Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 3 avril 2019 à 16h25

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Présidence

La commission poursuit l'examen, en première lecture, du projet de loi portant création d'une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l'impôt sur les sociétés (M. Joël Giraud, rapporteur général) (n° 1737).

Article 1er (suite)

La commission examine l'amendement CF115 de M. Éric Coquerel.

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Cet amendement tend à inclure parmi les services visés par la taxe sur les services numériques (TSN) la vente directe en ligne de biens matériels. Il vise clairement des sites marchands tels qu'Amazon qui, en 2017, n'a payé que 8 millions d'euros d'impôts en France pour un chiffre d'affaires mondial de 151,9 milliards. Compte tenu de la répartition des ventes, il doit y avoir anguille sous roche – en l'occurrence, une évasion fiscale qui passe par le Luxembourg, le Delaware ou ailleurs. Nous souhaitons que des mesures réelles et concrètes soient prises pour qu'Amazon ne concurrence pas de façon déloyale les librairies de quartier françaises, qui rencontrent de grandes difficultés.

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Nous avons eu hier le débat sur le commerce en ligne, qui n'est pas inclus dans le champ de la TSN. Nous avons proposé de nous rassembler tous autour d'un amendement de M. Carrez qui vise à ce que le Parlement dispose d'un rapport sur ce sujet réel – qu'il n'est pas question d'éluder – pour prendre des décisions dans le cadre du prochain projet de loi de finances (PLF). En attendant, votre amendement ne saurait être adopté puisque le commerce en ligne, compte tenu de sa nature, ne correspond pas au champ de la TSN ni à l'économie générale de celle-ci. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Elle en vient à l'amendement CF116 de Mme Sabine Rubin.

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Cet amendement a le même objectif que le précédent mais porte sur les biens immatériels, notamment les vendeurs de logiciels comme Microsoft qui, en l'état actuel de la rédaction de l'article 1er, ne seraient pas redevables de la TSN au titre des logiciels qu'ils vendent directement. Ils pourraient donc continuer de vendre des logiciels de bureautique aux entreprises françaises et aux administrations publiques, aux écoles et aux universités, profitant du même coup de la manne publique, en quelque sorte, pour réaliser des bénéfices. J'évoquais Amazon il y a un instant, mais le fisc français reproche aussi à Microsoft d'avoir mis sur pied un dispositif d'évasion fiscale lui permettant de transférer des sommes colossales vers l'Irlande. C'est pourquoi nous demandons la taxation de la vente directe en ligne de biens immatériels.

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Il s'agit encore du commerce en ligne. Microsoft est taxé par ailleurs sur la publicité. Avis défavorable ; je vous propose de vous rallier à l'amendement de M. Carrez visant à la remise d'un rapport avant le prochain PLF.

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La taxation de la publicité ne nous suffit pas : des ventes directes sont également réalisées auprès des administrations, notamment. Il faut aller plus loin.

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Cette question a plutôt trait aux prix de transfert, qui feront l'objet de nouvelles modalités de traitement dans le cadre des lignes directrices que l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a adoptées récemment.

La commission rejette l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CF105 de M. Charles de Courson.

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Cet amendement vise à préciser l'alinéa 10 de l'article, qui prévoit d'exclure des services taxables certains services fournis entre entreprises appartenant à un même groupe, en ajoutant que les entreprises en question sont « situées en France ou à l'étranger » – à moins que le Gouvernement ne nous confirme que c'est bien le cas.

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Votre amendement est satisfait par le texte. J'ajoute que nous examinerons en séance publique des amendements concernant les cas que vous avez soulevés hier.

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Autrement dit, les services en question sont-ils exclus du champ de la taxe dans tous les cas, que les entreprises soient situées en France ou à l'étranger ?

L'amendement est retiré.

La commission examine l'amendement CF44 de M. Jean-Paul Dufrègne.

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Le texte fixe deux seuils cumulatifs : 750 millions d'euros de chiffre d'affaires au niveau mondial et 25 millions de chiffre d'affaires en France. Or ces deux seuils s'entendent en termes d'activité numérique, et sont donc restrictifs puisqu'ils excluent d'office le chiffre d'affaires réalisé dans d'autres domaines. Le présent amendement vise à ajuster les seuils de sorte qu'ils s'entendent quelle que soit l'importance de l'activité numérique dans l'activité globale de l'entreprise. Ils porteraient donc sur toutes les activités confondues, étant entendu que la taxe ne s'appliquerait naturellement qu'aux activités taxables.

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Le ministre a abordé cette question dès son allocution liminaire hier. Il est cohérent et normal de faire reposer les seuils sur l'activité numérique, car la TSN concerne des services particuliers : les utilisateurs – je me répète – y jouent un rôle primordial dans la création de valeur et les effets de réseau y sont massifs et essentiels. Avis défavorable.

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Néanmoins, une telle disposition permettrait d'englober des entreprises ayant un chiffre d'affaires numérique inférieur aux seuils prescrits mais tout de même important, dont les activités, autrement, ne seraient pas taxées. Malgré ce moindre chiffre d'affaires numérique, elles seraient taxables parce que leur chiffre d'affaires global dépasse les seuils.

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Nous avons abordé la question des seuils ce matin avec M. Saint-Amans, directeur du centre de politique et d'administration fiscales de l'OCDE. L'équilibre de la taxe française permet précisément de capter les pure players tout en préservant la compétitivité économique de certaines entreprises européennes et françaises.

La commission rejette l'amendement.

Elle étudie l'amendement CF141 de M. Éric Bothorel.

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L'article 1er fixe deux seuils au titre desquels une entreprise est redevable de la taxe sur les services numériques : le premier vise un chiffre d'affaires mondial de 750 millions d'euros réalisé au titre des services fournis lors de l'année civile précédant l'année d'exigibilité, et le second un chiffre d'affaires de 25 millions d'euros au titre des services fournis en France. Le présent amendement maintient ces deux seuils mais prévoit qu'ils doivent être dépassés pendant deux années consécutives. Cette modification permettrait de ne pas pénaliser les entreprises qui se trouveraient à la limite des seuils et ne le dépasseraient qu'exceptionnellement.

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Je comprends votre objectif, mais le dispositif proposé par le Gouvernement me paraît tout à fait satisfaisant. Tout d'abord, il est simple ; en matière fiscale, c'est une vertu. En outre, il correspond à un mécanisme déjà existant dans notre droit, par exemple concernant la taxation des transactions financières : pour qu'elle s'applique, la capitalisation boursière doit être supérieure à 1 milliard d'euros au 1er décembre de l'année précédente. Enfin, ce secteur se caractérise par une forte croissance et le risque de dépassement ponctuel est très marginal. Je vous propose de retirer l'amendement.

L'amendement est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF47 de M. Fabien Roussel, CF90 de M. Éric Coquerel et CF57 de M. Fabien Roussel.

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L'amendement CF47 vise à abaisser les seuils d'assujettissement afin d'étendre le champ de la taxe et d'en améliorer le rendement. L'amendement CF57 est un amendement de repli.

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L'amendement CF90 vise à abaisser le seuil d'assujettissement à la taxe de 750 à 250 millions d'euros de chiffre d'affaires réalisé dans le monde. En l'état, la mesure ne touche que les géants de l'internet – une trentaine de groupes seulement, selon le Gouvernement – et non les grosses entreprises du numérique. Certes, il ne faut pas taxer les jeunes entreprises françaises du numérique – les start-up, pour reprendre un terme à la mode – mais un seuil fixé à 250 millions d'euros ne les concernerait pas.

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Ces trois amendements, à quelques différences près, visent à abaisser le seuil d'assujettissement à la taxe. Il me semble que les seuils proposés par le Gouvernement sont cohérents. Le seuil de 750 millions est connu et déjà utilisé en droit français, dans l'Union européenne et par l'OCDE. D'autre part, les deux seuils permettent – c'est un élément fondamental du périmètre de la taxe – de garantir que les entreprises taxées ont une empreinte numérique significative et suffisamment forte qui justifie leur assujettissement. Je suis donc défavorable à la modification de ces seuils qui, de surcroît, ne sont pas isolés : le seuil britannique, par exemple, obéit à la même logique puisqu'il est fixé à 25 millions de livres.

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Le ministre, hier, n'a pas répondu à l'une de mes questions sur les seuils. La proposition européenne s'oriente vers un seuil de 50 millions d'euros ; nous avons choisi 25 millions. Pourquoi ne pas avoir retenu le seuil européen ? Il est bon de débattre des hausses et des baisses de seuils, mais encore faut-il pouvoir les objectiver ! Puisque nous avons pu réduire le seuil par rapport à la directive européenne, pourquoi ne pourrait-on pas l'augmenter ou le baisser davantage ? Sur quel critère objectif ce choix se fonde-t-il ?

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L'alinéa 22 de la proposition de directive européenne fixe bien le seuil du chiffre d'affaires mondial à 750 millions d'euros, mais celui du chiffre d'affaires national à 50 millions. Pourquoi vous caler sur le texte européen pour le premier seuil et non pour le second, que vous avez divisé par deux ?

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

En effet, nous avons conservé le montant du chiffre d'affaires mondial, mais n'avons pas calqué le seuil du chiffre d'affaires national sur le montant européen, tout simplement parce que le produit intérieur brut (PIB) de la France n'est hélas pas encore équivalent à celui de l'Europe entière.

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La France ne représente tout de même pas 50 % du PIB de l'Union européenne !

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Non, il équivaut à 21 % de celui de la zone euro.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Certes, nous n'avons pas non plus adapté le pourcentage au point près, mais le seuil de 25 millions nous a paru raisonnable eu égard au poids de l'économie française et à l'objectif de la taxe.

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Concluons, monsieur Aubert, et évitons de multiplier les calculs à l'infini.

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C'est tout le problème du débat en commission : une fois dans l'hémicycle, on nous dit que le débat a déjà eu lieu en commission ! Je sais bien qu'il n'est jamais temps de débattre…

Tout de même : s'il faut fixer un seuil qui corresponde à la part de l'économie française dans le PIB européen, alors il faut le fixer à 20 % de 50 millions, soit un seuil beaucoup plus bas. Pourquoi le fixer à la moitié ? Ce choix procède-t-il d'une étude attestant de la concentration des services numériques en France et de l'intensité numérique du PIB français, qui serait supérieure aux PIB des autres pays européens ? Si nous voulons débattre du bon seuil dans l'hémicycle, il faut pouvoir l'objectiver en fonction d'un étalon ; or je ne comprends pas l'étalon.

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La proposition de directive prévoit que « le montant total des produits imposables générés par l'entité dans l'Union durant cet exercice dépasse 50 millions d'euros ». Appliquons donc votre règle, monsieur le ministre : 20 % de 50 millions font 10 millions, et non 25 millions. La France ne pèse pas 50 % du marché européen !

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Je m'étonne que l'on cite l'exemple du Royaume-Uni en période de pré-Brexit alors que l'on ne cite pas celui de l'Italie, qui propose un seuil de 5,5 millions, ni celui de l'Espagne, qui proposait un seuil de 3 millions. Expliquez-nous de manière plus objective ce qui motive le choix de ce montant. Si l'on applique le critère du prorata de la population française par rapport à celle de l'Europe, le seuil devrait s'élever à quelque 6,5 millions d'euros. À ce stade, je n'ai donc pas reçu de réponse qui me satisfasse.

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La taxe française porte sur le chiffre d'affaires numérique. Vous comparez des choux et des carottes : les seuils ne sont pas de même nature.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Je formulerai trois arguments. Premièrement : nous avons choisi un seuil correspondant à la moitié du chiffre d'affaires retenu au niveau européen sans le calquer sur la part de la richesse française dans la richesse européenne. Ce seuil me semble raisonnable. D'autre part, notre objectif consiste à ce que cette taxe s'applique dès lors que l'utilisation des données produit un effet de réseau, qui doit donc exister. Enfin, à trop baisser le seuil, on risquerait d'englober dans le champ de la taxe un nombre important de filiales françaises de grands groupes qui réalisent un chiffre d'affaires mondial supérieur à 750 millions d'euros.

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J'ajoute un scoop pour celles et ceux qui n'auraient pas lu la presse germanophone du jour : le gouvernement autrichien a annoncé ce matin même que le seuil serait également fixé à 25 millions d'euros dans son pays.

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Justement : l'Autriche représente une part encore moins importante de la richesse de l'Union : c'est incohérent !

La commission rejette successivement les amendements.

Elle est saisie de l'amendement CF134 de Mme Frédérique Dumas.

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Il apparaît clairement que le problème tient au choix du chiffre d'affaires comme critère d'assujettissement, puisqu'il faut s'employer à faire sortir des entreprises du champ de la taxe – d'où cet amendement. Vous citez souvent l'exemple du Royaume-Uni, mais seulement quand cela vous arrange. Rappelons qu'il n'applique pas encore cette taxe puisqu'elle est assortie d'une clause d'application différée – ou sunrise clause. Ensuite, il a en effet proposé d'éviter le jour venu – c'est-à-dire dans un an si les travaux de l'OCDE n'ont pas abouti d'ici là – de taxer les entreprises déficitaires ou réalisant des marges faibles, en l'occurrence inférieures à 2 %, puisque c'est le taux de la taxe britannique. Par cet amendement, nous proposons quant à nous d'exonérer les entreprises dont le ratio du résultat opérationnel au chiffre d'affaires est inférieur ou égal à 3 %.

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Je comprends votre raisonnement mais, sur le plan juridique, votre amendement est plus que fragile. Le mécanisme britannique auquel vous faites référence n'est en rien analogue à celui que vous présentez puisqu'il vise non pas à exonérer les redevables, mais à calculer un montant de taxe différent. Le but est de réduire la charge fiscale en fonction de la marge, et non d'exonérer purement et simplement.

D'autre part, votre amendement risque de tomber dans le champ des conventions fiscales et, de ce fait, d'être neutralisé ; il ne serait donc pas opérant. Avis défavorable.

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Reste que cet amendement pose un réel problème. Supposons qu'une entreprise ne fasse que 1 % de bénéfices : vous la placerez en situation de déficit reportable. En clair, cette taxe coûtera au Trésor public. L'avantage que présente l'amendement de Mme Dumas tient au fait qu'il protège les finances publiques. En deçà de 3 % de bénéfices, la taxe rendra l'entreprise déficitaire puisqu'elle est déductible ; c'est donc un amendement protecteur. Autrement, que dirons-nous aux entreprises que nous mettrons en déficit ou dont nous aggraverons le déficit existant ?

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Qu'elles ne rapatrient pas assez de profits en France.

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Moyennant un report déficitaire qui plombera les finances publiques !

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Non, puisque le déficit est déductible – donc reportable.

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Le rapporteur général a présenté deux arguments : le premier, juridique, portait sur les conventions, mais j'ose espérer que le Royaume-Uni est lié par les mêmes conventions fiscales et les mêmes impératifs juridiques, a fortiori parce qu'il n'a pas encore quitté l'Union européenne. Cet argument me semble donc ne pas pouvoir prospérer.

Votre second argument consistait à préciser la nature de la mesure adoptée au Royaume-Uni. Soit, mais que cela ne nous empêche pas de réfléchir – quitte à ne pas accepter cet amendement – à l'opportunité d'un mécanisme visant non pas à supprimer l'impôt mais à en alléger la portée dès lors qu'une entreprise serait faiblement rentable, notamment une start-up.

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Le seuil est fixé à 750 millions d'euros !

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Certes. Quoi qu'il en soit, on peut toujours partir du principe que nos voisins adoptent des mécanismes sans y avoir réfléchi ; on peut aussi estimer utile, même si votre projet de loi est parfait et ne souffrira aucune modification, de s'inspirer d'exemples étrangers. En l'occurrence, si les Britanniques ont adopté cette mesure, c'est qu'ils y ont réfléchi. Tenons-en compte avant de balayer cette proposition au motif qu'elle ne trouverait pas à s'appliquer dans le dispositif tel qu'il nous est proposé.

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Pour atténuer concrètement les effets collatéraux négatifs de ce système que d'aucuns estiment être la pire des solutions – n'allons pas jusque-là mais disons qu'il n'est pas la bonne solution, surtout à l'échelle nationale –, je regrette qu'il ne soit pas envisagé de ne pas taxer des entreprises accusant un déficit ou de faibles marges. On invoque un problème juridique mais votre texte en présente bien d'autres que vous vous gardez de mentionner. D'autre part, les Britanniques ont été prudents avant d'adopter cette mesure. Surtout, si vous estimez qu'ils font n'importe quoi, cessez de les citer en exemple pour prétendre qu'ils font comme nous ! Au contraire, ils ne font pas du tout la même chose que nous : ils s'emploient à atténuer les effets négatifs de cette taxe dont l'application est différée en attendant des avancées à l'OCDE. Si cet amendement ne vous convient pas, il faudrait au moins trouver un mécanisme permettant de résoudre ce réel problème.

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Les start-up ne sont guère concernées par un seuil de 750 millions d'euros de chiffre d'affaires à l'échelle du groupe. Surtout, le problème tient au fait que bon nombre de ces entreprises ne localisent pas leurs bénéfices imposables en France ; elles délocalisent leurs marges. C'est comme cela qu'Amazon a pris des parts de marché dans tous les pays d'Europe, en y vendant à perte. Ce critère ne saurait donc être retenu alors même que nous cherchons à rééquilibrer la taxation du numérique.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Je ne vous cache pas que je peine à comprendre cet amendement – je vous le dis sincèrement. Cette taxe de 3 % vise des entreprises dont le chiffre d'affaires est d'au moins 750 millions d'euros au niveau mondial et d'au moins 25 millions au niveau national. Je laisse de côté le modèle britannique, qui n'est pas pertinent : vous ne me verrez jamais prendre quoi que ce soit qui vienne du Royaume-Uni en exemple pour l'Europe. En toute franchise, il y a sans doute bien d'autres entreprises à protéger que celles que vous souhaitez protéger par cet amendement.

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La question est très simple, monsieur le ministre : d'après vos calculs, trente groupes seront redevables de cette taxe. Y a-t-il parmi eux des entreprises déficitaires ou au « petit équilibre » ? Il semblerait qu'il y en ait une ou deux.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Je ne suis pas habilité à vous donner la liste des entreprises qui seraient assujetties, en vertu de la règle du secret fiscal que vous connaissez parfaitement. Croyez-moi cependant : ce ne sont pas des entreprises qui vous feront pleurer.

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Vos propos sont graves, monsieur le ministre. Tout d'abord, j'aimerais que vous cessiez de prétendre que nous cherchons à protéger des entreprises qu'il ne faudrait pas protéger…

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

C'est le sentiment que vous donnez, madame Dumas.

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Ce n'est qu'un sentiment. Vous dites que la taxe va gêner les géants du numérique mais chacun a vu comment ils se sont mobilisés lors de l'examen de la directive européenne sur le droit d'auteur. Or pas un seul de ces géants ne m'a appelée concernant la présente taxe : il n'existe pas de lobby des fameuses « grandes entreprises » dont vous parlez. En revanche, les entreprises françaises et européennes qui paient des impôts considérables en France – à hauteur de plusieurs dizaines de millions d'euros, voire 100 millions – seront affectées. Vous nous dites que les seuils sont élevés mais, dans le numérique, ces montants sont négligeables ! Les capitalisations atteignent des milliards d'euros. Vous prétendez que ce n'est pas grand-chose, mais c'est une mesure grave pour les entreprises françaises ! Je vous ai même entendu hier estimer que l'on pouvait sans gravité imposer trois taxes successives aux entreprises ! Résumons : on taxe les entreprises qui créent des emplois, même lorsqu'elles sont déficitaires ou en période de faibles marges, ou encore en période d'investissement – car, dans le secteur des nouvelles technologies, les investissements nécessaires sont colossaux. Ne laissez pas entendre que nous voulons « protéger » certaines entreprises !

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Je ne vois guère comment cet amendement pourrait s'appliquer sur le plan technique, car un résultat opérationnel de 3 % est presque un résultat équilibré. Je comprends l'esprit de l'amendement mais il ne me semble pas applicable. J'ajoute que dans le secteur des nouvelles technologies, les comptes d'exploitation présentent généralement des résultats très faibles mais les entreprises vont souvent chercher des milliards sur le marché, et leur potentiel se trouve plutôt en haut de bilan qu'en bas de bilan.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CF23 de M. Charles de Courson.

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J'anticipe sur le problème du calcul de l'assiette. Il est proposé d'effectuer un prorata entre le nombre de clics effectués en France et celui effectué au niveau mondial, et d'appliquer le pourcentage obtenu au chiffre d'affaires généré au niveau mondial. Reste que le nombre de clics est difficile à quantifier, dans la mesure où, comme nous l'ont expliqué de nombreux spécialistes, on peut, depuis la France, utiliser une adresse IP basée à l'étranger, ce qui empêchera que vous soyez comptabilisé comme un utilisateur français.

L'objet de mon amendement est donc de préciser que l'adresse IP doit être en France.

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Votre amendement entend préciser que l'adresse IP doit être en France pour que l'utilisateur d'une interface soit considéré comme localisé en France.

Au-delà de l'ambiguïté rédactionnelle qui ne permet pas de savoir à coup sûr si l'adresse IP fait référence à celle de l'utilisateur ou du terminal, ce n'est pas tant l'adresse IP qui est en France que le terminal, dont la localisation est rendue possible par l'adresse IP – qui, elle, n'est nulle part.

Sur le fond, je crains que l'amendement ne puisse conduire à des difficultés opérationnelles. Si l'adresse IP devrait, dans l'écrasante majorité des cas, permettre de localiser l'utilisateur, il pourra arriver qu'elle ne suffise pas, notamment si plusieurs terminaux ont la même adresse – ce qui peut arriver, bien que ce soit rare. C'est pourquoi le texte ne fait pas explicitement référence à l'adresse IP, et pourquoi la proposition de directive ajoutait que la localisation pouvait se faire par tout autre moyen utile. Avis défavorable.

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Le but de mon amendement est de clarifier l'alinéa 17, qui précise que l'utilisateur d'une interface numérique est localisé en France dès lors qu'il utilise un terminal situé en France. Comment, en effet, localise-t-on un terminal ?

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Il peut être localisé par l'adresse IP ou tout autre moyen utile. Or votre précision restreint le champ de ces moyens.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Le critère de localisation principal, c'est l'adresse IP, mais ce n'est pas le critère unique. Cela sera indiqué dans la doctrine fiscale, notamment dans le Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP), qui précisera, dans le respect de la hiérarchie des normes, que l'adresse IP peut faire partie des éléments utilisés par les redevables pour territorialiser l'assiette, à charge ensuite de définir éventuellement d'autres éléments pour compléter cet élément principal qu'est l'adresse IP.

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La réponse du ministre est un peu plus claire, mais ceci est du domaine de la loi, et non du décret. Je pense donc, monsieur le ministre, qu'il faudrait que vous amendiez votre texte pour y ajouter cette précision.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Je ne le ferai pas, pour deux raisons. D'abord parce qu'on entre là dans un niveau de détails qui ne me semble pas relever du domaine législatif ; ensuite parce que ces critères sont voués à évoluer en fonction des technologies : les techniques de géolocalisation évoluent quasiment tous les six mois.

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En vertu de l'article 34 de la Constitution, c'est au Parlement et non au Gouvernement qu'il revient de fixer l'assiette de l'imposition.

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Je comprends la préoccupation de M. de Courson, mais beaucoup d'internautes sont attachés à la préservation de leur anonymat et utilisent pour cela des réseaux privés virtuels – virtual private networks – qui leur permettent d'avoir une adresse IP localisée hors du territoire. L'adresse IP n'est donc pas suffisante pour localiser un internaute.

La commission rejette l'amendement.

Elle en vient à l'amendement CF24 de M. Charles de Courson.

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Il s'agit de préciser l'alinéa 19, car il arrive qu'une livraison soit fractionnée – on a le même problème avec la TVA. Il faut donc intégrer dans l'assiette de la taxe les livraisons, y compris lorsqu'elles sont fractionnées.

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Cet amendement est satisfait, car ce qui compte, c'est le fait que l'interface permette une mise en relation, ici pour réaliser des transactions. La façon dont les transactions sont ensuite effectuées n'a pas d'importance en soi. Je vous en demande donc le retrait.

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Je comprends donc que, selon vous, en cas de livraison fractionnée, c'est le premier clic qui est comptabilisé.

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C'est le service d'intermédiation qui est taxé, pas la livraison.

L'amendement est retiré.

La commission est saisie de l'amendement CF104 de Mme Marie-Christine Dalloz.

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Je propose, à ce problème de calcul de l'assiette, une solution pragmatique qui me semble relever du bon sens.

En effet, l'alinéa 40, qui précise que « les redevables conservent, à l'appui de leur comptabilité, l'information des sommes encaissées mensuellement en contrepartie de chacun des services taxables fournis, en distinguant celles se rapportant à un service fourni en France, […] ainsi que les éléments quantitatifs mensuels utilisés pour calculer les proportions [de ceux-ci] » me semble d'une trop grande complexité. Je suggère donc que le fait générateur soit non pas la consultation d'une publicité, mais bien l'acquisition par un annonceur localisé en France de prestations publicitaires. Est-ce envisageable ou non ?

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Vous proposez que la réalisation en France d'un service de publicité ciblée dépende de la localisation en France de l'annonceur qui en bénéfice.

D'une part, l'assiette de la TSN ne repose pas sur les sommes encaissées par opération, mais sur une répartition globale, fonction de la proportion d'utilisateurs français. C'est donc la localisation des utilisateurs qui est pertinente.

D'autre part, compte tenu de l'économie générale de la TSN, la localisation de l'annonceur est totalement indifférente, et la prendre en compte serait paradoxal : toutes les publicités affichées en France mais qui concerneraient des annonceurs étrangers, donc des entreprises étrangères, seraient hors de l'assiette.

Je suggère donc le retrait de l'amendement.

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La manière dont vous prévoyez d'estimer la part de la France dans l'activité mondiale me paraît une ineptie.

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Votre solution se fonde sur une évaluation statistique. L'avantage de la proposition de Marie-Christine Dalloz est qu'elle repose sur une approche plus traditionnelle du calcul de l'impôt. Il me semble qu'avant de repousser cet amendement, il faudrait analyser ce que serait le produit de la taxe dans un cas et dans l'autre. Si on s'aperçoit en effet que, avec ce que propose Marie-Christine Dalloz, certains étrangers échappent à la taxe mais que, au bout du compte, celle-ci rapporte plus, on pourrait opter pour cette simplification.

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Je souhaite une précision sur l'assiette des services de publicité. En effet, à l'alinéa 9, il est indiqué que sont notamment concernés « les services commercialisés auprès des annonceurs, ou de leurs mandataires, visant à placer sur une interface numérique des messages publicitaires ciblés ». La base taxable correspond-elle donc au prix de la publicité payé par l'annonceur à la plateforme, ou considère-t-on que le service commercialisé est à un coût différent ?

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C'est le service d'affichage publicitaire qui est pris en compte.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Nous partons du principe que ce sont les utilisateurs qui créent la valeur avec leurs données. L'amendement de Mme Dalloz s'inscrit dans une logique radicalement différente, qui revient à épargner des entreprises étrangères installées à New York, Washington ou Sydney, et utilisant sans être taxées les données personnelles de consommateurs situés en France, ce qui est révoltant.

L'outil que nous employons, à savoir le chiffre d'affaires, est certes rudimentaire, mais c'est le seul disponible aujourd'hui ; dès que nous tentons de raffiner le dispositif, comme nous y travaillons depuis deux ans avec l'OCDE, nous ne parvenons qu'à détourner la taxe de son objet.

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Vous me dites que l'assiette sera calculée non pas à partir du coût de la publicité mais de celui du service d'affichage : à titre d'exemple, si une plateforme facture une publicité 1 000 euros à un annonceur, quelle est la part de cette somme imputable au service commercialisé, et les entreprises disposent-elles de cette donnée ?

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Dans la mesure où une entreprise paie un prestataire, il me semble qu'elle connaît le prix de la prestation, puisque c'est elle qui fait l'objet d'une tarification.

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Le seul montant connu aujourd'hui, c'est le prix facturé à l'annonceur, qui génère du chiffre d'affaires pour la plateforme. Or ce prix correspond bien au coût de la publicité, mais est-il assimilable au coût de l'affichage ?

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Cela dépend du contrat passé et de ce que couvre le tarif, au-delà de l'affichage. Si, sur les 1 000 euros, il y a 200 euros de frais de « technique », ce sont les 800 euros facturés pour l'affichage qui serviront de base de calcul.

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Nous avons visiblement un problème de définition de l'assiette. Peut-être le ministre, qui est à l'origine de ce texte, pourrait-il nous expliquer précisément à quoi correspond l'assiette de la taxe sur les publicités ciblées.

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Le plus souvent, l'annonceur a déjà conçu sa publicité et demande simplement à la plateforme de la diffuser. Me confirmez-vous donc que c'est sur cette prestation qu'est calculée l'assiette ?

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Tout dépend des modèles. Criteo, qui commercialise de la publicité ciblée, saura exactement quelle part de son chiffre d'affaires entre dans l'assiette. Facebook le saura aussi. Dans d'autres cas, l'assiette n'apparaîtra pas clairement dans la comptabilité sociale et il faudra procéder à une répartition. Il est donc clair que, dans les premières années, il y aura du tâtonnement dans les déclarations. Il y aura également des rescrits, ce qui est autorisé par la loi.

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C'est parce que nous nous appuyons sur le chiffre d'affaires que les choses sont complexes. En effet, l'approche statistique est parfois très éloignée de la réalité économique, a fortiori lorsqu'on essaye de donner une définition générale de business models qui non seulement sont très divers, mais évoluent sans cesse. La proposition de notre collègue est donc assez pertinente, parce qu'elle se fonde sur la réalité économique.

En matière de publicité privée, par exemple, lorsque l'affichage est vendu aux enchères aux annonceurs, aucun des clics n'aura de valeur économique, à l'exception du dernier, qui remporte l'enchère. C'est cette distorsion par rapport à la réalité qui fait que votre dispositif risque de poser des problèmes juridiques.

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Si j'ai bien compris, nous allons définir l'assiette en calculant, statistiquement, le pourcentage de consultations opérées depuis la France, pourcentage par lequel on multipliera le chiffre d'affaires global, puisqu'on ne peut obtenir autrement la part du chiffre d'affaires réalisée en France. Le ministre a raison de parler d'assiette assez grossière…

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Monsieur le ministre, peut-être pourriez-vous revenir sur cette question de l'assiette pour la publicité ciblée, et éclairer les commissaires.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Le principe de base, c'est le coefficient de présence numérique en France. Ce coefficient sera déterminé au prorata des utilisateurs français actifs sur le service, selon les caractéristiques propres à chaque catégorie de service : la publicité ciblée, autre que la vente de données, la vente de données à des fins publicitaires, les services qui permettent à des acheteurs et à des vendeurs de réaliser des transactions via les places de marché, les services, enfin, mettant en relation des acheteurs et des vendeurs sans leur permettre de réaliser des transactions via le site internet, ce qui d'ailleurs n'inclut pas les mises aux enchères.

Il me semble que tout ceci est relativement précis, et il me semble que vous coupez les cheveux en quatre en voulant à tout prix définir le périmètre de la taxe au centime près, et je ne vois donc pas, honnêtement, la difficulté que vous soulevez.

La commission rejette l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CF142 de M. Éric Bothorel.

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Je m'excuse par avance de couper les clics en quatre… mais il est important à mes yeux de lever toute ambiguïté sur la définition des services de ciblage publicitaire concernés et de l'assiette assujettie à la taxe, notamment au regard de la technicité et de la complexité du secteur de la publicité numérique ciblée. Cette nécessaire clarté permettra d'assurer une meilleure sécurité juridique et facilitera l'implémentation de cette taxe pour l'administration fiscale. Il est très probable que l'incertitude sur la valeur de l'assiette conduise à des interprétations divergentes de la loi entre les contribuables et l'administration fiscale française, pouvant engendrer des coûts administratifs élevés.

Il convient en particulier de souligner que le simple placement d'un message publicitaire sur une interface numérique n'a pas la même valeur que la consultation d'une publicité ciblée par un utilisateur. La confusion entre ces différents schémas pourrait avoir un impact indirect sur les services délivrant à titre principal des contenus numériques, notamment les sites d'information, dont le modèle économique repose en grande partie sur la valeur portée par la publicité ciblée.

Le temps de la concertation lors de l'écriture du décret permettra de faire ressortir les standards utilisés par l'industrie. Ce temps nécessaire et utile pourrait être également mis à profit pour une coordination entre les autorités compétentes en la matière, notamment concernant les enjeux de la conservation des données personnelles des utilisateurs et l'efficience de l'administration fiscale.

Aussi le présent amendement propose-t-il de renvoyer à un décret la définition des modalités de consultation d'une interface numérique et de messages publicitaires.

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Votre amendement renvoie à un décret la définition des modalités de consultation de l'interface sur laquelle un message publicitaire apparaît et de consultation dudit message publicitaire.

Le dispositif proposé par le Gouvernement n'exige en aucun cas que l'utilisateur de l'interface consulte effectivement la publicité : c'est l'interface sur laquelle le message apparaît, et non ce dernier, qui doit être consultée – sans doute est-ce l'un des points qui a généré de la confusion. Votre amendement ajoute donc une exigence qui ne figure pas dans la loi.

Au demeurant, la non-consultation des messages publicitaires est un état de fait totalement intégré dans le modèle économique de la publicité ciblée. C'est d'ailleurs pour cela qu'il existe, à côté de la tarification par clic dite « coût par clic », ou CPC, une tarification par volume d'affichage indépendamment de la consultation effective des messages : le coût par mille – entendre « mille affichages » – ou CPM.

Je vous invite donc à retirer cet amendement, faute de quoi mon avis sera défavorable.

La commission rejette l'amendement.

L'amendement CF25 de M. Charles de Courson est retiré.

La commission en vient à l'amendement CF106 de M. Charles de Courson

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Il s'agit d'un petit amendement précisant que l'on parle bien des encaissements au niveau mondial.

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Votre amendement entend apporter une précision sur le fait que les encaissements faits par le redevable s'entendent au niveau mondial.

Sur la forme, tel qu'il est rédigé, il conduirait à dire que les sommes encaissées en contrepartie d'un service fourni en France le sont au niveau mondial, ce qui n'a pas tellement de sens.

Sur le fond, il me paraît satisfait : l'assiette de la TSN repose en effet déjà sur les sommes encaissées au niveau mondial, auxquelles est appliqué un coefficient qui représente la part des utilisateurs français dans le total des utilisateurs du service taxé.

L'amendement est retiré.

La commission adopte ensuite l'amendement rédactionnel CF65 du rapporteur général.

Puis elle examine les amendements identiques CF35 de M. Charles de Courson et CF100 de Mme Marie-Christine Dalloz.

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Mon amendement porte sur la définition de l'assiette et vise à exclure les opérations pour lesquelles un vendeur français fournit un bien ou une prestation de service à un utilisateur étranger par le biais d'une interface numérique dont la mise à disposition constitue un service taxable.

En effet, inclure de telles opérations dans les opérations rattachables à la France pour la détermination de la proportion visée dans le code général des impôts, dans sa rédaction telle que prévue par le projet de loi, conduirait, en cas de répercussion d'une partie de la taxe sur les commissions payées par les vendeurs, à un renchérissement du coût des exportations. Ce dernier risque d'affecter en majorité les particuliers et les petites et moyennes entreprises françaises qui exportent des biens et des services par le biais d'interfaces numériques. Il s'agit donc d'éviter ce type de distorsion de concurrence.

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Il s'agit bien d'exclure du champ de la taxe les entreprises françaises qui travaillent à l'exportation. Notre déficit commercial est suffisamment massif pour qu'on ne les pénalise pas.

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Ces amendements proposent de considérer comme réalisés en France, pour des services d'intermédiation permettant la réalisation de transactions entre utilisateurs, uniquement ceux dans lesquels l'acheteur, le client, est en France. Cela exclut donc de l'assiette toutes les opérations où l'utilisateur français est le vendeur ou le prestataire. Une telle restriction ne me paraît pas souhaitable. Avis défavorable.

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Une entreprise française qui produit de l'électroménager et exporte en Allemagne via un service d'intermédiation va donc acquitter la taxe.

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Certes, mais vous partez du principe que l'interface ne répercutera pas cette taxe sur le vendeur, ce qui est nier la réalité. Il y aura donc une incidence économique, qui va pénaliser l'entreprise vendeuse et créer une distorsion de concurrence par rapport à une entreprise allemande qui commercialise le même bien.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Monsieur de Courson, je ne veux pas qu'on joue avec les peurs des uns et des autres en laissant entendre qu'on va pénaliser les exportations des petites et moyennes entreprises (PME) françaises : ce n'est pas raisonnable et ça ne correspond pas à la réalité ! Pardon d'être un peu brutal, mais si je suis ouvert au débat démocratique, il ne me paraît pas opportun de susciter inutilement la peur. Croyez-moi, si on voulait favoriser les exportations françaises, il y aurait bien d'autres sujets sur lesquels intervenir en priorité, à commencer par les impôts de production.

Je rappelle au demeurant que le montant de la taxe s'élèvera à 3 % maximum – cela dépendra de la façon dont les grandes entreprises du secteur numérique la répercuteront – sur la commission de 10 % ou 12 % prélevée par ces entreprises. Par ailleurs, prenant l'exemple de l'électroménager, vous semblez croire que la taxe va s'appliquer sur chaque appareil vendu : or, elle ne va pas s'appliquer transaction par transaction, mais sur un volume global de chiffre d'affaires. Enfin, vous partez du principe que la répercussion de ces 0,3 % ou 0,4 % sera intégrale, alors qu'il n'est pas exclu qu'ils soient dilués dans le chiffre d'affaires de la plateforme. Très franchement, je ne trouve pas crédible l'affirmation selon laquelle cette taxe va pénaliser les exportations françaises.

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Monsieur le ministre, vous me connaissez un peu, et vous savez donc que je n'ai rien d'un rigolo… ! Vous partez de l'hypothèse implicite selon laquelle cette taxe n'aura aucune incidence économique sur les tiers, mais cette hypothèse est-elle crédible ? Je ne suis pas Dieu, je ne sais pas tout, c'est pourquoi je me suis renseigné… Il se trouve qu'il existe une étude – qu'on peut contester, certes –, selon laquelle la répercussion de la taxe sur les utilisateurs se ferait à environ 50 % de son montant. Vous dites que ce n'est pas significatif, mais quand on connaît les marges des entreprises, même une taxe de 0,3 % ou 0,4 % représente des sommes considérables.

Par ailleurs, vous ne pouvez contester le fait que, si j'achète le même produit par le même moyen en Allemagne, je ne serai pas taxé. Vous voyez bien qu'il y a un vrai problème ! Votre hypothèse, selon laquelle il n'y aura aucune incidence économique, est bâtie sur un raisonnement de juriste, et non d'économiste.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Un raisonnement d'économiste, ne vous en déplaise, me conduit à penser qu'un groupe mondial faisant 750 millions d'euros de chiffre d'affaires, ne va pas répercuter l'incidence d'une taxe de 0,3 % sur sa seule filiale nationale, mais plutôt la diluer dans le chiffre total de son groupe – et avec votre parfaite connaissance des questions fiscales et économiques, vous le savez aussi bien que moi, monsieur de Courson !

L'idée selon laquelle un groupe s'emploierait à répercuter la taxe à 3 % portant sur sa commission de 10 %, uniquement sur un bien produit en France et exporté vers l'Allemagne ou l'Italie, pour pénaliser la PME française productrice, est totalement farfelue : très honnêtement, ce n'est pas ainsi que fonctionne un groupe mondial de cette taille et, de ce point de vue, votre raisonnement ne me paraît pas tenir la route.

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Monsieur le ministre, il existe une étude montrant que la répercussion de la taxe sur les utilisateurs est un peu supérieure à 50 %, et que les entreprises à qui l'on veut appliquer cette taxe ne seraient touchées qu'à hauteur de 5 % environ de son incidence. Si vous disposez d'une autre étude disant le contraire, pourquoi ne la produisez-vous pas ? Vous avouerez qu'il y a de quoi se poser des questions au sujet de votre hypothèse selon laquelle l'incidence économique serait nulle !

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Je vous rappelle que nous avons déjà eu exactement la même discussion hier, monsieur de Courson. Il y a manifestement un désaccord entre le Gouvernement et vous au sujet de ce texte et, une fois que nous avons fait le constat, il ne sert à rien de répéter sans cesse les mêmes arguments.

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Il y a un vrai problème, et le Gouvernement ne répond pas à nos questions !

La commission rejette les amendements identiques.

Puis elle est saisie de l'amendement CF66 du rapporteur général.

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Afin de lever une ambiguïté figurant dans le texte, cet amendement vise à préciser que les comptes ouverts en France doivent avoir été utilisés durant l'année d'imposition.

La commission adopte l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement CF67 du rapporteur général.

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Cet amendement prévoit de façon expresse que, dans l'hypothèse d'une cessation d'activité, le fait générateur intervient au moment de cette cessation, et non au 31 décembre de l'année durant laquelle elle intervient.

La commission adopte l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CF91 de M. Éric Coquerel.

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Par cet amendement, nous proposons de supprimer l'exclusion automatique des produits soumis aux droits d'accises – produits énergétiques, tabac, alcool – du champ de la taxe. Nous pensons que les plateformes numériques réalisant des bénéfices grâce à ces produits doivent payer la taxe au même titre que leurs concurrents ne vendant pas ce type de produits.

En effet, il serait un peu étrange qu'Amazon ne paye pas cette taxe au titre du vin qui est vendu via sa marketplace en ligne.

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Votre amendement supprime l'exclusion du champ de la TSN des sommes tirées de la mise à disposition d'une interface facilitant la vente de produits soumis à accises, tels que les boissons ou le tabac, si ces sommes sont directement liées au volume ou au prix des produits vendus.

Je partage votre préoccupation quant à l'insuffisance générale des impôts payés par certaines multinationales du numérique, et j'avais d'ailleurs cité l'entreprise à laquelle vous faites référence lors d'une question au Gouvernement le 6 mars dernier, puisque son taux d'imposition l'an dernier serait négatif malgré des profits records.

Cependant, l'exclusion prévue tend à garantir au dispositif sa conformité au droit européen. Revenir dessus exposerait donc sur ce point la taxe française à une condamnation par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), avec les conséquences que l'on sait pour les finances publiques d'un contentieux perdu.

Je suis donc défavorable à votre amendement.

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Si je comprends la position de M. le rapporteur général, il faut reconnaître que cet amendement soulève un problème bien réel : il est un peu choquant que l'alcool et le tabac vendus par les plateformes numériques échappent à la taxe.

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J'avais cru comprendre que, vis-à-vis des « GAFA » (Google, Amazon, Facebook, Apple), nous nous efforcions de modifier la réglementation européenne et qu'à défaut nous prenions des mesures de manière unilatérale. Je suis donc un peu étonné d'entendre le rapporteur général évoquer la conformité du texte au droit européen, surtout quand celui-ci présente un caractère aussi anormal qu'en l'occurrence. J'estime qu'il faut savoir sortir des traités européens, mais aussi qu'il faut savoir aller jusqu'au bout de notre démarche quand nous travaillons à la mise au point d'une mesure nationale d'application unilatérale.

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La violation du droit européen à laquelle je fais référence est en l'occurrence la violation d'une directive relative aux produits soumis à accises, transposée en droit national. Je maintiens donc mon avis défavorable, au motif que la disposition proposée nous exposerait à une condamnation par la CJUE.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CF145 du rapporteur général.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CF113 de M. Éric Coquerel, CF146 et CF59 de M. Jean-Paul Dufrègne ainsi que CF38 et CF39 de Mme Valérie Rabault.

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Par l'amendement CF113, nous proposons de rendre la taxe progressive suivant le chiffre d'affaires réalisé, avec un taux allant de 3 % à 10 %.

En effet, nous trouvons que la taxe prévue par le texte est trop peu ambitieuse. D'après nos calculs, elle ne rapporterait que 400 millions d'euros en 2019, dont seulement 16 millions d'euros seraient payés directement par les GAFA, le reste étant certainement répercuté sur les consommateurs. Selon l'économiste Gabriel Zucman, ce sont ainsi plus de 5 milliards d'euros qui échapperaient chaque année au fisc français du fait de l'évasion fiscale des multinationales, c'est-à-dire beaucoup plus que ce que le Gouvernement ambitionne de récupérer.

En outre, il faut rappeler que le Gouvernement avait initialement promis de présenter une taxe progressive. Bruno Le Maire avait même répondu à une question orale de Marie-Noëlle Lienemann au Sénat sur ce sujet en lui disant : « Vous devriez être contente, cette taxe sera progressive. » Par cet amendement, nous donnons donc la possibilité au Gouvernement de tenir sa promesse.

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Par notre amendement CF46, nous proposons également que la taxe sur les services numériques soit calculée progressivement, par l'application de trois taux différents – 3 %, 5 % et 7 % –, mis en oeuvre en fonction du niveau de chiffre d'affaires mondial de l'entreprise concernée. Comme vient de le dire Éric Coquerel, cette notion de progressivité figurait dans les plans initiaux de l'exécutif.

Une taxe progressive serait plus juste sur le plan fiscal. En outre, monsieur le ministre, vous avez hier affirmé à plusieurs reprises que vous souhaitiez continuer à disposer d'un levier afin que la France soit placée dans une situation plus favorable dans les négociations internationales. Il me semble qu'en adoptant cet amendement, vous en auriez un peu plus sous le pied !

L'amendement CF59 vise à porter le taux de la taxe de 3 % à 6 %, ce qui n'a rien d'extravagant quand on sait que l'Autriche a l'intention d'adopter un taux de 5 %. Compte tenu de la déductibilité de cette taxe du résultat comptable sur lequel est calculé l'impôt sur les sociétés (IS), le taux initial de 6 % serait en réalité situé à un niveau un peu inférieur, très proche de celui de 5 % envisagé par l'Autriche. Songez que si vous vous cantonnez au taux de 3 %, on risque de vous trouver singulièrement peu ambitieux dans le cadre des négociations internationales…

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L'amendement CF38 vise à porter le taux de la taxe de 3 % à 5 %. Ce taux de 5 % est en effet celui qui avait été proposé au sein du Parlement européen par le rapporteur néerlandais, ce qui n'a pu se faire en raison de l'opposition de quatre États membres sur vingt-huit.

Quant à l'amendement de repli CF39, il propose un taux de 4 %.

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J'ai, dès le départ, posé la question de la progressivité, comme vous pourrez le vérifier en lisant mon rapport, qui sera publié comme il est d'usage à l'issue des travaux de la commission. J'ai obtenu une réponse extrêmement claire sur les risques juridiques que nous ferait courir cette progressivité, en ce qu'elle conduirait à une forme de sélectivité qui pourrait rendre la taxe incompatible avec le droit européen.

Il existe une jurisprudence en la matière : l'éventuel caractère progressif d'une taxe sur le chiffre d'affaires n'est admis que s'il est nécessaire à l'objectif de la taxe, comme la Commission européenne l'a précisé en 2017 au sujet d'une taxe polonaise.

En ce qui concerne les amendements suivants, ayant pour objet d'augmenter le taux de la taxe, les travaux européens ont toujours lié la problématique du taux à celle de l'assiette. Or, le taux de 3 % est celui qui avait été expertisé par la Commission européenne pour une assiette reposant à la fois sur la publicité ciblée et les services d'intermédiation. Le taux de 5 % actuellement envisagé par l'Autriche ne concerne pas du tout la même assiette, puisque ce pays a décidé de supprimer l'intermédiation de l'assiette de la taxe sur le numérique, pour ne conserver que la publicité. Nous avons rencontré la direction générale de la fiscalité et des douanes à Bruxelles, qui nous a confirmé que le taux de 3 % était cohérent avec l'assiette que nous avons choisie.

Pour ces raisons, je suis défavorable à ces cinq amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle est saisie de l'amendement CF92 de Mme Sabine Rubin.

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Par cet amendement, nous souhaitons créer un taux majoré pour la taxe, qui s'appliquerait aux entreprises déclarant plus de la moitié de leurs bénéfices dans des États à fiscalité très faible. Il s'agit à la fois de faire application d'une sorte de principe de précaution et de taxer de manière plus juste des entreprises dont on peut estimer, non seulement qu'elles ne règlent pas tout ce qu'elles devraient au fisc français, mais qu'elles ont des arrangements avec des pays pratiquant une fiscalité agressive ou un dumping fiscal au détriment de leurs voisins.

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Cet amendement me semble poser deux problèmes. D'une part, il revient à surimposer lourdement des entreprises étrangères, ce qui induit une discrimination fondée sur la nationalité, contraire au droit européen et aux règles internationales. D'autre part, il revient à lier le taux de la TSN à des éléments propres à l'IS, ce qui présente un gros risque constitutionnel.

Je rappelle en effet que le Conseil constitutionnel a déjà censuré, le 19 mai 2017, un dispositif de ce type pour la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), dans lequel était prise en compte pour la détermination du taux effectif de la CVAE l'intégration fiscale, un mécanisme propre à l'IS.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine l'amendement CF43 de M. Fabien Roussel.

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Vous conviendrez que nous faisons beaucoup d'efforts pour essayer de rendre cette taxe efficace : après avoir fait des propositions visant à remédier au caractère insuffisant de son assiette et de son taux, nous voulons souligner qu'il est anormal que cette taxe, qui ne devrait rapporter que 400 millions d'euros bruts, soit en plus déductible de l'IS, ce qui diminue encore son rendement : ainsi son taux réel n'est-il pas de 3 %, mais sans doute plutôt de 2 %… Avec l'amendement CF43, nous proposons donc que cette taxe ne soit pas déductible de l'IS.

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Il est ici proposé d'introduire une disposition totalement dérogatoire au droit commun, ce qui ne me paraît pas opportun.

Par ailleurs, certains redevables de la TSN paient déjà l'IS, sans pratiquer l'évasion fiscale. Les empêcher de déduire la TSN de l'assiette imposable les pénaliserait excessivement : en quelque sorte, cela reviendrait à traiter plus durement ceux qui jouent le jeu que ceux qui éludent l'impôt, et les premières victimes seraient les entreprises françaises, pas les géants étrangers…

J'estime que votre amendement n'atteint pas la cible que vous visez, et qu'il aboutirait à pénaliser la vertu. J'y suis donc défavorable.

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Je souscris à ce que vient de dire M. le rapporteur général. En vertu des principes de droit commun de la fiscalité, les impôts et taxes sont des charges déductibles du résultat fiscal, à l'exception de ceux expressément non déductibles, notamment l'IS et certaines pénalités prévues en cas de fraude.

En l'occurrence, si cet amendement était mis en oeuvre, l'entreprise qui déclare ses impôts en France ne pourrait pas déduire certaines charges de son résultat fiscal français : pour elle, ce serait donc la double peine – IS et TSN. Or, la taxe a vocation à concerner des personnes qui ne sont pas forcément assujetties à l'IS en France, puisqu'elle concerne aussi des non-résidents. Je ne vois pas pourquoi les entreprises qui déclarent en France devraient se voir privées du droit de déduire la charge représentée par la TSN, par dérogation au droit commun.

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Je rappelle que nous avions proposé tout à l'heure des amendements visant à augmenter le taux de la taxe : si vous les aviez acceptés, celui que nous examinons actuellement n'aurait plus lieu d'être !

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Vous nous dites que notre proposition est « brutale », monsieur le président, mais que dire alors de la réponse du rapporteur général, qui évoque des entreprises vertueuses à qui il faudrait éviter d'appliquer une double peine ? Nous parlons tout de même d'entreprises pratiquant le transfert de leurs bénéfices vers des paradis fiscaux !

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Allons, il ne faut pas accuser toutes les entreprises situées dans le champ de la taxe de faire de l'évasion fiscale !

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Avant que le débat ne dérape totalement, je tiens à rappeler que le sujet dont nous débattons actuellement n'a rien à voir avec l'évasion fiscale. Ce que nous voulons taxer, c'est de la valeur créée sur la base de consommateurs français, c'est-à-dire une valeur qui n'est pas taxée aujourd'hui. Le problème de l'évasion fiscale sera traité dans un autre cadre, celui du G7, avec une imposition minimale à l'IS, afin que les multinationales ne puissent pas délocaliser leurs bénéfices vers des paradis fiscaux.

En aucun cas ce projet de loi n'a vocation à lutter contre l'évasion fiscale : il vise à toucher des entreprises qui, en l'absence actuelle de base fiscale, peuvent faire des bénéfices sur la base des données des consommateurs français et sans avoir à payer des impôts d'un même montant que ceux acquittés par les autres entreprises, en particulier les entreprises françaises. C'est une question de justice et d'efficacité, mais pas de lutte contre l'évasion fiscale.

Pour ce qui est de la progressivité, ce principe avait effectivement été envisagé, mais nous nous sommes rangés aux arguments de la Commission européenne et du Conseil d'État, qui nous ont indiqué que la création d'une taxe progressive pouvait poser un problème juridique.

Enfin, à ceux qui estiment que le taux de cette taxe n'est pas suffisant, en citant l'exemple de l'Autriche, je précise que si ce pays a fait le choix d'une taxe à 5 %, il a aussi pris une base plus étroite, puisque ne sont retenus au titre de la base taxable que les revenus tirés de la publicité – les plateformes étant, elles, exclues, du champ de la taxe. Il ne me paraît donc pas justifié de prétendre que la taxe française ne serait pas comparable à ce qui se fait ailleurs en Europe.

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Monsieur le rapporteur, nous n'avons jamais dit qu'il s'agissait d'une discrimination fondée sur la nationalité – rassurez-vous, nous n'en sommes pas encore à l'impôt universel, qui fait actuellement l'objet d'une mission d'information de la commission des finances. Ce que nous constatons, c'est une discrimination se faisant au profit des multinationales qui planquent leur argent dans les paradis fiscaux, ce qui n'est pas tout à fait la même chose.

Par ailleurs, je suis très étonné de vous entendre dire, monsieur le ministre, que ce projet de loi n'est pas destiné à lutter contre l'évasion fiscale des GAFA, alors que c'est pourtant ce que vous avez dit précédemment dans les médias…

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Tout dépend de ce que vous entendez par « évasion fiscale », monsieur Coquerel. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a des entreprises qui, aujourd'hui, en l'absence de dispositifs fiscaux permettant de taxer la création de valeur à partir des données de consommateurs français, échappent à l'impôt – sans volonté délibérée de leur part de le faire, mais simplement en raison de l'absence de dispositif fiscal adapté. Le présent projet de loi a précisément pour objet de mettre en place un tel dispositif fiscal, c'est pourquoi j'y crois profondément.

Il est un autre sujet qui me préoccupe tout autant que celui de l'absence de taxation des revenus tirés des données des Français, à savoir celui des multinationales qui réalisent des bénéfices sur la base du consommateur français et rapatrient ensuite ces bénéfices ailleurs qu'en France, ce qui leur permet de se soustraire à l'impôt français. Cette pratique est tout à fait inacceptable, et sera à ce titre combattue dans le cadre du G7.

La commission rejette l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CF68 du rapporteur général.

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Cet amendement fait écho à certaines préoccupations soulevées par des entreprises au cours des auditions que nous avons effectuées, préoccupations relatives aux variations de change qui peuvent être très importantes durant une même année. Il propose donc que la conversion en euros repose non sur le premier taux annuel, mais sur le dernier taux de change connu au premier jour du mois d'encaissement des sommes.

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Le dispositif proposé m'inspire une question : est-il compatible avec le fait qu'il est également indiqué à l'article 1er que la taxe est calculée en fonction du chiffre d'affaires mondial consolidé dans le domaine concerné ?

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La réponse est oui : par coordination, je propose en effet également que les éléments que doivent conserver les entreprises fassent état des aspects liés au taux applicable chaque mois, pour permettre un bon suivi de l'assiette déclarée.

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Mais s'il s'agit d'une société américaine – ce qui est le cas de la plupart des GAFA –, elle aura des comptes consolidés en dollars.

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On va donc demander à ces entreprises de faire des statistiques mensuelles, avant d'appliquer pour chaque mois le taux de conversion en euros.

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Toutes les entreprises concernées, quelle que soit leur taille – y compris Apple –, sont parfaitement conscientes de cette difficulté, qu'elles ont évoquée lors des auditions. Pour une fois qu'on répond aux demandes des entreprises… !

La commission adopte l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement CF89 de M. Éric Coquerel.

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Mes chers collègues, je vais vous présenter un amendement de bon sens, dont je ne doute pas que vous l'adopterez, puisqu'il vise à renforcer les sanctions prévues dans le droit commun vis-à-vis des GAFA qui échapperaient à la taxe. Il s'agit en fait de sanctionner ces entreprises en leur interdisant de percevoir le crédit d'impôt recherche (CIR), ce qui paraît logique.

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Premièrement, une ambiguïté dans la rédaction de cet amendement pourrait conduire à priver de CIR toutes les entreprises qui ne paient pas la TSN, même si elles n'en sont pas redevables.

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Si ce n'est que ça, nous pouvons sous-amender !

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Je vous invite effectivement à remédier à ce problème d'ici à l'examen du texte en séance publique.

Deuxièmement, le paiement de la TSN n'est pas un critère d'octroi du CIR, et il n'y a aucun lien entre les deux : le CIR est de droit si des dépenses éligibles sont engagées, indépendamment du fait d'avoir ou non payé la TSN due. Pour cette même raison, le CIR n'est pas repris si la TVA ou la CVAE n'est pas acquittée.

Enfin, faute de précision contraire, votre amendement pourrait conduire à reprendre des créances de CIR acquises ou en germe, exposant là aussi le dispositif à une censure constitutionnelle.

J'émets donc un avis défavorable à cet amendement.

La commission rejette l'amendement.

Elle est saisie des amendements identiques CF56 de M. Jean-Noël Barrot, faisant l'objet du sous-amendement CF147 du rapporteur général, et CF125 de Mme Émilie Cariou.

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Créer une taxe sur les services numériques est une bonne chose, mais encore faut-il donner à l'administration les moyens d'exercer son droit de reprise. Compte tenu des procédures qui risquent d'être longues et complexes, l'amendement CF56 propose la mise en place d'un délai de reprise d'une durée spécifique de six ans, identique au délai de droit commun et venant se substituer au délai triennal applicable à la TVA et aux autres taxes basées sur le chiffre d'affaires.

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Compte tenu du caractère inédit des modalités de détermination de l'assiette de la taxe, et du fait que de nombreux redevables seront situés hors de France, il me paraît normal d'augmenter le délai accordé à l'administration pour exercer son droit de reprise, en le faisant passer de trois à six ans.

Je suis donc favorable à ces amendements identiques, sous réserve que soit adopté mon sous-amendement CF147, qui a simplement pour objet de tirer les conséquences de la spécificité du fait générateur de la TSN par rapport à celui de la TVA, dans le cadre du délai de droit de reprise de l'administration en cas de flagrance fiscale ou d'activités occultes.

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M. le rapporteur général et M. le ministre pourraient-ils nous éclairer sur la manière dont s'effectuera le contrôle de cet impôt ? Pour la détermination de son assiette, l'administration fiscale devra connaître le nombre de clics au niveau mondial par rapport au nombre de clics au niveau de la France, mais comment exercera-t-elle son contrôle auprès d'une entreprise située aux États-Unis ?

Par ailleurs, quel est l'intérêt de faire passer le délai du droit de reprise de trois ans à six ans, puisqu'il s'agit d'une taxe temporaire ?

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Les modalités du contrôle figuraient dans le document de présentation diffusé hier, avant que M. le ministre donne des informations complémentaires à ce sujet dans son exposé. On ne va pas refaire la discussion générale, monsieur de Courson…

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Je suis désolé, monsieur le rapporteur général, mais il ne nous a pas été expliqué comment on allait s'y prendre pour aller effectuer des contrôles auprès des GAFA américains… Pour ce qui est du nombre de clics au niveau mondial, les entreprises concernées vont effectuer une déclaration, mais comment allons-nous vérifier que celle-ci correspond à la réalité ?

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Toutes ces choses ont été précisées hier, notamment lorsque j'ai évoqué les échanges de renseignements dans le cadre de l'OCDE et le rôle du représentant local des redevables étrangers.

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L'échange d'informations ne résout absolument pas le problème, car il ne prévoit pas la communication du nombre de clics. Revenons sur terre, monsieur le rapporteur !

La commission adopte le sous-amendement CF147.

Puis elle adopte les amendements identiques CF56 et CF125 modifiés.

Elle examine l'amendement CF69 du rapporteur général.

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Il s'agit d'une précision : en cas de consolidation, le représentant légal d'un redevable n'a pas à déclarer la TSN.

La commission adopte l'amendement.

Elle examine les amendements identiques CF60 de Mme Véronique Louwagie et CF107 de M. Charles de Courson.

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Ce dispositif, qui vise à taxer en France des activités qui ne le sont actuellement pas, aura pour effet de taxer taxer des activités qui le sont déjà – puisque certaines entreprises paient déjà l'IS. Cette taxe sur le chiffre d'affaires étant totalement indépendante du résultat de l'entreprise, le cumul de cette taxe avec l'IS risque d'être difficilement supportable dans certaines situations. Ainsi, pour une entreprise dont le résultat net représenterait 10 % du chiffre d'affaires – ce qui est déjà beaucoup –, la taxe représenterait 30 % du bénéfice avant impôt et 20 % du bénéfice après impôts. Si on additionne les 33,33 % d'impôt sur les sociétés, l'imposition totale dépasserait 50 % du bénéfice !

L'amendement CF60 propose que les entreprises qui s'acquittent déjà de leurs impôts en France puissent imputer cette taxe sur l'impôt qu'elle doive. Monsieur le ministre, il me semble que vous aviez pensé à cette solution ; ce serait une mesure de justice pour les entreprises françaises.

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L'amendement CF107 est identique. Il permettra non seulement de remédier aux situations de double imposition, mais aussi d'éviter une censure juridictionnelle, au motif du caractère confiscatoire de la taxe.

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Monsieur de Courson, concernant votre dernier argument, le Conseil d'État a affirmé dans son avis que la taxe ne pouvait en aucun cas être considérée comme confiscatoire.

J'entends ce que vous dites ; la question a d'ailleurs été abordée par la mission d'information de Bénédicte Peyrol, mais aussi par nos collègues du Sénat, sur la proposition de directive européenne. Je vous rappelle cependant que, si une directive peut s'affranchir des conventions entre États membres, une loi nationale ne le peut pas. Or les conventions feraient obstacle à ces dispositions. Mon avis est donc défavorable.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Madame Louwagie, je vous propose de retirer votre amendement : si vous déduisez le montant de la taxe, non pas de l'assiette de l'IS, mais de l'IS lui-même, vous faites entrer la taxe dans le champ de l'imposition sur les bénéfices, et donc des conventions fiscales. Par conséquent, vous ne pouvez plus l'appliquer au niveau national.

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Vous avez raison, monsieur le ministre, mais depuis la publication du projet de loi, d'excellents articles ont été publiés, qui font état de doutes sur la qualification de cet impôt devant les juridictions internationales. Si vous votez notre amendement, vous êtes à l'abri puisque cette déduction évite la double taxation. Si vous votez contre, vous prenez un risque…

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Ce matin, M. Pascal Saint-Amans, le directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l'OCDE, nous a apporté une réponse parfaitement claire !

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Je pense qu'à la place qui est la sienne, il connaît les conventions fiscales. Il est extrêmement compétent !

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Je partage votre sentiment, monsieur le rapporteur général, mais de grands spécialistes estiment malgré tout que la qualification de cette taxe devant les juridictions internationales est loin d'être évidente : elle pourrait être requalifiée en impôt direct – et donc soumises aux conventions. Voter cet amendement nous met à l'abri.

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Le débat qui a fait suite à l'audition de M. Pascal Saint-Amans a mis en avant d'autres dispositifs juridiques internationaux. Relisez également les analyses de Mme Ruth Mason avant d'être aussi affirmatifs…

En outre, vous avez souligné que la directive européenne ne s'inscrivait pas dans le même cadre que la taxe française. C'est bien le problème ! Ce que vous affirmez aurait été valable si une directive européenne avait été adoptée, mais tombe dans le cadre d'un dispositif purement français. Enfin, vous vous comparez au chancelier autrichien : je ne suis pas sûre qu'il incarne le progressisme face au nationalisme…

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Je vous laisse juger du choix des électeurs autrichiens. Je ne vois pas de quelles discussions postérieures à l'audition vous voulez parler… J'ai simplement rappelé la hiérarchie des normes, qui explique les précisions apportées par Pascal Saint-Amans. La non-adoption de la directive européenne ne fait absolument pas tomber notre dispositif. Cela n'a rigoureusement rien à voir !

La commission rejette les amendements identiques.

Elle en vient à l'amendement CF143 de Mme Émilie Cariou.

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Nous proposons que la déclaration pays par pays issue des travaux de l'OCDE soit complétée des informations concernant la TSN, afin que ce document soit un vecteur complet d'informations fiscales.

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Si je comprends parfaitement la finalité de votre amendement, je ne suis pas convaincu qu'il soit opportun. La TSN a vocation à être provisoire : imposer dans ce contexte une nouvelle obligation déclarative risque d'alourdir les charges administratives des entreprises, à rebours de l'objectif du Gouvernement de les alléger, comme en témoigne notamment le projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (« PACTE »).

Le contenu de la déclaration pays par pays est régi par une convention multilatérale conclue dans le cadre de l'OCDE. Enrichir unilatéralement son contenu ne rendra pas opposables ces modifications aux autres pays. En conséquence, la mesure que vous proposez ne touchera que les entreprises françaises, et non étrangères.

En outre, la déclaration pays par pays est une obligation déclarative concernant l'impôt sur les sociétés. L'étendre à la TSN, sans lien avec l'impôt sur les sociétés, ne me paraît pas souhaitable.

Enfin, cette déclaration contient des données fournies sur la base des exercices fiscaux, alors que la TSN fonctionne sur l'année civile, ce qui compliquera le traitement des données. En conséquence, le complément que vous proposez risque d'être vidé de sa substance. Dans ces conditions, je vous invite à retirer votre amendement.

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Certes, les exercices ne correspondent pas aux années civiles. Mais, peu importe, car il s'agit d'une déclaration d'informations sur les éléments soumis à la taxation. Je vais le retirer, mais il serait souhaitable de le garder en tête lors de nos futures négociations concernant la taxe au niveau de l'OCDE. Il sera utile d'enrichir le document de ces informations.

L'amendement est retiré.

La commission examine l'amendement CF70 du rapporteur général.

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Cet amendement vise à préciser dans la loi l'assiette des pénalités applicables en cas de modulation excessive à la baisse des acomptes dus par le redevable. Si, pour certaines taxes sur le chiffre d'affaires, cette assiette est définie par le BOFiP, il me semble préférable, et juridiquement plus solide, que ce soin revienne au législateur. En cas de modulation excessive, les pénalités seront assises sur la différence entre le montant qui aurait dû être payé à travers les acomptes – sans modulation – et le montant effectivement payé.

La commission adopte l'amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF71, CF72, CF73 et CF74 du rapporteur général.

Elle en vient à l'amendement CF75 du rapporteur général.

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Je propose de supprimer la mention insérée à l'alinéa 64 selon laquelle la TSN sera déductible de l'assiette de la « taxe YouTube ». Le produit de cette taxe étant affecté au Centre national du cinéma et de l'image animée, il ne paraît pas souhaitable de risquer de réduire les ressources de ce dernier. Je ne dirai pas la même chose de tous les crédits d'impôt, mais c'est un autre débat, qui fait déjà sourire mes collègues !

L'impact concret pour les entreprises concernées – de grandes multinationales à forts profits – sera tout à fait supportable.

La commission adopte l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CF138 de Mme Frédérique Dumas.

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Je continue d'essayer de protéger les entreprises françaises et européennes dans la compétition internationale. Le rapporteur nous a indiqué qu'il fallait récompenser la vertu.

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J'ai dit qu'il ne fallait pas la pénaliser, c'est différent !

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Nous essayons donc de ne pas la pénaliser… Cette première proposition est issue d'un dispositif de suramortissement des immobilisations dans le secteur de l'immobilier, proposé par Emmanuel Macron lui-même. Il s'agissait de prendre en compte une base amortissable égale à 140 % de l'immobilisation neuve acquise – soit plus que sa valeur.

Le même dispositif de suramortissement a été repris dans le projet de loi de finances pour 2019 pour les équipements de production de froid de toutes les entreprises et pour les investissements des armateurs dans leurs bateaux, afin d'accélérer la transition énergétique. Le mécanisme est une déduction de 40 % de la valeur du bien répartie linéairement sur la durée d'utilisation du bien, qui s'ajoute à la dotation aux amortissements de l'immobilisation.

Afin d'éviter tout lien avec l'IS, nous proposons de déduire des résultats imposables une somme égale à trois fois le montant de la taxe sur les services numériques.

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Quelque chose me choque dans votre raisonnement : on ne peut comparer cette proposition aux suramortissements susmentionnés, qui portent sur des dépenses d'investissement, non sur des impôts dont la prise en compte s'inscrit dans un cadre conventionnel international ! Ce n'est pas la même logique.

En outre, il existe déjà en France, contrairement à ce que vous semblez affirmer, des taxes sur le chiffre d'affaires, comme celles sur la publicité diffusée à la télévision ou sur les services de communication électronique. Pourquoi prévoir des modalités de déductibilité différentes pour la TSN ?

Je suis défavorable à votre proposition qui s'apparente à une exonération complète et inacceptable, y compris au regard des conventions internationales.

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Vous nous avez dit qu'un des objectifs de cette taxe était de réduire l'injustice fiscale – certains payent les impôts, d'autres pas. C'est ce que nous essayons de faire ! Si vous avez d'autres idées, tant mieux, mais, en l'état, les Français et les Européens qui paient leurs impôts seront soumis à une double peine, contrairement aux autres. Trouvons un système qui ne pénalisera pas ceux qui sont déjà vertueux !

En outre, vous avez évoqué des taxes sur le chiffre d'affaires que je connais très bien en tant que productrice ayant défendu la régulation. Il ne vous aura pas échappé que ces taxes ou les obligations des chaînes de télévision sont une forme d'épargne et d'investissement forcés dans le secteur. On oblige les chaînes de télévision à investir dans la production française, qu'elles vont ensuite diffuser. Ce n'est donc absolument pas comparable !

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Les entreprises concernées paient aussi l'IS, ce qui n'est pas le cas de beaucoup d'autres.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine en discussion commune les amendements CF140 et CF139 de Mme Frédérique Dumas.

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Il s'agit encore une fois de ne pas pénaliser les entreprises vertueuses, qui paient leurs impôts. Puisqu'il est impossible d'imputer l'IS sur la taxe, pour les raisons que vous avez évoquées, l'amendement CF139 propose de déduire le montant de l'IS de la taxe payée. Ce mécanisme serait particulièrement incitatif : les grandes entreprises étrangères auraient intérêt à payer l'IS en France pour le déduire de la taxe.

C'est un amendement de repli par rapport à l'amendement CF140, qui propose que le montant de l'IS et la CVAE déjà payé puisse être déduit du montant de la taxe.

Il s'agit d'aider les entreprises françaises et européennes. Si nous protégeons des intérêts, ce sont les intérêts français et européens !

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Mon amour immodéré pour les crédits d'impôt est bien connu, notamment de Frédérique Dumas…. En outre, je le répète, les conventions fiscales font obstacle à l'imputation sur l'IS, – et non sur l'assiette de celui-ci, – à une triple déduction, ou à la présente proposition. Cela annule donc l'effet de vos amendements. Mon avis est défavorable.

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Si c'est le cas, cela signifie que le dispositif proposé ne fonctionne pas, puisqu'il inflige une double peine aux entreprises françaises et européennes !

La commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite l'amendement CF76 du rapporteur général.

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Dans le souci d'offrir les garanties utiles aux redevables en matière procédurale, il est proposé que la mise en demeure préalable à la taxation d'office soit étendue à l'absence de réponse.

La commission adopte l'amendement.

Elle en vient à l'amendement CF77 du rapporteur général.

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Cet amendement de coordination tire les conséquences de la création d'un nouveau type de groupe consolidé spécifique à la TSN, dans le cadre des vérifications opérées par l'administration fiscale.

La commission adopte l'amendement.

Elle aborde ensuite l'amendement CF31 de M. Charles de Courson.

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Ce petit amendement… vise à reporter l'entrée en vigueur de la taxe en janvier 2021, dans l'attente des conclusions de l'OCDE. Ce matin, nous avons reçu M. Saint-Amans, directeur en charge des questions fiscales à l'OCDE, et il ne désespère pas de parvenir à un accord. Le ministre ayant présenté cette taxe comme provisoire, pour deux ans, nous proposons de la créer, mais de ne l'appliquer qu'au 1er janvier 2021, en l'absence d'accord.

Monsieur le rapporteur général, lors de la discussion générale, vous avez indiqué que la taxe a été créée en Italie. Mais vous avez oublié de préciser que le Gouvernement bloque les décrets d'application ! Elle n'est donc pas opérationnelle. De même, elle a été votée en Espagne, mais le budget a été repoussé…

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Le rapporteur général l'a précisé dans la discussion générale, monsieur de Courson.

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Mais il n'est pas exact d'affirmer que les autres pays européens nous imitent. Même au Royaume-Uni, la taxe n'est pas encore mise en oeuvre. C'est pourquoi je propose ce report de deux ans. Ne jouons pas avec le feu et ne répétons pas l'erreur de la « taxe Chirac » sur le transport aérien. Là aussi, tout le monde devait nous imiter…

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La loi italienne de finances pour 2019 impose que les décrets soient pris dans les six mois suivant sa promulgation. C'est donc une obligation faite au Gouvernement italien. Mon document est parfaitement exact.

Je vous inviterai à bien vouloir retirer votre amendement. Vous souhaitez décaler l'application de la TSN de deux ans, mais votre amendement modifie simplement les dates des modalités particulières de paiement. Si vous voulez débattre de la sunset clause, il faudra déposer un autre amendement.

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C'est entendu, mais êtes-vous favorable au report de l'application de cette taxe en 2021 ?

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L'audition de M. Saint-Amans n'a donc pas été productive…

L'amendement est retiré.

La commission examine l'amendement CF79 du rapporteur général.

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Si, en principe, les redevables disposent déjà de toutes les données requises pour calculer l'assiette de la TSN, ces données pourraient, dans certaines hypothèses, faire défaut pour la période entre le 1er janvier 2019 et l'entrée en vigueur de la loi. En conséquence, dans un souci de sécurisation maximale de l'effectivité de la taxe, mon amendement propose des modalités particulières pour 2019 portant sur la période postérieure à l'entrée en vigueur de la loi.

Pour l'acompte unique dû en octobre 2019, le pourcentage représentatif de la part des utilisateurs français sera apprécié sur la période entre l'entrée en vigueur de la loi et le 30 septembre 2019. Pour le solde, lors de la régularisation, il sera apprécié entre l'entrée en vigueur de la loi et la fin 2019.

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Ne calcule-t-on pas l'assiette en multipliant le prorata par l'assiette mondiale ? L'amendement du rapporteur général réduit le calcul du prorata de la date de mise en oeuvre au 31 décembre 2019. Mais qu'en sera-t-il du chiffre d'affaires ? Sera-t-il aussi réduit, entre la date de mise en oeuvre et 31 décembre 2019 ? Tel que rédigé, votre amendement ne résout que la moitié du problème.

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C'est le pourcentage représentatif des utilisateurs qui est visé.

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Mais le chiffre d'affaires visé sera-t-il le chiffre d'affaires mondial sur ce domaine d'activité réalisé entre le 1er janvier et le 31 décembre, ou celui réalisé de la date de publication de la loi au 31 décembre ?

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Ce n'est pas cohérent : on ne peut calculer un prorata temporis sur le coefficient, et pas sur le chiffre d'affaires.

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Rassurez-vous, le dispositif est cohérent et fonctionne : il ne s'agit pas d'un prorata temporis, mais d'un coefficient.

La commission adopte l'amendement.

Elle examine l'amendement CF28 de M. Charles de Courson.

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Il s'agit de préciser de manière officielle que la taxe est déductible de l'assiette de l'IS ou de l'impôt sur le revenu. M. le rapporteur général nous l'a dit, mais peut-on avoir l'engagement du ministre ?

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Cette disposition est prévue au 4° du 1 de l'article 39 du code général des impôts ; il s'agit donc du droit commun en vigueur.

L'amendement est retiré.

La commission examine l'amendement CF29 de M. Charles de Courson.

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Cet amendement revient sur la nature de la taxe au regard de nos conventions bilatérales, notamment celle signée avec les États-Unis. Dans son avis du 28 février 2019, le Conseil d'État souligne que si la taxe créée devait être regardée comme relevant des impôts visés par les conventions fiscales bilatérales conclues par la France, cela ne constituerait par un motif d'invalidité juridique.

Certains articles affirment pourtant exactement l'inverse… Cet impôt doit-il être considéré, ou non, comme un impôt direct ? Entre-t-il dans le champ de la TVA ? Ce dernier point n'est pas clair ; vous avez simplement précisé à l'oral que ce n'était pas le cas.

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Vous proposez de préciser que la TSN est un impôt direct au regard des conventions fiscales internationales. Si, par cet amendement, vous entendez préserver le dispositif de toute neutralisation par les conventions, je vous rassure : c'est déjà le cas. À la différence d'un impôt assis sur les bénéfices, l'intérêt de la TSN est d'échapper aux conventions fiscales, et donc d'être effectif.

Ce matin, M. Saint-Amans a été très clair. En outre, les modifications que vous et vos collègues proposez, qui rapprochent la TSN d'une taxe sur les bénéfices, risquent de la neutraliser. Ce n'est pas le cas du dispositif du Gouvernement.

Enfin, la loi nationale ne peut qualifier un impôt au regard des conventions ou interpréter ces dernières, puisqu'elles ont une force supérieure à la loi.

Je vous invite donc à retirer votre amendement.

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Monsieur de Courson, ce débat a déjà eu lieu.

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Vous avez répondu à ma première question, monsieur le rapporteur général, mais pas à la seconde. Cette taxe entre-t-elle dans le calcul de l'assiette de la TVA ? Vous nous avez répondu négativement, le ministre également, mais cela n'apparaît pas dans le projet de loi.

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Certaines taxes, comme les taxes sur l'électricité, entrent dans l'assiette de la TVA.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Ce n'est pas facturé, donc cela n'entre effectivement pas dans le champ de la TVA.

L'amendement est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CF80 du rapporteur général, CF15 de la commission des affaires étrangères et CF54 de M. Jean-Noël Barrot, les amendements CF126 de Mme Émilie Cariou, CF123 de Mme Valérie Rabault ainsi que CF133 et CF132 de Mme Lise Magnier.

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L'amendement CF80 répond à plusieurs inquiétudes formulées au cours des auditions et de la discussion générale. Nous nous accordons tous sur ce point : pour relever le défi que représentent les géants du numérique en matière de fiscalité, le mieux serait de parvenir à un accord international. Malheureusement, force est de constater qu'il n'est pas facile de mettre tout le monde d'accord et que les négociations prennent du temps. En attendant, ce projet de taxe est une première réponse, qui a vocation à être provisoire. Juridiquement, nous ne pouvons subordonner l'application de la loi à un accord qui n'existe pas encore. C'est pourquoi nous souhaitons donner des gages aux principaux intéressés. L'amendement propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport annuel précisant l'avancée des négociations et les positions des différents acteurs participant aux travaux, fournissant une évaluation de l'impact de chaque proposition sur l'économie et les finances publiques françaises et donnant un calendrier indicatif de suppression de la taxe, en fonction de l'avancée des négociations. Ce rapport pourrait faire l'objet d'un débat dans les deux assemblées.

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Le choix d'établir une taxe nationale sur certains services numériques est motivé par l'échec que nous rencontrons actuellement, compte tenu de la règle de l'unanimité en matière fiscale, dans la recherche d'un accord sur un dispositif européen. Ce dispositif national a pour but de faire bouger les lignes. Par ailleurs, la question de la fiscalité du secteur numérique est au coeur du projet « BEPS » (base erosion and profit shifting) de l'OCDE – c'est même l'action 1 parmi les quinze identifiées – et, compte tenu notamment des évolutions de la position des États-Unis, nous pouvons espérer une issue favorable dans quelques mois.

Mais ce choix d'un dispositif strictement national entraîne aussi des incertitudes, voire des risques d'ordre juridique et économique. C'est pourquoi il doit être explicité dans le texte de la loi que cette solution nationale est temporaire : elle sera abandonnée quand les négociations internationales et européennes auront fait apparaître une solution globale plus satisfaisante. L'amendement propose donc d'instituer une sorte de clause de rendez-vous annuelle, à l'occasion de laquelle le point sera fait et où le Gouvernement devra indiquer ses orientations ou décisions. Cet exercice aurait lieu chaque année avant l'examen du projet de loi de finances annuelle, afin de pouvoir rapidement adapter la législation fiscale, le cas échéant.

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Notre amendement étant plus restrictif, je le retire au profit de celui du rapporteur général.

L'amendement CF126 est retiré.

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Nous souhaiterions compléter l'amendement adopté par la commission des affaires étrangères, que vient de présenter M. Masséglia, afin que le rapport du Gouvernement intègre également la liste des entreprises redevables de la taxe ainsi que son rendement.

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Ces amendements témoignent de notre volonté de consacrer la nature provisoire de la TSN et de garantir à la représentation nationale qu'elle disposera de tous les éléments d'information. Madame Rabault, vous demandez que figure dans le rapport la liste des entreprises redevables de la TSN, mais cela relève du secret fiscal. Je vous suggère donc de retirer votre amendement au profit des trois amendements identiques. Je ferai la même objection à Mme Magnier, dont l'un des amendements propose, en outre, une date de remise du rapport plus tardive que la nôtre. Compte tenu de l'accélération des travaux, dont nous a fait part Pascal Saint-Amans lors de son audition ce matin, il me semble utile de disposer d'un premier point du ministre dès 2019, afin de nous saisir d'éventuelles avancées majeures et, le cas échéant, d'organiser un débat en séance.

Les amendements CF133 et CF132 sont retirés.

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Je ne comprends pas pourquoi mon amendement CF97 a été placé beaucoup plus loin dans la discussion, alors qu'il demande aussi la remise d'un rapport au Parlement dans les six mois à compter de la publication de la loi, aux fins de mesurer l'impact fiscal du périmètre d'imposition de la taxe prévue par le Gouvernement sur les entreprises françaises et les éventuelles répercussions qui pourront être supportées par les consommateurs.

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Mettons donc que je n'aie rien dit, Monsieur le président… !

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Vous l'avez quand même dit, madame Dalloz, et ce sera au compte rendu…

La commission adopte les amendements identiques CF80, CF15 et CF54.

En conséquence, l'amendement CF123 tombe.

Puis la commission examine, en discussion commune, les amendements CF42 de M. Charles de Courson, CF99 et CF102 de Mme Marie-Christine Dalloz et CF131 de Mme Lise Magnier.

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Le Gouvernement présente cette taxe comme provisoire, sans pour autant la borner dans le temps. C'est pourquoi je propose une borne variable : l'article serait abrogé dès l'adoption par la Commission européenne d'une directive instituant une taxe sur les services numériques.

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L'objectif de l'amendement CF99 est le même que celui de M. de Courson, car l'idée n'est pas d'instaurer une taxe définitive. Il s'agit donc d'appliquer cette taxe franco-française jusqu'à l'accord international sur la fiscalité des entreprises du numérique négocié au sein de l'OCDE et, au plus tard, jusqu'au 31 décembre 2020.

Quant à l'amendement CF102, il répond aux préoccupations du ministre de l'économie, qui a invoqué à plusieurs reprises la nécessité d'une mesure temporaire. C'est pourquoi il vise à faire cesser l'application de l'article 1er à compter du 31 décembre qui suivra la promulgation par la France de la loi autorisant la ratification de la convention multilatérale pour la mise en oeuvre des mesures relatives aux conventions fiscales définies dans le cadre de l'OCDE.

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Notre amendement CF131 a le même objet que l'amendement CF102 de Mme Dalloz.

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Plusieurs amendements visent à mettre une borne à l'application de l'article 1er ou à lier l'application d'une loi française à l'adoption d'un accord international qui n'existe pas encore – pour ce qui est de l'accord sur la directive européenne, c'est mal parti. Je vous suggère de retirer vos amendements au profit de la solution qui vient d'être adoptée. Borner ne correspondrait à rien et soumettre l'application d'une loi française à l'adoption d'un texte international qui n'existe pas est inopérant d'un point de vue juridique.

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Nous ne voudrions pas prendre le risque qu'après la réussite des négociations au sein de l'OCDE une taxe soit appliquée dans les pays membres et que, parallèlement, la taxe française soit maintenue. Le Gouvernement pourrait s'engager à substituer la nouvelle taxe à la taxe française. Nous espérons tous que la négociation en cours aboutira.

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Cela ne va pas sans contradictions. Instaurer le dispositif à partir de 2021 seulement aurait permis de résoudre tous les problèmes. Je ne comprends pas pourquoi il n'est pas possible, juridiquement, de lier la fin de l'application de l'article à la mise en oeuvre d'une disposition internationale, par définition supérieure.

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Je suis prêt à retirer mon amendement, même si je trouve paradoxal de ne pas fixer de borne, quelle qu'elle soit. En cas d'échec des négociations, un amendement pourrait modifier cette borne et prolonger la durée d'application de la taxe, sans quoi le caractère provisoire n'est pas crédible. En créant une taxe provisoire, qui n'est pas bornée, la loi crée une taxe permanente qui deviendra peut-être provisoire.

L'amendement CF42 est retiré.

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Je trouverais choquant d'adopter un texte dont la durée de validité soit suspendue à l'adoption d'une directive.

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Pas à une directive, monsieur Mattei, à un accord international.

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Tout le monde souhaitait que la directive européenne s'impose en droit français. Or son objectif politique était le même que celui du Gouvernement français, dans l'attente d'une taxe de niveau international. Vous ne pouvez pas reprocher au texte national de ne pas être borné, alors que la directive européenne ne l'était pas non plus. Ne faites pas de faux procès au Gouvernement !

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Une directive européenne aurait évité de fragmenter le marché européen, alors qu'une taxe française handicape nos entreprises. Pourquoi continuer à les handicaper ? Vous avez promis de ne pas créer de nouveaux impôts. Aussi qu'allez-vous vous amuser à faire, une fois celui-ci créé : le garder et le recycler ?

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Nous avons eu mille fois ce débat. Cette fois, les choses sont très différentes.

La commission rejette successivement les amendements CF99, CF102 et CF131.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CF12 de M. Fabrice Brun, CF48 de M. Jean-Paul Dufrègne et CF97 de Mme Marie-Christine Dalloz.

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Parmi les questions qui se posent figure la durée du dispositif. Cette taxe franco-française sur les services devrait s'éteindre le jour où une disposition internationale aura été adoptée. Or nous avons bien compris que ni le ministre ni le rapporteur général ne souhaitaient borner le dispositif, pour peser dans les négociations – un argument qui se défend. C'est pourquoi l'amendement vise à demander un rapport au Gouvernement au plus tard en décembre 2021 pour évaluer la mesure, notamment au regard de l'évolution des normes internationales sur la taxation des entreprises.

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La TSN s'inspire directement du projet de la Commission européenne, qui a capoté faute d'obtenir un accord unanime des États membres. Ce projet européen se voulait temporaire, en attendant une réforme plus globale de l'imposition des sociétés, notamment dans le cadre des travaux conduits par l'OCDE. L'amendement entend inviter le Gouvernement à remettre au Parlement un rapport évaluant les effets de la taxe. Par ailleurs, ce rapport pourrait également présenter l'évolution des travaux menés au niveau international. Il dresserait les pistes d'évolution des normes internationales en matière d'imposition des entreprises multinationales, éclairant ainsi la représentation nationale sur les transformations législatives nécessaires.

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Nous revoilà à ma demande de rapport ! Le périmètre d'application de la taxe étant difficile à définir, il faudra voir de toute urgence, dans les six mois à compter de la publication de la loi, l'impact qu'elle aura sur les entreprises, ainsi que ses conséquences économiques sur les entreprises en lien avec le numérique. Il est fondamental de disposer de cette vision. L'absence de toute étude d'impact est regrettable : nous légiférons à l'aveugle.

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Le fonds commun à ces trois amendements est satisfait par les amendements que nous venons d'adopter, dont une partie de la logique est de faire le point sur les accords internationaux relatifs à une taxe sur le numérique. L'amendement CF12 est, de fait, satisfait. Les auteurs de l'amendement CF48 demandent un rapport sur l'application de la TSN avant le 30 juin 2019, soit quelques jours seulement après sa mise en oeuvre, voire avant celle-ci… Quant au délai de six mois proposé dans l'amendement CF97, Pascal Saint-Amans nous a dit ce matin qu'il était difficile d'évaluer l'impact réel de ce genre de mesures avant un, voire deux ans.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l'article 1er modifié.

Après l'article 1er

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF86 de Mme Sabine Rubin et CF52 de M. Fabien Roussel.

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Notre amendement CF86 vise à taxer les multinationales à hauteur du bénéfice réellement réalisé en France. Nous proposons que le fisc français puisse s'intéresser au ratio entre le chiffre d'affaires français et le chiffre d'affaires mondial des multinationales et puisse le comparer au ratio entre le bénéfice français et le bénéfice mondial, suivant une proposition de l'économiste Gabriel Zucman. Dès lors, si ces ratios sont manifestement décorrélés, nous proposons que l'administration fiscale puisse recalculer les bénéfices réels de l'entreprise en France. Par exemple, si une entreprise réalise 10 % de son chiffre d'affaires mondial en France, il faudrait qu'elle déclare 10 % de ses bénéfices mondiaux en France. Ces entreprises doivent être taxées sur leur activité réelle en France, d'autant que certaines, comme McDonald's, utilisent des voies détournées pour cacher leurs bénéfices. Ainsi, McDonald's est presque devenu un simple loueur de surfaces.

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McDonald's, mais aussi Apple, Amazon, Starbucks, Nike, Ikea… Ces multinationales qui réalisent des bénéfices importants dans notre pays paient-elles pour autant, chez nous, des impôts à leur juste mesure, ou bien profitent-elles des paradis fiscaux toujours autorisés dans l'Union européenne pour en payer le minimum ? La réponse est connue. Le principe de l'amendement CF52 est simple : les multinationales, qu'elles soient actives dans le secteur du numérique ou non, doivent payer leurs impôts là où elles réalisent leur activité, et non dans les paradis fiscaux. Dans la mesure où ces multinationales masquent leurs bénéfices réalisés en France grâce à des schémas complexes d'optimisation fiscale, nous proposons d'imposer ces bénéfices avant qu'ils ne sortent du pays. Le système que nous proposons fonctionne déjà parfaitement ailleurs, aux États-Unis, en Allemagne ou au Canada, où un impôt sur les sociétés peut être perçu au niveau local.

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Nous avons déjà eu ce débat lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2019, autour d'amendements comparables. Les mêmes raisons me conduisent à donner le même avis. Les dispositions que vous prévoyez risquent de se heurter aux conventions fiscales, lesquelles répartissent le droit d'imposer entre pays selon des modalités bien différentes de celles que vous proposez. Quant aux pays qui appliquent ces mécanismes, ils le font au niveau fédéral et non pas international, et c'est un outil de répartition de l'assiette entre les différents États fédérés, non une détermination du bénéfice imposable. La logique est complètement différente et relève d'une question interne aux pays fédéraux.

Indépendamment du problème des conventions fiscales, vos amendements font courir un vrai risque de double imposition. L'amendement CF86 retient le chiffre d'affaires des entreprises contrôlées : or, si elles ont déjà payé leur juste part d'IS, je ne vois pas pourquoi il faudrait les prendre en compte. Quant à l'amendement CF52, qui prévoit l'interdiction d'exercer sur le territoire français en cas de refus d'ériger une société membre seule redevable de l'impôt sur les sociétés, je doute fortement de sa constitutionnalité et de sa compatibilité avec le droit européen. Enfin, le ratio entre le chiffre d'affaires français et le chiffre d'affaires mondial pourrait être en défaveur de la France dans plusieurs secteurs payant un impôt sur les sociétés très supérieur à la part de la France dans leurs recettes. Avis défavorable.

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Monsieur le rapporteur général, peut-être que nous avons déjà présenté des amendements semblables ; cette loi concernant les GAFA, il nous semblait approprié de les présenter de nouveau. Par ailleurs, vous dites qu'elles ont déjà payé leur IS. Mais elles ne le paient pas ! C'est bien pour cela que nous essayons de changer les choses. Si j'ai bien compris le ministre, le projet n'est plus de contrecarrer l'évasion fiscale ; mais l'Union européenne aurait perdu 5,4 milliards d'euros de revenus fiscaux de la part de Google et de Facebook, entre 2013 et 2015. Selon la Commission européenne, les GAFA paient deux fois moins d'impôts que les entreprises traditionnelles. Ce problème ne peut pas se résoudre avec votre seule loi, bien trop modeste, et vous refusez nos mesures pour la durcir. Notre disposition permettrait que ces sociétés paient leurs impôts sur les activités qu'elles ont en France.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle étudie les amendements identiques CF53 de M. Jean-Paul Dufrègne et CF85 de M. Éric Coquerel.

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Notre amendement vise à définir des critères permettant de consacrer en droit interne la notion d'établissement stable virtuel. Son adoption serait une avancée notable ; car il poserait la première pierre d'une imposition effective des grandes entreprises du numérique.

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Nous avons repris un amendement de Marie-Noëlle Lienemann qui a fait consensus au Sénat. Il vise à créer la notion d'établissement stable virtuel pour les entreprises ayant une présence numérique significative en France et qui devront, de ce fait, payer l'IS au même titre que les entreprises physiquement implantées en France. Cela nous permettrait de nous rapprocher d'une plus grande justice fiscale.

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Nous avions présenté cet amendement, qui avait malheureusement été rejeté, en octobre 2017.

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Je tiens à préciser que cet amendement n'a pas fait l'unanimité au Sénat, où il a été voté contre l'avis de sa commission des finances. Il avait d'ailleurs été précisé, au cours du débat, qu'il servait surtout à faire plaisir à ses auteurs, étant donné que les conventions fiscales neutraliseraient le dispositif prévu. Si je reconnais tout à fait l'intérêt de définir la notion d'établissement stable virtuel, il faut le faire a minima au niveau européen. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques.

Puis elle examine l'amendement CF136 de Mme Frédérique Dumas.

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Si j'ai bien compris, l'objectif de départ a été abandonné entre-temps. Au départ, il s'agissait effectivement de répondre à l'injustice fiscale et on nous explique aujourd'hui que ce n'est plus le problème.

L'amendement que nous proposons n'a rien à voir avec la fraude fiscale, mais il permet effectivement de lutter contre les stratégies agressives d'optimisation fiscale, préoccupation dont procède la taxe que vous nous proposez : « Comme on n'arrive pas à le faire au niveau européen, que la seule chose qu'on peut appréhender est le chiffre d'affaires, et que cela ne pose pas de problème avec des dispositions fiscales, faisons-le ! » Vous oubliez de nombreuses autres fragilités juridiques, qui tiennent non pas aux dispositions fiscales mais au caractère discriminatoire, au périmètre, à la proportion du chiffre d'affaires. Puisque vous vous fondez toujours sur des exemples étrangers, nous proposons de faire ce qu'ont fait les Anglais : une taxe sur les profits détournés leur a rapporté – ce n'est pas négligeable – 304 millions de livres sterling.

J'ai cru comprendre qu'on m'objecterait que le droit britannique n'est pas le droit français. Soit, mais alors adaptons notre droit ! Quant aux autres dispositifs, comme l'article 209 B du code général des impôts, Pascal Saint-Amans nous a expliqué qu'ils ne permettaient pas d'aller aussi loin. Si l'objectif est de répondre à la justice fiscale, de ne pas pénaliser nos entreprises françaises et européennes et d'aller chercher de l'argent – c'est ce que vous semblez vouloir absolument –, taxons les profits détournés. Vous nous dites qu'on protège un certain nombre d'intérêts, mais n'est-ce pas ce que l'on fait aussi quand on ne cherche pas les profits détournés par les grandes entreprises étrangères ?

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En fait, je me suis déjà exprimé sur la question, puisqu'hier nous avons examiné un amendement reprenant le dispositif de la diverted profit tax (DPT). C'est maintenant une combinaison de la DPT et de la nouvelle définition de l'établissement stable du modèle OCDE qui est proposée. À propos du modèle OCDE, je vous renvoie à la problématique des conventions internationales telle que je l'ai déjà évoquée. Quant au modèle de la DPT, j'ai effectivement indiqué hier que l'arsenal juridique britannique était moins fourni que le nôtre – le droit britannique est désarmé dans un certain nombre de cas.

À titre d'exemple, l'article 57 du code général des impôts, cité à juste titre, permet de lutter contre les manipulations de prix de transfert, et il a conduit à des redressements annuels de plus de 3 milliards d'euros en base – il rapporte plus que la DPT. L'article 238 A permet, quant à lui, d'imposer notamment les revenus passifs transférés anormalement vers un pays à régime fiscal privilégié. Et, comme je l'ai dit hier, ce dispositif a été renforcé par un amendement à la loi relative à la lutte contre la fraude dont Bénédicte Peyrol était l'auteur.

En fait, je passe sur les problèmes techniques, mais cet amendement présenterait surtout les inconvénients des deux dispositifs, et ne serait pas opérationnel.

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L'idée d'abandonner la notion de présence numérique et de ne conserver que celle des profits détournés ne me pose aucun problème. Par ailleurs, depuis hier, monsieur le rapporteur général, nous avons auditionné Pascal Saint-Amans, qui nous a dit que cette taxe était très différente des dispositifs en vigueur en France. Nous pouvons donc l'instaurer pour récupérer encore plus d'argent. Certes, il nous a aussi confirmé, que ce serait peut-être un peu déclarer la guerre aux États-Unis, mais j'ai cru que nous étions prêts à le faire. Ce dispositif nous permettrait de récupérer beaucoup d'argent de manière sûre, et non de manière aléatoire, au contraire de ce que vous proposez, qui, en plus, pénalise des entreprises françaises. Je me demande donc, moi aussi, qui protège qui !

La commission rejette l'amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CF45 de M. Fabien Roussel et CF87 de Mme Sabine Rubin.

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La question des paradis fiscaux est directement liée à l'objet du projet de loi soumis à notre examen. L'amendement CF45 vise à réformer en profondeur la liste française des paradis fiscaux, selon les termes de la proposition de loi n° 585 qu'a déposée le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

La liste noire des paradis fiscaux retenue par l'Union européenne comporte seulement quinze juridictions, faisant l'impasse sur la Suisse, Hong Kong, les Îles Vierges britanniques ou encore les Îles Caïmans, à l'exclusion délibérée de tout État membre de l'Union européenne. Les États européens ont fait le choix de s'auto-exclure. Pourtant, l'application rigoureuse des seuls critères retenus par l'Union européenne nécessiterait d'intégrer l'Irlande, les Pays-Bas, Malte, le Luxembourg, voire la Hongrie, la Belgique et Chypre à cette liste noire. Un comité du Parlement européen a récemment indiqué que ces sept États membres constituaient des paradis fiscaux et facilitaient la planification fiscale agressive, contrairement à ce que s'échine à prétendre M. Pierre Moscovici, selon qui il n'y aurait pas un seul paradis fiscal au sein de l'Union européenne.

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L'amendement CF87 procède du même esprit. Il a pour objectif de définir des critères pertinents afin d'établir une liste des territoires non coopératifs qui corresponde aux pratiques fiscales réelles des États. Suivant les recommandations de l'organisation non-gouvernementale Oxfam, il permettrait plus d'efficacité dans la lutte contre l'évasion fiscale, ce qui n'est pas sans rapport avec l'objet du projet de loi soumis à notre examen.

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Par ces amendements, chers collègues, vous réintroduisez la proposition de loi déposée par Fabien Roussel, que nous avions examinée l'an dernier et qui n'avait pas été adoptée. Je ne reviendrai pas sur les débats de l'époque mais rappellerai simplement que, depuis lors, le paysage a un peu changé.

Au travers de la loi relative à la lutte contre la fraude, la France a transposé la liste noire européenne, qui a été complétée le 12 mars dernier, pour passer de cinq à quinze juridictions, notamment avec l'ajout des Bermudes et des Émirats arabes unis, dont l'absence sur cette liste posait un léger problème. Il existe en outre une liste grise ; les pays qui y sont inscrits sont placés en observation et risquent de rejoindre la liste noire s'ils n'évoluent pas dans le bon sens.

Pour les raisons qui nous avaient conduits à rejeter la proposition de loi de M. Roussel et compte tenu de l'évolution du droit, je suis défavorable à ces deux amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 1er bis (nouveau) : Rapport sur la fiscalité du commerce en ligne et physique

Elle se saisit ensuite de l'amendement CF61 de M. Gilles Carrez.

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Le commerce en ligne n'est pas concerné par cette taxe. Se pose pourtant de plus en plus un problème d'équité fiscale par rapport au commerce traditionnel, qui s'exerce dans des locaux physiques et est soumis à une fiscalité très ancienne, essentiellement locale, qui repose sur les valeurs locatives. Et lorsqu'on regarde aujourd'hui le poids de la cotisation foncière des entreprises (CFE), issue de la taxe professionnelle, de la taxe foncière sur les propriétés bâties, le cas échéant de la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM), plus récente et également affectée aux collectivités locales, ce sont des impôts de production, inscrits comme charges au compte d'exploitation, des charges très lourdes par rapport aux marges. L'intérêt général nous commande cependant de préserver notre commerce traditionnel, physique, qui représente des centaines de milliers d'emplois. C'est un enjeu majeur dans nos centres-villes.

À l'occasion de l'examen de ce texte, nous devons réfléchir à des solutions qui réduisent cette distorsion de fiscalité entre le commerce en ligne et le commerce traditionnel.

Ce matin, Pascal Saint-Amans a indiqué que les taxes sur le chiffre d'affaires échappent aux conventions fiscales, mais, à mes yeux, il s'agit non pas de créer une nouvelle taxe mais, à fiscalité constante, de rééquilibrer la charge entre commerce traditionnel et e-commerce. Si nos finances publiques étaient florissantes, nous pourrions décider de supprimer purement et simplement la CFE, la taxe foncière sur les propriétés bâties acquittées par les commerces et la TASCOM, en compensant aux collectivités locales la perte de recettes. Une piste serait de créer une taxe sur le chiffre d'affaires qui s'applique sur un pied d'égalité et de la même manière à toute la distribution, qu'elle soit en ligne ou traditionnelle, et, en contrepartie, par redéploiement, de supprimer notamment la CFE. C'est une piste, que j'ai à l'esprit, parmi de nombreuses autres. Un travail a été commandé à l'Inspection générale des finances. Je ne sais pas ce qu'il est devenu mais j'estime que le sujet est urgent. C'est pourquoi je propose, par cet amendement, de demander au Gouvernement un rapport qui analyse la situation, vérifie le degré de distorsion fiscale et propose des pistes de réflexion. Peut-être nous-mêmes pourrions-nous nous saisir de ce sujet, vraiment au coeur de nos problématiques d'aménagement du territoire et de maintien de la vitalité de nos centres-villes.

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S'il n'entre pas dans le champ de la TSN, le commerce en ligne, comme l'a très bien monté M. Carrez, est majeur. Non seulement je suis favorable à l'idée de demander la remise d'un rapport avant l'examen du projet de loi de finances pour l'année prochaine, mais j'ai moi-même cosigné cet amendement.

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À la suite de ce rapport, nous pourrions rapidement créer un groupe de travail transpartisan pour essayer d'aboutir à des solutions sur ce sujet important.

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Effectivement, monsieur Carrez, il sera intéressant d'étudier plus avant les problèmes que vous soulevez. Des écarts de fiscalité se sont creusés au fil du temps entre un monde numérique et un monde physique dont la coexistence ne va pas sans difficultés. Nous soutiendrons évidemment cet amendement, sachant que le commerce électronique n'est pas visé par cette taxe, hors éventuelles prestations d'intermédiation – c'est très marginal. Il importe en tout cas d'approfondir notre connaissance de la question.

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Je suis tout à fait favorable à cet amendement. Comme je l'ai expliqué lors de la discussion générale, la taxe que le projet de loi a pour objet d'instaurer n'est pas neutre à l'égard des différents circuits de distribution. Si je vends du champagne via un grand acteur du commerce en ligne, je ne paierai pas la taxe. Je ne la paierai pas non plus si j'en vends via une grande surface. En revanche, si j'en vends directement par une place de marché en ligne, je paierai la taxe. Il y a bien d'autres facteurs de discrimination que cette taxe mais elle n'en accentue pas moins la discrimination. Voilà pourquoi je suis tout à fait favorable à cet amendement.

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Je ne peux que soutenir cet amendement. C'est un véritable problème qui se pose avec les commerces de centre-ville, notamment en raison de l'application de la réforme des valeurs locatives – même lissée dans le temps. Il est temps de faire le point sur toute cette fiscalité périphérique dont les commerces de centre-ville peuvent parfois souffrir de manière anormale.

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En l'absence du ministre qui a dû s'absenter un instant, je précise que le Gouvernement est très favorable à cet amendement – j'en ai discuté avec M. Le Maire.

La commission adopte l'amendement.

Article 2 : Maintien en 2019 du taux normal de l'impôt sur les sociétés à 33 13 % pour les plus grandes entreprises

La commission examine les amendements de suppression CF30 de M. Charles de Courson, CF37 de Mme Véronique Louwagie, CF109 de Mme Marie-Christine Dalloz, CF127 de M. Julien Aubert et CF144 de Mme Lise Magnier.

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Pourquoi proposé-je de supprimer l'article 2 ? Le Gouvernement nous a expliqué à juste titre, au début de la législature, qu'il fallait une stratégie claire, pluriannuelle et stable, position que j'ai toujours partagée, mais voici qu'on nous explique maintenant que la baisse du taux de l'IS sera reportée d'un an, certes pour les plus grandes entreprises seulement, mais il y en a quand même pour 1,8 milliard d'euros. Cela veut dire que la pression fiscale sur les entreprises s'alourdit de 1,8 milliard d'euros. Et tout cela pour financer 11 milliards d'euros de dépenses nouvelles ! Peut-être aurions-nous pu les financer autrement, par des redéploiements ou des économies.

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Cet article 2 pèse effectivement beaucoup : 1,8 milliard d'euros. Le Gouvernement avait arrêté à la fin de l'année 2017 une trajectoire de baisse de l'IS jusqu'en 2022. On pouvait se réjouir d'une telle visibilité sur cinq ans – les entreprises demandent précisément de la visibilité.

Cette modification de la donne, moins de deux ans plus tard, envoie un très mauvais message au monde des entreprises. J'ai par ailleurs entendu hier le ministre nous indiquer que la trajectoire pour 2022 n'était pas remise en cause, mais il ne nous a donné aucune assurance quant au fait qu'elle n'était pas remise en cause non plus pour les années 2020 et 2021. C'est aussi de nature à nous inquiéter.

Il faut que nous fassions preuve de responsabilité à l'égard du monde économique et également de nos concitoyens. Lorsque des trajectoires sont inscrites dans la loi, il faut que nous ayons le courage d'aller jusqu'au bout. Je vous propose donc, par cet amendement, de supprimer l'article 2.

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Je propose également – cela ne surprendra personne – la suppression de l'article 2, et ce pour des raisons d'honnêteté intellectuelle. J'ai regardé attentivement le document présenté hier par le rapporteur général. On a l'air de dire que les mesures prises pour répondre aux attentes des « gilets jaunes », qui ont coûté 10,8 milliards d'euros, seront en partie compensées par l'article 2 de ce projet de loi… mais il s'agit de 1,76 milliard d'euros ! Il est déjà quelque peu difficile d'entendre qu'il faut compenser les montants donnés par un prélèvement sur les entreprises. Et puis on a l'air de dire que cela n'aura pas d'impact en raison de l'année double en 2019… Mais enfin, l'« année double », entre le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et l'allégement des cotisations sociales patronales, était programmée, inscrite dans la loi ! Vous ne pouvez pas prendre le prétexte de l'« année double » pour revenir sur une décision prise quand nous savions déjà qu'il y aurait en 2019 une « année double » ! Je ne supporte pas cette manière, d'une grande malhonnêteté intellectuelle, de présenter les choses.

Et puis on ne peut pas, un an et demi après avoir affirmé sa volonté d'en finir avec l'instabilité fiscale de suivre une trajectoire claire et précise, remettre cette dernière en cause. Si encore il y avait une crise considérable ! Ce reniement de la parole donnée décrédibilise énormément ce gouvernement.

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Je propose également de supprimer ce « décalage de la baisse du taux » de l'IS, pour reprendre les mots du ministre de l'économie.

Je suis content que nous arrivions enfin à cet article 2, qui représente 82 % des crédits de ce projet de loi. D'un côté, il y a 1,8 milliard d'euros ; de l'autre, il y a 400 millions d'euros. Il serait dommage de consacrer peu de temps au « gros » sujet budgétaire, et beaucoup au « petit », d'autant que le premier est réel, tandis que l'autre n'est que virtuel.

Ce que j'aimais bien, dans la politique du Gouvernement, c'était son action en faveur des entreprises. Je trouvais intéressant de réduire les charges et les impôts auxquels elles sont assujetties – c'est plutôt la manière dont sont traités les particuliers, notamment les retraités, qui attire nos critiques. Pour ma part, je souhaite rester fidèle à votre programme électoral… Vous savez, chers collègues, c'est un peu comme dans le grand débat national : il y a un garant. C'est un peu mon rôle…

Par ailleurs, je me rappelle la communication enthousiaste faite autour des baisses de taxe : en 2018, vous n'y gagnez rien, ou vous y gagnez peu, mais voyez la courbe pour les années 2019, 2020 et 2021 ! Voici que, dans le silence de la commission, ce beau document imprimé il y a trois ans est réduit à néant.

Et puis les entreprises ont déjà cotisé au fameux plan annoncé par le Président de la République au mois de décembre dernier : ce sont elles qui ont payé les primes exceptionnelles. Je trouve donc un peu dommage de leur annoncer maintenant que l'IS sera plus élevé. Ce n'est pas un beau cadeau ni une bonne manière d'inciter les entreprises à écouter le Président de la République. Nous sommes pourtant tous très attentifs à la parole du Président de la République, qui ne se prive pas de parler – il le fait beaucoup.

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Par l'amendement CF144, je propose également, pour les raisons qui viennent d'être évoquées, de supprimer cet article 2. Les entreprises ont besoin de stabilité, on ne peut pas changer les règles en cours d'année, et ce serait envoyer un très mauvais signal que de revenir sur la parole donnée.

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La mesure prévue à l'article 2 est ponctuelle puisqu'elle ne porte que sur 2019, et ne concerne que les plus grandes entreprises, c'est-à-dire celles qui sont capables de fournir l'effort demandé.

Les représentants auditionnés des organisations patronales – le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) et l'Association française des entreprises privées (AFEP) – nous ont clairement dit qu'elles n'étaient pas opposées à la mesure ; elles la comprennent et en ont pris acte. Elles n'en sont pas forcément heureuses, mais c'était un peu négocié : elles n'auraient pas aussi bien accepté des mesures relatives aux charges sociales.

L'article 2 ne remet pas en cause la suite de la trajectoire de baisse de l'IS. D'ailleurs, les entreprises y ont beaucoup insisté lors de l'audition que j'évoquais. Peut-être le ministre pourra-t-il rappeler les engagements pris.

Par ailleurs, entre le CICE et les allégements de charges, le montant du soutien aux entreprises s'élèvera en 2019 à 40 milliards d'euros. Et ce sont largement les grandes entreprises, qui emploient beaucoup de salariés, qui en bénéficieront. Les choses ne sont donc pas aussi dramatiques que certains veulent bien le dire, et c'est la raison pour laquelle les entreprises ont fait ces déclarations lors de leur audition.

Je suis donc défavorable à ces amendements de suppression.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

L'engagement du Gouvernement et du Président de la République sera tenu : nous atteindrons bien l'objectif d'un taux ramené de 33 13 % à 25 % en 2022, et ce pour toutes les entreprises. Le niveau d'imposition des entreprises françaises sera le plus faible des vingt dernières années – c'est absolument décisif pour leur compétitivité.

En 2019, nous avons décidé de décaler cette baisse d'impôt pour les entreprises qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 250 millions d'euros. Nous leur demandons ainsi un effort particulier, nous l'assumons. Pour les prochaines années, toutes les options sont sur la table : nous pourrons revenir à la trajectoire définie en loi de finances pour 2018 ou opter pour une pente plus progressive. Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2020, nous en discuterons avec l'ensemble des parlementaires, en particulier ceux de la commission des finances.

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À cette audition où nous n'étions que trois parlementaires présents, monsieur le rapporteur général, j'ai bien entendu, en effet, les représentants du MEDEF dire que ce ne serait pas dramatique, mais ils ont également dit que si vous touchiez ainsi à la trajectoire une fois, vous étiez susceptibles le faire une autre fois, malgré l'engagement pris. Cela pose évidemment un problème de prévisibilité. Certes, la trajectoire reste prévisible, mais le décalage de la trajectoire est imprévu.

Je veux souligner une incohérence et une cohérence.

L'incohérence, c'est de prétendre que ce qui concerne l'évasion fiscale, les profits détournés ne peut faire partie de ce projet de loi, alors même qu'il comporte la disposition par laquelle la trajectoire est ainsi décalée. Cet article 2 prouve que le projet de loi peut traiter d'autre chose que de taxes sur le chiffre d'affaires.

La cohérence, c'est que les deux articles affectent les entreprises françaises, et celles qui créent des emplois. Vous avez souvent répété qu'il fallait renforcer l'attractivité des entreprises françaises pour qu'elles créent des emplois. Voilà deux articles qui les affectent !

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Monsieur le ministre, selon l'étude que vous nous avez remise, les mesures annoncées par le Président de la République représentent quasiment 11 milliards d'euros et ce montant de 1,8 milliard d'euros vise à les financer. Pourrions-nous en savoir plus sur le financement des 9,2 milliards d'euros restants ?

Par ailleurs, pour éviter toute rétroactivité, cette mesure s'applique, dispose le quatrième alinéa, « aux exercices clos à compter du 6 mars 2019 » ? Est-ce à dire que les entreprises qui ont clôturé leurs comptes avant le 6 mars ne subiront aucune majoration ? Et n'y a-t-il pas là, sur ces deux mois et six jours, une rupture d'égalité ?

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Monsieur le rapporteur général, vous avez justifié l'augmentation de l'IS en rappelant que la fin du CICE et l'allégement des cotisations sociales patronales représentent 40 milliards d'euros, mais ce n'est pas tout à fait cela. Effectivement, l'impact est de 40 milliards d'euros sur les comptes de l'État, mais, pour les entreprises, en fait, il y a un effet de 20 milliards d'euros sur les résultats en 2018 et un effet de 20 milliards d'euros sur les résultats en 2019. Il ne faut pas parler d'un impact de 40 milliards d'euros.

Second point : le respect de la parole de l'État. Vous annoncez, monsieur le ministre, qu'il faudra revoir la trajectoire dans les prochains PLF. Soit, mais dans ce cas, mieux vaut ne pas inscrire des trajectoires quinquennales dans le PLF si le Gouvernement entend y revenir chaque année. Le message est pire ainsi : c'est une question d'honnêteté intellectuelle, mais c'est aussi la parole de l'État qui est cause. On nous dit que l'application de la TSN sera temporaire et prendra fin lors de l'entrée en vigueur d'une solution internationale : comment les Français pourraient-ils croire un tel engagement alors qu'une disposition pluriannuelle inscrite en loi de finances peut être revue chaque année ? Il faut se pencher sur l'état d'esprit qui inspire de tels engagements.

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Je comprends l'argument selon lequel nous atteindrons tel résultat en 2022, mais la parole de l'État repose sur des engagements. Celui-ci a été gravé dans un marbre pluriannuel – marbre qui se révèle en fait être un calcaire des plus friables… Quels enseignements collectifs peut-on en tirer, monsieur le ministre, sachant que les entreprises nous adressent une éternelle demande de stabilité fiscale ?

Deuxième question, restée sans réponse : pourquoi avoir associé deux sujets très différents dans le même projet de loi ? Nous qui sommes dans l'opposition avons par exemple des approches différentes sur l'article 1er, que nous pouvons critiquer, et sur l'article 2, auquel nous sommes résolument opposés.

Ma troisième question est d'ordre technique : certaines entreprises du secteur de la grande distribution ont pâti de la crise des « gilets jaunes ». Vous nous avez annoncé, monsieur le ministre, que les pertes de chiffre d'affaires de certains grands groupes français – Casino et Carrefour, entre autres – atteignaient plusieurs dizaines de millions d'euros. J'en déduis qu'ils subiront une double peine : après la crise des « gilets jaunes », vous leur annoncez le report d'un an de la baisse attendue de l'IS. Avez-vous chiffré l'incidence de ce report pour ces entreprises ? La baisse initialement prévue sera-t-elle compensée l'année suivante par une baisse nettement supérieure pour que les entreprises récupèrent le montant qu'elles auraient dû conserver, ou vous contenterez-vous de reprendre la trajectoire en l'état ? Dans ce cas, les entreprises en question auront bel et bien perdu de facto une année de baisse d'impôt.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

S'agissant du financement des mesures que le Président de la République a annoncées en décembre, je répète les chiffres : les économies de dépenses s'élèvent à 1,5 milliard d'euros, l'augmentation de l'imposition des plus-values de cessions intra-groupe, dite « niche Copé », représente 200 millions d'euros, la TSN 400 millions et le report de la baisse de l'IS pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 250 millions d'euros représente 1,7 milliard, soit un total de 3,8 milliards – sachant qu'il n'y a pas de financement intégral, comme je l'ai toujours dit, des mesures annoncées par le Président de la République.

Il n'y aura pas de dérogations aux majorations, mais nous ferons preuve de toute la compréhension nécessaire.

En ce qui concerne la trajectoire, nos avis divergent, madame Louwagie : il est important de fixer une trajectoire pour respecter l'objectif final de 25 %. Je saisis cette occasion pour vous montrer le tableau qu'a dressé l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) concernant l'évolution des impôts sur les ménages et les entreprises depuis vingt ans : il est accablant. De 1999 à la crise de 2008, les prélèvements obligatoires sur les ménages et sur les entreprises ont connu une baisse parallèle et continue. À partir de 2009, les prélèvements sur les entreprises ont fortement augmenté jusqu'à l'adoption en 2014 du CICE, suite à quoi ces prélèvements sont repartis à la baisse. En revanche, l'augmentation des prélèvements obligatoires sur les ménages entre 2009 et 2017 a été tout simplement vertigineuse – et elle explique assez largement la situation actuelle. À partir de 2017, nous constatons que, pour la première fois depuis dix ans, les impôts sur les ménages commencent à baisser, et que cette tendance est accentuée par les mesures de 2019, comme en atteste cette courbe claire, simple et convaincante que je vous montre et qui est celle de l'OFCE, non des services de l'État.

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Et l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ?

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Quant aux entreprises, elles atteindront en 2019 leur plus bas niveau d'imposition depuis vingt ans. Nous pourrons toujours entrer dans les détails mais les courbes valent parfois mieux qu'un long discours et, en l'occurrence, montrent à quel point nous sommes en train d'inverser la tendance des impôts et des prélèvements obligatoires.

Quant à la modification du rythme de la trajectoire tout en conservant le cap de 25 points d'IS pour toutes les entreprises en 2022, elle relève du débat politique. Il me semble légitime de demander un effort aux entreprises qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 250 millions d'euros.

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Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir rappelé les sources de financement des mesures récemment décidées, mais ce financement de 3,8 milliards pour un montant total de 11 milliards nous laisse avec une dégradation budgétaire de quelque 7 milliards, étant précisé que certaines de ces recettes sont déductibles – c'est le cas des 400 millions liés à la TSN, qui ne rapportera en fait que 300 voire 250 millions puisqu'elle est déductible de l'IS. Autrement dit, il reste 7 à 7,5 milliards.

J'en viens au tableau que vous venez de nous montrer. La France a toujours fait payer les crises aux entreprises, contrairement à ce que l'on prétend. Cela vaut pour 1974 comme pour 2008 – et c'est l'une des causes, parmi d'autres, de notre non-compétitivité. S'agissant des ménages, en revanche, vous ne nous montrez qu'un début de commencement de faible baisse des impôts. L'analyse par décile montre qui en bénéficie : les plus aisés – c'est un homme de droite modérée qui vous le dit. Il y aurait beaucoup à dire sur ce point. Reste que nous nous trouvons incontestablement dans une situation de dérapage des finances publiques – et encore : attendons les éventuelles mesures qui seront annoncées aux alentours du 15 avril ! Suspense… À moins que vous ne puissiez nous en dire davantage, monsieur le ministre, puisque vous êtes censé tenir les cordons de la bourse avec M. Darmanin.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Non : le président a promis de lever la séance à 20 heures…

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Certes, nous ne sommes que la commission des finances…

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Je suis ravie d'entendre un ministre de l'économie et des finances accepter l'idée – à laquelle Bercy était hélas opposé jusqu'à il y a peu – d'une ligne de partage entre les prélèvements sur les ménages et les prélèvements sur les entreprises. La commission des finances l'a fait dès 2014, contre l'avis de Bercy. Je constate que l'OFCE a publié des chiffres parfaitement exacts : sur les 44 % de prélèvements obligatoires, 25 % concernent les ménages et 19 % les entreprises, pour un montant qui n'a cessé de baisser depuis lors.

Je me réjouis donc que vous ayez rappelé ces chiffres, monsieur le ministre, et j'espère que les ménages bénéficieront d'une baisse de prélèvements mais prenons garde : la baisse que l'on constate sur ce tableau est pour l'essentiel due à la suppression de l'ISF, qui bénéficie à moins de 350 000 Français !

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La taxe d'habitation, supprimée à raison d'un tiers cette année, ne se voit pas encore sur ce tableau. Quoi qu'il en soit, vous pourrez tourner la question comme vous voulez, il faut accepter la vérité des chiffres : la baisse de prélèvement est due pour l'essentiel à l'ISF. Autrement dit, elle ne bénéficie qu'à moins de 300 000 ménages.

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Je n'ai pas eu de réponse à ma question !

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C'est la vie parlementaire, monsieur Aubert : le ministre n'est pas obligé de vous répondre. Je suis certain que vous ne manquerez pas de faire observer dans l'hémicycle qu'il ne vous a pas répondu.

La commission rejette les amendements de suppression.

Elle en vient à l'examen de l'amendement CF98 de M. Michel Castellani.

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Nous proposons un amendement qui a pour objet d'instaurer un taux plancher minimum d'IS. En effet le taux d'imposition réel est fortement décroissant pour les grandes entreprises et le taux de 31 % ne correspond pas au taux qu'elles paient réellement. Il s'agit d'une mesure d'équité.

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Même si j'en comprends l'objectif, votre amendement revient à remettre en cause le bénéfice éventuel de crédits et réductions d'impôts et pourrait aussi potentiellement empêcher, partiellement ou totalement, des mécanismes tout à fait normaux tels que les reports déficitaires ou la déduction des charges financières. Cela ne paraît pas souhaitable.

Par ailleurs, si prévoir un taux normal différent selon la taille des entreprises est possible et se conçoit, votre référence au taux implicite revient à imposer, non pas un taux minimum d'IS, mais un montant minimum d'IS. Je crains que ce ne soit constitutionnellement délicat et vous renvoie à mes propos sur le fait que cela ferait obstacle à l'application de certaines règles d'assiette. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Elle est saisie, en discussion commune, des amendements CF51 de M. Fabien Roussel et CF50 de M. Jean-Paul Dufrègne.

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Avant de défendre ces deux amendements, je voudrais remercier le ministre d'avoir confirmé le transfert massif de l'impôt des entreprises vers les ménages, la légère baisse de l'imposition de ces derniers ne concernant en effet qu'une infime partie de nos concitoyens.

L'amendement CF51 ambitionne d'introduire de la progressivité au coeur de l'imposition des sociétés. Il est désormais incontestable que la trajectoire de baisse de l'IS, telle que la proposent le Gouvernement et sa majorité, profitera essentiellement aux grandes entreprises.

Pour ses défenseurs, cette baisse serait légitime compte tenu d'un taux d'IS français largement supérieur à celui de nos voisins, mais cet argument ne tient pas : dès lors que sont prises en compte les dispositions dérogatoires de type CICE et CIR, l'imposition effective des sociétés dans notre pays n'est pas plus élevée qu'ailleurs.

Quant à l'amendement CF50, il vise carrément à rétablir un taux d'IS de 33 13 % et à annuler purement et simplement la trajectoire que vous gelez aujourd'hui.

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Vous comprendrez que je ne sois pas favorable à la suppression de la trajectoire de baisse du taux normal adoptée en loi de finances pour 2018, qui irait d'ailleurs à l'encontre de la baisse jusqu'à 28 % prévue par la précédente majorité. Tout cela est en effet un peu excessif.

Je ferai en outre observer que les plus pénalisées par votre proposition seraient les PME en pleine phase de croissance, ce qui n'est sans doute pas le but que vous poursuivez.

Enfin, sur la forme, vos amendements n'empêcheront pas que le taux normal soit de 25 % à compter de 2022, faute de modifier à cet effet l'article 84 de la loi de finances pour 2018.

Je vous invite donc à les retirer.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CF81 du rapporteur général.

Elle en vient à l'amendement CF146 du président Éric Woerth.

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Mon amendement a d'abord pour objet de rappeler au ministre que la trajectoire de l'IS n'est pas un cap ou une idée générale, mais qu'elle figure dans la loi, inscrite dans le code général des impôts.

Par ailleurs, vous présentez les choses de manière assez curieuse : vous réaffirmez un engagement qui n'est en somme qu'un engagement pour l'avenir – un taux de 25 % d'IS dans trois ans –, en voulant nous faire considérer comme acquis que cet engagement sera tenu, puisque vous en avez déjà donné les preuves. Sauf que, dans l'immédiat, vous commencez par casser la trajectoire qui doit permettre d'y conduire. Tout cela me paraît un peu acrobatique.

La vérité, c'est que le Gouvernement a décidé d'augmenter l'IS, tout en affirmant vouloir l'abaisser à 25 %, ce qui, soit dit en passant, est certes un taux bas pour la France mais reste relativement élevé par rapport à bien d'autres pays ; or vous savez comme moi combien un faible taux d'IS est important pour l'attractivité d'un pays.

Quant à la répartition de l'impôt entre les ménages et les entreprises, la conclusion qui s'impose est que et les ménages et les entreprises paient trop d'impôts. Les premiers voient leur pouvoir d'achat dégradé par un matraquage fiscal qui s'est alourdi après la crise de 2008 ; les secondes ne me semblent pas être fiscalement bien loties par rapport à aux entreprises des autres pays développés.

Notre amendement vise donc à consolider la trajectoire de baisse de l'IS, dont vous laissez délibérément l'orientation ouverte, sans doute pour pouvoir y revenir dans le PLF 2020 et revoir les taux à la hausse.

Nous considérons qu'en la matière, la certitude vaut mieux que l'incertitude et que, même si les entreprises semblent prêtes à payer sans trop rechigner cette hausse destinée à financer les difficultés que vous avez rencontrées cette année, la trajectoire doit reprendre dès 2020, d'autant qu'elle n'est pas si rigoureuse que cela.

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Tel qu'il est rédigé, l'article 2 ne remet pas en cause la suite de la trajectoire, ce qui devrait vous satisfaire. Il s'agit d'une réponse purement juridique, car c'est davantage au ministre qu'il appartient de vous donner des assurances politiques. Je vous suggère, quoi qu'il en soit, de retirer cet amendement.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Je partage votre souci de baisser l'IS, monsieur le président Woerth, et c'est ce que nous faisons. Nous aurons l'occasion de discuter de la trajectoire à partir de 2020 dans le cadre de nos débats sur le PLF 2020, que j'attends avec impatience.

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Formidable ! Je tiens en tout cas à redire que cette trajectoire est inscrite dans notre droit.

Quant à mon amendement, je le retire puisqu'en droit il est satisfait ; politiquement, c'est une autre histoire…

L'amendement est retiré.

La commission adopte ensuite l'amendement rédactionnel CF82 du rapporteur général.

Puis elle adopte l'article 2 modifié.

Après l'article 2

La commission est saisie de l'amendement CF118 de M. Boris Vallaud.

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Monsieur le ministre, vous avez décidé de taxer les GAFA, ce dont personne ne saurait vous faire grief. Cependant, le sentiment qui prédomine est que nous avons laissé les multinationales se moquer des États comme jamais et que la proposition que vous faites aujourd'hui appelle un effort supplémentaire, la problématique de l'optimisation fiscale n'étant pas réservée au secteur du numérique – il est même permis de penser qu'il n'est pas un secteur qui ne se livre actuellement à cet exercice.

L'optimisation fiscale est une pratique qui finit par tout corrompre, tout saper, en instillant le soupçon, en permettant aux inégalités de se perpétuer et en affaiblissant les modèles sociaux. Ce sont ainsi des centaines de milliards d'euros qui, chaque année, manquent à nos services publics.

Afin d'y remédier, nous proposons un amendement que j'avais déjà déposé dans le cadre du PLF 2019 – ce qui m'avait valu de la part du rapporteur général un commentaire sibyllin portant sur la rédaction de ma proposition et, de la part du ministre Gérald Darmanin, une réponse très brève d'où il ressortait, en substance, que nous aurions dû régler le problème quand nous étions dans la majorité, ce que nous avions trouvé un peu court.

Notre amendement vise à changer la définition de la base imposable en France. Chaque société domiciliée à l'étranger vendant des biens ou des services en France pour un montant excédant 100 millions d'euros deviendrait sujette à l'IS en France, qu'elle y possède ou non un établissement stable, et les bénéfices imposables seraient calculés en multipliant les bénéfices mondiaux consolidés du groupe par la fraction de ses ventes mondiales faites en France. Ce dispositif donne corps à un principe simple, selon lequel les multinationales doivent payer leurs impôts là où elles réalisent leur chiffre d'affaires.

Pour aller au bout de la logique de cet amendement et lutter réellement contre l'évasion fiscale, il est prévu une clause anti-abus. L'administration fiscale se réserverait le droit d'ignorer les ventes faites à des territoires à fiscalité nulle ou faible dans le calcul de la proportion des ventes mondiales faites en France. Cette mesure permettrait d'éviter que les sociétés déclarent une fraction disproportionnée de leurs ventes à des clients hors groupe implantés dans des paradis fiscaux.

Cette réforme nécessite de renégocier les conventions fiscales internationales, et c'est pourquoi nous avons prévu que, durant une période intermédiaire permettant la conduite des négociations, en l'occurrence jusqu'à fin 2028, les bénéfices réalisés en France calculés en l'état du droit resteraient pleinement imposés en France s'ils sont supérieurs à ceux résultant de l'application des nouvelles règles proposées. Pendant cette période, les nouvelles règles proposées permettraient, en droit interne, de taxer les bénéfices supplémentaires actuellement taxables à l'étranger au fur et à mesure de la renégociation des conventions fiscales concernées. Il s'agit par cette mesure transitoire d'éviter la double non-imposition le temps que les autres pays et les conventions fiscales s'adaptent.

Pour répondre à une objection que vous avez eu la gentillesse de me faire parvenir par l'intermédiaire de votre cabinet, monsieur le ministre, je précise que la réforme ici proposée ne s'appliquerait qu'en France, et qu'il faudrait effectivement que d'autres pays se posent la question de la réforme de l'assiette. Pour ce qui est de la clef de répartition du chiffre d'affaires, la réforme ici proposée ne s'appliquant qu'en France, il a été fait le choix de ne pas retenir l'hypothèse d'y inclure la masse salariale et le capital, pour éviter le risque d'une incitation à la délocalisation des multinationales vers des pays à fiscalité faible.

Pour conclure, je voudrais revenir sur certains de vos propos, monsieur le ministre. Il y a quelques mois, alors que vous étiez en train de négocier la taxation des GAFA au niveau européen, vous aviez indiqué qu'il était compliqué de taxer en France seulement. Aujourd'hui, vous vous décidez finalement à le faire, suivant en cela l'exemple d'autres États, et c'est heureux.

Il y a quelques semaines, vous déclariez dans l'hémicycle qu'il fallait que les multinationales paient leurs impôts là où elles faisaient leur chiffre d'affaires.

Il y a quelques jours, j'ai lu sous la plume de grands penseurs – de la « Macronie », s'entend, à savoir Ismaël Emelien et David Amiel – un hommage au travail de l'économiste Gabriel Zucman, en l'occurrence à une proposition à l'élaboration de laquelle j'ai moi-même pris part, aux côtés de certains hauts fonctionnaires de la direction de la législation fiscale. Cela me conduit à espérer que ma proposition finira par emporter votre adhésion, peut-être même dès aujourd'hui si mon amendement venait à être adopté.

À défaut, je crains que la taxation des GAFA ne soit considérée comme une sorte de solde de tout compte qui ne résoudrait en rien la crise de confiance dans notre modèle social et dans notre capacité politique à affronter les excès de la puissance privée.

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Comme vous l'avez indiqué vous-même, monsieur Vallaud, nous avons déjà rejeté cet amendement dans le cadre du PLF 2019. Je ne sais plus en quoi mon commentaire de l'époque pouvait être sibyllin – si je l'ai prononcé à quatre heures du matin, après m'être déjà exprimé sur plusieurs centaines d'amendements, on peut penser que j'étais tout simplement fatigué…

J'ai cependant le souvenir de vous avoir fait quelques remarques, dont vous n'avez apparemment pas tenu compte puisque vous nous présentez aujourd'hui exactement le même dispositif, ce qui a pour conséquence de me donner aujourd'hui le mauvais rôle en vous disant à nouveau non, car ce que vous proposez sera sans effet.

Sur le fond, je répète que votre amendement sera neutralisé par les conventions fiscales : la France en ayant signé plus de cent vingt, il faudrait entre vingt et trente ans pour les renégocier.

Rien n'est dit non plus sur les questions de double imposition – le fait que les entreprises paieront deux fois leur impôt. Je sais que vous êtes conscients de ces problèmes, puisque vous y faites référence. Néanmoins, votre dispositif ne les règle pas.

J'espère que vous ne me trouverez pas sibyllin si je vous dis que, pour toutes ces raisons, je suis toujours défavorable à votre proposition.

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Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances

Je partage totalement l'objectif qui sous-tend la proposition de Boris Vallaud consistant à renforcer la lutte contre la fraude et l'optimisation fiscale.

Pour ce qui est de la taxation du numérique, il ne s'agit évidemment pas pour ce projet de loi de constituer un solde de tout compte, mais au contraire un point de départ. Comme je l'ai déjà dit à de multiples reprises, ce texte n'est que l'un des éléments de la refondation nécessaire de la fiscalité internationale du XXIe siècle.

Les dispositifs que vous proposez, monsieur Vallaud, ne me posent pas de difficulté sur le fond, puisqu'ils sont assez proches de ceux sur lesquels nous travaillons. Si je vous rejoins, donc, sur plusieurs propositions ainsi que sur la nature même des mécanismes que vous proposez, je souhaite toutefois que ces mécanismes très puissants en termes de redistribution et de fiscalité soient adoptés dans un cadre multilatéral : au niveau européen et à celui de l'OCDE.

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On entend souvent l'argument selon lequel il faudrait d'abord faire quelque chose tous ensemble avant de le faire pour soi-même. C'est d'ailleurs le prétexte ayant conduit plusieurs acteurs, notamment les entreprises concernées, à s'opposer à la loi de 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre – dont tout le monde se félicite aujourd'hui, et qui inspire de nombreux projets de conventions internationales.

Cet argument ne me convainc pas et, comme vous, monsieur le ministre, je suis désireux de voir l'Europe se saisir de ces sujets. Cela dit, dès lors qu'elle ne le fait pas, on ne saurait reprocher à certains États de vouloir avancer de leur côté car, à défaut, le libéralisme économique dans tous ses excès – dont la question de l'imposition des services numériques nous donne un exemple patent – risque d'emporter avec lui le libéralisme politique : certains prétendront agir à la place des démocraties, afin de reprendre la main sur une mondialisation devenue déloyale.

La France a donc l'obligation de travailler sérieusement sur ces sujets, et vous en donnez l'exemple en nous soumettant ce projet de loi relatif aux GAFA. Cependant, estimant que votre texte ne va pas assez loin, nous vous faisons des propositions alternatives, que vous pourriez reprendre – en les modifiant si vous l'estimez nécessaire. Ainsi, quand nous proposons un dispositif entrant en vigueur au 1er janvier 2020, vous pourriez le sous-amender pour repousser l'entrée en application au 1er janvier 2021, voire 2022, afin de laisser à vos services le temps d'y travailler.

Monsieur le rapporteur général, si je n'ai pas tenu compte de vos observations, c'est que je ne les partage pas. J'ai évoqué la présente proposition avec certains hauts fonctionnaires ayant en la matière une compétence bien supérieure à la mienne, qui considèrent tous qu'elle n'est pas dénuée d'intérêt – je le dis très modestement, étant bien conscient des limites d'un petit groupe d'opposition comme le nôtre. En d'autres termes, si nous formulons cette proposition, ce n'est pas forcément pour que vous l'acceptiez sans réserve, mais pour que vous vous saisissiez de la question que nous soulevons, et que vous fassiez en sorte qu'on ne laisse plus les multinationales se moquer des États. Je remercie M. le ministre pour sa réponse, mais j'estime que la problématique qui est ici évoquée mérite davantage de travail – même si cela doit prendre du temps –, un travail auquel nous sommes disposés à prendre notre part.

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Pour la énième fois, le sujet est sur la table… Il est dommage que notre collègue ne soit pas venu à l'audition de M. Saint-Amans. Ce dernier nous a expliqué que tout ce qu'on dit sur les États-Unis – et que vous reprenez dans votre exposé des motifs – est faux depuis 2017, suite à la réforme fiscale américaine.

Les résultats de cette réforme sont paradoxalement à l'opposé de ce que l'on imagine. Cette réforme fixe un taux d'imposition mondial minimal d'environ 13 % ; si le groupe concerné a des bénéfices en Irlande, il va donc payer le différentiel aux États-Unis !

En conséquence, tout ce qui a été dit sur les GAFA est faux : entre 2016 et 2018, ils ont payé entre 17 % et 27 % d'impôts, soit une moyenne d'environ 22 %. Mais ils les ont payés aux États-Unis, en privant l'Europe, et d'autres pays, de base taxable.

Nous devons mettre en place ces deux grands axes – taux minimum et définition de la localisation des impôts. Les États-Unis l'ont décidé unilatéralement – n'est-ce pas, monsieur le ministre ? – mais dans le respect des conventions bilatérales, qu'elles soient franco ou germano-américaines. Pourquoi ne nous engagerions-nous pas dans cette voie ? Sinon les États-Unis vont nous imposer leur politique fiscale !

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Nous avons déjà eu ce débat lors de la discussion du projet de loi de finances. Tout a été dit. Le ministre et le rapporteur général se sont exprimés. Cela fait sept heures que nous siégeons. Le débat aura aussi eu lieu dans l'hémicycle, monsieur Vallaud.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CF120, CF121 et CF122 de Mme Valérie Rabault.

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Vous allez me dire que ces trois amendements ont déjà été déposés. C'est exact : ils l'ont été chaque année sous la précédente législature. Certes, nous aurions pu les adopter, mais il est encore temps.

Nous devons envoyer un signal fort aux PME. Ces amendements concernent le taux réduit à 15 % d'IS, qui repose sur une vieille définition. Il s'applique aux PME qui réalisent moins de 7,63 millions d'euros de chiffre d'affaires – c'est l'héritage des 50 millions de francs qui existaient auparavant. Il me semblerait opportun de basculer vers la définition européenne d'une PME.

L'amendement CF120 propose que le taux réduit s'applique aux entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur ou égal à 50 millions d'euros, mais aussi que la franchise de résultat net passe de 38 120 euros à 100 000 euros. Une telle modification coûterait 1 milliard d'euros.

L'amendement CF121 est de repli, ; il vise à ce que le taux réduit s'applique aux entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur ou égal à 50 millions d'euros. Il coûterait 200 millions d'euros.

L'amendement CF122 est une incitation fiscale plus massive pour les PME, la franchise de résultat net passant de 38 120 euros à 100 000 euros. Il coûterait 800 millions d'euros.

On ne peut pas dire que ce sont les PME qui créent de l'emploi, qui irriguent les territoires, qui dynamisent la vie économique sur le territoire, et ne jamais leur donner de signal fiscal propre. Vous allez me répondre « CICE », mais il s'applique à toutes les entreprises.

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Nous avons déjà discuté et rejeté ces amendements plusieurs fois. Que s'est-il passé depuis ? Je le souligne dans le rapport de 2018 sur l'application des mesures fiscales : la nouvelle trajectoire de baisse du taux d'IS est plus favorable aux PME – même sans toucher au taux réduit – que la précédente trajectoire inscrite dans la loi de finances initiale (LFI) pour 2017.

Vous faites référence à la mesure votée en LFI 2017, mais le taux cible était alors de 28 %, et nous l'avons ramené à 25 %. Or il est systématiquement plus intéressant d'être imposé à 25 % sur la totalité du bénéfice qu'à 15 %, puis 28 %, dès lors que le bénéfice global est de 165 000 euros ou plus, ce qui correspond en moyenne à un chiffre d'affaires d'environ 3 millions, très inférieur au plafond en vigueur de 7,63 millions.

Pour un taux à 25 %, le gain par entreprise est de moins de 4 000 euros. Pour une PME dont le chiffre d'affaires est de 40 millions, le bénéfice de 3 millions et l'IS de 750 000 euros, je doute que cela fasse une grosse différence, surtout au regard du coût important de ces mesures – notre calcul est encore plus défavorable que le vôtre…

Enfin, en 2016, le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) concluait à l'absence de certitude sur l'efficacité d'un différentiel de taux selon la taille des entreprises.

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Monsieur le rapporteur général, je sais que vous comprenez parfaitement mon amendement : c'est « fromage et dessert » pour les PME. Le fromage, ce sont les 25 % que vous mentionnez, qui s'appliquent sur le bénéfice au-dessus de 38 120 euros, et le dessert, c'est d'appliquer le taux réduit de 15 % – bien plus favorable que 25 % – jusqu'à 100 000 euros.

En outre, vous évoquez le rapport du CPO. Mais d'autres rapports – notamment de l'OCDE – démontrent le contraire et soulignent l'intérêt d'un taux différencié. Les Américains le font, et proposent même une franchise d'impôt sur les premiers 100 000 dollars !

Je maintiens donc les amendements et maintiens également qu'il serait grand temps de donner des gages aux PME.

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Le barème de l'IS américain a été remplacé par un taux unique, madame Rabault.

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Le sujet est d'importance. Il a été soulevé à de nombreuses reprises et je n'ai jamais compris pourquoi nous n'avons pas baissé le taux réduit ou remonté son seuil d'application dans le cadre de la stratégie de baisse des taux pour les moyennes et grandes entreprises. Nous ne réglerons pas la question aujourd'hui, mais il serait intéressant que le ministre nous dise s'il est ouvert à un geste pour les PME dans le cadre du prochain projet de loi de finances.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l'ensemble du projet de loi modifié.

Membres présents ou excusés

Réunion du mercredi 3 avril à 16 heures 15

Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Julien Aubert, M. Fabrice Brun, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Philippe Chassaing, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, Mme Dominique David, M. Benjamin Dirx, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Frédérique Dumas, Mme Stella Dupont, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, Mme Nadia Hai, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, Mme Patricia Lemoine, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, M. Jean-Paul Mattei, Mme Cendra Motin, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Valérie Rabault, M. Xavier Roseren, M. Fabien Roussel, M. Laurent Saint-Martin, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth

Excusés. - M. Jean-Louis Bourlanges, M. M'jid El Guerrab, M. Marc Le Fur, M. Olivier Serva, M. Philippe Vigier

Assistaient également à la réunion. - M. Éric Bothorel, M. Denis Masséglia, M. Benoit Potterie, M. Boris Vallaud

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