Séance en hémicycle du jeudi 28 novembre 2019 à 9h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • dépollution des friches
  • foncier
  • foncière
  • friche
  • logement
  • observatoire
  • propriété
  • tendue

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures.

Suspension et reprise de la séance

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Le Gouvernement n'étant pas représenté, la séance est suspendue.

La séance, suspendue à neuf heures, est reprise à neuf heures cinq.

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La séance est reprise.

Avant de commencer nos débats, je tiens à rappeler au Gouvernement que le respect du Parlement implique d'être présent à l'ouverture des séances de l'Assemblée nationale, a fortiori lorsqu'il s'agit d'une séance réservée à l'ordre du jour fixé par les parlementaires, en l'espèce du groupe MODEM.

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L'ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 103 du Règlement, de la proposition de loi de M. Jean-Noël Barrot et plusieurs de ses collègues visant à lutter contre le mitage des espaces forestiers en Île-de-France (nos 2152, 2435).

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Ce texte n'ayant fait l'objet d'aucun amendement, je le mets aux voix en application de l'article 106 du règlement.

La proposition de loi est adoptée.

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L'ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 103 du règlement, de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à améliorer la lisibilité du droit par l'abrogation de lois obsolètes (nos 1765, 2431).

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Les amendements déposés n'ayant pas été défendus, je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi en application de l'article 106 du règlement.

La proposition de loi est adoptée.

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L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, selon la procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 103 du règlement, de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, visant à améliorer la trésorerie des associations (nos 2432, 2127).

Rappel au règlement

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La parole est à M. Dominique Potier, pour un rappel au règlement.

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Chers collègues, prenez ce rappel au règlement, fondé sur les articles 103 et suivants, comme une demande de précision sur l'esprit de notre délibération d'aujourd'hui.

Dans le cadre de la procédure d'examen simplifiée, les groupes parlementaires semblaient s'être entendus sur le principe selon lequel, après la discussion de la proposition de loi en commission, ils ne déposaient pas d'amendements en séance. Certes, l'usage auquel je fais référence n'est pas inscrit dans le règlement, mais les députés semblaient s'être accordés sur cette méthode permettant aux groupes minoritaires et d'opposition de voir leurs propositions de loi consensuelles adoptées, de gagner du temps – ô combien précieux – lors de la séance qui leur est réservée et de travailler en toute sérénité.

Aussi, je m'étonne – mais n'y voyez qu'une interrogation – que la rapporteure ait déposé, au mépris de ce principe, un amendement sur un texte qui a fait l'objet d'un large consensus lors de son examen en commission, la semaine dernière.

L'article 4 bis que l'amendement propose de supprimer vise à exclure du champ du droit de préemption les donations de biens immobiliers au profit des associations et des fondations. Cette disposition avait été introduite par des amendements identiques des groupes Socialistes et apparentés et Mouvement démocrate et apparentés.

Alors que l'article avait été supprimé par le Sénat, la commission, sur proposition de mon groupe, l'a rétabli de manière consensuelle, la rapporteure ayant émis un avis de sagesse.

Permettez-moi donc de m'étonner du dépôt de cet amendement contre lequel nous voterons.

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En application de l'article 107 du règlement, je n'appellerai que les amendements et l'article auquel ces amendements se rapportent.

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La parole est à Mme Sarah El Haïry, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour soutenir l'amendement de suppression no 7.

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Cela me permet d'apporter à M. Potier la précision qu'il demande.

L'amendement est destiné à garantir le vote conforme du texte au Sénat et, par conséquent, son entrée en vigueur immédiate pour répondre aux besoins des associations.

En commission, j'ai émis un avis de sagesse après avoir alerté sur le risque que cette disposition ne retarde l'adoption définitive de la proposition de loi.

Ce qui nous réunit aujourd'hui et qui suscite une telle unanimité, c'est la situation des associations et leur trésorerie. Le texte comporte de nombreuses avancées en faveur de ces dernières. L'article 4 bis pouvant être un élément de blocage, sa suppression vise à épargner au texte les limbes de la procédure.

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La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse pour donner l'avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal, secrétaire d'état auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Le Gouvernement avait soutenu, lors de la discussion en première lecture, les amendements qui avaient introduit l'interdiction pour les maires d'exercer le droit de préemption sur les donations de biens immobiliers au profit des fondations, congrégations et associations.

Mais j'ai entendu les arguments des sénateurs et des députés, et force est de constater que cette disposition n'a pas emporté une large adhésion. Il me semble donc raisonnable de nous en remettre à l'intelligence collective dans les territoires.

Je fais partie des membres du Gouvernement qui sont élus locaux – je siège dans un conseil municipal. J'accorde une totale confiance aux élus pour faire preuve de l'intelligence qui les caractérise. Puisque la mesure n'a pas convaincu, je suggère de nous en tenir au droit existant. Mon avis est donc favorable à l'amendement.

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Je remercie la rapporteure qui a eu la courtoisie de me répondre alors qu'elle n'était pas obligée de le faire. Ses arguments nous ont convaincus.

L'amendement no 7 est adopté et l'article 4 bis est supprimé.

La proposition de loi est adoptée.

Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.

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L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de MM. Jean-Luc Lagleize, Patrick Mignola et plusieurs de leurs collègues visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français (nos 2336, 2434).

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La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, rapporteur de la commission des affaires économiques.

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Il y a plus de quarante ans, Edgar Pisani publiait son ouvrage Utopie foncière. Dès sa publication, cet essai a été considéré comme révolutionnaire, car il démontrait qu'en France, la propriété telle qu'elle est décrite dans le code civil est le résultat d'un accident historique. Ministre de l'agriculture puis ministre de l'équipement et du logement sous la présidence du général de Gaulle, son auteur a montré que de nombreuses sociétés vivent et s'épanouissent avec une autre définition juridique et économique de l'appropriation du sol. Fruit de notre histoire issu du code napoléonien, la propriété était ainsi, pour la première fois, remise en cause au profit d'un rapport au sol plus collectif et universel.

Avec le recul, cet essai se révèle toujours d'actualité, puisqu'il aborde l'enjeu majeur que représente la maîtrise du foncier rural et urbain et, à travers lui, l'avenir de l'humanité et la fragilité des écosystèmes.

Quarante-deux ans plus tard, nous voici réunis à l'Assemblée pour débattre d'une proposition de loi visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français.

Quarante-deux ans ont passé, mais les problèmes demeurent et mettent à mal tant la vie quotidienne de nos concitoyens que la viabilité de nos villes et de nos territoires.

Quarante-deux années ont passé, nos villes ont grignoté du terrain, mais nos concitoyens font plus que jamais face à une situation douloureuse en matière de coût du foncier et du logement.

Le prix du foncier a augmenté de 71 % en dix ans, ce qui occasionne pour de nombreux Français des difficultés à se loger dignement et librement, notamment dans les zones tendues de notre pays.

Or, nous l'avons observé à l'occasion du mouvement des gilets jaunes, le coût du foncier grève in fine le pouvoir d'achat des Français et entrave leur qualité de vie. Selon l'INSEE, l'Institut national de la statistique et des études économiques, la part des dépenses contraintes dans le revenu des ménages est passée de 12 % en 1960 à près de 30 % en 2017, et c'est bien le logement et les dépenses qui y sont associées qui, en définitive, plombent leur pouvoir d'achat.

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Malgré l'accroissement continu de ces dépenses, les Français ne sont pas nécessairement mieux logés. Au contraire, ils sont souvent relégués à l'écart des zones tendues, ce qui entraîne de facto une hausse importante de leurs dépenses de transport.

Dans ce contexte critique, la présente proposition de loi, soutenue par le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, vise à réduire le coût du foncier pour redonner du souffle au budget des Français. Elle vise aussi à replacer les élus locaux au coeur de l'acte de construire la ville, en leur donnant de vrais outils pour mettre en oeuvre leur stratégie d'intervention foncière.

Ce texte résulte de la mission que m'a confiée le Premier ministre, que je remercie solennellement pour sa confiance. Mes remerciements s'adressent également à vous, monsieur le ministre chargé de la ville et du logement. C'est à vous que j'ai remis mon rapport, qui comporte cinquante propositions.

Avant de vous présenter dans le détail les travaux de la commission des affaires économiques sur les articles de la proposition de loi, je tiens à remercier très sincèrement les porte-parole de tous les groupes politiques de l'Assemblée pour leur implication sur ce texte. Je l'ai abordé avec humilité, et je suis fier d'avoir pu mener avec vous un véritable travail de coconstruction, sur un sujet d'importance majeure pour nos concitoyens et ô combien transpartisan.

L'article 1er vise à limiter le recours à l'adjudication pour la cession de biens fonciers et immobiliers du domaine de l'État et des collectivités territoriales. Il s'agit tout simplement d'une mesure d'exemplarité : les acteurs publics devront favoriser le recours aux ventes amiables dans la cession de leur foncier, afin de limiter l'impact délétère des ventes aux enchères sur la formation des nouveaux prix de référence.

L'adjudication n'est qu'une modalité dans la palette de possibilités pour la cession du foncier. La solution alternative est la vente à l'amiable, qui s'effectue soit de gré à gré, soit avec publicité et mise en concurrence, sur appel d'offres pour les grands projets ou bien dans le cadre d'une vente notariale interactive. Ce mode de cession permet en outre de valoriser des critères qualitatifs et limite les risques d'augmentation excessive du prix du foncier dans les quartiers sous tension.

L'article 2 prévoit la création d'organismes de foncier libre, qui favoriseront les projets d'acquisition de logement fondés sur la dissociation entre la propriété du foncier et celle du bâti. Il tend ainsi à développer de façon innovante un troisième droit de propriété, complémentaire aux deux premiers, que sont la pleine propriété classique et le démembrement du droit de propriété qui partage celui-ci entre l'usufruitier et le nu-propriétaire. Alors que le poids moyen du foncier dans le bilan d'une opération d'aménagement atteint régulièrement 30 à 40 %, voire 50 % dans les zones tendues, la dissociation permettra de produire des logements à un coût plus accessible pour nos concitoyens.

Sur le modèle des organismes de foncier solidaire, les organismes de foncier libre permettront de massifier la dissociation en faveur du logement intermédiaire, du logement libre ou du logement à usage commercial ou de service. Afin de prévenir tout risque spéculatif dans la durée, la commission des affaires économiques a souhaité que cette activité soit assumée uniquement par des sociétés à capitaux publics ou majoritairement publics.

L'article 3 porte création d'observatoires de l'habitat et du foncier, de manière à accroître la transparence au profit des élus locaux et des citoyens et à objectiver les évolutions du prix du foncier. Les collectivités territoriales auront ainsi les capacités d'analyse nécessaires au pilotage de leur politique foncière. En effet, la mise en place de stratégies de maîtrise des prix du foncier par les collectivités territoriales suppose que celles-ci disposent en la matière de données fiables, actualisées et consolidées à l'échelle du bassin de vie.

La mission des observatoires de l'habitat et du foncier, qui seront rattachés au programme local de l'habitat – PLH – , consistera à étudier les évolutions en matière de foncier sur leur territoire et à recenser les espaces en friche ainsi que les surfaces potentiellement réalisables par surélévation des constructions existantes. Les agences d'urbanisme et les différents établissements publics fonciers pourront, bien entendu, coordonner leurs expertises au profit de ces observatoires.

L'article 4 vise à créer un fonds national pour la dépollution des friches. La réhabilitation des friches – qu'elles soient industrielles, commerciales, administratives, urbaines ou militaires – est un combat fondamental, notamment pour lutter contre l'artificialisation des sols. En effet, optimiser des friches, c'est réutiliser du foncier déjà artificialisé plutôt que d'utiliser de nouvelles terres ; c'est créer des logements et de l'activité économique sans utiliser d'espaces nouveaux.

Nous devons imaginer de nouveaux outils pour optimiser le foncier disponible et pour recenser, requalifier, dépolluer et valoriser les friches en zones tendues. Sur ces sujets, nous attendons une action ferme et résolue de la part du Gouvernement.

L'article 5 tend à autoriser les collectivités territoriales à recourir à une expertise privée pour l'évaluation de certains projets immobiliers. Aujourd'hui, les projets immobiliers des collectivités territoriales sont conditionnés, avant toute entente amiable, à une demande d'avis préalable de la direction de l'immobilier de l'État.

Si nous notons les réticences du Gouvernement à mettre un terme définitif au monopole des Domaines, nous appelons toutefois son attention sur le besoin d'accompagner et de sécuriser les collectivités territoriales dans leurs projets d'opérations immobilières. À ce jour, les méthodes d'évaluation des services de l'État sont régulièrement remises en cause par les élus locaux, qui souhaitent pouvoir disposer d'un tel droit d'option. Au-delà de ce dispositif, sur lequel nous serons amenés à nous prononcer, nous attendons donc des actions fortes de la part du Gouvernement pour améliorer le fonctionnement de la direction de l'immobilier de l'État, afin que les élus locaux puissent véritablement bénéficier de son expertise.

La commission des affaires économiques a supprimé l'article 6 au profit d'un article 6 bis qui vise à renforcer la déclaration d'utilité publique réserve foncière. Ce dispositif demeure à ce jour compliqué, donc peu utilisé, et uniquement dédié aux acquisitions urgentes. L'article 6 bis permettra aux élus locaux de constituer plus aisément des réserves foncières, sous réserve que le Gouvernement adapte le corpus réglementaire en conséquence.

L'article 7, enfin, vise à renforcer les mesures de transparence en matière de construction de logements dans le cadre des PLH. Trop souvent, le nombre de logements construits sur le territoire de la collectivité est bien inférieur aux objectifs fixés par le PLH.

Dans un souci de transparence, tant pour les élus locaux eux-mêmes que pour nos concitoyens, l'article tend à instituer un compte rendu annuel en conseil municipal et en conseil communautaire présentant les écarts entre les objectifs du PLH et le nombre de logements effectivement livrés au cours de l'exercice écoulé. Cette délibération annuelle permettra de mettre en avant l'évolution de la situation sociale et démographique ainsi que les analyses des observatoires de l'habitat et du foncier. De cette manière, les élus pourront plus facilement piloter la mise en oeuvre de leurs projets de construction et d'aménagement.

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, la présente proposition de loi a été pensée pour doter les élus locaux des outils indispensables, en faveur du pouvoir d'achat de nos concitoyens. Notre ambition est que les Français puissent s'émanciper et retrouver de la liberté dans leur parcours résidentiel. Pour que cette ambition ne demeure pas une utopie, je vous invite à adopter la proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM. – M. Dominique Potier applaudit également.

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La parole est à M. le ministre chargé de la ville et du logement.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Je suis très heureux d'être parmi vous ce matin pour discuter de la proposition de loi visant à réduire le coût du foncier. Ces travaux résultent d'une volonté partagée, notamment par les parlementaires de la majorité, et de la force de conviction de M. Lagleize, qui met cette question en avant depuis de nombreux mois.

Vous aviez accepté, monsieur le rapporteur, de mener à bien la mission que le Premier ministre et moi-même vous avions confiée, et vous m'avez effectivement remis votre rapport il y a quelques semaines. J'en profite pour remercier les services de mon ministère, qui vous ont accompagnés, vos attachés parlementaires et vous-même, dans l'élaboration du texte.

Cette proposition de loi est très importante à mes yeux, car elle s'inscrit pleinement dans la vision de la politique du logement que nous essayons de mettre en oeuvre depuis deux ans et demi. On peut résumer cette vision par un objectif très clair : le logement ne doit plus être un facteur d'empêchement. Il ne doit plus empêcher de trouver un travail parce qu'il est trop éloigné ou d'élever dignement ses enfants parce qu'il est trop dégradé. En un mot, il ne doit plus empêcher d'avoir la maîtrise du destin auquel on aspire.

L'atteinte de cet objectif passe par deux axes principaux : produire des logements abordables ; rénover les logements partout où il est nécessaire de le faire. Telles sont les deux boussoles de l'action que je mène depuis deux ans, avec le soutien de la majorité. La mise en oeuvre de ces deux volets est aujourd'hui pleinement effective sur le terrain.

Beaucoup a déjà été fait pour favoriser la production de logements abordables. Je pense à la stabilisation des aides financières, en dépit des nombreux débats à ce sujet chaque année lors de l'examen du projet de loi de finances– il est bien normal qu'il y en ait. Je pense également à l'adoption de la loi, dite ELAN, portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique. Je remercie tous les parlementaires, non seulement ceux de la majorité, mais aussi ceux qui siègent sur les autres bancs de cet hémicycle, pour le travail constructif que nous avons réalisé alors.

La loi ELAN a d'abord permis la réécriture du code de la construction. Dans quelques semaines, je présenterai une ordonnance qui permettra d'arracher une page sur quatre de ce code ! Je vous laisse imaginer le travail homérique que cela a représenté. Dans quel secteur assiste-t-on à un changement aussi colossal ? Cela donnera plus de liberté aux acteurs du secteur et leur permettra d'innover davantage.

La loi ELAN a aussi permis de sortir du tout-procédure pour entrer dans le tout-projet, ce qui est essentiel à mes yeux. Cela a pris la forme des projets partenariaux d'aménagement – PPA – , dont nous avons longuement débattu ici même. À Marseille, quelques mois à peine après le drame de la rue d'Aubagne, nous avons mis en place un PPA, à la demande des collectivités locales. Cela prouve la pertinence des dispositifs que vous aviez adoptés quelques mois auparavant afin d'accélérer les projets d'urbanisme, de rénovation ou de reconstruction.

Vous avez en outre approuvé des dispositions permettant de lutter contre des abus, non seulement la spéculation, bien évidemment, mais aussi les recours dits abusifs, qui, trop souvent, conduisent au gel de projets.

En parallèle, nous avons beaucoup travaillé sur la rénovation, dont j'ai fait, vous le savez, un marqueur très fort de mon action. Dès le premier jour, j'ai déclaré que je voulais être autant le ministre de la rénovation que celui de la construction. Citons les nombreuses actions que nous avons engagées ensemble en la matière : le plan national action coeur de ville ; la rénovation urbaine ; la rénovation énergétique ; le plan d'investissement volontaire, lancé récemment avec nos partenaires, Action logement et les bailleurs sociaux.

Malgré toutes ces mesures, il restait un trou dans la raquette, que nous avions d'ailleurs identifié collectivement lors de l'examen du projet de loi ELAN : la question du foncier. Nous partageons tous le constat que vous avez dressé, monsieur le rapporteur : le foncier représente aujourd'hui une part beaucoup trop importante – 20 à 60 % – du coût d'une opération, et cela ne peut plus durer.

Avant d'insister sur quelques-unes des mesures très pertinentes que vous proposez, je rappelle que des solutions existent et sont déjà mises en oeuvre. Je pense notamment au rôle joué par les organismes de foncier solidaire – OFS – dans l'accession sociale à la propriété. Nous avons travaillé sur cette question pendant de longs mois et nous sommes tous convenus que ces OFS étaient très certainement la meilleure solution du moment pour que l'accession sociale à la propriété coûte le moins cher possible à nos concitoyens.

Nous avons réalisé des avancées considérables. Grâce à la loi ELAN, les logements faisant l'objet d'un bail réel solidaire – BRS – établi par un OFS sont désormais comptabilisés dans le quota de logements sociaux fixés par la loi, dite SRU, relative à la solidarité et au renouvellement urbains. C'est dire la priorité politique que nous accordons aux OFS. Au moment où je vous parle, une vingtaine d'OFS sont en cours de création, et la mairie de Paris a annoncé elle aussi la mise en place d'un tel organisme. Je m'en réjouis, car je me suis battu en ce sens. Songez que nous avions introduit les BRS quand Emmanuel Macron était ministre de l'économie, dans la loi qui porte son nom.

La question est désormais de savoir si nous pouvons aller plus loin, en étendant le modèle des OFS pour créer des organismes fonciers libres – OFL – : j'y suis profondément favorable. Néanmoins, il faut veiller à préserver ce qui a fondé le succès des OFS, en cohérence avec leur objectif premier : pouvoir circonscrire les opérations afin d'éviter toute spéculation sur le foncier.

Pour lutter contre la spéculation foncière, l'exemplarité est également mise à profit : enfin, nous apportons une solution au problème des enchères. Combien parmi nous ont connu l'expérience d'être sollicité par des personnes dénonçant le tout enchère ! Celui-ci en effet n'a en définitive qu'une conséquence : les Français payent des prix de plus en plus élevés.

M. le rapporteur acquiesce.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Vous proposez dans ce domaine des avancées très significatives. Si cette proposition de loi est adoptée, l'État devra donc se montrer exemplaire, et je m'en réjouis.

La maîtrise du foncier par les collectivités constitue un autre enjeu. Je crois que votre proposition concernant le droit de préemption urbain est pertinente ; il constitue un outil indispensable pour mettre en place une politique maîtrisée des coûts. C'est là un autre domaine dans lequel nous pouvons travailler de manière profitable.

Enfin, la question se pose de l'accompagnement des collectivités dans l'élaboration des stratégies foncières ; l'objectif est d'adopter l'approche la plus pragmatique possible, afin de définir comment l'État et le législateur peuvent donner davantage de moyens en ce sens aux collectivités. Pour y parvenir, nous devrons réfléchir à de nombreux aspects de ces stratégies et de leur inclusion dans le PLH. Votre proposition de loi nous invite à en discuter.

Ainsi, l'examen de ce texte constitue pour moi un moment important, parce qu'il apporte des solutions pour construire le dernier étage de la fusée : la loi ELAN avait permis d'en identifier le besoin, nous avions alors renvoyé sa réalisation à l'exécution de travaux supplémentaires. Vous avez accepté de vous en charger, monsieur le rapporteur, en collaboration avec nombre de vos collègues, et je suis vraiment très satisfait que nous puissions aujourd'hui apporter au problème du foncier de nouvelles solutions, pleinement cohérentes avec notre stratégie : réhabiliter des logements et en construire de nouveaux, abordables, le tout au bénéfice des Français.

Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.

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Dans la discussion générale, la parole est à Mme Isabelle Florennes.

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Le texte défendu par notre collègue Jean-Luc Lagleize, fruit de son rapport sur le foncier, s'inscrit dans la continuité des trois premières propositions de loi que le groupe Mouvement démocrate et apparentés présente aujourd'hui. Complémentaires, ces textes tentent en effet de répondre, chacun à sa manière, aux préoccupations que les Français ont fait entendre ces derniers mois, notamment en matière de pouvoir d'achat.

Le logement est devenu, ces dernières décennies, l'un des premiers postes de dépense des ménages – et même le premier en zone dite tendue. Dans le même temps, il constitue un élément absolument déterminant de l'accès à l'emploi, de l'évolution d'une carrière professionnelle ou du choix des modes de déplacements, et donc de l'empreinte écologique. En résumé, le logement irrigue tous les aspects de la vie quotidienne des Français, et l'envolée de ses prix a une incidence directe sur le porte-monnaie de nos concitoyens. Cette envolée, nous en connaissons au moins l'un des principaux facteurs : le jeu spéculatif sur le foncier, désormais bien installé. Tous les professionnels du secteur le font savoir : ce qui coûte cher, c'est le foncier. Le constat vaut d'autant plus pour les zones tendues, où il manque cruellement.

Notre collègue Jean-Luc Lagleize s'est donc courageusement attaqué aux racines du problème et a – avec beaucoup de sagesse, il faut le dire – dialogué avec tous les acteurs de la filière afin d'établir son rapport et d'élaborer cette proposition de loi. Mais la grande sensibilité du sujet appelait également une consultation de l'ensemble des groupes politiques de cette assemblée. Là encore, je crois que nous pouvons saluer l'attitude de notre collègue, qui a tout mis en oeuvre pour que chacun puisse s'exprimer au sujet de ce texte et proposer des amendements afin d'en étendre la portée. Le fruit de ces échanges est une boîte à outils complète mise à la disposition des élus et des citoyens.

Il s'agit d'encourager les pratiques vertueuses susceptibles – nous l'espérons – de mettre fin à l'augmentation des prix et de permettre aux maires de mieux aménager leur territoire et de mieux répondre à la demande de logement. Les mesures proposées s'articulent autour de ces deux grands objectifs.

La première, l'une des plus importantes, est révélatrice du mouvement que ce texte a pour but d'impulser ; elle consiste à interdire à l'État et aux collectivités de vendre de leur foncier aux enchères, et à réaffirmer qu'ils doivent se montrer exemplaires en la matière.

L'État et les collectivités font en effet partie des acteurs du jeu spéculatif et ont leur part de responsabilité dans la hausse des prix du foncier. Pour ne pas contribuer à cette évolution néfaste, ils doivent consentir un effort et adopter des pratiques plus vertueuses dans la gestion de leur domaine.

Une autre mesure phare, dont nous espérons que l'esprit sera préservé, est la création d'organismes fonciers libres. Sans détailler plus avant le dispositif que vous avez déjà présenté, monsieur le rapporteur, je me contenterai de rappeler que les futurs OFL, directement inspirés des OFS créés par la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové – ALUR – , sont pensés comme des outils permettant aux collectivités de décorréler le prix du foncier de celui de la construction pour encourager l'accession sociale à la propriété.

Il s'agit là d'une mesure dont nous sommes convaincus qu'elle va dans le bon sens et c'est pourquoi nous souhaitons vivement que l'ordonnance destinée à définir les baux adaptés aux produits proposés par les futurs OFL soit conçue en concertation avec les parlementaires, tout en étant publiée suffisamment rapidement pour que sa mise en application effective advienne dans la foulée de la promulgation du texte.

Nouveaux outils dont nous attendons aussi beaucoup, les futurs observatoires du foncier sont instaurés par l'article 3 du texte. Ils constitueront un appui solide pour les édiles, dont ils faciliteront la mission d'aménagement en leur fournissant un tableau de bord complet des informations relatives au foncier et au logement dans leur territoire. Ils devraient se montrer parfaitement adaptés pour résoudre les difficultés que les maires rencontrent dans les zones tendues pour collecter l'information.

Toujours concernant les maires, nous avons souhaité leur donner la possibilité de recourir à une expertise privée agréée pour certaines opérations. Je m'arrête quelques instants sur ce sujet qui a suscité de nombreuses discussions. La Direction de l'immobilier de l'État – DIE – a consenti d'importants efforts que nous saluons. Elle a ainsi entamé une remise à plat de son mode de fonctionnement – je pense notamment à la méthode d'élaboration des prix et à leur justification. C'est une bonne chose : de telles mesures sont de nature à offrir aux édiles une plus grande visibilité dans la réalisation de leurs projets, et donnent un exemple significatif de la transparence vers laquelle tous les acteurs doivent tendre en matière de logement.

Il n'est toutefois pas interdit de s'interroger sur le recours hiérarchique dont nous allons examiner le principe au cours de la discussion. Cette nouvelle voie de recours ne va-t-elle pas complexifier, là où nous voulions simplifier ? Par ailleurs, comment imaginer que le recours auprès d'une autre instance interne à la DIE aboutisse à une décision désavouant celle déjà rendue par la DIE elle-même ? Ce sont là de vraies interrogations qui, je l'espère, trouveront une réponse lors de nos discussions.

La transparence, que j'évoquais à l'instant, inspire également la dernière mesure proposée par ce texte : l'obligation de dresser un compte rendu annuel de la construction de logements. Présenté en conseil municipal, ce point d'étape servira à la fois aux citoyens, à qui il offrira une vue d'ensemble des projets passés, en cours et à venir sur la commune, et aux élus, qui pourront ainsi évaluer leurs propres avancées par rapport aux objectifs qu'ils se sont fixés.

Nouveaux outils, pratiques vertueuses, transparence : autant de mots d'ordre qui ont guidé la construction de ce texte, dont nous espérons qu'il créera une émulation nouvelle au sein du secteur du foncier. Je dis « émulation » car il s'agit bien de produire un effet d'entraînement parmi les acteurs, de les responsabiliser et de poser la question des conséquences de leur attitude sur les prix du foncier et donc du logement.

Mais il s'agit aussi de donner, notamment aux élus, les moyens de s'adapter à cette évolution et d'en atténuer les effets néfastes. Cette double volonté d'encouragement et d'accompagnement doit permettre d'aboutir à un équilibre et de ne pas laisser le jeu spéculatif l'emporter dans la détermination des prix du logement. Il est impératif que nous puissions oeuvrer tous ensemble en ce sens.

Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM. – Mme Pascale Boyer applaudit également.

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Je remercie le groupe du Mouvement démocrate et apparentés pour cette proposition de loi particulièrement visionnaire, intelligente et à la recherche de solutions, mais aussi pour l'esprit qui a animé son élaboration, pendant le travail d'information parlementaire, grâce à la concertation avec l'ensemble des groupes politiques.

Au nom du groupe Socialistes et apparentés, je veux dire solennellement notre gratitude d'avoir insufflé dans l'Assemblée un tel état d'esprit. Nous l'avions perçu avec la proposition de loi de Jimmy Pahun pour la protection des activités agricoles et des cultures marines en zones littorale et de montagne ; nous l'avons retrouvé avec celle d'Erwan Balanant pour une interdiction effective de la pêche électrique : sur des sujets susceptibles de nous rassembler, nous concerter, travailler ensemble, chercher des consensus et des compromis éclaire notre Assemblée et répond à une attente forte de la société actuelle.

Malheureusement, la niche du groupe Socialistes et apparentés ne connaîtra pas le même sort la semaine prochaine ; nous avons ressenti un mépris pour nos propositions dans le manque de travail, de collaboration, d'écoute. Nos propositions sont presque systématiquement rejetées ; pourtant elles étaient – du moins je le crois profondément – exactement dans le même état d'esprit, si on les regarde avec du recul en s'affranchissant des considérations politiciennes. Je ne peux que regretter cette différence de traitement ; il existe une école de la démocratie apaisée et constructive qui pourrait inspirer la majorité.

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Autre sujet de satisfaction, monsieur le rapporteur : vous avez cité Edgard Pisani, touchant une corde sensible, celle des jours heureux où des groupes d'inspirations politiques et spirituelles différentes étaient capables de converger dans le sens du gaullisme social.

Je voudrais à mon tour citer Edgard Pisani qui, dans les années 1990, disait admirer le dynamisme de l'entreprise, mais sans pouvoir s'empêcher de penser aux problèmes de l'homme et de la société que l'entreprise ne résout ni directement ni indirectement. « Qui pensera au lointain futur, disait-il, si la politique, comme un guetteur dans la nuit et comme un visionnaire, ne propose pas un avenir et n'y prépare pas l'espèce et la nation à les résoudre pour qu'elles demeurent maîtresses de leur destin ? » C'est exactement ce que vous avez voulu faire.

Une autre citation d'Edgard Pisani est plus directement liée à la question du foncier, qui nous rassemble aujourd'hui : « Le maintien des biens de la nature parmi les biens marchands nous conduira à l'accélération de phénomènes menaçants, dont nous sommes déjà les témoins. » C'était il y a trente ans et cette accélération n'a fait que s'accentuer.

Merci donc pour votre proposition de loi, qui concourt à deux réalisations auxquelles le groupe Socialistes et apparentés est très attaché : le pouvoir de vivre – pour reprendre le nom de l'ensemble de propositions pragmatiques et précises que défendent Nicolas Hulot, Laurent Berger et une coalition d'associations afin de réduire les inégalités sociales et territoriales – et la protection de l'écosystème de la planète, notre maison commune.

Concernant cette dernière, je ne peux pas ne pas faire allusion au colloque transpartisan que Jean-Michel Clément, Jean-Bernard Sempastous et moi-même avons réuni hier ; la salle Victor Hugo était pleine à craquer. Toutes les organisations présentes, les syndicats agricoles, Régions de France, l'ADCF – l'Assemblée des communautés de France – et cinq ONG environnementales ont signé ensemble un appel au Gouvernement pour un passage à l'action en matière de réforme et de régulation foncières.

Il est grand temps, il y a urgence d'assurer la relève générationnelle et de protéger l'agriculture et la terre comme un bien commun. Bref, cet appel, vous l'avez compris, converge avec vos propositions visant à rééquilibrer puissance publique et puissance privée, ce qui est l'enjeu de l'action politique en ce début de XXIe siècle.

De façon plus précise, notre groupe a été force de proposition, puisque nous avons repris, en accord et en discussion avec vous, quelques-uns de nos attendus, qui n'avaient pas rencontré de succès au cours de ces derniers mois. Certains ont pu rejoindre les cinquante propositions du rapport adressé au ministre. Je suis fier que Mme Battistel et moi-même ayons contribué à créer pour les collectivités la possibilité de constituer des réserves foncières sans avoir à justifier d'un projet à court terme.

Plus généralement, je regrette que nous n'ayons pas eu le temps de simplifier l'organisation collective, notamment des EPF, établissements publics fonciers, et des SAFER, sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural, en lien avec les SCOT, schémas de cohérence territorial. Ces outils de planification devenus des outils de programmation et d'expériences locales, dont nous disposons à Nancy et que j'ai eu l'honneur de coconstruire au cours des années précédentes, montrent que l'articulation, la planification et la programmation appelleraient des objets politiques plus performants que la dispersion actuelle de l'organisation des centres de décision. Peut-être reviendrons-nous sur ce point.

Je suis par ailleurs dubitatif en ce qui concerne la contre-expertise immobilière privée, lui préférant une réforme des domaines, pour éviter tout risque de spéculation. De la même façon, les SAFER doivent accompagner la hausse du marché foncier agricole, y compris quand elle est le fait de personnes qui contournent leur droit de préemption – scandale que nous devrons résoudre un jour.

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Notre appel à un grand remembrement, englobant tous les biens publics domaniaux des différents ministères sur les différents territoires, afin de dépolluer les sols anthropisés et de les remettre sur le marché au bénéfice des collectivités, est un pari extraordinaire sur l'avenir. Les propositions que nous avons formulées en ce sens n'ont pas pu aboutir, mais nous les reprendrons le moment venu.

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et MODEM.

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Nous tenons tout d'abord à féliciter notre collègue Jean-Luc Lagleize, pour la qualité de son travail, ainsi que le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, pour avoir inscrit ce texte à l'ordre du jour de sa niche parlementaire.

Monsieur le rapporteur, le 4 avril dernier, le Premier ministre vous a missionné pour étudier la maîtrise du coût du foncier dans les opérations de construction en vue de permettre un aménagement équilibré du territoire.

Vous avez identifié deux objectifs prioritaires. Le premier est de casser l'engrenage de la hausse des prix des logements en interdisant la vente aux enchères publiques, en offrant plus de transparence sur la définition des prix et en stoppant la spéculation foncière. Le second objectif stratégique consiste à libérer plus de foncier et à optimiser le foncier disponible en donnant aux maires des outils pour conduire efficacement leur politique du logement.

Votre travail a largement contribué à ces objectifs. C'est pourquoi le groupe UDI, Agir et indépendants soutient les propositions que vous formulez pour renforcer les collectivités dans leurs prérogatives.

La proposition de loi tend notamment à généraliser la dissociation entre le foncier et le bâti en permettant aux collectivités locales de créer un organisme foncier libre grâce auquel elles pourraient proposer des baux réels libres – BRL – sur les fonciers qu'elles aménagent. Nous nous réjouissons que les débats en commission aient limité cette possibilité aux sociétés détenues majoritairement par des capitaux publics.

Le recours à des experts agréés auprès des cours d'appel permettrait également d'accélérer les procédures pour les collectivités. Je regrette que le Gouvernement tente de supprimer cette mesure facilitatrice pour les élus locaux contraints, comme nous l'avons tous été, à attendre les évaluations.

Autre disposition intéressante : les observatoires fonciers locaux auront pour objectif d'apporter plus de transparence aux opérations de vente des particuliers. Nous nous félicitons que, renonçant à créer de nouvelles agences d'urbanisme pour remplir ces missions nouvelles, vous les ayez confiées aux agences existantes.

En ce qui concerne les données de construction de logement que ces observatoires devront transmettre aux collectivités locales, nous proposerons, avec vous, monsieur le rapporteur, de modifier l'article 7 afin de le rendre plus efficient.

Autre problématique : la maîtrise de l'étalement urbain. La dépollution des friches et leur reconversion sont un véritable défi pour l'aménagement du territoire. L'article 4 crée un fonds pour la dépollution des friches, ce qui me semble une excellente initiative. Il serait bon que ce fonds couvre aussi les opérations de désamiantage de certains bâtiments agricoles. En effet, la persistance de ces bâtiments insalubres reste préoccupante pour l'aménagement équilibré du territoire et le respect des exigences écologiques. Seules, les régions ne sont pas suffisamment armées pour relever ce défi ; il est de la responsabilité de l'État de les aider.

Le groupe UDI, Agir et indépendants a toujours proposé et soutenu des initiatives tendant à une simplification d'ampleur de la politique du logement. Dans ce domaine encore, monsieur le rapporteur, vous avez formulé plusieurs propositions pertinentes dans le rapport que vous avez remis au Premier ministre. J'interroge M. le ministre chargé de la ville et du logement sur les suites qu'y donnera son administration.

Pour conclure, si le texte se concentre sur la problématique du foncier, n'oublions pas que la hausse des prix des logements est aussi due à la complexité des normes et à notre politique d'aménagement du territoire. Nous l'avions dit lors de l'examen de la loi ELAN.

Je salue votre intervention, monsieur le ministre. Elle nous a éclairés sur des travaux qui seront conclus dans les prochains jours, et qui devraient améliorer significativement la situation.

Il faut privilégier une politique territorialisée du logement, adaptée aux 400 bassins de vie identifiés. Plutôt que de construire plus au moyen d'une politique centralisée, nous devons favoriser le « construire mieux » grâce à l'ancrage territorial. Je le répète : nous soutenons toutes les initiatives qui contribueront, comme ce texte, à une simplification d'ampleur de la politique du logement.

Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.

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Le texte est animé par une ambition que nous partageons tous : faciliter l'accès au logement de nos concitoyens qui, dans bien des cas, ont du mal à concrétiser leurs projets immobiliers. Les premiers à perdre leurs illusions dans ce domaine sont les habitants des zones tendues, où la demande de logements explose, alors que se tarit l'offre de biens disponibles à la location ou à la vente. L'inflation inquiétante du coût du foncier contribue à ce renchérissement généralisé.

Cette problématique, au coeur des préoccupations de nos concitoyens, est aussi, nous le savons, un sujet essentiel pour les élus locaux. Aussi la retrouvons-nous souvent au coeur de la campagne électorale pour les élections municipales de mars prochain.

Je salue à mon tour votre travail, monsieur le rapporteur. Dans le cadre de votre mission, vous avez procédé à de nombreuses auditions, et vous avez rédigé un rapport d'une grande qualité. J'apprécie également votre méthode consistant à associer tous les groupes parlementaires à la coconstruction d'un texte consensuel. Un équilibre a été trouvé. Je souhaite que nous conservions ce compromis ou ce consensus durant l'examen de la proposition de loi.

Vous préconisez des dispositifs complémentaires, plutôt ciblés sur les classes moyennes, afin de leur permettre d'accéder à un logement dans les zones tendues, bien sûr, mais aussi ailleurs, notamment dans le périurbain. Pour ce faire, il est indispensable de maîtriser le coût du foncier.

Le texte propose plusieurs améliorations opérationnelles et pragmatiques, auxquelles nous souscrivons largement. Je pense en particulier à l'interdiction de la vente par adjudication lors des cessions de foncier du domaine privé de l'État et des collectivités territoriales. Cette mesure, prévue à l'article 1er, limitera l'effet inflationniste des ventes aux enchères que nous constatons régulièrement sur le terrain. De plus, les cessions à l'amiable permettent à la politique d'aménagement de mieux s'abstraire des arbitrages purement financiers et de valoriser la qualité des projets, la mixité sociale et la qualité architecturale, paysagère ou environnementale.

La création d'observatoires fonciers locaux reçoit, elle aussi, toute mon approbation. Tout d'abord parce que la connaissance des marchés fonciers est indispensable à une action publique efficace. Aussi, je suis convaincue que leurs travaux permettront aux collectivités d'agir en faveur du développement de leur territoire et de déployer des stratégies foncières pertinentes. Ensuite, parce que l'accès des particuliers et des professionnels aux informations sur les transactions immobilières et foncières est une condition de la lutte contre la spéculation foncière. Enfin, parce qu'en prévoyant que ces organismes puissent s'adosser à des agences d'urbanisme, des EPF, et être articulés avec les programmes locaux de l'habitat, on garantit à la fois leur portée et leur efficacité.

Par ailleurs, je suis sûre qu'une bonne connaissance des réserves de foncier est également utile dans les zones détendues. À mon sens – vous le savez, monsieur le rapporteur – , nous aurions pu pousser cette logique plus loin en octroyant aux observatoires du foncier une légitimité équivalente à celle des observatoires des loyers. Je défendrai donc un amendement visant à mettre en place un processus d'agrément des observatoires de l'habitat et du foncier par le représentant de l'État en région.

De même, je soutiens la possibilité offerte de recourir aux experts agréés par les cours d'appels, dont l'estimation est à la fois rapide et fiable. C'est une demande des collectivités. Il faut l'entendre. Je regrette moi aussi que le Gouvernement ait déposé un amendement tendant à maintenir le monopole de la direction de l'immobilier de l'État, ancien service des domaines.

À l'égard de la création d'un troisième droit de propriété, je vous ai fait part de mes réserves. Actuellement, la dissociation entre le foncier et le bâti introduite par la loi ALUR est limitée aux logements sociaux, conformément au dispositif du bail réel solidaire – le BRS. Son élargissement au parc privé pourrait être mal compris par nos concitoyens : ils pourraient y voir une attaque au droit de propriété, dont nous connaissons la valeur constitutionnelle et la dimension sociale. Nul n'ignore l'attachement des Français à ce droit.

Il est dommage que le Gouvernement ait choisi de passer par une ordonnance pour créer ce dispositif. Les parlementaires sont en mesure de légiférer sur ce point, en améliorant le texte au cours de la navette.

Vous l'avez compris : le groupe Libertés et territoires aborde la proposition de loi plutôt favorablement, en espérant une fois encore que le compromis ou l'équilibre trouvés en commission grâce au travail du rapporteur nous permettront d'en débattre dans de bonnes conditions.

Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.

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Réduire le coût du foncier, augmenter l'offre de logements accessibles aux Français : ces deux objectifs, nous ne pouvons que les partager. Examinons donc en quoi la proposition de loi peut permettre de les atteindre.

À l'article 1er, l'interdiction de la mise aux enchères des terrains publics va dans le bon sens, du moins en apparence, car les cessions de foncier public ne représentent qu'une minorité – moins de 10 % – des logements produits. Reste que cette mesure semble porter atteinte à la libre administration des collectivités locales et pourrait être censurée par le Conseil constitutionnel. En outre, la cession à l'amiable ne garantit pas la maîtrise du prix du logement, ce qui est pourtant le but recherché. Dans des territoires détendus, on peut peiner à trouver un preneur au prix fixé. Enfin, imaginez enfin les difficultés qui surgiront si une collectivité cherche à céder un atelier : comment choisir entre plusieurs artisans ? Espérons que vous adapterez la proposition aux réalités locales.

À l'article 2, un amendement gouvernemental renvoie à des ordonnances la création des organismes fonciers libres, ce qu'on ne peut que regretter. Il serait bon que le législateur précise l'extension du champ de la dissociation du foncier et du bâti, autorisée depuis la loi ALUR. Cette mesure encore récente doit être évaluée avant que l'on décide d'aller plus loin. Il faudra aussi résoudre la question des garanties bancaires.

J'en viens à l'article 3. La création d'observatoires fonciers locaux a fait ses preuves dans des territoires tendus. Il faut l'inciter – non l'imposer – si les élus la jugent pertinente. De la confiance, de la liberté : voilà ce qu'attendent les élus locaux après les promesses du congrès des maires.

Le Gouvernement va inviter la majorité à supprimer l'article 4. La sagesse va l'emporter.

En ce qui concerne l'article 5, nous partageons votre volonté d'améliorer l'évaluation des biens publics. Essayons ensemble de parfaire ce service public !

L'article 6 a été supprimé en commission. En effet, l'inversion de la logique de dérogation aux règles d'un PLU – plan local d'urbanisme – aurait nécessité une rédaction plus précise et plus solide, retenant peut-être la possibilité d'une dérogation, prévue dans le PLU lui-même.

L'article 7 instaure une obligation de compte rendu annuel de la construction de logements, pour rapporter la production aux objectifs du PLH. Justifiée dans les communes importantes, la mesure ne me le semble pas dans les petites, pour lesquelles le PLH n'envisage pratiquement pas de constructions.

Objectivement, l'impact de ces quelques mesures, certes intéressantes, me semble limité.

Allons plus loin, mes chers collègues, et réfléchissons de manière plus globale. Le coût du foncier n'est pas déterminé par le seul prix du terrain. Plusieurs facteurs le renchérissent : la fiscalité immobilière, les taxes et frais de raccordements, ainsi que les participations destinées à financer les équipements publics.

Par ailleurs, l'abaissement du coût du foncier ne suffira pas à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français. Dans certains cas, même si le coût du foncier est nul, le prix des logements n'est pas pour autant accessible. En effet, les coûts de construction peuvent augmenter à cause des caractéristiques du terrain ou des prescriptions architecturales et urbaines ; s'y ajoute la fiscalité de la construction.

Monsieur le ministre, il faudrait envisager d'instaurer un taux réduit de TVA pour rendre les logements plus abordables. Surtout, des mesures telles que le rétablissement de l'APL accession – l'aide personnalisée au logement – , ou du taux initial de la quotité finançable du PTZ– le prêt à taux zéro – dans les communes où vous l'avez diminué, permettraient de rendre la demande solvable.

Précisons que la hausse du coût du foncier, si elle est importante, ne vaut pas partout. Elle concerne surtout certains centres en France métropolitaine, rendant le prix des logements qui s'y trouvent peu accessible. Dans ces espaces, qui concentrent un nombre croissant d'emplois et de services, la demande de logements augmente, mais l'offre ne peut suivre, même quand le coût du foncier est moindre. Ainsi, l'absence d'aménagement équitable du territoire aggrave la pénurie de foncier, et explique la hausse de son coût.

Monsieur le rapporteur, vous avez le mérite de faire des propositions afin de faciliter l'accession à la propriété, même si elles sont bien insuffisantes. Il nous faut rendre l'ensemble du territoire attractif et accessible, mieux le connecter, répartir de manière pertinente les emplois publics et les filières d'avenir. Cela permettra de rééquilibrer géographiquement la demande de logements et de réduire la pénurie, diminuant ainsi le coût du foncier.

« Construire plus, mieux et moins cher » : que sont devenus les objectifs affichés de la loi ELAN ? Une crise du logement couve. Je tire la sonnette d'alarme et invite le Gouvernement et les députés de la majorité à promouvoir enfin une politique volontariste du logement et une politique d'aménagement équitable de notre pays.

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À la suite de Dominique Potier et des autres orateurs, je souhaite remercier le rapporteur Jean-Luc Lagleize pour sa proposition de loi, et la méthode qu'il a adoptée. Choisir la concertation, rechercher le consensus, prendre en compte l'avis de tous les groupes – y compris ceux dont les effectifs sont les plus réduits, comme celui de la Gauche démocrate et républicaine, dont je fais partie : voilà qui est suffisamment rare pour mériter d'être salué.

J'ai travaillé sur de multiples propositions de loi, j'y ai consacré des heures, des mois, j'ai organisé de nombreuses concertations. En réponse, la majorité a souvent refusé ne serait-ce que d'engager le débat en adoptant des motions de rejet préalables.

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C'est toujours désagréable. Je n'ai que trop vécu ces situations depuis le début de la législature pour ne pas saluer la méthode du rapporteur, qui rompt avec une attitude trop fréquente.

M. Jean-Paul Dufrègne applaudit.

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Je souhaite faire quelques remarques, avant que nous ne commencions l'examen des articles.

Nous serons d'accord pour dire, je crois, que notre pays connaît une profonde crise du logement – il est trop rare, et trop cher – , qui va s'aggravant.

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En effet, les mesures qui auraient permis, même lentement, de sortir de cette spirale n'ont pas été prises. La crise s'aggrave, le nombre de constructions baisse, les prix à l'achat ou à la location continuent d'augmenter.

La part du logement dans le budget des ménages s'accroît, et le logement contribue de plus en plus fortement à dégrader le pouvoir d'achat des familles, notamment les plus modestes, dans les zones tendues.

Cette proposition de loi est importante, parce que le prix du foncier détermine celui des logements – c'en est la matière première. Il faut le réguler, parce qu'en ce domaine, la main invisible du marché n'existe pas.

Et puis, pour faire de l'argent en dormant, il n'y a pas mieux que le foncier. Quand le prix d'un terrain augmente, c'est rarement à cause du travail fourni par son propriétaire, ou de son intelligence. La hausse des prix s'explique toujours par des facteurs exogènes, d'ailleurs souvent liés à l'intervention publique : le plan local d'urbanisme – PLU – est modifié, ouvrant de nouveaux droits à construire ou densifiant un territoire ; de nouvelles infrastructures de transports, stations de métro ou gares, sont construites ; des écoles s'ouvrent. L'accroissement du prix du terrain ne s'explique jamais par le travail de celui qui le détient.

La valeur de certains terrains peut être multipliée par dix, quinze ou vingt en quelques années, grâce aux investissements publics. Pourquoi la valorisation foncière permise par les investissements publics devrait-elle être privatisée ? Le foncier illustre parfaitement la tendance à la socialisation des investissements et à la privatisation des bénéfices. Il faut de la régulation. La présente proposition de loi, si elle n'est pas révolutionnaire, permet quelques avancées en la matière.

Soulignons l'importance de la mesure de limitation des ventes par adjudication et des ventes aux enchères. J'en prends pour preuve deux exemples de la région parisienne. Les maires du Grand Paris se sont associés pour lancer la consultation « Inventons la métropole du Grand Paris » ; le critère privilégié de sélection des projets a été la valorisation foncière, favorisant la spéculation. La Société du Grand Paris investit actuellement dans les gares et les lignes de métro ; les terrains adjacents à ces infrastructures seront attribués au plus offrant, au détriment de la mixité sociale et de l'accessibilité des prix. Cela ne peut pas durer.

J'espère que l'interdiction de vendre par adjudication ne vaudra pas seulement pour le domaine privé de l'État et des collectivités territoriales, mais aussi pour les aménageurs fonciers et toutes les sociétés sous contrôle public, qu'il s'agisse de la Société du Grand Paris, des sociétés d'économie mixte – SEM – , ou des aménageurs. C'est une question clé pour notre politique publique.

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Je souhaite surtout que le Gouvernement ne dévitalise pas le texte sur lequel nous avons travaillé, en l'amendant ou en recourant aux ordonnances.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM. – M. Jean-Luc Lagleize, rapporteur, applaudit également.

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Le groupe La République en marche tient à saluer le travail remarquable effectué par le rapporteur, Jean-Luc Lagleize, membre du groupe MODEM, qui a travaillé de nombreux mois sur le sujet. Le 4 avril dernier, le Premier ministre, Édouard Philippe, lui confiait une mission temporaire, ayant pour objet « la maîtrise du coût du foncier dans les opérations de construction », l'objectif étant de construire un plus grand nombre de logements à des prix plus abordables. Cette mission faisait suite à la promulgation de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi ELAN, que vous avez défendue, monsieur le ministre.

Le rapport issu de la mission est riche. Il comporte cinquante propositions, dont certaines sont reprises dans la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui.

Le prix du logement pèse de plus en plus lourdement sur le budget des ménages. Selon un rapport de la Commission des comptes du logement, c'est leur premier poste de dépenses ; ils y consacrent 25 % de leur budget.

Le coût du foncier constitue un frein majeur à l'aménagement et à la construction. Il représente entre 20 % et 60 % du coût des opérations ; cette part atteint 30 % dans les zones où l'offre est la plus insuffisante. Dans les zones tendues – Paris et la région parisienne, les métropoles de province, les zones transfrontalières et les villes et zones touristiques de montagne, du littoral et d'outre-mer – , le prix du terrain est le premier frein à la construction de nouveaux logements. Selon des chiffres établis en 2017, toutes les régions ont vu le prix au mètre carré des terrains augmenter au cours des dix dernières années, l'augmentation étant de 23 % en Île-de-France, où la valeur du mètre carré est trois fois supérieure à la moyenne nationale, de 40 % dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et de 123 % en Basse-Normandie.

Pour construire davantage de logements accessibles au plus grand nombre, il faut faciliter la cession des terrains, – cela contribue à la baisse des prix du foncier – , et développer des projets d'urbanisme cohérents en partenariat avec les acteurs du territoire. Tel est le principal objectif de la présente proposition de loi.

Afin de freiner la spéculation foncière, la vente par adjudication dans les zones tendues, où les communes sont soumises à la taxe sur les logements vacants, ne sera plus autorisée. Le groupe La République en marche déposera un amendement visant à maintenir la possibilité de vendre par adjudication les biens des domaines privés dans les territoires n'appartenant pas aux zones tendues, afin de préserver la liberté de choix des communes, en particulier des communes rurales.

La proposition de loi permettra la création, sur le modèle des organismes de foncier solidaire, des organismes fonciers libres, qui favoriseront la dissociation du foncier et du bâti. Ces OFL auront pour objectif d'acquérir et de gérer des terrains, bâtis ou non, en vue de réaliser des logements et des équipements collectifs. Ils resteront propriétaires des terrains, et consentiront des baux de longue durée au preneur, qui sera propriétaire du bâti.

Actuellement, une mission d'observation de l'habitat et du foncier est prévue dans le PLH de chaque commune. La présente proposition de loi prévoit, en son article 3, de transformer ce dispositif pour créer de véritables observatoires de l'habitat et du foncier. Le groupe La République en marche défendra deux amendements relatifs à l'obligation de créer ces observatoires dans certains territoires, et visant à renforcer leurs missions, notamment celles relatives à l'observation des prix et à la constructibilité du foncier.

L'article 4 de la proposition de loi vise à instituer un fonds pour la dépollution des friches urbaines et industrielles, dans l'objectif d'accroître le foncier disponible. Le Gouvernement défendra un amendement de suppression de cet article. Il propose de créer un groupe de travail pour réfléchir aux autres solutions possibles pour réhabiliter les friches ; le groupe La République en marche suivra avec vigilance les travaux de ce groupe et ses résultats.

Afin de protéger les communes, notamment celles situées en milieu rural, le groupe La République en marche votera en faveur de l'amendement no 59 rectifié du Gouvernement, tendant à supprimer la possibilité de remplacer l'avis des services de la direction de l'immobilier de l'État – les anciens services des domaines – par les résultats d'une expertise privée.

Par l'amendement no 59 rectifié , le Gouvernement entend en outre obliger les services compétents de l'État à apporter des réponses d'une même qualité à toutes les collectivités territoriales, quelle que soit leur taille. Ces dernières pourront ainsi disposer d'une évaluation neutre, objective et gratuite, afin de protéger les intérêts financiers de la puissance publique et des contribuables tout en éclairant la prise de décision de l'assemblée délibérante.

Enfin, l'amendement no 59 rectifié tend à donner à toutes les collectivités la possibilité de faire appel à des experts privés, en complément de l'avis des services de l'État, si elles le souhaitent. Il vise à faciliter les recours, en introduisant la possibilité de recours hiérarchique en cas de désaccord entre les services compétents de l'État et la collectivité.

La présente proposition de loi rendra obligatoire la remise par les EPCI d'un compte rendu annuel, présentant, pour chaque commune, l'exécution du programme local de l'habitat, en s'appuyant sur le programme local de l'habitat, le plan local d'urbanisme, et les travaux des observatoires de l'habitat et du foncier.

Cette proposition de loi apporte des solutions pour les zones marquées par une forte tension locale de l'immobilier, en mettant notamment de nouveaux outils à disposition des collectivités territoriales.

En somme, ce texte apporte des solutions aux Français en matière de logement ; le groupe La République en marche le votera.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

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Je veux à mon tour remercier le groupe MODEM pour cette proposition de loi, qui replace la question du coût du foncier et de l'offre de logements au coeur de nos débats. Ces problèmes constituent le principal motif des visites de nos concitoyens dans les permanences en région parisienne et dans les zones urbaines, mes collègues élus dans ces territoires le savent.

C'est un problème majeur, qui… quel mot puis-je utiliser à cette tribune ? C'est un problème qui complique la vie de nombre de nos concitoyens, quelle que soit leur génération. Monsieur le ministre, vous avez, je crois, le portefeuille le plus important du Gouvernement ; vous assumez une lourde tâche.

Peut-être ne partagerez-vous pas ce constat-là, monsieur le ministre, mais toutes les études démontrent, hélas ! que la crise du mal-logement s'aggrave. Notre pays compte désormais 150 000 personnes sans domicile fixe, dont 30 000 enfants, auxquelles pourrait s'ajouter une grande partie des 100 000 personnes chassées de leur logement l'an dernier – certaines sous la contrainte de la police. Dans le même temps, 200 000 appartements sont actuellement vides, rien qu'à Paris.

Vous l'avez peut-être fait comme moi, je me suis rendu, il y a quelque temps, à Montreuil, auprès des équipes d'Interlogement 93, qui gèrent le centre d'appel du 115 en Seine-Saint-Denis. Dans ce département, plus de 150 mineurs dorment dans les rues chaque nuit, sans qu'aucune solution d'hébergement ne leur soit proposée. Le nombre d'appels au 115 de familles avec enfants a triplé en quatre ans – triplé en quatre ans ! – , preuve, s'il en fallait encore une, que la crise du mal-logement explose et qu'aucune des grandes promesses du Gouvernement, comme celles des gouvernements précédents, n'inverse cette tendance dramatique.

Pire, tout est parfois fait pour que les indicateurs restent dans le rouge : l'an dernier, on a par exemple annoncé que les subventions aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale baisseraient de près de 60 millions d'euros. Dans le même temps, le Président de la République n'avait pas hésité à se prêter à une opération de communication, en posant aux côtés de personnes sans domicile fixe, à l'occasion d'une maraude nocturne du SAMU social. Cela n'est bien entendu pas suffisant !

Le prix du logement, à la location comme à l'achat, est un indéniable facteur d'aggravation de la crise que plus personne ne peut nier. Pourtant, le Gouvernement a choisi, dès son installation, de baisser les APL – il s'agit du « boulet » du Président Macron, selon ses propres termes – et de couper dans les budgets des bailleurs sociaux, tout en encourageant la spéculation grâce à de multiples niches fiscales réservées aux investisseurs privés.

En France, 2 millions de ménages attendent un logement social. La Cour des comptes prévoit pourtant un effondrement de la construction de HLM, conséquence des choix politiques opérés. Pour ceux qui veulent devenir propriétaires, le prix à payer est de plus en plus excluant : dans les communes de Montreuil ou de Bagnolet, dans la circonscription qui m'a élu, l'augmentation du prix du mètre carré atteint 10 % par an.

Pour lutter contre ce fléau, les propositions de nos collègues du groupe MODEM ont le mérite d'exister, même si elles restent quelque peu insuffisantes. Permettez-moi de revenir sur quelques points du texte.

Tout d'abord, la possibilité donnée aux collectivités locales de créer des offices fonciers libres pour dissocier le foncier du bâti est une bonne idée. Nous la soutiendrons, à la condition qu'elle ne restreigne pas l'offre pour les ménages aux revenus modestes.

S'agissant du sujet majeur de la nécessaire dépollution des friches industrielles, que vous évoquez dans le texte, nous veillerons à ce que les payeurs soient les pollueurs, et non le contribuable. À Montreuil, les habitants se battent pour que les entreprises qui ont sali de nombreux terrains les remettent en état. La loi doit aller dans ce sens !

En revanche, nous sommes opposés à votre proposition d'accorder aux maires l'autorisation de ne pas respecter certaines règles ou normes d'urbanisme.

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L'intérêt général humain et environnemental est invariable quelle que soit la ville, et la loi doit être la même pour tous.

Pour conclure, nous pensons utile d'inscrire dans la loi des dispositions visant à encadrer le prix du logement, à la location comme à la vente. Nous essaierons d'enrichir votre proposition de loi au cours des débats, car, mes chers collègues, il y a urgence ! Oui, un toit est un droit pour tous !

Mmes Isabelle Florennes, Élodie Jacquier-Laforge et Maud Petit applaudissent.

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Je voudrais prolonger la réflexion de M. Peu et de M. Corbière, et dire que je me réjouis également de l'initiative de nos collègues du groupe MODEM de nous présenter ce texte, qui nous offre l'opportunité de réfléchir ensemble.

Dans une période aussi incertaine que la nôtre, le mieux que nous ayons à faire ici est de débattre, de mettre nos expériences en commun et de tenter de nous mettre d'accord sur des sujets, monsieur le ministre, qui n'ont, à ma connaissance, pas encore trouvé de solutions. Au fond, vous êtes confronté à de l'impossible, et vous faites face à des contraintes dont la conciliation est impossible. Il me semble très intéressant de pouvoir en discuter.

Je vais parler de ce que je connais. J'ai eu la chance d'être maire pendant une petite quarantaine d'années : à mes débuts, et pendant longtemps, il y avait deux commissions communales, l'une des impôts et l'autre du cadastre. Par bonheur pour moi, elles étaient toutes deux présidées par le maire, le reste de ses membres étant les candidats battus aux précédentes élections municipales. Nous étions obligés de regarder le prix des ventes des maisons, propriétés et bâtiments, avec un représentant des services fiscaux, pour la commission dite des impôts. Le monsieur des impôts savait tout ou venait, quand il ne savait pas, avec deux ou trois collègues, car il y avait souvent des cas inédits dans la commune. Une route était ainsi tracée ! Pour le cadastre, c'était la même chose, et le monsieur du cadastre tenait compte de toutes les modifications qui avaient eu lieu.

Le maire et le conseil municipal pouvaient donc, avant même que la carte communale n'existât et a fortiori après sa création, prendre des décisions de bon sens. Malheureusement, je ne vois plus ces experts, les commissions communales ont disparu, et nous avons sauvé de justesse la fonction de maire !

Quelles réflexions devons-nous nourrir ? La première mesure, qui ne coûterait rien, est de revenir à ce qui a existé et qui a réglé des problèmes fonciers complexes. Pour ce faire, il faut replacer le maire au coeur de la responsabilité territoriale, en en faisant le chef de file de l'ensemble du processus territorial. Il faut abroger la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe – faites remonter ce souhait au patron, même si je ne sais pas s'il vous entendra ! C'est une horreur absolue qui n'est pas de votre fait, mais de celui de M. François Hollande et de M. Manuel Valls, auxquels vous avez fort heureusement succédé – même si ce simple changement ne règle pas tout.

Ensuite, il faudrait réfléchir dans tous les domaines. Il conviendrait en particulier de penser à la relance de la libre administration, car il y a belle lurette que nous n'inventons plus rien en France, à part des interdictions !

Enfin, je vais vous donner une adresse : j'ai travaillé pendant de nombreuses années au sein de l'association Sol et Civilisation, qui a beaucoup réfléchi sur ce sujet, y compris pour ce qui concerne la région parisienne. Monsieur le président, je n'ai pas dépassé mon temps de parole, …

Mme Maud Petit applaudit.

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J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

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La parole est à Mme Pascale Boyer, pour soutenir l'amendement no 52 , proposant une nouvelle rédaction de l'article 1er. Cet amendement fait l'objet d'un sous-amendement no 62 .

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Afin de diminuer la part du foncier dans le coût de la construction, l'amendement vise à supprimer les ventes par adjudication dans les zones tendues, c'est-à-dire dans les communes soumises à la taxe sur les logements vacants – TLV – , là où les enjeux du foncier sont élevés.

Dans les zones détendues, l'amendement autorise les ventes par adjudication des logements, commerces, bureaux et sièges sociaux.

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La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 62 .

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Monsieur le ministre, je vous ai posé des questions lors de la discussion générale : reprendrez-vous la parole pour y répondre ou le ferez-vous au fil de l'examen des amendements ?

Si l'amendement de Mme Boyer était adopté, les autres amendements à l'article tomberaient. Pour moi, ce n'est pas un problème, puisqu'il intègre mon amendement no 53 qu'il ferait tomber. Je souhaite toutefois le sous-amender.

Le quatrième alinéa de l'amendement se lit ainsi : « À l'exception des lots de copropriétés, dans les zones urbaines ou à urbaniser des plans locaux d'urbanisme ou des documents en tenant lieu définies à l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme et dans les communes mentionnées à l'article 232 du code général des impôts, la vente de ces immeubles est obligatoirement effectuée à l'amiable ». Je propose d'ajouter les mots « quand ils sont destinés à du logement abordable » après « effectuée ».

En effet, nous voulons que les ventes des immeubles du domaine privé de l'État se fassent obligatoirement à l'amiable pour développer le parc du logement abordable. Cette précision me semble opportune.

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… mais son adoption aurait un effet totalement inverse à notre objectif. Si nous restreignions la possibilité de recourir à la vente à l'amiable à la seule construction de logements abordables, les communes seraient incitées à bâtir d'autres types de logements. Je suis donc défavorable au sous-amendement.

S'agissant de l'amendement de Mme Boyer, qui vise à n'autoriser les ventes aux enchères que dans les zones détendues, il faut avoir à l'esprit que le processus de vente aux enchères est vicié, délétère et porteur d'augmentations du prix du foncier. Ces augmentations se produiront partout, en zones tendues comme détendues. Leur impact sera effectivement plus fort dans les zones tendues, là où les Français ont énormément de mal à se loger, mais il se fera également sentir sur les prix, demain si ce n'est aujourd'hui, dans les zones détendues.

À titre personnel, je ne voterai pas l'amendement, mais j'émets un avis de sagesse.

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

L'amendement de Mme Boyer est important à plusieurs titres. Un grand changement est en train de s'opérer, avec l'arrêt du tout-adjudication aux enchères. Nous voyons très souvent les effets néfastes de ce système, certes pas partout ni tout le temps, d'où la portée de cette évolution.

Autre raison pour laquelle je donnerai un avis favorable à l'amendement, nous demandons ce changement à l'ensemble des acteurs procédant aux adjudications, M. Bazin en parlait lors de la discussion générale, ce qui n'est pas neutre. C'est facile pour l'État, mais plus difficile pour les collectivités locales. Circonscrire la suppression des ventes aux enchères aux seules zones tendues sécurise juridiquement la rupture à laquelle procède l'article 1er, essentiel à mes yeux, en lui donnant comme justification la poursuite d'un intérêt national, clairement établi, celui d'augmenter le nombre de logements dans les zones où il en manque.

Je ne sais plus si la question était posée par M. Potier ou M. Peu, mais il est évident que l'article s'appliquera non seulement à l'État, mais aussi à ses « agences » comme le Grand Paris Aménagement – GPA – , etc. L'amendement apporte une sécurisation juridique importante.

Sur le sous-amendement, je partage totalement les propos de M. le rapporteur. La définition du logement abordable est très complexe, surtout avec les évaluations que nous menons sur les dispositifs de défiscalisation.

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Monsieur le ministre, j'estime comme vous que l'amendement va dans le bon sens. Il est adapté aux réalités de certains territoires, notamment les zones détendues, s'agissant des immeubles cédés par les collectivités territoriales qui ne sont pas destinés à accueillir des logements.

Toutefois, le discours consistant à affirmer que nous allons mettre un terme au tout-enchères me pose problème. En réalité, dans la plupart des communes situées en zone tendue, le foncier public n'est pas mis en vente aux enchères.

Je l'ai constaté à Metz, et Richard Lioger, co-rapporteur de la mission d'information sur l'application de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique – ELAN – , pourrait en témoigner. Il en va de même à Nancy. La plupart des biens fonciers publics sont vendus à un prix fixé. Tel est notamment le cas dans le cadre des sociétés d'économie mixte – SEM – et des zones d'aménagement concerté – ZAC.

Lorsque les collectivités territoriales cèdent des biens fonciers aux enchères, elles le font le plus souvent en fonction de certains critères, dont la qualité du projet, mais elles s'enquièrent aussi du prix de cession des logements envisagé par l'acquéreur. En général, une discussion s'engage : « Si je vous vends le terrain à ce prix, vous vous engagez à vendre les logements à tel prix ». Tout au long d'une dizaine d'années de pratique dans des communes situées en zone tendue, j'ai observé que les terrains publics ne sont pas vendus aux enchères.

Si l'ambition dont procède l'amendement est louable, il faut, me semble-t-il, faire preuve d'une grande prudence, et ne pas faire croire aux Français que nous allons subitement révolutionner les choses. En réalité, la vente aux enchères concerne très peu de cas.

En outre, c'est surtout l'État qui y a recours. Sauf s'il s'agit d'un établissement public foncier achetant pour le compte d'une commune, auquel cas on retrouve une procédure à l'amiable. En général, ces transactions relèvent de la responsabilité de l'État, par le biais du service des Domaines.

Il est un peu dommage de ne pas connaître la position de Bercy, car nous courons le risque de voir les biens fonciers concernés systématiquement classés comme biens d'exception, ce qui aurait pour effet de les exclure du champ de la présente proposition.

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Le groupe Libertés et territoires ne soutient pas l'amendement, pour les raisons avancées par M. le rapporteur. Limiter la suppression des adjudications aux zones tendues, c'est mal connaître la pratique et les territoires. Chacun sait que cette procédure a un effet d'enchérissement du foncier, y compris dans les zones détendues.

C'est également – comme je l'ai rappelé dans le cadre de la discussion générale – ignorer que les ventes de gré à gré permettent de valoriser certains critères, tels que la mixité sociale ainsi que la qualité architecturale, paysagère et environnementale. Il faut, me semble-t-il, appréhender la proposition de loi dans son ensemble.

Enfin, l'amendement dénature la proposition de loi à l'orée de son examen.

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En commission, nous sommes parvenus à un compromis intéressant, fait d'équilibres largement partagés. Je regrette : si nous revenons, dès l'article 1er, sur certains aspects du consensus auquel nous sommes parvenus, nous hypothéquons les débats qui vont suivre.

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Chers collègues, vous ne serez pas surpris que je soutienne la position exprimée par Mme Pinel et M. le rapporteur. Il faut veiller à ne pas dénaturer le texte. Il ne faudrait pas que ce bel article visant à limiter le recours aux enchères fasse « pschitt » pour des raisons de sécurité juridique. Il importe d'en conserver l'esprit.

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J'illustrerai mon propos en dressant une comparaison avec un marché que je connais mieux, celui du foncier agricole. Le simple exercice de leur droit de préemption par les SAFER – société d'aménagement foncier et d'établissement rural – sur 1 % des projets de vente qui leur sont notifiés sert d'indicateur pour assainir le marché. Ainsi, même en agissant sur des flux très faibles, on obtient un effet de levier sur le marché du foncier dans son ensemble.

Celui-ci n'est pas limité aux zones – tendues ou détendues – que nous avons définies. Il est nécessairement de dimension nationale, pour le moins. Tout signal, même émis uniquement dans les zones détendues, a des effets délétères, et peut avoir en conséquence, par ricochet, un effet sur les zones tendues.

Il faut, me semble-t-il, appréhender l'article 1er dans son acception complète. Le principe même d'un prix juste, dont la fixation échappe au marché, me semble aller dans le sens des objectifs que nous visons.

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Madame Pinel, l'objectif de la proposition de loi est de travailler sur les zones tendues, …

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… il est donc normal que l'interdiction des cessions par adjudication soit restreinte aux zones tendues.

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Par ailleurs, l'amendement tient compte des spécificités des territoires.

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En effet, les ventes de maisons éclusières ou forestières et de lots de copropriété ne seront pas soumises à l'adjudication. Cher collègue Bazin, vous affirmez que les territoires ne sont pas pris en considération.

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Il faut prendre en considération la nécessité, pour les communes situées en zone détendue, de recourir à la vente par adjudication, afin de disposer d'une base pour la fixation du prix de leurs biens fonciers.

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C'est précisément ce que j'ai dit ! Je suis le seul orateur à vous avoir soutenue !

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Le débat sur l'application aux territoires des dispositions votées ici est très clairement tranché. La politique que nous tâchons de mettre en oeuvre est évidemment destinée à tous les territoires.

Lors de la présentation du texte, j'ai insisté sur la nécessité, d'une part, de produire des logements à prix abordable et, d'autre part, de rénover ceux qui existent. Par ailleurs, vous m'avez déjà entendu dire que je suis favorable à une décentralisation et à une territorialisation de la politique du logement aussi massives que possible.

Toutefois, j'insiste sur un point : les dispositions de l'article 1er, qui sont essentielles, ont fait l'objet d'une évaluation juridique attentive. Limiter leur application aux zones tendues permet de les justifier au titre de l'intérêt national. En effet, ces zones présentent des problèmes spécifiques en raison d'une rareté accrue du foncier.

La rédaction prévue par l'amendement renforce donc la solidité juridique de l'article 1er, qui est essentiel à mes yeux, je le répète, car il va vraiment dans le bon sens.

Le sous-amendement no 62 n'est pas adopté.

L'amendement no 52 est adopté ; en conséquence, les amendements nos 24 , 41 , 38 , 53 , 54 et 30 tombent et l'article 1er est ainsi rédigé.

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La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 33 , tendant à la suppression de l'article.

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La procédure prévoit que nous examinions les amendements de suppression avant les autres. Celui-là est en fait plutôt un amendement d'appel.

Il vise à inciter à la vigilance s'agissant d'un dispositif, certes très intéressant, mais qui mériterait de faire l'objet d'une évaluation, car il est très récent. Des questions ont été soulevées, notamment lors des auditions, au sujet des garanties bancaires.

Cette question n'est pas négligeable, dès lors que l'accession à la propriété a lieu en deux temps. Si le concept est intéressant, il importe de le préciser et de se pencher sur sa traduction concrète. Son application à l'accession à la propriété sous cette forme n'est pas si évidente qu'il n'y paraît.

Je pense très sérieusement qu'il faut prendre le temps d'une telle évaluation, sans exclure de revenir sur le dispositif, afin d'éviter tout biais lors de son extension.

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L'article 2 est majeur dans l'économie générale de la proposition de loi. Il permet la dissociation du foncier et du bâti, en vue de présenter des offres de logement abordables aux Français.

À l'heure actuelle, les OFS sont un véritable succès. Les premiers logements loués dans le cadre d'un BRS seront livrés dans quelques semaines. Leur inauguration aura lieu au mois de décembre.

Les OFS traitent la question de l'accession sociale à la propriété en soumettant celle-ci à des conditions de ressources. Nous avons décidé d'étendre ce régime pour permettre aux classes moyennes d'accéder à la propriété en zones tendues, grâce à la dissociation entre le foncier et le bâti. L'article 2 est donc, en quelque sorte, le coeur même du réacteur. Vous comprendrez que j'émette un avis défavorable à sa suppression.

L'amendement no 33 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

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La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no 43 .

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Défendre un amendement visant à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances est toujours un exercice malaisé, surtout s'il s'inscrit dans le cadre d'une proposition de loi, et plus encore s'agissant d'un article relatif à un dispositif auquel le Gouvernement – et, dans le cas singulier, le ministre que je suis – est profondément attaché, comme il l'a démontré depuis deux ans en se battant sans relâche en sa faveur.

De quoi s'agit-il ? Nous constatons que la part du foncier dans le coût de sortie des opérations immobilières est de plus en plus importante. Ménager la possibilité de proposer à nos concitoyens des logements plus abordables en dissociant le coût du foncier de celui du bâti est très certainement une bonne solution.

Il s'agit d'une approche totalement nouvelle des actes de propriété et de la production de logements tels que nous les connaissons. Je suis profondément persuadé qu'il faut l'étendre, dans le respect du libre choix de nos concitoyens.

Une question vaut tout de même d'être posée – c'est ce que vient de faire M. Bazin : sait-on si les dispositifs déjà adoptés fonctionnent ?

Ce qui est très positif, c'est que nous pouvons nous appuyer sur ce qui a été réalisé – les OFS et les BRS. Les dispositifs d'accession sociale à la propriété existent ; nous nous interrogeons aujourd'hui pour savoir s'il faut les étendre tels quels à l'accession libre à la propriété ainsi qu'à l'accession à la propriété de logements intermédiaires.

S'agissant de l'accession sociale à la propriété, le retour d'expérience démontre que le dispositif fonctionne. J'en veux pour preuve le fait qu'il existait une demi-douzaine d'OFS au début de l'année 2018, et que nous avons atteint, au moment où je vous parle, le chiffre de dix-neuf OFS en cours de constitution.

Comme l'a rappelé M. le rapporteur, les premiers logements réalisés dans le cadre des OFS sont sortis de terre. Que les collectivités territoriales fassent preuve d'une telle appétence pour ce dispositif suggère qu'il est particulièrement judicieux.

Un deuxième point me semble très important. Comment en sommes-nous arrivés à la situation actuelle en matière d'accession sociale à la propriété par le biais du dispositif consistant à séparer le foncier et le bâti ? En trois ou quatre années de travail – objectivement. Lorsque je participais à l'élaboration de la loi dite Macron au ministère de l'économie et des finances, en 2015-2016 …

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Cela fait donc plus de deux ans que vous êtes au pouvoir !

Sourires.

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

… je me souviens que nous travaillions déjà sur les baux réels solidaires, modifiant certaines dispositions de la loi ALUR, qui les a créés.

Pourquoi cela a-t-il été aussi long ? Il ne faut surtout pas perdre de vue la finalité du dispositif, qui est certes de produire des logements abordables – chacun en est convaincu – , mais qui est aussi de faire en sorte que nos concitoyens accèdent bel et bien à ces logements et de lutter contre toute forme de spéculation.

Cela soulève la question incroyablement compliquée de l'encadrement de la spéculation : elle ne peut certainement pas être résolue en un claquement de doigts. Par ailleurs, cela signifie que les collectivités locales doivent faire partie des gagnants en matière de création de valeur sur le foncier. Comme l'a rappelé tout à l'heure un orateur à très juste titre, elles contribuent à la valeur du bâti, notamment grâce à l'aménagement du territoire.

Il faut donc protéger l'accédant, conforter la production de logements abordables, et examiner le périmètre pertinent, qui peut ne pas concerner seulement le logement, comme nous le propose aujourd'hui cette proposition de loi, mais aussi les locaux commerciaux ; bref, il s'agit de définir le système le plus performant, le plus stable, le plus crédible possible. Pour cela, une ordonnance me paraît nécessaire.

Bien sûr, il n'est jamais satisfaisant qu'un ministre propose aux parlementaires d'habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance.

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Mais j'ai, je crois, démontré depuis deux ans et demi ma volonté d'avancer sur ce sujet. Je m'engage à agir le plus rapidement possible, en lien avec votre rapporteur et avec les députés.

C'est un modèle auquel je crois très profondément, et c'est précisément pour cette raison que je veux qu'il soit totalement sécurisé : personne ne doit pouvoir en déduire qu'il y aurait de la spéculation ni ressentir une appréhension au motif que le droit de propriété serait modifié. Nous voulons respecter l'objectif du texte – produire du logement abordable par la dissociation du foncier et du bâti – en préservant son caractère ambitieux et en assurant l'efficacité au service des Français, tout en luttant contre toute spéculation éventuelle – en la matière, je m'engage à protéger un tel système.

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J'avais annoncé en commission que l'instauration de ce troisième droit de propriété nécessiterait la création de ces organismes de foncier libres, mais aussi d'un bail réel libre ; en particulier, il faut rendre rechargeable le bail emphytéotique. J'avais également annoncé que le Gouvernement nous aiderait sans doute à aller plus vite que nous ne le pourrions ; il va même un peu plus loin aujourd'hui.

La commission a accepté l'amendement.

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Ce dispositif est très intéressant, je l'ai dit, mais nous devons l'examiner très concrètement, à la fois à l'échelle macro et à l'échelle micro.

Aujourd'hui, un candidat à l'accession sociale à la propriété bénéficie d'un accompagnement ; il y a une ingénierie. Certaines clauses lui permettent même de faire marche arrière, s'il se rend compte qu'il est trop fragile.

L'accession « abordable » n'est pas encore précisément définie, mais elle s'adressera aussi à des personnes qui n'entrent pas dans le champ de l'accession sociale. Il faudra veiller aux conditions qui seront proposées, notamment par les banques, à celles qui ne seraient pas soutenues comme les candidats à l'accession sociale à la propriété le sont aujourd'hui. Le succès des baux réels solidaires est aussi lié à l'action d'organismes compétents, qui savent accompagner les candidats.

Ce nouvel outil ne pourra pas être mis en place sans s'intéresser aux garanties. Que se passera-t-il en cas de défaillance de candidats qui ne seraient pas soutenus pas de tels organismes ?

L'amendement no 43 est adopté ; l'amendement no 31 tombe et l'article 2 est ainsi rédigé.

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La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 13 .

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Cet amendement demande que, dès la création d'un observatoire de l'habitat et du foncier, l'inventaire des actifs fonciers de l'État dans le périmètre de compétence de cet observatoire soit mis à jour.

Il faut à notre sens saisir cette occasion pour dresser un inventaire complet – il y a aujourd'hui trop de politiques en silos, trop de lois inopérantes. Nous pourrions ainsi examiner toutes les possibilités de dépollution, de réaffectation d'îlots fonciers pour des desseins collectifs, qu'ils soient le fait d'acteurs publics ou privés.

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Cet amendement a déjà été présenté en commission ; il avait reçu un avis défavorable, que je renouvelle.

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Même avis. Les bases de données sont déjà nombreuses, et je vous propose plutôt de travailler sur l'existant, afin de comprendre ce qui pourrait faire défaut.

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La question du foncier public de l'État doit être à mon sens considérée avec une plus grande attention. Lorsque l'on recherche du foncier, par exemple pour créer des aires de grand passage, il arrive que l'on identifie du foncier public qui n'était pas connu des collectivités territoriales ! Les dévolutions d'actifs n'ont pas toujours été faites. Je pense notamment à la SEITA – société nationale d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes – qui était une régie d'État : lors de cessions de foncier, les actes notariés n'ont pas toujours fait apparaître l'État comme propriétaire.

L'administration fiscale devrait donc mener un long travail de mise à jour de l'inventaire des actifs fonciers de l'État. Si je vous ai bien écouté, monsieur le ministre, vous vous engagez à relever ce défi ; c'est, je crois, ce que vous demande légitimement Dominique Potier.

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C'est un amendement d'appel, monsieur le ministre : je suis vraiment volontaire, avec d'autres, comme M. Bazin, pour ouvrir un dialogue avec vous-même et avec vos services sur ces sujets.

L'armée, par exemple, se retire de plus en plus de nos territoires. Or, on parle d'appels à projets ou à manifestation d'intérêt en matière de production d'énergie photovoltaïque, on parle de terres nourricières, on parle d'opérations de logements complexes… mais on voit aussi parfois l'État se comporter en vendeur de biens opportuniste, sans prise en considération des projets des collectivités territoriales et des EPF – établissements publics fonciers. On voit des administrations incapables de se parler pour former un îlot commun et répondre aux attentes des collectivités. Bref, pour que chaque parcelle de terre soit utile pour relever les défis de demain, il nous faut un inventaire, un dessein stratégique ; en particulier, lorsqu'il s'agit de dépollution, nous devons pouvoir prendre l'initiative de rechercher les pollueurs pour en faire des payeurs.

Cette cartographie constituerait un véritable outil de pilotage. L'État ne peut pas donner des leçons de planification aux collectivités s'il ne livre pas lui-même les biens dont il est dépositaire, qui, de surcroît, constituent souvent une charge pour lui – l'armée doit entretenir un foncier important pour des raisons qui remontent parfois au XIXe siècle. Il y aurait une belle opération de remembrement des biens de l'État, des biens des collectivités territoriales et des biens privés à mener à l'échelle nationale.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Le code de la construction et de l'habitation prévoit déjà l'existence de telles bases de données pour les biens de l'État, et la loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté prévoit qu'elles doivent être mises à la disposition des collectivités territoriales.

Il s'agit donc de mettre en pratique un droit existant : travaillons sur le sujet avec les services de l'État, les préfectures… pour avancer plus vite.

L'amendement no 13 n'est pas adopté.

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Je suis saisi de deux amendements, nos 66 et 14 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no 66 .

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Cet amendement est lié à d'autres que nous examinerons par la suite.

En l'état actuel de la proposition de loi, l'obligation de mise en place d'observatoires de l'habitat et du foncier deux ans au plus tard après que le programme local de l'habitat – PLH – ou le plan local d'urbanisme intercommunal valant PLH – PLUI-H – a été rendu exécutoire est restreinte aux EPCI situés en zone tendue. Nous proposons, avec cet amendement, de généraliser cette obligation.

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La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 14 .

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Dans le même esprit que celui du débat sur les enchères en zones tendues ou non tendues, nous estimons qu'il faut mettre en place ces observatoires sur l'ensemble du territoire, et à l'échelle de chaque schéma de cohérence territoriale – SCOT.

Nous proposons donc d'étendre l'obligation de créer des observatoires de l'habitat et du foncier, dans une logique de simplification ; les SCOT doivent être des outils de coopération, de planification et de programmation. Il ne faut pas réserver ce dispositif aux zones tendues disposant d'un PLH.

Monsieur le ministre, s'agissant de la discussion précédente, nous ne faisions que nous inspirer d'une recommandation de la Cour des comptes sur l'optimisation de la gestion du foncier de l'État. Ce travail est essentiel.

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Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion commune ?

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Elle est favorable à l'amendement du Gouvernement et défavorable à l'amendement no 14 .

Monsieur Potier, je comprends l'esprit de votre proposition. Vous avez évoqué les SCOT mais votre amendement concerne évidemment aussi le plan d'aménagement et de développement durable de la Corse – PADDUC – territoire particulier que vous défendez avec raison. Nous avons décidé en commission de rattacher les observatoires du foncier aux PLH, afin qu'ils soient établis au plus près des territoires. À notre sens, le SCOT n'est pas la bonne échelle.

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Je ne ferai pas de rappel au règlement, car notre rapporteur est courtois et recherche le consensus ; mais on ne peut pas dire que la commission soit favorable à l'amendement du Gouvernement : elle a, au contraire, voté de son propre chef la restriction aux zones tendues de l'obligation de créer ces observatoires.

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Qu'ils soient obligatoires dans les zones tendues, pourquoi pas ? Mais n'étendons pas cette obligation aux collectivités qui, situées en zone non tendue, ont fait le choix de mettre en place des PLH alors qu'elles n'y étaient pas obligées. Certaines ont choisi, d'ailleurs, de créer un tel observatoire. Mais ne chargeons pas la barque : il n'y a pas partout de problèmes fonciers ; un partenariat intelligent avec l'établissement public foncier local permet parfois de mener des études. Étendre l'obligation à l'ensemble du territoire, qui plus est pour des PLH déjà exécutoires, serait un très mauvais signal envoyé aux collectivités, dans un contexte budgétaire tendu.

L'amendement no 66 est adopté et l'amendement no 14 tombe.

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La parole est à Mme Pascale Boyer, pour soutenir l'amendement no 56 .

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Cet amendement vise notamment à renforcer les missions des observatoires du foncier, par l'ajout d'une mission d'analyse de la conjoncture des marchés fonciers et immobiliers. Cette proposition mesurée leur permettra notamment de se pencher sur les enjeux de la maîtrise des coûts du foncier et de la limitation de l'étalement urbain.

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Je remercie Mme Boyer pour cette proposition qui s'inscrit dans le droit fil du rapport de mission que j'ai remis au ministre il y a quelques semaines et des discussions que nous avons eues en commission. Avis favorable, donc.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Même avis.

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Je comprends votre intention, madame Boyer, lorsque vous demandez que les observatoires analysent la conjoncture des marchés fonciers et immobiliers. Mais pour avoir, comme plusieurs d'entre nous, participé à l'élaboration de PLH, je sais que les observatoires de l'habitat créés par ces plans s'acquittent déjà d'une telle mission. Votre proposition est donc un peu redondante. Je voterai pour l'amendement, mais je ne suis pas sûr qu'il apporte quelque chose.

L'amendement no 56 est adopté.

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La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, pour soutenir l'amendement no 47 .

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Il précise le champ d'intervention des observatoires du foncier. Certaines collectivités définissent avec les promoteurs des chartes dans lesquelles sont fixés les prix de vente des logements sociaux, des logements intermédiaires et des logements en accession sociale. Pour que ces données puissent être connues, il convient que l'observatoire du foncier en assure le suivi et la publication.

J'en profite pour rassurer M. Bazin au sujet des observatoires du foncier : leur création sera obligatoire dans les zones tendues et dans les EPCI dont l'une au moins des communes membres se trouve en zone tendue, mais facultative ailleurs.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Les missions attribuées aux observatoires du foncier sont déjà nombreuses, et nous devons faire attention à ce que la publication des informations relatives au prix de vente des logements sociaux, intermédiaires et en accession sociale ne soit pas celle de trop. C'est pourquoi je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

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J'ai bien compris, monsieur le rapporteur, que vous présentiez cet amendement à titre personnel – il n'a pas été examiné en commission. Je m'interroge cependant sur le fait que votre amendement évoque les prix de vente des logements sociaux, alors que ceux-ci sont normalement destinés à la location.

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Il conviendrait alors de rectifier l'amendement en précisant qu'il concerne les données relatives aux prix de vente « des logements sociaux destinés à la vente ».

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Mais le prix de VEFA est celui de la vente de logements clé en main. Certains maîtres d'ouvrage disposent en interne de ressources suffisantes pour lancer des opérations, mais d'autres préfèrent passer par la VEFA si celles-ci s'avèrent trop complexes, ou s'ils veulent accélérer la production de logements aidés.

Pour que la publication par l'observatoire des données relatives à la VEFA soit pertinente, et afin que l'analyse soit complète, il faudrait y ajouter le coût de la construction en régie de ces logements.

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Une fois n'étant pas coutume, je ne suis pas tout à fait d'accord avec mon camarade Bazin… Il me semble important d'étendre les compétences des observatoires afin qu'ils publient les informations relatives aux prix de VEFA. Peut-être vous en rappelez-vous, nous avons abordé le sujet au moment de l'examen de la loi ELAN : les VEFA donnent lieu à des abus incroyables, le prix des mêmes logements sociaux, au même endroit, pouvant varier de 30 % ou 40 %. Or ils sont financés par de l'argent public. Un encadrement s'impose donc, et les observatoires sont là pour l'assurer.

L'amendement no 47 est adopté.

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La parole est à Mme Sylvia Pinel, pour soutenir l'amendement no 50 .

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Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, il vise à renforcer le rôle des observatoires de l'habitat et du foncier et à conférer une plus grande valeur juridique à leurs interventions en soumettant leur création à un agrément, sur le modèle des observatoires des loyers. Il s'inspire ainsi de l'excellent rapport remis au Gouvernement par M. Lagleize, lequel préconisait d'améliorer la transparence du marché foncier en s'appuyant sur des éléments beaucoup plus fiables et en suivant une méthodologie rigoureuse.

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Vous avez raison, madame Pinel : il faudrait, à terme, que les observatoires du foncier soient suffisamment impartiaux pour être considérés comme de véritables arbitres en matière de prix des logements et du foncier. Néanmoins, nous avons décidé ensemble, en commission, de les rattacher aux PLH, du moins dans un premier temps, ce qui a pour effet d'en faire des instances d'observation plutôt que d'arbitrage.

Sans doute faudra-t-il, à terme, en venir à une labellisation, ou peut-être à l'attribution d'un statut analogue à celui des observatoires des loyers. On pourra ainsi faire droit à la proposition de M. Peu d'instaurer un droit de préemption en cas de prix manifestement exagéré, ce qui n'est pas possible aujourd'hui. Mais je propose de renvoyer la question à nos successeurs ; laissons d'abord les observatoires s'installer et travailler. Je vous demande donc de retirer l'amendement : nous devons aller dans le sens qu'il indique, mais pas tout de suite.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Même demande de retrait, pour les mêmes raisons.

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J'aimerais pouvoir faire confiance à nos successeurs, à plus d'un titre, d'ailleurs,

Sourires

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mais l'expérience m'a montré que, d'une législature à l'autre, les orientations peuvent varier.

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Parfaitement, cher collègue. Sur le prêt à taux zéro, par exemple, je pense que nous sommes d'accord tous les deux, mais un peu moins avec le ministre.

Cela étant, je comprends que ma proposition ne soit pas réalisable aujourd'hui. Je retire donc l'amendement. Je voulais que le débat ait lieu parce que je considère que, pour que cette proposition de loi, qui sera vraisemblablement adoptée, soit efficacement appliquée dans l'ensemble de nos territoires, il faut garantir l'impartialité des observatoires. Nous avons l'exemple des observatoires des loyers, qui ont non seulement amélioré la transparence, mais fournissent aussi des références qui, dans bien des territoires, ont un effet sur les exigences de certains propriétaires. De même, si les observatoires de l'habitat et du foncier appliquent une méthodologie d'une rigueur quasi-scientifique et s'ils sont agréés à ce titre, leur action aura elle aussi un effet sur les transactions immobilières. Je conçois qu'il s'agit là d'un objectif de long terme mais – je le dis à M. le ministre – il ne faut pas le perdre de vue si nous voulons obtenir des résultats dont nos concitoyens bénéficieront.

L'amendement no 50 est retiré.

L'amendement no 32 rectifié est adopté.

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Il en est de même de l'amendement no 4 rectifié du même auteur.

La parole est à M. Thibault Bazin.

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Quand on crée des observatoires, la plus grande difficulté est de recueillir des données fiables. En effet, le système repose souvent uniquement sur les déclarations des promoteurs et des monteurs d'opérations. Comme le disait Stéphane Peu, on constate parfois des abus, des mobilisations de fonds propres, y compris de la part de certains bailleurs, sur des terrains où il est franchement étonnant que le prix du foncier atteigne un tel niveau.

Or c'est l'État qui dispose des données foncières fiscales. Il faut donc qu'il s'engage. L'agrément réclamé par Mme Pinel vise aussi à ce que l'État transmette ces données. Les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement – DREAL – ont certes des services très compétents, mais les données dont ils disposent ne concernent souvent que les volumes. Il faudrait donc que les services de Bercy les complètent par des éléments portant sur le niveau de prix. Or si vous obligez les collectivités à créer des observatoires fonciers, il faut que, réciproquement, l'État s'engage à transmettre rapidement les données qualitatives dont il dispose.

L'amendement no 4 rectifié est adopté.

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Je salue, mes chers collègues, la présence dans les tribunes du Premier ministre de la République centrafricaine, M. Firmin Ngrebada.

Mmes et MM. les députés ainsi que M. le ministre chargé de la ville et du logement se lèvent et applaudissent.

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Nous reprenons la discussion des articles de la proposition de loi visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français.

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Je suis saisi d'un amendement no 57 qui fait l'objet d'un sous-amendement no 63 .

La parole est à Mme Pascale Boyer, pour soutenir l'amendement.

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Il vise à déterminer le périmètre dans lequel doit s'exercer l'action de l'observatoire du foncier. Ce doit être la totalité du territoire de l'EPCI, même si certaines de ses communes ne sont pas en zone tendue, l'objectif étant de préserver la cohérence de la politique locale de l'habitat.

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La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 63 .

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L'amendement no 27 tomberait si le no 57 était adopté. Ce sous-amendement en reprend donc le contenu et vise à modifier les délais fixés dans l'amendement afin de ne pas imposer de nouvelles charges aux collectivités qui viennent à peine de consacrer une part non négligeable de leur budget au financement d'études requises pour les PLH et les PLU, surtout quand ces collectivités ne sont pas en zone tendue et n'ont pas, normalement, à respecter les obligations qui s'y attachent.

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Quel est l'avis de la commission sur cet amendement et ce sous-amendement ?

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L'amendement de Mme Boyer reflète fidèlement les travaux de la commission : il précise les lieux auxquels s'applique l'obligation de créer un observatoire du foncier, c'est-à-dire toutes les zones tendues et tous les EPCI dont au moins une commune se trouve en zone tendue. La commission en ayant débattu, son avis est tout à fait favorable.

M. Bazin souhaite exclure de cette obligation toutes les communes qui ont déjà adopté un PLH. Cette restriction n'irait pas du tout dans le sens de la mécanique que nous souhaitons créer. Ce sous-amendement n'a pas été examiné par la commission, mais j'y suis défavorable à titre personnel.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Même avis, pour les mêmes raisons.

Le sous-amendement no 63 n'est pas adopté.

L'amendement no 57 est adopté ; en conséquence, l'amendement no 27 tombe.

L'article 3, amendé, est adopté.

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Je suis saisi de deux amendements, nos 16 et 15 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.

La parole est à M. Dominique Potier, pour les soutenir.

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Le premier amendement vise à affirmer que les établissements publics fonciers de l'État constituent l'outil de programmation des schémas de cohérence territoriale.

Le second a pour objet d'instaurer à l'échelon régional une mutualisation de la gestion des espaces fonciers à laquelle prendraient notamment part les EPF et les SAFER. À défaut d'être regroupés au sein d'une autorité publique, les organismes compétents optimiseraient ainsi leurs relations au service d'une vision holistique du foncier, vision qui manque terriblement aux collectivités, comme il ressort des arguments précédents.

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Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

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Ces amendements visent à faire des EPF des outils stratégiques, alors qu'ils ne sont que des outils de mise en oeuvre des stratégies. Cela leur imposerait des tâches qu'ils ne savent pas remplir ou du moins ne sont pas équipés pour remplir.

Monsieur Potier, vos amendements ne me paraissent pas tout à fait au point : nous pourrons y travailler, si vous voulez. En attendant, je vous propose de les retirer ; à défaut, l'avis de la commission sera défavorable.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Ces amendements se situent dans le prolongement de la discussion que nous avons eue tout à l'heure. Les EPF participent aux SCOT ; la question consiste à savoir s'ils doivent devenir l'acteur local par excellence de leur programmation.

Je partage votre constat : il faut que les EPF deviennent des acteurs de l'aménagement et soient plus étroitement liés aux SAFER, mais aussi aux politiques d'aménagement industriel et bien entendu de maîtrise du foncier. Ils peuvent également jouer un rôle majeur dans la préservation environnementale de nos territoires.

Depuis un an, pour tout vous dire, j'ai resserré l'animation des EPF. Je vois régulièrement leurs directeurs généraux afin de leur attribuer des feuilles de route très claires. Il serait bon de poursuivre ce travail pour concilier les transitions en matière de logement mais aussi industrielle, agricole, environnementale, ainsi que pour renforcer le rôle des EPF en binôme avec les EPA, les établissements publics d'aménagement, et en relation avec d'autres acteurs comme les SAFER.

Par conséquent, je demande le retrait de ces amendements, mais en souhaitant pouvoir y travailler.

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Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, j'entends vos arguments ; mais, s'agissant de réformes, je m'étonne de cette relative tiédeur d'un Gouvernement qui n'y va pas avec le dos de la cuillère concernant d'autres sujets.

Il faut une simplification si nous voulons dans ce pays une autorité foncière digne de ce nom, une puissance publique juste et forte. Rien de pire que la justice sans force ; quant à la force sans justice, vous savez ce qu'il en est. Le temps n'est pas encore venu de débattre d'une autorité foncière qui se substituerait aux EPF et aux SAFER : un autre texte nous en fournira peut-être l'occasion. Mais considérer que les EPF sont de facto en rapport avec les SAFER, ce serait créer une instance de planification dans le même espace, la même gouvernance, avec une mise en oeuvre opérationnelle au même échelon. Nous y gagnerions considérablement.

Chaque fois qu'il y a confusion au sein de la puissance publique, celle-ci est affaiblie, ce qui favorise la marchandisation et profite aux spéculateurs. Nous proposons une logique d'efficience, d'effectivité, pour reprendre un mot cher au Président de la République. Vous hésitez à la suivre : j'espère donc que le dialogue se poursuivra et, en attendant, je maintiens mes amendements.

Les amendements nos 16 et 15 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

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La parole est à M. Alexandre Freschi, pour soutenir l'amendement no 49 .

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Mon amendement initial ayant été déclaré irrecevable en application de l'article 40 de la Constitution, je vous propose un amendement de repli. Il vise à appliquer en partie et à titre expérimental la proposition no 8 de l'excellent rapport de M. Lagleize sur la maîtrise des coûts du foncier dans les opérations de construction.

Cette proposition avait pour objectif de faciliter l'accès à des documents d'urbanisme efficaces et cohérents, en renforçant la dématérialisation et la transparence des données. Elle suggérait donc de lancer une mission de préfiguration visant à constituer une base de données unique pour les politiques publiques du logement et de l'immobilier. Cette mesure me semble importante, voire essentielle, pour la bonne information de nos élus locaux.

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Monsieur Freschi, votre idée va dans le bon sens, mais l'échelon départemental n'est pas forcément approprié à la création de cette base de données unique.

Il faudra bien en venir à celle-ci, car il existe aujourd'hui soixante-douze bases de données dans le domaine du foncier. M. le ministre nous dira ce que le Gouvernement compte faire en faveur de cette harmonisation. En revanche, à l'instant où nous parlons, tout n'est pas mûr pour mettre en place la base de données que vous nous proposez : elle risquerait d'être totalement inefficiente.

La commission n'a pas examiné cet amendement. Je vous demande de le retirer ; à défaut, l'avis de la commission sera défavorable.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Il existe déjà une base de données, issue des bases fiscales, qui recense les parcelles cadastrées et les biens immobiliers sur l'ensemble du territoire ; mais elle n'est pas disponible en open data. Cela pose à la fois la question d'une base départementale et celle de sa diffusion aux collectivités locales.

Beaucoup de choses sont déjà en cours, et nous allons poursuivre ce travail avec vous. Néanmoins, il ne me semble pas nécessaire de modifier la proposition de loi. Je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis du Gouvernement serait défavorable.

L'amendement no 49 est retiré.

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Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 37 et 42 , tendant à supprimer l'article 4.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no 37 .

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Il propose la suppression de cet article, lequel a pour objet la création d'un fonds pour la dépollution des friches. Le Gouvernement, en lien avec la majorité présidentielle, travaille ardemment et depuis longtemps sur le sujet des friches, qui constitue un immense enjeu d'aménagement du territoire. C'est toute notre politique de revitalisation et de rénovation : je n'y reviens pas.

On sait depuis toujours que l'obstacle majeur à l'aménagement des friches réside dans le coût de leur dépollution, qui peut compromettre l'équilibre financier voire la viabilité de l'opération. Faut-il créer un fonds visant à soutenir et financer la dépollution ? Cette question en suscite d'autres : comment s'appliquerait le principe pollueur-payeur ? Ce n'est pas neutre. Qui alimenterait ce fonds ? La proposition de loi prévoit que cette charge revienne au groupe Action logement, organisme paritaire dont il est souvent fait mention dans cet hémicycle.

Depuis que je suis ministre, j'ai signé avec Action logement une convention quinquennale de 15 milliards d'euros et un plan d'investissement volontaire de 9 milliards d'euros. Ce sont en tout 24 milliards d'euros de soutien à des mesures telles que la construction de logements sociaux ou la transformation de 200 000 baignoires en douches, dont j'ai déjà eu l'occasion de vous parler.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Merci, monsieur le député. Quoi qu'il en soit, ce n'est objectivement pas la mission d'Action logement que de financer des opérations de dépollution.

Par ailleurs, nous avons constitué des groupes de travail pour lutter contre l'artificialisation des sols et pour trouver des solutions notamment en matière d'aménagement des friches. Prenons un exemple qui fait écho à vos propos, monsieur Potier : l'un des thèmes que j'ai mis à l'ordre du jour de notre feuille de route pour les EPF et les EPA est le devenir des vastes surfaces de parking qui se trouvent dans nombre de friches industrielles. Nous savons tous qu'elles ont la propriété infernale – c'est l'ingénieur des Eaux et Forêts qui vous parle – de conduire massivement aux inondations que l'on constate ici et là.

Ces travaux sont en cours ; une nouvelle fois, je m'engage à les poursuivre avec la méthode qui est la mienne ; mais ils ne sont pas encore achevés. La création par voie législative d'un fonds pour la dépollution des friches financé par Action logement serait donc prématurée, d'autant qu'il convient de faire attention à l'application du principe pollueur-payeur. Voilà pourquoi je présente cet amendement.

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La parole est à Mme Nadia Hai, pour soutenir l'amendement no 42 .

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Je ne vais pas revenir sur les propos de M. le ministre, auxquels je souscris, mais seulement sur le fait qu'Action logement ne me semble pas le bon outil pour financer les opérations de dépollution des friches. Mieux vaut passer par l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, qui, de mémoire, a lancé un appel à projets dans ce domaine.

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Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques ?

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La commission a estimé la semaine dernière qu'elle accepterait bien volontiers ces amendements de suppression si le thème de la dépollution des friches de centre-ville en vue de la construction de logements – que ces friches soient industrielles, commerciales, administratives ou autres – était abordé par ailleurs, notamment au sein des groupes de travail de Mme Emmanuelle Wargon.

Nous consentirons donc à la suppression de l'article 4 si le ministre s'engage à ce que le sujet soit réellement pris en considération. Je ne l'ai pas vraiment entendu dans votre réponse, monsieur le ministre, mais sans doute allez-vous l'expliciter, afin que nous puissions voter unanimement et de tout coeur en faveur de ces amendements.

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Je souhaite réaffirmer ici, de manière constructive, la position du groupe Socialistes et apparentés au sujet de cette proposition de loi.

Nous soutenons toutes les mesures de lutte contre la spéculation, pourvu qu'elles soient universelles et non restreintes à certaines zones. Nous sommes également favorables à la simplification des outils de planification et de programmation, car, encore une fois, le manque d'une vision holistique du foncier se fait terriblement sentir – en la matière, nous parlons d'expérience.

Par conséquent, ces amendements m'embarrassent beaucoup. Nous partageons l'idée qu'Action logement n'est pas l'instrument qui convient pour financer un fonds de dépollution. Nous avions soumis à ce propos deux propositions plus pertinentes que celle de Mme Hai – sans vouloir l'offenser – , que le jeu légistique a empêchées de voir le jour. L'une portait sur la TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes ; l'autre sur les taxes destinées à lutter contre la spéculation, qu'il aurait suffi d'augmenter de quelques points pour alimenter ce fonds permettant d'économiser le sol.

Je me souviens d'avoir vu le SCOT du Sud Meurthe-et-Moselle, l'un des plus grands de France, diviser par deux ses zones à urbaniser – industrielles et d'habitation – et dans le même temps restituer 50 hectares aux zones naturelles et agricoles, grâce aux EPF, grâce à un plan de relance qui lui avait valu des dérogations, à l'époque, de Matignon. Nous pouvons témoigner que ce mouvement vertueux permet d'associer les deux phénomènes. Il ne s'agit pas de renoncer à faire payer les pollueurs, mais d'anticiper, et d'éviter d'attaquer du foncier agricole lorsque nous pouvons faire autrement. Pour cela, il existe d'autres solutions qu'Action logement.

Néanmoins, nous nous abstiendrons de nous prononcer au sujet de ces amendements, car ni le renoncement du Gouvernement, ni la solution proposée par le rapporteur ne sont satisfaisants.

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La dépollution des friches est un sujet essentiel. Il mine un certain nombre de territoires, qui attendent qu'un nouvel usage soit enfin trouvé à celles-ci.

Les friches sont de deux sortes. D'une part, il y a celles pour lesquelles on parvient à des solutions, parfois même intégrées dans un budget privé grâce au principe pollueur-payeur ; parfois aussi les EPF, qui possèdent un savoir-faire en la matière, parviennent à diminuer le prix du foncier du coût de la dépollution, grâce à des déclarations d'utilité publique. Tout cela se passe bien. D'autre part, il y a les cas qui posent problème, où le coût total de la dépollution dépasse la valeur du foncier, si bien que le solde de l'opération est négatif ; on peut alors envisager un appui de l'État.

Pour traiter ces cas, Action logement ne me paraît pas le bon outil. Il faut rester équitable et ne pas déresponsabiliser les pollueurs.

Dans ce domaine, nous avons de nombreux défis à relever, en particulier celui du démantèlement des éoliennes. Compte tenu des dimensions de leur socle de béton, ce n'est pas en exigeant des exploitants une simple caution de 50 000 euros que l'on pourra garantir ce démantèlement ! Surtout, les pales n'étant pas recyclables, elles sont aujourd'hui enfouies dans le sol ! Le problème est donc réel. Nous devons adapter le principe du pollueur-payeur aux réalités actuelles pour éviter, à l'avenir, de créer de nouvelles friches industrielles.

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Ne manquons pas d'ambition pour un texte aussi important. On peut certes comprendre les raisons d'une limitation aux seules zones tendues de l'interdiction de recourir aux enchères pour la vente de biens relevant du domaine public. Cependant, j'ai suffisamment dirigé de collectivités locales pour savoir que la frontière est parfois ténue entre zones tendues et détendues : du fait de l'extension de la tache urbaine, les efforts pour limiter l'inflation foncière au sein des premières risquent d'avoir pour effet de la reporter vers les secondes. Sur ce sujet, nous étions donc déjà en droit d'émettre quelques réserves.

Et voilà que l'on nous propose une autre manière de déshabiller la proposition de loi en renonçant au fonds pour la dépollution des friches. Or si nous voulons parvenir à contenir enfin les prix du foncier, il faut certes lutter contre l'inflation foncière, mais aussi provoquer un afflux massif de terrains sur le marché, quelle que soit leur destination. À cet égard, les friches constituent donc un sujet central, d'autant qu'elles ont l'intérêt d'être déjà imperméabilisées.

La situation des collectivités locales, sur laquelle j'appelle l'attention du Gouvernement, est un autre élément à prendre en considération. Il y a urgence à agir car beaucoup d'établissements publics de coopération intercommunale et d'établissements publics fonciers subissent depuis de longues années la présence, sur leur territoire, de friches dont personne n'est prêt à financer la dépollution pour les remettre sur le marché. Les friches représentent donc une lourde charge pour les collectivités locales, qui pourraient investir plus utilement ailleurs le coût de leur entretien et se voient privées d'un foncier qu'elles préféreraient exploiter. Faute de pouvoir le dépolluer, elles doivent de surcroît, pour se développer, imperméabiliser d'autres sols.

Le problème est donc grave et urgent. Mais personne n'est prêt à financer les solutions : ni la DREAL, ni l'ADEME, ni Action logement. On ne peut pourtant pas laisser cette seule responsabilité aux collectivités ! Par ailleurs, je comprends bien, monsieur le ministre, l'intérêt d'appliquer le principe du pollueur-payeur, mais la plupart du temps, les terrains dont nous parlons étaient occupés par des sociétés mises en liquidation. En définitive, on ne peut donc pas faire payer le responsable initial de la pollution.

Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LT.

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Je le répète, l'urgence est absolue. Action logement n'est peut-être pas la meilleure solution mais, en attendant que le Gouvernement propose d'autres mesures, il reste le seul recours pour financer les actions de dépollution.

Selon l'exposé des motifs de l'amendement du Gouvernement, des propositions concrètes doivent être faites d'ici la fin de l'année. Mais, dans ce cas, nous ne comprenons pas pourquoi des crédits n'ont pas été prévus à cet effet dans le projet de loi de finances pour 2020.

Il ne faut pas supprimer cet article. Action logement pourra ainsi prendre en charge ces opérations en 2020 avant d'être relayé par l'État en 2021.

Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LT.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Monsieur Mignola, le Gouvernement a pris la mesure du problème : il s'acharne sur ce dossier depuis deux ans et demi. Je vous renvoie par exemple à l'expérimentation que nous menons avec l'EPF d'Île-de-France et la banque des territoires pour, notamment, répondre aux situations évoquées par M. Bazin, celle de la friche abandonnée depuis longtemps par l'industriel pollueur ou celle de la friche qui ne peut être remise en état selon l'équation économique classique.

Le financement des actions de dépollution ne doit-il s'étaler que sur quinze ou vingt ans ? Pourquoi ne pas considérer, après avoir allongé à quatre-vingts ans la durée des prêts pour le foncier en faveur du logement social, que la durée de financement des actions de dépollution doit s'étendre à celle des investissements qui se succéderont sur le site, plutôt que de ne concerner que l'entreprise prenant la relève de celles qui ont pollué ? Souvent, en effet, la pollution n'est pas seulement imputable au dernier exploitant mais à tous ceux qui se sont relayés sur le site. En répartissant le coût de la dépollution sur un grand nombre d'années, nous pourrions permettre à des projets d'émerger alors que, sans cela, ils ne verraient pas le jour faute de financements.

Cet article me pose problème parce que la solution qu'il propose, celle d'un fonds financé par Action logement, n'est pas la bonne. D'un autre côté, je ne veux pas que l'amendement du Gouvernement, qui vise à le supprimer, soit pris pour une marque d'indifférence à l'égard d'une question dont nous avons fait une priorité depuis deux ans et demi. Des groupes de travail ont été constitués pour avancer avec pragmatisme. Ce ne sont pas les groupes d'Emmanuelle Wargon, mais de ceux du Gouvernement. J'ai participé au premier ; je vous encourage vivement à en faire de même.

Je crains que la perspective de voir les actions de dépollution prises en charge par Action logement n'ait pour effet de déresponsabiliser nombre d'acteurs. Cela étant, vous avez raison, il y a urgence à agir et nous n'avons pas encore trouvé la bonne solution.

Je vous ai exposé les raisons de ma proposition mais je suis bien conscient de ses limites. Laissons travailler les groupes de travail ; je m'engage à ce qu'ils aboutissent à des conclusions très rapidement, quitte à se rabattre, en cas d'échec, sur les solutions qui seront jugées les moins mauvaises.

Les amendements identiques nos 37 et 42 ne sont pas adoptés.

L'article 4 est adopté.

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Je suis saisi d'un amendement no 59 rectifié qui fait l'objet de plusieurs sous-amendements.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement.

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

L'article 5 de la proposition de loi prévoit de mettre en concurrence la Direction de l'immobilier de l'État et des experts privés pour réaliser l'évaluation domaniale exigée par la loi avant la cession d'un bien par une collectivité territoriale ou son acquisition lorsque le montant du bien dépasse 180 000 euros.

Si certaines évaluations ont pu être contestées par des collectivités, le ministre de l'action et des comptes publics a engagé, depuis deux ans, plusieurs actions pour améliorer le fonctionnement du service des domaines et la formation des évaluateurs. Ces efforts se poursuivront, notamment pour harmoniser les pratiques entre services d'évaluation. Le Gouvernement entend saisir l'opportunité offerte par ces discussions pour accélérer cette dynamique dans l'ensemble du territoire.

C'est le sens de cet amendement qui tend, tout d'abord, à consacrer au niveau législatif des informations communiquées dans les avis émis par les domaines afin que les collectivités aient systématiquement connaissance de l'ensemble des éléments de fait et des méthodes retenues par l'évaluateur. Ces avis devront être conformes à la charte de l'évaluation en vigueur, rédigée avec l'Association des maires de France pour encadrer le travail des évaluateurs et dont le contenu sera mis à jour régulièrement.

Par ailleurs, cet amendement vise à créer, pour les cessions comme pour les acquisitions, un dispositif de réexamen permettant à une collectivité qui conteste un avis d'obtenir une nouvelle évaluation domaniale.

Il est également prévu que les communes de petite taille et les petits établissements publics de coopération intercommunale puissent désormais saisir, sans condition de seuil, le service des domaines, pour les cessions comme pour les acquisitions.

Enfin, l'amendement prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport détaillant, au bénéfice du Parlement, l'ensemble des données disponibles en matière d'évaluation et comparant les pratiques des évaluateurs dans les territoires afin d'informer la représentation nationale de l'activité et des résultats obtenus par les services du Domaine.

Conformément à la position défendue par le Gouvernement, et revenant ainsi sur les dispositions initiales de l'alinéa 3 de l'article 5, la nouvelle rédaction qui vous est proposée maintient l'obligation pour les collectivités de saisir les domaines, ces dernières conservant la faculté de consulter un expert privé pour obtenir un avis complémentaire.

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La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 65 .

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Tout comme Mme Battistel, nous avons dû déposer des sous-amendements à l'amendement du Gouvernement car son adoption ferait tomber les nôtres.

Cet amendement que je qualifierais d'appel – car la majorité agira comme elle l'entend – propose de ne faire appel aux services des experts immobiliers auprès des cours d'appel qu'en cas de défaut de réponse du service compétent de l'État. Sinon, autant dire les choses clairement et supprimer sans plus attendre le service du Domaine !

Il est vrai que le service des domaines pourrait améliorer la qualité de ses évaluations et travailler plus rapidement. Mais la solution alternative proposée aurait un coût pour les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics. Nous ne pouvons décharger ainsi l'État de ses responsabilités envers les collectivités. C'est pourquoi le contenu de l'article m'apparaît dangereux et je vous appelle à la prudence. Je préférerais que nous travaillions ensemble à améliorer l'action des services du Domaine.

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La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir le sous-amendement no 58 .

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Nous avons été contraints, nous aussi, de déposer un sous-amendement. La solution proposée par le Gouvernement n'est pas la nôtre. Nous préférerions, en effet, moderniser les domaines. La situation est aussi ubuesque que celle qui conduit à demander aux SAFER de ne pas surenchérir dans des situations où le prix du foncier résulte de l'action de spéculateurs affranchis de tout contrôle public.

J'étais plutôt favorable à une modernisation des modes de calcul qui tienne davantage compte de l'intérêt général que du prix du marché. Une telle réforme, plus systémique, aurait été préférable aux mesures de bricolage institutionnel que vous nous soumettez.

Cela étant, puisqu'une autre solution a été retenue, nous vous proposons de sous-amender l'amendement du Gouvernement afin que, dans le souci de lutter contre la corruption et les conflits d'intérêts, l'expert immobilier agréé procédant à l'évaluation complémentaire ne puisse être partie prenante au projet immobilier dont relève le bien concerné. C'est évident mais mieux vaut l'inscrire dans la loi.

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La proposition du Gouvernement est intéressante en ce qu'elle témoigne de la capacité du service des domaines à se réformer lorsqu'il y est contraint.

L'article adopté en commission prévoyait d'instaurer un recours alternatif aux domaines en faisant appel aux services d'un expert privé agréé auprès de la cour d'appel. L'amendement du Gouvernement tend à ce que ce recours ne soit plus possible en substitution mais seulement en complément. La commission lui a donné un avis favorable, ce matin, même s'il ne correspond pas à l'esprit du dispositif initialement adopté la semaine dernière.

Je salue la capacité des domaines à faire amende honorable et leur engagement à ne retenir qu'une seule méthode d'évaluation pour l'ensemble du territoire. Il est louable, également, que les services des domaines transmettent, en plus du prix auquel ils aboutissent, la méthode d'évaluation et la manière dont ils l'ont appliquée. C'est très bien et nous pouvons simplement nous demander pourquoi ils n'ont pas travaillé ainsi depuis vingt ans.

Saluons également l'instauration d'une procédure d'appel – le recours hiérarchique, en droit administratif.

Je suis donc partagé : le texte adopté la semaine dernière en commission, à une large majorité, correspondait à 100 % au contenu du rapport ; on nous demande aujourd'hui de revenir en arrière, tout en proposant d'améliorer le service des domaines. À titre personnel, j'émets un avis de sagesse en appelant à la bonne volonté des parlementaires.

Le sous-amendement de M. Bazin va dans un sens contraire à ce qu'avait prévu la commission la semaine dernière. L'avis est donc défavorable. Enfin, bien que la commission ait émis un avis défavorable au sous-amendement de Mme Battistel, celui-ci me semble aller dans le bon sens ; à titre personnel, je voterai pour.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Avis défavorable aux deux sous-amendements.

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Monsieur le président, je demande une suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à onze heures cinquante-cinq.

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La séance est reprise.

La parole est à M. Stéphane Peu.

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Sans demander un rappel au règlement, et bien que je me sente extérieur à la famille, je ferai remarquer qu'il n'est pas très élégant de demander une suspension de séance pour compléter les bancs du groupe majoritaire afin de disposer d'un nombre de voix suffisant pour contrer les propositions d'un groupe qui fait lui aussi partie de la majorité présidentielle.

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De plus, le Gouvernement a totalement dévitalisé une proposition de loi que j'avais pourtant qualifiée de relativement modeste dans ses intentions : malgré son caractère modeste et concerté, il en fait, à mesure que nous avançons dans l'examen des articles, un squelette.

Je voudrais dire deux choses sur cet amendement. La première est que, si l'on considère que le texte vise à réguler les prix du foncier, on ne peut pas laisser les services des domaines seuls habilités à fixer les prix, pour la simple raison qu'ils ne sont pas un outil de régulation, mais d'indication des prix : les prix qu'ils donnent sont calculés en fonction de ce qui est constaté sur le marché. Or comment peut-on à la fois constater et réguler le marché ? Ces deux notions ne sont pas compatibles. Les domaines ne sont pas des régulateurs ; si nous voulons que la loi régule le marché, il faut d'autres outils.

La seconde est que les experts privés dont nous parlons ne seront pas les experts du coin de la rue, mais des experts privés agréés auprès des tribunaux. Je pense donc que c'est une excellente suggestion, qui correspond à l'esprit de la proposition de loi, qui est de réguler le marché – et pas seulement de le constater, sans quoi le texte n'aurait pas de sens.

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Je souscris entièrement aux propos de mon collègue Stéphane Peu. J'ajoute que nous regrettons le rejet, tout à l'heure, de l'amendement de notre groupe proposant que les SAFER et les EPF ne soient pas seulement les indicateurs du prix du marché, mais aussi les instruments de la fabrique d'un prix juste. Nous le faisons pourtant dans d'autres domaines de la loi. La capacité de la puissance publique à déterminer le prix d'équilibre d'une opération en fonction du bien commun serait une révélation, car elle permettrait aux collectivités de disposer d'un double regard : le prix du marché et le prix d'équilibre de l'opération, fabriqué par ces établissements. Si notre amendement avait été adopté, nous aurions accepté la proposition d'amendement qui nous est faite maintenant ; puisque ce n'est pas le cas, nous devons la condamner.

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J'aimerais revenir au fond du sujet. Comme l'a très bien rappelé notre collègue M. Peu, il est important qu'un regard tiers puisse intervenir au cours des évaluations. Même si nous avons une confiance absolue dans le service des domaines, admettons qu'il peut en effet lui arriver de nourrir lui-même l'inflation foncière, dès lors qu'il s'inspire, évidemment, de statistiques notariées. Dans la mesure où il n'est pas sans avoir de liens avec les collectivités ou avec l'État, il ne faudrait pas que ces derniers nourrissent également la spéculation foncière en France !

Cette parenthèse étant fermée, j'en viens à l'amendement du Gouvernement. Il est équilibré puisqu'il organise une itération ou bien une possibilité de substitution entre l'expertise des domaines et une expertise extérieure, qui peut être très utile. De ce point de vue, le sous-amendement de notre collègue Bazin ne semble pas opportun. Il ne s'agit pas, en effet, de considérer qu'il ne doit y avoir qu'un seul avis, celui du service des domaines, et qu'en cas d'absence de réponse de sa part, l'on fait intervenir un expert. C'est bien le principe d'itération qu'il convient de rechercher pour définir le prix du foncier.

En revanche, le sous-amendement de Marie-Noëlle Battistel me paraît logique et même, éthique. Un expert foncier ne peut être intéressé financièrement à l'opération sur laquelle il est intervenu. Notre groupe soutiendra donc le sous-amendement no 58 mais pas le no 65 de M. Bazin. Il votera bien sûr l'amendement du Gouvernement.

Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.

Les sous-amendements nos 65 et 58 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement no 59 rectifié est adopté et l'article 5 est ainsi rédigé.

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Dans l'esprit constructif qui a caractérisé la préparation de cette proposition de loi, je voudrais souligner que l'article 6 bis ne figurait pas initialement dans le périmètre annoncé par le rapporteur. Cette disposition résulte d'un amendement déposé en commission, mais il manque son étude d'impact, et je m'interroge sur sa constitutionnalité.

L'expropriation, en particulier, peut être utile pour la constitution de réserves foncières, dans la perspective d'un projet répondant à un besoin, à une utilité publique. Mais je crains que l'ajout de la mention « y compris lorsque l'acquisition ne présente pas de caractère d'urgence » n'ouvre une porte, n'ouvre trop grand la porte. Une expropriation deviendra-t-elle possible pour répondre par anticipation à un besoin qui pourrait se faire sentir dans cinquante ou cent ans ? Jusqu'où cela peut-il nous mener ? Je ne suis pas certain que l'article 6 bis, tel qu'il est rédigé, soit opportun. Il conviendrait sans doute d'y réfléchir et, dans l'attente, de le supprimer.

L'article 6 bis est adopté.

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Je suis saisi d'un amendement no 45 qui fait l'objet d'un sous-amendement no 64 .

La parole est à M. Paul Christophe, pour soutenir l'amendement.

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Il vise à clarifier l'articulation des échanges entre les communes et les EPCI dont elles sont membres. Ainsi, les observatoires de l'habitat et du foncier devront fournir au conseil municipal les éléments lui permettant de délibérer, en particulier ceux portant sur l'écart éventuel entre les objectifs de construction de logements inscrits au programme local de l'habitat – PLH – et le nombre de logements réalisés. Le conseil communautaire pourra ainsi intégrer les éléments concernés dans sa délibération annuelle relative à l'exécution du PLH.

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La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 64 .

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Une nouvelle fois, nous avons été contraints de déposer un sous-amendement, puisque l'adoption de l'amendement no 45 ferait tomber les amendements suivants.

Tel qu'il est rédigé l'amendement no 45 pose la question de la liberté des communes et des charges qui leur sont imposées. Mon sous-amendement vise à remplacer dans l'amendement le mot « fait » par l'expression « peut faire ». À l'heure où nos collectivités territoriales demandent moins de contraintes administratives, il convient de ne pas rendre obligatoire ce compte rendu annuel pour l'ensemble des communes de l'EPCI. Il serait préférable de tenir compte de la taille des communes pour ne pas leur imposer à toutes des contraintes inadaptées.

Considérons le cas d'un village de cent habitants, dont le PLH ne prévoirait la construction d'aucun logement. On imposerait à son maire d'inscrire à l'ordre du jour, chaque année, un débat sur ces logements qui ne sont pas construits ou dont la construction n'est pas prévue. Vous imaginez le caractère cocasse d'une telle situation !

Même si un compte rendu annuel peut être utile dans les communes tendues ou de taille importante, dans lesquelles il existe des objectifs de production de logements, il ne serait pas opportun partout. Dans certaines intercommunalités, il existe de toutes petites communes qui ne demandent pas ces charges supplémentaires.

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… puisqu'il est conforme à ce qui a été prévu par la commission qui l'a accepté. Il simplifie et organise de façon plus limpide la circulation des informations entre le PLH, les communes et l'EPCI.

Monsieur Bazin, la délibération du conseil municipal prévue à l'amendement no 45 n'a lieu que lorsqu'il existe un observatoire de l'habitat et du foncier qui n'est obligatoire qu'en zone tendue. Je n'imagine pas que la petite commune de cent habitants que vous avez évoquée puisse être en zone tendue. Et si elle l'est, c'est que le logement y constitue un enjeu et, dans ce cas, il convient de l'évoquer en conseil municipal. J'émets donc un avis défavorable sur ce sous-amendement.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Le Gouvernement émet un avis de sagesse sur l'amendement no 45 . D'après mon expérience dans ce domaine, et contrairement à ce qu'affirme le rapporteur, l'ajout de l'obligation d'une décision de la municipalité ne serait pas le gage d'une plus grande fluidité alors que l'intercommunalité resterait décisionnaire ultime. Je m'en remets néanmoins à la sagesse de l'Assemblée sur ce sujet. Cet avis me conduit à émettre un avis défavorable au sous-amendement.

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Monsieur le ministre, si votre majorité se fait déborder par le groupe minoritaire de la majorité, il vaudrait mieux éviter le pire en adoptant mon sous-amendement, au sujet duquel vous pourriez émettre un avis de repli favorable !

Sourires.

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Monsieur le rapporteur, je vous demande de prendre en considération le cas des collectivités qui ont fait le choix, sans y être contraintes, de mettre en place des PLH et qui disposent d'observatoires fonciers sans se trouver en zone tendue. Tous les articles de la proposition de loi n'étant pas cohérents entre eux, l'amendement créerait pour ces collectivités une obligation de délibération annuelle. Or cela n'a aucun sens. Je vous demande d'en tenir compte afin de prévoir une obligation dans les zones tendues, y compris pour les petites communes, mais pas dans toutes les collectivités possédant un observatoire foncier, car il en existe parfois en zone détendue.

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M. le rapporteur a tenu des propos très clairs : il s'agit simplement aujourd'hui de fluidifier les dispositions de l'article 7, afin de mieux définir le rôle de la collectivité dans l'articulation du dispositif. Le schéma part de l'observatoire, passe à la commune et enfin à l'intercommunalité, qui apprécie la situation. Il s'agit simplement de respecter le rôle que les communes doivent jouer et de ne pas les déposséder des enjeux relevant du PLH.

Le sous-amendement no 64 n'est pas adopté.

L'amendement no 45 est adopté et les amendements nos 29 et 19 tombent.

L'article 7, amendé, est adopté.

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Sur l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisi par le groupe du Mouvement démocrate et apparentés d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

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Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 7.

La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour soutenir l'amendement no 22 .

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Les députés du groupe Libertés et territoires ne pouvaient aborder cette proposition de loi visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français sans évoquer le cas des zones en tension importante, comme la Corse.

Le présent amendement propose d'identifier et de délimiter des zones, à l'intérieur du plan local d'urbanisme, et sous définition du plan d'aménagement et de développement durable de Corse, dans lesquelles l'accession sociale à la propriété, les activités économiques pérennes et le logement social seraient exclusifs.

Cette mesure répondrait à une tension croissante en Corse, liée à la part disproportionnée des résidences secondaires. Celles-ci représentent en effet 37 % des logements contre 8,9 % en France métropolitaine. Par ailleurs, un Corse sur cinq vit sous le seuil de pauvreté et le revenu annuel médian s'élève en Corse à environ 18 900 euros contre 20 300 euros à l'échelle de la France métropolitaine. Enfin, je rappelle les informations fournies par l'observatoire des marchés fonciers et immobiliers, créé par la collectivité de Corse : en dix ans, le coût du logement a augmenté deux fois plus vite sur l'île que sur le continent, avec des hausses respectives de 68 % et 36 %. Quant au coût du foncier, il a augmenté quatre fois plus vite que sur le continent, avec une hausse de 138 %, à comparer à 64 %. Enfin, le taux de logement social y est plus faible, à 10 % contre 17 %.

L'ensemble de ces éléments crée une fracture sociale, économique et culturelle sans précédent dans une île-montagne qui, par nature, connaît une situation de rareté foncière. Les espaces qu'il est possible d'urbaniser y sont moins nombreux qu'en France continentale. La proposition de définition de ces zones dans les PLU, en articulation avec le PADDUC, a pour objectif de réguler fortement cette situation, au profit de l'accession sociale à la propriété, du logement social et des activités permanentes.

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Effectivement, la Corse constitue une zone tendue, notamment parce qu'elle compte des agglomérations importantes, des zones littorales et des zones de montagne : c'est donc à trois titres qu'elle est tendue, et il convient d'aborder ce sujet avec précision.

Vous proposez de mettre en place des restrictions visant les résidences secondaires. En droit, une telle disposition n'est a priori pas possible ; elle relève du domaine fiscal. Quoi qu'il en soit, et comme nous l'avons déjà évoqué en commission, une résidence peut être secondaire un jour, principale un autre jour, puis redevenir secondaire ultérieurement. Il est impossible de qualifier un tel critère.

Enfin, en remontant cette qualification au niveau du PADDUC, vous la placez à un niveau qui n'est pas le bon : elle relèverait plutôt du niveau du PLU ou de la collectivité délivrant le permis de construire. La commission confirme son avis défavorable à votre amendement.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Je me souviens très bien de nos débats à ce sujet lors de la discussion de la loi ELAN. Comme l'a indiqué le rapporteur, plusieurs difficultés doivent être surmontées. L'une d'elles concerne le document d'urbanisme référent : doit-il s'agir du PADDUC ou du PLU ? Nous en avons déjà beaucoup parlé et je n'y reviendrai pas.

La principale difficulté soulevée par ce document institutionnel tient au fait que l'on ne peut pas être certain, lors du dépôt d'un permis de construire, qu'une résidence déclarée comme secondaire ne deviendra pas principale quelques jours après – et vice-versa.

C'est la raison pour laquelle il est extrêmement difficile de limiter les résidences secondaires et de favoriser les résidences principales sur certains territoires. Cela peut se faire dans le cadre de projets d'aménagement, mais de façon prospective, sur le terrain. À l'heure actuelle, nous n'avons pas encore trouvé la solution, fiscale ou législative, pour empêcher ce que vous dénoncez. Je comprends très bien votre préoccupation mais l'amendement que vous proposez ne permettra pas de résoudre ce problème.

La déclaration d'un logement en tant que résidence secondaire ou principale peut en effet varier très rapidement. Concrètement, une personne souhaitant absolument construire une résidence secondaire pourrait y domicilier son fils, sa fille, son cousin ou sa cousine. Cette maison aurait un usage de résidence secondaire, mais votre amendement serait contourné.

Je demande donc le retrait de l'amendement qui n'apporte malheureusement pas de solution satisfaisante. Nous devons continuer à travailler pour trouver d'autres solutions, y compris coercitives.

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Je voudrais tout d'abord lever une confusion. Lorsque j'évoque l'articulation entre le PADDUC et les PLU, je m'inscris strictement dans le cadre législatif en vigueur : aux termes de mon amendement, le PADDUC « définit des critères » visant à créer les zones, tandis que les PLU « identifient » et « délimitent » ces dernières. Ce n'est donc pas le PADDUC qui accorde le permis de construire, mais bien le maire ou le président de l'intercommunalité en cas de PLU intercommunal. Je le répète, mon amendement respecte strictement le cadre institutionnel et la loi en vigueur.

Par ailleurs, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous avez soulevé un problème s'agissant des résidences secondaires et des résidences principales. À ce sujet, j'ai été très amusé par le débat auquel nous avons assisté sur les locations Airbnb à Paris : tous les candidats à l'élection prochaine étaient là pour débattre de la question de la régulation et de la possibilité, pour le maire, de plafonner les locations des résidences principales à 60 nuits au lieu de 120 nuits par an, au motif d'une pression économique et touristique réduisant le nombre de logements permanents disponibles et entravant l'accession à la propriété. Ce débat existe donc ailleurs qu'en Corse, y compris pour des territoires à statuts spéciaux comme l'Île-de-France. Or mon amendement n'évoque pas le nombre de résidences secondaires avant ou après le vote du PADDUC, mais les zones dans lesquelles les nouvelles constructions seraient exclusivement destinées à l'accession sociale à la propriété, dans le cadre de conventions, au logement social ou à toute activité économique en dehors de la grande distribution.

Ce genre de projet ne peut naître spontanément car nous sommes dans une situation très contrainte de rareté foncière et que, vu les prix du mètre carré en France que j'ai cités, les transactions immobilières seront toujours beaucoup plus rentables que n'importe quel projet d'accession sociale à la propriété ou de logement social.

Si nous ne pouvons pas opérer une régulation par la fiscalité – on nous a refusé des dispositions fiscales spécifiques aux résidences secondaires – ou par la codification spatiale, ce sera l'impasse. Dans l'impasse, je vous préviens, le sentiment de dépossession va grandir. Et là, il y a aura une réaction.

Je vous invite à bien lire mon amendement. Vous verrez qu'il s'inscrit tout à fait dans le cadre de la loi existante. À un moment, il faut apporter une réponse aux problèmes qui se posent.

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Très franchement, après avoir écouté M. Acquaviva et lu l'exposé sommaire de son amendement, je trouve ses arguments extrêmement convaincants. Comment ne pas tenir compte d'une particularité que notre collègue a très bien décrite, avec des proportions élevées de résidences secondaires et une forte pression spéculative ?

Il faut revenir aux fondements de la proposition de loi, qui vise à réguler les prix du foncier et à permettre la construction de logements à prix abordables. En l'espèce, l'amendement no 22 cible l'accession sociale à la propriété : il ne permet ni la spéculation ni le développement du tourisme, puisque l'accession sociale à la propriété est réservée exclusivement à des propriétaires occupants, c'est-à-dire à des gens qui habiteront ce logement toute l'année.

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Il en est de même pour le logement social, par définition. Aussi, nous voyons bien que cet amendement, très pertinent, concourt à l'objectif de la proposition de loi, qui vise à réguler le foncier et à orienter la production de logements vers des prix plus raisonnables et vers les publics qui en ont le plus besoin – en l'occurrence, les travailleurs et les habitants de l'île qui souhaitent y rester et y vivre dignement.

Mme Sylvia Pinel applaudit.

L'amendement no 22 n'est pas adopté.

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La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 17 .

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Nous voulons profiter de cette proposition de loi, qui s'inscrit dans le prolongement des mesures de la loi ALUR relatives à la maîtrise publique du foncier, pour clarifier les dispositions sur le droit de préemption exercé par la commune et l'EPCI. En effet, malgré quelques amendements adoptés dans le cadre de la loi ALUR, les choses ne sont pas tout à fait claires : il arrive que, sur un bien susceptible d'être préempté, une commune fasse blocage aux desseins d'un EPCI. Je vous soumets donc une proposition d'une extrême limpidité : dans un souci de simplification et de clarification des compétences, lorsqu'un bien est lié à une compétence attribuée à l'EPCI, il doit revenir à cet EPCI d'exercer le droit de préemption.

J'avais déposé le même amendement – mais il est tombé – pour les biens communs sans maître, souvent mobilisés grâce à des efforts intercommunaux, qui retombent dans l'escarcelle d'une commune alors qu'ils pourraient concourir à une opération de plantations viticoles ou de réorganisation foncière sur les rives d'un fleuve, par exemple.

En clair, le principe d'un droit de préemption bénéficiant d'abord à l'EPCI si le bien en question entre dans le champ de ses compétences me paraît aller dans le sens de la modernité et de l'exercice par les territoires de la puissance publique.

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Défavorable, dans la mesure où cet amendement pourrait entraîner une concurrence néfaste entre des collectivités bénéficiant d'un droit de préemption et d'autres collectivités susceptibles d'exercer un droit de priorité. On ne saurait plus qui détient vraiment le droit de préemption. Aujourd'hui, en cas de besoin, il peut être délégué.

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Certes, mais elle est à l'initiative de la commune !

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Même avis.

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Je suis en désaccord total avec M. le rapporteur. La délégation du droit de préemption dépend de la volonté de la commune qui le détient. Ainsi, une commune peut bloquer un projet collectif portant sur une compétence exercée par l'EPCI : c'est stupéfiant ! Il faut vraiment modifier cela : l'acquisition des biens sans maître et l'exercice du droit de préemption doivent être remontés à l'échelon communautaire dès lors qu'un EPCI a adopté une délibération sur ces axes stratégiques. Vous connaissez comme moi la réalité du terrain : on ne peut pas s'en remettre à la volonté de la commune.

L'amendement no 17 n'est pas adopté.

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La parole est à Mme Laurianne Rossi, pour soutenir l'amendement no 1 .

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Cet amendement, dont Mme Sandra Marsaud est la première signataire, vise à faire évoluer stratégiquement les outils au service des politiques locales de l'habitat en créant un lien entre le PLU et le PLH. Nous constatons que de nombreux territoires ne sont couverts ni par un PLH, ni par un PDH – plan départemental de l'habitat – , ce qui nous empêche d'avoir une vision cohérente de leurs besoins. Pourtant, les PDH sont des documents obligatoires au regard de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement. C'est pourquoi nous proposons une date limite pour l'établissement d'un PDH, fixée au 1er janvier 2022. Les signataires du présent amendement y voient la clé d'une politique d'aménagement du territoire équilibrée entre secteurs tendus et secteurs détendus.

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L'article L. 302-11 du code de la construction et de l'habitation prévoit déjà que les PDH doivent être mis en place partout en France, pour une durée de six ans. A priori, l'amendement est donc satisfait.

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Demande de retrait ou avis défavorable, pour les mêmes raisons.

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Merci, monsieur le rapporteur, pour cette précision. Effectivement, les PDH sont des documents à caractère obligatoire, mais aucune échéance n'ayant été fixée dans la loi, de nombreux territoires en sont dépourvus. Il y a donc urgence à les déployer partout. Mme Marsaud ne m'ayant laissé aucune consigne particulière, je maintiens l'amendement.

L'amendement no 1 n'est pas adopté.

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La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no 36 tendant à supprimer l'article 8.

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Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Cet amendement vise à supprimer le gage de la proposition de loi. Puisque cette dernière n'engage aucune dépense nouvelle, je propose de supprimer l'article 8.

J'ai conscience que la création du fonds pour la dépollution des friches, qui pourrait être financé par d'autres partenaires que ceux dont ce serait l'objet social, est susceptible d'avoir des incidences financières. Cela ne m'empêche pas de vous proposer la suppression de l'article 8, tout en appelant l'attention de chacun sur l'impact éventuel de l'article 4, dont il faudra que nous discutions encore et encore.

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Je me réjouis de cet amendement de suppression, qui prouve que le Gouvernement souhaite la mise en oeuvre la plus rapide possible de la proposition de loi. J'invite donc tous les députés à voter l'amendement.

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Monsieur le ministre, il est effectivement souhaitable de lever le gage – c'est ce qui se pratique lorsque l'examen d'une proposition de va jusqu'à son vote. Cependant, vous avez dit que ce texte ne créait pas de dépenses nouvelles. C'est faux : il crée des nouvelles charges, des nouvelles obligations pour les collectivités, ce qui entraînera forcément des dépenses nouvelles, certes modiques, mais qui pourront quand même représenter, dans certains territoires, quelques milliers d'euros – ce n'est pas négligeable. J'ai bien compris que l'État n'accorderait aucun financement aux collectivités qui assumeront ces nouvelles charges, alors que les problèmes de logement doivent tous nous concerner.

À l'article 4, vous demandez à Action logement d'assurer la gestion d'un fonds ; cela ne fait pas partie des objectifs contenus dans le pacte d'investissement que vous avez signé avec l'association, qui a beaucoup de choses à faire par ailleurs. C'est aussi une question de respect de la gouvernance de cette structure ! Vous allez très loin. Cela pose une vraie question quant à la nécessité d'un financement complémentaire d'Action logement par l'État, qui lui demande d'exercer des missions supplémentaires.

Enfin, si l'on permet aux collectivités d'acheter du terrain à un prix maîtrisé, il va aussi falloir mobiliser des fonds. En effet, la création de réserves foncières telles qu'imaginées à l'article 6 bis demande beaucoup d'argent. Le portage foncier est très coûteux et il faut que l'État puisse procéder à cet aménagement équitable dans l'ensemble de notre pays.

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Je ne résiste pas au plaisir de souligner que notre collègue Thibault Bazin est en phase avec le Gouvernement. Je lui rappelle néanmoins que les dispositifs permettant de créer des réserves foncières sont nombreux, que ce soit dans les établissements publics fonciers d'État ou dans les établissements publics fonciers locaux, lesquels sont financés par ailleurs, en particulier par les taxes d'aménagement et une partie de la fiscalité locale. Il n'y a donc pas besoin d'engager des fonds supplémentaires.

Je souhaite également répondre au clin d'oeil que nous a adressé M. le ministre s'agissant de l'article 4. Il convient d'entamer la navette parlementaire en considérant cet article comme un appel pressant de la représentation nationale à avancer sur la question des friches. Action logement n'est sûrement pas le bon vecteur. Comme M. le ministre l'a laissé entendre tout à l'heure, c'est la Banque des territoires qui pourrait être mobilisée, sous réserve d'un financement et d'un calendrier de mise en oeuvre de ce financement. D'ici à la deuxième lecture, veillons à ce que la situation soit éclaircie pour les collectivités.

Au nom du groupe du Mouvement démocrate et apparentés, je salue l'excellent travail réalisé non seulement par notre collègue Jean-Luc Lagleize, mais également sur l'ensemble des bancs de la représentation nationale, en lien avec les services du ministère et votre cabinet, monsieur le ministre – toutes les mesures imaginées par les députés de la nation n'auraient pas pu être concrétisées aujourd'hui sans votre aide.

Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et UDI-Agir ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

L'amendement no 36 est adopté et l'article 8 est supprimé.

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Nous avons achevé l'examen des articles de la proposition de loi.

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Dans les explications de vote, la parole est à M. Dominique Potier.

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Je salue à nouveau – je l'ai déjà fait dans la discussion générale – l'état d'esprit qui prévaut lors de l'examen des propositions de loi du groupe MODEM, …

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Dommage que celles des autres groupes ne bénéficient pas du même traitement !

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… et particulièrement lors de la discussion de ce texte de Jean-Luc Lagleize. Je salue également le travail d'expertise et de propositions de notre rapporteur.

Je regrette que nous ayons davantage procédé à des replâtrages, ici et là, qu'à des refondations, mais des rendez-vous ont été pris avec M. le ministre Julien Denormandie, sur différents dossiers importants, en vue de moderniser l'action publique et de la rendre plus juste et plus forte dans nos territoires. Je prends note de ces rendez-vous, auxquels l'opposition pourrait être associée, sur les sujets que nous avons abordés.

Un dernier clin d'oeil sur les coûts évoqués des réserves foncières et des activités de dépollution : hier, lors de l'excellent colloque intitulé « Partager et protéger la terre – Plaidoyer pour une nouvelle loi foncière », qui se tenait en salle Victor Hugo, un universitaire a cité les travaux de Thomas Piketty. Alors que le foncier représentait, au XVIIIe siècle, 20 % de la valeur totale des biens marchands, il n'en représente plus aujourd'hui que 1 %. Il n'est donc pas impossible de le socialiser, comme nous sommes en train de le faire grâce à cette proposition de loi : c'est une question de volonté. L'enjeu est capital, tant pour le « pouvoir de vivre » que pour le partage de nos communs, c'est-à-dire du foncier agricole et naturel, dont nous aurons terriblement besoin pour résoudre l'équation climatique, comme le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat – GIEC – l'a encore rappelé hier, dans ces murs, en présentant son rapport spécial sur le changement climatique et les terres.

Merci encore pour ces travaux. Le groupe Socialistes et apparentés votera cette proposition de loi et nous vous donnons rendez-vous pour approfondir ce sujet et rendre l'action publique plus juste et plus forte.

Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

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J'ai dit tout à l'heure, à l'occasion de la discussion générale, à quel point le groupe de la Gauche démocrate et républicaine avait apprécié le travail autant que la méthode du rapporteur Jean-Luc Lagleize ; je ne cache pas cependant que j'éprouve une certaine déception à l'issue de la séance de ce matin, tant les amendements du Gouvernement et ceux du groupe majoritaire ont détricoté un texte de loi déjà très modeste au regard des propositions du rapport que M. Lagleize vient de remettre au Premier ministre et qui n'ont pas été reprises précisément dans l'espoir d'obtenir une avancée, certes plus limitée mais concrète.

Je regrette par exemple que la proposition de reversement des plus-values foncières aux communes n'ait pas été retenue, alors que cela aurait été un moyen de revenir sur la décision très mauvaise du Gouvernement de supprimer l'aide aux maires bâtisseurs, qui vient s'ajouter à la suppression de la taxe d'habitation et à l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties sur les logements sociaux pendant vingt-cinq ans. Les villes ne sont de ce fait plus du tout encouragées à construire alors que notre pays connaît une crise du logement.

Je voudrais dire également mon incompréhension face à la décision des services de la séance d'opposer l'irrecevabilité de l'article 40 de la Constitution à un amendement relatif au droit de préemption que j'avais présenté avec M. Acquaviva et que la commission avait jugé recevable puisqu'il ne s'agit pas du tout d'une dépense mais de la demande d'extension du droit de préemption des collectivités locales. C'est absolument anormal.

Cette proposition de loi, déjà limitée par rapport aux préconisations du rapport de M. Lagleize, était au moins concrète : après qu'elle a été vidée de l'essentiel de sa substance en séance, on arrive à quelque chose de très minimal. C'est la raison pour laquelle, alors que j'avais dit en commission que je voterais la proposition de loi, je me retrouve à l'issue de ces débats dans l'impossibilité d'approuver un texte réduit à la portion congrue tant il a été malmené par le Gouvernement et la majorité, et désormais trop minimal pour avoir mon assentiment.

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Nos débats ont été très constructifs et le texte apporte des réponses aux attentes dans le domaine du logement. Il fournit des outils pour lutter contre la spéculation foncière et doit permettre d'acheter son logement dans des conditions financières acceptables. Il apporte aussi un véritable soutien aux collectivités territoriales. Le groupe la République en marche tient à saluer tout le travail qui a été accompli par notre collègue et le groupe MODEM ainsi que par le ministre et son cabinet.

Nous espérons néanmoins que nous pourrons revenir sur l'article 4 lors de la navette parlementaire, car l'outil Action logement ne nous paraît pas adapté pour financer un fonds de dépollution des friches qui ne relève pas de ses missions, comme ses représentants nous l'avaient précisé lors de nos auditions.

En tout état de cause, les membres du groupe la République en marche voteront en faveur de cette proposition de loi.

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Le groupe Libertés et territoires regrette la tournure prise par nos débats ce matin, alors que le rapporteur, dans le cadre de la mission que le Gouvernement lui avait confié, avait fait un travail d'excellente qualité et proposé de nombreuses solutions extrêmement concrètes pour lutter contre la spéculation immobilière et réduire les coûts du foncier, problèmes récurrents et extrêmement préoccupants pour de nombreux territoires. Certes la proposition de loi ne reprenait pas l'intégralité des préconisations du rapport, certaines étant d'ordre fiscal, d'autres n'étant pas suffisamment affinées, mais elle comprenait des dispositions complémentaires particulièrement efficaces et pertinentes. C'est la raison pour laquelle nous avions pu dire en commission que notre groupe souscrivait à ces dispositions.

Or ce matin les amendements du groupe majoritaire et ceux du Gouvernement ont affaibli le texte en le vidant de sa substance. Je pense à l'article 1er ou à l'article 5 par exemple, qui répondaient pourtant, mes chers collègues, à une attente forte des élus de nos territoires.

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S'agissant de l'article 4, le financement de la dépollution des friches par Action logement n'était peut-être pas la meilleure solution mais nous le savons, la navette nous permettra d'améliorer ce dispositif.

Alors que le travail du rapporteur avait permis de valoriser le rôle du Parlement, je considère à cet instant que ce résultat est en contradiction avec ce qui avait été accompli.

Enfin, monsieur le ministre, mes collègues corses m'en voudraient de ne pas dire que la situation tout à fait particulière de ce territoire méritait une solution particulière. J'ai entendu votre engagement de travailler avec les élus et la collectivité de Corse sur cette question et je vous y invite de façon pressante : il y a urgence et les élus de Corse attendent des actes et non plus des mots en la matière.

Pour ces raisons notre groupe s'abstiendra, à regret, sur cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe LT.

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Je me permets de saluer à mon tour le travail de notre rapporteur et cette proposition de loi. On peut effectivement se réjouir des avancées de ce texte s'agissant d'un enjeu de société qui nous préoccupe tous et concerne bon nombre de nos concitoyens.

Cependant je regrette également que le texte initial, qui avait pourtant recueilli un large consensus en commission, se retrouve affaibli par les amendements de la majorité et du Gouvernement. Il ne s'agit pas, bien évidemment, d'instruire un procès avant l'heure, monsieur le ministre, mais d'exprimer une inquiétude sur notre capacité à légiférer de nouveau dans un calendrier particulièrement chargé, alors que la navette parlementaire aurait probablement suffi. Cela dit, monsieur le ministre, vous vous êtes engagé sur les attentes fortes qui demeurent. Nous serons donc attentifs aux mesures de simplification que vous avez annoncées lors de la discussion générale. Elles sont d'importance et bien évidemment attendues.

Le groupe UDI, Agir et indépendants ayant toujours soutenu les mesures de simplification en matière de logement, ce soutien vaut bien évidemment pour ce texte proposé par le groupe MODEM.

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Le groupe Les Républicains ne pouvait que partager les objectifs de cette proposition de loi : limiter le coût du foncier, faciliter et renforcer l'offre de logements abordables, mais les divers dispositifs qui ont finalement été votés s'avèrent bien insuffisants, malgré certaines pistes intéressantes.

Le texte qui en résulte est à l'image de la politique que vous menez : il oublie la réalité d'un certain nombre de territoires en France. C'est un véritable problème : il n'y a toujours pas de politique d'aménagement susceptible de renforcer l'attractivité de nos territoires qui en ont bien besoin. Vous créez de nouvelles charges pour certaines collectivités, ce qui est aussi un véritable problème.

Au regard du véritable objectif, qui serait de solvabiliser la demande, des décisions telles que la suppression de l'APL accession ou la division par deux de la quotité du prêt à taux zéro pour plus de 90 % du territoire posent question. Vous avez un problème avec la propriété et avec l'accession à la propriété. Il est temps de changer de politique et de permettre aux Français de réaliser ce rêve. C'est pourquoi nous nous abstiendrons sur cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 90

Nombre de suffrages exprimés 80

Majorité absolue 41

Pour l'adoption 80

Contre 0

La proposition de loi est adoptée.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Je voudrais d'abord remercier l'ensemble des parlementaires ici présents, et tout particulièrement M. le rapporteur pour tout le travail qu'il mène depuis plusieurs mois sur ce sujet.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement

Contrairement à ce que certains ont pu dire, ce texte va véritablement dans le bon sens, même si on peut juger qu'il ne va pas suffisamment loin sur tel ou tel point. Quand, comme le fait l'article 1er, on met fin au tout enchères avec la garantie qu'on pourra aller jusqu'au bout, je pense que cela va profondément dans le bon sens sans en rabattre d'aucune façon au regard de l'ambition originelle. Ces fameux OFL dont vous avez voté la création feront date comme les OFS l'ont fait en leur temps. On peut toujours juger qu'il faut aller encore plus vite et que l'ordonnance n'est pas forcément le meilleur des moyens mais ce qui est sûr c'est qu'on a mis quatre ans à créer les OFS. Qu'on dispose d'un vecteur qui permette de mettre en place les OFL le plus rapidement possible, je pense pour ma part que c'est une immense avancée.

En ce qui concerne la consultation des domaines, j'ai aussi l'impression que vous avez apporté des réponses importantes ce matin.

On peut toujours trouver que les choses ne vont pas suffisamment loin ni suffisamment vite mais je crois que si tout ce qui a été voté est mis en oeuvre très rapidement, cela se traduira par nombre de changements significatifs pour beaucoup de territoires et je voudrais vous en remercier très chaleureusement.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

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L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Cyrille Isaac-Sibille et plusieurs de ses collègues visant à répondre à la demande des patients par la création de Points d'accueil pour soins immédiats (nos 2226, 2428).

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La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur de la commission des affaires sociales.

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Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chers collègues, nous examinons aujourd'hui la proposition de loi que j'ai l'honneur de défendre au nom du groupe MODEM et qui vise à répondre à la demande des patients par la création de Points d'accueil pour soins immédiats, les PASI.

Si, en sortant de notre hémicycle, vous chutez dans les escaliers – ce que je ne vous souhaite pas – et que cette chute entraîne une douleur à la cheville vous empêchant de marcher, ou une plaie sanglante au front ou au coude, qu'allez-vous faire ?

Sourires.

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Si par malchance votre médecin n'est pas disponible, vous n'aurez d'autre choix que d'appeler le 15 qui vous orientera vers les urgences.

Pourquoi nos concitoyens acceptent-ils d'attendre pendant trois, quatre, six heures aux urgences ? Parce que, confrontés à l'angoisse de la douleur, ils souhaitent une réponse rapide et un diagnostic posé par un médecin qui peut, au besoin, avoir recours à l'imagerie médicale, à des analyses biologiques – ou tout simplement à du matériel stérile permettant de procéder à une suture. Les médecins généralistes, alors qu'ils sont capables d'établir un diagnostic ou de pratiquer ces soins, ne peuvent pas satisfaire ce besoin d'une réponse immédiate parce qu'ils ne disposent pas du plateau technique nécessaire, qu'il s'agisse de radiologie, de biologie ou de matériel stérile.

Permettre à la médecine générale de ville de répondre rapidement à ces pathologies en adossant à son activité de garde un plateau technique : tel est l'esprit de cette modeste proposition de loi.

Avec plus de 21 millions de passages chaque année contre 10 millions en 1995, les services d'urgence de nos hôpitaux sont aujourd'hui excessivement sollicités par des patients qui expriment une demande de plus en plus importante de soins non programmés.

Plusieurs facteurs contribuent à expliquer cet état de fait : la raréfaction médicale bien sûr, mais aussi le vieillissement de la population et, surtout, l'exigence d'une réponse immédiate en matière de diagnostic et de prise en charge globale.

Selon les enquêtes de la DREES – direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques du ministère des solidarités et de la santé – , près de 60 % des patients se rendent aux urgences non pour une raison d'urgence vitale ou grave, mais parce que les soins y sont accessibles et qu'ils peuvent y réaliser rapidement des examens complémentaires.

Les rapports les plus récents confirment que les services d'urgence assurent un nombre croissant de soins non programmés, ne relevant pas de leur mission. Je n'insisterai pas sur les conséquences de cette évolution, que vous connaissez comme moi : des services d'urgence engorgés, un personnel au bord de l'épuisement et un lourd surcoût.

Quelle réponse la médecine de ville peut-elle apporter à cette situation ? En dépit des solutions intéressantes expérimentées ces dernières années pour renforcer l'offre de soins non programmés de ville – maisons de santé pluriprofessionnelles, maisons médicales de garde, hôpitaux de proximité – , l'offre reste « insuffisante et disparate », pour citer le rapport que notre collègue Thomas Mesnier a consacré au premier accès aux soins. En outre, comme l'observe la Cour des comptes, l'absence de plateaux techniques conduit à s'interroger sur la véritable utilité du dispositif. C'est précisément l'une des raisons pour lesquelles les généralistes peinent à répondre à la demande des patients.

Aussi modeste soit-elle, notre proposition de loi est d'importance pour nos concitoyens. Elle tire son origine des expérimentations qui ont été réalisées et évaluées en région Auvergne-Rhône-Alpes : dans certaines structures, des médecins généralistes reçoivent sans rendez-vous, durant des plages horaires déterminées, des patients dont l'état nécessite des soins immédiats sans urgence vitale. Ils y pratiquent des actes de premier recours grâce à un plateau technique léger, tandis que les patients ont accès à des examens complémentaires – biologiques ou radiologiques – et sont dirigés, si nécessaire, vers un spécialiste ou un hôpital. Ce dispositif efficace permet de soulager les urgences.

Notre proposition de loi préconise que des structures de cette nature, les points d'accueil pour soins immédiats – PASI – , soient labellisées sur la base d'un cahier des charges national défini par arrêté du ministre chargé de la santé. Ce label PASI, qui permettra de les identifier clairement, pourrait être formalisé par une croix orange, en contrepoint de la croix verte des pharmacies et de la croix rouge des urgences. Ainsi les PASI contribueront-ils à mailler le territoire d'une offre de soins non programmée graduée.

Comme vous le savez, la commission des affaires sociales a effectué un travail important sur la base d'un amendement de rédaction globale que j'ai proposé à l'issue des auditions d'acteurs de terrain, menées avec de nombreux députés, mais aussi de réunions avec les cabinets de la ministre chargée de la santé et du Premier ministre. Nous nous sommes accordés sur une rédaction satisfaisante pour tous.

En visant un décloisonnement des acteurs de santé et un exercice plus ouvert, pluriprofessionnel et coordonné, le dispositif que nous vous soumettons poursuit les objectifs tracés par la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, que nous avons adoptée récemment, et qui traduit l'ambition forte du Gouvernement d'introduire de la souplesse dans le système de santé et de privilégier les initiatives de terrain. C'est précisément dans cette optique que s'inscrit la présente proposition de loi.

Le texte adopté par la commission signale expressément que les communautés professionnelles territoriales de santé – CPTS – constituent le point d'origine des PASI, et que leur création et leur fonctionnement devront s'inscrire dans le projet de santé d'une ou plusieurs CPTS ou dans les projets territoriaux de santé, les PTS.

Depuis la signature, en juin dernier, de l'accord conventionnel interprofessionnel en faveur du développement de l'exercice coordonné et du déploiement des CPTS, ces dernières peuvent s'organiser elles-mêmes, volontairement, à l'initiative des professionnels de santé des territoires, pour construire une offre de soins coordonnée. Elles s'associeront progressivement à d'autres acteurs – établissements de santé, hôpitaux de proximité – pour assumer trois missions-socles, au premier rang desquelles l'accès des patients aux soins et, plus particulièrement, l'amélioration de la prise en charge des soins non programmés. Ce sont autant d'avancées éminemment positives.

Je vous proposerai un amendement – que la commission des affaires sociales, réunie en application de l'article 88 du règlement, a accepté hier – visant à inscrire la création et le fonctionnement du PASI soit dans le projet de santé d'une CPTS, soit dans un PTS. Pour ne pas retarder le lancement de ce dispositif pertinent, il me paraît nécessaire que le directeur général de l'agence régionale de santé – ARS – puisse prendre l'initiative de labelliser une telle structure lorsque la CPTS n'est pas encore constituée ou n'a pas encore élaboré son PTS, ou en l'absence de PTS. Ce schéma vise à apporter davantage de souplesse et doit pouvoir être déployé de manière rapide.

Pour finir, je tiens à remercier les députés de tous les groupes pour leur attitude constructive tout au long de l'examen de cette proposition de loi.

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Je remercie également le Gouvernement, le Premier ministre et la ministre des solidarités et de la santé pour la bienveillance avec laquelle ils ont accueilli notre proposition de loi. Elle est certes modeste, mais je suis persuadé qu'elle sera le ferment d'un déploiement des CPTS et, surtout, qu'elle permettra à une médecine générale mieux outillée d'apporter une réponse rapide aux demandes pressantes de nos concitoyens.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes MODEM et LaREM.

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La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.

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Adrien Taquet, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Je vous remercie, monsieur le rapporteur, d'appeler notre attention sur un sujet majeur, l'accès aux soins non programmés, que le Gouvernement a érigé en priorité que ce soit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 – que l'Assemblée a adopté en nouvelle lecture mardi dernier – ou en prenant récemment des mesures destinées aux services d'urgences. En cela, notre seul objectif est bien de remettre le système de santé sur la bonne voie.

Chacun a en tête des images de services saturés. Si ces images ne sont pas nouvelles, elles sont le reflet des mutations qui affectent notre société. La figure rassurante du médecin de famille, joignable à toute heure du jour et de la nuit, prenant les décisions relatives aux besoins de santé, a perdu de son évidence pour beaucoup de Français. Elle ne répond d'ailleurs plus à la conception que se forgent légitimement les nouvelles générations de médecins de leur exercice professionnel. Ayant perdu ce repère, nombreux sont les Français qui expriment une difficulté à s'y retrouver et à s'orienter dans le système de santé.

La ministre Agnès Buzyn et moi-même savons combien les médecins libéraux se mobilisent aujourd'hui et sont prêts à le faire encore davantage demain, en particulier dans le cadre des CPTS qui émergent partout dans le pays, pour garantir l'accès de chacun à un médecin traitant. Ce combat est fondamental, car le médecin traitant est – et doit rester – le gage d'un suivi au long cours, d'une prise en charge globale qui intègre une dimension à la fois préventive et curative, et d'une bonne orientation des patients dans le système de santé. Sans médecin traitant, l'errance médicale s'accentue, les patients n'ont plus personne à qui s'adresser, et les urgences deviennent tout à la fois le premier et le dernier recours – en réalité, elles apparaissent pour beaucoup comme le seul recours. Il en résulte un engorgement des services d'urgence, qui fait peser une pression néfaste sur tous les acteurs.

J'en viens à votre proposition de loi. Je salue le travail de fond que vous avez mené, monsieur le député, pour élaborer un texte opérationnel visant à apporter davantage de clarté au système de santé. Je salue tous ceux qui ont enrichi ce texte ou qui, par leurs travaux – je pense notamment à Thomas Mesnier qui s'est longuement penché sur le sujet – , ont permis d'établir un diagnostic fiable et d'élaborer des solutions concrètes en faveur de l'accès aux soins.

Pour éviter l'engorgement des urgences, vous préconisez de créer une nouvelle catégorie de structures de santé, à mi-chemin entre la médecine générale traditionnelle et les services d'urgence, appelée « point d'accueil pour soins immédiats ». Cette catégorie nous paraît pertinente, car nombre d'admissions aux urgences ne répondent pas aux critères de la médecine d'urgence. Par le biais des ARS, il s'agira de labelliser, pour une durée de cinq ans, des structures capables d'accueillir des patients dans le cadre de soins non programmés, lorsque les situations ne répondent pas aux critères de la médecine d'urgence.

La gradation des soins ne doit pas être une notion technique, voire abstraite : elle doit être une réalité de terrain. De ce point de vue, votre proposition de loi constitue un outil très concret permettant d'apporter une réponse juste et pertinente.

Sous réserve de certaines modalités pratiques de labellisation, qui restent encore à définir, nous répondrons favorablement à votre proposition de loi, qui poursuit et complète l'action du Gouvernement dans le champ de l'accès aux soins non programmés.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.

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La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la discussion de la proposition de loi visant à répondre à la demande des patients par la création de Points d'accueil pour soins immédiats.

La séance est levée.

La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.

Le Directeur du service du compte rendu de la séance

de l'Assemblée nationale

Serge Ezdra