perdu le premier vote, vous avez rappelé vos troupes pour revenir sur la suppression de cet article 4. Après un rejet du Sénat, un avertissement du Conseil d'État et un vote de suppression, il vaut mieux accepter sa défaite et respecter la démocratie parlementaire !

Plusieurs dispositions de ce texte pourraient pourtant motiver un vote favorable de notre groupe, en particulier le statut législatif de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes). D'autres dispositions suscitent notre inquiétude. Ainsi, l'article 6 bis risque de créer une chape de plomb : en permettant aux médecins de casser le secret médical, il risque de dissuader les victimes de se confier, aggravant leur enfermement mortifère – l'exemple même d'une fausse bonne idée.

Bref, évoluez au sujet de l'article 4 et vous obtiendrez un vote consensuel sur un texte susceptible d'apporter des solutions aux victimes de dérives sectaires !

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Une précision, monsieur Ménagé : l'application du règlement en séance publique n'a, à mes yeux, rien de scandaleux.

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Bis repetita ! Notre commission examine à nouveau la version qui nous était parvenue il y a quelques semaines. Pourquoi ? Parce que la majorité fait le choix de n'écouter personne. Il y a plus d'un an, les assises nationales de la lutte contre les dérives sectaires avaient réuni les experts du secteur, professionnels ou associatifs, et abouti à plusieurs recommandations : l'accompagnement des victimes, la prévention auprès du grand public, la coopération entre services, la sensibilisation des agents. Pas une seule de ces recommandations ne se retrouve dans ce texte, qui marque sa rupture sur le fond avec les expertes et les experts. La chose est d'autant moins acceptable qu'il fait l'objet d'une procédure accélérée – on ne voit pas très bien pourquoi il fallait gagner quinze jours…

Dans ce contexte donc, nous nous retrouvons avec un texte purement répressif, qui envisage le problème par le petit bout de la lorgnette. Et on s'étonne ensuite – voire on verse de grosses larmes ! – que ni le Conseil d'État, ni le Sénat, ni la CMP ne s'en satisfassent.

Comment expliquer ce rejet ? D'abord, le texte affiche une approche exclusivement répressive. Utile dans certains cas, la répression ne permettra aucunement de mettre les gourous concernés hors d'état de nuire. Disons les mots : le texte n'est pas seulement inefficace – nous en avons l'habitude – il constitue une menace pour le système français de lutte contre les dérives sectaires.

Un gourou cévenol de 71 ans qui se faisait appeler Loup blanc, dont Mme la rapporteure connaît bien le cas, a été poursuivi pour viols, abus de faiblesse sur personnes en état de sujétion, et escroquerie. Que s'est-il passé lors du procès ? À l'extérieur du palais, nombre de ses adeptes étaient venus lui apporter leur soutien, convaincus que la répression pénale montrait juste qu'il dérange. Pire, à l'intérieur, plaignantes et plaignants saluaient encore le siège vide de cette personne contre laquelle ils avaient porté plainte.

J'en tire trois conclusions. Premièrement, le code pénal n'a jamais permis de rompre un rapport de sujétion et d'emprise, bien qu'il puisse aider, pendant les poursuites. Deuxièmement, les gourous représentant un danger pour l'ordre public, la loi permet déjà de les déférer, comme dans le cas que je viens de citer. Troisièmement, la sujétion ne disparaît pas comme par enchantement au cours du procès : la capacité d'accompagner les victimes est cruciale pour qu'elles se détachent du gourou contre qui elles ont porté plainte. On a vu, par exemple lors de procès autour de Raël, nombre de ses victimes se retirer de la procédure en cours, parce qu'elles étaient toujours sous son emprise. Ce dernier point n'est pas aussi distant du texte qu'il peut paraître. En effet, en retirant aux associations reconnues d'utilité publique le monopole de la constitution de partie civile, l'article 3 du texte permet à n'importe quelle association qui aura votre sympathie de le faire. Nous n'aurons aucune garantie quant à la capacité des associations nouvellement agréées à prendre en charge les victimes et à les soutenir psychologiquement tout au long de l'épreuve que représente le procès.

Bref, ce texte repose sur la croyance en la seule vertu de la répression pénale – que vous parvenez encore à désorganiser – pour arracher les consciences à certaines dérives sectaires. Il me semble au contraire que le recul de ce type de croyance et de sujétion au cours du XXe siècle est avant tout dû à l'école, aux soignantes et soignants, à la démocratisation des sciences. Tel sera le sens de nos amendements : le renforcement de la République, seul chemin pour libérer les consciences et voter un texte consensuel.

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Nous voilà en nouvelle lecture après l'échec de la CMP. La nécessité de lutter contre les dérives sectaires faisait initialement l'objet d'un accord unanime. Plus nombreuses, ces dérives touchent aussi de nouveaux domaines : la santé, l'alimentation, le bien-être, le développement personnel. Elles se diffusent par de nouveaux canaux, notamment les réseaux sociaux.

Le projet de loi initial se concentrait essentiellement sur la réponse pénale. L'arsenal répressif existant n'était pas évalué. Les actions de prévention, pourtant indispensables dans ce domaine, n'étaient pas plus évoquées que le renforcement des moyens de la justice, en particulier ceux des enquêteurs spécialisés. Le Sénat a apporté d'importantes améliorations sans que la CMP parvienne à un accord pour autant. J'y vois deux raisons : les défauts du texte initial, et le choix d'une procédure accélérée – on connaît la tendance du Gouvernement à en abuser. En l'occurrence, la navette parlementaire aurait sans doute permis d'améliorer la rédaction, au lieu d'en arriver directement à la confrontation entre les deux chambres, ou plutôt entre les deux rapporteures.

Cette réunion devrait être l'occasion de l'amender, en particulier l'article 4, sorte d'article maudit, objet d'avis très sévères tant du Conseil d'État qu'au sein de notre propre commission. Il n'a été maintenu qu'au prix d'une deuxième délibération peut-être conforme à la lettre de notre règlement, mais scandaleuse au vu du déroulement des débats. Les rédactions s'empilent, le texte devient de moins en moins lisible alors même qu'il touche à des sujets d'importance comme la liberté d'expression et la liberté de conscience. Il nous faut trouver un équilibre qui garantisse ces libertés, et nous interroger en conséquence sur le devenir de l'article 4, malgré l'entêtement de la majorité à le maintenir.

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Les dérives sectaires ne constituent pas un phénomène nouveau : il a été identifié dans les rapports parlementaires dès les années 1990, mais les moyens modernes de communication ont rendu sa diffusion massive et difficilement contrôlable. Les scandales sanitaires et la remise en cause du discours des autorités publiques en matière de santé publique, mais également des données scientifiques relatives aux caractéristiques des pathologies, à l'efficacité et aux risques des traitements, ont renforcé la crédibilité de ceux que l'on peut qualifier de charlatans. Cependant, la lutte contre ces dérives ne doit en aucun cas nous conduire à stigmatiser les pratiques dites non conventionnelles et la recherche du bien-être, ou à entraver la liberté d'accepter ou de refuser un traitement médical, qui est essentielle à la maîtrise de son propre destin et à l'autonomie personnelle en l'absence de pressions inappropriées, comme l'a rappelé la Cour européenne des droits de l'homme dans un arrêt du 10 juin 2010. Il reste donc nécessaire de protéger tant les victimes de ces dérives que les praticiens honnêtes, en sanctionnant plus efficacement les personnes malintentionnées.

Je félicite la rapporteure pour son souci d'écouter les avis et demandes de chacun. Ce travail collaboratif a permis d'aboutir à un texte qui soit à la fois protecteur pour les victimes et respectueux des libertés individuelles.

De nombreuses dérives sectaires portent également atteinte à la santé des victimes, notamment lorsque celles-ci interrompent des traitements médicaux, y compris pour de graves pathologies. Il est donc essentiel que les mesures de bannissement prévues par le projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique s'appliquent également aux pratiques visées par le texte que nous examinons.

Pour toutes les raisons évoquées, le groupe Démocrate votera ce texte.

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Je constate que le texte suscite des interrogations légitimes dans les deux assemblées, les sénateurs partageant notre souci de ne pas légiférer pour rien. En réalité ce n'est d'ailleurs jamais pour rien : un mauvais texte vient troubler le travail du juge et le ralentir, sans bienfait pour la société. D'où notre exigence quant à la qualité légistique des textes.

Celui-ci revient devant nous après l'échec de la CMP dans le cadre d'une procédure accélérée. Il faudrait d'ailleurs cesser d'y recourir si souvent vu le nombre de textes que notre commission examine. Contrairement à ce que prétend l'article d'un quotidien qui épingle bien injustement le travail du Parlement, nous sommes en effet très occupés en commission des lois, l'agenda le montre bien.

Ce texte procède d'un constat : le phénomène des dérives sectaires n'a pas faibli. Les gourous peuvent désormais passer par de multiples canaux, comme les stories Instagram ou les groupes Telegram. Les victimes de ces influenceurs dangereux, qui seraient de plus en plus jeunes, tombent ainsi dans l'isolement car ces intrusions à l'aide des réseaux sociaux se produisent souvent à l'insu de l'entourage. Cette situation mérite que le législateur s'y penche. Le texte procède donc d'une bonne intention, mais nous partageons les craintes exprimées par le Sénat de la voir dériver en atteintes à la liberté d'expression et à la liberté d'être, voire en abandon d'une forme de responsabilité individuelle pourtant constitutive de notre société.

Cela étant dit, ce texte est aussi une réponse à une situation préoccupante, aggravée par les réseaux sociaux et les multiples interactions possibles dans le monde numérique. Comme l'a dit Xavier Breton, l'article 4 pose problème. La loi doit préserver un équilibre. Nous l'examinerons en ce sens, sans vous donner pour le moment nos intentions de vote.

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Si nous pouvons regretter le désaccord, d'ailleurs prévisible, avec nos collègues du Sénat en CMP, le retour du projet de loi devant notre commission me donne l'occasion d'affirmer à nouveau la position du groupe Horizons et apparentés en faveur d'un texte complet, barrant fermement la route aux dérives sectaires et prenant en compte leurs nouveaux aspects, leurs nouveaux instigateurs et leurs nouveaux modes de diffusion.

Comme législateur, nous devons toujours avoir la main qui tremble en abordant des sujets aussi sensibles que les croyances et la liberté d'expression. Il nous faut pourtant jouer notre rôle politique, en particulier à cette étape du parcours législatif. En séance publique, j'avais cité cette phrase de Voltaire : « Toute secte, en quelque genre que ce puisse être, est le ralliement du doute et de l'erreur. » Voici ma position : ne pas être dans le doute et nous garder d'une erreur qui consisterait à nous éloigner de l'intention initiale de ce projet de loi.

La lutte contre les dérives sectaires répond à des enjeux de cohésion sociale, mais aussi de santé et d'ordre publics. Ces dérives constituent un dévoiement de la liberté de penser, d'opinion ou de croyance, et portent atteinte à l'ordre public, aux droits fondamentaux, à la sécurité et à l'intégrité des personnes. S'il est quelquefois difficile de détecter et de qualifier ces dévoiements, la liberté de conscience et de pensée étant au cœur de nos valeurs fondamentales, une frontière est systématiquement franchie lorsqu'on parle de dérives sectaires, qui ont pour leurs victimes des conséquences physiques ou psychologiques graves.

La loi About-Picard du 12 juin 2001 a renforcé notre arsenal législatif, en réprimant notamment l'abus de faiblesse par sujétion psychologique. Mais nous savons que les dérives sectaires ont profondément changé : aux groupes à prétentions religieuses ou spirituelles se sont ajoutées de multiples entités, investissant les champs de la santé, de l'alimentation, du bien-être, du développement personnel, du coaching ou de la formation. Des gourous 2.0 autoproclamés diffusent désormais leurs doctrines sur des plateformes numériques et fédèrent de véritables communautés autour d'eux.

En entraînant une crise de confiance en la parole scientifique et médicale, la crise sanitaire a constitué un catalyseur pour ces dérives, dont la nature, les modes opératoires et l'ampleur sont préoccupantes. L'augmentation constante du nombre des saisines de la Miviludes en témoigne. Nous devons mieux prendre en compte l'évolution des techniques employées. Ne soyons pas dupes : les gourous se savent protégés par les lois visant à garantir la liberté d'expression. Ils utilisent la défiance des Français à l'égard des institutions et des représentants, politiques notamment, pour instiller le doute chez ceux qui les écoutent et affermir leur propre influence.

Nous nous réjouissons donc que l'examen du texte par notre assemblée ait permis la réintégration de l'article 4, qui vise à répondre à un problème de santé publique aussi nouveau que dangereux en créant un délit de provocation à l'abandon ou l'abstention de soins et à l'adoption de pratiques dont il est manifeste qu'elles exposent la personne visée à un risque grave ou immédiat pour sa santé.

En première lecture, nous nous sommes employés à tenir compte des remarques du Conseil d'État afin d'aboutir à une rédaction équilibrée de cet article. Nous restons néanmoins particulièrement attentifs à sa sécurisation juridique. Pour limiter le risque d'inconstitutionnalité et préserver la liberté de conscience, il est primordial de préciser que l'infraction de provocation à l'abandon de soins ne serait pas constituée dès lors que la personne concernée aurait pu exprimer une volonté libre et éclairée de remplacer un traitement par un autre, alors même qu'elle était consciente des risques que cela entraînait. Nous soutiendrons une amélioration du texte en ce sens lors de nos débats.

Pour toutes ces raisons, notre groupe votera en faveur de ce projet de loi.

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Nous partageons évidemment l'objectif de ce texte, qui est de protéger des personnes vulnérables, les victimes de gourous. Nous regrettons néanmoins l'approche répressive d'un sujet qui doit être traité de manière bien plus large. Comme Xavier Breton, nous regrettons l'usage de la procédure accélérée ainsi que l'impossibilité pour la CMP de débattre, les deux rapporteures étant venues présenter des positions fermement en désaccord. D'un tel texte, il faut au contraire débattre publiquement et longuement afin d'épuiser toutes les réserves qu'il peut susciter. Il touche en effet à des sujets aussi sensibles que la liberté d'expression, la responsabilité individuelle et le secret médical, l'article 6 bis soulevant sur ce point de sérieuses questions. Les rédactions successives ont levé certains doutes, mais il en reste. Je pense notamment à l'exemption pour les lanceurs d'alerte ajoutée à l'article 4, avancée qui ne couvre sans doute pas tous les cas susceptibles de présenter des difficultés.

Nous sommes donc assez réservés sur l'opportunité de ce texte. Quant à sa compréhension, pour en avoir discuté avec de nombreuses personnes, elle est vraiment à parfaire. Peut-être y a-t-il lieu de faire un effort de pédagogie, mais la construction du texte, ses intentions, le message émis posent sans doute aussi problème. À ce stade, il me semble prématuré de dire que le texte serait consensuel. Nous réservons donc notre position de vote, qui évoluera en fonction des amendements retenus en commission et en séance.

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Nous nous retrouvons à peu près au même point qu'en première lecture. Nous répétons donc que tout le monde partage l'objectif de lutter contre les dérives sectaires et surtout d'en protéger les victimes, mais qu'il nous semble important pour cela d'emprunter d'autres chemins que celui de la répression, qui est le seul que vous vouliez suivre. Même dans ce domaine, votre façon de l'envisager soulève des risques importants pour des principes qui animent notre république et notre Constitution. Peut-être faudrait-il écouter un peu plus ce que disent les parlementaires aussi bien à l'Assemblée qu'au Sénat, que leurs différences n'empêchent pas d'exprimer des critiques communes.

Lors de la première lecture à l'Assemblée, vous aviez fait un premier effort, notamment au sujet de l'article 4. Nous avions modifié en conséquence notre vote concernant cet article, preuve de notre ouverture. Nous nous en tenons donc pour l'instant à la position d'ensemble que nous avions choisie en première lecture, l'abstention, tout en restant attentifs aux efforts d'écoute que vous pourriez fournir pendant ce nouvel examen du texte.

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Chacun ici s'accorde à dire que ce projet de loi touche à un vrai problème : l'espèce de commerce auquel certains gourous se livrent sur les réseaux sociaux. En première lecture, nous nous étions trouvés d'accord pour une réglementation des réseaux sociaux et aussi pour une certaine limitation de la liberté des individus à appréhender ce qui touche, par exemple, à leurs soins et leur confort.

Notre inquiétude venait de l'article 4, qui doit être réécrit de façon à empêcher clairement les lobbys de faire pression sur les lanceurs d'alerte. Il arrive malheureusement que des médicaments posent problème : pensons au talc Morhange de nos grands-mères, ou au Mediator. En dépit de toutes les règles qui existent, certaines situations ne sont pas réglées. Et il reste particulièrement difficile d'obtenir gain de cause contre de grands laboratoires, qui ont une armada d'avocats qui leur permet de tirer avantage de la loi. On ne peut pas leur en vouloir, mais l'asymétrie de leurs moyens avec ceux d'un lanceur d'alerte est évidente. Sauf qu'il arrive que David, ou en l'occurrence Irène Frachon, gagne contre Goliath !

Voilà en tout cas le point qui nous inquiète. Nous réservons donc notre vote pour l'instant.

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Les dérives sectaires ont évolué. Protéiformes, elles se diffusent de plus en plus rapidement, à l'aide d'internet et des réseaux sociaux. Le nombre de signalements adressés à la Miviludes a augmenté de 33 % en un an et de 86 % depuis 2015. Il est donc nécessaire d'agir pour sauvegarder la dignité humaine et préserver l'ordre public, mais sans attenter aux libertés individuelles, en particulier les libertés de conscience et d'opinion.

Or le projet de loi met ces libertés à mal. Dès le début, le Conseil d'État nous a alertés sur l'absence de nécessité et de proportionnalité des nouvelles incriminations. En effet, l'article 4 crée un nouveau délit, la provocation à abandonner les soins ou à s'en abstenir, lorsque cela peut entraîner des conséquences graves pour la santé et exposer les personnes à un risque immédiat de mort ou de blessure.

Le Sénat avait supprimé ce fameux article 4 ; celui-ci a été réintroduit lors de l'examen en commission à l'Assemblée, avant d'être à nouveau supprimé en séance publique. Vous nous avez alors imposé une seconde délibération. Un nouvel article 4 a fait son apparition à la sauvette, et c'est à la sauvette aussi que nous avons dû le sous-amender, pour tenter de tirer les leçons des avertissements du Conseil d'État. Pour ma part, j'avais défendu un amendement visant à le compléter par un alinéa prévoyant que les délits ne sont pas constitués dès lors que la liberté de conscience des patients s'exerce pleinement. Il s'agit d'une mesure de bon sens pour préserver l'équilibre entre les libertés, mis en exergue par le Conseil d'État.

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Je me réjouis que tous les groupes soient désormais convaincus de l'utilité de légiférer sur ce sujet. Cela a été dit, la CMP n'a pas pu aboutir : la rapporteure du Sénat et moi-même avions une même ligne rouge, l'article 4, mais nous étions chacune d'un côté ! Pour moi, sans l'article 4, le texte n'aurait plus de raison d'être, je le dis à M. Ménagé. Dussé-je rester la dernière, je continuerais à le soutenir. Pour l'améliorer encore, je défendrai deux amendements et je remercie les groupes ouverts à une nouvelle discussion.

Monsieur Clouet, les assises nationales de la lutte contre les dérives sectaires ont permis de définir une stratégie en trois axes : mieux prévenir les risques ; mieux accueillir et soutenir les victimes ; et renforcer l'arsenal juridique. Le présent texte porte uniquement sur ce troisième axe. Mais la prévention est bien évidemment essentielle et est prévue ; et ne nous privons pas d'un autre texte, peut-être transpartisan, sur ce sujet !

Monsieur Breton, il est vrai que le Sénat a amélioré le texte. Nombre de ses modifications ont été conservées, en particulier celles relatives au statut de la Miviludes, à l'allongement du délai de prescription, aux circonstances aggravantes en cas de mise en danger d'enfants et à l'aggravation des peines pour les faits commis en ligne. Cependant, l'article 4 nous sépare toujours.

Je remercie les trois groupes de la majorité. Nous avons travaillé conjointement sur ce texte, notamment pour améliorer l'article 4.

Madame Faucillon, j'ai entendu vos doutes. Je vous demande d'écouter attentivement les propositions de rédaction que nous défendrons.

Chapitre Ier A Consacrer les pouvoirs et le rôle de l'administration chargée de la mise en œuvre de la politique de prévention et de la lutte contre les dérives sectaires

Avant l'article 1er A

Amendement CL51 de Mme Brigitte Liso

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Il s'agit d'un amendement de coordination qui fait suite à l'adoption en première lecture de l'amendement n° 24 de Mme Béatrice Descamps.

La commission adopte l'amendement.

Article 1er A (art. 21 bis [nouveau] de la loi n° 2001-504 du 21 juin 2001) : Statut législatif de la MIVILUDES

Amendement CL52 de Mme Brigitte Liso

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Cet amendement vise à préciser la rédaction. La Miviludes sera « instituée par voie réglementaire », et non « désignée par décret du Président de la République » - les décrets du Président de la République concernant en principe des nominations.

La commission adopte l'amendement.

La commission adopte l'amendement rédactionnel CL53 de Mme Brigitte Liso, rapporteure.

Amendement CL33 de Mme Ségolène Amiot

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Vous disiez, madame la rapporteure, que nous pourrions prendre en considération les autres axes de la stratégie nationale : cet amendement nous en offre l'occasion.

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Le rôle de la Miviludes n'est pas de s'immiscer dans les programmes scolaires. Je suis pour former et sensibiliser les enfants, mais ils le sont déjà. La stratégie nationale renforce les actions en ce sens, grâce à un volet conçu pour la protection de l'enfance. Avis défavorable.

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L'intention n'est pas que la Miviludes vienne « s'immiscer » dans les programmes de l'éducation nationale ; nous proposons d'y intégrer une sensibilisation aux dérives thérapeutiques ou sectaires. Cela participerait à la prévention, cet objectif que nous partageons.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL54 de Mme Brigitte Liso

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Les questions financières relèvent du champ de compétence de Tracfin. De plus, la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République lui a confié le devoir de veiller particulièrement aux mouvements financiers de certaines organisations. Ce service dispose de l'expertise nécessaire dans ce domaine, qu'il ne convient donc pas d'inscrire au nombre des missions de la Miviludes.

La commission adopte l'amendement.

Amendements CL55 de Mme Brigitte Liso et CL8 de M. Thomas Ménagé (discussion commune)

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L'alinéa 8 prévoit que la Miviludes contribuera à l'information et à la formation des agents publics, et l'Assemblée a souhaité mentionner expressément certaines catégories d'entre eux dans le texte lors de l'examen en première lecture, contre mon avis. Le présent amendement tend à supprimer cette précision car dès lors qu'on établit une liste, on risque d'oublier des catégories, sans compter celles qui sont susceptibles de se créer par la suite. Je le répète, tous les agents publics sont bien concernés, sans qu'il soit besoin de les nommer.

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Nous voilà revenus à la discussion qui a semé la discorde lors de l'examen en première lecture, provoquant un incident de séance. Gabriel Attal avait annoncé vouloir travailler « avec tout l'hémicycle », car « derrière chaque député, il y a des Français. Qu'on en soit heureux ou non » – et vous n'êtes clairement pas heureux de la présence de 88 députés du Rassemblement national. Mme la secrétaire d'État Agresti-Roubache, voulant respecter cet engagement, a émis un avis de sagesse sur notre amendement visant à élargir la mission d'information et de formation de la Miviludes aux élus locaux.

L'amendement CL8 et le CL9 qui suivra reprennent cette proposition de bon sens et consensuelle. En séance, nous avons soutenu la position de la rapporteure contre l'établissement d'une liste à la Prévert des agents publics concernés par cette formation. En revanche, les élus locaux ne sont pas des agents publics, et ils ne sont pas cités. Je suis élu d'un territoire rural du Loiret où il n'y a pas d'agents publics. Dans ce cas, ce sont les élus qui se trouvent en première ligne, par exemple dans les communes de 100 ou 200 habitants. Indirectement, le texte implique les élus dans la lutte contre les dérives sectaires, en créant des groupes de travail chargés de ces questions dans les CLSPD et les CISPD, les conseils locaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance. Il faut aller plus loin. Essayez d'ouvrir votre esprit. C'est ce qu'avait fait la ministre avant de se faire taper sur les doigts pour avoir fait son travail.

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Je le redis, votre demande est satisfaite. L'objectif n° 2 de la stratégie nationale est d'informer et de sensibiliser le public et les élus. Les actions menées associeront les associations d'élus, comme l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité, l'Assemblée des départements de France et Régions de France. Je vous propose donc de retirer votre amendement, sinon j'émettrai un avis défavorable.

La commission adopte l'amendement CL55.

En conséquence, l'amendement CL8 tombe.

Amendement CL32 de M. Hadrien Clouet

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Cet amendement vise à charger la Miviludes d'informer et de sensibiliser les organismes de formation professionnelle. En effet, 14 % des signalements viennent du monde du travail, notamment du secteur de la formation – et cela risque de ne pas s'améliorer après l'application d'une franchise de 100 euros sur le recours au compte personnel de formation (CPF). La Miviludes a même publié en 2012 un guide intitulé « Savoir déceler les dérives sectaires dans la formation professionnelle ». Certaines entreprises s'adonnent pourtant à des pratiques de cette nature, même hors du cadre du CPF : Fleury Michon par exemple fait dessiner à ses salariés des ennéagrammes, méthode ésotérique et farfelue. Il faut permettre l'intervention de la Miviludes pour prévenir et accompagner les personnes exposées à de telles pratiques en milieu professionnel, où la sujétion au patron s'ajoute à la sujétion au gourou.

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La stratégie nationale prévoit des actions de formation pour les acteurs du contrôle de la formation professionnelle. Une nouvelle fois, votre amendement est satisfait : demande de retrait, ou avis défavorable.

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J'en déduis que des actions en ce sens seront menées tant que votre majorité sera au pouvoir. Cependant, si la loi ne prévoit pas que cette mission relève des compétences de la Miviludes, cela pourrait changer en cas d'alternance politique. Voter cet amendement vous permettrait de faire vivre vos idées au-delà de votre mandat !

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La liste des attributions de la Miviludes n'est pas exhaustive. Par ailleurs, une nouvelle majorité pourrait aussi changer la loi : adopter une disposition ne prémunit de rien.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL9 de M. Thomas Ménagé

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Cet amendement vise à accompagner les membres des CLSPD et des CISPD qui travailleront à lutter contre les dérives sectaires. Le voter ne serait pas idiot, sauf si l'on estime que la secrétaire d'État était à côté de la plaque lorsqu'elle a émis un avis de sagesse. Il est gênant pour une majorité de considérer que les membres du Gouvernement ne comprennent rien, surtout s'agissant d'un projet de loi, donc dû à l'initiative du Gouvernement. Or la secrétaire d'État a jugé que cette disposition servirait la lutte contre les dérives sectaires.

En effet, si les personnes concernées ne disposent pas des connaissances et des clés de lecture appropriées, elles ne pourront pas travailler efficacement. Les dérives sectaires, multiformes, évoluent très rapidement ; elles augmentent fortement. Cela justifie d'adopter cet amendement qui n'est d'aucun groupe en particulier, mais relève du bon sens. Même en période d'élections européennes, ne craignez pas d'émettre un avis favorable, cela ne nous fera pas progresser dans les sondages, mais contribuera à atteindre l'objectif que nous partageons tous.

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Je le redis, la Miviludes intervient déjà auprès des élus locaux et la stratégie nationale de lutte contre les dérives sectaires prévoit expressément des actions de formation et de sensibilisation spécifiques pour eux.

Avis défavorable.

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Je transmettrai à Mme la secrétaire d'État, qui n'avait donc pas compris l'amendement ni lu le texte. C'est inquiétant, ou dommage. Soit vous avez tout compris et nous rien, soit votre position est sectaire. Malheureusement, je penche pour la deuxième hypothèse.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL18 de Mme Ségolène Amiot

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La Miviludes conclut des conventions avec les agences régionales de santé (ARS). L'objectif est aussi bien de lui faire remonter des informations utiles à son action que de lui permettre d'accompagner les ARS dans le ciblage et la prévention des dérives sectaires dans le domaine de la santé publique.

Cette possibilité est actuellement laissée à la discrétion des institutions concernées. Il existe par exemple une convention en Île-de-France, qui s'est révélée très efficace : les cadres de l'ARS peuvent se former auprès de la Miviludes et y trouver des interlocuteurs immédiats. Le présent amendement vise à systématiser ces conventions. Le dispositif existe, il ne s'agit que d'en faire la norme : c'est efficace et peu coûteux. Là encore, il s'agit d'une recommandation des assises nationales.

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Vous venez de le préciser : des partenariats entre la Miviludes et certaines ARS existent déjà. Les rendre obligatoires ne va pas de soi. Conservons ce qui fonctionne. La Miviludes entretient déjà des relations avec les ARS et participe à la formation de leurs agents ; la stratégie nationale prévoit par ailleurs de renforcer les actions conjointes de la Miviludes et des autres administrations. Avis défavorable.

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Nous sommes d'accord : l'obligation ne va pas de soi, sinon je ne défendrais pas un amendement. Vous venez de le dire, certaines ARS ont déjà une convention, mais qu'en est-il des autres ? Ce n'est pas une question de volonté, mais de temps ou de priorité. Nous avons là l'occasion de systématiser un dispositif efficace.

La commission rejette l'amendement.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL56 et CL57 de Mme Brigitte Liso, rapporteure.

La commission adopte l'article 1er A modifié.

Article 1er BA (art. L. 132-5 et L. 132-13 du code de la sécurité intérieure) : Élargissement aux dérives sectaires des compétences des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance

La commission adopte l'amendement de coordination CL58 de Mme Brigitte Liso, rapporteure.

Amendement CL21 de M. Hadrien Clouet

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Cet amendement est presque rédactionnel : il vise à remplacer le terme « phénomènes » par celui de « dérives », plus adapté au champ du texte.

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La notion de « phénomènes sectaires » est claire et suffisamment large. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

La commission adopte l'article 1er BA, modifié.

Chapitre Ier Faciliter et renforcer les poursuites pénales

Article 1er B (supprimé) (art. 223-15-2 du code pénal) : Circonstance aggravante en cas d'abus de faiblesse au moyen d'un support numérique ou électronique

La commission maintient la suppression de l'article 1er B.

Article 1er (art. 223-15-2, 223-15-3 [nouveau], 223-15-4 et 223-15-5 du code pénal, art. 704 et 706-73 du code de procédure pénale, art. L. 444-6 du code de l'éducation et art. 19 de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001) : Singulariser le délit d'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse résultant d'un état de sujétion et créer un délit autonome permettant de réprimer les agissements qui ont pour effet de créer cet état

Amendements de suppression CL1 de M. Xavier Breton et CL35 de M. Jean-François Coulomme

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Le droit en vigueur sanctionne déjà l'abus de faiblesse et satisfait donc les besoins auxquels entend répondre l'article 1er dans ce domaine. L'article 222-33-2-2 du code pénal, lui, permet de réprimer les comportements visés par l'infraction qu'il crée, relative à l'état de sujétion. De plus, sa rédaction excéderait largement les cas de sujétion liés à des dérives sectaires : la loi pourrait s'appliquer à d'autres types d'emprise, de manière indéterminée, ce qui serait dangereux. C'est pourquoi il convient de supprimer cet article, comme le Sénat l'avait fait en première lecture.

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Cet article fait d'abord doublon avec le délit existant d'abus de faiblesse – c'est du bavardage pénal. Ensuite, il est source de confusion : il instaure un abus qui n'est pas spécifique aux dérives sectaires, donc qui n'a pas sa place dans le texte. Enfin, il accrédite l'idée qu'il suffirait d'aggraver les peines encourues pour combattre les gourous. Or nous ne souffrons pas d'un déficit de peines, mais de moyens policiers et judiciaires pour identifier les délits commis, les poursuivre et les sanctionner.

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Lors de l'examen en première lecture, la commission a rétabli l'article 1er ; en séance publique, nous avons rejeté, sans aucune ambiguïté, les amendements de suppression. À ce stade de la navette, il n'est pas utile d'approfondir le débat. Je précise seulement que le texte ne crée aucun doublon : il prévoit une nouvelle infraction, qui distingue la sujétion de l'abus de faiblesse. Avis très défavorable.

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Le texte définit deux infractions identiques : c'est bien un doublon.

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En première lecture, le groupe Rassemblement national était défavorable à l'article 1er, et donc à l'article 2, qui est son pendant. Nous ne sommes pas convaincus de l'utilité de ce réagencement juridique, qui scinde en deux un même dispositif. Mais les auditions, les retours et le travail que vous avez réalisé nous ont convaincus qu'il pouvait se révéler utile dans certains cas spécifiques – nous sommes capables d'écouter, de comprendre et d'évoluer, ce qui n'est pas le cas de tout le monde ici. Sur ces amendements de suppression, nous nous abstiendrons donc.

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Vous avancez, Madame la rapporteure, que l'article crée un délit supplémentaire. Est-ce à dire que la législation ne répondait pas à certains cas, ou alors que vous apportez une nouvelle distinction – et dans ce cas, quels cas précis seront visés ? Vous posez une frontière sans la définir clairement, ce qui soulèvera des problèmes d'interprétation.

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Ce débat est fictif. Le texte ne supprime aucunement l'abus de faiblesse du code pénal, n'en parlons pas. En revanche, le droit français est trop restreint à cette notion d'abus de faiblesse, dont le champ est limité : il concerne essentiellement les personnes âgées. Le projet de loi prévoit des dispositions nouvelles, propres à réprimer des comportements qui ne relevaient pas jusqu'à présent du champ pénal. Elles sont complémentaires, et visent un objectif différent : sanctionner le fait de créer ou de maintenir un état de sujétion psychologique ou physique, par l'exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer le jugement d'une personne. Relisez le code pénal : le délit d'abus de faiblesse ne permet pas de réprimer des situations de cette nature.

L'article 1er, comme les articles 2 et 4, est essentiel au texte ; ils visent à adapter le droit à la réalité des dangers que font courir les dérives sectaires.

La commission rejette les amendements.

La commission adopte l'article 1er, non modifié.

Article 1er bis (art. 1378 octies du code général des impôts) : Inéligibilité aux avantages fiscaux des dons faits au bénéfice d'organismes condamnés pour abus de faiblesse ou sujétion

Amendement CL17 de M. Thomas Ménagé

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Il s'agit d'un amendement de cohérence, mais par anticipation. Nous soutenons la suppression de l'article 4, qui constitue notre ligne rouge car il est attentatoire aux libertés et susceptible de bâillonner le débat scientifique, mais ne résoudra pas le problème des dérives sectaires. L'amendement vise donc à supprimer dans l'article 1er bis la référence au délit que crée l'article 4.

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Je vous demande de retirer votre amendement. En effet, il porte sur les peines applicables aux auteurs d'abus de faiblesse ou de sujétion et non sur l'infraction que crée l'article 4 du texte. Si vous ne le retirez pas, j'émettrai un avis défavorable.

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J'avais de toute façon prévu de le retirer.

L'amendement est retiré.

La commission adopte l'article 1er bis, non modifié.

Article 2 (art. 221-4, 222-3, 222-4, 222-8, 222-10, 222-12, 222-13, 222-14 et 313-2 du code pénal) : Introduire une circonstance aggravante de sujétion psychologique ou physique pour le meurtre, les actes de torture et de barbarie, les violences et les escroqueries

Amendements de suppression CL2 de M. Xavier Breton et CL36 de M. Hadrien Clouet

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Si nous avions voté la suppression de l'article 1er, il aurait été cohérent de supprimer également l'article 2.

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Nous pensons qu'un tel arsenal juridique n'est pas nécessaire pour lutter contre les dérives sectaires : le délit d'abus de faiblesse suffit, avec tous les avantages d'un droit plus léger et plus adaptable. En réalité, c'est une autre question qui se pose : la Miviludes n'a pas les moyens de faire son boulot.

Il arrive que les citoyens s'interrogent sur les liens que l'État entretient avec telle ou telle secte. Je pense au projet de la Famille missionnaire de Notre-Dame d'édifier une basilique pouvant accueillir 3 500 personnes à Saint-Pierre-de-Colombier en Ardèche. L'ire des citoyens a été éveillée entre autres par le fait que le permis de construire d'une telle bâtisse ait pu être instruit sans prendre en considération qu'elle se situe en plein parc naturel régional, ce qui aurait dû modifier la décision. La Miviludes a également publié un rapport qui recense plusieurs signalements relatifs à cette congrégation, faisant état de gens manipulés et dépouillés, sans qu'il y ait aucune suite. Je ne dresse pas de procès mais j'appelle votre attention sur le fait que, s'il n'est pas nécessaire de créer un délit, qui ne coûte rien il est vrai, il est essentiel de donner à la Miviludes les moyens dont elle a besoin pour avancer.

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Avis défavorable, puisque nous avons maintenu l'article 1er.

La commission rejette les amendements.

La commission adopte l'article 2 non modifié.

Article 2 bis A (art. 225-4-13 du code pénal) : Introduire des circonstances aggravantes liées aux dérives sectaires pour les « thérapies de conversion »

Amendements de suppression CL3 de M. Xavier Breton et CL37 de Mme Ségolène Amiot

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Nous ouvrons un débat dans le débat avec cet article 2 bis A relatif aux thérapies de conversion, qui a été introduit lors de l'examen en première lecture.

Pendant la discussion de la loi du 31 janvier 2022 interdisant les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne, j'avais affirmé que nous légiférions mal. Il s'agissait de créer un délit autonome pour sanctionner les thérapies de conversion, alors qu'il existait déjà des dispositions à même de réprimer les excès. Au cours des débats, la rédaction avait été quelque peu bâclée, portant atteinte à la solidité juridique du dispositif : déplacement des futures dispositions dans le code pénal, risques de conflits de qualification, problèmes sur l'échelle des peines… Nous retrouvons ici les mêmes difficultés légistiques. D'ailleurs l'exposé sommaire de l'amendement à l'origine du présent article précisait qu'il visait à lever une difficulté d'application de la loi du 31 janvier 2022 !

Comme par hasard, la procédure accélérée avait été engagée sur cette loi et beaucoup d'articles ont été insérés par voie d'amendement, sans étude d'impact ni avis du Conseil d'État. Quand nous dénonçons la mauvaise rédaction d'un texte, on nous répond « Circulez, y'a rien à voir ». Résultat, deux ans après, nous y revenons.

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Toute la question est en effet de savoir à quel point nous avons besoin de nouvelles dispositions législatives. L'exploitation d'une sujétion psychologique ou physique est déjà considérée par le code pénal comme un abus frauduleux, y compris en bande organisée. L'ensemble des infractions que vous souhaitez poursuivre dans ce projet de loi est donc déjà couvert. Il n'y a pas de valeur ajoutée à créer ce nouveau délit, d'autant plus que l'infraction que vous proposez pourra être moins poursuivie que ce qui existe déjà en matière d'abus de faiblesse. Vous joignez donc le doublon à l'inutile, ce qui fait deux raisons de ne pas adopter cette disposition.

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Cet article est une mesure de cohérence avec les articles 1er et 2. Il étend aux thérapies de conversion des circonstances aggravantes qui correspondent aux dérives sectaires. Par ailleurs, étant présidente du groupe d'études VIH et sida, je peux vous affirmer que ces sujets reviennent très souvent et qu'il est véritablement nécessaire de créer ce nouveau délit et d'alourdir les peines. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Elle adopte l'article 2 bis A non modifié.

Chapitre Ier bis Renforcer la protection des mineurs victimes de dérives sectaires

Article 2 bis (art. 8 du code de procédure pénale) : Allongement des délais de prescription applicables en cas d'abus de faiblesse d'un mineur

La commission adopte l'article 2 bis non modifié.

Article 2 ter (art. 227-15 et 227-17 du code pénal) : Circonstance aggravante des délits de privation d'aliments ou de soins et de manquement à ses obligations par une personne ayant autorité sur mineur en cas de manquement à l'obligation de déclaration à l'état civil d'un enfant

Amendement de suppression CL22 de Mme Ségolène Amiot

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Il s'agit de savoir si le renforcement des sanctions en cas d'isolement social volontaire des enfants aura un effet. L'amende est multipliée par 100 et la peine de prison portée à 10 ans : vous pourriez la porter à 500 ans, cela ne changerait pas grand-chose, car les gourous qui font en sorte de soustraire des enfants à un environnement sain et sécurisé le font rarement avec le code pénal sous le bras ! Dès lors, nous ne pouvons pas vous suivre dans la surenchère pénale.

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Votre position est de ne jamais enchérir sur les sanctions pénales, par principe. Je peux le comprendre. Néanmoins, si les sanctions n'existaient pas, que serait notre société ? Prenez le code de la route : les risques ne justifient-ils pas que nous adaptions la loi ? Attacherions-nous tous notre ceinture de sécurité si le non-port n'était pas puni ? Avis défavorable.

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Nous sommes favorables à cette sanction et n'envisageons absolument pas de la supprimer. En revanche, nous sommes contre son alourdissement car la littérature scientifique a prouvé que cela n'avait aucun impact. Je peux entendre que vous considériez que les scientifiques, en France et dans le monde, se plantent totalement, mais il va falloir l'assumer. En effet, ils ont démontré par a + b qu'alourdir une sanction n'avait pas d'impact sur la commission ou non d'un crime ou d'un délit.

Il serait bien préférable de parler de prévention, le plus tôt possible en amont de la commission du délit, plutôt que d'alourdir encore les sanctions et de remplir un peu plus les prisons sans pour autant faire quoi que ce soit des délinquants et des criminels.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'article 2 ter non modifié.

Article 2 quater (art. 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004) : Inclusion de l'abus de faiblesse et du délit de sujétion parmi les infractions contre lesquelles doivent lutter les fournisseurs d'accès à internet et les hébergeurs de contenus

La commission adopte l'article 2 quater non modifié.

Chapitre II Renforcer l'accompagnement des victimes

Article 3 (art. 2-6 et 2-17 du code de procédure pénale) : Étendre les catégories d'associations pouvant se constituer partie civile en matière d'emprise sectaire

Amendement de suppression CL23 de M. Jean-François Coulomme

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L'article 3 concentre une partie des faiblesses de votre texte. Vous proposez en effet une modification du régime de la partie civile. Aujourd'hui, une association de lutte contre les dérives sectaires doit être reconnue d'utilité publique pour pouvoir se porter partie civile. Vous souhaitez remplacer la reconnaissance d'utilité publique par un agrément, à caractère plus discrétionnaire, remis par les ministères.

Nous ne sommes pas d'accord, pour deux raisons essentielles. La première, c'est qu'il y a une raison pour laquelle il faut être reconnu d'utilité publique pour se porter partie civile : l'autonomie, voire l'indépendance totale par rapport au ministère en place. Pour ma part, je n'ai aucune confiance dans les agréments que les sarkozystes, s'ils revenaient au pouvoir, distribueraient à des associations de lutte contre les dérives sectaires. La reconnaissance d'utilité publique est une protection car elle garantit que les associations habilitées à se porter partie civile ne sont pas purement partisanes.

Par ailleurs, dans de nombreux procès, des victimes de dérives sectaires se retirent de la procédure pénale, soit parce que le lien de sujétion n'est pas rompu, soit parce qu'elles font l'objet d'intimidations. C'était le cas par exemple durant le procès de Raël et des Raëliens. La reconnaissance d'utilité publique constitue une garantie que seules les associations ayant toutes les compétences pour accompagner, protéger et soutenir les victimes peuvent les mener dans les méandres de la procédure pénale.

Votre disposition aura pour conséquence d'affaiblir l'autonomie associative et fera peser un risque sur les poursuites judiciaires elles-mêmes si une association ayant la sympathie d'un décideur public peut être habilitée à aller en justice sans en avoir les compétences.

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Il s'agit d'étendre la possibilité de se constituer partie civile en accordant à certaines associations un agrément délivré sous certaines conditions très précises – intérêt général, transparence financière, collégialité, souscription d'un contrat d'engagement républicain. Les agréments ne seront donc pas distribués comme des bonbons. À vous entendre, seule l'Unadfi (Union nationale des associations de défense des familles et de l'individu victimes de sectes) devrait bénéficier de cette possibilité. Le Caffes (Centre national d'accompagnement familial face à l'emprise sectaire), le Gemppi (Groupe d'étude des mouvements de pensée en vue de la protection des individus) ou le CCMM (Centre contre les manipulations mentales) seraient ravis de s'entendre dire qu'ils ne sont pas compétents ! Avis défavorable.

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Dès lors que différentes associations sont compétentes, pourquoi faites-vous le choix de leur ouvrir le droit de se porter partie civile plutôt que de les accompagner vers la reconnaissance d'utilité publique ? Cela leur permettrait de sanctuariser dans le temps long leur capacité d'intervention. De plus, cela acterait qu'elles sont là au titre de leurs compétences et de leur savoir-faire, et non parce qu'un agrément à caractère politique, voire partisan, leur aurait été remis.

Je suis évidemment favorable à ce qu'un plus grand nombre d'associations de lutte contre les dérives sectaires soient accompagnées vers la reconnaissance d'utilité publique. Vous n'en prenez pas le chemin avec votre texte, parce que n'importe quel membre d'une association reconnue d'utilité publique aura intérêt à la quitter pour créer la sienne dans le but de bénéficier d'un agrément, affaiblissant ainsi le monde associatif engagé dans ce combat. C'est pour cela que nous proposons la suppression de l'article 3, ou à défaut l'instauration d'un double régime faisant coexister les agréments et le maintien des associations reconnues d'utilité publique. Ainsi, chacun sera satisfait d'avoir contribué à renforcer la lutte contre les dérives sectaires.

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Pour être reconnue d'utilité publique, une association doit respecter plusieurs critères, en particulier celui du nombre d'adhérents. Or des associations, comme le CCMM et le Gemppi, peuvent ne pas atteindre le nombre requis. Cet effet de seuil les prive alors de la possibilité de se porter partie civile. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que les associations bénéficiant d'un agrément puissent le faire. Les associations attendent vraiment beaucoup de l'article 3.

La commission rejette l'amendement.

Amendements identiques CL4 de M. Xavier Breton et CL10 de M. Thomas Ménagé

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L'article 3 permet à des associations d'exercer les droits de la partie civile. Toutefois, sous couvert de lutter contre les thérapies de conversion, cet ajout compromettrait gravement la possibilité de prendre en charge des patients, en particulier les enfants et adolescents qui ressentent de la souffrance liée à la dysphorie de genre.

Les dispositions que nous contestons soumettent parents et professionnels à la pression d'associations militantes qui cherchent à assimiler toute prise en charge prudente d'enfants et d'adolescents en questionnement de genre à une thérapie de conversion. Ce sont des sujets sensibles et la prudence devrait être nécessaire s'agissant de traitements encore expérimentaux présentant des conséquences lourdes et irréversibles, particulièrement s'agissant de jeunes en proie aux questionnements de leur âge. Il nous semble donc nécessaire d'arrêter cette fuite en avant sur la thérapie de conversion et l'identité de genre, et de commencer par appliquer la réglementation existante, qui est suffisante.

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Nous avons déposé cet amendement de suppression pour d'autres raisons que notre collègue : nous considérons qu'il doit y avoir un accord de la victime dès lors qu'une association catégorielle se constitue partie civile.

Nous ne remettons absolument pas en cause la lutte contre les thérapies de conversion. La loi de 2022 était souhaitable et les députés du Rassemblement national l'avaient votée. Il faut continuer, bien entendu, à lutter contre les dérives et les attaques contre les homosexuels. Nous souhaitons simplement que la victime soit associée au procès.

Je tenais à revenir sur les fake news que M. Kerbrat, de La France insoumise, a encore une fois publiées sur les réseaux sociaux, donnant le sentiment que nous voudrions autoriser les thérapies de conversion. Ce n'est absolument pas le cas et je trouve franchement dégueulasse, j'assume le terme, d'utiliser cette lutte noble contre les thérapies de conversion à des fins politiques, en attaquant le groupe Rassemblement national qui a toujours été aux côtés des homosexuels et contre les thérapies de conversion.

(Exclamations.)

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Pire, M. Kerbrat m'a attaqué personnellement sur mon coming out, en utilisant des faits de ma vie personnelle. La France insoumise a tout simplement fait preuve d'homophobie à mon encontre en sous-entendant que j'étais pour les thérapies de conversion. Je trouve vraiment honteux d'utiliser la vie personnelle d'un collègue à des fins politiciennes.

Nous réaffirmons donc notre soutien à la lutte contre les thérapies de conversion mais nous considérons que les victimes de ces thérapies doivent avoir leur mot à dire dans les procès.

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La logique est exactement la même que pour les dérives sectaires : les victimes sont en état de sujétion, donc empêchées de s'exprimer. Il est bien évident que si elles en avaient la possibilité, on leur donnerait volontiers la parole, mais il arrive qu'une personne en état de sujétion retire sa plainte après l'avoir déposée parce qu'elle subit encore cette chape de plomb qui l'empêche d'être véritablement libre de ses propos. Voilà pourquoi je suis défavorable à ces amendements.

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Dans les pas de notre collègue Kerbrat, nous ne voterons bien évidemment pas ces amendements. Nous n'oublions pas que, le 1er mars 2018, les élus du Rassemblement national au Parlement européen ont voté contre la motion condamnant les thérapies de conversion. Je constate que vous-même, monsieur Ménagé, avez changé d'avis – c'est à croire qu'une élection arrive ! De plus, un certain Jean-Marie Le Pen a été condamné en appel pour avoir comparé l'homosexualité à de la zoophilie. Cela fait donc deux bonnes raisons de ne pas vous suivre sur ce point particulier et de douter plus généralement de vos propos sur le sujet.

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Vous qui êtes perpétuellement dans la compromission avec les islamistes et qui les soutenez depuis des mois – une partie d'entre vous allant jusqu'à soutenir le Hamas en le qualifiant de mouvement de résistance – alors même que les islamistes tuent les homosexuels, qu'ils sont engagés dans une lutte à mort contre eux, vous devriez balayer devant votre porte avant de faire de l'archéologie vis-à-vis de notre mouvement. Les homosexuels et les Français de confession juive savent très bien que Marine Le Pen a toujours été un rempart face aux islamistes qui font la loi dans certains quartiers, où les jeunes homosexuels ne peuvent pas vivre ni se balader en se tenant par la main. Cela, vous voulez le cacher, par clientélisme électoral !

Madame la rapporteure, je comprends vos arguments mais ils soulèvent la question beaucoup plus large des moyens à mettre en œuvre pour accompagner les victimes des thérapies de conversion. Ce n'est pas en laissant des associations catégorielles se constituer partie civile sans leur accord que l'on aidera les victimes à se reconstruire : cela ne peut fonctionner que si elles le font de leur plein gré. Il faut donc prévoir, ce qui manque dans votre projet de loi, des moyens d'accompagnement psychologique et psychiatrique afin de leur donner le courage de mener ce combat devant les tribunaux. Ce n'est qu'ainsi que nous pourrons aider les jeunes homosexuels à lutter contre ces pratiques honteuses.

La commission rejette les amendements.

Amendements CL45 de M. Philippe Schreck, CL5 de M. Xavier Breton, CL24 de Mme Ségolène Amiot, CL6 de M. Xavier Breton et CL25 de M. Hadrien Clouet (discussion commune)

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Une association reconnue d'utilité publique présente plus de garanties pour ester en justice car, par rapport à une association simplement agréée, elle dispose d'un nombre d'adhérents, d'un rayonnement territorial et de capacités financières et de management étendus. À l'inverse, les conditions d'octroi et de retrait de l'agrément sont floues, voire discrétionnaires. Il faut inciter les associations agréées à obtenir la reconnaissance de l'utilité publique et à travailler ensemble lorsqu'elles n'atteignent pas la taille critique.

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Si les thérapies de conversion ont pu donner lieu à des abus qui doivent être réprimés, il ne faut pas tomber dans l'excès inverse. Avec l'article 3, on peut se demander comment les professionnels de santé pourront s'interroger sur le mal-être de leurs patients, notamment mineurs, et leur prodiguer les soins psychologiques ou psychiatriques souvent associés à cette prise en charge. S'ils peuvent être la cible d'associations militantes, comment les parents pourront-ils offrir à leur enfant une prise en charge complète des troubles qui se dissimulent souvent derrière une demande de transition ? Tout cela nous semble très dangereux, d'autant que l'on assiste de plus en plus à des phénomènes de détransition, qui génèrent beaucoup de souffrances, même si les tenants de la logique transaffirmative refusent de le reconnaître. Ceux qui votent ces textes seront un jour comptables des souffrances qu'ils auront occasionnées avec leur législation.

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L'amendement CL24 tend à reconnaître le travail accompli par les associations reconnues d'utilité publique en les maintenant aux côtés des associations agréées. Cela permettrait d'élargir le spectre des associations autorisées à se porter partie civile. Il s'agit donc de rechercher le mieux-disant : puisque des associations font déjà le travail, pourquoi leur retirer cette possibilité au bout d'un an ? A-t-on quelque chose à leur reprocher ? Je n'en suis pas sûre.

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Les processus de transition peuvent avoir des conséquences physiques et psychologiques irréversibles. Si l'on supprime la possibilité de détransitionner, cela risque d'occasionner des drames de plus en plus nombreux.

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Vous avez rappelé à juste titre, madame la rapporteure, que certaines associations ont des compétences mais n'atteignent pas la taille critique en nombre d'adhérents pour être reconnues d'utilité publique, en l'occurrence 200 membres. Une véritable politique de lutte contre les dérives sectaires, avec notamment des campagnes de prévention, favoriserait très rapidement le développement des associations et leur permettrait d'atteindre cette taille critique. En étant reconnues d'utilité publique, elles deviendraient indépendantes du pouvoir exécutif, quel qu'il soit. L'objet de mon amendement est donc de porter à quatre-vingt-dix-neuf ans la durée de la période transitoire pendant laquelle les associations reconnues d'utilité publique peuvent continuer à se porter partie civile, afin de nous donner le temps de la réflexion. Nous concilierions ainsi variété des acteurs et sécurité en cas de changement de gouvernement.

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Tout d'abord, le critère de l'utilité publique n'est pas inscrit dans la Constitution : il peut être modifié. Ensuite, vous craignez qu'un futur gouvernement ne remette en cause l'agrément. Mais celui-ci ne sera délivré qu'après avis du parquet, et à condition que l'association agisse dans l'intérêt général, fonctionne de façon démocratique, assure la transparence financière et respecte les règles du contrat d'engagement républicain, qui sont des critères prévus par la loi. Maintenir un double régime me paraît déséquilibré et risque d'établir une hiérarchie entre les associations. Quant à la période transitoire, nous proposons de la fixer à une année afin de laisser à l'Unadfi le temps d'obtenir l'agrément. Avis défavorable à tous ces amendements.

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Madame la rapporteure, l'avis du parquet que vous invoquez n'est qu'un avis et une autre majorité que la vôtre pourrait décider de s'asseoir dessus. De même, vous arguez que les associations doivent agir dans l'intérêt général, mais ce n'est pas une garantie si un nouveau pouvoir exécutif promeut une autre définition de l'intérêt général. Cette borne ne me paraît pas pérenne.

Vous évoquez ensuite un risque de hiérarchisation entre les associations. Mais dans votre système, les deux catégories d'associations cohabiteraient, une seule ayant le droit de se porter partie civile : la hiérarchie existerait aussi. Du reste, en quoi une hiérarchisation devrait-elle poser problème ? L'essentiel est que chaque victime puisse obtenir l'accompagnement le plus approprié.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l'article 3 non modifié.

Chapitre III Protéger la santé

Article 4 A (art. L. 4161-5, L. 4223-1 du code de la santé publique, art. L. 132-2 du code de la consommation) : Aggravation des sanctions pour les délits d'exercice illégal d'une profession médicale ou de pratiques commerciales trompeuses commises au moyen de supports numériques et création d'une peine complémentaire de suspension de l'accès au service de plateforme en ligne utilisé pour commettre ces infractions

Amendement de suppression CL27 de M. Jean-François Coulomme

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Il existe deux manières d'envisager la lutte contre les dérives sectaires. La première consiste à créer de nouvelles infractions et à alourdir les peines, la mesure de la réussite reposant sur le nombre de personnes condamnées. La deuxième, qui est celle que nous défendons, consiste à faire de la prévention, le but étant la réduction du nombre de victimes. Votre texte permettra de mettre plus longtemps à l'ombre les gourous et tous ceux qui exercent une sujétion sur autrui, mais il ne protègera pas davantage les victimes. Pour ce faire, il faudrait renforcer les services publics dans les domaines de la santé, de l'accompagnement psychologique, de la police, de la magistrature, etc.

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Je ne m'étendrai pas sur ce sujet que nous avons déjà largement évoqué. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL43 de M. Thomas Ménagé

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L'article 4 A érige en circonstance aggravante des infractions d'exercice illégal de certaines professions médicales le fait qu'elles ont été commises en ligne. Cette mesure nous paraît aller dans le bon sens pour mieux lutter contre le charlatanisme qui se répand sur internet.

Cependant, les organisations sectaires peuvent disposer de ressources financières importantes. Certaines peuvent déployer des campagnes de publicité sur les réseaux sociaux pour des montants dépassant celui de l'amende, à savoir 75 000 euros. De ce fait, les fournisseurs d'accès et les réseaux sociaux pourraient être tentés de payer les amendes, pour conserver ces campagnes : c'est leur intérêt économique. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons augmenter substantiellement le montant de l'amende encourue.

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Avis défavorable. Le montant prévu de 75 000 euros me paraît tout à fait proportionné et adapté.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL59 de Mme Brigitte Liso

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Cet amendement a pour objet le rétablissement de la peine complémentaire de suspension du compte d'accès au service en ligne utilisé pour commettre les délits d'exercice illégal de la médecine, de la pharmacie, de la biologie médicale et de pratiques commerciales trompeuses. Dans ces circonstances, le bannissement numérique s'impose.

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Il faut bien entendu fermer ces comptes et se montrer très sévère face à de telles dérives en ligne. Toutefois, la peine de bannissement n'est pas recevable parce qu'elle nécessiterait la création d'une identité numérique, actuellement impossible en raison de problèmes techniques.

Certes, cela part d'un bon sentiment : une personne ayant utilisé un compte pour commettre des actes répréhensibles en ligne ne devrait pas pouvoir en créer un nouveau. Mais ce qui me choque, c'est que vous souhaitiez revenir non pas sur une proposition du Rassemblement national – nous avons l'habitude d'être ostracisés, bien qu'il y ait derrière nous des millions de Français – mais sur un amendement de bon sens déposé par une députée de votre majorité, Mme Louise Morel, et qui avait été adopté de façon consensuelle. La peine que vous prévoyez n'est pas applicable. Je vous invite donc à un peu de bon sens, et à retirer votre amendement.

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L'amendement de Louise Morel sur lequel vous souhaitez revenir avait fait l'objet d'un important travail. Il est en outre conforté par le fait qu'au niveau de l'Union européenne, le digital wallet (portefeuille électronique) qui est en cours d'adoption ne sera qu'une possibilité offerte à l'ensemble des citoyens européens et non une obligation. Vous n'aurez donc pas la possibilité technique d'opérer des contrôles à partir du digital wallet, qui devrait emporter une grande partie de l'identité numérique en Europe. Enfin, votre amendement serait anticonventionnel. Restons-en donc à la rédaction de bon sens qui avait été proposée par Louise Morel, et qui avait fait l'objet d'un consensus.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 4 A modifié.

Article 4 (art. 223-1-2 du code pénal) : Création d'infractions réprimant la provocation à l'abandon ou l'abstention de soins ou à l'adoption de pratiques dont il est manifeste qu'elles exposent la personne à un risque grave ou immédiat pour sa santé

Amendements de suppression CL7 de M. Xavier Breton et CL11 de M. Thomas Ménagé

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L'article 4 est l'article maudit de ce projet de loi. Mme la rapporteure a certes déposé des amendements visant à l'améliorer mais il est devenu inintelligible. La prudence devrait prévaloir lorsque l'on touche à la liberté d'expression et de conscience. Nous proposons donc de supprimer cet article.

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Je ne suis pas certain, madame la rapporteure, que l'article 4 mérite que vous restiez la dernière, comme vous l'avez dit, pour le défendre ! Le Conseil d'État, la rapporteure du texte au Sénat et les parlementaires sont unanimes : la création d'une nouvelle infraction n'est pas nécessaire. Les infractions existantes, comme la mise en danger de la vie d'autrui ou l'exercice illégal de la médecine, constituent un arsenal suffisant pour lutter contre les abandons de soins. Je comprends que vous ayez été touchée par certains témoignages, mais un cas particulier ne saurait entraîner une atteinte aussi importante et aussi disproportionnée à la liberté d'expression, comme le souligne le Conseil d'État dans son avis. Il arrive que les faits ne soient pas constitués. Lorsque l'on touche aux libertés fondamentales, il faut le faire d'une main tremblante et il me semble en l'occurrence que vous manquez de prudence. C'est la raison pour laquelle notre groupe propose la suppression de l'article 4.

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Cet article n'est pas maudit, monsieur Breton, mais attendu. Lors de l'examen du texte en première lecture, nous avons travaillé à une rédaction équilibrée qui a permis de mieux circonscrire les éléments constitutifs des nouvelles infractions : pour que l'infraction de provocation à l'abandon ou à l'abstention de soins soit caractérisée, il faut désormais que les conséquences soient particulièrement graves pour la santé de la personne.

Nous avons aussi tenu à préciser les conditions d'application de ces infractions pour garantir le respect de la liberté de conscience et en matière de choix d'un traitement : il a ainsi été précisé que les infractions ne sont pas applicables lorsque les circonstances de commission des faits permettent de retenir que la personne disposait de toutes les informations pour librement consentir à l'abandon de soins ou à l'adoption de certaines pratiques. Ne sera pas sanctionnée une personne qui, par exemple, conseillerait un proche de bonne foi et de façon bienveillante. Comme pour l'ensemble des infractions en droit pénal, la caractérisation de celles-ci nécessitera d'apporter la preuve d'une intention – exclusive de toute bonne foi – de tromper, ou de profiter de la vulnérabilité d'un malade pour le manipuler, le détourner de soins indispensables ou l'inciter à adopter – bien souvent à acheter – de prétendus remèdes mettant gravement sa santé en péril.

La rédaction à laquelle nous sommes parvenus est aboutie et équilibrée, mais elle peut sans doute être encore améliorée : j'ai déposé un amendement visant à clarifier les garanties apportées au respect de la liberté de conscience et du libre choix d'un traitement.

Je donne bien évidemment un avis défavorable à ces amendements de suppression.

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Il ne fait aucun doute que le texte initial présentait une faiblesse, dans la mesure où il n'intégrait pas suffisamment les précautions demandées par le Conseil d'État.

Voter la suppression de l'article 4, ce serait ne pas reconnaître les évolutions que les discussions en commission et en séance ont permises – et que les sénateurs ont refusé de considérer lors de la CMP. Nous devons encore éliminer quelques scories purement juridiques, s'agissant notamment du régime de présomption qui était dangereux sur le plan des libertés individuelles. Mais nous sommes parvenus à un équilibre entre la protection de la santé psychique ou physique et la liberté de conscience : il est parfaitement naturel, en effet, de pouvoir refuser un traitement ou une thérapie. Plutôt que de supprimer l'article, nous vous invitons chers collègues à voter l'amendement à venir CL65 de la rapporteure, qui permettra d'aboutir à une rédaction équilibrée, parfaitement conforme au droit français et à l'évolution de la législation.

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Le cas des lanceurs d'alerte est depuis l'origine un point d'inquiétude. Vous vous efforcez de nous rassurer sur ce point, madame la rapporteure, mais l'encadrement que vous avez prévu n'est pas satisfaisant. Vous essayez de vous rattraper aux branches pour sauver votre article, mais votre rédaction ne règle pas le problème.

Avant d'être un lanceur d'alerte, on est un fou, ou à tout le moins quelqu'un dont les positions ne sont pas conformes au consensus scientifique. On pourra donc être condamné sur le fondement de l'article 4 et n'être reconnu comme un lanceur d'alerte que cinq ou dix ans plus tard. Comment le texte pourra-t-il protéger des lanceurs d'alerte qui n'en sont pas encore ? Je le répète : l'article 4 constitue une remise en cause du débat scientifique et une atteinte profonde à nos libertés fondamentales.

La commission rejette les amendements.

Amendement CL46 de M. Philippe Schreck

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L'article 4 n'ayant pas été supprimé, nous allons passer notre temps à le triturer pour essayer de l'améliorer. Cet amendement a pour objet de préciser qu'il n'est applicable que lorsque la provocation est adressée à une personne ou à un groupe de personnes déterminées. Dès lors qu'il se pose en des termes généraux, le débat pourra ainsi se poursuivre librement.

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Je suis défavorable à cet amendement qui restreint beaucoup trop le champ d'application des nouvelles infractions, en interdisant, par exemple, de réprimer les faits de provocation commis au moyen de vidéos ou de publications largement relayées sur internet.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CL60 de Mme Brigitte Liso, rapporteure.

Amendements identiques CL65 de Mme Brigitte Liso, CL48 de M. Philippe Pradal, CL49 de M. Didier Paris et CL50 de Mme Mathilde Desjonquères

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Ces amendements visent à réécrire les alinéas 5 et 6 afin de préciser les conditions dans lesquelles les délits ne sont pas constitués, tout en garantissant la protection de la personne placée en état de sujétion.

La rédaction actuelle de ces deux alinéas comporte des imprécisions qui sont de nature à nuire à l'application correcte du dispositif et à son efficacité. D'une part, la référence aux conditions dans lesquelles la provocation a été faite mérite d'être mieux explicitée. Il est difficile de définir les conditions dans lesquelles un acte de provocation est susceptible ou non de remettre en cause la volonté de la personne. Les praticiens ne pourront que se heurter à cette difficulté, qui pourrait aussi alimenter les débats devant la justice et fragiliser les procédures. D'autre part, il existe en l'état actuel de la rédaction un doute sur les conditions dans lesquelles les délits peuvent être ou non constitués, qui risque de contrevenir aux principes de légalité des délits et de précision de la loi pénale. Enfin, la rédaction actuelle de l'alinéa 6 est imprécise et fait dépendre l'application de la protection bénéficiant à la personne en état de sujétion de la délivrance d'une information ; cela ne correspond pas parfaitement aux conditions d'exclusion de la responsabilité pénale qui sont prévues à l'alinéa 5.

La réécriture que je vous propose corrige ces difficultés. Elle permettra d'exclure les cas dans lesquels la personne a, en toute connaissance de cause, librement consenti à l'abandon ou à l'abstention de soins ou à l'adoption de certaines pratiques. Il appartiendra au juge de prendre en compte les circonstances de commission des faits et d'établir si la personne disposait, dans ce contexte particulier, d'une pleine et entière volonté.

L'actualité démontre l'importance de protéger les personnes : récemment encore, la presse s'est fait l'écho de l'arrestation d'un prétendu « yogi-gourou » qui faisait signer à ses victimes une décharge de responsabilité pour se prémunir de tout dépôt de plainte.

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Les groupes de la majorité ont souhaité déposer des amendements identiques à celui de Mme la rapporteure, visant à ce que l'article 4 soit plus équilibré et plus fidèle à l'avis du Conseil d'État. Il s'agit de protéger non seulement la victime – c'est l'objet principal du texte – mais aussi la liberté de conscience de chacun, qui est libre d'entrer ou non dans certains protocoles de soin.

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Ces amendements améliorent très sensiblement le texte en rétablissant la notion de volonté libre et éclairée de la personne, dès lors que l'information qui lui a été adressée est claire et complète. Je souhaite qu'à l'instar de tous les groupes de la majorité, l'ensemble des membres de la commission les adoptent.

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Ces amendements fluidifient le texte en précisant les conditions de traitement des infractions de provocation prévues par l'article 4. Ils mentionnent la garantie du respect de la liberté individuelle dans le choix d'un traitement, ce qui était essentiel.

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Cette nouvelle rédaction est un bricolage de plus ! Plutôt que de me lancer dans un long discours, je vais simplement lire votre proposition : « Lorsque les circonstances dans lesquelles a été commise la provocation, définie au premier alinéa, permettent d'établir la volonté libre et éclairée de la personne, eu égard notamment à la délivrance d'une information claire et complète quant aux conséquences pour la santé, les délits définis au présent article ne sont pas constitués, sauf s'il est établi que la personne était placée ou maintenue dans un état de sujétion psychologique ou physique, au sens de l'article 223-15-3. » C'est inintelligible ! Je ne doute pas de votre intention d'apporter la meilleure réponse possible aux questions essentielles qui sont posées, mais vous êtes lancés dans une fuite en avant. Le texte est mal écrit et son application va susciter des dangers.

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Oui, il s'agit d'un bricolage. Par définition, une victime parfaitement informée et dont le consentement est libre et éclairé n'est pas une victime ! Ces amendements cherchent à sauver un article au destin cauchemardesque.

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Notre groupe s'abstiendra sur le vote de ces amendements : ils améliorent certes la version initiale, mais ne lèvent pas nos réticences s'agissant de l'ordonnancement des peines et de leur place dans notre droit. Nous ne sommes toujours pas convaincus par la rédaction de l'article 4 dans son ensemble.

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Souscrivant à tout ce qui vient d'être dit, je pense qu'il serait utile de réécrire l'article dans la perspective de la séance. Plutôt que de commencer par écarter ce qui ne serait pas un délit, allez directement au sujet et définissez ce qui le serait ! Cela tiendra en trois lignes et cela sera plus lisible.

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La rédaction que nous avons retenue permet justement d'écarter les situations dans lesquelles les personnes sont correctement informées et exercent leur liberté de conscience, monsieur Schreck. Vous avez parfaitement compris le texte, ne cherchez pas à en faire une mauvaise interprétation.

La commission adopte les amendements identiques.

En conséquence, les amendements CL15 et CL16 de M. Thomas Ménagé tombent.

Elle adopte ensuite l'article 4 modifié.

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Certains d'entre vous semblent douter du résultat du vote. Je vous confirme que l'article 4 a été largement adopté. Les socialistes n'ont pas voté. Pour la majorité, seul M. Latombe a voté contre.

Article 5 (art. 11-3 du code de procédure pénale) : Obligation pour le parquet d'informer l'ordre professionnel en cas de condamnation ou de placement sous contrôle judiciaire d'un professionnel de santé à raison de la commission de certaines infractions

Amendement de suppression CL28 de Mme Ségolène Amiot

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Les députés du groupe LFI-NUPES sont attachés au secret de l'enquête, auquel il ne doit pas être possible de déroger n'importe comment. Les magistrats peuvent déjà le faire lorsqu'ils l'estiment nécessaire. Néanmoins, il nous paraît disproportionné de faire de cette possibilité une obligation. Cela pourrait nuire gravement et durablement à la réputation de professionnels mis hors de cause par la suite.

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Le décompte du vote précédent n'est pas bon, monsieur le président.

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Cet article a été largement adopté. À la commission des lois, c'est moi qui compte, et je le fais avec précision. On ne remet pas en cause mon décompte.

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Le code de procédure pénale prévoit déjà une faculté d'information des ordres de santé, mais force est de constater que cette disposition est très peu employée. L'article 5 permet de répondre aux enjeux spécifiques attachés à la limitation de la propagation des dérives sectaires. Surtout, les ordres professionnels que j'ai eu l'occasion d'auditionner ont demandé à maintes reprises que cette obligation de les informer soit instituée. Il paraît donc essentiel de conserver cet article. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL44 de M. Philippe Schreck

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Le texte prévoit une information des ordres professionnels, lesquels peuvent et doivent avoir un rôle à jouer en la matière, mais uniquement en cas de condamnation. Je propose que les ordres soient informés plus tôt, dès lors qu'une juridiction de jugement ou d'instruction est saisie. Ayant communication du dossier en amont, ils pourraient ainsi envisager l'opportunité de se constituer partie civile et faire des demandes d'actes.

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L'information obligatoire de l'ordre professionnel de santé concerné est déjà prévue en cas de placement sous contrôle judiciaire. Il serait excessif de déroger au secret de l'enquête et d'informer les ordres de santé dès lors qu'une information judiciaire est ouverte. Avis défavorable.

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Il ne s'agit pas de rendre l'information obligatoire dès lors qu'une enquête est déclenchée, mais lorsqu'une juridiction d'instruction ou de jugement est saisie, afin que les ordres puissent avoir accès au dossier comme toutes les parties au procès.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'article 5 non modifié.

Chapitre IV Assurer l'information des acteurs judiciaires sur les dérives sectaires

Article 6 (art. 157-3 du code de procédure pénale) : Permettre la transmission à l'autorité judiciaire de toute information utile sur les phénomènes sectaires

La commission adopte l'amendement rédactionnel de Mme Brigitte Liso, rapporteure.

Elle adopte l'article 6 modifié.

Article 6 bis (art. 226-14 du code pénal) : Dérogation au secret médical pour permettre aux professionnels de santé de signaler à l'autorité judiciaire des faits de placement ou de maintien en état de sujétion

Amendements de suppression CL12 de M. Thomas Ménagé et CL38 de M. Jean-François Coulomme

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L'article 6 bis part d'une bonne intention : permettre la détection des dérives sectaires. Il pourrait néanmoins avoir des effets contre-productifs. On parle librement à son médecin, quand on a la chance d'en avoir un, parce que l'on sait que ces échanges sont couverts par un secret quasiment absolu. Un équilibre a été trouvé entre le secret dû par le professionnel de santé à son patient et la nécessité de protéger l'intérêt général, ainsi que celui des mineurs. Mais en envisageant de lever le secret médical pour lutter contre les dérives sectaires, on risque paradoxalement de conduire les patients à se taire et à se priver de l'accompagnement de leur médecin. Cet article est vraiment une fausse bonne idée.

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Notre groupe n'a pas d'hostilité de principe à la levée du secret médical, qui existe déjà. Mais, si la rédaction de l'article a été améliorée lors de l'examen du texte en séance s'agissant du consentement de la personne concernée, elle continue de poser deux problèmes. D'abord, en l'absence d'une définition de l'état de sujétion qui doit déclencher l'information du procureur, les pratiques risquent d'être très diverses, voire contradictoires d'un praticien à l'autre. Peut-être conviendrait-il d'abord de préciser cette définition. Par ailleurs, ce n'est pas la croyance qui est réprimée, mais la dérive qui en est issue – par exemple la mise en danger. L'article 226-14 du code pénal prévoit d'ores et déjà des exceptions au secret professionnel, en cas de privations, de sévices ou de violences intrafamiliales notamment. Nous ne voyons pas les lacunes que viendrait combler le nouvel alinéa. De ce fait, nous sommes défavorables à l'article 6 bis.

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Lorsque cette disposition a été introduite en commission, en première lecture, j'avais émis un avis défavorable. Aucun ordre professionnel, en effet, n'en avait évoqué la nécessité. Elle a néanmoins été retravaillée et le périmètre du dispositif est mieux défini. Ainsi rédigé, cet article me convient. Je suis donc défavorable aux amendements de suppression.

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J'en tire une conclusion politique importante : lorsque nous rejetons vos articles, vous les réécrivez mieux. Je propose que nous poursuivions ainsi afin d'aboutir à un texte plus satisfaisant d'ici l'examen en séance !

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Avez-vous envisagé, madame la rapporteure, l'effet contre-productif que pourrait avoir cet article ? Je le répète : aujourd'hui, les gens parlent à leur médecin sans crainte – ce qu'ils ne seraient pas forcément capables de faire avec un policier. Si leurs propos sont désormais susceptibles de déclencher une procédure judiciaire sans leur accord, ils risquent de ne plus se confier. Pourriez-vous nous rassurer sur ce point ?

La commission rejette les amendements.

Amendement CL14 de M. Thomas Ménagé

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Il ne faut pas considérer à la légère la levée du secret professionnel : cet amendement de repli vise à préciser que le professionnel doit disposer d'éléments suffisamment probants laissant supposer que les faits sont établis et que la sujétion cause une altération grave de la santé de la victime. Il n'est pas raisonnable en effet de se fonder sur une estimation « en conscience » du professionnel de santé, qui pourrait ne reposer sur aucun élément tangible. La formulation que nous proposons, plus adaptée aux enjeux, aurait le mérite de protéger le praticien et son patient tout en élargissant le champ des faits considérés.

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Je suis défavorable à cet amendement qui ferait du médecin un enquêteur. Il devrait aller chercher lui-même des éléments de preuve pour se forger une conviction et décider si les faits de placement ou de maintien en état de sujétion sont établis. Cela relève des compétences de l'autorité judiciaire.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL13 de M. Thomas Ménagé

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Cet amendement vise à rendre plus objective l'appréciation sur laquelle se fonde le professionnel de santé pour lever le secret médical. La formulation actuelle, désignant une personne qui « n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique », n'est pas assez précise. Nous proposons de se fonder plutôt sur une notion juridique qui existe déjà en circonscrivant la levée du secret médical aux personnes bénéficiant du statut de majeur protégé, dont l'autorité judiciaire a déjà reconnu qu'elles ne sont pas capables de se protéger elles-mêmes.

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Votre amendement est trop restrictif. Il faut pouvoir protéger les personnes qui ne sont pas en état de le faire elles-mêmes mais qui ne font pas l'objet d'une mesure de protection. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CL62 de Mme Brigitte Liso, rapporteure.

La commission adopte l'article 6 bis modifié.

Chapitre V Dispositions diverses

Article 7 (art. 711-1 du code pénal, art. 804 du code de procédure pénale) : Coordinations outre-mer

La commission adopte l'article 7 non modifié.

Article 8 : Remise d'un rapport au Parlement portant sur la mise en œuvre des dispositions de la présente loi dans le domaine de la santé mentale

La commission adopte l'article 8 non modifié.

Article 9 : Remise d'un rapport au Parlement portant sur l'usage des titres professionnels par des personnes exerçant des pratiques de santé non réglementées

La commission adopte les amendements rédactionnels CL63 et CL64 de Mme Brigitte Liso, rapporteure.

Elle adopte l'article 9 modifié.

Titre

Amendement CL40 de M. Hadrien Clouet

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Nous examinons un projet de loi « visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l'accompagnement des victimes ». Il ne s'est pourtant enrichi durant nos débats d'aucune mesure sur ce dernier point. Des amendements ont proposé d'associer les agences régionales de santé à la lutte contre les dérives sectaires, de sanctuariser la possibilité, pour les associations reconnues d'utilité publique, d'exercer les droits reconnus à la partie civile, ou encore de renforcer les moyens de la magistrature, mais ils n'ont pas été adoptés. Nous proposons donc de mettre le titre du texte en cohérence avec son contenu et de remplacer les termes « à améliorer l'accompagnement des victimes » par les termes « à accompagner l'inflation pénale ».

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Je vous trouve sévère, monsieur Clouet: ce texte privilégie certes la réponse pénale, mais il permet une meilleure indemnisation des victimes, prévoit l'extension du délai de prescription et élargit la possibilité pour les associations d'agir en justice. Le titre est donc adapté au contenu du texte, et je suis donc défavorable à votre amendement.

La commission rejette l'amendement.

La commission adopte l'ensemble du projet de loi modifié.

Puis, la Commission examine le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole (n° 2041) (M. Ludovic Mendes, rapporteur).

Lien vidéo : https://assnat.fr/bELwMr

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Tous les sujets abordés par ce projet de loi ne relèvent pas que de la commission des lois. C'est pourquoi nous avons sollicité l'avis au fond des commissions des finances, des affaires économiques ainsi que du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Conformément à une pratique maintenant bien établie, s'agissant des articles et amendements adoptés par les autres commissions, nous nous contenterons de ratifier les choix faits par nos collègues sans les examiner sur le fond.

Notre examen ne portera donc que sur les dispositions relatives au droit des sociétés, à la procédure pénale et à la fonction publique.

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Nous examinons donc le deuxième « Ddadue » de la législature, autrement dit le deuxième projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne. Depuis quinze ans, le Parlement est saisi d'un Ddadue par an en moyenne.

Son objet est de transposer en droit interne des règlements et des directives de l'Union européenne. Celui-ci porte sur des matières composites : économie, finances, transition écologique, droit pénal, droit social et agricole.

Le projet de loi initial comportait trente-quatre articles. Le Sénat l'a adopté en première lecture le 21 décembre, après avoir confié son examen à une commission spéciale. Notre assemblée, elle, a choisi de le renvoyer à la commission des lois. Toutefois, des délégations de fond ont été accordées aux commissions des affaires économiques, des finances, ainsi que du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Notre commission est ainsi chargée de l'examen des articles 4, 5, 21 à 30 et 32. Je remercie l'ensemble des personnes auditionnées – les administrations centrales, le Conseil national des barreaux, et les acteurs représentant les entreprises – pour leur précieux concours à mes travaux.

Les articles 4 et 5 portent sur le droit des sociétés. L'article 4 ratifie la transposition par ordonnance de la directive 2019/2121 qui réforme les opérations transfrontalières – fusions, scissions, apports partiels d'actifs. De nature technique, il apporte des coordinations supplémentaires dans le code de commerce afin de renforcer le libre établissement des entreprises dans l'espace économique européen. Je vous proposerai d'adopter cet article et plusieurs amendements rédactionnels.

L'article 5 habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2022/2381 sur la représentation équilibrée des hommes et des femmes dans les conseils d'administration des grandes sociétés commerciales. Le Sénat a souhaité encadrer l'habilitation afin de s'assurer que la transposition n'entraîne aucun recul en droit interne pour la représentation des femmes. En effet, la France est en avance sur ses voisins européens : elle a institué un quota de 40 % dans les conseils d'administration dès 2011, par le biais de la loi Copé-Zimmermann, et des sanctions dissuasives. La loi visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle de 2021, dite loi Rixain, a ensuite défini des règles pour les organes de direction. Je vous proposerai donc des ajustements essentiellement rédactionnels.

Les articles 21 à 26 concernent les échanges d'informations en matière répressive. Ils transposent la directive 2023/977 du 10 mai 2023 visant à instaurer des règles précises et harmonisées de nature à garantir aux services répressifs de tout État membre un accès équivalent aux informations disponibles dans les autres États membres. Cette directive comporte plusieurs dispositions, relatives entre autres au point de contact unique pour l'échange d'informations, ou au principe de la transmission d'une copie des envois et réponses aux points de contact uniques des États émetteurs et destinataires lorsqu'ils ne sont pas à l'origine de ces demandes ou réponses. Le Sénat a profondément réécrit ces articles, dans un sens qui n'apparaît ni respectueux de la directive, ni opérationnel pour les services. C'est pourquoi je vous proposerai d'adopter les amendements du Gouvernement qui rétablissent la rédaction initiale.

L'article 27 adapte le code de procédure pénale au règlement européen 2023/2131 qui fluidifie les échanges d'information numériques en matière de terrorisme. Après audition de la Chancellerie, je vous proposerai de supprimer un ajout inopportun du Sénat concernant l'autorité chargée de correspondre avec l'agence européenne Eurojust.

L'article 28 met en conformité le code de procédure pénale avec la directive 2013/48 sur la garde à vue. Nous y reviendrons en détail tout à l'heure car il fait l'objet d'amendements. La Commission européenne a estimé, dans un avis motivé, que la présence de l'avocat n'était pas suffisamment garantie durant la garde à vue dans le droit français, notamment du fait de l'existence d'un délai de carence de deux heures qui court à compter de l'avis adressé à l'avocat choisi : à son terme, une audition sans avocat est possible si celui-ci ne s'est pas présenté. Le Sénat a réintroduit une procédure d'audition immédiate, mais elle n'est pas complètement conforme à la directive. Il faudra donc l'amender, sous peine d'exposer la France à un recours en manquement.

L'article 29 met en conformité le code de procédure pénale avec la décision-cadre 2002/584, qui porte sur la procédure de mandat d'arrêt européen. Il n'y a pas de marge de manœuvre ici pour se conformer au droit européen. Le Sénat a adopté cet article sans modification et je vous proposerai de faire de même.

L'article 30 prévoit certaines modalités d'application outre-mer. Le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement pour reporter de trois mois l'entrée en vigueur de l'article 28 sur la garde à vue, de manière à permettre aux services judiciaires de se préparer, ce qui me semble opportun. Je vous proposerai de l'adopter sans modification.

Enfin, l'article 32 porte sur le droit de la fonction publique. Il a pour objet de transposer l'article 10 de la directive 2019/1158 du 20 juin 2019 concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants. Il prévoit un maintien des droits acquis – droit à la formation, aux évaluations annuelles, etc. – avant le début de certains congés, notamment le congé de paternité et d'accueil de l'enfant, le congé parental ainsi que le congé de proche aidant. Le Sénat a opportunément allongé la liste des congés concernés. Je vous proposerai d'adopter l'article 32 dans cette nouvelle rédaction.

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Je salue l'important travail des rapporteurs Damien Adam, Stéphane Vojetta et Daniel Labaronne qui, dans leurs commissions respectives, ont contribué à améliorer ce projet de loi. Il s'agit certes d'un exercice assez technique, mais aussi récurrent – c'est le troisième en trois ans – et essentiel pour la conformité de notre droit à la législation européenne.

L'étroitesse de la marge de manœuvre des États membres pour transposer le droit européen est avérée. En dépit de la technicité du texte, d'importantes mesures ayant parfois fait l'objet de longs débats en France demeurent soumises à notre vote.

La commission devra ainsi se prononcer sur l'article 28 qui adapte le régime de la garde à vue en France, s'inscrivant ainsi dans le long processus de réforme déjà engagé dans notre pays sur ce sujet. Je tiens à saluer les propositions de notre rapporteur pour rétablir la possibilité pour l'avocat de consulter les procès-verbaux des auditions qui se sont déroulées en sa présence ou pour supprimer la possibilité de recourir à l'audition immédiate sans la présence de l'avocat, pour des raisons d'éloignement géographique du lieu où se déroule la garde à vue. Ces dispositions semblent particulièrement bienvenues pour conserver l'équilibre si subtil, propre à notre code de procédure pénale.

Engager une réflexion sur l'articulation entre la direction des affaires criminelles et des grâces et le parquet national antiterroriste, notamment s'agissant du rôle de correspondant local aux échanges d'informations numériques dans les affaires de terrorisme, est également souhaitable.

Ce projet de loi n'est pas seulement technique, il est aussi déterminant pour les droits de la défense et les droits fondamentaux. Le groupe Renaissance le soutiendra donc, ainsi que les amendements du rapporteur.

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Ce projet de loi ne fait qu'appliquer les décisions européennes afin de les rendre conformes au droit français. Son titre témoigne à lui seul du caractère disparate et incohérent des dispositions soumises au vote national : pêle-mêle des dispositions relatives aux batteries, à la collecte et à la valorisation des déchets, aux contrats de concessions aéroportuaires, à l'échange d'informations numériques dans les affaires de terrorisme, à la politique agricole… Et l'on s'étonne encore qu'un tel texte puisse être perçu comme un amas de normes indigestes.

L'Assemblée nationale devrait à tout le moins pouvoir examiner ces textes visant à adapter le droit français au droit européen dans des conditions acceptables, autrement dit en disposant du temps nécessaire pour étudier les textes européens dont ils sont issus, et en se voyant présenter autant de projets de loi qu'il y a de domaines juridiques abordés. Mais le Gouvernement, loin de respecter le mandat confié à la représentation nationale, a engagé la procédure accélérée. Il révèle là son allégeance à l'Union européenne, qui lui dicte son calendrier sous la menace de sanctions en cas de retard ou de refus de transposition.

Le Parlement français ne peut pas être la chambre d'enregistrement de l'Union européenne. Nous vous le rappellerons constamment, le Rassemblement national s'attachera à la défense des intérêts français à chaque instant et ce, malgré les sanctions que Bruxelles pourrait prendre. Nous ne laisserons pas, sans rien faire, nos intérêts être bradés au nom d'une Europe trop souvent sourde aux aspirations et aux besoins de notre nation.

Si certains articles peuvent paraître utiles, tel l'article 29 qui supprime l'exigence du consentement de la personne dont le transfèrement est envisagé dans le cadre du mandat d'arrêt européen, ce n'est pas le cas pour de nombreux autres – je pense à l'article 5 qui prévoit « un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées » alors que ces dispositions sont déjà présentes dans le droit français. Plusieurs articles sont même contreproductifs, comme l'article 28, qui modifie plusieurs articles du code de procédure pénale afin notamment de permettre à la personne gardée à vue de prévenir le membre de son entourage de son choix. Cela multipliera les risques d'entrave au bon déroulement de l'enquête. La nécessité d'attendre l'avocat, y compris lorsque son retard se prolonge, avant de procéder à l'audition de la personne gardée à vue ne pourra là encore que nuire à l'efficacité de l'enquête. Deux amendements ont été déposés par le groupe Rassemblement national pour éviter ces modifications gravement attentatoires à la sécurité de nos ressortissants pourtant déjà tellement mise à mal.

Si 54 % des Français désavouent le fonctionnement actuel de l'Union européenne, selon une enquête publiée lundi par Le Monde, c'est parce qu'ils ne se retrouvent pas dans une Europe qui noie la souveraineté et la démocratie française sous un flot de normes techniques, souvent illisibles et trop fréquemment inutiles, voire contraires à leur intérêt. Il suffit d'aller aux manifestations des agriculteurs pour s'en rendre compte.

Ce projet de loi illustre, une fois de plus, le poids de la technocratie bruxelloise qui n'a aucune vision pour l'Europe et passe son temps à menacer et à sanctionner les États membres. Le groupe Rassemblement national défend une Union européenne soucieuse des souverainetés des nations dans les domaines mettant en jeu les intérêts vitaux de notre pays, et attachée aux coopérations fructueuses dans les autres domaines – je pense à Erasmus. Nous voulons offrir aux Français et aux Européens une Europe respectueuse de chacun et profitable à tous. Nous déterminerons notre vote sur le texte à l'issue des débats.

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Voici donc un nouveau Ddadue qui vient démontrer, une fois de plus, que nous sommes rarement en retard lorsqu'il s'agit de mettre notre droit national en conformité avec la réglementation européenne.

Ces adaptations emportent rarement des changements majeurs. Parfois même, le droit national est plus normatif que le droit européen – la responsabilité de la norme excessive, dont on parle beaucoup en matière d'agriculture en ce moment, n'est pas forcément imputable à l'Europe mais peut se loger dans les arcanes de notre droit. Le Ddadue peut donc être l'occasion de libéralisations ou d'allégements bienvenus.

Le projet de loi balaye, comme d'habitude pour les textes de cette nature, des domaines très différents.

Nous soulignons le travail effectué par le Sénat pour s'assurer que nous ne profitions pas de ce support législatif pour faire de la surtransposition, ce qui a été une fâcheuse habitude du législateur français. Nous saluons le travail de la chambre haute, qu'il s'agisse de la parité dans les conseils d'administration, de l'échange d'informations entre les services répressifs des États membres, ou encore du recours à l'avocat lors de la garde à vue. Nous soutiendrons le texte.

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Ce texte comporte d'abord des adaptations du droit des sociétés. Il permet de réformer le régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières ainsi que de rechercher un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées.

Le texte comprend ensuite diverses dispositions relatives à l'échange d'informations en matière répressive et dans les affaires de terrorisme. La transmission d'informations est parfois cruciale dans les affaires qui concernent plusieurs pays et les difficultés de communication entre les États peuvent nuire au bon déroulement des enquêtes. Si l'installation d'un point de contact unique n'est pas une nouveauté pour la France, il paraît bienvenu d'instaurer un cadre commun à l'ensemble des État pour la transmission des informations. En revanche, les modifications apportées par le Sénat ne nous semblent pas pertinentes. C'est pourquoi nous soutiendrons les amendements du rapporteur et du Gouvernement en la matière.

Enfin, le projet de loi prévoit une réforme de la garde à vue, motivée par l'alerte de la Commission européenne sur la mauvaise transposition de la directive de 2013. Afin d'y remédier, il adapte le code de procédure pénale s'agissant du droit de communiquer avec un proche et des dérogations possibles à l'assistance d'un avocat lors d'une garde à vue.

Le groupe Démocrate soutient évidemment ce texte.

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Ce texte, bien que très technique, n'en est pas moins nécessaire pour intégrer dans notre droit des dispositions adoptées au niveau européen. Je note que les sénateurs ont choisi de l'examiner au sein d'une commission spéciale.

La forte dimension technique des dispositions, ajoutée à l'éloignement du contexte d'origine, rend leur objet et leurs motifs difficiles à cerner. En outre, l'exercice de la déclinaison en droit français est contraint ; les marges de manœuvre laissées aux parlements nationaux pour la transposition sont limitées.

L'article 9 comporte une habilitation à légiférer par ordonnance. L'article 17, lui, modifie le code général de la fonction publique pour étendre aux praticiens hospitaliers le droit général à l'information. D'après notre rapporteur, le contenu et les modalités de ce droit seront précisés par un décret en Conseil d'État et un arrêté qui pourrait être commun aux agents du service public et aux praticiens hospitaliers, lesquels, s'ils sont agents publics, conservent une autonomie fonctionnelle dans le service public. On ne peut que se féliciter d'une telle extension.

Plusieurs articles portent sur le droit et la procédure pénale, le plus important étant l'article 28 qui concerne la garde à vue et le droit à l'assistance d'un avocat. Dans sa version initiale, cet article consacrait l'interdiction de la possibilité d'audition immédiate des gardés à vue sans la présence d'un avocat. Le Sénat a aménagé l'article 63-4-2 du code de procédure pénale afin de reporter la présence de l'avocat pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête, pour assurer le bon déroulement des investigations urgentes, ou pour prévenir une atteinte à la vie, à la liberté et l'intégrité physique des personnes. La référence à une situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale, introduite pat le Sénat, est peu précise, ce qui pourrait faciliter les dérogations à la présence de l'avocat. Nous avons présenté un amendement afin de réaffirmer ce principe. C'est un point que le Conseil de l'Europe relève régulièrement.

L'article 28 mentionne aussi la nécessité pour l'avocat de se présenter « sans retard indu ». Le diable se cachant dans les détails, j'appelle votre attention sur le risque que fait encourir une telle rédaction.

Nous soutenons ce texte. Caroline Abadie l'a rappelé, nous avons eu à examiner plusieurs Ddadue. L'un d'entre eux a été l'occasion d'introduire des dispositions importantes dans notre droit pénal en matière d'esclavage et de traite des êtres humains, qui ont facilité le travail des magistrats dans plusieurs affaires.

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Ce projet de loi vise à transposer dans le droit français les directives et règlements qui ont fait l'objet d'un consensus au niveau européen. À l'approche des élections européennes, il est bon de rappeler à quel point l'Union européenne sait participer à rendre l'ensemble de ses États membres plus forts.

Nous soutenons l'habilitation à légiférer par ordonnances, prévue à l'article 5, afin de transposer la directive relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées. Si la France est pionnière en la matière, avec 46 % de femmes dans les conseils d'administration et de surveillance des sociétés du SBF 120, l'harmonisation des législations des autres États européens permettra d'insuffler une dynamique commune. Si la directive adoptée l'année dernière poursuit des objectifs ambitieux, il convient de veiller à ce que sa transposition en droit français ne fragilise pas l'édifice construit depuis la loi Copé-Zimmermann.

Le projet de loi permet également de renforcer la coopération entre services répressifs des États membres sans empiéter sur les compétences régaliennes des États. Il est indispensable d'instaurer des mécanismes de collaboration entre les services nationaux afin de s'assurer d'une pleine efficacité dans les enquêtes menées, à l'heure où la criminalité, toujours plus professionnelle, s'internationalise. Cette coopération est encore plus essentielle en matière de terrorisme et d'atteinte à l'intégrité des territoires européens, d'où la nécessité de transposer le règlement relatif aux échanges d'informations numériques dans ces affaires. Cette coopération essentielle doit demeurer respectueuse des modes de fonctionnement propres à chaque pays, en particulier en matière de renseignement.

Le projet de loi réforme substantiellement les règles concernant l'assistance d'un avocat pendant la garde à vue, à la suite de l'engagement d'une procédure précontentieuse contre la France en raison de la non-conformité de la transposition de la « directive C » de 2013. Si cette directive cherche à renforcer l'effectivité du droit des gardés à vue, notamment pour l'accès à un avocat, le groupe Horizons et apparentés regrette que cette réforme substantielle soit menée dans le cadre d'un projet de loi de transposition. En effet, l'équilibre entre les deux principes constitutionnels que sont la recherche d'auteurs d'infractions pénales et le droit d'être assisté et défendu est subtil et les effets de bord, d'un côté comme de l'autre, peuvent être importants.

Ainsi, nous soutenons les précisions apportées par les sénateurs, notamment sur le maintien de certaines possibilités de procéder à l'audition de la personne gardée à vue sans délai dans des conditions très strictes d'autorisation par le procureur de la République, lorsqu'elle est indispensable, soit pour éviter une situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale, soit pour prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l'intégrité physique d'une personne.

Enfin, nous déplorons qu'ait été déclaré irrecevable notre amendement relatif aux suites que le Gouvernement entend donner aux remarques de la Commission européenne sur la loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne, texte adopté à l'unanimité par les deux chambres et promulgué en juillet dernier. Nous aurons l'occasion d'en reparler.

Pour l'ensemble de ces raisons et malgré cette dernière remarque, le groupe Horizons et apparentés votera en faveur du projet de loi.

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Le groupe Écologiste soutiendra ce texte très technique, sur lequel la marge de manœuvre du législateur est très réduite. Il n'est toutefois pas interdit de surtransposer, malgré les réserves de M. Schellenberger.

J'insiste sur une disposition très importante en matière de libertés publiques : l'article 28, qui prévoit de mettre enfin notre procédure pénale en conformité avec les exigences d'une directive de 2013 que nous avions mal transposée. Ladite directive reconnaît un droit pour le suspect ou la personne poursuivie de bénéficier de la présence d'un avocat lors de son audition. Or notre code de procédure pénale prévoit simplement un délai de carence de deux heures pendant lesquelles la personne ne peut être auditionnée en l'absence de son avocat, une disposition manifestement incompatible avec les exigences européennes. L'article 28 met fin à cette divergence et c'est heureux. Nous aurions pu aller plus loin en donnant à l'avocat accès au dossier dès le stade de la garde à vue – cela correspond aux standards européens. Notre amendement sur ce point a malheureusement été déclaré irrecevable. Il est quelque peu difficile de comprendre pourquoi et j'espère une explication sur ce point.

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Je m'attacherai essentiellement à cet article 28. On peut tout de même s'interroger sur l'opportunité d'examiner une réforme du régime de la garde à vue dans un texte aussi dense, technique et disparate. Nous sommes certes satisfaits de certaines avancées qui s'y trouvent, mais un tel choix n'est pas à la hauteur des enjeux. Il y a une certaine passivité fautive de la part du Gouvernement qui n'a pas transposé plus tôt et de manière plus fournie les dispositions sur la garde à vue.

La mise en conformité de notre droit avec la directive C renforce indéniablement les droits et garanties procédurales de la personne gardée à vue. Le droit de communiquer avec un proche est étendu ; la personne pourra faire intervenir non seulement un membre de sa famille et son employeur, mais toute personne de son choix. C'est une disposition que nous avons défendue dans d'autres projets de loi.

Ensuite les dérogations à l'assistance immédiate d'un avocat sont restreintes. Cependant, la commission des lois du Sénat a introduit trois conditions dans lesquelles le procureur de la République peut, à la demande de l'officier de police judiciaire, et sur décision écrite et motivée, décider de faire procéder immédiatement à l'audition du gardé à vue ou à des confrontations, sans attendre son avocat. Or ces conditions sont suffisamment vagues pour autoriser l'audition immédiate dans de nombreuses situations. Ces exceptions créent un droit de carence dérogatoire qui ne nous semble pas conforme à la directive de 2013, laquelle prévoit la possibilité de déroger temporairement au droit d'accès à un avocat dans des conditions bien plus strictes que celles introduites par le Sénat.

Si la transposition dans notre droit de la directive de 2013 renforce indéniablement les droits de la défense, ces avancées doivent être prolongées, à défaut d'avoir été devancées.

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Comme à chaque projet de loi visant à adapter le droit européen, nous avons à examiner un texte fourre-tout qui cumule les adaptations techniques, dépourvues de lien entre elles, tout en en dissimulant des changements sensibles pour les citoyens et la coopération effective au sein de l'Union. Notre groupe aurait d'ailleurs préféré que ce texte soit renvoyé à une commission spéciale, comme au Sénat, en lieu et place du découpage opéré.

Nous constatons que le Gouvernement tient souvent le Parlement, mais également les acteurs des secteurs concernés à l'écart des rappels à l'ordre et des alertes de la Commission européenne. Le manque d'information, associé parfois à l'absence de consultation des intéressés lors des négociations, conduit à légiférer dans l'urgence, donc parfois à le faire mal.

Nous tenons à insister sur un point essentiel du texte, la réforme de la garde à vue. Les travaux du Sénat laissent entendre que le Gouvernement, alerté depuis deux ans, n'a pas agi. Sur le fond, l'évolution est utile puisqu'elle donne plus de droits à la personne gardée à vue. Nous sommes favorables à la version initiale, certaines dispositions ajoutées au Sénat étant dangereuses. La possibilité de commencer l'audition sans attendre l'avocat pour des raisons d'éloignement géographique créerait ainsi une rupture d'égalité territoriale entre justiciables et toucherait durement certaines zones rurales, outre-mer et insulaires. Enfin, nous nous interrogeons sur la capacité à mettre en œuvre ces modifications puisque ni les directions du ministère de l'intérieur, ni les forces de l'ordre, ni le Conseil national des barreaux n'ont été mis en mesure d'anticiper une telle réforme.

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Je ne voudrais pas paraître agressif, Monsieur Guitton, mais alors que vous clamez sans cesse que vous voulez, aux prochaines élections, être les représentants de la France au sein de l'Union européenne, vous contestez son fonctionnement et ses directives, qui pourtant améliorent souvent notre droit.

Elles ne l'améliorent pas s'agissant des conseils d'administration, parce que la France était pionnière en la matière. Mais justement, dans ce genre de cas, l'Union européenne nous suit : ainsi la loi Copé-Zimmermann, que nous connaissons depuis un certain temps, va-t-elle s'appliquer désormais presque partout en Europe, dans une version certes allégée. Nous veillerons à ce qu'elle ne soit pas détricotée, monsieur Schellenberger, je vous rassure. Vous avez raison, le droit français est parfois plus normatif que celui de l'Union européenne mais, le texte en est la preuve, nous sommes capables aussi d'impulser des évolutions.

Madame Karamanli, en ce qui concerne la garde à vue, nous avons vous et moi déposé des amendements identiques afin de revenir sur certaines modifications apportées par le Sénat. Quant à l'article 17, son examen relevait de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, dont le rapporteur a très bien travaillé. Enfin, s'agissant du « retard indu » de l'avocat, nous en débattrons tout à l'heure.

Monsieur Pradal, vous avez raison, il n'est pas question de détricoter le droit national, mais au contraire de l'améliorer quand il en a besoin. Je l'ai dit, la France est souvent en avance. L'objectif est de se garder de toute surtransposition, comme est parfois tenté de le faire le Sénat sur certains articles. Les débats actuels illustrent qu'elles ont des conséquences fâcheuses.

Je le rappelle, le texte ne propose pas une réforme de la garde à vue. Il vise à garantir les droits du prévenu en autorisant la présence de l'avocat à ses côtés dès la première heure et en mettant fin au délai de carence. La dernière réforme de la garde à vue date de 2011. Madame Faucillon, vous regrettez la réponse tardive de l'État mais sachez que l'avis motivé de la Commission européenne sur une mauvaise transposition de la directive date de septembre 2023 et que le projet de loi a été déposé en novembre 2023. Le Gouvernement a donc fait le nécessaire pour mettre notre législation en conformité avec le droit européen dès qu'il a été informé de l'avis de la Commission.

Je note que le texte ne suscite pas d'autres objections majeures. Vous avez raison, il est ultratechnique. Les modifications apportées n'ont pas un impact significatif dans notre droit national mais auront des conséquences sur la vie quotidienne de certains acteurs, dont les agents de police et de gendarmerie ainsi que les avocats. Nous connaissons les craintes que, dans certains territoires, les avocats ne soient pas disponibles assez rapidement à cause du manque d'effectifs et de l'éloignement des tribunaux. Nous serons attentifs à la réponse qui leur sera donnée.

Quant aux conseils d'administration, le débat porte davantage aujourd'hui sur la représentation des salariés en leur sein. Parmi toutes les personnes que nous avons auditionnées, aucune ne s'oppose à la réforme. Elles considèrent que le texte est moins contraignant que le droit national et qu'il pourra s'appliquer assez facilement.

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Nous commençons par trois articles qui ont été délégués à la commission des affaires économiques.

Titre Ier

Dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière

Chapitre I er Diverses dispositions relatives au droit de la consommation

Article 1er (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL20, CL17, CL18 et CL19 de la commission des affaires économiques.

Elle adopte l'article 1er modifié.

Article 2 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL16, CL15 et CL14 de la commission des affaires économiques.

Elle adopte l'article 2 modifié.

Article 3 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL13 et CL12 de la commission des affaires économiques.

Elle adopte l'article 3 modifié.

Chapitre II Diverses dispositions relatives au droit des sociétés

Article 4 (articles L. 225-124, L. 236-20, L. 236-21, L. 236-22, L. 236-28 à L. 236-31, L. 236-35, L. 236-36, L. 236-38, L. 236-40, L. 236-48, L. 236-50, L. 236-52 et L. 950-1 du code de commerce, et L. 2371-1 et L. 2372-1 du code du travail ) : Ratification de l'ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales et diverses améliorations de ce même régime

Amendements CL80, CL81, CL82, CL83, CL84, CL85 et CL86 de M. Ludovic Mendes

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Cet article et le suivant relèvent de notre commission. Les amendements que je vous propose ici sont purement rédactionnels.

La commission adopte successivement les amendements.

Elle adopte l'article 4 modifié.

Article 5 : Demande d'habilitation à prendre par ordonnance des mesures pour transposer la directive (UE) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes et pour harmoniser les différents dispositifs nationaux préexistants relatifs à la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes au sein des organes des sociétés commerciales

La commission adopte l'amendement rédactionnel CL87 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL88 de M. Ludovic Mendes

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Cet amendement propose une rédaction plus précise et plus correcte des dispositions introduites par le Sénat, sans en modifier le fond. Le Sénat a souhaité encadrer les modalités de transposition par ordonnance de la directive. L'amendement vise à inscrire dans le texte les obligations légales de représentation équilibrée des femmes et des hommes – soit un quota de 40 % dans les conseils d'administration – plutôt qu'un « objectif de parité ». Par ailleurs, l'amendement vise à inciter le Gouvernement à inclure les administrateurs représentant les salariés. En effet, il est assez difficile, lorsqu'on est à la tête d'un conseil d'administration, d'expliquer qu'il faut changer un représentant élu par les organisations syndicales au motif que l'on a besoin d'une femme ou d'un homme.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 5 modifié.

Chapitre III Diverses dispositions relatives au droit bancaire, monétaire et financier

Article 6 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL1, CL2 et CL3 de la commission des finances.

Elle adopte l'article 6 modifié.

Article 7 (examen délégué)

La commission adopte l'amendement CL4 de la commission des finances.

Elle adopte l'article 7 modifié.

Article 7 bis (examen délégué)

La commission adopte l'article 7 bis non modifié.

Après l'article 7 bis (examen délégué)

La commission adopte l'amendement CL5 de la commission des finances.

Article 8 (examen délégué)

La commission adopte l'amendement CL6 de la commission des finances.

Elle adopte l'article 8 modifié.

Chapitre IV Dispositions relatives à l'assistance internationale au recouvrement

Article 9 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL7, CL8 et CL9 de la commission des finances.

Elle adopte l'article 9 modifié.

Titre II

Dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de transition écologique

Chapitre I er Dispositions relatives aux batteries, à la collecte et à la valorisation des déchets

Article 10 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL24, CL25, CL26 et CL27 de la commission du développement durable.

Elle adopte l'article 10 modifié.

Article 11 (examen délégué)

La commission adopte l'amendement CL28 de la commission du développement durable.

Elle adopte l'article 11 modifié.

Article 12 (examen délégué)

La commission adopte l'article 12 non modifié.

Chapitre II Dispositions relatives au mécanisme d'ajustement carbone aux frontières

Article 13 (examen délégué)

La commission adopte l'amendement CL29 de la commission du développement durable.

Elle adopte l'article 13 modifié.

Chapitre III Dispositions relatives au système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effets de serre

Article 14 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL30, CL31, CL32, CL33, CL34, CL35, CL36, CL37, CL38, CL39, CL40, CL41 et CL42 de la commission du développement durable.

Elle adopte l'article 14 modifié.

Article 15 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL43, CL44, CL45, CL46, CL47, CL48, CL49 et CL50 de la commission du développement durable.

Elle adopte l'article 15 modifié.

Article 16 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL51, CL52, CL53, CL54, CL55, CL56, CL57 et CL58 de la commission du développement durable.

Elle adopte l'article 16 modifié.

Article 17 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL59, CL60 et CL61 de la commission du développement durable.

Elle adopte l'article 17 modifié.

Chapitre IV Dispositions en matière de droit de l'énergie

Article 18 (examen délégué)

La commission adopte l'article 18 non modifié.

Article 19 (examen délégué)

La commission adopte l'article 19 non modifié.

Chapitre V Dispositions relatives aux contrats de concessions aéroportuaires

Article 20 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL62 et CL63 de la commission du développement durable.

Elle adopte l'article 20 modifié.

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Les articles 21 à 30 relèvent de notre commission.

Titre III

Dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière répressive

Chapitre I er Diverses dispositions relatives à l'échange d'informations en matière répressive

Article 21 (Intitulé de la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale) : Modification de l'intitulé de la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale relative à l'échange simplifié d'informations entre services

La commission adopte l'article 21 non modifié.

Chapitre II Dispositions applicables aux demandes d'informations émises par les services français

Article 22 (art. 695-9-31 et art. 695-9-31-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Désignation des services ou unités pouvant saisir directement les points de contacts uniques des autres États membres et disposition relative à l'instauration d'un point de contact unique en France

Amendement CL73 du Gouvernement

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Cet amendement a trait aux échanges d'informations entre les services répressifs compétents et les services répressifs désignés. Il a pour objet d'en revenir à la rédaction initiale de l'article, à laquelle le Sénat avait apporté des modifications. Il apporte toutefois deux modifications. Premièrement, il prévoit que la désignation des services et des unités pouvant contacter directement les points de contact uniques des autres États membres est facultative. Cette évolution est conforme à l'article 4 de la directive du 10 mai 2023. Deuxièmement, la nouvelle rédaction précise que cette liste ne pourra être établie que par le point de contact unique, en l'occurrence le service central de coopération opérationnelle de police (Sccopol). Cette disposition correspond à une demande des services et me paraît cohérente. Pour l'ensemble de ces raisons, je donnerai un avis favorable à cet amendement

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 22 modifié.

Article 23 (art. 695-9-33 du code de procédure pénale) : Dispositions relatives aux demandes d'informations émises par les services français

Amendement CL74 du Gouvernement

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Cet amendement rétablit la rédaction initiale de l'article 23. En effet, la rédaction du Sénat soulève deux difficultés. D'une part, elle interdit les échanges directs entre les services répressifs compétents des États membres, ce qui n'est pas conforme à l'esprit de la directive. D'autre part, elle modifie les dispositions relatives aux motifs permettant de ne pas transmettre une copie de la demande d'information aux points de contact uniques. Ces ajouts pourraient réduire le champ du texte et constituer une sous-transposition de la directive. Avis favorable.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 23 modifié.

Chapitre III Dispositions applicables aux demandes d'informations reçues par les services français

Article 24 (art. 695-9-37 et art. 695-9-38 du code de procédure pénale) : Dispositions relatives aux transmissions d'informations sur demande ou spontanées émises par les services français

Amendement CL75 du Gouvernement

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Cet amendement vise à rétablir la rédaction initiale de l'article 24. En effet, le Sénat a inscrit dans la loi les délais de réponse aux demandes d'information reçues par les services répressifs français. Or il semble plus cohérent que ces délais demeurent fixés au niveau réglementaire, comme le prévoit le droit en vigueur.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 24 modifié.

Article 25 (art. 695-9-39 du code de procédure pénale) : Transmission, à un État membre, des informations détenues par les services et unités et leur ayant été préalablement transmises par un autre État membre

Amendement CL76 du Gouvernement

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C'est encore un rétablissement de la rédaction initiale de l'article, auquel je suis favorable.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 25 modifié.

Article 26 (art. 695-9-40, art. 695-9-41, art. 695-9-42, art. 695-9-43, art. 695-9-44, art. 695-9-45, art. 695-9-45-1 [nouveau], art. 695-9-46, et art. 695-9-47 du code de procédure pénale) : Dispositions relatives à l'intervention de l'autorité judiciaire en matière d'échanges d'informations, aux refus de communication des informations demandées et à l'utilisation des informations transmises

Amendement CL77 du Gouvernement

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Cet amendement tire les conséquences de l'adoption des amendements précédents, qui rétablissent la rédaction initiale du projet de loi. Favorable.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 26 modifié.

Chapitre IV Échanges d'informations numériques dans les affaires de terrorisme

Article 27 (article 695-8-2 du code de procédure pénale) : Adaptation du code de procédure pénale au règlement (UE) 2023/2131 du Parlement européen et du Conseil du 4 octobre 2023 relatif aux échanges d'informations numériques dans les affaires de terrorisme

Amendement CL89 de M. Ludovic Mendes

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Je vous propose de supprimer l'alinéa 3, ajouté par le Sénat, qui prévoit la désignation du parquet national antiterroriste comme correspondant national pour les questions de terrorisme auprès d'Eurojust. Le correspondant national est habituellement désigné par voie de circulaire.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 27 modifié.

Titre IV

Dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de droit pénal

Article 28 : Mise en conformité des dispositions du code de procédure pénale relatives au droit d'accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales avec la directive 2013/48/UE

Amendement CL79 de M. Jordan Guitton

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Cet amendement vise à supprimer les alinéas 3 à 6 afin de faciliter l'enquête lors de la garde à vue.

Le code de procédure pénale dispose que toute personne placée en garde à vue « peut, à sa demande, faire prévenir, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l'un de ses parents en ligne directe ou l'un de ses frères et sœurs de la mesure dont elle est l'objet ». Il prévoit également que la personne peut prévenir son employeur. Aux yeux de notre groupe, ces droits sont suffisants. Le projet de loi ajoute les mots : « ou toute autre personne qu'elle désigne », ce qui ne paraît pas utile et pourrait même se révéler dangereux, car le gardé à vue pourrait prévenir un coauteur ou un complice. Cela remettrait en cause une partie de la procédure et du secret de l'enquête. Par ailleurs, que l'Europe nous impose des règles sur ce sujet très sensible nous pose un problème de fond.

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Avis défavorable. Ce point est expressément visé par la Commission dans son avis motivé de septembre 2023, d'où l'insertion par le Gouvernement de cette disposition dans le projet de loi déposé en novembre.

La personne gardée à vue a peu intérêt à prévenir un complice puisqu'aux termes de l'article 63-2 du code de procédure pénale, le procureur de la République peut, à la demande de l'officier de police judiciaire (OPJ), décider que le tiers sera prévenu plus tard, ou pas du tout, « si cette décision est, au regard des circonstances, indispensable afin de permettre le recueil ou la conservation des preuves ou de prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l'intégrité physique d'une personne ». La Commission garantit la liberté de choix de la personne, qui peut décider ou non de la présence d'un avocat. Nous n'avons aucune marge de manœuvre.

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Nous avons ici un véritable problème. La Commission nous a dit que nous avions mal transposé la directive de 2013. La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) nous sanctionnerait immanquablement si nous ne réalisions pas une transposition exacte. S'il ne faut pas surtransposer, il faut surtout éviter de sous-transposer, sous peine de fragiliser nos procédures pénales. À titre d'exemple, la semaine dernière, la Cour de cassation a invalidé en totalité une procédure de réquisition de données de connexion par le procureur au motif que notre droit n'est pas conforme à celui de l'Union. Tenons-nous-en au texte initial, qui évite la surtransposition.

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La transposition remet en cause une partie importante de notre procédure pénale. Cette question ne devrait pas être débattue à l'occasion d'un texte d'adaptation de notre droit à celui de l'Union européenne, mais d'un véritable projet de loi, en présence du garde des sceaux. La procédure suivie relègue le Parlement au rang d'une chambre d'enregistrement du droit de l'Union européenne. J'entends que nous pourrions encourir des sanctions, mais la question est de savoir si nous sommes encore un État souverain dans le domaine du droit pénal ! Ces alinéas sont inutiles. Ils pourraient mettre en danger le travail des professionnels du droit et des forces de l'ordre.

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Cet amendement constituerait clairement une sous-transposition. Or c'est parce que la directive avait déjà été sous-transposée que nous y revenons. En réalité, Monsieur Guitton, ce que vous remettez en cause, c'est l'Union européenne. J'ai du mal à comprendre votre position : si nous ne devons pas transposer les dispositions européennes dans cette matière, proposez-vous que la France sorte de l'Union ?

Par ailleurs, j'aimerais avoir une explication sur l'irrecevabilité qui a été opposée à d'autres amendements portant sur cet article.

La commission rejette l'amendement.

La commission adopte l'amendement de coordination CL90 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL72 de Mme Marietta Karamanli

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Cet amendement vise à ce que, dès son interpellation – soit avant même le début de la garde à vue – une personne puisse demander à être assistée par un avocat. C'est une demande que nous formulons de longue date.

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Le projet de loi prévoit que, si la personne a choisi de se faire assister par un avocat, elle ne peut être entendue sur les faits sans la présence de ce dernier. Le texte renforce donc les droits de la défense et de la personne gardée à vue. Aucune des personnes que nous avons auditionnées, pas même le Conseil national des barreaux, ne demande la mesure que vous proposez. Demande de retrait ou défavorable.

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Dès qu'une personne est interpellée et que l'OPJ l'informe de son placement en garde à vue, celle-ci commence. La personne peut appeler son avocat sans délai et si elle se voit imposer un délai excessif, elle peut intenter un recours. Je ne comprends donc pas bien le sens de cet amendement. Le point de départ de la garde à vue est la déclaration de l'OPJ, non le fait d'entrer dans un commissariat.

La commission rejette l'amendement.

La commission adopte l'amendement rédactionnel CL91 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL92 de M. Ludovic Mendes

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Cet amendement vise à supprimer la seconde phrase de l'alinéa 10, introduite par le Sénat, selon laquelle l'avocat désigné « accomplit les diligences requises pour se présenter sans retard indu ». Cette obligation est formulée dans des termes imprécis et n'est pas assortie de sanction, ce qui la prive d'effets juridiques concrets. En outre, la mention d'une obligation de diligence de l'avocat relève davantage de la déontologie que du code de procédure pénale, comme cela a été évoqué en séance au Sénat.

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J'approuve cet amendement mais je rappelle que les droits de la défense doivent être conciliés avec le principe d'efficacité de l'enquête. Le Sénat a accompli un bon travail, y compris en transposant des exceptions définies notamment à l'article 3, paragraphe 6, de la directive. Il nous faut transposer cette dernière intégralement, mais en tirant parti des possibilités qu'elle offre.

Le projet de loi réécrit le code de procédure pénale, ce qui est un peu regrettable. Notre procédure, traditionnellement inquisitoire, a emprunté certains traits à la forme accusatoire et devient aujourd'hui sans conteste une procédure contradictoire. Bien que ce modèle n'existe pas en tant que tel dans notre droit pénal, il faut tirer les conséquences de cette évolution.

Je nourris quelques inquiétudes, à titre personnel, quant aux conséquences de ce genre de texte, qui devrait entraîner une diminution sensible du nombre de gardes à vue, du taux d'élucidation des procédures pénales et des mesures alternatives. Ces dernières sont souvent décidées une fois que la personne a admis la réalité des faits : elles sont appliquées dans 40 % des affaires pénales, ce qui simplifie d'autant le travail de la justice. Alors transposons, oui, mais en étant conscients que nous ajoutons de la complexité au travail des forces de sécurité, ce qui créera sans aucun doute des difficultés.

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Je partage ce point de vue, mais il nous revient de transposer le plus justement possible la directive en laissant la CJUE interpréter certaines de ses dispositions. La transposition proposée par le Sénat entraînerait une forte incertitude juridique. Pour préserver notre enquête pénale, il convient d'adapter le plus finement possible notre droit tout en évitant la surtransposition. J'en reviens à cette procédure de réquisition de données de connexion qui a été cassée : songez au nombre d'enquêteurs dont le travail a été mis par terre ! Par ailleurs, la CJUE devra se prononcer sur certains points de la directive : dès que les choses seront clarifiées, nous pourrons les incorporer à notre droit.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CL93 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL22 de M. Emeric Salmon

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L'article 28 prive l'OPJ de la possibilité de commencer l'audition deux heures après le début de la garde à vue en cas d'absence de l'avocat. Nous souhaitons que le délai de vingt-quatre heures qui constitue la durée maximale de la garde à vue soit suspendu jusqu'à l'arrivée de l'avocat afin de préserver le temps d'enquête.

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Avis défavorable. Prolonger automatiquement la garde à vue d'une durée indéterminée, liée au retard de l'avocat, plongerait la personne concernée dans une incertitude problématique quant à la durée maximale de sa privation de liberté. Cela ne correspond pas à l'esprit de la directive. En outre, il pourrait en résulter une rupture d'égalité selon la disponibilité des avocats dans les différents barreaux. Enfin, la durée maximale de la garde à vue doit s'apprécier à compter du début de la privation de liberté ; on ne saurait prendre pour point de départ la survenance d'un aléa extérieur.

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Il pourrait y avoir, dans certains cas, des effets de bord liés à l'absence ou au retard de l'avocat. Des avocats pourraient jouer sur la procédure, ce qui réduirait la durée de l'audition et, partant, le temps d'enquête du policier.

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En le formulant ainsi, vous jetez le soupçon sur les avocats.

L'article ne remet pas en question le système de la garde à vue. Ni les policiers, ni les gendarmes, ni les représentants de la douane judiciaire n'ont fait de remontées à ce sujet. Cette disposition ne leur pose pas de problème parce que la manière de conduire les enquêtes a évolué : dans les grandes affaires, l'enquête fait toute la différence et la garde à vue sert surtout à obtenir des aveux ou le nom de complices. La directive offre la possibilité de mener l'audition en l'absence de l'avocat. Le dispositif en l'état garantit les droits de la défense, mais aussi la possibilité pour la police, la gendarmerie et la douane de faire leur travail. Et je ne reviens pas sur la rupture d'égalité qu'impliquerait votre proposition.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL70 de Mme Marietta Karamanli

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Cet amendement vise à ce que l'audition ou la confrontation ne puisse pas avoir lieu avant l'arrivée de l'avocat, afin d'assurer le respect des droits de la défense dès le début de la procédure.

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Votre demande est satisfaite puisque le texte prévoit que la personne gardée à vue « ne peut être entendue sur les faits sans la présence de l'avocat choisi ou commis d'office, sauf renonciation expresse de sa part ». Demande de retrait.

L'amendement est retiré.

La commission adopte l'amendement rédactionnel CL94 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL95 de M. Ludovic Mendes

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Il s'agit de rétablir la possibilité pour l'avocat de consulter les procès-verbaux d'audition lorsque l'audition s'est déroulée en sa présence. Le Sénat a supprimé par erreur ce droit.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CL96 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL97 de M. Ludovic Mendes

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Cet amendement prévoit l'inscription de la renonciation de la personne gardée à vue à la présence de son avocat dans le procès-verbal d'audition et non dans le procès-verbal récapitulatif. Cette solution est plus opérationnelle, notamment si la personne revient sur la renonciation après l'audition. Si l'avocat arrive alors que l'audition est toujours en cours, il pourra prendre connaissance de la renonciation sur le procès-verbal d'audition et n'aura pas à attendre la fin de la procédure de garde à vue. C'est une mesure de bon sens.

La commission adopte l'amendement.

Amendements CL67 de Mme Elsa Faucillon, CL65 et CL66 de Mme Andrée Taurinya, et amendements identiques CL98 de M. Ludovic Mendes et CL71 de Mme Marietta Karamanli (discussion commune)

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Par l'amendement CL67, nous proposons de rétablir la version initiale de l'article 28 et, ce faisant, de supprimer le dispositif de carence qui permet à l'OPJ de commencer l'interrogatoire sans la présence de l'avocat une fois le délai de deux heures expiré. Conformément à la directive de 2013, nous souhaitons garantir l'assistance d'un avocat dans le cadre de la procédure pénale. L'assistance d'un avocat dès qu'une personne gardée à vue en fait la demande, et la présence de ce dernier au cours de l'ensemble des auditions et des confrontations, est une garantie essentielle du droit à un procès équitable.

Si nous adoptions cet amendement, il ne serait plus possible d'auditionner le gardé à vue sans son avocat, à moins que l'intéressé renonce à son droit ou que la procédure relève du régime dérogatoire de la criminalité organisée. Comme le rapporteur de la commission des lois du Sénat l'a rappelé, la Commission européenne a estimé que les dispositions relatives à la carence constituaient une transposition incorrecte de la directive. Toutefois, la Commission n'a pas pour autant exclu la possibilité d'une audition immédiate du gardé à vue. Or le droit de carence dérogatoire introduit par le Sénat ne nous semble pas conforme à la directive. En effet, celle-ci ne tolère de dérogations que dans des circonstances exceptionnelles et de façon temporaire. L'alinéa 21 ne mentionne pas ces conditions, qui figurent expressément aux points 5 et 6 de l'article 3 de la directive.

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Les amendements CL65 et CL66 veulent également en revenir à la rédaction initiale de l'article. Dans le texte transmis par le Sénat, la notion d'urgence – qui n'était pas, il est vrai, sans poser problème – a disparu. Par ailleurs, le texte prévoit la possibilité de recourir à une audition immédiate afin « d'éviter une situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale ». Cette formulation est beaucoup trop vague et ne permet pas de s'assurer du bien-fondé d'une procédure qui remet en cause substantiellement le droit à être défendu et, par voie de conséquence, à bénéficier d'un procès équitable. Il faut insister sur le fait que la garde à vue n'est pas neutre, puisqu'elle entraîne une privation de liberté. Elle doit être instruite avec tout le sérieux et la rigueur nécessaires afin de permettre la manifestation de la vérité, objectif qui doit être concilié avec le respect du droit de la défense. Pour ces raisons, l'amendement CL65 vise à supprimer l'alinéa 19.

L'amendement CL66 vise, d'une part, à supprimer les mots « soit pour éviter une situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale », à la première phrase de l'alinéa 21, et d'autre part à supprimer le critère de l'éloignement géographique, qui est par nature subjectif et ne saurait justifier la privation du droit à être assisté d'un avocat – à moins de considérer que celui-ci ne sert à rien : je laisse le Gouvernement et ceux qui le représentent ici s'en expliquer avec les membres de cette profession.

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Par l'amendement CL98, je vous propose de supprimer la possibilité, introduite par le Sénat, de recourir à la nouvelle audition immédiate en dérogation au droit à la présence de l'avocat, au motif de l'éloignement géographique du lieu où se déroule la garde à vue. En effet, ce motif est strictement encadré par la directive, qui évoque deux cas de figure – la présence du suspect outre-mer et la conduite d'une opération militaire extérieure – alors que le Sénat, pour sa part, en fait un motif général sans restriction.

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L'éloignement géographique ne saurait en effet être un motif suffisant pour différer l'application des droits de la défense. Cela ne peut faire partie des exceptions admissibles.

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Je propose à Mme Faucillon et à Mme Martin de retirer leurs amendements, car leur adoption entraînerait un déséquilibre. À défaut, j'y serais défavorable. La rédaction que Mme Karamanli et moi-même proposons assurerait la conformité de notre droit à la directive et prémunirait la France contre une condamnation.

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Il faut là encore se garder de surtransposer comme de sous-transposer. Les termes de la directive en la matière sont très précis, il faut les reprendre exactement. À défaut, nous risquerions d'être condamnés par la CJUE. Il convient donc de voter les amendements de Mme Karamanli et du rapporteur.

La commission rejette successivement les amendements CL67, CL65 et CL66.

Elle adopte les amendements identiques.

La commission adopte l'article 28 modifié.

Article 29 (art. 695-43 et 695-45 du code de procédure pénale) : Mise en conformité du droit français avec la décision-cadre du Conseil 2002/584/JAI du 13 juin 2002 relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres

La commission adopte l'article 29 non modifié.

Article 30 (art. 804 du code de procédure pénale) : Application outre-mer et entrée en vigueur différée des dispositions relatives à la garde à vue

La commission adopte l'article 30 non modifié.

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L'article 31 a été délégué à la commission du développement durable.

Titre V

Dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière sociale et de droit de la santé

Article 31 (examen délégué)

La commission adopte l'amendement CL64 de la commission du développement durable.

Elle adopte l'article 31 modifié.

Article 32 (art. L. 515-8, art. L. 631-9, art. L. 632-2, art. L. 633-2 et art. L. 634-4 du code général de la fonction publique) : Maintien pour les fonctionnaires de droits acquis avant le début de certains congés

La commission adopte l'article 32 non modifié.

Titre VI

Dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de politique agricole

Article 33 (examen délégué)

La commission adopte l'article 33 non modifié.

Après l'article 33 (examen délégué)

La commission adopte l'amendement CL21 de la commission des affaires économiques.

Article 34 (examen délégué)

La commission adopte l'article 34 non modifié.

La commission adopte l'ensemble du projet de loi modifié.

Présidence de Mme Caroline Abadie, vice-présidente.

Puis, la Commission examine la proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France (n° 2150) (M. Sacha Houlié, rapporteur),

Lien vidéo : https://assnat.fr/bELwMr

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Cette proposition de loi sera examinée en séance le 25 mars, pendant la semaine de l'Assemblée nationale. Elle a été déposée par trois des membres de la délégation parlementaire au renseignement (DPR) – vous-même, monsieur le président, Thomas Gassilloud et Constance Le Grip.

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Cette proposition de loi est le fruit d'un long travail, mené au sein de la délégation parlementaire au renseignement, dont j'ai assuré la présidence au cours de la session 2022-2023. La délégation, composée de quatre députés et de quatre sénateurs, offre la possibilité de travailler sur des thématiques choisies par son président. Sur le sujet des ingérences étrangères, nous avons ainsi formulé vingt-deux propositions. Certaines, qui vous sont soumises ce matin, relèvent du champ législatif, d'autres du champ réglementaire, d'autres enfin de l'organisation des services.

Notre rapport a reçu un très bon accueil, comme pourraient le confirmer Thomas Gassilloud, le président de la commission de la défense, et Constance Le Grip, par ailleurs rapporteure d'une commission d'enquête sur les ingérences étrangères, excellente malgré son contexte polémique. Il est rare que les parlementaires soient à l'initiative de textes sur un tel sujet. Si les pôles ministériels sont très forts en cette matière – Tracfin et la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières à Bercy, la DGSE (direction générale de la sécurité extérieure) au ministère des armées et la DGSI (direction générale de la sécurité intérieure) au ministère de l'intérieur –, nous nous sommes pleinement saisis de nos compétences pour assurer une forme d'interministérialité.

Qu'il s'agisse du rapport de la commission d'enquête rédigé par Constance Le Grip ou de celui de la DPR, nous disposons d'une littérature assez fournie qui justifie la proposition de loi. Les ingérences étrangères sont une menace actuelle, réelle et immédiate. Nul besoin de remonter loin, la cyberattaque menée par un groupe de hackeurs pro-russes dont ont été victimes, il y a quelques jours, les services de plusieurs ministères montre toute son acuité. Dans les derniers mois, les exemples ne manquent pas : je pense à l'amplification de la polémique sur les punaises de lit, à la reproduction d'étoiles de David dans les rues de Paris et en Île-de-France à la fin du mois d'octobre, ou encore aux activités du réseau « Portal Kombat », identifié par l'agence Viginum, qui rassemble 193 sites participant d'un vaste mouvement de manipulation de l'information. Ce sont des exemples éloquents du nombre et de la qualité des auteurs de ces attaques.

Nous sommes frappés en France métropolitaine mais aussi outre-mer, et nos intérêts sont également attaqués à l'étranger, notamment en Afrique. Bien sûr, la France n'est pas la seule concernée : l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Espagne sont aussi victimes de telles attaques. Ce sont en réalité toutes les démocraties occidentales qui sont directement visées dans cette guerre informationnelle particulièrement agressive. Les institutions européennes ont fait l'objet de pressions, devenues quotidiennes. Pensons au Qatargate au Parlement européen ou à la députée lettonne accusée de collusion avec le FSB.

Si les ingérences étrangères ont toujours existé, elles ont particulièrement évolué ces dernières années, du fait de l'affrontement entre régimes autoritaires et démocraties libérales et des nouveaux outils que leur offre la révolution numérique et technologique.

La notion d'ingérence renvoie à tout action réalisée pour le compte d'une puissance étrangère, directement ou indirectement, et qui vise à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de nos nations. Leur forme s'est diversifiée. Traditionnellement, il s'agissait d'approcher des élites politiques et administratives et de procéder à de l'espionnage économique. Aujourd'hui, nous assistons à des cyberattaques et à des campagnes de désinformation, qui portent la signature de leurs auteurs, qu'il s'agisse de la Russie, de la Chine, de la Turquie ou de l'Iran, comme l'ont montré les rapports de la commission d'enquête et de la DPR.

La Russie, par exemple, essaie d'attirer dans sa sphère d'influence des dirigeants européens, actuels ou anciens, en leur offrant de participer aux conseils d'administration de grands groupes. Elle procède à des opérations de manipulation de l'information de grande ampleur et tente d'intervenir dans les processus électoraux.

La Chine, de son côté, a plutôt recours à la stratégie dite du « front uni », qui utilise différents leviers d'action : le recours aux diasporas, les médias, l'économie, les universités et le monde de la recherche ou encore la sphère culturelle autour des instituts Confucius.

La Turquie promeut ses intérêts par le biais de quatre leviers : l'enseignement de la langue et de la culture, la pratique religieuse, l'entrisme politique, grâce à la participation aux élections locales et nationales, et la présence active sur les réseaux sociaux.

Enfin, la stratégie des otages pratiquée par l'Iran est particulièrement agressive.

L'État a évidemment réagi. La loi de programmation militaire 2024-2030 a fait du renforcement des capacités techniques un objectif stratégique. La gouvernance du renseignement a évolué et des outils ont été créés, comme l'agence Viginum, en 2021, pour protéger le débat public numérique contre les campagnes de manipulation de l'information, ou l'Anssi (Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information), chargée de lutter contre les cyberattaques.

La commission des lois a beaucoup débattu ces derniers temps de la création de nouvelles sanctions pénales, mais ce ne sont pas des délits qu'ajoute cette proposition de loi : elle crée quatre outils, qui se développent autour de trois axes.

Le premier axe vise à sensibiliser les parlementaires et l'opinion publique, grâce à l'organisation d'un débat régulier au Parlement sur l'état des menaces qui pèsent sur la sécurité nationale. Le débat se fonderait sur un rapport remis par le Gouvernement. Je vous proposerai qu'il soit remis tous les deux ans, et non tous les ans comme nous l'avions imaginé initialement, car la menace évolue certes très rapidement, mais pas suffisamment pour nécessiter un débat annuel.

Le deuxième axe concerne le contrôle de l'influence, avec la création d'un répertoire des représentants d'intérêts agissant pour le compte d'un mandant étranger. Il s'inspire directement du Foreign Agent Registration Act (FARA) américain. Il s'agit de faire toute la transparence sur l'influence, qui, dans de nombreuses situations, constitue le préalable de l'ingérence. La frontière est assez poreuse entre ces deux notions : l'influence ne tend pas toujours à la déstabilisation, mais elle y participe. C'est pourquoi nous avons besoin de mieux connaître les personnes qui s'y livrent, qui devront désormais se déclarer. Ce répertoire s'inspire aussi de ce qui avait été fait dans la loi Sapin 2 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. Je vous proposerai d'enrichir le dispositif, notamment pour définir les personnes qui en relèvent et celles qui n'en relèvent pas, comme les diplomates, les avocats ou les sociétés de presse : c'est l'objet de mon amendement CL39 rectifié.

Il y aura donc deux registres, exclusifs l'un de l'autre : l'un de lobbying domestique, prévu par la loi « Sapin 2 », Mme Untermaier et M. Le Gendre ont récemment proposé des pistes d'amélioration – et l'autre, nouveau, spécifique aux actions d'influence menées pour le compte d'une puissance étrangère.

La volonté qui préside à la création de ce nouvel outil peut paraître naïve. Pourquoi ces personnes auraient-elles intérêt à se déclarer ? Parce que, si elles ne le font pas, des sanctions pénales s'appliqueront. Le dispositif initial prévoit des peines deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. Nous vous proposerons de le porter à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. Dans le cas de ressortissants étrangers, des mesures d'interdiction du territoire français, voire d'expulsion pourront être appliquées, sachant que nous pratiquons déjà, pour les pays avec lesquels nous entretenons des relations particulièrement difficiles, une parité diplomatique qui nous amène à éconduire toute une partie de leurs diplomates et à limiter les ingérences.

Le troisième axe vise à renforcer les outils dont disposent les services de renseignement pour contrer les ingérences.

L'article 3 ouvre ainsi la possibilité d'utiliser des algorithmes sur les données de connexion pour détecter des ingérences. Cette technique existe déjà en matière de terrorisme mais, compte tenu des modes d'action très diversifiés des terroristes, sa performance est assez limitée. Par ailleurs, comme la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement nous l'a confirmé, nous n'utilisons pas encore d'algorithmes sur les URL, bien que cela ait été permis par la loi de 2021.

La technique de l'algorithme, qui ne peut être mise en œuvre actuellement que dans le but de prévenir le terrorisme, pourra désormais l'être aussi pour défendre et promouvoir l'indépendance nationale, l'intégrité du territoire et la défense nationale – c'est ce qu'on appelle la finalité n° 1 du renseignement – ainsi que les intérêts majeurs de la politique étrangère, l'exécution des engagements européens et internationaux de la France et la prévention de toute forme d'ingérence étrangère – c'est la finalité n° 2. Dans ce cadre, la technique de l'algorithme ne pourra être employée que pour rechercher spécifiquement les ingérences étrangères.

Les services considèrent que cette nouvelle possibilité leur serait utile : le traitement algorithmique permettra aux services d'identifier plus facilement les agents étrangersEn effet, les services étrangers disposent, tout comme nous, de protocoles standardisés, : les agents chinois, par exemple, peuvent avoir pour habitude de faire plusieurs réservations d'hôtels, de billets de train ou d'avion, et de les annuler avant d'arriver dans le pays.

L'article 4 modifie le code monétaire et financier pour élargir aux ingérences étrangères le périmètre de la procédure des gels d'avoirs, aujourd'hui réservée à la lutte contre le terrorisme. Nous proposerons une définition légèrement révisée, à la suite de nos consultations.

Voilà la boîte à outils que nous voulons constituer pour mobiliser l'opinion, lutter contre les influences et entraver les ingérences.

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Chers collègues, merci de m'accueillir dans votre prestigieuse commission des lois pour traiter d'un sujet qui m'est cher.

Plusieurs travaux parlementaires récents, de la commission d'enquête sur les ingérences étrangères, de la DPR et de notre collègue sénateur André Gattolin dans la mission d'information sur les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français et leurs incidences, ont abondamment documenté la réalité et la dangerosité des ingérences à l'œuvre dans notre pays. Toutes ces réflexions, menées également dans d'autres parlements nationaux et au Parlement européen, accompagnées par des travaux d'experts, d'universitaires, de think tanks, de chercheurs et de journalistes, insistent sur l'intensification de ces actes hostiles, malveillants et trompeurs d'immixtion d'un État étranger ou d'une entité étrangère dans nos affaires intérieures.

Ces ingérences prennent toute une série de formes : classiques comme l'espionnage et le pillage du patrimoine intellectuel ou technologique ; plus modernes grâce aux nouvelles technologies ; et composites. Nos autorités ont clairement identifié cette guerre hybride comme une menace très forte pesant sur notre indépendance, notre souveraineté et nos intérêts. Il est important d'identifier et de combattre l'ensemble de ces marques protéiformes d'ingérence, qui vont des cyberattaques aux atteintes au patrimoine scientifique en passant par l'utilisation du droit comme arme, la captation des élites ou les manipulations et autres désinformations, sans oublier cette zone grise qui se caractérise par la proximité, la complaisance, la connivence voire l'allégeance de certains à tel ou tel régime étranger.

C'est ainsi que nous proposons, dans ce texte que j'ai eu l'honneur de contribuer à écrire, des dispositions très précises que le groupe Renaissance accueille avec beaucoup d'intérêt et une bienveillante attention. Le maître-mot est de reprendre le contrôle. Le nouveau registre où devront s'inscrire les représentants d'intérêts travaillant pour un mandat étranger, comme l'ont fait les États-Unis, le Royaume-Uni ou l'Australie, vise à apporter de la transparence et de l'information sur celles et ceux qui se livrent à des activités d'influence. Le rapport que nous demandons au Gouvernement fera transparaître de manière plus claire et plus objective la réalité des menaces.

Le groupe Renaissance votera cette proposition de loi. Nous regarderons en détail la réécriture de certains articles, mais nous pensons qu'il y a là une œuvre très utile pour augmenter le niveau de protection et d'entrave que nous devons opposer aux ingérences étrangères.

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Je ne m'attarderai pas sur la manière dont nous travaillons dans cette commission, parfaitement inadaptée à la complexité des sujets et à l'enjeu démocratique. Sachez juste que nous ne sommes pas du tout satisfaits.

Cette proposition de loi, qui ne s'appuie pas sur un avis du Conseil d'État, fait l'objet d'une procédure accélérée et ne pourra pas, pour des raisons temporelles, prendre en compte les conclusions du rapport sur le recours aux algorithmes dans le cadre de la prévention des actes de terrorisme.

Avec ce texte, nous sommes en présence d'un objet bien étrange, d'un florilège de notions floues et indéfinies. Ce qui est tout à fait clair, c'est qu'il offre, une nouvelle fois, la possibilité de recourir à la collecte et au traitement de masse des données, qui fait courir des risques évidents à nos droits et à nos libertés fondamentales.

La définition de l'ingérence étrangère, qui est vieille comme le monde, ou en tout cas comme les États, est introuvable. Aucun des amendements qui ont été déposés n'en propose une précise. Les notions d'influence et d'ingérence se superposent. C'est pourtant bien le mot « influence », et non « ingérence », qui est adopté dans les textes de loi étrangers, même dans le FARA américain. L'ingérence, elle, est un concept anxiogène, évoquant une menace étrangère clandestine et la violation de la souveraineté de notre pays. Le choix de ce terme va dans le sens du vocabulaire militariste du Président de la République, lui qui parle de « réarmement démographique ».

C'est à se demander si la proposition de loi ne cherche pas à mettre en avant une notion anxiogène afin de justifier politiquement des mesures liberticides. Dans un État de droit, on ne peut pas contrôler un phénomène, on ne peut pas légiférer sur quelque chose qui n'est pas défini par la loi. Les représentants d'intérêts agissant pour le compte d'un mandant étranger ne sont pas plus définis. Ce sont les ONG, les syndicalistes, les agents de consulat et d'ambassade ou les journalistes qui ne relèvent pas de la définition des entreprises éditrices qui sont visés. Tout ce petit monde serait volontairement soumis à un fichage. Nous nous opposons, par principe, à l'extension d'une surveillance de masse.

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La proposition de loi vise à renforcer la protection de la souveraineté nationale contre les ingérences étrangères, lesquelles peuvent prendre diverses formes et menacer nos intérêts politiques, militaires, économiques, scientifiques, culturels mais aussi, bien sûr, démocratiques. Ce texte est issu des travaux de la commission d'enquête sur les ingérences étrangères et reprend une partie des recommandations de la délégation parlementaire au renseignement pour proposer une série de mesures législatives afin de prévenir et de contrer ces ingérences.

L'article 1er crée un registre obligatoire des acteurs influant sur la vie politique française pour le compte d'une puissance étrangère. Géré par la HATVP (Haute Autorité pour la transparence de la vie publique), ce registre vise à mieux informer les responsables publics sur leurs interlocuteurs étrangers. Des sanctions pénales sont prévues en cas de non-respect de l'obligation de déclaration. Il sera cependant nécessaire d'augmenter les moyens mis à disposition de la HATVP pour qu'elle soit en mesure de mener à bien sa mission.

L'article 2 dispose que le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport sur les menaces dues aux ingérences étrangères pesant sur la sécurité nationale. Pour que ce rapport ait une utilité, il devra toutefois être débattu notamment au sein de la DPR et des commissions compétentes – de la défense et des lois.

L'article 3 élargit les finalités permettant aux services de renseignement d'utiliser la technique de l'algorithme. Actuellement limitée à la prévention du terrorisme, cette technique pourra désormais être utilisée pour contrer les ingérences étrangères. Elle permet, de façon réglementée, d'utiliser des processus automatisés pour repérer des activités en ligne pouvant indiquer une menace potentielle. Le groupe LR restera vigilant quant à cette technique de surveillance, bien qu'elle semble nécessaire pour faire face aux méthodes utilisées par certaines puissances étrangères, qui n'ont pas toujours les mêmes scrupules que nos démocraties.

L'article 4 élargit la procédure des gels d'avoirs, actuellement limitée à la lutte contre le terrorisme, pour inclure les ingérences étrangères. Cela permettra de geler les avoirs de toute personne ou entité se livrant à des actions nuisibles aux intérêts fondamentaux de la nation en lien avec une puissance étrangère. C'est évidemment une bonne mesure.

Ces propositions visent à poser des limites à des ingérences étrangères omniprésentes et protéiformes et à nous départir d'une certaine naïveté à l'égard de puissances comme la Russie, la Chine, ou l'Azerbaïdjan que l'on ne cite pas assez. Toutefois, malgré la richesse des travaux existant sur le sujet, les réponses semblent trop timides pour inverser une tendance déjà largement amorcée. Il est à craindre que cette proposition de loi ne soit qu'un moyen de la majorité présidentielle pour régler ses comptes politiques avec le Rassemblement national en vue des élections européennes, sans faire la preuve d'une réelle volonté de trouver des réponses adaptées aux ingérences étrangères.

En effet, si cet enjeu vous semble aussi majeur qu'aux députés Les Républicains, il convient de dresser ensemble le bilan du Président de la République, qui ne cesse depuis dix ans d'encourager ou de laisser faire le démembrement de l'appareil industriel stratégique français au profit d'acteurs étrangers. En 2014, la vente de la branche énergie d'Alstom, rachetée par l'Américain General Electric (GE), a été autorisée et pilotée par Emmanuel Macron, alors ministre de l'économie. En 2022, ce même Emmanuel Macron, soudain converti au souverainisme, a annoncé dans son discours de Belfort le rachat par EDF à GE des turbines Arabelle, essentielles pour la relance d'un programme de construction de centrales nucléaires en France. Et en 2015, Emmanuel Macron a défendu le rachat d'Alcatel-Lucent par Nokia, en écartant toute « vision romantique » vis-à-vis des grandes entreprises françaises. Dernier exemple en date : le projet de cession des activités d'infogérance du groupe Atos au milliardaire tchèque Daniel Křetínský, qui n'a pas suscité de réactions politiques au sein de la majorité.

En somme, pour prévenir les ingérences étrangères, la France devrait d'abord protéger beaucoup plus fermement ses actifs stratégiques. Le groupe LR estime par ailleurs que les mesures proposées sont trop timides pour être pleinement efficaces, même si nous sommes conscients que certaines sont du domaine réglementaire. Mais la lutte contre les ingérences étrangères est un sujet majeur, nécessitant une approche globale et forte sur le long terme. C'est pourquoi le groupe LR soutiendra ce texte, malgré ses lacunes, car il permettra tout de même de régler une partie des problèmes.

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Nous poursuivrons l'examen de la proposition de loi cet après-midi.

Puis, la Commission examine, en application de l'article 88 du Règlement, les amendements à la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé (n° 2296) (M. Philippe Pradal, rapporteur).

Le tableau ci-après récapitule les décisions de la Commission :

ArticleAmendementAuteurGroupeSort
1er45Mme FIRMIN LE BODO AgnèsHorizons et apparentésAccepté
1er54M. MARTIN DidierRenaissanceAccepté
1er65Mme LUQUET AudeDémocrate (MoDem et Indépendants)Accepté
246Mme FIRMIN LE BODO AgnèsHorizons et apparentésAccepté
255M. MARTIN DidierRenaissanceAccepté
266Mme LUQUET AudeDémocrate (MoDem et Indépendants)Accepté
347Mme FIRMIN LE BODO AgnèsHorizons et apparentésAccepté
356M. MARTIN DidierRenaissanceAccepté
367Mme LUQUET AudeDémocrate (MoDem et Indépendants)Accepté
368M. PRADAL PhilippeHorizons et apparentésAccepté
370M. HOULIÉ SachaRenaissanceAccepté
ap. 353Mme LUQUET AudeDémocrate (MoDem et Indépendants)Accepté

Tous les autres amendements qui n'ont pas été examinés lors de la réunion tenue en application de l'article 86 du Règlement ont été repoussés.

Puis, la Commission examine, en application de l'article 88 du Règlement, les amendements à la proposition de loi organique visant à renforcer l'ancrage territorial des parlementaires (n° 2076 rect.) (M. Henri Alfandari, rapporteur).

Le tableau ci-après récapitule les décisions de la Commission :

ArticleAmendementAuteurGroupeSort
unique79M. ROYER-PERREAUT LionelRenaissanceAccepté
unique42M. ALFANDARI HenriHorizons et apparentésAccepté
unique6M. VINCENDET AlexandreLes RépublicainsAccepté
unique92Mme MOUTCHOU NaïmaHorizons et apparentésAccepté

Tous les autres amendements qui n'ont pas été examinés lors de la réunion tenue en application de l'article 86 du Règlement ont été repoussés.

Puis, la Commission examine, en application de l'article 88 du Règlement, les amendements à la proposition de loi visant à valoriser la réserve communale de sécurité civile (n° 2301) (M. Didier Lemaire, rapporteur).

Le tableau ci-après récapitule les décisions de la Commission :

ArticleAmendementAuteurGroupeSort
1er5M. CHAUCHE FlorianLa France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et socialeRepoussé
1er1M. CHAUCHE FlorianLa France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et socialeRepoussé
ap. 1er9M. RANCOULE JulienRassemblement NationalRepoussé
ap. 1er15M. VUIBERT LionelRenaissanceRepoussé
214M. ZULESI Jean-MarcRenaissanceRepoussé
22M. CHAUCHE FlorianLa France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et socialeRepoussé
ap. 23M. CHAUCHE FlorianLa France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et socialeRepoussé
ap. 24M. CHAUCHE FlorianLa France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et socialeRepoussé
ap. 26M. RANCOULE JulienRassemblement NationalRepoussé
2 bis7M. LEMAIRE DidierHorizons et apparentésAccepté
4 bis8M. LEMAIRE DidierHorizons et apparentésAccepté
ap. 4 bis12M. ZULESI Jean-MarcRenaissanceAccepté
ap. 4 bis13M. ZULESI Jean-MarcRenaissanceRepoussé
ap. 4 bis10M. RANCOULE JulienRassemblement NationalRepoussé
ap. 4 bis11M. ZULESI Jean-MarcRenaissanceRepoussé

Enfin, la Commission examine, en application de l'article 91 du Règlement, des amendements du projet de loi organique, adopté par le Sénat, modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution (n°2300) (M. Sacha Houlié, rapporteur).

Le tableau ci-après récapitule les décisions de la Commission :

ArticleAmendementAuteurGroupeSort
1er9Mme TAURINYA AndréeLa France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et socialeRepoussé
1er13Gouvernement Accepté
22Mme BATHO DelphineÉcologiste - NUPESRepoussé
25M. JULIEN-LAFERRIÈRE HubertDéputés non inscritsRepoussé
27M. LESEUL GérardSocialistes et apparentésRepoussé
212Mme LAERNOES JulieÉcologiste - NUPESRepoussé
28M. LESEUL GérardSocialistes et apparentésRepoussé

La séance est levée à 13 heures.

Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné :

M. Jérémie Iordanoff, rapporteur sur la proposition de loi constitutionnelle pour un article 49 respectueux de la représentation nationale (n° 940) ;

Mme Lisa Belluco, rapporteure sur la proposition de loi portant dépénalisation de l'accès à la nature (n°1835).

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Caroline Abadie, M. Henri Alfandari, M. Erwan Balanant, M. Clément Beaune, Mme Lisa Belluco, Mme Pascale Bordes, M. Ian Boucard, M. Florent Boudié, M. Xavier Breton, Mme Blandine Brocard, M. Éric Ciotti, M. Hadrien Clouet, Mme Mathilde Desjonquères, Mme Elsa Faucillon, M. Yoann Gillet, Mme Claire Guichard, M. Jordan Guitton, M. Sacha Houlié, M. Jérémie Iordanoff, Mme Élodie Jacquier-Laforge, M. Mansour Kamardine, Mme Marietta Karamanli, M. Bastien Lachaud, M. Philippe Latombe, M. Gilles Le Gendre, Mme Constance Le Grip, M. Antoine Léaument, M. Didier Lemaire, Mme Brigitte Liso, Mme Marie-France Lorho, Mme Aude Luquet, Mme Élisa Martin, M. Thomas Ménagé, Mme Emmanuelle Ménard, M. Ludovic Mendes, Mme Laure Miller, M. Paul Molac, M. Didier Paris, M. Éric Pauget, Mme Anna Pic, M. Jean-Pierre Pont, M. Thomas Portes, M. Éric Poulliat, M. Philippe Pradal, M. Stéphane Rambaud, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Béatrice Roullaud, M. Lionel Royer-Perreaut, M. Thomas Rudigoz, M. Hervé Saulignac, M. Raphaël Schellenberger, M. Philippe Schreck, M. Bertrand Sorre, Mme Andrée Taurinya, Mme Cécile Untermaier, M. Guillaume Vuilletet, M. Jean-Luc Warsmann, Mme Caroline Yadan

Excusés. - M. Philippe Gosselin, Mme Emeline K/Bidi, Mme Naïma Moutchou, Mme Sabrina Sebaihi

Assistaient également à la réunion. - M. Damien Adam, Mme Ségolène Amiot, M. Emeric Salmon